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Ménager

Variantes Singulier Pluriel
Masculin ménager ménagers
Féminin ménagère ménagères

Définitions de « ménager »

Trésor de la Langue Française informatisé

MÉNAGER1, verbe trans.

I. − Utiliser avec réserve, modération; économiser, épargner.
A. − [Le compl. d'obj. dir. désigne un inanimé concr. ou abstr.]
1. Utiliser quelque chose avec modération de manière à en prolonger l'usage, à en tirer un plus grand profit. Jacques Randel harassé, les jambes brisées, le ventre vide, l'âme en détresse, marchait nu-pieds sur l'herbe au bord du chemin, car il ménageait sa dernière paire de souliers, l'autre n'existant plus depuis longtemps déjà (Maupass.,Contes et nouv., t. 1, Vagabond, 1887, p.668).Il monta tout de suite se déshabiller, autant parce que ses vêtements d'apparat le gênaient toujours un peu, que pour les ménager (Montherl.,Célibataires,1934, p. 798).Ménage la pile, Jean-Louis. Le mince faisceau de la petite lampe tourne autour de la grille du parc, fait sortir un moment de l'ombre ses grands pilastres (Bernanos,Crime,1935, p. 744).
2. Epargner, employer quelque chose avec économie de manière à en dépenser le moins possible. Ménager sa fortune. Ceux-là fondent sur la langue. D'habitude maman ne les fait pas trop mal. Pourtant ce n'est plus ça. Elle doit ménager la crème (Renard,Poil Carotte,1894, p. 192).Il enflamma un peu, très peu de son alcool (il le ménageait pour confire ses nouveaux serpents) (Giraudoux,Suzanne,1921, p. 207).Nos pères ne charpentaient qu'avec du chêne. Ils ne ménageaient point le bois. Je connais des habitations où les combles ont l'aspect de forêts pétrifiées (Pesquidoux,Livre raison,1925, p. 141).
Région. (Canada). Ménager sur.Économiser. Ménager sur la nourriture (Fichier TLFQ).
3. Au fig. User d'une chose, l'employer avec mesure, modération. Ils s'accusèrent d'avoir été trop ambitieux, et ils résolurent de ménager désormais leur peine et leur argent (Flaub.,Bouvard, t. 1, 1880, p. 44):
1. Est-ce qu'on ne pourrait pas laisser mon père prendre ses repas calmement, et moi aussi par surcroît? Est-ce que vous croyez que nous n'avons pas d'autres soucis, dit-il sans ménager sa violence. Si c'est nécessaire, j'exigerai qu'on se taise pendant que mon père mange. Druon,Gdes fam., t. 2, 1948, p. 103.
Proverbe. Se ménager une poire pour la soif. Garder une poire pour la soif (v. garder II A 2 e). [Il] avait eu soin d'envoyer six cent mille francs en Angleterre, une poire pour la soif qu'il se ménageait à toute occasion (Maupass.,Contes et nouv., t.2, Boule de suif, 1880, p. 123).
B. − P. ext.
1. [Le compl. d'obj. dir. désigne des pas, des gestes, des paroles de qqn] Mesurer, utiliser avec économie, mesure. Ménager les mots inutiles, les termes. Une autre vache de locataire arrivait. Plongé dans un demi-sommeil, il ne ménageait plus ses expressions (Dabit,Hôtel Nord,1929, p. 44).V. cocuage ex.
2. Vous dites qu'elle vous a offert de se tuer avec vous. Cette offre, vous ne deviez pas l'accepter. Nous n'en sommes plus à ménager les mots. C'est à un abominable égoïsme que vous la sacrifiez. Bourget,Sens mort,1915, p. 271.
[Gén. à la tournure négative] Ne pas ménager qqc. à qqn.Ne pas ménager les allusions à qqn. Christophe ne lui ménageait pas les remontrances: elle les écoutait avec une humilité touchante, qui le désarmait (Rolland,J.-Chr., Foire, 1908, p. 749).Prince, démobilisé, venait de rompre une nouvelle fois avec sa mère, et, sans le sou, en quête d'une profession élégante, prenait des airs ravis et confus, en parlant d'une «dame du monde», qui ne lui ménageait pas ses bontés (Arland,Ordre,1929, p.261).[Il] tomba (...) de haut lorsqu'il apprit de la bouche même de MgrDuberville que le nouvel évêque préférait l'ancien plain-chant. M. Meisson avait l'esprit caustique, la dent dure. Il ne ménagea point les sarcasmes à l'évêque (Billy,Introïbo,1939, p.58).
2. [Le compl. d'obj. dir. désigne un organe, une fonction, une partie du corps hum.] Prendre soin de, éviter de fatiguer. Ménager son estomac, son foie, ses nerfs, son souffle, sa voix, ses cordes vocales; dentifrice qui ménage les gencives. Je vous supplie de ménager votre santé durant la convalescence et de ne point la compromettre de nouveau par un travail prématuré (Renan,Souv. enf.,1883, p. 401).Il faut au grand architecte de bons ouvriers qui sachent leur métier et ne ménagent point leurs forces (Rolland,J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p. 1566).Ce fumoir présentait une particularité remarquable, c'est que l'on y fumait fort peu. Il convenait de ménager la poitrine de Fauvet, harcelé par des crises d'asthme (Duhamel,Cécile,1938, p. 48).
C. − Au fig. [Le compl. désigne un animé ou un trait de caractère]
1. Épargner de la fatigue, des soucis à une personne fragile, de santé délicate; traiter quelqu'un avec bonté, douceur. Je ne voulais pas envisager cette bataille, en malade que l'adversaire ménage et protège (Mauriac,Noeud vip.,1932, p. 249).L'abbé soigna Decraemer, qui lui dut une fois de plus la vie. Il le ménageait, le rationnait, choisissait une alimentation légère pour cet organisme en ruine, incapable de soutenir le combat qu'est la nutrition (Van der Meersch,Invas. 14,1935, p.448).C'est une enfant très délicate, très sensible, on doit la ménager beaucoup, me dit-il d'un ton rogue. L'institutrice ne la ménageait pas assez (Bernanos,Journal curé camp.,1936, p.1180).
Proverbe. Qui veut voyager loin*, ménage sa monture.
Emploi pronom. réfl. Le rayon restait désert, peu de clientes montaient aux confections, à cette heure matinale. Ces demoiselles se ménageaient, droites et lentes, pour se préparer aux fatigues de l'après-midi (Zola,Bonh. dames,1883, p. 474).Il commença à les débiter [ses visions] sans se ménager et sans se contraindre (Bremond,Hist. sent. relig., t. 4, 1920, p. 202).
2. Traiter quelqu'un avec égards, soit par respect, soit par intérêt dans le but de l'influencer, de ne pas le peiner, de ne pas lui déplaire. Synon. fam. prendre des gants* avec qqn.Comme c'est la fête patronale, j'ai dit au garde de faire sa tournée le soir et de ne pas ménager les ivrognes (Renard,Journal,1905, p. 975).Je ne le ménagerai pas plus que vous: vous savez que je ne ménage personne. Il ne travaillera pas de ses mains, mais je le ferai trimer dur (Sartre,Mains sales,1948, 3etabl., 3, p. 100):
3. Vous vous êtes fait jusqu'ici bien venir de ma gouvernante qui, comme toutes les vieilles gens, est assez morose de son naturel. Ménagez-la. J'ai cru devoir la ménager moi-même et souffrir ses impatiences. Je vous dirai, Jeanne, respectez-la. Et, en parlant ainsi, je n'oublie pas qu'elle est ma servante et la vôtre... A. France,Bonnard,1881, p. 489.
[P. méton.]
[Le compl. d'obj. dir. désigne le caractère, un sentiment de qqn] Traiter avec indulgence, délicatesse, respect. Ménager l'amour-propre, la susceptibilité de qqn. Je vous ai souvent froissée. Je ne ménageais pas assez votre délicatesse. Il y a eu des malentendus entre nous. Cela tient à ce que nous n'avons pas la même nature (A. France,Lys rouge,1894, p. 347).On avait disposé, dans la chambre, une couchette pour moi, une petite couchette de garde-malade et, − ô ironie! afin, sans doute, de ménager sa pudeur et la mienne − un paravent, derrière lequel je pusse me déshabiller (Mirbeau,Journal femme ch.,1900, p. 149):
4. Il commença de monter l'escalier que l'obscurité envahissait par cette fin d'un après-midi d'hiver. Il allait doucement, afin de ménager la lassitude de sa compagne qui se tenait à la rampe, comme si elle gardait à peine assez d'énergie physique pour suffire à l'effort de gravir ces quatre étages. Bourget,Disciple,1889, p. 54.
Ménager l'opinion. Ne pas déplaire, ne pas choquer ou causer de scandale. Grazia prit la résolution d'aller s'enfermer avec Lionello dans un sanatorium des Alpes. Christophe demanda à l'accompagner. Pour ménager l'opinion, elle l'en dissuada. Il fut peiné de l'importance excessive qu'elle attachait aux conventions (Rolland,J.-Ch., Nouv. journée, 1912, p. 1516).
Ménager les intérêts de qqn; avoir un intérêt à ménager. Veiller à le(s) conserver, à ne pas le(s) compromettre. Nous sommes débordés par l'activité tapageuse de gens sans mandat qui essayent de se tailler un succès personnel avec une question que l'on ne peut traiter qu'avec la plus grande réserve. Ceux-là n'ont aucun intérêt à ménager (Barrès,Cahiers, t. 9, 1912, p. 259).
Expr. Ménager la chèvre et le chou. S'efforcer de ne déplaire à aucun des deux adversaires ou des deux partis en présence; user d'adresse afin de ne froisser personne. Drôle de foire, dit Lambert. La moitié des gens qui sont ici ne demanderait qu'à massacrer l'autre. Forcément puisque tu as choisi de ménager la chèvre et le chou. − Tu appelles ça les ménager? J'ai mécontenté tout le monde (Beauvoir,Mandarins,1954, p.366):
5. Il n'est pas franc, c'est un monsieur cauteleux, toujours entre le zist et le zest. Il veut toujours ménager la chèvre et le chou. Quelle différence avec Forcheville! Voilà au moins un homme qui vous dit carrément sa façon de penser. Ça vous plaît ou ça ne vous plaît pas. Ce n'est pas comme l'autre qui n'est jamais ni figue ni raisin. Proust,Swann,1913, p. 265.
Var. «C'est vrai que X... c'est mieux que moi? − Tu sais bien que l'imitateur c'est toujours mieux que l'inventeur!». Cela ménageait la chèvre, le chou et la vérité. N'empêche que le livre de X... est tombé dans l'oubli et que le petit «Cornet» vit encore (Jacob,Cornet dés,1923, p. 9).
II. − Disposer, préparer, régler quelque chose avec adresse, soin.
A. − [Le suj. désigne une pers.]
1. Prendre des dispositions pour, régler, arranger avec adresse, soin, prudence. Ménager son coup, sa rentrée, une transition; ménager la réconciliation de deux personnes; ménager une entrevue entre deux personnes. Je devrais dès maintenant leur ménager une rencontre. Mais je sais si bien ce qui en sortira: une raison de plus de ne pas l'épouser. Et, ce que je cherche, c'est une raison de l'épouser (Montherl.,Démon bien,1937, p.1254).Il ménagea une pause, qui correspondait à l'arrivée du plateau de fromages (Romains,Hommes bonne vol.,1938, p.158):
6. Les récits qu'il tirait de son passé se composaient comme autant de romans bien venus et pleins de vie. Comme il savait ménager ses effets, jouer de l'imprévu, soutenir l'intérêt jusqu'au dénouement! Martin du G.,Souv. autobiogr.,1955, p. LXXIV.
Ménager qqc. à qqn.Lui préparer, lui réserver quelque chose. Ménager un avenir, une situation à qqn; ménager de la solitude et du silence à qqn. On en voulait presque à cette fille, maintenant, de n'avoir pas été trouver secrètement le Prussien, afin de ménager au réveil, une bonne surprise à ses compagnons (Maupass.,Contes et nouv., t. 2, Boule de suif, 1880, p. 140).
Emploi pronom. réfl.
[Le compl. désigne un inanimé] Se réserver, se préparer quelque chose. Se ménager une (porte de) sortie. L'abbé Guitrel se ménageait des occasions fréquentes de visiter les magasins de Rondonneau jeune, fabricant d'objets sacrés (A. France,Orme,1897, p. 35):
7. Il est bien vrai qu'il parle de la foi comme si elle était l'acte immédiat, la pensée la plus intime de sa pensée; mais ce n'est que pour se ménager une plus spécieuse retraite, pour céder à un plus subtil désir et livrer savamment son âme aux démons de la complexité. Massis,Jugements,1924, p. 100.
[Le compl. désigne une pers.] Se concilier quelqu'un. Il y a deux Mistral: un grand, un petit. Le petit croit à Paris, aux Instituts, à l'argent, est craintif dans son village, voudrait se ménager les instituteurs (lui, le traditionaliste). Et puis il y a le grand Mistral, celui qui écrivit Mireille à vingt-quatre ans (Barrès,Cahiers, t. 8, 1910, p. 131).
2. Installer, disposer avec adresse, avec soin. Ménager un passage, une ouverture. Le peintre lui-même, devant la mauvaise grâce du propriétaire, la coupa [la pièce], dans un bout, d'une cloison de planches, derrière laquelle il ménagea une cuisine et une chambre à coucher (Zola, Œuvre,1886, p. 258).Ils voulurent la cuisine au milieu. Au reste, les deux portes la situaient déjà, l'une, s'ouvrant de côté sur la grange, l'autre sur la cour. Ils firent ménager une fenêtre double sur le même pan de mur (Pesquidoux,Livre raison,1928, p. 145):
8. Que dira-t-il de ce bocage planté dans la cour du Louvre pour y masquer les belles lignes de l'architecture, lui qui avait pour principe de ménager de vastes espaces autour des habitations? Barrès,Cahiers, t. 10, 1913, p. 130.
Emploi pronom. réfl. [La bonne] avait si bien casé les ustensiles et les meubles, qu'elle s'était ménagé, près de la fenêtre, un coin libre où elle travaillait le soir (Zola,Page amour,1878, p.46).Derrière cette porte s'étend le reste du grenier, que j'ai coupé d'une cloison de briques pour me ménager en deçà une retraite habitable (Bosco,Mas Théot.,1945, p.174).
B. − [Le suj. désigne un inanimé concr. ou abstr.] Réserver, permettre quelque chose. Des idées qui ne ménagent rien de bon. Un vaste appentis descendra de la maison (...) en pente douce. Il couvrira tout. Assez élevé pour ménager l'air nécessaire à la conservation des vaisselles vinaires, à la tenue du vin lui-même (Pesquidoux,Livre raison,1925, p. 146).Sa susceptibilité lui ménageait fatalement d'«immenses chagrins», les amis intimes étant, dans l'éloge, toujours au-dessous de ce que le cher garçon aurait attendu d'eux (Blanche,Modèles,1928, p. 122).On le leurre de l'espoir de la guérison, pour la fin du printemps ou l'été. Mais les suites de la maladie se prolongent péniblement et lui ménagent une vie sans joie (Rolland,Beethoven, t. 1, 1937, p. 86).
REM. 1.
Ménageable, adj.Qui peut être ménagé, traité, réglé avec adresse, soin. Nicole est tout dans les intervalles, dans les nuances, aux confins des opinions ménageables; il n'est qu'un psychologiste habile et surtout un moraliste (Sainte-Beuve,Port-Royal, t. 4, 1859, p. 392).
2.
Ménageur, -euse, adj. et subst.(Celui, celle) qui ménage quelqu'un, le traite avec égards, réserve. Oh! la terreur de mon livre chez les peureux, chez les couards, chez les ménageurs de la chèvre et du chou! (Goncourt,Journal,1890, p.1246).Ce ne sera pas ces maîtres ménageurs qui feront notre firme et notre patronage (Péguy,Ève,1913, p. 907).
Prononc. et Orth.: [menaʒe], (il) ménage [mena:ʒ]. Ac. 1694, 1718: mesnager; dep. 1740: ménager. Étymol. et Hist. 1. a) 1309 «habiter» (Preuves de l'Hist. de Bret., I, col. 1226 ds Gdf.); b) 1450 «vaquer aux soins du ménage» (Arch. JJ 184, pièce 65, ibid.), sens att. en a. et m. fr., réputés ,,anc.`` ds Guérin 1892; 2. xves. «disposer, arranger» (ds FEW t. 6, 1, p. 190a qui précise ,,hapax``); 3. 1567 «administrer, gérer un bien» (Amyot, Périclès, 16 ds Hug.); d'où a) ca 1570 «disposer avec prudence» (La Boétie, 174 ds Littré); b) 1571 «tirer le meilleur parti de» (Id., La Mesnag. de Xenoph. ds Gdf.); 1605 [éd.] ménager le temps (O. de Serres, 808 ds Littré); 1679 ménager ses forces (Bossuet, Hist., III, 6, ibid.); 4. 1621 «régler, prendre des dispositions» mesnager accord (D'Aubigné, Livre des missives et discours milit., II ds Œuvres, éd. Reaume et de Caussade, I, 134); av. 1654 pronom. «disposer pour soi» (Guez de Balzac ds Besch. 1845); 5. a) 1628-30 «traiter quelqu'un avec égards» (D'Aubigné, Sa vie à ses enfants, loc. cit., I, 108); 1629 pronom. se mesnager avec qqn «id.» (Richelieu, Lettres, instructions diplomatiques..., éd. M. D'Avenel, III, 421 ds Haschke Richelieu, p. 78); b) mil. xviies. «traiter quelqu'un avec indulgence, bonté» (Retz, Mémoires, IIepart. ds Œuvres, éd. A. Feuillet, II, 8: en y ménageant avec soin tous mes amis); 6. a) 1646 «épargner le danger, la fatigue à quelqu'un» menager les troupes (Ablancourt, Ar. ds Rich. 1680); 1668 menager sa monture (Racine, Plaideurs, I, 1); b) 1662 pronom. «prendre soin de sa personne» (La Rochefoucault, Mémoires, II [année 1643] ds Œuvres, éd. D. L. Gilbert et J. Gourdault, II, 60); 7. 1690 «réserver, fournir la place nécessaire pour» (Fur.: Mesnager un escalier... dans l'espaisseur du mur). Dér. de ménage*; dés. -er. Fréq. abs. littér.: 2 114. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 3621, b)3437; xxes.: a)2663, b)2454.

MÉNAGER2, -ÈRE, adj. et subst. fém.

I. − Adjectif
A. − Vieilli. Qui administre, dépense, gère avec économie, modération; économe. Elle sortit pour louer un logement et le meubler; elle acheta le plus étroit nécessaire (car elle a toujours été ménagère), et nous nous trouvâmes enfin chez nous (Restif de La Bret.,M. Nicolas,1796, p. 112).La vieillesse est ménagère, sage, prudente... et les jeunes hommes la disent avare, égoïste, poltronne (Toepffer,Nouv. genev.,1839, p. 178).
Être ménager de qqc.Le dépenser, l'utiliser avec économie. On ne lui en voulait pas d'être grand ménager de son bien; et peut-être l'en estimait-on davantage (A. France,Pt Pierre,1918, p. 108):
1. L'argent qu'il avait dans sa poche après tout, à quoi bon en être si ménager? Edmond ne lui avait-il pas très facilement donné dix francs? Il dînerait pour deux francs cinquante, c'est-à-dire luxueusement. Aragon,Beaux quart.,1936, p. 353.
Qui est économe, prudent. Sa force est double parce qu'elle est une force bien distribuée. Tu me raillais tout à l'heure: «Tu es bien ménager!» Regarde-le: il rase la barre, il sait que s'il saute deux centimètres de plus, ce qu'il aura dépensé pour ce surcroît inutile, c'est autant qui lui manquera quand la barre sera montée de deux centimètres et qu'alors il en aura besoin (Montherl.,Olymp.,1924, p. 319).
Être ménager de qqc.; être ménager de ses mouvements, de son temps. Il est évident qu'un chef d'État et qu'un général doivent être ménagers de leur vie, les ambitieux ni les violents ne voudraient plus de ces métiers-là (Alain,Propos,1921, p.192).Nos disponibilités en hommes étaient telles que si je ne me montrais pas ménager de nos effectifs, nous risquions de voir l'armée française incapable de prendre, l'heure venue, une part suffisante dans la bataille décisive (Joffre,Mém.,t.2, 1931, p.229):
2. À la suite d'une guerre malheureuse contre les Spartiates, le nombre des vrais citoyens était devenu si faible, qu'il avait fallu donner le droit de cité à une foule de périèques. C'est pour n'avoir pas à tomber dans cette extrémité que Sparte était si ménagère du sang des vrais Spartiates. Fustel de Coul.,Cité antique,1864, p. 426.
B. − Qui a rapport à la vie au foyer, qui est relatif aux travaux d'entretien du foyer, à l'ensemble des tâches domestiques se rapportant à l'entretien d'une famille. Dans le va-et-vient des occupations ménagères elle faisait tinter un vase. Les fleurs étouffent par un temps pareil. Il faut leur changer leur eau (Aragon,Beaux quart.,1936, p. 464).Dès avant sept heures, les bruits ménagers de la maison me réveillent (Gide,Ainsi soit-il,1951, p. 1214):
3. Je n'avais pu obtenir qu'elle modifiât en rien aucune de ses habitudes ménagères; obtenir, par exemple, qu'elle remontât la pendule haute du vestibule de Cuverville autrement qu'en se hissant sur un échafaudage de caisses vides, fragiles et d'un équilibre incertain... Gide,Et nunc manet,1951, p. 1136.
SYNT. Activité, besogne, économie, folie, inquiétude, rage ménagère; exigences, vertus ménagères; odeurs, rumeurs ménagères; faits matériels d'ordre ménager; services, soins, soucis, (gros) travaux ménagers.
En partic.
Appareils ménagers. Appareils électriques destinés à faciliter certaines tâches domestiques. Il n'a pas l'air d'un criminel, d'un gangster. Il a presque l'air d'un jeune vendeur de voitures ou d'appareils ménagers qui aurait réussi (Camus,Requiem,1956, 2epart., 5etabl., p. 882).
Arts ménagers. V. art II A 1.Électro-ménager*.
Ordures ménagères, détritus ménagers. Détritus laissés par chaque ménage et qui sont ramassés par le service de voirie. Être employé au service des ordures ménagères. Des enfants manipulaient des détritus ménagers transformés en jouets (Malègue,Augustin,t. 1, 1933, p. 252):
4. Dans les villes allemandes, les habitants avaient l'ordre de faire de leurs ordures ménagères deux parts: ordures minérales d'abord, ordures animales et végétales ensuite, qu'on ramassait séparément. Van der Meersch,Invas. 14,1935, p. 278.
Eaux, boues ménagères. Eaux usées ayant servi aux tâches domestiques (vaisselle, lessive, nettoyage de la maison). Il sautait les flaques de boues ménagères afin de ne point salir le coutil vierge de son pantalon (Adam,Enf. Aust.,1902, p. 468).À chaque palier, les habitants pouvaient, par la fenêtre, répandre leurs eaux ménagères dans des plombs dont, au passage, on respirait le souffle ammoniacal (Duhamel,Terre promise,1934, p.43):
5. La rue de Normandie est une de ces vieilles rues, à chaussée fendue, où la ville de Paris n'a pas encore mis de bornes-fontaines, et dont le ruisseau noir roule péniblement les eaux ménagères de toutes les maisons, qui s'infiltrent sous les pavés et y produisent cette boue particulière à la ville de Paris. Balzac,Cous. Pons,1847, p. 241.
Éducation, formation ménagère, enseignement ménager. Cours où sont traités la couture, la puériculture, la cuisine, l'économie domestique, l'hygiène, l'entretien de la maison:
6. ... former des maîtresses de maison, ne se bornera pas à donner régulièrement des recettes de cuisine ou des indications sur la façon de confectionner une brassière. L'éducation ménagère, c'est beaucoup plus que cela. On a l'habitude, d'ailleurs, de distinguer différentes formes d'activités − cuisine, repassage, couture, ménage, etc. − qui exigent, si l'on ose le dire, une spécialisation assez poussée. Mathiot,Éduc. mén.,1957, p. 92.
École ménagère. V. école I A 1 b.
Rare et littér.
[En parlant d'une pers.] Qui s'occupe, aime s'occuper du ménage. Ce bon Lequesne a toujours la même boule, même tabatière, même voix, même bel œil. Son épouse toujours active et ménagère (Flaub.,Corresp.,1845, p. 46).Les placards, vastes comme des chambres, présentent l'aspect d'un désordre affreux mais si ancien qu'il inspire à l'âme simple et pourtant ménagère de MmeMarchal, du respect (Bernanos,M. Ouine,1943, p. 1531).
Mains ménagères. Mains qui font le ménage. Le bout des doigts piqués de points noirs par l'aiguille... mains laborieuses, mains ménagères, que le repos rend ridicules (Bernanos,Mouchette,1937, p. 1342).
[En parlant d'une plante] Qui est réservée à l'alimentation humaine. Anton. fourrager2, -ère (v. ce mot I A ex. de Giraudoux).
II. − Subst. fém.
A. − Femme qui s'occupe de son foyer, de l'organisation des tâches domestiques du foyer. Elle se mit pourtant à ranger avec soin les documents, les notes, par une habitude de bonne ménagère qui ne voulait rien laisser en désordre derrière elle (Zola,Argent,1891, p. 237).Ce fut aussitôt comme une ménagère dans sa demeure. Elle mit de l'ordre dans les chambres, brossa les habits que Meaulnes avait portés la veille (Alain-Fournier,Meaulnes,1913, p. 343):
7. ... dans l'économie domestique, une mauvaise ménagère détruit bien vite les fortunes bornées. C'est la femme, et non le mari, qui décide ordinairement des consommations de tous les jours, de celles qui se répètent sous une multitude de formes. Say,Écon. pol.,1832, p. 442.
SYNT. Brave, excellente, honnête, médiocre, simple, robuste ménagère; jeune ménagère maladroite; bonne grosse ménagère; bonne ménagère ordonnée; talents de bonne ménagère; faire une belle ménagère; faire qqc. en bonne ménagère.
P. métaph. Attendez le grand jour du jugement, vous verrez ce que les anges auront à retirer des plus saints monastères, par pelletées − quelle vidange! alors, mon petit, ça prouve que l'église doit être une solide ménagère, solide et raisonnable (Bernanos,Journal curé camp.,1936, p. 1038).
Pop. Sa ménagère. Sa femme. Fraisier rit du calembour et mit le verrou, pour que sa ménagère ne vînt pas interrompre les confidences de la Cibot (Balzac,Cous. Pons,1847, p. 178).Une négresse se suspend à son bras: c'est sa «ménagère», sans doute (Gide,Voy. Congo,1927, p. 702).
B. − Service de couverts présentés dans un écrin. Ménagère de soixante-deux pièces; ménagère de qualité moyenne, de haut de gamme. Pour les ménagères, il existe deux qualités d'acier inoxydable (Catal. CAMIF, été 1982, p. 272).
Prononc. et Orth.: [menaʒe], fém. [-ε:ʀ]. Ac. 1694, 1718: mesnager, -ere; Ac. 1740: ménager, -ère; dep. 1762: ménager, -ère. Étymol. et Hist. A. Subst. masc. 1. 1281 maynagier «personne de petit état, journalier» pouvres maynagiers (Test. de Guy de Lusignan, Arch. J. 270, pièce 19) en a. et m. fr.; 2. 2emoitié xves. «celui qui organise avec économie» trop chiche et bon mesnager (Nouvelles fr. inédites du XVes., éd. E. Langlois, IV, p. 18); 3. 1550 «petit propriétaire agricole» (Ronsard, Odes, III, XI ds Œuvres, éd. P. Laumonier, II, 24). B.Subst. fém. 1. fin xive-début xves. «femme qui s'occupe des soins du ménage» estre bonne mesnagere (Quinze Joyes de mariage, éd. J. Rychner, V, 124, p. 36); 2. 1931 «service complet de couverts de table dans son coffret spécial» (Lar. 20e). C. Adj. 1. fin xves. «médiocre» gaiges mesnaigiers (Ph. de Commynes, Mémoires, éd. J. Calmette, I, p.176), attest. isolée; 2. 1583 «qui administre en dépensant le moins» main mesnagere Du maistre (Gauch., Plais. des champs, p. 185 ds Gdf. Compl.); 1665 ménager de «qui use avec mesure de quelque chose» ménagers de notre bien (La Rochefoucault, Réflexions ou sentences et maximes morales, CCLXV ds Œuvres, éd. Gilbert, I, 172); 3. 1594 «qui concerne les choses du ménage» soucy mesnager (J. Godard, Les Desguisez, I, 1 ds Anc. Théâtre fr., VII, 341). Dér. de ménage*; suff. -er (-ier*). Fréq. abs. littér. Ménager: 74. Ménagère: 459. Fréq. rel. littér. Ménager: néant. Ménagère: xixes.: a) 313, b) 547; xxes.: a)1145, b)701. Bbg. Lewicka (H.). Dat. de mots. Kwart. neofilol. 1954, t. 1, p.77. _ Quem. DDL t. 2.

Wiktionnaire

Verbe - français

ménager \me.na.ʒe\ transitif 1er groupe (voir la conjugaison) (pronominal : se ménager)

  1. Dépenser avec circonspection, avec prudence.
    • Comme il ne nous restait guère de munitions, nous les ménagions le plus que nous pouvions. — (Dillon, Voyage dans la mer du sud, Revue des Deux Mondes, 1830, tome 1)
    • Les soldats appréciaient les efforts qu'il ne cessait de faire pour améliorer leur bien-être ; ils étaient touchés du soin avec lequel il ménageait leur sang ; […]. — (A. Brialmont, Histoire du duc de Wellington, 1857, volume 3, page 135)
    • Il importait donc de les maintenir dans un parfait état de vigueur. Aussi la viande saignante, et principalement la chair de ces rennes qui se laissaient tuer aux environs de la factorerie, ne leur fut-elle point ménagée. — (Jules Verne, Le Pays des fourrures, J. Hetzel et Cie, Paris, 1873)
    • On attaquerait la roche à la masse afin d'épargner les burins, car il n'y avait pas de forge pour les recharger. Cette façon de procéder ménagerait également la dynamite, car il fallait aussi craindre le pouillant qui asphyxie. — (Michel Michellod, « La promesse de Dago conte de Noël) », dans les Échos de Saint-Maurice, 1958, tome 56, page 310)
    • En cherchant à ménager, on paiera finalement plus cher, parce que pendant que l’entraîneur Legault regarde ses pee-wee patiner sur la bottine, la facture monte. — (Claude Villeneuve, Les pee-wee aux commandes du tramway, Le Journal de Québec, 24 février 2021)
  2. (Figuré) Éviter de faire des démarches, en faire le moins qu’on peut.
    • Il craint de se déranger, il ménage bien ses pas.
  3. Se servir d’un être ou d’une chose de façon qu’ils restent en bon état.
    • Il s’acharnera au travail, il ne ménagera ni son temps, ni ses forces, à une époque où le radium et la radiothérapie profonde était encore inconnue. — (Bulletin de la Société d'obstétrique et de gynécologie de Paris, 1924, volume 3, page 403)
    • Ces objectifs sont déterminés par un plan à long terme, pour l'atteinte duquel on ménagera au maximum ses forces tout en cherchant les prises les plus variées qu'offre la situation du moment. — (François Sellier, Stratégie de la lutte sociale, Les Éditions ouvrières, 1961, page 308)
    • Ménager la chèvre et le chou.
  4. (Par extension) Disposer avec adresse, avec art.
    • Le Roi a une entrevue à Nice avec le Pape Paul III, qui ménage une trêve de dix ans entre les Puissances belligérantes. — (Jacques Auguste de Thou, Abrégé de l’histoire universelle, commenté par Rémond de Sainte-Albine, 1759, volume 10, page 440)
    • On ménage une porte d'entrée, à laquelle on parvient avec une échelle, et on forme des compartiments en planches pour recevoir le grain. — (François Rozier, Cours complet d'agriculture ou Nouveau dictionnaire d'agriculture, Pourrat, 1836, volume 12, page 67)
  5. (Figuré) Traiter avec ménagement, avec égard, de manière à ne pas offenser, à ne pas déplaire. (En parlant de personnes)
    • C’est un homme qu’il faut ménager, qu’il importe de ménager.
    • C’est un homme à ménager.
    • Don Juan — C'est un dessein que j'ai formé par pure politique, un stratagème utile, une grimace nécessaire, où je veux me contraindre pour ménager un père dont j'ai besoin, et me mettre à couvert du côté des hommes de cent fâcheuses aventures qui pourraient m’arriver. — (Molière, Don Juan, acte V, scène II)
    • Puisqu’il se pose en ennemi, on ne le ménagera point.
    • Qui veut voyager loin ménage sa monture.
    • L’adjoint ménageait les prêtres.
    • Ménager la susceptibilité.
  6. Épargner quelqu’un, user modérément de la supériorité, de l’avantage qu’on a sur lui.
    • Les compagnies, qui jusqu'en janvier 1852 ménageaient les messageries à chevaux et la navigation fluviale, éliminent leurs concurrents, les ruinant ou les achetant, jouant à leur guise avec les prix. — (Jocelyne George, Paris-Province: De la Révolution à la mondialisation, Fayard, 1998)
  7. Procurer, réserver une chose à quelqu’un.
    • "Vous me devez plus que la vie. En échange, ménagez-moi une entrevue avec le duc d'Angoulême dès que vous serez libre." — (Michel Zévaco, Le Capitan, 1906, Arthème Fayard, collection « Le Livre populaire » no 31, 1907)
    • Theresa May espérait, avec ce compromis, ménager un accès au marché unique européen pour les produits britanniques. — (Philippe Bernard, Brexit : « Theresa May s’attendait à des paroles encourageantes. Elle est tombée des nues », Le Monde. Mis en ligne le 21 septembre 2018)
    • Vous m’avez ménagé une surprise agréable.
  8. (Pronominal) (Par extension) Prendre soin de sa santé, ne pas aller jusqu’au bout de ses forces.
    • Vous n’êtes pas encore tout à fait guéri, et, si vous ne vous ménagez, vous retomberez malade.
    • Une très vive douleur cardiaque la tire de son demi-sommeil. Il lui semble qu’elle va mourir si elle bouge. Le docteur lui a recommandé de beaucoup se ménager. — (Jules Supervielle, Le voleur d’enfants, Gallimard, 1926, collection Folio, page 39)

Nom commun - français

ménager \me.na.ʒe\ masculin (pour une femme, on dit : ménagère)

  1. Personne qui administre avec économie.
    • Les censeurs, ménagers des deniers publics, du moins quand ils prenaient leur devoir à cœur, se heurtaient à des prétentions contre lesquelles ils avaient peine à se défendre… — (Gustave Bloch, La République romaine, Flammarion, 1913)
    • Les Rifains retranchés dans la montagne, tireurs adroits et ménagers de leurs munitions, s'étaient révélés comme des ennemis redoutables, […]. — (Frédéric Weisgerber, Au seuil du Maroc Moderne, Institut des Hautes Études Marocaines, Rabat : Les éditions de la porte, 1947, page 203)
  2. (Vieilli) Paysan qui travaille sa terre et ne se loue pas.
    • Mais en gros, ménager est dans le Midi l’équivalent de laboureur et il est très vivant en ce sens dans le langage des pays d’oc. — (Maurice Agulhon, La Vie sociale en Provence intérieure au lendemain de la Révolution, Société des études robespierristes, 1970, page 153)
    • L’histoire que tu as entendue n’est pas un conte de mon imagination. Si jamais tu viens en Provence, nos ménagers te parleront souvent de la cabro de moussu Seguin. — (Alphonse Daudet, Lettres de mon moulin, Folio junior, 1979, page 34)

Adjectif - français

ménager \me.na.ʒe\

  1. Qui administre avec épargne, avec économie.
    • C’est un homme très ménager de ses deniers.
    • Il n’est pas assez ménager de son bien.
    • Les jeunes gens ne sont guère ménagers, ne sont pas assez ménagers.
    • — Une fille comme toi, plaisante à voir, de bonne santé et avec ça vaillante et ménagère, c’est fait pour encourager ses vieux parents, d’abord, et puis après se marier et fonder une famille chrétienne. — (Louis Hémon, Maria Chapdelaine, J.-A. LeFebvre, Montréal, 1916)
    • Madeleine agitait l’eau par mouvements prompts de grande laveuse ; elle ne craignait point de se mouiller les bras ni de faire sauter des gouttes jusqu'à son visage. Elle frottait entre ses mains pour ne pas user l’étoffe et, quant au savon, elle en était très ménagère : elle rinçait vivement, le linge défripé d’un coup sec, claquant à hauteur de figure. — (Ernest Pérochon, Nêne, 1920)
  2. (Par extension) Qui administre la vie, la personne.
    • Pauvres en vies humaines, nous en sommes aussi peu ménagers que possible. Nous arrivons peu à peu et sans protester à subir une mortalité de 50 p. 100 supérieure à celle de nos voisins, …. — (Ludovic Naudeau, La France se regarde : le Problème de la natalité, Librairie Hachette, Paris, 1931)
  3. Qui a rapport à l’administration du ménage, en parlant des choses.
    • L’enseignement ménager.
  4. Qui est relatif au ménage.
    • Quand les tâches ménagères lui laissent un peu de répit, elle offre ses services à la paroisse, où l'on ne refuse jamais son aide. — (Antoine Bello, Scherbius (et moi), Gallimard, page 26)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

MÉNAGER. v. tr.
Dépenser avec circonspection, avec prudence. Ménager sa fortune, son revenu. Cette petite rente suffira à vous faire vivre, à condition de la ménager. Ménager sa santé, ses forces, En user avec prudence. Par extension, Il se ménage, Il prend soin de sa santé, il ne va pas jusqu'au bout de ses forces. Vous n'êtes pas encore tout à fait guéri, et, si vous ne vous ménagez, vous retomberez malade. Ménager ses paroles, Parler peu. Ménager les termes, les expressions, Parler avec circonspection. Fig., Ménager le temps, ménager son temps, Ne pas le perdre, en faire un bon emploi. Ménager ses pas, Craindre de se fatiguer en marchant. Il signifie figurément Éviter de faire des démarches, en faire le moins qu'on peut. Il craint de se déranger, il ménage bien ses pas. Ménager une étoffe, L'employer si bien qu'il n'y ait rien de perdu. Il signifie aussi Se servir d'un être ou d'une chose de façon qu'ils restent en bon état. Ménager son cheval, sa monture. Ménager ses habits. Ménager un meuble. Ménager sa voix. Ménager des troupes, Prendre garde de les fatiguer inutilement, de les exposer mal à propos. Prov. et fig., Qui veut voyager loin ménage sa monture, Il faut éviter les excès si l'on veut avoir longue vie; il faut user avec ménagement des choses dont on veut se servir longtemps. Ménager une chose à quelqu'un, La lui procurer, la lui réserver. Je lui ai ménagé une place, un emploi. Vous m'avez ménagé une surprise agréable. Je me suis ménagé une entrevue avec lui. Se ménager la bienveillance de quelqu'un. Se ménager des ressources pour l'avenir. Ménager l'occasion, les occasions, Préparer le moment, la circonstance favorable pour faire quelque chose. On dit dans le même sens Ménager ses effets. Ménager les intérêts de quelqu'un, Avoir soin de les conserver, de ne pas les compromettre. N'avoir rien à ménager avec quelqu'un, N'avoir plus de mesure à garder avec lui. Il signifie, par extension, Disposer avec adresse, avec art. Il a ménagé un accommodement entre deux ennemis qui se croyaient irréconciliables. Ménager une trêve, une entrevue. Ce chanteur ménage bien sa voix, Il la conduit bien, il en tire le meilleur parti. Cet auteur a bien ménagé les péripéties de son drame, l'intrigue de sa comédie, Il les a disposées avec art. Par extension, Ménager la transition, ménager les transitions, Ne pas passer trop brusquement d'un état à un autre. Avant de traiter en allié cet ennemi d'hier, il sera bon de ménager la transition. Ce peintre a bien ménagé l'ombre et la lumière dans son tableau, Il les a distribuées habilement. Ménager un escalier dans un bâtiment, un cabinet dans un appartement, etc., Faire en sorte qu'il s'y trouve de la place pour un escalier, pour un cabinet, etc., sans gâter le dessin principal. On dit aussi Ménager une perspective dans un jardin. Il signifie encore figurément, en parlant des Personnes, Traiter avec ménagement, avec égard, de manière à ne point offenser, à ne point déplaire. C'est un homme qu'il faut ménager, qu'il importe de ménager. C'est un homme à ménager. Puisqu'il se pose en ennemi, on ne le ménagera point. Prov. et fig., Ménager la chèvre et le chou. Voyez CHÈVRE. Ménager quelqu'un signifie aussi L'épargner, user modérément de la supériorité, de l'avantage qu'on a sur lui. Vous êtes plus fort que lui, vous avez plus d'esprit que lui, ménagez-le. Ménager un adversaire, un partenaire.

Littré (1872-1877)

MÉNAGER (mé-na-jé. Le g prend un e devant a et o : ménageais, ménageons) v. a.
  • 1Employer, dépenser avec économie, comme on fait dans un ménage bien conduit. Il ménage bien son revenu. Il ménage tout ce qu'il peut dans sa maison. Il entre dans tout… et veut que le marquis ménage lui-même son argent, qu'il écrive, qu'il suppute, qu'il ne dépense rien d'inutile, Sévigné, 10 déc. 1688. Je ménagerai votre bourse, ne vous mettez pas en peine, Regnard, Sérénade, sc. 7.

    Absolument. Il ménage pour l'avenir, pour sa vieillesse, pour ses enfants.

    Par extension. Je ne reçois [à Nantes] vos lettres que deux jours plus tard qu'à Paris ; c'est tout ce qu'on peut ménager sur une distance aussi extrême que celle-ci, Sévigné, 25 mai 1680.

    Fig. Ménager ses paroles, parler peu.

    Ménager ses pas, éviter de faire des démarches, en faire le moins qu'on peut.

  • 2Économiser, épargner, comme on épargne dans un ménage. Elle [Rome] ménageait ses forces contre un ennemi qui venait des bords de l'Afrique, que le temps devait détruire tout seul dans un pays étranger, Bossuet, Hist. III, 6. Aussi capable de ménager ses troupes, que de les pousser dans les hasards, Bossuet, Louis de Bourbon. On croit qu'il expose ses troupes : il les ménage en abrégeant le temps des périls par la vigueur des attaques, Bossuet, ib. Il n'y a rien que les hommes aiment mieux à conserver et qu'ils ménagent moins que leur propre vie, La Bruyère, XI. Et prodigues d'un sang qu'ils devraient ménager, Voltaire, Zaïre, III, 1.

    Ne pas abuser de, conserver pour soi. Vous avez un ami riche qui vous donne des repas ; ménagez bien cette bonne fortune, Sévigné, 1er août 1685.

  • 3 Fig. Conduire comme on conduit le ménage d'une maison, manier, diriger. Ménagez cela suivant cette politique dont vous me donnez des leçons, Sévigné, à Guitaut, 9 avr. 1683. Un homme qui, pour ne pas irriter la haine publique déclarée contre le ministère, sût se conserver de la créance dans tous les partis et ménager les restes de l'autorité, Bossuet, le Tellier. Il relève le courage des alliés, il ménage la foi suspecte et chancelante des voisins, Fléchier, Turenne. Après avoir été à la tête des affaires et ménagé le destin de Rome, Massillon, Or. fun. Villeroy.

    Absolument. Je ne m'endors pas auprès de Mme de Coulanges… mais il faut ménager longtemps avant que d'entreprendre quelque chose d'utile, Sévigné, 13 nov. 1673.

    Fig. Préparer avec adresse, avec mesure. Souffrez que je ménage un moment de retraite, Corneille, Agésil. II, 1. Un auteur qui avait trois épîtres toutes prêtes pour un même livre, pour trois personnes fort différentes en condition et en mérite, ayant résolu d'employer celle dont il pourrait tirer le plus d'utilité, et faisant ménager cela par une tierce personne, Scudéry, les Conversations, Dialogue. L'éléphant devait sur son dos Porter l'attirail nécessaire,… L'ours s'apprêter pour les assauts ; Le renard ménager de secrètes pratiques ; Et le singe amuser l'ennemi par ses tours, La Fontaine, Fabl. V, 19. Certains loisirs qu'il sait fort bien ménager, Sévigné, 19 janv. 1674. Ménagez, s'il est possible, quelques jours avant la communion, un entretien avec votre confesseur, afin qu'il vous aide par ses conseils à bien faire une action si sainte, Bourdaloue, Instruct. sur la commun. exhort. t. II, p. 455. Or, je vous le demande, quels ont pu être les desseins de la miséricorde de Dieu en vous ménageant des spectacles si effrayants ? Massillon, Carême, Impén. fin. Toutes les facilités de salut que la bonté de Dieu lui avait ménagées, Massillon, Carême, Mauv. riche. Le cardinal Mazarin ménageait cette célèbre paix de Munster, par laquelle les Français et les Suédois furent les législateurs de l'Empire, Voltaire, Hist. parlem. ch. LV. Platon s'était rendu en Sicile, dans le dessein de ménager une réconciliation entre Dion et le roi de Syracuse, Barthélemy, Anach. ch. 33.

  • 4Ménager de ou que, faire adroitement en sorte que. Nous en revenons toujours à ménager qu'au moins il [Ch. de Sévigné] ne fasse pas un marché extravagant [en vendant sa charge], Sévigné, 29 mars 1680. Nous ménageons… de lui faire faire une bonne confession, Sévigné, 27 avr. 1671. Notre grande affaire, c'est de savoir nous concilier la miséricorde divine, c'est de ménager qu'un Dieu nous pardonne, et de faire que sa clémence arrête le cours de sa colère, Bossuet, Sermons, Justice, 3.
  • 5 Fig. Employer avec habileté et mesure. …Elle est et belle et fine, Et sait si dextrement ménager ses attraits Qu'il n'est pas bien aisé d'en éviter les traits, Corneille, Gal. du Pal. I, 9. Si dans l'occasion je ménage un peu mieux L'assiette du pays et la faveur des lieux, Corneille, Sertor. III, 2. Allez, mon Père, votre ordre [les jacobins] a reçu un honneur qu'il ménage mal : il abandonne cette grâce qui lui avait été confiée, Pascal, Prov. II. Elle aimait mieux employer son crédit pour les intérêts des autres, que de le ménager pour les siens propres, Fléchier, Mme de Mont. Son adroite vertu ménage son crédit, Racine, Brit. IV, 4.

    Ménager un terrain, une étoffe, les employer si bien, qu'on en fasse tout ce qu'on en veut faire, et qu'il n'y ait rien de perdu.

    Ménager le temps, ménager son temps, ménager les moments, ne pas les perdre, en faire bon emploi. Par le travail on charmait l'ennui, on ménageait le temps…, Bossuet, Anne de Gonz. Elle [la reine] ménageait si bien son temps que, sans retarder les desseins du roi, elle avait toute la complaisance qu'une femme doit à son époux, et toute la fidélité qu'une chrétienne doit à Dieu, Fléchier, Mar.-Thér. Ménageons les moments que ce transport nous laisse, Racine, Andr. V, 5. Si vous aimez la vie, ménagez le temps ; car c'est l'étoffe dont elle est faite, Mot de Franklin.

    Ménager l'occasion, les occasions, préparer le moment, la circonstance favorable pour faire quelque chose.

    Ce chanteur ménage bien sa voix, il la conduit bien, il en tire tout le parti qu'elle permet.

    On dit aussi dans un autre sens : ce chanteur ménage sa voix, il ne la donne pas toute.

    Ménager sa santé, en user avec prudence, avec circonspection.

  • 6Ménager une chose à quelqu'un, la lui procurer, la lui réserver. Vous aviez sans doute ordonné à vos peintres de vous ménager le plaisir de la surprise, Maintenon, Lett. à la duch. de Savoie, 1696, t. II, p. 215, dans POUGENS. Il ménage à l'esprit des espèces de repos que tout écrivain qui veut être lu et goûté doit avoir soin de placer de distance en distance, surtout s'il écrit pour des Français, D'Alembert, Éloges, l'abbé Dubos. L'entreprendre sans succès, c'est lui ménager un triomphe, Beaumarchais, Mère coupable, V, 4.

    Se ménager une chose, se la procurer, se la réserver. Se ménager des ressources pour l'avenir. M. de Montmort se ménagea encore un secours très utile ; il s'associa M. Nicole, jeune homme qui avait déjà quelque teinture de géométrie, Fontenelle, Montmort. Dès que nous aspirons à nous ménager leur faveur [des grands], il faut commencer par ménager leurs faiblesses, Massillon, Confér. Zèle contre les scandales. Les situations que nous nous ménageons à nous-mêmes, Massillon, Mystères, Soumission. Un siècle où toute la fermeté semble se réduire à ne pas se ménager soi-même des occasions de lâcheté, Massillon, Or. fun. Villars. Tel était l'asile que je m'étais ménagé, et où je résolus d'aller m'établir en quittant le val de Travers, Rousseau, Confess. XI.

  • 7Arranger graduellement. Ses amis ont résolu de lui ménager cette nouvelle, pour empêcher que le chagrin ne le fasse mourir, Fénelon, Solon. Si j'ai bien ménagé ma gradation, loin de s'effrayer au dernier masque, il [l'enfant] en rira comme du premier, Rousseau, Ém. I.
  • 8Disposer. Ce poëte a bien ménagé les incidents de son épopée, de sa tragédie, de sa comédie. Ce peintre a bien ménagé l'ombre et la lumière dans son tableau.

    Ménager un escalier dans un bâtiment, un cabinet dans un appartement, etc. faire en sorte qu'il s'y trouve de la place pour un cabinet, un escalier, etc. sans gâter le dessin principal. Dans le plancher du portique est ménagée une trappe par laquelle les castors descendent au bain, Chateaubriand, Amér. Hist. nat. castors.

    On dit dans le même sens : ménager un jour dans une maison, une issue dans une clôture.

  • 9Ménager une personne, l'esprit d'une personne, obtenir adroitement une certaine influence sur ses volontés, se conduire adroitement avec elle. Ou par vous, ou par lui, ménagez bien le père, Corneille, Suiv. III, 4. L'abbé de Grignan a si bien ménagé M. de Paris [l'archevêque], que le coadjuteur en sera reçu [à l'assemblée du clergé] comme un député très agréable et très cher, Sévigné, 31 mai 1675. Jules Mazarin… s'était donné à la France, et, propre par son génie et par ses correspondances à ménager les esprits de sa nation…, Bossuet, le Tellier. Quelques chefs qu'il avait soigneusement ménagés, Bossuet, Hist. I, 6. C'est un homme à ménager pour défendre l'autorité du saint-siége, Bossuet, Lett. quiét. 197. Il eut le soin de ménager l'esprit de son oncle, Hamilton, Gramm. 7. Je voudrais ménager ces deux femmes, de façon que l'une ou l'autre ne pût me manquer, Picard, Collatéral, IV, 7.

    Traiter avec égard, de manière à ne point offenser, à ne point déplaire. Ne savez-vous pas bien pourquoi je le ménage ? Molière, Mis. II, 1. Aujourd'hui toutefois, sans trop le ménager [un homme entiché de sa noblesse], Sur ce ton un peu haut je vais l'interroger, Boileau, Sat. V. Mais de nos alliés ne vous séparez pas, Ménagez-les, seigneur, Racine, Alex. I, 3. Nous lui laissons un maître, il le doit ménager, Racine, Andr. IV, 1. Personnes puissantes qu'on a besoin de ménager, Fénelon, Tél. XXIV. Le pape élu avait à ménager à la fois le sénat romain, le peuple et l'empereur, Voltaire, Mœurs, 30. Le vrai courage est celui qui combat les ridicules et les vices, ménage les personnes et obéit aux lois, D'Alembert, Essai sur la soc. des gens de lettres, Œuv. t. III, p. 92, dans POUGENS.

    Il se dit des choses, dans un sens analogue. Il n'y eut point dans son esprit de faiblesse à ménager, Fléchier, le Tellier. Il faut ménager votre honneur, Fénelon, Tél. XI. C'est une lâche timidité qui n'ose s'élever contre les préjugés communs et qui ménage plus les suffrages frivoles des hommes que leurs intérêts sérieux et éternels, Massillon, Confér. Zèle contre les scandales. La critique s'exerce sur l'ouvrage, et non sur la personne : elle ne doit ménager aucun défaut, si elle veut être utile, Voltaire, Comment. Corn. Rem. Sertor. préf. Ménager les préjugés, c'est manquer à la vérité ; ménager les vices, c'est rougir de la vertu, Diderot, Claude et Néron, II, 38. Ménage ma douleur, Voltaire, Tancr. IV, 6. Entraînons-le [le peuple] à la guerre, et, sans rien ménager, Succédons à César en courant le venger, Voltaire, M. de César, III, 8. Il ménageait toutes les faiblesses, il n'en avait aucune, Marmontel, Mém. X.

    Ménager les termes, les expressions, parler avec une grande circonspection. Le duc ne ménageait point les termes, Sévigné, 535.

    N'avoir rien à ménager avec quelqu'un, n'avoir plus de mesure à garder avec lui.

    Fig. Ménager la chèvre et le chou, voy. CHÈVRE ; la locution est aussi : sauver la chèvre et le chou, et vient d'un ancien conte où il s'agit de sauver la chèvre du loup et le chou de la chèvre.

  • 10Préserver du dommage. Je ne veux point dire ce que M. de Chaulnes m'a mandé [dans les troubles de Bretagne]… et comme il ménage [la terre de] Sévigné, qui est aux portes de Rennes, Sévigné, 27 oct. 1675.

    Ménager les intérêts de quelqu'un, avoir soin de les conserver, de ne pas les compromettre.

  • 11Ménager quelqu'un, user modérément des avantages qu'on peut avoir sur lui. Vous êtes plus fort que lui, ménagez-le. Il a passé l'âge où l'on se corrige ; il n'y a donc plus qu'à le ménager, Marmontel, Cont. mor. Connaiss. La douleur est déjà dans mon cœur, ménagez-moi, Staël, Corinne, IV, 6.

    Ménager quelqu'un, signifie aussi ne pas mal parler de lui. Rappelez en votre mémoire, avec quelle circonspection elle ménageait le prochain, et combien elle avait d'aversion pour les discours empoisonnés de la médisance, Bossuet, Reine d'Anglet.

  • 12Ménager un cheval, être attentif à ne point le fatiguer.
  • 13Se ménager, v. réfl. Être procuré, arrangé. Il semble que le mariage de Mlle de Laval se ménage avec M. de Roquelaure, Sévigné, 11 mai 1683.

    Se développer graduellement. Nous voulons qu'avec art l'action [d'un poëme dramatique] se ménage, Boileau, Art p. III.

  • 14Avoir soin de sa personne, de sa santé. Vous m'aviez tant promis de vous ménager que je comptais un peu plus sur les paroles que vous m'en aviez données, Sévigné, 417. Elle [Mme de Guitaut qui venait d'accoucher] ne s'est non plus ménagée sur le bruit que si elle était reine ou Dauphine, c'est tout dire, Sévigné, 26 mai 1681. Ceux qui le priaient de se ménager, Fléchier, Lam. Vous ne vous êtes pas ménagé pour le plaisir, Massillon, Carême, Resp. hum. Ménagez-vous, sire, et conservez-vous pour vos peuples, D'Alembert, Lett. au roi de Prusse, 14 nov. 1776. Nous avons nombre d'exemples d'hommes qui ont vécu cent dix ans et même cent vingt ans ; cependant ces hommes ne s'étaient pas plus ménagés que d'autres, Buffon, De la vieillesse et de la mort.
  • 15S'observer, user de retenue. Je me ménage [pour ne pas trop parler de Mme de Grignan] selon les lieux, les temps et les personnes avec qui je suis, Sévigné, 6 janv. 1672.
  • 16Avoir des égards, des ménagements les uns pour les autres. L'empereur et le pape se ménagent l'un l'autre, Voltaire, Ann. Emp. Frédéric 1er, 1155. On se ménagera davantage quand on aura plus de raisons de se ménager, Rousseau, Lett. à d'Alemb.
  • 17Se conduire avec adresse, avec circonspection. Vous me peignez fort plaisamment les manières dont elle s'est ménagée pour éviter de s'engager, Sévigné, 31 déc. 1684. L'âge viril… Se pousse auprès des grands, s'intrigue, se ménage, Boileau, Art p. III. Il trouve de grandes difficultés pour se ménager parmi tant de rois jaloux, Fénelon, Tél. XVI. Dans les occasions où il s'agit de se déclarer pour lui [Dieu], on mollit et on se ménage, Massillon, Myst. Pentec.

    Ne pas se ménager, n'avoir aucune modération, aucune retenue. Ils emploient les voies les plus injustes et ne se ménagent sur rien, Massillon, Panég. St Thom.

PROVERBE

Qui veut aller loin ménage sa monture, c'est-à-dire il faut éviter les excès ; il faut user avec ménagement des choses dont on veut se servir longtemps. Qui veut voyager loin ménage sa monture, Racine, Plaid. I, 1.

HISTORIQUE

XVe s. Guesclin menagea si bien les choses, qu'elles alloient de pair entre les deux parties, Mém. s. du G. ch. 6. La bonne femme qui menageoit [faisait le ménage] par leans, en sa main tenant un ramon [balai], demande…, Louis XI, Nouv. I.

XVIe s. Pour mesnager d'une pierre deux coups, Montaigne, IV, 318. Prens envie de sçavoir mesnager parfaitement ce que nous avons, La Boétie, 174. Aiant les levres sur son oreille et mesnageant ma voix, lui respondoit souvent : que dis-tu ? D'Aubigné, Hist. III, 285. De tel nom [ménage] est derivé le verbe mesnager, dont nous disons mesnager la santé, mesnager l'amitié, la faveur, la prosperité, l'occasion, le temps, le loisir, le plaisir, De Serres, 808.

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Étymologie de « ménager »

Ménage.

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(Verbe) (XVe siècle) De ménage. Le sens d’« habiter » apparaît dès 1309.
(Adjectif) (fin XVe siècle) De mainagier (1281), « homme du petit peuple, journalier », puis « habitant » ; de ménage.
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Phonétique du mot « ménager »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
ménager menaʒe

Fréquence d'apparition du mot « ménager » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « ménager »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « ménager »

  • On ne peut ménager la chèvre et le chou.
    Proverbe français
  • Ce rapport se concentre sur le volume et la valeur du marché Aspirateur ménager 2020-2024 au niveau mondial, régional et au niveau de l’entreprise. D’un point de vue mondial, ce rapport représente la taille globale du marché Aspirateur ménager en analysant les données historiques et les perspectives futures. Au niveau régional, ce rapport se concentre sur plusieurs régions clés: l’Amérique du Nord, l’Europe, la Chine et le Japon, etc.
    Marché Aspirateur ménager 2020 Concurrence par les fabricants, les utilisateurs finaux, le taux de concentration, le volume de production et les prévisions jusqu’en 2024 – Commune Magazine
  • Saviez-vous que l’enseignement ménager, autrefois dispensé aux jeunes filles françaises, avait vu naître sa première école à Reims ? Le succès du film “La Bonne Épouse”, actuellement en salles, est l’occasion de raconter l’histoire de cet établissement créé en 1873.  
    France 3 Grand Est — ​​​​​​​Reims : l’histoire de la première école ménagère pour jeunes filles
  • Pour ma part, je ne voyais pas Anselma d’un mauvais œil. Mais du moment qu’on est pauvre, n’est-ce pas ? on ne vous regarde même pas. Le plus drôle, c’est qu’à force de ménager la chèvre et le chou, elles n’auront rien au tout. Elles étaient aussi pressées que si leur pot avait senti le roussi, croyant déjà tenir le maître.
    Mariano Azuela — Mauvaise graine
  • Elle voulait que son Jacques ne frayât plus avec les savetiers, mais elle ne voulait pas perdre un auditoire. Mon aventure de mardi gras lui permit de basculer la situation, de ménager la chèvre et le chou.
    Jules Vallès — L’enfant
  • Vous voyez comme il nous la représente souveraine, faisant tout, disposant de tout, réglant tout, jém’y tiens : voilà ce que j’en crois ; et si, en tournant le Feuillet, ils veulent dire le contraire pour ménager la chèvre et les choux, je les traiterai sur cela comme ces ménageurs politiques ; ils ne me feront pas changer, je suivrai leur exemple, car ils ne changent pas d’avis pour changer de note.
    Mme de Sévigné — Lettres choisies
  • Lettre CLIII :Le Vicomte de Valmont à la Marquise de Merteuil.Je réponds sur-le-champ à votre Lettre, et je tâcherai d'être clair ; ce qui n'est pas facile avec vous, quand une fois vous avez pris le parti de ne pas entendre.De longs discours n'étaient pas nécessaires pour établir que chacun de nous ayant en main tout ce qu'il faut pour perdre l'autre, nous avons un égal intérêt à nous ménager mutuellement : aussi, ce n'est pas de cela dont il s'agit. Mais encore entre le parti violent de se perdre, et celui, sans doute meilleur, de rester unis comme nous l'avons été, de le devenir davantage encore en reprenant notre première liaison, entre ces deux partis, dis-je, il y en a mille autres à prendre. Il n'était donc pas ridicule de vous dire, et il ne l'est pas de vous répéter que, de ce jour même, je serai ou votre Amant ou votre ennemi. (…)Deux mots suffisent.Paris, ce 4 décembre 17**.Réponse de la Marquise de Merteuil (écrite au bas de la même Lettre).Eh bien ! la guerre.
    Pierre Choderlos de Laclos — Les Liaisons dangereuses

Traductions du mot « ménager »

Langue Traduction
Anglais to spare
Espagnol de sobra
Italien risparmiare
Allemand übrig haben
Chinois 腾出
Arabe للاحتياط
Portugais poupar
Russe жалеть
Japonais スペアに
Basque ordezko
Corse pà sparte
Source : Google Translate API

Antonymes de « ménager »

Combien de points fait le mot ménager au Scrabble ?

Nombre de points du mot ménager au scrabble : 9 points

Ménager

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