La langue française

Accueil > Dictionnaire > Définitions du mot « mal »

Mal

Définitions de « mal »

Trésor de la Langue Française informatisé

MAL2, adv.

I. − Mal + verbe ou part. passé
A. −
1. D'une manière fâcheuse, contraire à l'intérêt ou aux désirs de quelqu'un. Tout va mal; ça va mal (fam.); aller au plus mal, de plus en plus mal. Il était une fois un pauvre chemisier dont les chemises allaient bien, mais les affaires mal (Larbaud,Barnabooth,1913, p. 11):
1. Tout allait mal pour les Anglais en ce moment. Le prince de Galles était à Londres, bien près de mourir; le valeureux Jean Chandos avait été tué l'année d'avant auprès de Poitiers; Jean de Grailly, captal de Buch, était prisonnier... Barante,Hist. ducs Bourg.,t. 1, 1821-24, p. 141.
Vieilli. Aller à mal. Gérard (...) se retira le coeur navré, avec la ferme croyance que tout iroit à mal aux droits réunis (Balzac,Annette,t. 1, 1824, p. 30).
Mal finir. Finir d'une manière désastreuse. [En parlant de qqn] Pauvre Justin! j'avais toujours pensé que ce garçon-là finirait mal (Labiche,Affaire rue Lourcine,1857, xviii, 1, p. 478).[En parlant de qqc.] Ah! vraiment c'est triste, ah! vraiment ça finit trop mal, non vraiment cela finit trop mal, vraiment c'est triste (Verlaine,Jadis,1884, p. 203).
Mal marcher (fam.). Rencontrer des difficultés. Journée de travail. Ça n'a pas trop mal marché; j'ai écrit six pages, avec un certain entrain (Sartre,Nausée, 1938, p. 80).
Être mal parti (fam.). Être sur une mauvaise route. (Il les regarde.) Mes enfants, vous êtes mal partis. (À Hugo.). Toi, tu fais l'insolent parce que tu es le plus faible. (À Slick et à Georges.) Vous, vous avez vos gueules des mauvais jours (Sartre,Mains sales,3etabl., 3, p. 94).
S'y prendre mal. Agir maladroitement, se tromper. Il me semble qu'on s'y est mal pris, et qu'on a choisi une route opposée à celle qu'il falloit suivre (Lamarck,Philos. zool.,t. 1, 1809, p. 4).
Mal lui en prit. Les conséquences furent fâcheuses pour lui. Les calomniateurs n'étaient pas d'accord sur la somme. Mal leur en a pris, en vérité, de chercher querelle à M. Barthélemy (Musset dsR. des Deux Mondes,1833, p. 108).
Mal tomber*.
Mal tourner*.
Se trouver mal de qqc. Être indisposé par quelque chose. Les princes d'Allemagne se trouveront mal de l'alliance du roi de Prusse et de l'empereur (Staël,Lettres,1791, p. 492).Fam. Ça se trouve mal. Ça tombe de façon inopportune. − C'est une invitation à dîner, fit la jeune femme. Hein! comme ça se trouve? − Ça se trouve mal, dit le jeune homme (Murger,Scènes vie bohème,1851, p. 232).
Loc. De mal en pis. De plus en plus mal. Sa santé, ses affaires vont de mal en pis. Le commerce des estampes allait de mal en pis, disait Blaise, qui depuis quelque temps ne voulait plus rien acheter (A. France,Dieux ont soif,1912, p. 16).
2.
a) En partic.
Être bien mal, fort mal, très mal; être mal en point; être, se sentir mal fichu (fam.), mal foutu (vulg.). Être très malade. Depuis quinze jours il est très-mal, a-t-il répondu; et, dans ce moment, le délire est revenu comme tous les soirs (Krüdener,Valérie,1803, p. 234).
Être au plus mal. Être à la dernière extrémité. Le facteur (...) avertit la servante que François Baillard venait de passer une nuit très mauvaise et qu'il était au plus mal (Barrès,Colline insp.,1913, p. 273).
Se trouver mal. Défaillir, avoir un malaise. Au surplus fatigué par un catarrhe infect, et le coeur flanchard... depuis que (c'était avant-hier) j'ai couru après l'omnibus qui devait me mener chez les M. du Gard; couru comme un gosse, que je ne suis plus; ce dont j'ai bien dû me convaincre sitôt ensuite: sur la plate-forme atteinte péniblement et de justesse, j'ai cru que j'allais me trouver mal (Gide,Journal,1946, p. 301).
b) D'une manière inconfortable. Être mal dans un fauteuil, dans un lit. Quand on prétend nous traiter avec magnificence et nous persuader que nous sommes très bien, on nous amène à nous récrier sur ce que nous sommes très mal et sur ce que nous manquons de tout (Las Cases,Mémor. Ste-Hélène,t. 1, 1823, p. 366).On grelotte, on est mal; on change de place sur place, comme un bétail parqué (Barbusse,Feu,1916, p. 32).Au fig. Me voilà comme à ces dix-neuf ans sur lesquels je me lamente avec sottise, car j'y étais toujours mal dans mon âme et mal dans ma peau (Cocteau,Maalesh,1949, p. 136).
B. − D'une manière défavorable, désobligeante, blessante. Recevoir, traiter mal qqn; être mal vu de qqn. Il ne savait «sur quel pied danser», se voyant tantôt bien, tantôt mal accueilli (Duranty,Malh. H. Gérard,1860, p. 262).
Mal parler de qqn (cf. dire du mal de qqn, s.v. mal3). Parler mal de qqn. Médire, calomnier. Telles étaient les lois sévères de la galanterie, que tout chevalier convaincu d'avoir mal parlé des dames était exclu des assemblées et des tournois (Jouy,Hermite,t. 3, 1813, p. 4).
Être mal avec qqn. Être en mauvais termes. Être mal avec sa famille. − Vous êtes mal avec cet Anglais? − J'aime Zaccone et lui le déteste; nous sommes en froid à cause de cela (Dumas père, Monte-Cristo,t. 2, 1846, p. 136).Être au plus mal avec qqn. Être brouillé avec lui. Jules: Il n'y a qu'un mois que tu étais au mieux avec elle. Alfred: Il y a une heure que j'y suis au plus mal (Dumas pèreAngèle,1834, i, 4, p. 111).
Se mettre mal avec qqn. Se brouiller avec lui. Ce n'est pas le moment de se mettre mal avec eux, continuait MmeLoiseau, on était vaincu, on n'avait qu'à se tenir tranquille (Triolet,Prem. accroc,1945, p. 219).
Être mal pour qqn (vieilli). Être désagréable, méchant. Je sais que son mari est très mal pour elle, − c'est un animal qui la rend malheureuse (Mérimée,Double mépr.,1833, p. 23).
Être mal en cour (vieilli ou p. plaisant.). Être en défaveur. Il a contremandé un ballet dans lequel il devait danser à Saint-Germain. Ceci pourrait bien mettre notre poète assez mal en cour (Jouy,Hermite,t. 2, 1812, p. 9).
Prendre mal qqc. Interpréter quelque chose de façon blessante pour soi-même. Prendre mal un conseil, une plaisanterie, un propos, une remarque; le prendre mal.
C. − Autrement qu'il convient.
1. De façon imparfaite, défectueuse, insatisfaisante. L'habillement des femmes est un manteau de peau de cerf mal tannée (Voy. La Pérouse,t. 2, 1797, p. 271).Un tailleur qui vous explique pourquoi un vêtement qui vous va très mal vous va très bien (Renard,Journal,1906, p. 1045).Je vis que le ménage était mal fait. Je touchai, par caprice, un des balustres: le doigt laissa une marque dans la poussière (G. Bataille,Exp. int.,1943, p. 69).
SYNT. Travail mal fait; maison mal construite; place mal pavée; route mal empierrée; paroles mal comprises, mal rapportées; mal comprendre des propos, un texte; mal connaître qqn; raisonner mal; dormir mal; jouer mal la comédie, du violon; parler mal français; mal dire, mal exprimer qqc.
Locutions
Tant bien que mal ou, vieilli, que bien* que mal. Ni bien ni mal. Vous autres, vous chanterez le refrain avec moi, tant bien que mal, comme vous pourrez (Guilbert de Pixér.,Coelina,1801, ii, 4, p. 31).Plutôt mal que bien. L'acrobate arrive à continuer son impossible vie et, vaille que vaille, à en atteindre le bout qui est la mort. Tant bien que mal (plutôt mal que bien), le vivant finit par accomplir son destin (Jankél.,Le Mal,Grenoble-Paris, Arthaud, 1943, p. 17).
Cote* mal taillée.
2. D'une façon anormale, éloignée du modèle, de la norme. Arbre mal venu; être mal balancé(e), mal bâti(e) (fam.), mal fichu(e) (fam.), mal foutu(e) (vulg.). Si décharné et voûté qu'il fût, il ne me paraissait point trop mal fait de sa personne (Milosz,Amour. initiation,1910, p. 13).La petite prend ses dix-sept ans, elle n'est pas mal tournée, tant s'en faut! (Pourrat,Gaspard,1925, p. 13).
3. D'une façon qui choque les convenances ou le goût. Être mal fagoté(e), mal habillé(e), mal mis(e), mal tenu(e), mal élevé, mal poli ; répondre mal ; se tenir mal. − Rien ne vous va plus mal que de trop crêper vos cheveux, reprit Justine. Les grosses boucles bien lisses vous sont plus avantageuses. − Vraiment? − Mais oui, madame, les cheveux crêpés clair ne vont bien qu'aux blondes (Balzac,Peau chagr.,1831, p. 161).J'étais mal vêtu, mal coiffé, mal rasé; je n'avais aucun souci de plaire (Gide,Journal,1905, p. 164).
Fam. Marquer mal. Faire mauvaise impression par sa tenue. Un homme (...) de vingt à vingt cinq ans (...) chapeau melon, cravate claire, veston court, marquant mal (Gyp,Gde vie,1891, p. 98).Emploi subst., rare. Un marque-mal. Dès que j'étais pour une heure à mon hôtel du Corso Vittorio-Emanuele, quelque marque-mal se disant proche parent de la mamma venait me demander un secours (Larbaud,Barnabooth,1913, p.211).
Vulg. Ça la fout mal (v. foutre1), la fiche mal. Cela fait mauvais effet.
D. − D'une manière contraire à la loi morale, à la vertu, au bien. Agir, se comporter mal; distinguer entre ce qui est bien et ce qui est mal; mal famé, mal fréquenté. Tout homme qui jouit d'une prospérité mal acquise a fait un pacte avec l'Esprit de Ténèbres, et légué son ame aux enfers (Chateaubr.,Génie,t. 2, 1803, p. 169):
2. C'est un fait incontestable que, quand nous avons bien ou mal fait, quand nous avons accompli la loi du juste et de l'injuste ou que nous l'avons enfreinte, nous jugeons que nous méritons une récompense ou une punition... Cousin,Hist. philos. XVIIIes.,t. 2, 1829, p. 261.
Mal se conduire avec qqn. Se conduire d'une façon malhonnête ou incorrecte. Le plus important dans les visites immédiates c'est d'aller chez Herr − avec qui je me suis si mal conduit (Du Bos,Journal,1923, p. 379).
Il sied mal de + inf. Ce n'est pas bien de. Ah! prince, qu'il vous sied mal de nous tromper ainsi! (Musset,Fantasio,1834, ii, 7, p. 232).
E. − [Avec le sens d'une négation affaiblie] Une fausse démarche, une parole gauche prononcée mal à propos, pouvaient détruire à jamais tout le prestige (Las Cases,Mémor. Ste-Hélène,t. 2, 1823, p. 12).La salle du théâtre des Carmes était rectangle et mal commode (Duhamel,Suzanne,1941, p. 26).
Être mal à l'aise. Entre ces murs épais je suis mal à mon aise; Cet air, qui vous suffit, à ma poitrine pèse (Dumas père, Charles VII,1831, i, 4, p. 243).
II. − Loc. adv. Pas mal
A. − [En alliance avec ne, avec le sens d'un adv. de qualité] Pas mal du tout. Assez bien, bien. − Qu'en dis-tu? ajouta-t-il quand elles furent passées. L'as-tu bien vue? − Oui... − Eh bien? − Elle n'est pas mal (Flaub.,1reÉduc. sent.,1845, p. 106).Il n'est pas mal. Il est même bien. C'est un 25 paysage. Cela vaut vingt-cinq mille francs (Duhamel,Passion J. Pasquier,1945, p. 77).
[Avec ell. du verbe et donc de ne] Brotonneau: Et votre femme va bien? Lardier: Pas mal (Flers, Caillavet,M. Brotonneau,1923, iii, 4, p. 20).
B. − [En dehors de ne, avec le sens d'un adv. de quantité compris entre assez et beaucoup] Se ficher, se moquer pas mal de qqn. Nous étions pas mal en Europe à vouloir cogner (Giraudoux,Siegfried et Lim.,1922, p. 24).
Pas mal de + qqc. Beaucoup de. Avoir pas mal d'argent à la banque. Elle a lu d'excellents livres, elle a dû entendre pas mal de sermons, et il se pourrait que sa mémoire fût tout son génie (Bremond,Hist. sent. relig.,t. 3, 1921, p. 572).
Rem. Emploi considéré comme fam., quoique très répandu. Littré enregistre uniquement, en le déclarant également ,,fam.``, l'emploi quantitatif en alliance avec ne: Il n'y avait pas mal de curieux à ce spectacle. Cf. Il n'est pas mal effronté (DG).
Rem. gén. 1. [Précède, pour en inverser le sens ou pour ajouter une idée négative, un assez grand nombre d'adj. ou de part. employés adj.: maladroit, malaisé, malappris, malgracieux, malhabile, malintentionné, malpropre, malvenu, etc. En a. fr. mal adv. pouvait s'utiliser avec un adj. (infra étymol. 2 a); auj. non productif. Sur la forme mau- devant consonne, plus arch., v. maudit, maussade, mauvais] Malcomplaisant, -ante, adj. Non complaisant (néol. ds DG). Mal croyant, -ante, adj. Qui est hors de la foi reconnue par l'Église, une Église. On craignit que vraiment Jeanne, comme tant de savants docteurs le soutenaient, ne fût hérétique, mal croyante, séduite par le prince des ténèbres (France, J. d'Arc, t. 1, 1908, p. LVI). Mal né, -ée, adj. Qui n'est pas de famille noble. Monsieur de Restaud a une mère qui mangerait des millions, une femme mal née, une demoiselle Goriot (Balzac, Gobseck, 1830, p. 380). Mal pensant, -ante, adj. Dont la pensée n'est pas conforme à l'idéologie religieuse, politique ou sociale en cours. À qui la faute si cet argent tombe dans les mains de gens mal pensants, c'est-à-dire dans les mains de ton neveu, un impie qui, en 1815, a fait partie de ce régiment de brigands appelés corps franc levé contre les Prussiens? (Stendhal, Lamiel, 1842, p. 38). Mal portant, -ante, adj. Qui n'a pas une bonne santé. Femme mal portante. Elle a été indisposée et nous mal portants, ces derniers jours. Nous allons mieux les uns et les autres (Tocqueville, Corresp. [avec Reeve], 1851, p. 118). Mal rasé, -ée, adj. Qui ne prend pas soin de se raser, ou qui le fait mal. J'achève de vivre, en robe de chambre, (...) près d'une table couverte de potions, mal rasé, malodorant (Mauriac, Noeuds vip., 1932, p. 21). 2. [En partic. précède un part. passé ou prés. employé subst.: malentendant] Mal-aimé, -ée, subst. ,,Personne ou groupe qui est ou se sent impopulaire ou tenu à l'écart: Ce mal-aimé du cinéma...`` (Gilb. 1971). Et je demeure persuadé que la province recèle, encore maintenant, dans le secret de ses maisons, plus de «mal-aimés» que nous n'en imaginerons jamais (Mauriac, Nouv. Bloc-notes, 1961, p. 210). Mal(-)blanchi, subst. masc. Nègre. Sur des tambours de bois, (...) des mal-blanchis, à cheval, battirent aussitôt le rappel (Morand, Magie noire, 1930, p. 59). Mal-disant, -ante, subst. Personne qui dit ou aime à dire du mal des autres. C'est un mal disant, voyez-vous, mais sans plus de méchanceté qu'un enfant (Bernanos, Soleil Satan, 1926, p. 279). Mal embouché, -ée, subst., fam. Personne qui parle grossièrement. En voilà un mal embouché!... A-t-on jamais vu! (Feydeau, Dame Maxim's, 1914, I, 21, p. 24). Mal-fondé (p. oppos. à bien-fondé), subst. masc. Ce qui est mal établi. On discutait du bien ou mal-fondé des croyances (G. Bataille, Exp. int., 1943, p. 40). Mal-foutu, -ue, subst. Personne qui est en mauvaise forme physique. Nous avons établi entre le corps médical, que la guerre pouvait être faite avec des mal foutus (Bernanos, Enf. humil., 1948, p. 24). Mal-logé, -ée, subst. Personne dont le logement est de dimension ou de confort insuffisants. Les représentants des locataires réclamaient une politique du logement répondant aux besoins des mal-logés (Le Monde, 10 juill. 1965 ds Gilb. Mots contemp. 1980). Mal-marié, -ée, subst. Personne qui a fait un mauvais mariage. Au XIIes., toutes les hautes dames se considèrent comme des «mal-mariées» (R. Nelli, L'Amour en question ds Planète, no30, sept.-oct. 1966, p. 107). Mal-né, -ée, subst., rare. Personne qui est de mauvaise constitution. Ce sentiment, quel est donc celui, sinon un infirme, un mal-né, qui ne le retrouve dans son âme? (Barrès, Cahiers, t.8, 1910, p.185). Mal-peigné, -ée, subst. ,,Homme malpropre et mal vêtu`` (Ac.). Je m'en allai au clos Saint-Laze, avec quelques mal-peignés de mon âge (Arène, Contes Paris, 1887, p.209). Mal-pensant, -ante (p. oppos. à bien-pensant A 1), subst. Par les temps où nous vivons on ne peut savoir, ajouta-t-il en jetant un regard circulaire et circonspect comme pour voir s'il ne se trouvait aucun «mal pensant» dans le salon (Proust, Guermantes 1, 1920, p.215). Mal-voyant, -ante, subst. Personne qui voit mal. L'association des donneurs de voix offre aux aveugles et aux mal-voyants la possibilité d'écouter gratuitement les livres de leur choix (La Vie du rail, 31 mars 1974 ds Gilb. Mots contemp. 1980). 3. [Dans des subst. dérivés d'adj. et de part.: malchance, maldonne, malfaisance, malhonnêteté, malpropreté, malformation]. 4. [Devant un inf., le groupe mal + inf. étant employé subst.] Mal(-)être (p. oppos. à bien-être), subst. Sensation de malaise. Ces dispositions vagues de bien être ou de mal être, que chacun éprouve journellement (Cabanis, Rapp. phys. et mor., t.1, 1808, p.95). Au fig. 24% des femmes avouent encore qu'elles auraient préféré être un homme (...) ce qui en dit long sur leur mal-être dans la société (L'Express, 18 déc. 1967 ds Gilb. Mots contemp. 1980). Mal-vivre, subst. Pays du mal-vivre. Pays où l'on vit mal. Pays du mal-vivre, du mal-loger, du mal-manger, du mal-s'asseoir et du mal-dormir (Morand, Londres, 1933, p.110).
Prononc. et Orth.: [mal]. Homon. malle. Att. ds Ac. dep. 1694. Les mots constr. sont gén. soudés: maladroit, malaisé, malcommode, malhabile, malchance, malentendu, malfaçon, malheur, malnutrition, malmener, etc. Certains sont séparés (il y a ou non trait d'union): mal pensant, mal disant, mal(-)blanchi, mal-aimé, mal-logé (où la présence des 2 l empêche peut-être la soudure) mal-marié, etc. (supra rem. gén.). Étymol. et Hist. 1. Ca 1100 «d'une manière fâcheuse ou défavorable» (Roland, éd. J. Bédier, 216: Ne ben ne mal ne respunt); ca 1155 malvenue (Wace, St Nicolas, éd. E. Ronsjö, 1270); fin xiies. aller de mal en pis (Raoul de Cambrai, éd. P. Meyer et A. Longnon, 7951); 1536 mal en point (Roger de Collerye, Oeuvres, éd. Ch. D'Héricault, 151); 2. a) ca 1155 devant un adj., équivaut à une négation totale (Wace, op. cit., 520); ca 1200 id. devant un verbe (Aiol, éd. J. Normand et G. Raynaud, 1979); b) 1273 avec valeur de négation affaiblie (Adenet Le Roi, Berte, éd. A. Henry, 730); 3. ca 1245 «de façon incomplète, imparfaite» mal ... empli (Ph. Mousket, Chron., éd. de Reiffenberg, 19950); av. 1654 personne ... mal faite (Balz., I, 340 ds Littré); 4. 1361 «d'une manière contraire à la morale» faire mal (Oresme, Ethiques, éd. A. D. Menut, X, chap. I, p. 496, note 3); 5. pas mal loc. adv. a) 1661 «en assez grande quantité» (Molière, École des maris, II, 8); b) 1764 «assez bien» (Voltaire, Dict. philos. Dieu ds Œuvres complètes, éd. L. Moland, t. 18, p. 381). Du lat. male «mal, autrement qu'il ne faut; de façon fâcheuse» lui-même de malus, v. mal1. Fréq. abs. littér.: 18 111. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 22370, b) 24125; xxes.: a) 26596, b) 29006. Bbg. Bastin (J.). Adv. de manière. In: Nouv. glanures gramm. Riga, 1907, p. 29. _ Darm. 1877, p. 140. _ Goosse 1975, p. 25. _ Lew. 1968, p. 147.

MAL3, MAUX, subst. masc.

I. − Tout ce qui fait souffrir, physiquement ou moralement.
A. − Souffrance qui affecte le corps.
1. [De manière temporaire] Douleur passagère. Mal, maux de gorge, de tête; maux d'estomac, de reins; avoir mal aux pieds, à la poitrine, au ventre. «Eh bien! c'est donc le mal de dents, m'a-t-il dit.» En effet, il avait une violente fluxion; sa joue droite était enflée et fort rouge (Las Cases,Mémor. Ste-Hélène, t. 2, 1823, p. 223).
Mal blanc. Infection localisée de la pulpe des doigts. Synon. panaris. (Ds Duranteau 1971).
Mal perforant. Lésion ulcéreuse. Maux perforants plantaires. Le mal perforant est une ulcération arrondie ou ovalaire présentant des bords saillants et taillés à pic avec un fond atone (Quillet Méd.1965, p. 354).
Avoir mal au coeur. Nausée d'origine gastrique, sans rapport avec le coeur. Oh! dit-elle, j'ai un peu mal au coeur... (...) et puis j'ai la tête qui me tourne (Ramuz,Derborence, 1934, p. 61).Au fig. Tu dégoûtes ma famille, maman surtout, et dès qu'elle pense à toi, elle a mal au coeur (Renard,Poil Carotte, 1894, p. 203).
Avoir mal aux cheveux (au fig., fam.). Avoir la tête lourde un lendemain de fête (d'apr. Carabelli, [Lang. fam.], s.d.).
Être dans les mals (vx). ,,Être dans les douleurs de l'enfantement`` (Carabelli, [Lang. pop.], s.d.).
Prendre mal, du mal. Tomber malade. Comment donc avait-elle pris mal? Ne la laissez pas courir à volonté, quelque temps qu'il fasse (E. de Guérin, Lettres, 1840, p. 347).Tu es mouillé, trempé. De quoi prendre du mal. Viens, j'ai du lait chaud sur le feu, avec une goutte de café (Duhamel,Terre promise, 1934, p. 66).
Faire mal à qqnFam. et pop. Cela/ça me fait mal au coeur, au ventre, au(x) sein(s). Cela me degoûte, me donne envie de vomir. On rit. L'homme noir s'en offusqua. Il se leva. − Vous m'faites mal au ventre, articula-t-il avec mépris (Barbusse,Feu, 1916, p. 15).[Au cond. et sans compl.] Ça me ferait mal! Il n'en est pas question. [À la forme pronom.] Tous les élèves l'applaudissent à se faire mal aux mains (Larbaud,F. Marquez, 1911, p. 47).
Gêner, incommoder. Elle se fardait, mettait son corsage neuf et ses beaux souliers qui lui faisaient mal (Dabit,Hôtel Nord, 1929, p. 138).
Expressions
Être dur au mal. Être capable de supporter la souffrance, la fatigue, l'inconfort. Il est dur au mal, insoucieux du confortable (...), enchanté d'être au milieu de soldats de seconde classe et non d'officiers (Montherl.,Songe, 1922, p. 40).
(Femme) en mal d'enfant (vx). En train d'accoucher. En se trouvant placé par le comte devant une femme en mal d'enfant, le rebouteur recouvra toute sa présence d'esprit (Balzac,Enf. maudit, 1831-36, p. 358).
En partic.
Mal de l'air, du rail, de la route. Malaises ressentis au cours d'un voyage en avion, en train, en voiture. Mal des transports. ,,Ensemble des troubles observés chez certains passagers d'un véhicule en mouvement`` (Méd. Flamm. 1976). Un nouveau médicament destiné à prévenir les inconvénients causés par le mal des transports (...) vient d'être lancé sur le marché américain par une société pharmaceutique suisse (L'Est Républicain, 11 juill. 1981, p. 1).
Mal de mer. Malaise provoqué par les mouvements du bateau et donnant des maux de tête, des nausées, des vomissements. Le mal de mer le prit. Chacun connaît les effets de cette maladie: la plus horrible de ses souffrances sans danger est une dissolution complète de la volonté (Balzac,Contrat mar., 1835, p. 326).P. métaph. Je vous avoue que les disputes littéraires me donnent le mal de mer. Cela manque de grâce et de résultats (Valéry,Entret.[avec F. Lefèvre], 1926, p. 25).
Mal des montagnes. ,,Malaises causés par la raréfaction de l'oxygène en altitude`` (Villen. 1974). Les plus vaillants défaillirent, et le vertige, ce terrible mal des montagnes, détruisit non seulement leurs forces physiques, mais aussi leur énergie morale (Verne,Enf. cap. Grant, t. 1, 1868, p. 107).
2. [De manière chronique ou répétitive] Douleur continue ou récurrente manifestant une maladie souvent grave, parfois mortelle. Affreux mal; mal cruel, implacable, irrémédiable; endurer, enrayer le mal. Cet enfant si beau, si sage et déjà si cultivé était secrètement atteint du mal horrible qui lui valut son surnom de Baudouin le Lépreux (Grousset,Croisades, 1939, p. 210):
1. À la suite de crises répétées, son corps entier se prenait, le mal montait des pieds aux genoux, puis aux coudes et aux mains. (...) C'était maintenant la goutte chronique, inguérissable, la goutte qui ankylose et qui déforme. Zola,Joie de vivre, 1884, p. 938.
Mal de mort. Vouloir mal de mort à qqn. Désirer sa mort. Il avait beaucoup tardé à publier les oeuvres de son oncle, et il voulait mal de mort à ceux qui l'avaient devancé dans cette tâche (A. France,Vie littér., t. 1, 1888, p. 306).
Mauvais mal (vx). Maladie mortelle considérée comme un fléau à une époque donnée. Chaque époque a connu son «mauvais mal» auquel s'accrochait une effrayante mythologie (...). Ce fut, au Moyen Âge, la peste noire, détrônée par le choléra, puis par la tuberculose (...) le cancer a pris sa succession et assumé son héritage d'épouvantement (L'Est Républicain, 15 oct. 1980, p. 1).Pop. Maladie quelconque. Tu vas te faire venir du mauvais mal, la Torine... Tu seras bien avancée? (Martin du G..,Testament P. Leleu, 1920, ii, p. 1153).
Mourir du mal. Mourir d'une certaine maladie. Elle est morte du mal. On appelle ça: «le mal», mais c'est une vapeur; ça prend les gens d'âges. Ils ont les «trois sueurs», le «point de côté» puis, ça s'arrache tout, là-dedans et ils meurent (Giono,Regain, 1930, p. 25).
Aller à mal (vx). Être atteint d'une mauvaise maladie. C'est là que nous avons mangé notre pain blanc en premier, car il me semble que je vais à mal. Je suis bien malade, Jacques (Balzac,Pierrette, 1840, p. 124).
Mal caduc, comitial, sacré ou haut mal. Épilepsie. Ce pauvre petit corps de fillette poitrinaire et peut-être atteinte du mal sacré (Suarès,Voy. Condottière, t. 3, 1932, p. 255).Tomber du haut mal. P. métaph. Je ne veux pas être une sotte grue et tomber du haut mal d'admiration. Je m'attache à peindre les personnages en conscience (Chateaubr.,Mém., t. 2, 1848, p. 649).
Mal divin. Peste. Synon. vieilli de grand mal. (Ds Méd. Biol. t. 2 1971).Hippocrate l'appela [la peste] le mal divin, et Thucydide le feu sacré; ils la regardèrent tous deux comme le feu de la colère céleste (Chateaubr.,Mém., t. 4, 1848, p. 59).
Mal noir. ,,Charbon`` (Méd. Biol. t.2 1971). Les camarades lui conseillèrent de mouiller sans cesse la blessure pour empêcher le mal noir (Maupass.,Contes et nouv., t. 1, En mer, 1883, p. 97).
Mal de (+ nom propre, subst. ou adj.).Maladie de. Mal des ardents (v. ardent II B).Mal de Bright. Néphrite. Il lui trouva de l'asthme, une bronchite, et le mal de Bright (Maurois,Disraëli, 1927, p. 294).Mal de Pott. Tuberculose vertébrale. Un enfant a le mal de Pott. Il va à Berck (Barrès,Cahiers, t. 9, 1911, p. 178).
Mal + déterminants variés (vieilli).Mal espagnol, français, italien, de Sicile. Syphilis. J'ai guéri la fièvre pestilente, la podagre, l'hydropisie et le mal français (Arnoux,Seigneur, 1955, p. 111).
Mal (de) (+ nom de saint).Affections diverses, le saint en question étant censé guérir l'affection qu'il servait à nommer. Il était mort en effet de la dyssenterie et des hémorrhoïdes, qu'on nommait alors le mal saint Fiacre (Barante,Hist. ducs Bourg., t. 4, 1821-24, p. 371).Nicolas Remy atteste que le mal St. Jean était l'épilepsie, le mal St. Antoine le «feu sacré» ou érysipèle, le mal St. Manne l'impétigo, et le mal St. Anastase la folie (E. Delcambre, Le Concept de sorcellerie dans les duchés de Lorraine au XVIeet au XVIIes., Nancy, Soc. d'archéol. lorr., 1949, p. 50).
Expressions
Prendre son mal en patience. Supporter son mal avec courage. Au fig. Je prends mon mal en patience, je me livre avec courage à des travaux qui finiront par me rendre indépendant (Hugo,Lettres fiancée, 1820, p. 15).
Plus de bruit que de mal. Plus de bruit et d'agitation que de dégâts réels. Comme il arrive dans ces échauffourées, il y eut plus de bruit que de mal. Une dizaine de juifs environ demeuraient sur le carreau (Tharaud,Fête arabe, 1912, p. 193).
Rendre le remède pire que le mal. Utiliser des produits aux effets plus nocifs que la maladie qu'on cherche à combattre. Bergotte (...) essaya avec succès, mais avec excès, de différents narcotiques, (...) tous les produits (...) étaient toxiques et par là rendaient le remède pire que le mal (Proust,Prisonn., 1922, p. 186).
Tomber de fièvre en chaud mal (vx). Aggraver son cas. Au fig. Aujourd'hui un très grand nombre de propriétaires, pour ne pas dire presque tous, honteux de leur oisiveté, travaillent, épargnent, capitalisent. C'est tomber de fièvre en chaud mal (Proudhon,Propriété, 1840, p. 288).
B.− Souffrance vécue sur les plans affectif, psychique, moral. Synon. chagrin, déception, désillusion, peine, tourment.Mal de l'absence, de l'exil; mal d'amour, de langueur; avoir mal à l'âme. L'idée que cet homme est son amant me fait un mal affreux (Dumas fils, Dame Cam., 1848, p. 136).Connais-tu point quelque remède spécifique, ou quelque corps exactement antidote, pour ce mal d'entre les maux, ce poison des poisons (...) l'ennui de vivre? (Valéry,Eupalinos, 1923, p. 34).
Doux mal, mal délicieux. Tourment d'amour. Des romans de coeur pleins d'amoureuses peines, Où l'art sait retracer, sous l'éclat de nos moeurs, Ce mal délicieux dont je sens que je meurs (Sainte-Beuve,Poés., 1829, p. 113).Sa chanson (...) témoignant sincèrement (...) du doux mal qu'on souffre en aimant (Verlaine, Œuvres compl., t. 1, Bonne chans., 1870, p. 103).
En partic.
Mal du pays. Regret profond du pays natal qu'on a quitté, de la patrie. Synon. nostalgie.Cette langueur d'ame qu'on éprouve hors de sa patrie; (...) le mal du pays. C'est véritablement un mal, et qui ne se peut guérir que par le retour (Chateaubr.,Génie, t. 1, 1803, p. 228).
Mal du siècle. État de malaise, de tristesse, de dégoût de vivre manifesté par la jeunesse romantique, et que Chateaubriand a peint dans le personnage de René; p. anal., malaise particulier qui atteint plus ou moins les jeunes générations. Désormais, le nouveau «mal du siècle» avait un nom; il était fait de la nostalgie d'un âge d'or, celui de l'enfance (Benda,Fr. byz., 1945, p. 56).
Mal de vivre. Difficulté d'être. Sentir le mal de vivre. Le présent volume qui n'est lui-même qu'une longue digression sur le mal de vivre, sur l'infernale disgrâce de subsister (Bloy,Femme pauvre, 1897, p. 111).P. ext. Mal de l'été. Mal de l'été et du «beau fixe», (...) mélancolie des jours fériés (Jankél.,L'Aventure, l'ennui, le sérieux, Paris, éd. Montaigne, 1963, p. 99).
[P. anal. avec (avoir) mal à la gorge, à la tête, etc.] Mal à la France. Le mal à la France atteint à l'aigu quand le Canard enchaîné (...) orchestre depuis son officine le débat public (Le Figaro Magazine, 26 avr. 1980, p. 21).
Avoir mal de + inf.J'ai mal de tenir tant à vous (Montherl.,Encore inst. bonh., 1934, p. 698).
Être en mal de qqn, de qqc.Souffrir de l'absence de quelqu'un, de quelque chose; p. ext., désirer, avoir besoin de. Être en mal d'amour, d'enfant, de guerres, de poésie, de promenade, de publicité, de renseignements. Des groupes en mal d'espace, en quête de territoires (Vidal de La Bl.,Princ. géogr. hum., 1921, p. 46).Ce grand flot parfumé, satiné, voluptueux, des femmes de Lima en mal de frivolités, de liberté, de plaisirs défendus (Morand,Dern. jour Inquis., 1947, p. 247).
Faire mal (fam.).Faire pitié, agacer, ennuyer. Tu me fais mal! Tu me fais mal à + inf.Ah! (...) tu nous fais mal à rabâcher trente-six fois la même chose (Le Petit Parisien ds Bruant1901).
II. − P. ext. [Fréq. avec le partitif] Tout ce qui est contraire au bien-être, à l'épanouissement; tout ce qui est mauvais, dommageable, néfaste (aux êtres ou aux choses).
A. − [Dommageable aux êtres]
1. Ce qui est mauvais dans les êtres ou les choses. Les maux du despotisme, de l'intolérance. Tout ce qui diminue l'indépendance du clergé est un mal, et un très grand mal (Lamennais,Religion, 1826, p. 235).Voltaire avait bien vu. C'est le fanatisme qui est le mal humain; et ce n'est que l'esprit qui pense convulsivement par une ambition trop prompte et aussitôt déçue (Alain,Propos, 1931, p. 993).
Le mal, le grand mal, le plus grand mal, le plus grand des maux. Le mal, le grand mal, c'est que nous ne sommes point de notre siècle (Chateaubr.,Essai Révol., t. 1, 1797, p. 11).Le nonce Bargellini (...) disait: «Le mal en France, c'est qu'on n'étudie pas assez la scolastique (...)» (Sainte-Beuve,Port-Royal, t. 4, 1859, p. 314).Le plus grand des maux, cause de tous, c'était encore l'anarchie (Bainville,Hist. France, t. 1, 1924, p. 187).
Fam., exclam. Le grand mal! Quel dommage à cela? Bon! Quand vous lui auriez dit quelques paroles en l'air, le grand mal! (Nerval,Filles feu, Corilla, 1854, p. 672).
Il n'y a pas de mal (à ça). [Formule de politesse (en réponse à qqn qui demande qu'on l'excuse)]
Au plur. [À propos de méfaits qui entraînent la ruine matérielle et la misère morale] L'auteur, la cause de tous nos maux; souffrir, supporter de grands maux; vivre avec ses maux. Chacun jeûnait et se mortifiait afin d'obtenir du ciel la fin de tant de maux; la France était, depuis deux ans, ravagée et mise à feu et à sang (Barante,Hist. ducs Bourg., t. 3, 1821-24, p. 278):
2. L'affaire Pyrot (...) doit rester secrète. Si elle était divulguée, les maux les plus cruels, guerres, pillages, ravages, incendies, massacres, épidémies, fondraient immédiatement sur la Pingouinie. A. France,Île ping., 1908, p. 299.
Proverbes. De, entre deux maux il faut choisir le moindre. Je lui ai dit qu'il n'y avait qu'un héroïsme, celui de faire souffrir (...), que, comme entre deux maux il faut choisir le moindre, il valait mieux être bandit qu'honnête homme (Rivière,Corresp.[avec Alain-Fournier], 1907, p. 313).
Aux grands maux les grands remèdes. Les grandes difficultés appellent des solutions radicales. Quand nous nous récriions contre une telle perfidie et une telle ingratitude, ils nous répondaient: Aux grands maux, les grands remèdes (Las Cases,Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 949).
C'est le plus grand des maux que + inf.C'est le plus grand des maux qu'être sans caractère (Laya,Ami loix, 1793, ii, 4, p. 42).
2.
a) Faire du mal à qqn. Lui nuire. Au commencement de l'action, la cavalerie turque de Damas leur fit beaucoup de mal en les criblant de flèches, selon sa coutume (Grousset,Croisades, 1939, p. 68).
Faire moins de mal que de peur. Causer de la frayeur plutôt que des maux réels. Un tribunal frappe avec lenteur et fait moins de mal que de peur (A. France,Dieux ont soif, 1912, p. 118).
[À la forme négative] Ne faire aucun mal. Ne pas molester. Le chef de la bande rassura les voyageurs en leur disant qu'il ne leur seroit fait aucun mal (Balzac,Annette, t. 1, 1824, p. 111).Ne jamais faire/vouloir de mal à qqn. Le duc répondit qu'il le ferait très volontiers [entretenir bonne paix dans le royaume], qu'il ne voulait de mal à personne, et désirait la paix avec les grands et les petits (Barante,Hist. ducs Bourg., t. 4, 1821-24, p. 109).Cela ne fait de mal à personne (fam.). Un petit coup de vin, un petit air de danse, ça ne fait de mal à personne (Claudel,J. d'Arc, 1939, 8, p. 1216).Ne pas faire de mal à une mouche (fam., gén. au cond.). Être tout à fait pacifique ou inoffensif. Je me sens trop doux. Je ne ferais pas de mal à une mouche (Sartre,Mains sales, 1948, 2etabl., 1, p. 39).
b) Mettre à mal qqn, qqc.
Vx, p. plaisant. [L'obj. désigne qqn, en partic. une femme] Violer; p. ext., séduire. Le baron Vauveron (...) s'accusa brusquement d'avoir mis à mal une fille de ferme dont il avait eu un enfant (L. Daudet, Bacchantes, 1931, p. 120).
[L'obj. désigne qqc.] Maltraiter. Sous le tapotage et les placages de ses terribles grands doigts, le piano était si souvent mis à mal, qu'elle avait pris le parti d'attacher à sa personne (...) un vieil accordeur auquel elle donnait de l'ouvrage, tous les jours (E. de Goncourt, Faustin,1882, p. 303).Au fig. Quand, par fait de guerre, des intérêts français sont mis à mal dans le monde, que se passe-t-il? Qui paie la facture? (L'Est Républicain, 11 juin 1981, p. 20).
3.
a) Dire du mal de qqn. Médire, calomnier. On demanda à Madame Dubarry si Louis XV ne disait pas beaucoup de mal d'elle [Madame de Beauvau] (...). «Oh! beaucoup. − Eh bien! Quel mal, de moi, par exemple? − De vous, madame, que vous étiez hautaine, intrigante; que vous meniez votre mari par le nez.» (Chamfort,Caract. et anecd., 1794, p. 105).
b) Parler en mal de qqn (vieilli). Dire du mal de quelqu'un. Ne parlez jamais en mal des employés, vous autres! (Balzac,Employés, 1837, p. 92).Prendre qqc. à/en mal (vieilli); tourner en mal qqc. Voir le mauvais côté de quelque chose. Si tu tiens à la lettre que je t'avais écrite sur elle, demande-la à Chopin (...) Il l'a prise en mal, et je ne voulais pourtant pas le chagriner (Sand,Corresp.,1843, p. 283).Les choses les plus innocentes peuvent être interprétées à mal (Dumas père, Chev. Maison-Rouge, 1847, i, tabl. 3, 4, p. 48).Écoute, et ne prends point à mal ce que je vais te dire, et songe que cela m'est bien dur (Claudel,Échange, 1894, ii, p. 689).
4. [Avec un sens affaibli] Tout ce qui demande effort, exige de la peine. Avoir du mal, beaucoup de mal; se donner du mal pour qqn, pour qqc.; se donner le mal de + inf., un mal infini à + inf. Cette enfant me donnait bien du mal; cependant j'en prenais volontiers la peine; elle m'était si chère! (Nerval,Faust, 1840, p. 129).On avait tant tardé à partir, qu'à peine s'il y avait de l'eau dans le port, et nous eûmes grand mal à y entrer (Flaub.,Champs et grèves, 1848, p. 248):
3. ...ces enfants de paysans et ces enfants d'ouvriers (...) se donnaient beaucoup plus de mal, ils fournissaient beaucoup plus de travail pour passer le brevet simple que nous pour passer l'examen de fin de quatrième... Péguy,Argent, 1913, p. 1139.
Avoir le plus grand mal à faire qqc., à vivre. Avoir la plus grande difficulté à. Nous aurons, dès la fin du mois, le plus grand mal à joindre les deux bouts (Duhamel,Notaire Havre, 1933, p. 106).
Se donner un mal de chien, du diable, de cinq cents diables, de tous les diables, d'enfer, de galérien. Se donner beaucoup de mal. La «conférence» que je viens de me donner un mal d'enfer à écrire (Gide,Corresp.[avec Valéry], 1901, p. 384).Je ne vois pas pourquoi tu m'insultes quand je me donne un mal de chien pour te faire plaisir (Pagnol,Fanny, 1932, i, 1ertabl., 1, p. 11).
[Avec un sens encore plus affaibli] Inconvénient, ennui. Je compte dans un an aller faire un grand voyage en Allemagne. Le mal est que je n'en sais pas la langue (Tocqueville,Corresp.[avec Reeve], 1836, p. 36).
B. − Rare. [Dommageable aux choses] Dommage. La gelée a tout perdu, il y a encore plus de mal qu'on ne croit (Ac.).Comment pouvais-je réparer le mal fait au manuscrit, si ce n'est en donnant au public le texte imprimé d'après une copie authentique? (Courier,Lettre à M. Renouard, 1810, p. 260).Le mal ne se borna pas là; le feu qu'ils avaient mis à leurs tentes gagna le reste du camp et en consuma une partie (Barante,Hist. ducs Bourg., t. 3, 1821-24, p.232).Il vint aussi un grand lion qui faisait beaucoup de mal dans le pays, mangeant les vaches et les moutons (Claudel,Violaine, 1892, i, p.506).
Demi-mal. Dégâts limités. Comme cela, dit-il en revenant, il n'y a que demi-mal, la lettre paraîtra demain (Rolland,J.-Chr., Amies, 1910, p. 1095).
III. − Au sing. Tout ce qui est contraire au bien.
A. − Ce qui est contraire à la loi morale, à la vertu.
1. [À propos d'un mal commis ou d'un mal d'intention] Faire tout le mal possible; se plaire au mal. Le duc Raukhing, (...) qui faisait le mal par goût (...) On racontait de lui des traits d'une cruauté vraiment fabuleuse (Thierry,Récits mérov., t. 1, 1840, p. 118):
4. ...le mal que je fais, c'est d'abord une souffrance que j'impose à autrui; aussi ne me donne-t-il jamais à moi-même qu'une amère satisfaction. Car le mal dont la souffrance est la trace, c'est la vie qui retourne contre soi la puissance même dont elle dispose, c'est la vie qui se blesse et qui se mutile. L. Lavelle, Le Mal et la souffrance, Paris, Plon, 1941, p. 5.
Locutions
Faire, vouloir le mal pour le mal. Faire, vouloir le mal pour lui-même. En voulant le Mal pour le Mal, je tente de contempler la transcendance divine - dont le Bien est la possibilité propre -, comme transcendance purement donnée et que je transcende vers le Mal (Sartre,Être et Néant, 1943, p. 350).
[P. réf. à la loi du talion œil pour œil, dent pour dent] Rendre le mal pour le mal. Rendre méfait pour méfait. Je ne fais pas le mal pour le bien; mais, par le ciel, je sais rendre le mal pour le mal (Musset,Nuit vénit., 1834, 1, p.16).Répondre au mal par le mal. À la fin, il avait fallu donner l'ordre de répondre au mal par le mal; nous étions malheureusement forcés de massacrer et d'incendier aussi (Erckm.-Chatr.,Hist. paysan, t.2, 1870, p.182).
Sans songer à mal. Sans avoir d'intentions mauvaises. J'arrosais mes pétunias sans songer à mal, quand je vis entrer un grand jeune homme blond (About,Roi mont., 1857, p.12).
Expressions
Honni* soit qui mal y pense.
À qui mal veut mal arrive. Je te revaudrai ça: à qui mal veut, mal arrive (Vidocq,Mém., t. 4, 1828-29, p. 250).
2. [À propos d'un mal subi] Souffrir, subir, supporter le mal. Le mal et la méchanceté (...) collaborent à nous rendre la vie intenable, sulfureuse, frénétique, comme se relayent les guerres qui viennent de la méchanceté des hommes (Jankél.,Traité des vertus, Paris, Bordas/La Haye, Mouton, t. 3, 1972, p. 1102):
5. «Ni les parfums de l'Arabie... ni l'Océan du Grand Neptune...» Il y a en effet de l'éternellement ineffaçable dans le mal. Que la persécution triomphe à grand éclat de l'innocence et des causes justes, ou que la bonne volonté privée ou publique finisse par s'enliser ou succomber, cédant à la malchance des circonstances et à la perversité des exemples, le mal fait alors au réel une blessure que seule une pensée étourdie dirait cicatrisable. E. Borne, Le Problème du mal, Paris, P.U.F., 1960, p. 18.
3. [P. oppos. au bien] Avoir la connaissance du bien et du mal. Il est certain qu'au centre de nos pensées sur le bien et sur le mal, on retrouve l'opposition de ce qui doit être et de ce qui ne doit pas être, selon la liberté et l'obligation morale (J. Nabert,Essai sur le mal, Paris, éd. Montaigne, 1970, p. 150):
6. Dans la représentation poétique du mal, il en est comme dans l'ordinaire de la vie réelle: le mal existe par référence au bien et veut en prendre les apparences. Étant ce qui ne doit pas être, il soulève la question: d'où vient-il? Il est la justification négative du bien. Fries t. 3 1966, p. 22.
[P. anal. avec ce qui est obscur, nocturne] La nuit, l'opacité du mal. Avec quoi un roman est-il fait, sinon avec du mal? Ôté le mal, que reste-t-il? Du bien, c'est-à-dire du blanc. Il faut aussi du noir (Green,Journal, 1957, p. 308):
7. ...le mal, sous la forme de la folie ou de la perdition, (...) comme le contraire de ce bien, tout en gardant quelque chose d'obscur et d'indéfini, semblable - la métaphore est classique - à la part d'ombre dans un monde que la lumière ne saurait visiter. Encyclop. univ.t. 101972, p. 345.
B. − RELIG. Faute, péché, concupiscence. Tentation du mal; condamner, reconnaître le mal; demander à être délivré, protégé, sauvé du mal. Si l'âme (...) s'est fréquemment adonnée au mal et rarement au bien, elle prend un autre corps (...) qui est destiné aux tortures de l'enfer (Ozanam,Philos. Dante, 1838, p. 212):
8. Dans le domaine de la transgression morale, il est une dépréciation que nous connaissons bien, que nous comprenons facilement et clairement, c'est celle que nous opérons lorsque après avoir commis une mauvaise action nous reconnaissons que nous sommes coupables et que l'action est mauvaise. Le mal que nous avons commis nous oppresse, nous fait perdre l'estime de nous-mêmes. R. Otto, Le Sacré, Paris, Payot, 1969, p. 88.
En partic., vieilli. Commerce charnel. Le flottement triste qui est l'apanage (...) des femmes dites indépendantes qui ne font pas le mal, si l'on donne au commerce charnel son ancien nom de «mal» (Colette,Naiss. jour, 1928, p. 25).
C. − Absol. [Avec l'art. le, inv.: faire le mal]
1. PHILOS. Le mal absolu, métaphysique; absurdité, dialectique, énigme, injustice, interrogation, mystère, nécessité, origine, principe, problématique du mal. Si le mal, au lieu d'être privation, était une force positive, sa causalité s'expliquerait peut-être; mais il n'est que vide et zéro hypostasié, laideur-en-soi qui est amorphie et amétrie, absence de forme et de mesure (Jankél.,Traité des vertus, Paris, Bordas/La Haye, Mouton, t. 3, 1972, p. 1073):
9. Le mal est l'objet de toutes les protestations de la conscience (...) le mal est le scandale du monde. Il est pour nous le problème majeur; c'est lui qui fait du monde un problème (...). Dirons-nous que le bien lui aussi est un problème? (...) le bien, dès qu'on l'a reconnu, dès qu'on l'a accompli, est au contraire une solution (...). Par une sorte de renversement, il n'est un problème que pour celui qui le cherche, au lieu que le mal est un problème pour celui qui le trouve. L. Lavelle, op cit., p. 31.
2. THÉOL. Le Démon, l'Esprit du Mal; Belzébuth ou Satan, incarnation du mal:
10. Le discours théologique (...) contraint le mal à avouer que, si terrifiant soit-il, il n'a d'autre réalité que celle du vide ou du défaut ; ce rien, l'ange de lumière qu'il a refusé d'être, fait toute la noirceur de Satan, et, pour passer à la limite, l'enfer n'est infernal que par une absence, il est vrai éternelle, celle de l'amour. Encyclop. univ.t. 101972, p. 346.
[P. réf. à la Bible] L'arbre de la science du bien et du mal. Arbre dont le fruit, défendu à l'homme, conférait la science du bien et du mal. C'est une belle allégorie, dans la Bible, que cet arbre de la science du bien et du mal qui produit la mort (Chamfort,Max. et pens., 1794, p. 18).L'esprit du mal. Satan. L'Esprit du Mal, l'Esprit des Ténèbres, s'était installé au coeur de son enfant! (Martin du G.,Thib., Été 14, 1936, p. 663).Les puissances du mal. Les puissances sataniques. Je n'étais plus un de ces ministres de la morale chrétienne mais un homme inspiré, un de ces exorcistes légendaires, prêts à arracher aux puissances du mal les brebis de leur troupeau (Bernanos,Soleil Satan, 1926, p. 259).
REM. 1.
Mali, subst. masc.,région. (Belgique), fin. publ. Déficit. Anton. boni.Grâce à la loi sur les fusions [de communes], le mali du budget 1982 d'Anvers ne sera que de 2,14 milliards (Le Soir, 4 janv. 1982, p. 7).
2.
Malicide, adj.,vieilli. Qui tue le mal. Quand il ôte la vie d'un méchant, il n'est pas homicide, mais «malicide» (M.-M. Davy, Initiation à la symbolique romane, Paris, Flammarion, 1977, p. 25).
3.
Malus, subst. masc.,assur. (Bonus-)malus. Estimation de la prime des véhicules, en raison directe des dégâts matériels (ou de leur absence) occasionnés au cours de l'année d'assurance. Régularisation bonus-malus. Le système de bonus-malus en matière d'assurance est très simple: après le premier accident, un malus de 10% est appliqué; après le second accident, ce malus est de 40%, et après le troisième, il est de 100%, voire plus, ce qui se traduit au minimum par un doublement de la prime (Femmes d'aujourd'hui: Écho de la mode, 1982, no7, p. 20).
Prononc. et Orth.: [mal], [mo]. Homon. malle. Att. ds Ac. dep. 1694. Être dans les mals à la place du plur. maux (supra I A 1, d'apr. Carabelli, [Lang. pop.], s.d.). Étymol. et Hist. 1. a) Ca 980 «ce qui est contraire au bien, à la loi morale» (Jonas, éd. G. de Poerck, 195: e sis penteiet de cel mel qe fait [de uia sua mala]); fin xes. [rendre] ben... per mal (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 161); b) 2emoitié xes. «ce qui est néfaste, ce qui nuit» vouloir du mal à (St Léger, éd. J.Linskill, 101: molt li vol miel); ca 1100 mult grant mal funt (Roland, éd. J. Bédier, 378); 2. 1050 «maladie» (Alexis, éd. Chr. Storey, 153); joint à une autre qualification, sert à dénommer diverses maladies: fin xiies. mal d'Acre «épidémie que durent affronter les Croisés en 1190 et 1191 durant le siège d'Acre» (Béroul, Tristan, éd. E. Muret et L. M. Defourques, 3849); ca 1220 grant mal «épilepsie» (Amadas et Ydoine, éd. J. R. Reinhard, 859); 3. a) ca 1100 «souffrance physique» (Roland, 2101: En la teste ad e dulor e grant mal); 1174-76 mal del flanc (Guernes de Pont-Ste-Maxence, St Thomas, 1508 ds T.-L.); 1174-76 faire... mal (Id., ibid., 4354, ibid.); 1225-30 avoir mal en «souffrir de» (Guillaume de Lorris, Rose, éd. F. Lecoy, 2420: home qui a mal es denz); b) 1223-27 mal d'enfant (Gautier de Coinci, Miracles, éd. V. F. Koenig, II Chast. 10, 963); 4. a) ca 1100 «tort» (Roland, 578: Mult grant mal funt... a lur seignur, ki tel cunseil li dunent); b) 2emoitié xiiies. [ms] «dégâts matériels» ([Guérin], De Beranger au long cul [ms. A], 195 ds J. Rychner, Contribution à l'étude des Fabliaux, p. 107: N'a mon escu ne ferai mal [ms. D, fin xiiies., 147: Ne ses heaumes n'a point de mal]); 5. 1155 «souffrance morale» (Wace, Brut, 8690 ds T.-L.); cf. ca 1165 (Troie, 17742, ibid.: ço no fait al cuer grant mal); 1803 mal du pays (Chateaubr., Génie, t. 1, p. 228); 6. ca 1170 «le mauvais côté, le mauvais sens» (Chrétien de Troyes, Erec et Enide, éd. M. Roques, 2467: que ses sire an mal nel preist); 1690 tourner en mal (Fur.); 7. a) 1567 aller à mal «(d'une chose) empirer» (Amyot, Demosth., 5 ds IGLF); b) 1635 «inconvénient» il n'y a point de mal à ce que (Guez de Balzac, Lettres, livre VII, 47 ds Œuvres, Paris, 1665, t. 1, p. 317); 8. 1690 «effort, peine» avoir du mal à (Fur.). Substantivation de mal2* plutôt que de l'adj. lat. substantivé malum dont l'évolution phonét. se confond avec celle de l'adv. male, mais qui n'a pas été maintenu dans les autres lang. rom. et a été remplacé par l'adv. substantivé; cf. ital. sarde male, esp. cat. port. mal. FEW t. 6, 1, p.128a. Fréq. abs. littér.: 17802. Fréq. rel. littér.: xixes.: a)26885, b) 22783; xxes.: a) 24172, b) 26023. Bbg. Lew. 1968, p.69. _ Quem. DDL t. 8, 13, 15, 17, 19, 20. _ Rothwell (W.). Medical and botanical terminology from Anglo-Norman sources. Z. fr. Spr. Lit. 1976, t. 86, p. 247.

Wiktionnaire

Adverbe - français

mal \mal\ masculin invariable

  1. De mauvaise manière, autrement qu’il ne faut, qu’il ne convient, qu’on ne désirerait.
    • — Oh toi, ronchonne-t-elle, tu joues l’esprit fort, n’empêche que tu dormais mal, souviens-toi. — (Frédéric Dard, San-Antonio, n° 63 : Faut être logique, Éditions Fleuve Noir, 1967)
    • Cette affaire va mal.
    • Il a mal fait ses affaires.
    • Il a mal réussi.
    • Que cette lettre est mal tournée!
    • J’ai mal entendu.
    • Il parle mal.
    • Il tient mal à cheval.
    • Il est mal dans ses affaires.
    • Mal vu, mal pensé, mal dit, mal interprété.
    • Cela est arrivé mal à propos.
    • son père tel qu’il s’avançait jadis sur les routes mal sûres — (Robert Brasillach, La Conquérante, Cinquième partie, ch. ii, Librairie Plon, 1943, p. 270)
    • Prendre mal une chose : S’en offenser.
    • Se trouver mal : Tomber en faiblesse, en défaillance. Éprouver un malaise.
    • Se trouver mal d’une chose, : En éprouver du dommage, de l’inconvénient.
    • Se mettre mal : S’habiller sans goût.
    • Se mettre mal avec quelqu’un : Se brouiller avec lui.
    • Être mal avec quelqu’un : Être brouillé avec lui.
  2. (Familier) Se dit en parlant du visage, de la tournure, des manières.
    • Cette jeune fille n’est pas mal.
    • Comme ce jeune homme est mal !

Adjectif - français

mal \mal\

  1. Mauvais.
    • D'ailleurs, ce qui est particulier à la politique de l’histoire sainte, c'est que, chaque fois qu'un personnage marquant fait quelque chose de mal, c'est toujours le pauvre peuple qui écope. — (Émile Thirion, La Politique au village, p. 131, Fischbacher, 1896)
    • Par avance, il sait ce qu'il trouvera d'imparfait, de médiocre, de mal, d'immuable, en dépit des conseils, des admonestations ou reproches qu'il prodigue et ressasse à chaque inspection. — (Jean Rogissart, Passantes d’Octobre, Librairie Arthème Fayard, Paris, 1958)
    • La male peste vous étouffe.
    • Mourir de male mort : Mourir de mort violente.
  2. Il est encore employé dans les expressions :
    • Bon gré mal gré et
    • Bon an, mal an.
  3. Il est aussi employé comme adjectif invariable dans les expressions suivantes :
    • Être mal : Être sérieusement malade.
    • Être fort mal : Être en danger de mort.

Nom commun - ancien français

mal \Prononciation ?\ masculin

  1. Le mal.
    • A grant honnor ne puet venir
      Se bien et mal ne puet souffrir
      — (Le Roman d’Eneas, f. 2, au milieu de la 5e colonne (manuscrit du XIVe siècle))

Adjectif - ancien français

mal \Prononciation ?\ masculin

  1. Mauvais.
    • Que elle lur or dit male novele — (Le Ysope, Marie de France, f. 63r, 1re colonne de ce manuscrit de 1275-1300)

Adverbe - ancien français

mal \Prononciation ?\

  1. Mal, de façon mauvaise.
  2. Mal, indique le contraire
    • Sote gent mal senee — (Li ABC Nostre Dame ms. 837 de la BnF, f. 171r. b.)

Nom commun - français

mal \mal\ masculin

  1. (Religion) Ce qui est refusé par une doctrine, un dogme religieux.
    • Pascal nous dit qu’au point de vue des faits, le Bien et le Mal sont une question de « latitude ». En effet, tel acte humain s’appelle crime, ici, bonne action, là-bas, et réciproquement. — (Auguste de Villiers de L’Isle-Adam, Les Demoiselles de Bienfilâtre, dans les Contes cruels, Calmann Lévy, 1893, p.1)
    • Les gentils cons qui décrétaient le Bien et le Mal comprenaient qu'un garnement tirât les cheveux d'une fillette, pas qu'il lui roulât un patin ! Sœur Marie me le fit bien savoir ! Purification de ma bouche vilaine par la cascade d’ave au pied de saint Joseph. — (Pierre-Robert Leclercq, Les Gabyandre, Librairie Fayard, 1978)
    • Que je le plains, pécheur, en ton heure dernière !
      Les maux les plus affreux sont amassés sur toi;
      Le noir enfer, séjour rempli d'effroi,
      T’attend au bout de la carrière.
      — (Mort du pécheur, dans Félix Dupanloup, Manuel des petits séminaires et des maisons d'éducation chrétienne, p.106, 2e éd., 1844)
    • Dans tes yeux le mal qui se traîne
      Comme une idée de crucifix
      Dans tes mains le mal qui se promène
      Avec un vieux rêve rougi
      Dans ton cœur le mal qui se soûle
      De quelques minutes d’oubli
      Et puis dans l’ombre le bien qui coule
      Dans la rivière de la nuit.
      — (Léo Ferré, Le Mal)
  2. Ce qui est contraire au bien, ce qui est mauvais, nuisible, désavantageux, préjudiciable, etc.
    • Nous croyons que la plus grande partie des maux qui affligent les hommes découle de la mauvaise organisation sociale ; et que les hommes, par leur volonté et leur savoir, peuvent les faire disparaître. — (Errico Malatesta, Le Programme anarchiste,)
    • Ce fut M. de Chalvet-Rochemonteix qui apprit aux paysans à se prémunir contre les ravages de la carie dans les grains par le sulfatage de la semence, dont les résultats furent souverains. Le mal cessa avec l’application de ce remède. — (Abbé Henri-Dominique Larrondo, Monographie de la commune de Merville (Haute-Garonne), dans Monographies de communes, concours ouvert en 1897 par la Société des agriculteurs de France, Paris & Lille : J. Lefort - A. Taffin-Lefort, successeur, 1898, page 96)
    • Si vous le fréquentez, mal vous en prendra.
    • De deux maux il faut choisir le moindre.
    • Il a eu plus de peur que de mal.
    • Un mal imaginaire : Un mal qui n’existe que dans l’imagination.
  3. Ce qui est contraire à la vertu, à la probité, à l’honneur, essentiellement la violence et le mensonge.
    • Faire souffrir autrui uniquement pour le plaisir égoïste constitue une manifestation évidente du mal.
    • Cette Antigone voyoute pourrait courir toutefois le risque d'énoncer un univers d’indifférenciation où l'ordre légal et la transgression s’égaleraient sur un seuil éthique au-delà du bien et du mal, […]. — (Rose Duroux, Les Antigones contemporaines: de 1945 à nos jours, Presses Universitaires Blaise Pascal, 2010, page 310)
    • Quand on dit qu'on a besoin de religion pour ne pas faire le mal, on pense en réalité qu'on a besoin de police, ce qui n'est pas la même chose. Supprimez la police quelques jours, et vous verrez que la crainte de Dieu n'empêchera pas grand-chose. — (Bernard Maris, Domination, Charlie Hebdo, 7 janvier 2015)
    • Faire le bien et le mal sans discernement.
    • Il y a du mal, il n’y a pas de mal, il n’y a pas grand mal à cela.
    • Mettre une femme à mal : Rendre une femme enceinte par violence ou par séduction.
    • Penser à mal : Avoir quelque intention maligne ou mauvaise.
  4. Douleur physique, maladie.
    • On dit encore que, profondément atteint, sous la rongeure d'un mal qui ne pardonne pas, Abd-ul-Hamid est préoccupé de sa succession. — (Victor Bérard, Le sultan, l'islam et les puissances, page 62, Armand Colin, 1907)
    • Parfois elles étaient si dures les nouvelles selles merveilleuses, qu'elle en éprouvait un mal affreux au fondement... Des déchirements... Elle était obligée de se mettre de la vaseline alors avant d'aller aux cabinets. — (Louis-Ferdinand Céline [Louis Ferdinand Destouches], Voyage au bout de la nuit, Denoël et Steele, Paris, 1932)
    • Base d'une sorte de médecine coranique, la graine de nigelle, elle aussi recommandée par un hadith (une parole rapportée) du Prophète et réputée soulager les maux les plus divers, se décline en poudre ou en huile essentielle. — (Bernadette Sauvaget, Halal est grand, dans Libération (journal), des 8 & 9 janvier 2011)
    • Atteint d'un mal nommé porphyrie, le pauvre garçon est contraint de s'abreuver de sang humain pour conjurer sa langueur chronique. — (François Rivière, Dracula, cent ans et toutes ses dents, dans Libération (journal), 31 décembre 1987)
  5. Peine, travail, difficulté.
    • On a trop de mal dans cette maison.
    • Il a bien du mal à gagner sa vie.
    • Il se donne bien du mal pour nourrir sa famille.
    • Les lois qui régissent la politique migratoire en France ont du mal à être appliquées.
  6. (Figuré) Répugnance.
    • Avoir du mal, bien du mal à faire une chose.
  7. (Figuré) Chagrin.
    • Il a eu bien du mal à vous quitter.
  8. Dommage, perte.
    • La gelée a tout perdu, il y a encore plus de mal que l’on ne croit.
    • Il n’y a que demi-mal.
  9. Médisance.
    • Dire du mal de son prochain.
    • Il a dit beaucoup de mal de moi.
  10. Interprétation défavorable et fausse donnée à quelque chose.
    • C’est un homme qui prend tout en mal.
    • Il a tourné en mal les choses obligeantes qu’on lui disait.
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

MAL. (Pluriel : MAUX.) n. m.
Ce qui est contraire au bien, ce qui est mauvais, nuisible, désavantageux, préjudiciable, etc. Le mal et le bien. Dieu dispense les biens et les maux. La vie est un enchaînement de biens et de maux. Mal physique. Mal moral. Il a souffert tous les maux du corps et de l'âme. Rendre le bien pour le mal. Faire du mal, souhaiter du mal à quelqu'un. Vouloir du mal. Je ne lui veux ni bien ni mal. Ce petit événement a causé un grand mal. Prévenir, arrêter, faire cesser, réparer le mal. Dieu vous garde, vous préserve du mal. Si vous le fréquentez, mal vous en prendra. De deux maux il faut choisir le moindre. Il a eu plus de peur que de mal. Un mal imaginaire, Un mal qui n'existe que dans l'imagination. Prov., Mal d'autrui n'est que songe. Voyez AUTRUI.

MAL signifie aussi Ce qui est contraire à la vertu, à la probité, à l'honneur. Il est enclin au mal. Un enfant porté à faire le mal. Il vaut mieux prévenir le mal que d'être réduit à le punir. Faire le bien et le mal sans discernement. Il y a du mal, il n'y a pas de mal, il n'y a pas grand mal à cela. Quel mal y a-t-il à cela? La science du bien et du mal. Avoir le génie du mal. Mettre une femme à mal, Rendre une femme enceinte par violence ou par séduction. Penser à mal, Avoir quelque intention maligne ou mauvaise. J'ai dit cela sans penser à mal.

MAL signifie encore Douleur physique, maladie. Vous me faites mal. Avoir mal à la tête, un grand mal de tête, de continuels maux de tête. La tête me fait mal. Mal aux yeux. Mal d'yeux. Mal aux dents. Mal de dents. Avoir mal à l'estomac, mal au ventre, mal à la jambe. Où a-t-il pris ce mal? Mal de Pott. Ce remède guérit bien des maux. Où avez-vous mal? Ce mal m'a pris tout à coup, est venu subitement. Ce mal s'en ira comme il est venu. Quelquefois, le remède est pire que le mal. Mal d'enfant, Les douleurs d'une femme qui accouche. Être en mal d'enfant. Mal caduc, haut mal. Voyez CADUC, HAUT. Mal de mer. Voyez MER. Mal de cœur. Voyez CŒUR. Mal de montagne. Voyez MONTAGNE. Mal du pays. Voyez PAYS. Prov., Aux grands maux les grands remèdes. On le dit au propre et au figuré.

MAL signifie aussi Peine, travail, difficulté. On a trop de mal dans cette maison. Il a bien du mal à gagner sa vie. Il se donne bien du mal pour nourrir sa famille. Fig., Avoir du mal, bien du mal à faire une chose, La faire avec répugnance, avec chagrin. Il a eu bien du mal à vous quitter.

MAL signifie en outre Dommage, perte. La gelée a tout perdu, il y a encore plus de mal que l'on ne croit. Il n'y a que demi-mal.

MAL signifie, dans plusieurs locutions, Propos désavantageux tenu sur quelqu'un, ou Interprétation défavorable et fausse donnée à quelque chose. Dire du mal de son prochain. Il a dit beaucoup de mal de moi. C'est un homme qui prend tout en mal. Il a tourné en mal les choses obligeantes qu'on lui disait.

MAL s'employait autrefois aussi comme adjectif. La male peste vous étouffe. Il est employé encore ainsi dans Bon gré mal gré et Bon an, mal an.

Littré (1872-1877)

MAL (mal, ma-l' ; au pluriel, maux, qu'on prononce mô ; l'x se lie : des mô-z affreux)

Résumé

  • Adj. Qui nuit, qui blesse.
  • S. m. Ce qui nuit, ce qui blesse.
  • 3° La part de mal qui, aux yeux de l'homme, règne dans l'univers.
  • 4° Ce qui est contraire à la vertu, à la probité, à l'honneur.
  • 5° Douleur physique, maladie.
  • 6° Un furoncle, un clou, un abcès, une tumeur.
  • 7° Dénomination de diverses maladies ou souffrances.
  • 8° Nom de diverses affections des animaux.
  • 9° Mal de vers ou mal de bassine ; mal subtil.
  • 10° Peine, travail.
  • 11° Dommage, perte, calamité.
  • 12° Inconvénient.
  • 13° Paroles désavantageuses, interprétation défavorable.
  • 14° Adv. Autrement qu'il ne faut.
  • 15° Se mettre mal.
  • 16° Prendre mal.
  • 17° Se trouver mal.
  • 18° Être mal avec quelqu'un.
  • 19° Être mal, être malade.
  • 20° Être mal, être dans une mauvaise situation ; être mal en, être mal pourvu.
  • 21° Être mal, n'avoir pas un visage agréable.
  • 22° Pas mal.
  • 1 Adj. Qui nuit, qui blesse. Mal est adjectif masculin dans les locutions : bon gré, mal gré ; bon an, mal an.

    Il est aussi adjectif dans cette tournure : Il est mal d'acquérir la fortune par des voies illicites. Il me semble qu'il ne serait pas mal de considérer de plus près les amertumes présentes, Guez de Balzac, Disc. à la régente. … Mais le peu que j'y vois Me paraît mal à vous, et dangereux pour moi, Gresset, Méchant, II, 1.

    Il est féminin dans les locutions suivantes (féminin que ne donne pas le Dictionnaire de l'Académie) : la male faim, voy. FAIM et MALEFAIM ; la male heure (voy. HEURE, n° 13) ; la male tache. La force de la male tache du péché originel, Patin, Lett. t. II, p. 556.

    Autrefois mal, male était un adjectif pleinement usité ; il ne reste plus, comme on voit, que des traces de cet usage.

  • 2 S. m. Le mal, ce qui nuit, ce qui blesse ; le contraire du bien (c'est l'adjectif mal pris substantivement). Ou que leur avint-il en ce vite départ [mort prématurée], Que laisser promptement une basse demeure Qui n'a rien que du mal, pour avoir, de bonne heure, Aux plaisirs éternels une éternelle part ? Malherbe, I, 4. Parlez plus sainement de vos maux et des miens ; Chacun voit ceux d'autrui d'un autre œil que les siens, Corneille, Hor. III, 4. Et tous maux sont pareils alors qu'ils sont extrêmes, Corneille, ib. À raconter ses maux souvent on les soulage, Corneille, Poly. I, 3. Et de deux maux qu'on craint également Celui qui nous arrive est toujours le plus grand, Corneille, Attila, IV, 2. Ne perdez pas le souvenir du mal au jour heureux, ni le souvenir du bien au jour malheureux, Sacy, Bible, Ecclésiastiq. II, 27. …Quand le mal est certain, La plainte ni la peur ne change le destin, La Fontaine, Fabl. VIII, 12. Sera-ce les philosophes qui nous proposent pour tout bien les biens qui sont en nous ? est-ce-là le vrai bien ? ont-ils trouvé le remède à nos maux ? Pascal, Pens. XII, 1, éd. HAVET. Qu'il y a un Dieu, qu'on est obligé de l'aimer, que notre vraie félicité est d'être en lui, et notre unique mal est d'être séparé de lui, Pascal, ib. N'appelons mal que ce qui rend la victime de Dieu victime du diable, Pascal, Lett. sur la mort de son père. Le mal est aisé, il y en a une infinité ; le bien presque unique ; mais un certain genre de mal est aussi difficile à trouver que ce qu'on appelle bien ; et souvent on fait passer pour bien à cette marque ce mal particulier, Pascal, Pens. VI, 61, éd. HAVET. Nous n'avons ni vrai ni bien qu'en partie, et mêlé de mal et de faux, Pascal, ib. VI, 60, éd. HAVET. Le plus grand des maux est les guerres civiles ; elles sont sûres, si on veut récompenser les mérites ; car tous diront qu'ils méritent ; le mal à craindre d'un sot qui succède par droit de naissance, n'est ni si grand, ni si sûr, Pascal, ib. V, 3, éd. HAVET. Nous trouvions l'autre jour qu'il n'y avait de véritable mal dans la vie que les grandes douleurs ; tout le reste est dans l'imagination, Sévigné, 4 mai 1672. Le plus grand de mes maux est de ne t'aimer plus, Th. Corneille, Ariane, V, 6. Ni les maux qui l'ont surprise, ni ceux qu'elle a prévus n'ont abattu son courage, Bossuet, Reine d'Anglet. La pauvreté n'était pas un mal pour eux [les Romains], Bossuet, Hist. III, 6. Il importe que vous ayez des maux à souffrir, tant que vous en aurez à corriger ; il importe que vous ayez des maux à souffrir, tant que vous serez au milieu des biens où il est dangereux de se plaire trop, Bossuet, Sermons, Vêture de Mlle de Bouillon, 2. Reconnaissez ici le monde ; reconnaissez ses maux toujours plus réels que ses biens, Bossuet, Anne de Gonz. Souvent la peur d'un mal nous conduit dans un pire, Boileau, Art p. I. Quel est donc ce grand mal que leur courroux [des dieux] annonce ? Racine, Théb. II, 2. Je souffre tous les maux que j'ai faits devant Troie, Racine, Andr. I, 4. Tout mal arrive avec des ailes, et s'en retourne en boitant, Voltaire, Lett. Mme de Lutzelbourg, 14 oct. 1754. Il ne faut croire le mal que quand on ne peut plus faire autrement, Voltaire, Lett. d'Argence, 10 juill. 1767. Je suis bien loin de vous dire, comme certains raisonneurs, que les maux particuliers forment le bien général ; cette extravagance est trop ridicule, Voltaire, Jenni, 9. Il rassemble sur lui tous les maux des enfers, Voltaire, Œdipe, I, 3. En politique, comme en morale, c'est un grand mal que de ne point faire le bien, Rousseau, Disc. rétabl. des sciences. Quand on cède à la peur du mal, on ressent déjà le mal de la peur, Beaumarchais, le Barb. de Sév. II, 2. Sire, un mal violent veut un remède extrême, Chénier M. J. Ch. IX, III, 2.

    Un mal d'opinion, un mal qui n'est mal que dans l'opinion, dans l'imagination des hommes. Un mal d'opinion ne touche que les sots, Molière, Amph. I, 4.

    Les maux d'imagination, les maux qui ne sont pas réels. C'est une idée assez heureuse pour exprimer la crainte des maux d'imagination que l'allégorie d'un enfant qui souffle en l'air des boules de savon, et qui, s'effrayant de leur chute, inspire la même frayeur à une foule d'autres enfants, sur qui ces boules vont retomber, Marmontel, Élém. de litt. Œuvr. t. V, p. 129. dans POUGENS.

    Faire du mal, nuire, infliger quelque chose qui fasse souffrir. Tant de gens qui ne vous ont point fait de mal, Pascal, Prov. XVI. Nous avons été si vilainement trompés par la Jarie… si vous pouvez épargner Pasgerant, j'en serai bien aise ; mais, pour la Jarie, je vous prie de lui faire non-seulement toute la peur, mais encore le mal, s'il en faut venir là, Sévigné, à d'Hérigoyen, 8 févr. 1687. Ce mensonge ne fait aucun mal à personne, Fénelon, Tél. III. Je gagne déjà quelque chose à dire du mal ; si je puis parvenir à en faire, ma fortune est faite, Voltaire, Écoss. I, 1. L'occasion de faire du mal se trouve cent fois par jour, et celle de faire du bien une fois dans l'année, comme dit Zoroastre, Voltaire, Zadig, 4. Ils [les gens de la cour, dans un château royal, à la campagne] chassent à travers nos blés avec leurs chiens et leurs chevaux, ouvrent nos haies, gâtent nos fossés, nous font mille maux, mille sottises, Courier, Simple disc. Oh ! fuis ! détourne-toi de mon chemin fatal ; Hélas ! sans le vouloir je te ferais du mal ! Hugo, Hern. III, 4.

    Vouloir du mal à quelqu'un, souhaiter que du mal lui arrive, être irrité contre lui. Aussi bien que Pompée, il vous voudra du mal, Corneille, Pomp. I, 1. Que je veux de mal à mes gens, de ne vous avoir pas fait entrer d'abord ! Molière, Festin, IV, 3. Mais aujourd'hui, Cliton, elle attend ma visite, Et me voudra du mal, si je ne m'en acquitte, Th. Corneille, l'Amour à la mode, I, 5. À la fin je me suis voulu un mal incroyable de m'être opposé un seul moment à ce mariage, D'Allainval, École des bourg. III, 1.

    On dit dans le même sens : vouloir mal, ou, en renforçant, vouloir mal de mort. [Ô mort] Ceux qui te veulent mal sont ceux que tu conserves, Malherbe, I, 4. Mon cœur, es-tu si tendre Que de donner des pleurs à l'époux de Cassandre, Et vouloir mal au bras qui t'en a dégagé ? Rotrou, Vencesl. IV, 2. Je me veux mal de mort d'être de votre race, Molière, Femm. sav. II, 7. Je suis sotte, et veux mal à ma simplicité, De conserver encor pour vous quelque bonté, Molière, Mis. IV, 3. Vous voulez un grand mal à la nature humaine, Molière, ib. I, 1. Ils voulurent mal à leurs officiers de ce qu'ils n'étaient pas si bien servis, Hamilton, Gramm. 2.

    Il vous en prendra mal, mal vous en prendra, cela vous causera du mal, du dommage.

  • 3 Absolument. Le mal, la part de mal qui aux yeux de l'homme règne dans l'univers. Les philosophes ont cherché longtemps la cause du mal. La religion de Zoroastre attribue le mal à un mauvais principe qui partage la souveraineté du monde avec le principe de bien. Il n'y a point de mal pour le grand être ; il n'y a pour lui que le jeu de la grande machine qui se meut sans cesse par des lois éternelles, Voltaire, Philos. de l'âme, 5. Wolmar se contentait de l'aveu que, peu ou beaucoup, enfin le mal existe, et de cette seule existence il déduisait défaut de puissance, d'intelligence ou de bonté dans la première cause, Rousseau, Hél. V, 5. Le mal dès lors régna dans son immense empire ; Dès lors tout ce qui pense et tout ce qui respire Commença de souffrir, Lamartine, Méd. I, 7.

    Terme de philosophie. Mal métaphysique, imperfection de nature qui tient à l'essence des choses.

    Mal physique, les souffrances, les maladies, la mort.

    Mal moral, crime et péché. e qui est contraire à la vertu, à la probité, à l'honneur. La science du bien et du mal. Il y a des gens de qui l'on ne peut jamais croire du mal sans l'avoir vu ; mais il n'y en a point en qui il nous doive surprendre en le voyant, La Rochefoucauld, Max. 197. Il n'a point vu le soleil et n'a point connu la différence du bien et du mal, Sacy, Bible, Ecclésiaste, VI, 5. Et le mal n'est jamais que dans l'éclat qu'on fait, Molière, Tart. IV, 5. On ne doit pas faire le moindre mal pour faire réussir le plus grand bien, Pascal, Prov. 11. On se corrige quelquefois mieux par la vue du mal que par l'exemple du bien, Pascal, Lett. à Mlle de Roannez, 7. Dieu conserve au juste un plus grand don ; il retire le pécheur d'un plus grand mal, Bossuet, Mar.-Thér. Il [saint Augustin] nous apprend qu'il y a en nous deux sortes de maux : il y a en nous des maux qui nous plaisent, et il y a des maux qui nous affligent, Bossuet, Sermons, Vêture de Mlle de Bouillon, 2. Quand les hommes veulent quitter le mal, le mal semble encore les poursuivre longtemps, Fénelon, Tél. XXII. Laure avait eu autant de peine à porter sa fille au mal que les autres mères en ont à porter les leurs au bien, Lesage, Gil Blas, XII, 3. Que personne ne songe à tromper les autres, c'est s'abuser soi-même ; qui mal fait, mal trouvera, Lesage, Guz. d'Alfar. I, 6. La honte, compagne du mal, me rendit muet, tremblant devant elle, Rousseau, Confess. IX. Tout ce qui est mal en morale est mal encore en politique, Rousseau, Lett. à d'Alembert. Serait-ce un mal de s'unir quand on s'aime, Pour que le ciel voulût nous en punir ? Malfilâtre, Narcisse, II.

    Induire quelqu'un à mal, le porter au vice, au péché, au crime.

    Mettre une femme à mal, la séduire. Le luxurieux animal Mit une pauvre fille à mal, Scarron, Virg. VI. Femmes mises à mal, maris poussés à bout, tout le monde est content, Molière, Festin, V, 7. Je ne pense pas que vous espériez la mettre à mal, Hamilton, Gramm. 7.

    Mettre à mal, se dit aussi, en général, pour corrompre. C'est l'imprimerie qui met le monde à mal, c'est la lettre moulée qui fait qu'on assassine depuis la création, et Caïn lisait les journaux dans le paradis terrestre, Courier, Lett. au réd. du Cens. 9.

    Penser, songer à mal, avoir quelque intention maligne ou mauvaise. Si un pauvre philosophe qui ne pense point à mal, s'avise de vouloir faire tourner la terre, Voltaire, Dict. phil. Contradictions. Toutes ces bonnes gens sont trop occupés pour songer à mal, Voltaire, Dial. XXIV, 3.

    Il n'y a pas de mal à, on ne pèche pas en. Quel mal y a-t-il d'aller dans un champ et de s'y promener en attendant un homme ? Pascal, Prov. 7.

    Il n'y a pas de mal entre eux, se dit pour exprimer que les relations d'un homme et d'une femme sont tout à fait innocentes. Messieurs, vous vous trompez, si vous croyez qu'il y ait du mal entre nous : je vous assure que nous sommes comme frère et sœur, Sévigné, 48.

    Familièrement. Faire du mal, commettre quelque action contraire à la morale. Un jour la duchesse d'Uzès, étonnée de ses scrupules [de Mme de Montespan], ne put s'empêcher de lui en dire un mot : Eh ! pourquoi, madame reprit Mme de Montespan, faut-il, parce que je fais un mal, faire tous les autres ? Mme de Caylus, Souvenirs, édit. 1805, p. 69. La comtesse : Si quelqu'un entrait ? - Suzanne : Est-ce que nous faisons du mal donc ? Beaumarchais, Mar. de Fig. II, 4.

  • 5Douleur physique, maladie. J'ai une extrême tristesse de voir que mon âme soit divisée en deux corps si faibles que le vôtre et le mien, et qu'il faille que je sois toujours malade de mes maux ou des vôtres, Voiture, Lett. 42. Mes yeux ont-ils du mal pour en donner au monde ? Molière, Éc. des f. II, 6. Considérez les maux que je souffre et qui me menacent ; voyez d'un œil de miséricorde les plaies que votre main m'a faites, Ô mon Sauveur, qui avez aimé vos souffrances en la mort, Pascal, Prière pour le bon usage des maladies, 10. Faites-moi bien connaître que les maux du corps ne sont autre chose que la punition et la figure tout ensemble des maux de l'âme, Pascal, ib. 7. Quand on se porte bien, on admire comment on pourrait faire si on était malade ; quand on l'est, on prend médecine gaiement ; le mal y résout, Pascal, Pens. VI, 16, éd. HAVET. La pauvre la Mousse a eu mal aux dents, Sévigné, 78. Il a un peu mal à la main droite, Sévigné, 474. Elle [ma fille] me mande qu'elle est mieux, qu'elle n'a point de mal à la poitrine, Sévigné, au comte de Guitaut, 18 mai 1680. Toujours assis, comme son mal le demandait, Bossuet, le Tellier. Et celle [la maladie] que nous appelons la dernière, qu'est-ce autre chose, à le bien entendre, qu'un redoublement et comme le dernier accès du mal que nous apportons au monde en naissant ? Bossuet, Mar.-Thér. Lorsqu'un mal funeste et contagieux se répandit tout à coup…, Fléchier, Duc de Mont. Ces douces ménades Qui, dans leurs vains chagrins, sans mal toujours malades…, Boileau, Sat. X. Courtois et Denyau [deux médecins], mandés à son secours… sauront bien… Lui donner sagement le mal qu'elle n'a point, Boileau, ib. Vous périssez d'un mal que vous dissimulez, Racine, Phèdre, I, 1. Philoctète est peut-être le seul sujet tragique dans lequel les maux physiques puissent être admis, Staël, Corinne, VIII, 3. Un mal cuisant déchire ma poitrine, Béranger, le Malade.

    Particulièrement, les maux, petites souffrances continuelles, par opposition à maladie. Ne soyez point en peine de ma santé, elle est délicate : un rien la dérange : souvent des maux, jamais de maladie, Maintenon, Lett. à Mme d'Aubigné, 22 oct. 1681.

    Maux de nerfs, souffrances indéterminées, synonyme de vapeurs, hypocondrie, etc.

    Mal de tête, douleur qu'on éprouve à la tête, céphalalgie. Madame eut avant-hier la fièvre jusqu'au soir, Avec un mal de tête étrange à concevoir, Molière, Tart. I, 5. Elle feignit un mal de tête ; et l'on sait qu'un mal de tête, pour une jolie femme, est une manière civile de congédier les importuns, Marmontel, Cont. mor. Heur. div.

    Mal du pays, maladie du pays, la nostalgie. Ces bals charmants où les femmes sont reines, J'y meurs, hélas ! j'ai le mal du pays, Béranger, Nostalgie. Mon ami, tu es triste, tu te promènes seul tu fuis tes camarades, tu as le mal du pays, Courier, Seconde lett. partie.

    Chaud mal, la fièvre chaude, le transport au cerveau.

    Fig. Tomber de fièvre en chaud mal, tomber d'un petit accident en un plus grand, voir empirer sa condition. C'est tomber de fièvre en chaud mal, Scarron, Virg. I.

    Allez, Dieu vous garde de mal, se dit à quelqu'un que l'on congédie, que l'on reconduit.

    Faire mal à, causer de la douleur, de la maladie. Mon cœur… N'entend pas que mes yeux fassent mal à personne, Molière, l'Étourdi, I, 3. La bise de Grignan [qui règne à Grignan, en Provence]… me fait mal à votre poitrine, Sévigné, 29 déc. 1688.

    Faire mal se dit aussi de la partie qui est douloureuse. Le doigt me fait mal. Le genou m'a fait mal toute la nuit.

    Se faire mal, se blesser. Elle s'est fait mal au doigt. Sous prétexte que je me fais mal aux yeux, Sévigné, 239.

  • 6 Familièrement, un mal, un furoncle, un clou, un abcès, une tumeur. Je ne puis continuer ma lettre : on parle d'ouvrir le mal du roi en quatre, Maintenon, Lett. au card. de Noailles, 7 sept. 1697.
  • 7Mal joint à une autre qualification sert à dénommer diverses maladies ou souffrances.

    Mai des ardents, maladie qui paraît avoir été une affection gangréneuse, caractérisée surtout par des destructions de la peau et des membres ; cette affection a régné à diverses reprises d'une manière épidémique, pendant le moyen âge.

    Mal d'aventure, nom donné à de petits abcès qui surviennent près d'un des ongles de la main.

    On donne aussi aux panaris le nom de mal d'aventure.

    Mal caduc, mai Saint-Jean, mal sacré, haut mal, l'épilepsie.

    Mal chimique, nom donné par les ouvriers à la nécrose de la mâchoire inférieure causée par le travail prolongé dans les fabriques d'allumettes phosphorées ou allumettes chimiques.

    Mal de cœur, envie de vomir, nausées. À moitié chemin j'eus un grand mal de cœur, Sévigné, 58.

    Mal de cœur, maux de cœur, symptôme de grossesse.

    Fig. Mal de cœur, dégoût de quelque chose ou de quelqu'un. Parlons un peu de votre frère, ma fille, il est d'une faiblesse à faire mal au cœur ; il est tout ce qu'il plaît aux autres, Sévigné, 44. Il me vient tout conter, en disant qu'il se fait mal au cœur à lui-même ; je lui dis qu'il me fait mal au cœur aussi, je lui fais honte, je lui dis que ce n'est point la vie d'un honnête homme, Sévigné, ib.

    Mal d'enfant, les douleurs d'une femme qui accouche. Une montagne en mal d'enfant, La Fontaine, Fabl. V, 10.

    Mal de Fiume ou scherlievo, voy. ce mot.

    Mal français, voy. mal de Naples.

    Mal de gorge des prédicateurs, angine glanduleuse ou granuleuse.

    Mal de mâchoire, nom vulgaire donné au trismus.

    Mal de mer, indisposition à laquelle beaucoup de personnes sont sujettes lorsqu'elles vont sur mer, et qui est caractérisée par des désordres d'estomac.

    Mal de mère, l'hystérie.

    Mal de misère, nom donné par quelques médecins à la pellagre.

    Mal de montagne, l'ensemble des phénomènes qui se manifestent lors de l'ascension sur les hautes montagnes.

    Mal de mort, nom d'une espèce de lèpre, dans laquelle les parties affectées prenaient une couleur livide et semblaient dans un état complet de mortification.

    Mal de Naples, nom que les Français donnent à la syphilis, parce que des soldats l'apportèrent, dit-on, autrefois du siége de Naples, vers la fin du XVe siècle ; les Italiens, au contraire, qualifient cette maladie de mal français. Tu pourras lui dire, que sans ma maladie de Naples (qui n'était pas le mal de Naples), j'aurais fait il y a six mois cette demande, Courier, Lett. 27 juill. 1808.

    Mal de rose ou mal des Asturies, sorte de pellagre, ainsi dite parce qu'elle donne une teinte rouge à la peau et qu'elle règne dans les Asturies.

    Mal rouge de Cayenne, espèce d'éléphantiasis.

    Mal Saint-Antoine, sorte d'érésipèle.

    Mal Saint-Jean, la chorée. Mal Saint-Lazare, l'éléphantiasis.

    Mal Saint-Main, nom donné tantôt à la gale, tantôt à la lèpre.

    Mal de Saint-Roch, maladie des paveurs et tailleurs de pavés de Paris et de Fontainebleau, et qui provient de l'introduction de la poussière du grès dans les poumons.

    Mal de Siam, nom donné à la fièvre jaune, parce qu'on a cru que, dans le XVIIe siècle, elle avait été apportée de Siam dans les îles de l'Amérique ; ce qui est une erreur.

    Mal vénérien, la syphilis.

    Populairement. Avoir du mal, avoir la syphilis. Donner du mal, gagner du mal, communiquer la syphilis, être atteint de syphilis. Il s'emporta, et dit… que, si sa femme avait du mal, elle était…, Sévigné, 21 août 1675.

    Mal vertébral de Pott, carie d'une ou de plusieurs vertèbres, ainsi appelée parce que Pott, chirurgien anglais, en a donné une excellente description.

  • 8Mal est employé dans le langage des vétérinaires pour désigner diverses affections des animaux.

    Mal d'âne, crevasses qu'on remarque souvent autour de la couronne du sabot des bêtes chevalines, de l'âne surtout, lorsque ces animaux sont atteints d'eaux aux jambes.

    Mal de bois ou mal de brout, maladie qui attaque les bestiaux qu'on mène paître, au printemps, dans les bois.

    Mal de cerf, maladie du cheval qui ne paraît pas différer du tétanos.

    Mal d'encolure, nom générique des blessures de la partie supérieure de l'encolure produites par des contusions ou des frottements répétés.

    Mal de feu ou mal d'Espagne, hépatite aiguë des animaux, accompagnée d'inflammation des méninges. On l'appelle aussi vertige idiopathique.

    Mal de foie, nom vulgaire qui a été donné à la pourriture du mouton ou cachexie aqueuse.

    Mal de garrot, meurtrissure ou blessure faite au garrot du cheval.

    Mal de pied, nom vulgaire donné au piétin.

    Mal de rognon, contusion sur les apophyses épineuses des dernières vertèbres dorsales et des vertèbres lombaires, chez les bêtes chevalines.

    Mal de taupe, tumeur qui survient à la région de la nuque chez le cheval, et même chez le bœuf, où elle porte le nom d'écrouellet.

    Mal de tête de contagion, nom donné tantôt à l'anasarque, tantôt à la morve gangréneuse chez le cheval.

  • 9 Terme de magnanerie. Mal de vers ou mal de bassine, affection observée dans les fabriques où l'on dévide les cocons de soie.

    Terme de fauconnerie. Mal subtil, espèce de phthisie qui attaque les oiseaux de proie.

  • 10Peine, travail. Il a eu bien du mal à l'armée. Le lendemain aura soin de lui-même ; à chaque jour suffit son mal, Sacy, Bible, Évang. St Math. VI, 34.

    Se donner du mal, prendre de la peine. Il s'est donné beaucoup de mal pour faire réussir cette affaire. Que de mal nous nous donnons Pour tromper des infidèles ! Béranger, Chapons.

    Fig. Avoir du mal, bien du mal à faire une chose, la faire avec répugnance, avec chagrin. Il a eu bien du mal à vous quitter.

  • 11Dommage, perte, calamité. La gelée a fait beaucoup de mal aux vignes. Quel mal nous fait sa vie ? Corneille, Poly. I, 4. Sur les coussins où la douleur l'enchaîne, Quel mal, dis-tu, vous fait ce roi des rois ? Béranger, Octavie.
  • 12Inconvénient. Il n'y a point de mal qu'elle médite un peu là-dessus, Guez de Balzac, liv. VII, lett. 47. Je ne saurais choisir un plus parfait berger ; Tout le mal que j'y trouve est qu'il est étranger, Racan, Berger. I, sc. 3, Arténice. Le mal est que dans l'an s'entremêlent des jours Qu'il faut chômer…, La Fontaine, Fabl. VIII, 20. Le mal est qu'en rimant, ma muse un peu légère Nomme tout par son nom, et ne saurait rien taire, Boileau, Disc. au roi. Le mal de changer est-il toujours moins grand que le mal de souffrir ? Montesquieu, Esp. XIX, 18. Quel mal y aurait-il à prévenir un forfait par de l'indulgence pour une faiblesse ? Diderot, Claude et Nér. I, 48. Quand on le découvrirait, le grand mal ! est-il défendu d'aimer la campagne, la solitude ? Genlis, Ad. et Théod. t. III, p. 186, dans POUGENS.

    Il n'y a que demi-mal, le mal est peu considérable.

  • 13Paroles désavantageuses tenues sur quelqu'un ou quelque chose ; et aussi interprétation défavorable donnée à quelque chose. C'est un homme qui prend tout en mal. La médisance tourne en mal les paroles innocentes. Pourquoi expliquer en mal ce qui est dit indifféremment ? Qu'on parle bien ou mal du fameux cardinal ; Ma prose ni mes vers n'en diront jamais rien ; Il m'a fait trop de bien pour en dire du mal, Il m'a fait trop de mal pour en dire du bien, Corneille. Ce poëme a tant d'illustres suffrages qui lui donnent le premier rang parmi les miens, que je me ferais trop d'importants ennemis si j'en disais du mal, Corneille, Cinna, Exam. Parbleu ! tous les autres comédiens qui étaient là pour la voir [une pièce], en ont dit tous les maux du monde, Molière, Critique, 7. Avec ces premiers [les confesseurs] on est comme Mlle d'Aumale, on aime mieux dire du mal de soi que de n'en point parler, Sévigné, 238. Le mal qu'on dit d'autrui ne produit que du mal, Boileau, Sat. VII. On m'a dit aujourd'hui du mal de la santé de M. d'Argenson ; c'est le seul mal qu'on puisse dire de lui, Voltaire, Lett. Mme du Deffant, 26 juill. 1764. Je serais fort étonné si le roi son père [de Frédéric II] revenait de sa maladie ; il faut qu'il soit bien mal, puisqu'il est défendu en Prusse de parler de sa santé ni en bien ni en mal, Voltaire, Lett. d'Argenson, 30 mars 1740. Dites, pour l'achever, du mal de la maison, Gresset, Méchant, III, 9. La louange la plus flatteuse pour une jolie femme, c'est le mal qu'on lui dit de ses rivales, Marmontel, Cont. mor. 4 flac.

    On lit dans la Bruyère, VIII : Pensant mal de tout le monde, il n'en dit de personne. Il serait plus correct de dire : Pensant du mal de tout le monde.

  • 14Mal, adv. Autrement qu'il ne faut. Quel espoir mal conçu te rapproche de moi ? Aurais-je de l'amour pour qui n'a point de foi ? Corneille, la Place royale, V, 8. Est-on sot, étourdi, prend-on mal ses mesures, On pense en être quitte en accusant son sort, La Fontaine, Fabl. V, 11. Bien qu'au moins mal qu'il pût il ajustât l'histoire, Le loup fut un sot de le croire, La Fontaine, ib. XI, 6. Pour modérer leur folie au moins mal qu'il se pouvait, Pascal, Pens. VI, 52, édit. HAVET. Un as mal à propos jeté, Boileau, Sat. X. Paix ! crois-moi, ne parle guère ; J'en sais qui, sans dire mot, N'ont pas mal fait leur affaire, Chaulieu, Dialogue entre deux perroquets. Un amant en grand deuil a toujours son mérite ; Et, quand, comme Carlin, on serait mal formé, Du moment qu'on hérite, on est sûr d'être aimé, Regnard, le Distr. II, 7. Mais qui sait mal, n'apprendra jamais bien, Rousseau J.-B. Épît. II, 6. Vous ne pouvez plus être occupé à bien dire, quand vous êtes effrayé par la crainte de dire mal, Montesquieu, Déf. Espr. lois, part. 3. Pour bien assurer qu'une chose est mal, il faut voir en même temps qu'on pourrait mieux faire, Voltaire, Philos. Traité de métaph. ch. II. Mais tremblez en formant ces nœuds mal assortis, Voltaire, Alz. I, 4. Comment me prouverez-vous que ces mauvais penchants dont vous prétendez le guérir [l'enfant], ne lui viennent pas de vos soins mal entendus, bien plus que de la nature ? Rousseau, Ém. II.

    Mal, dans un sens négatif. Toutefois j'aurais tort de jeter dans les cœurs, L'avis étant mal sûr, de paniques terreurs, Corneille, Cid, II, 7. Et nous aurions le ciel à nos vœux mal propice…, Corneille, Hor. V, 3. Et la vertu timide est mal propre à régner, Corneille, Perthar. IV, 3. Il semble qu'ils sortent d'ici mal satisfaits, Molière, Préc. 2. Qu'ils viennent essayer leur main mal assurée, Racine, Brit. IV, 3.

    Mal fait, dont le corps est mal fait, qui a mauvaise tournure. Une personne aussi malfaisante que mal faite, Guez de Balzac, I, 340.

    Substantivement. Peux-tu me conseiller de commettre un forfait, D'abandonner Lélie et prendre ce mal fait ? Molière, Sgan. 2.

    On écrit quelquefois en un seul mot : malfait.

    Faire mal, exécuter d'une manière défectueuse. Il fait mal tout ce qu'il fait.

    C'est mal dire, c'est s'exprimer d'une façon inexacte. Chardon de la Rochette… se présente à l'Académie, qui toute d'une voix le refuse ; non, c'est mal dire : on ne fit nulle attention à lui, Courier, Lettre à messieurs de l'Académie.

    Cote mal taillée, voy. COTE.

    Terme de blason. Mal taillé, se dit des pièces grossièrement dessinées.

    Terme de chasse. Un animal est mal mené lorsqu'il a beaucoup couru et qu'il est sur ses fins.

    Mal à l'aise, incommodé tant au physique qu'au moral. Mal à l'aise en présence d'une personne qu'il avait offensée. Pris dans un corps mal fait, où je suis mal à l'aise, Hugo, le Roi s'amuse, II, 2.

  • 15Se mettre mal, s'habiller sans goût, voy. METTRE.
  • 16Prendre mal une chose, s'en offenser. Il a mal pris la réponse qu'on lui a faite.

    Prendre mal un passage, n'en pas saisir le véritable sens.

    Parler mal, dire du mal. [Il] Parle bien de lui-même et mal de tout le monde, Gresset, Méchant, IV, 6.

  • 17Se trouver mal, tomber en faiblesse, en défaillance, et aussi éprouver du malaise.

    Se trouver mal d'une chose, en éprouver du dommage, de l'inconvénient.

    Mal en point, voy. POINT.

  • 18Être mal avec quelqu'un, être brouillé avec lui. Je vous assure que ceux qui disent et qui écrivent que vous êtes mal avec moi sont mal instruits : vous n'y avez jamais été si bien, Maintenon, Lett. au card. de Noailles, 24 mars 1706. C'est mon avis ; si vous ne le suivez pas, nous n'en serons pas plus mal ensemble, Maintenon, Lett. à M. d'Aubigné, t. II, p. 146, dans POUGENS. Il est vrai que j'étais née douce, et qu'avec le caractère que j'avais, rien ne m'aurait plus inquiétée que de me sentir mal dans l'esprit de quelqu'un, Marivaux, Marianne, 10e part. L'opinion publique, la créance de tous les ligueurs était qu'il fallait tuer son roi, s'il était mal avec la cour de Rome, Voltaire, Henr. Évén. sur lesquels elle est fondée.

    Mettre quelqu'un mal avec, le brouiller avec. Il était impossible de le mettre mal [Aristippe] avec eux [les rois], Fénelon, Aristippe.

    Se mettre mal avec quelqu'un, se brouiller avec lui. Être mal en cour, n'avoir pas la faveur du prince. Ce sont apparemment mes ennemis, madame, qui vous ont fait ces contes ; ils vont criant que je suis mal en cour, Voltaire, Taureau blanc, 3.

    Fig. Trop mal avec la fortune pour pouvoir en soutenir la dépense [d'une certaine existence], Hamilton, Gramm. 5.

    N'être pas mal avec une dame, se dit dans un style cavalier pour faire entendre qu'on a touché son cœur. Je suis venu à la campagne, me dit-il, pour faire plaisir à la maîtresse de la maison, avec laquelle je ne suis pas mal, Montesquieu, Lett. pers. 48.

  • 19Être mal, être extrêmement malade.

    Être très mal, être en grand danger. Sa fille a été très mal, Sévigné, 34. J'ai pu vous dire, madame, j'ai été très mal, je le suis encore, parce que la chose est vraie, et parce que l'expression est très conforme à nos décisions académiques ; ce le signifie évidemment : je suis très mal encore ; ce le signifie toujours la chose dont on vient de parler, Voltaire, Lett. Mme du Deffant, 30 mars 1775.

    Être au plus mal, être dans un état désespéré.

  • 20Être mal, être dans une mauvaise situation ; se mettre mal, se mettre dans une mauvaise situation. Tout le fruit qu'on en cueille est de se mettre mal, Et d'avancer par là les desseins d'un rival, Molière, le Dép. I, 2. Vous voilà mal, au moins, si j'en crois l'apparence, Molière, Tart. V, 1. Nous sommes mal, monsieur, dans nos affaires [il s'agit de la possibilité d'une arrestation], Molière, Mis. IV, 4. Ceux qui sont mal dans leurs affaires, Pascal, Prov. VIII. Nous ne sommes pas si mal que nos ennemis le croient, et que nous le disons souvent nous-mêmes, Maintenon, Lett. au duc de Noailles, 3 mai 1705. Ce libraire était mal dans ses affaires ; M. de Voltaire lui prêta dix mille livres, Voltaire, Comment. œuvr. aut. Henr.

    Être mal en, être peu pourvu de. Un de leurs citoyens, Noble, à ce que l'on dit, mais un peu mal en biens, Corneille, le Ment. V, 1. Vous voilà bien mal en preuves, Pascal, Prov. XVI.

    Être mal en, signifie aussi que ce qu'on a est mauvais. Il est mal en femme. Tous [les amants de Pénélope] s'écrièrent que Télémaque était bien mal en hôtes : l'un, dirent-ils, est un mendiant, et l'autre nous donne des extravagances pour des prophéties, Fénelon, t. XXI, p. 469.

  • 21Dans le langage familier, être mal se dit pour exprimer que le visage est laid, que la tournure est laide. Cette jeune fille est mal. Cette jeune fille n'est pas mal.

    On le dit aussi des choses. Ce vin n'est pas mal. Ce thème n'est pas mal.

  • 22Pas mal, se dit familièrement pour approuver quelque chose. Pas mal, vraiment. Pas mal, pour un barbare, Voltaire, Dict. phil. Dieu.

    Dans le langage familier, pas mal signifie aussi en assez bon nombre, en assez grande quantité. Il n'y avait pas mal de curieux à ce spectacle. Pour une jeune fille, elle n'en sait pas mal ; De ces ruses d'amour la croirait-on capable ? Molière, Éc. des maris, II, 8. Tu n'es pas mal impertinent, Baron, Homme à bonnes fort. I, 5. Après quelques plaintes sur la fausseté des calomnies et l'indécence des outrages répandus dans un mémoire signé, dit-on, Beaumarchais Malbête [Me Malbeste était l'avocat de Beaumarchais], le gazetier de France entreprend de se justifier par un petit manifeste signé Marin, qui n'est pas Malbête, Beaumarchais, Supplém. au 1er mém. à cons. note 1.

PROVERBES

Mal vit qui ne s'amende pas, c'est-à-dire il vient un temps où il faut se résoudre à changer de vie.

Mal sur mal n'est pas santé, se dit en parlant de plusieurs afflictions et infortunes qui arrivent coup sur coup.

Chacun sent son mal, se dit en se plaignant de quelque affliction secrète dont on ne veut pas dire la cause, et aussi en signifiant qu'on se fait seul idée du mal qu'on ressent.

Aux grands maux les grands remèdes.

Mal d'autrui n'est que songe, c'est-à-dire on est bien moins touché du mal d'autrui que du sien propre.

REMARQUE

Avec un participe présent, le participe s'accorde si mal est devant, et reste invariable si mal est après. Des personnes mal pensantes ; des personnes pensant mal. Et qu'il est aux enfers des chaudières bouillantes Où l'on plonge à jamais les femmes mal vivantes, Molière, École des femmes, III, 2.

HISTORIQUE

Xe s. Elle n'out eskoltet les mals conselliers, Eulalie. Ne aiet niuls male voluntatem contra sem peer [contre son pair], Fragm. de Valenc. p. 469. De paganis e de mals christianis, ib. E sis [si les] penteiet [repentait] de cil mal que fait habebant, ib.

XIe s. Dès or [il] comence le conseil que mal prist, Ch. de Rol. XI. Mal seit del cuer [cœur] qui el piz [poitrine] se couarde, ib. LXXXV. Come en Espaigne tu venis [vins] mal, seignur ! ib. CCIV. Ne bien ne mal [il] ne respond [à] son nevu, ib. X. Mult grant mal font et cil duc et cil conte, ib. XXVIII. Il dist après : paien, mal aies-tu ! ib. CXLIV. Ensemble aurons et le bien et le mal, ib. CLVII. De nos Franceis [il] va disant si mals mots, ib. XCI. Male chançon n'en deit estre chantée, ib. CXI.

XIIe s. Cist maus [ce mal] est grois [grief], Roncisv. 25. Qu'après nos mors n'en soit dit negun mal, ib. 49. Si Deu plaist et je vif, je vous mettrai à mal, ib. 193. Quant je fui mal à [avec] Karlon au vis fier, ib. 161. Vendus nous a par male traïson, ib. 84. Onques en lor jouvente [ils] ne firent se mal non, Saxons, III. Pour lor bonté [je] le di, ne nul mal [je] n'i entent, ib. XX. S'onques grans biens dut estre desserviz [mérité] Por mal avoir, bien doi merci atendre, Couci, V. Je ne doi pas amors grant mal vouloir, S'à la plus bele dou mont [du monde] mon cuer rent [je rends mon cœur], ib. IX. J'aim mieux ainsi soufrir et endurer Ces très douz maus…, ib. X. Et qui mal quiert, il doit bien mal souffrir, ib. X. Et quant mi mal li [à elle] sont bel et plaisant, ib. X. Biax niés [neveu], dist-il, or vait de mal en pis : Se nel trovons, nos sommes mal baillis, Raoul de C. 309.

XIIIe s. Et sachiés que nous ne venismes mie ci pour mal faire, mais pour vous aidier et desfendre, Villehardouin, LXVIII. Vostre cler vis [visage], qui sembloit flor de lis, Est si alés ore de mal en pis…, Quesnes, Romanc. p. 108. Si qu'ele fait les bons pour maus [méchants] tenir, Hues de la Ferté, Romanc. p. 184. Car li vilains le dist, et s'est vertés [c'est vérité], Que trop vient tost qui mal doit aporter, Leroux de Lincy, Prov. t. II, p. 492. Il establi les eves de la mer Rouge aussi comme en un boucel [outre, in utre], si que mal ne firent au pueple qui passoit, Psautier, f° 93. De deux maux doit en [on] prandre lou meilleur, Merlin, f° 65, recto. Et Berte le reçoit, qui mal n'i a pensé, Berte, X. [Elle] Prent pour Dieu plus en gré tous les maus qu'ele endure, ib. XLII. Car ele n'ot nouvele qui en mal ne se mue, ib. LXXX. Mal semble que je soie de lignage royal, ib. XXVI. Dame, ce dit Margiste, de male heure sui née, ib. LXXXII. Et li baron se partirent et ralerent cascuns [chacun] en sa tere à mesaise de cuer [cœur], pour çou qu'il n'avoient mie acompli lor volonté et avoient aquis la male amour la roine, Chr. de Rains, p. 189. Mariages est maus [mauvais] liens, la Rose, 8871. Et plus en gré sunt receü Li biens dont l'en a mal eü, ib. 2614. Quant il pleut le soir et fait mal tens de nuit, Joinville, 230. Par male avanture, au tourner que je fiz ma teste…, Joinville, 256. Taillebours, qui siet sus une male riviere que l'en appele Tarente [Charente], Joinville, 206. Quant aucuns est trovés mors, et il n'apert sor li nul signal pour lequel le [la] mors li soit venue, on doit mix [mieux] croire qu'il soit mort de mal d'aventure qu'autrement, Beaumanoir, LXIX, 14. Bestes mues n'ont nul entendement, qu'est biens ne qu'est maus [mal], Beaumanoir, LXIX, 6.

XIVe s. Et avecques ce ils voient que les fortunes d'unes meismes personnes sont variables et sont males et après bonnes, Oresme, Eth. 23. Se aucun fiert sanz ce que il soit courcié [courroucé], il fait plus mal que celui qui fiert pour ce que il est courcié, Oresme, ib. 209. Mal de l'heure que l'acointai, Chastelain de Couci, V. 2593.

XVe s. Sachez que monseigneur d'Anjou me veut grand mal pour la garnison de Lourdes que vous tenez, Froissart, II, III, 10. Par saint Denis, repondirent les chevaliers, sire, vous dites voir ; et mal ait qui fuira, Froissart, I, I, 327. Les choses iront si mal que les Turcs et les Tartares conquerront toute Grece et convertiront à leur loi, Froissart, II, III, 25. Et moult souvent par trop boire… ils avoient… si mal en leurs testes que ils ne se pouvoient aider tout le jour, Froissart, II, III, 34. Je deconfirai Jean Lyon sans coup ferir, et le mettrai si mal du comte, qu'oncques n'en fut si bien que il en sera mal, Froissart, II, II, 52. Toutefois, tout bien considéré, ne veoient-ils point de mal à lui demander…, Froissart, II, III, 19. Et quand on dit à Clisson ce qu'il falloit qu'il feist… ou autrement il seroit en grand danger de sa vie, il luy feit grand mal de l'accorder, Juvénal Des Ursins, Charles VI, 1387. J'ai maintes fois ouy dire : qui le bien laisse et le mal prent, il fait follie à escient, Perceforest, t. IV, f° 113. Se puet chascun net maintenir qui veult, Ne pour nul grief ne doit à mal tourner : Fay ce que doiz et aviengne que peut, Deschamps, Ball. Fais ce que dois. Le roy, à qui il suffisoit d'avoir joué son personnage… ne leur fist aucune malle responce, mais seullement leur dist…, Commines, IV, 8. Qui bien ne mal ne peut souffrir à grant honneur ne peut venir, J. de Saintré, p. 136, dans LACURNE.

XVIe s. Mal pense, qui ne repense, H. Estienne, Précellence, p. 197. Ores me sont courroucez ennemis, Me regardans de mal œil en travers, Amyot, Solon, 26. Le territoire estoit si maigre, qu'à male peine pouvoit-il rapporter pour nourrir ceulx qui le labouroient, Amyot, ib. 42. Il luy feit mal de veoir ceste belle image prisonniere entre les mains des barbares, Amyot, Thém. 55. Une autre fois il dit au mesme lieu tous les maulx du monde de luy, Amyot, Cicéron, 31. La vie n'est de soy ny bien ny mal ; c'est la place du bien et du mal, Montaigne, I, 86. J'en feus si mal, que j'en cuiday remourir, Montaigne, II, 58. Ho, dist-il, vous n'estes tant mal que vous dictes ; non, ou je suys bien trompé à vostre physiognomie, Rabelais, Pant. II, 21. Ha, malemort, nous as-tu tollu le plus parfaict des hommes ! Rabelais, ib. II, 30. Le mal feut plus fort que les remedes, Rabelais, ib. IV, 17. De choses mal acquises le tiers hoir ne jouira, Rabelais, ib. III, 1. Non pas par mal [par méchanceté], mais en se jouant, Nuits de Straparole, t. I, p. 116, dans LACURNE. D'aucuns feust nommé le mal de Naples, la grosse verolle ; les uns l'ont appellé le mal françois ; et plusieurs autres noms a eu la dite maladie ; mais de moi, je l'appelle le mal de celui qui l'a, Hist. du chev. Bayard, p. 56, dans LACURNE. Il [le duc d'Orléans, fils de François 1er] alloit plus viste que monsieur le Dauphin son frere, il estoit prompt, bouillant, et aimant à faire tousjours quelque petit mal, Brantôme, Cap. fr. t. I, p. 340, dans LACURNE. À peine endure mal qui ne l'a appris, Cotgrave Il est tost deceu qui mal ne pense, Cotgrave Tel se plaint qui n'a point de mal, Cotgrave Autant pleure mal batu que bien batu, Cotgrave Mal fait qui ne parfait, Cotgrave Mal poise qui ne contrepoise, Cotgrave Mal soupe qui tout disne, Cotgrave Qui mal entend mal respond, Cotgrave Mal se joue qui fiert [frappe] la joue, Leroux de Lincy, Prov. t. II, p. 343. À mal faire n'y gist qu'amende [réparation], Leroux de Lincy, ib. p. 344.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

MAL. Ajoutez :

23Mal à pied, voy. MAL-À-PIED au Supplément.

HISTORIQUE

XVIe s. Ajoutez : Et lors commença en la navire le mal de mer [scorbut], dont bien les deux tiers de l'equipage fut affligé, Relation du capitaine de Gonneville, du 19 juin 1505.

Version électronique créée par François Gannaz - http://www.littre.org - licence Creative Commons Attribution

Encyclopédie, 1re édition (1751)

MAL, le, s. m. (Métaphysiq.) C’est tout ce qui est opposé au bien physique ou moral. Personne n’a mieux traité ce sujet important que le docteur Guillaume King, dont l’ouvrage écrit originairement en latin, a paru à Londres en anglois, en 1732, en 2 vol. in-8°. avec d’excellentes notes de M. Edmond Law ; mais comme il n’a point été traduit en françois, nous croyons obliger les lecteurs en le leur faisant connoître avec un peu d’étendue, & nous n’aurons cependant d’autre peine que de puiser dans le beau dictionnaire de M. de Chaufepié. Voici l’idée générale du système de l’illustre archevêque de Dublin.

1°. Toutes les créatures sont nécessairement imparfaites, & toûjours infiniment éloignées de la perfection de Dieu ; si l’on admettoit un principe négatif, tel que la privation des Péripatéticiens, on pourroit dire que chaque être créé est composé d’existence & de non-existence ; c’est un rien tant par rapport aux perfections qui lui manquent, qu’à l’égard de celles que les autres êtres possedent : ce défaut, ou comme on peut l’appeller, ce mélange de non-entité, dans la constitution des êtres créés, est le principe nécessaire de tous les maux naturels, & rend le mal moral possible, comme il paroîtra par la suite.

2°. L’égalité de perfection dans les créatures est impossible ; & l’on peut ajouter qu’il ne seroit pas même convenable de les rendre toutes également parfaites.

3°. Il est conforme à la sagesse & à la bonté divine d’avoir créé non-seulement les créatures les plus parfaites, mais encore les moins parfaites, comme la matiere : attendu qu’elles sont préférables au néant, & qu’elles ne nuisent point aux plus parfaites.

4°. En supposant de la matiere & du mouvement, il faut nécessairement qu’il y ait des compositions & des dissolutions de corps ; ou, ce qui est la même chose, des générations & des corruptions, que quelques-uns regarderont peut-être comme des imperfections dans l’ouvrage de Dieu ; il n’est pourtant pas contraire à sa sagesse & à sa bonté de créer des êtres qui soient nécessairement sujets à ces maux. Il est donc évident que quoique Dieu soit infiniment bon, puissant & sage, certains maux, tels que la génération & la corruption, avec leurs suites nécessaires, peuvent avoir lieu parmi ses œuvres ; & si un seul mal peut y naître sans supposer un mauvais principe, pourquoi pas plusieurs ? L’on peut présumer que si nous connoissions la nature de toutes choses & tout ce qui y a du rapport, aussi bien que nous connoissons la matiere & le mouvement, nous pourrions en rendre raison sans donner la moindre atteinte aux attributs de Dieu.

5°. Il n’est pas incompatible avec les perfections de l’Etre suprème d’avoir créé des esprits ou des substances pensantes, qui dépendent de la matiere & du mouvement dans leurs opérations, & qui étant unies à la matiere, peuvent mouvoir leurs corps & être susceptibles de certaines sensations par ces mouvemens du corps, & qui ont besoin d’une certaine disposition des organes pour faire usage de leur faculté de penser ; en supposant que les esprits qui n’ont absolument rien de commun avec la matiere, sont aussi parfaits que le système de tout l’univers le peut permettre, & que ceux d’un ordre inférieur ne font aucun tort à ceux d’un ordre supérieur.

6°. On ne peut nier que quelques-unes des sensations excitées par la matiere & par le mouvement, doivent être désagréables, tout comme il y en a d’autres qui doivent être agréables : car il est impossible, & même peu convenable, que l’ame puisse sentir qu’elle perd sa faculté de penser, qui seule la peut rendre heureuse, sans en être affectée. Or toute sensation désagréable doit être mise au rang des maux naturels ; & elle ne peut cependant être évitée, à moins que de bannir un tel être de la nature des choses. Que si l’on demande pourquoi une pareille loi d’union a été établie ? la réponse est parce qu’il ne pouvoit pas y en avoir de meilleure. Cette sorte de nécessité découle de la nature même de l’union des choses qui ne pouvoient exister ni ne pouvoient être gouvernées par des lois plus convenables. Ces maux ne répugnent point aux perfections divines, pourvû que les créatures qui y sont sujettes jouissent d’ailleurs d’autres biens qui contrebalancent ces maux. Il faut encore remarquer que ces maux ne viennent pas proprement de l’existence que Dieu a donnée aux créatures, mais de ce qu’elles n’ont pas reçu plus d’existence, ce que leur état & le rang qu’elles occupent dans le vaste système de l’univers ne pouvoient permettre. Ce mélange de non-existence tient donc la place du mauvais principe par rapport à l’origine du mal, comme on l’a dit ci-dessus.

7°. Le bonheur de chaque être naît du légitime usage des facultés que Dieu lui a données ; & plus un être a de facultés, plus le bonheur dont il est susceptible est grand.

8°. Moins un agent dépend des objets hors de lui, plus il se suffit à lui-même ; plus il a en lui le principe de ses actions, & plus cet agent est parfait. Puis donc que nous pouvons concevoir deux sortes d’agens, les uns qui n’agissent qu’autant qu’ils sont poussés par une force extérieure, les autres qui ont le principe de leur activité en eux-mêmes ; il est évident que ces derniers sont beaucoup plus parfaits que les premiers. On ne peut nier que Dieu ne puisse créer un agent revêtu de la puissance d’agir par lui-même, sans la détermination d’aucune cause extérieure, tant que Dieu conserve par son concours général à cet agent son existence & ses facultés.

9°. Un tel agent peut se proposer une fin, y tendre par des moyens propres à y conduire, & se complaire dans la recherche de cette fin, quoiqu’elle pût lui être parfaitement indifférente avant qu’il se la fût proposée, & qu’elle ne soit pas plus agréable que toute autre fin de la même espece ou d’une espece différente, si l’agent s’étoit déterminé à la poursuivre : car puisque tout plaisir ou bonheur dont nous jouissons consiste dans le légitime usage de nos facultés, tout ce qui offre à nos facultés un sujet sur lequel elles puissent s’exercer d’une maniere également commode, nous procurera le même plaisir. Ainsi la raison qui fait qu’une chose nous plaît plus qu’une autre, est fondée dans l’action de l’agent même, savoir le choix. C’est ce qui est expliqué avec beaucoup d’étendue dans l’ouvrage dont nous parlons.

10°. Il est impossible que toutes choses conviennent à tous les êtres, ou ce qui revient au même, qu’elles soient bonnes : car puisque les choses sont distinctes & différentes les unes des autres, & qu’elles ont des appétits finis, distincts & différens, il s’ensuit nécessairement que cette diversité doit produire les relations de convenance & de disconvenance ; il s’ensuit au moins que la possibilité du mal est un apanage nécessaire de toutes les créatures, & qu’il n’y a aucune puissance, sagesse ou bonté, qui les en puisse affranchir. Car lorsqu’une chose est appliquée à un être auquel elle n’est point appropriée, comme elle ne lui est point agréable & ne lui convient point, elle lui cause nécessairement un sentiment de peine ; & il n’étoit pas possible que toutes choses fussent appropriées à chaque être, là où les choses mêmes & les appétits varient & different nécessairement.

11°. Puisqu’il y a des agens qui sont maîtres de leurs actions, comme on l’a dit, & qui peuvent trouver du plaisir dans le choix des choses qui donnent de l’exercice à leurs facultés ; & puisqu’il y a des manieres de les exercer qui peuvent leur être préjudiciables, il est évident qu’ils peuvent choisir mal, & exercer leurs facultés à leur préjudice ou à celui des autres. Or comme dans une si grande variété d’objets il est impossible qu’un être intelligent, borné & imparfait par sa nature, puisse toûjours distinguer ceux qui sont utiles & ceux qui sont nuisibles, il étoit convenable à la sagesse & à la bonté de Dieu de donner aux agens des directions, pour les instruire de ce qui peut leur être utile ou nuisible, c’est-à-dire, de ce qui est bon ou mauvais, afin qu’ils puissent choisir l’un & éviter l’autre.

12°. Puisqu’il est impossible que toutes les créatures soient également parfaites, & même qu’il ne seroit pas à propos qu’elles fussent placées dans un même état de perfection, il s’ensuit qu’il y a divers ordres parmi les êtres intelligens ; & comme quelques-uns de ceux d’un rang inférieur sont capables de jouir des avantages de leur ordre, il s’ensuit qu’ils doivent être contens d’une moindre portion de bonheur dont leur nature les rend susceptibles, & qu’ils ne peuvent aspirer à un rang plus élevé, qu’au détriment des êtres supérieurs qui l’occupent. En effet, il faut que ceux-ci quittent leur place avant qu’un autre puisse y monter ; or il paroît incompatible avec la nature de Dieu de dégrader un être supérieur, tant qu’il n’a rien fait qui le mérite. Mais si un être supérieur choisit librement des choses qui le rendent digne d’être dégradé, Dieu sembleroit être injuste vers ceux d’un ordre inférieur, qui par un bon usage de leur liberté sont propres à un état plus élevé, s’il leur refusoit le libre usage de leur choix.

C’est ici que la sagesse & la bonté divine semblent s’être déployées de la maniere la plus glorieuse ; l’arrangement des choses paroît l’effet de la plus profonde prudence. Par-là Dieu a montré la plus complette équité envers ses créatures ; de sorte qu’il n’y a personne qui soit en droit de se récrier, ou de se glorifier de son partage. Celui qui est dans une situation moins avantageuse, n’a aucun sujet de se plaindre, puisqu’il est doué de facultés dont il a le pouvoir de se servir d’une maniere propre à s’en procurer une meilleure ; & il est obligé d’avouer que c’est sa propre faute s’il en demeure privé : d’un autre côté, celui qui est dans un rang supérieur doit apprendre à craindre, de peur qu’il n’en déchée par un usage illégitime de ses facultés. Ainsi le plus élevé a un sujet de terreur qui peut en quelque façon diminuer sa félicité, & celui qui occupe un rang inférieur peut augmenter la sienne ; par-là ils approchent de plus près de l’égalité, & ils ont en même-tems un puissant aiguillon qui les excite à faire un usage avantageux de leurs facultés. Ce conflit contribue au bien de l’univers, & y contribue infiniment plus que si toutes choses étoient fixées par un destin nécessaire.

13°. Si tout ce qu’on vient d’établir est vrai, il est évident que toutes sortes de maux, le mal d’imperfection, le mal naturel ou physique, & le mal moral, peuvent avoir lieu dans un monde créé par un être infiniment sage, bon & puissant, & qu’on peut rendre raison de leur origine, sans avoir recours à un mauvais principe.

14°. Il est évident que nous sommes attachés à cette terre ; que nous y sommes confinés comme dans une prison, & que nos connoissances ne s’étendent pas au-delà des idées qui nous viennent par les sens ; mais puisque tout l’assemblage des élémens n’est qu’un point par rapport à l’univers entier, est-il surprenant que nous nous trompions, lorsque sur la vue de cette petite partie, nous jugeons, ou pour mieux dire, nous formons des conjectures touchant la beauté, l’ordre & la bonté du tout ? Notre terre est peut être la basse-fosse de l’univers, un hôpital de foux, ou une maison de correction pour des malfaiteurs ; & néanmoins telle qu’elle est, il y a plus de bien naturel & moral que de mal.

Voilà, dit M. Law, jusqu’où la question de l’origine du mal est traitée dans l’ouvrage de l’auteur, parce que tout ce qu’on vient de dire, ou y est contenu en termes exprès, ou peut être déduit facilement des principes qui y sont établis. Ajoutons-y un beau morceau inséré dans les notes de la traduction de M. Law, sur ce qu’on prétend que le mal moral l’emporte dans le monde sur le bien.

M. King déclare qu’il est d’un sentiment différent.

Il est fermement persuadé qu’il y a plus de bien moral dans le monde, & même sur la terre, que de mal. Il convient qu’il peut y avoir plus d’hommes méchans que de bons, parce qu’une seule mauvaise action suffit pour qualifier un homme de méchant. Mais d’un autre côté, ceux qu’on appelle méchans font souvent dans leur vie dix bonnes actions pour une mauvaise. M. King ne connoît point l’auteur de l’objection, & il ignore à qui il a à faire ; mais il déclare que parmi ceux qu’il connoît, il croit qu’il y en a des centaines qui sont disposés à lui faire du bien, pour un seul qui voudroit lui faire du mal, & qu’il a reçu mille bons offices pour un mauvais.

Il n’a jamais pu adopter la doctrine de Hobbes, que tous les hommes sont des ours, des loups, & des tigres ennemis les uns des autres ; ensorte qu’ils sont tous naturellement faux & perfides, & que tout le bien qu’ils font provient uniquement de la crainte ; mais si l’on examinoit les hommes un par un, peut-être n’en trouveroit-on pas deux entre mille, calqués sur le portrait de loups & de tigres. Ceux-là même qui avancent un tel paradoxe ne se conduisent pas sur ce pié-là envers ceux avec qui ils sont en relation. S’ils le faisoient, peu de gens voudroient les avouer. Cela vient, direz-vous, de la coutume & de l’éducation : eh bien, supposons que cela soit, il faut que le genre humain n’ait pas tellement dégénéré, que la plus grande partie des hommes n’exerce encore la bienfaisance ; & la vertu n’est pas tellement bannie, qu’elle ne soit appuyée par un consentement général & par les suffrages du public.

Effectivement on trouve peu d’hommes, à moins qu’ils ne soient provoqués par des passions violentes, qui aient le cœur assez dur pour être inaccessibles à quelque pitié, & qui ne soient disposés à témoigner de la bienveillance à leurs amis & à leurs enfans. On citeroit peu de Caligula, de Commode, de Caracalla, ces monstres portés à toutes sortes de crimes, & qui peut-être encore ont fait quelques bonnes actions dans le cours de leur vie.

Il faut remarquer en second lieu, qu’on parle beaucoup d’un grand crime comme d’un meurtre, qu’on le publie davantage, & que l’on en conserve plus longtems la mémoire, que de cent bonnes actions qui ne font point de bruit dans le monde ; & cela même prouve que les premieres sont beaucoup plus rares que les dernieres, qui sans cela n’exciteroient pas tant de surprise & d’horreur.

Il faut observer en troisieme lieu, que bien des choses paroissent très-criminelles à ceux qui ignorent les vues de celui qui agit. Néron tua un homme qui étoit innocent ; mais qui sait s’il le fit par une malice préméditée ! peut-être que quelque courtisan flateur, auquel il étoit obligé de se fier, lui dit que cet innocent conspiroit contre la vie de l’empereur, & insista sur la nécessité de le prévenir. Peut être l’accusateur lui-même fut-il trompé. Il est évident que de pareilles circonstances diminuent l’atrocité du forfait, si Néron change de conduite. Au surplus il est vraissemblable que si l’on pesoit impartialement les fautes des humains, il se présenteroit bien des choses qui iroient à leur décharge.

En quatrieme lieu, plusieurs actions blâmables se font sans que ceux qui les commettent sachent qu’elles sont telles. C’est ainsi que saint Paul persécuta l’Eglise, & lui-même avoue qu’il s’étoit conduit par ignorance. Combien de choses de cette nature se pratiquent tous les jours par ceux qui professent des religions différentes ? Ce sont, je l’avoue, des péchés, mais des péchés qui ne procedent pas d’une volonté corrompue. Tout homme qui use de violence contre un autre, par amour pour la vertu, par haine contre le vice, ou par zele pour la gloire de Dieu, fait mal sans contredit ; mais l’ignorance & un cœur honnête servent beaucoup à l’excuser. Cette considération suffit pour diminuer le nombre des méchans de cœur ; les préjugés de parti doivent aussi être pesés, & quoiqu’il n’y ait pas d’erreur plus fatale au genre humain, cependant elle vient d’une ame remplie de droiture. La méprise consiste en ce que les hommes qui s’y laissent entraîner, oublient qu’on doit défendre l’état par des voies justes, & non aux dépens de l’humanité.

En cinquieme lieu, de petits soupçons font souvent regarder comme criminels des gens qui ne le sont point. Le commerce innocent entre un homme & une femme, fournit au méchant un sujet de les calomnier. Sur une circonstance qui accompagne ordinairement une action criminelle, on déclare coupable du fait même, la personne soupçonnée. Une mauvaise action suffit pour deshonorer toute la vie d’un homme.

Sixiemement, nous devons distinguer (& la loi même le fait) entre les actions qui viennent d’une malice préméditée, & celle auxquelles quelque violente passion ou quelque desordre dans l’esprit portent l’homme. Lorsque l’offenseur est provoqué, & qu’un transport subit le met hors de lui, il est certain que cet état diminue sa faute aux yeux de l’Eternel qui nous jugera miséricordieusement.

Enfin la conservation & l’accroissement du genre humain est une preuve assurée qu’il y a plus de bien que de mal dans le monde ; car une ou deux actions peuvent avoir une influence funeste sur plusieurs personnes. De plus, toutes les actions vicieuses tendent à la destruction du genre humain, du-moins à son desavantage & à sa diminution ; au lieu qu’il faut nécessairement le concours d’un grand nombre de bonnes actions pour la conservation de chaque individu. Si donc le nombre des mauvaises actions surpassoit celui des bonnes, le genre humain devroit finir. On en voit une preuve sensible dans les pays où les vices se multiplient, car le nombre des hommes y diminue tous les jours ; si la vertu s’y rétablit, les habitans y reviennent à sa suite. Le genre humain ne pourroit subsister, si jamais le vice étoit dominant, puisqu’il faut le concours de plusieurs bonnes actions pour réparer les dommages causés par une seule mauvaise ; qu’un seul crime suffit pour ôter la vie à un homme ou à plusieurs : mais combien d’actes de bonté doivent concourir pour conserver chaque particulier ?

De tout ce qu’on vient de dire, il résulte qu’il y a plus de bien que de mal parmi les hommes, & que le monde peut être l’ouvrage d’un Dieu bon, malgré l’argument qu’on fonde sur la supposition que le mal l’emporte sur le bien. Tout cela cependant n’est pas nécessaire, puisqu’il peut y avoir dix mille fois plus de bien que de mal dans tout l’univers, quand même il n’y auroit absolument aucun bien sur cette terre que nous habitons. Elle est trop peu de chose pour avoir quelque proportion avec le système entier ; & nous ne pouvons que porter un jugement très-imparfait du tout sur cette partie. Elle peut être l’hôpital de l’univers ; & peut-on juger de la bonté & de la pureté de l’air du climat, sur la vue d’un hôpital où il n’y a que des malades ? de la sagesse d’un gouvernement, sur la vue d’une maison destinée pour y héberger des fols ? ou de la vertu d’une nation, sur la vue d’une seule prison qui renferme des malfaiteurs ? Non que la terre soit effectivement telle ; mais il est permis de le supposer, & toute supposition qui montre que la chose peut être, renverse l’argument manichéen, fondé sur l’impossibilité d’en rendre raison. Cependant loin de l’imaginer, regardons plûtôt la terre comme un séjour rempli de douceurs ; « Au moins, dit M. King, j’avoue avec la plus vive reconnoissance pour Dieu, que j’ai passé mes jours de cette maniere ; je suis persuadé que mes parens, mes amis, & mes domestiques en ont fait autant, & je ne crois pas qu’il y ait de mal dans la vie qui ne soit supportable, sur-tout pour ceux qui ont des espérances d’un bonheur à venir ».

Au reste, indépendamment des preuves de l’illustre archevêque de Dublin, qui établissent que le bien, tant naturel que moral, l’emporte dans le monde sur le mal, le lecteur peut encore consulter Sherlock, traité de la Providence ; Hutcheson, On the Nature and conduct of the passions ; London, 1728 ; Leibnitz, essais de Théodicée ; Chubb’s, supplement to the vindication of God’s Moral Character, &c. & Lucas, Enquiry after Happiness.

Bayle a combattu le système du docteur King, dans sa réponse aux questions d’un provincial ; mais outre que l’archevêque de Dublin a répondu aux remarques du savant de Roterdam, il est bon d’observer que Bayle a eu tort d’avoir réfuté l’ouvrage sans l’avoir lû autrement que dans les extraits de M. Bernard & des journalistes de Léipsig. On peut encore lui reprocher en général d’avoir mêlé dans ses raisonnemens, plusieurs citations qui ne sont que des fleurs oratoires, & qui par conséquent ne prouvent rien ; la méthode de raisonner sur des autorités est très-peu philosophique dans des matieres de Métaphysique. (D. J.)

Mal, (Médecine.) On emploie souvent ce mot dans le langage médicinal & on lui attache différentes idées ; quelquefois on s’en sert comme d’un synonyme à douleur, comme quand on dit mal de tête, mal aux dents, au ventre, pour dire douleur de tête, de dents, de ventre ; d’autrefois il n’exprime qu’un certain malaise, un sentiment qui n’est point douleur, mais toujours un état contre nature, qu’il est plus facile de sentir que d’énoncer : c’est le cas de la plûpart des maux d’estomac, du mal au cœur, &c. Il est aussi d’usage pour désigner une affection quelconque indéterminée d’une partie malade. Ainsi on dit communément, j’ai mal aux yeux, à la jambe, &c. sans spécifier quel est le genre ou l’espece de maladie dont on est attaqué. Enfin on substitue dans bien des cas le mot mal à maladie, & on l’emploie dans la même signification. C’est ainsi qu’on appelle l’épilepsie mal caduc, une espece de lepre ou de galle mal-mort. On dit de même indifféremment maladie ou mal pédiculaire, maladie ou mal de Siam, &c. Toutes les autres maladies étant traitées à leur article particulier, à l’exception des deux dernieres, nous nous bornerons uniquement ici à ce qui les regarde.

Mal pédiculaire. Ce nom est dérivé du latin pediculus qui signifie poux. Le caractere univoque de cette maladie est une prodigieuse quantité de poux qui occupent principalement les parties couvertes de poils, sur-tout la tête ; quelquefois aussi ils infectent tout le corps. Les Grecs appellent cette maladie φθειριασις, du mot φθειρ qui veut dire poux, que Gallien prétend être tiré radicalement de φθινειν, corrompre ; faisant entendre par-là que les poux sont un effet de la corruption. On a vu quelques malades tellement chargés de ces animaux, que leurs bras & leurs jambes en étoient recouverts ; bien plus, ils sembloient sortir de dessous la peau, lorsque le malade en se grattant soulevoit quelque portion d’épiderme, ce qui confirmeroit l’opinion de Galien & d’Avenzoar qui pensent que les poux s’engendrent entre la peau & la chair. Outre le désagrément & l’espece de honte pour l’ordinaire bien fondée, qui sont attachés à cette maladie, elle entraîne à sa suite un symptome bien incommode, c’est l’extrème demangeaison occasionnée par ces poux. C’est cette même incommodité, que Serenus croyant bonnement qu’il n’y a rien de pernicieux ou même d’inutile, regarde comme un grand avantage que la nature tire de la présence de ces vilains animaux. Voici comme il s’exprime :

Noxia corporibus quædam de corpore nostro
Progenuit natura, volens abrumpere somnos
Sensibus admonitis vigilesque inducere curas.

Lib. de medic.

Mercuriel refute très-sérieusement cette idée & assure que cette précaution de la nature pourroit être très-bonne pour des forçats de galeres, mais qu’elle seroit très-déplacée vis-à-vis des enfans, qui sont cependant les plus ordinairement infectés de poux & sujets à cette maladie.

On pourroit établir autant d’especes de mal pédiculaire, qu’il y a de sortes de poux ; mais ces sortes de divisions toujours minutieuses, n’ont aucune utilité pour la pratique. Il y en a une qui mérite seulement quelqu’attention, c’est celle qui est occasionnée par une espece de petits poux qu’on a peine à distinguer à la vue simple. Ils sont assez semblables à des lentes, leur principal effet est de couper, de déchirer les cheveux qui tombent alors par petits morceaux. On pourroit aussi rapporter à la maladie que nous traitons, les cirons qui s’attachent aux mains, & les pénétrent, de même que les morpions, espece de poux opiniâtres, qui se cramponnent fortement à la peau qui est recouverte de poils aux environs des parties de la génération. Voyez Cirons & Morpions.

Parmi les causes qui concourent à la maladie pédiculaire, quelques-autres comptent le changement d’eau, l’interruption de quelqu’exercice habituel. Avicenne place le coït chez des personnes mal-propres ; Gallien l’usage de la chair de vipere dans ceux qui ont des sucs vicieux : cet auteur assure aussi que rien ne contribue plus à cette maladie que certains alimens. Les figues passent communément pour avoir cette propriété. Mais il n’y en a aucune cause plus fréquente que la mal-propreté : on peut regarder cette affection comme une juste punition des crasseux qui négligent de se peigner, d’emporter par-là la crasse qui s’accumule sur la tête & qui gêne la transpiration, & de changer de linge, ce qui fait qu’elle est souvent un apanage de la mire. On la contracte facilement en couchant avec les personnes qui en sont atteints. Rarement elle est principale ; on l’observe quelquefois comme symptome dans la lepre, dans la phthysie, dans les fievres lentes, hectiques, &c. La plupart des anciens auteurs ont cru que la corruption des humeurs étoit une disposition nécessaire & antécédente pour cette maladie : ils étoient dans l’idée comme leurs physiciens contemporains, que les insectes s’engendroient de la corruption ; la fausseté de cette opinion est démontrée par les expériences incontestables que les physiciens modernes ont faites ; nous pouvons cependant avancer comme certain, fondés sur des faits, que la corruption ou plutôt la dégénération des humeurs favorise la génération des poux. Sans doute qu’alors ils trouvent dans le corps des matrices plus propres à faire éclore leurs œufs. Dès qu’ils ont commencé à s’emparer d’un corps disposé, ils se multiplient à l’infini dans un très-court espace de tems ; leur nombre augmente dans un jour d’une maniere inconcevable. En général, les especes les plus viles, les plus abjectes, celles dont l’organisation est la plus simple, sont celles qui multiplient le plus abondamment & le plus vite.

Cette maladie est plutôt honteuse, desagréable, incommode que dangereuse. Il y a cependant des observations par lesquelles il conste que quelques personnes qui avoient tout le corps couvert de poux en sont mortes. Aristote rapporte ce fait d’un syrien nommé Phérecide & du poëte Alcmane. Il y a pourtant lieu de présumer que c’est moins aux poux qu’à quelqu’autre maladie dont ils étoient symptome, que la mort dans ces cas doit être attribuée. Apollonius nous a transmis une remarque d’Aristote, que dans cette maladie, lorsque le malade étoit prêt à mourir, les poux se détachoient de la tête & couroient sur le lit, les habits du moribond : on a depuis vérifié cette remarque.

Lorsque la maladie est essentielle & qu’elle est bornée à la tête, on la guérit souvent par la simple attention de la tenir bien propre, bien peignée : quelquefois l’on est obligé de couper les cheveux ; &, si malgré cela, le mal pédiculaire subsiste & qu’il s’étende à tout le corps, il y a tout lieu de soupçonner qu’il est produit, entretenu, favorisé par quelque disposition interne, par quelqu’altération dans les humeurs qu’il faut connoître, & combattre par les remedes appropriés. Les stomachiques amers sont ceux dont on use plus familierement & qui réussissent le mieux, pris intérieurement ou employés à l’extérieur. Galien vante beaucoup les pilules qui reçoivent l’aloës dans leur composition ; mais le staphisaigre est de tous ces remedes celui qu’une longue expérience a fait choisir spécialement. On l’a surnommé à cause de cette vertu particuliere herbe pédiculaire. On fait prendre intérieurement la décoction de cette plante, & on lave la tête & les différentes parties du corps infectées par les poux ; ou on fait entrer la pulpe dans la plupart des onguens destinés au même usage. La cévadille découverte depuis, a paru préférable à plusieurs médecins. Je pense que tous ces médicamens doivent ceder au mercure dont on peut faire user intérieurement & qu’on peut appliquer à l’extérieur sous forme d’onguent. L’action de ce remede est prompte, assurée & exempte de tout inconvénient. Que quelques médecins timides n’en redoutent point l’application à la tête, & dans les enfans : on est parvenu à mitiger ce remede, de façon qu’on peut sans le moindre inconvénient l’appliquer à toutes les parties, & s’en servir dans tous les âges.

Mal de dents, est une maladie commune que les chirurgiens appellent odontalgie. Voyez Odontalgie.

Le mal de dent vient ordinairement d’une carie qui pourrit l’os & le ronge au-dedans. Quant aux causes de cette carie, &c. Voyez Dent.

Quelquefois il vient d’une humeur âcre qui se jette sur les gencives. Une pâte faite de pain tendre & de graine de stramonium, & mise sur la dent affectée, appaise le mal de dent. Si la dent est creuse, & la douleur violente, une composition de parties égales d’opium, de myrrhe & de camphre réduites en pâte avec de l’eau-de-vie ou de l’esprit de vin, dont on met environ un grain ou deux dans le creux de la dent, arrête la carie, émousse la violence de la douleur, & par ce moyen soulage souvent dans le moment.

Les huiles chimiques, comme celles d’origan, de girofle, de tabac, &c. sont aussi utiles, en détruisant par leur nature chaude & caustique le tissu des vaisseaux sensibles de la partie affectée : néanmoins un trop grand usage de ces sortes d’huiles cause souvent des fluxions d’humeurs, & des abscès.

Un vesicatoire appliqué derriere une oreille ou derriere toutes deux, manque rarement de guérir le mal de dent, sur-tout lorsqu’il est accompagné d’une fluxion d’humeurs chaudes, d’un gonflement des gencives, du visage, &c. Les linimens faits avec l’onguent de guimauve, de sureau, &c. mêlé avec l’eau de vie ou l’esprit de vin camphré, sont bons extérieurement pour appaiser la douleur.

M. Cheselden parle d’un homme qui fut guéri d’un mal de dent par l’application d’un petit cautere actuel sur l’anthelix de l’oreille, après que la saignée, la purgation, la salivation par l’usage des masticatoires ; les setons, &c. avoient été inutiles. Une chose fort singuliere dans ce mal de dent, c’est que dès que la douleur devenoit violente, ou que le malade essayoit de parler, il survenoit une convulsion de tout le côté du visage où étoit la douleur.

Scoockius dans son traité du beurre, prétend que rien n’est meilleur pour conserver les dents belles & saines, que de les frotter avec du beurre : ce qui suivant M. Chambers qui apparamment n’aimoit pas le beurre, n’est guere moins dégoûtant que l’urine avec laquelle les Espagnols se rincent les dents tous les matins.

Pour prévenir & guérir le scorbut des gencives, on recommande de se laver tous les matins la bouche avec de l’eau salée. Et pour empêcher les dents de se gâter ou carier, quelques-uns emploient seulement la poudre de corne de cerf dont ils se frottent les dents, & les rincent ensuite avec de l’eau froide. On prétend que cela est préférable aux dentifrices qui par la dureté de leurs parties emportent l’émail qui couvre les dents, & les garantit des mauvais effets de l’air, des alimens, des liqueurs, &c. lesquelles occasionnent des douleurs de dents, lorsqu’elles sont usées.

Les dentifrices sont ordinairement composés de poudres de corne de cerf, de corail rouge, d’os de seche, d’alun brûlé, de myrrhe, de san-dragon, &c. Quelques-uns recommandent la poudre de brique, comme suffisante pour remplir toutes les intentions d’un bon dentifrice. Voyez Dentifrice.

La douleur de dent qui vient de la carie, se guérit en desséchant le nerf & plombant la dent : si ce moyen ne réussit pas, il faut faire le sacrifice de la dent.

Mal des ardens, (Hist. de France.) vieux mot qu’on trouve dans nos anciens historiens, & qui désigne un feu brûlant. On nomma mal des ardens dans le tems de notre barbarie, une fievre ardente, érésipélateuse, épidémique, qui courut en France en 1130 & 1374, & qui fit de grands ravages dans le royaume ; voyez-en les détails dans Mézerai & autres historiens. (D. J.)

Mal caduc. Voyez Epilepsie.

M. Turberville rapporte dans les transactions philosophiques, l’histoire d’un malade qui étoit attaqué du mal caduc. Il observa dans son urine un grand nombre de vers courts qui avoient beaucoup de jambes, & semblables aux vers à mille piés. Tant que les vers furent vivans & eurent du mouvement, les accès revenoient tous les jours ; mais aussi-tôt qu’il lui eut fait prendre une demi-once d’oximel avec de l’ellebore dans de l’eau de tanaise, les vers moururent, & la maladie cessa.

Mal de mer, (Marine.) c’est un soulevement de l’estomac, qui cause de fréquens vomissemens & un mal-être général par tout le corps, dont sont affectés ceux qui ne sont pas accoutumés à la mer, & qui pour l’ordinaire cesse au bout de quelques jours. On prétend que le mouvement du vaisseau en est une des principales causes.

Mal de cerf, (Maréchal.) rhumatisme général par tout le corps du cheval.

Mal teint, (Maréchal.) variété du poil noir. Voyez Noir.

Mal de ojo, (Hist. mod.) Cela signifie mal de l’œil en espagnol. Les Portugais & les Espagnols sont dans l’idée que certaines personnes ont quelque chose de nuisible dans les yeux, & que cette mauvaise qualité peut se communiquer par les regards, sur-tout aux enfans & aux chevaux. Les Portugais appellent ce mal quebranto ; il paroît que cette opinion ridicule vient à ces deux nations des Maures ou Sarrasins : en effet les habitans du royaume de Maroc sont dans le même préjugé.

Wikisource - licence Creative Commons attribution partage dans les mêmes conditions 3.0

Étymologie de « mal »

(Vers 980) Du latin malum, de sens identique.
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Wallon, mâ, mau ; bourguig. maul : quique maule foteugne, quelque mauvaise fortune ; mau, un mal ; picard, mau : Berry, c'est une male affaire ; mau, un mal ; provenç. mal, mau ; espagn. mal ; portug. mão, et adv. mal ; ital. malo, et adv. mate ; du lat. malus. Il y a dans le sanscrit mala, sale, avare, malina, sale, noir, mauvais ; ces sens conduisent à malus ; le sens primitif est noir, sale ; il y faut donc rattacher μέλας, μέλανος, noir.

Version électronique créée par François Gannaz - http://www.littre.org - licence Creative Commons Attribution

Phonétique du mot « mal »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
mal mal

Fréquence d'apparition du mot « mal » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « mal »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « mal »

  • On aime mieux dire du mal de soi-même que de n'en point parler.
    François, duc de La Rochefoucauld — Maximes
  • Le bien est voulu, il est le résultat d'un acte, le mal est permanent.
    Antonin Artaud — Lettre à Jean Paulhan
  • Il n'est pas difficile à un homme de faire quelques bonnes actions ; ce qui est difficile, c'est d'agir bien toute sa vie, sans jamais rien faire de mal.
    Mao ZedongMao Tsö-tongMao Tsé-toung — Citations du président Mao Tsé-Toung, XXIV
  • Il n'y a rien de bon ni de mauvais sauf ces deux choses : la sagesse qui est un bien et l'ignorance qui est un mal.
    Platon — Euthydème, 281e (traduction Méridier)
  • […] Auprès des princes il est aussi dangereux et presque aussi criminel de pouvoir le bien que de vouloir le mal.
    Jean-François Paul de Gondi, cardinal de Retz — Mémoires
  • Il y a des héros en mal comme en bien.
    François de La Rochefoucauld — Maximes
  • Père, ô Sagesse profonde Et noire, Vous savez bien À quoi sert le mal du monde, Mais le monde n'en sait rien.
    Marie Rouget, dite Marie Noël — Chants de la merci, Chant de la divine merci , Stock
  • On dit du mal des femmes pour se venger de n'en rien savoir.
    Henri Petit — Les justes solitudes
  • Le mal est un mulet ; il est opiniâtre et stérile.
    Victor Hugo — Fragments
  • C'est un péché de penser du mal d'autrui, mais c'est rarement une erreur.
    Henry Louis Mencken — A Book of Burlesques
Voir toutes les citations du mot « mal » →

Images d'illustration du mot « mal »

⚠️ Ces images proviennent de Unsplash et n'illustrent pas toujours parfaitement le mot en question.

Traductions du mot « mal »

Langue Traduction
Anglais badly
Espagnol mal
Italien sbagliato
Allemand falsch
Chinois 错误
Arabe خطأ
Portugais errado
Russe неправильно
Japonais 違う
Basque oker
Corse sbagliatu
Source : Google Translate API

Synonymes de « mal »

Source : synonymes de mal sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « mal »

Combien de points fait le mot mal au Scrabble ?

Nombre de points du mot mal au scrabble : 5 points

Mal

Retour au sommaire ➦

Partager