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Brusquer

Définitions de « brusquer »

Trésor de la Langue Française informatisé

BRUSQUER1, verbe trans.

I.− Traiter de manière brusque, violente.
A.− Brusquer qqn :
1. Ce dernier coup (...) rendit madame de La Chanterie d'une défiance envers elle-même qui l'isola d'autant plus de sa fille, que sa fille, en échange de sa mauvaise fortune, exigea presque sa liberté, domina sa mère, et la brusqua même quelquefois. Balzac, L'Envers de l'hist. contemp.,Madame de La Chanterie, 1850, p. 306.
Emploi pronom., rare. Se secouer, se faire violence. Hier, j'ai résolu de me brusquer pour me guérir (Delécluze, Journal,1825, p. 194).
B.− Brusquer qqc.Secouer, malmener :
2. Aujourd'hui, l'Empereur, bien qu'il ne fût pas mieux, a résolu de brusquer, disait-il, sa souffrance. Las Cases, Le Mémorial de Sainte-Hélène,t. 2, 1823, p. 79.
P. métaph. :
3. Presque tout homme, dont la jeunesse fut sensible, a eu également son histoire où la qualité principale de son âme et, en quelque sorte, la saveur naturelle de ses larmes, s'est produite, où il a apporté sa plus chère offrande pour prix de l'initiation à la vie; mais la plupart, loin de ménager et de respecter ce premier accomplissement en eux, le secouent, le brusquent, le dénaturent et finissent d'ordinaire par l'abolir ou le profaner. Sainte-Beuve, Volupté,t. 2, 1834, p. 269.
Spéc., ART MILIT. Brusquer une place de guerre, une position (Ac. 1835-78, Lar. 19e, Nouv. Lar. ill., Littré, DG).
II.− Hâter le cours normal ou naturellement lent, précipiter. Anton. ralentir :
4. On était en hiver, la pièce n'était pas chauffée. « Je sentais que je m'enrhumais », me disait M. Royer-Collard, qui, la porte entrouverte, avait un pied dans une chambre et l'autre pied dans l'autre; il abrégeait donc et brusquait la conversation, que M. de Vigny, au contraire, maintenait toujours. Sainte-Beuve, Pensées et maximes,1869, p. 139.
5. Mais le cœur d'Alban battait la chamade. L'appréhension montait en lui. Il ne se sentait plus capable de sourire, plus capable de parler. Il brusqua le départ. Montherlant, Les Bestiaires,1926, p. 522.
Au fig. et employé absol. Conclure, c'est brusquer, c'est trancher, c'est renoncer (Amiel, Journal intime,1866, p. 383).
SYNT. Brusquer l'aventure (Ac. 1835, 1878, Lar. 19e, Lar. encyclop., Littré). Prendre rapidement son parti des événements quand ils se présentent. Brusquer une affaire (Ac. 1798-1932); brusquer le dénouement (cf. Zola, La Curée, 1872, p. 518); initiative brusquée (cf. Mounier, Traité du caractère, 1946, p. 695).
Emplois techn.
ART MILIT. Brusquer la bataille. Ils [les Russes] furent les premiers à offrir la bataille, à la brusquer (Sainte-Beuve, Nouveaux lundis,t. 13, 1863-69, p. 89).Attaque brusquée (cf. Joffre, Mémoires, t. 1, 1931, p. 126 et Bordeaux, Les Derniers jours du fort de Vaux, 1916, p. 12).
Rare, LITT. et PEINT. Brusquer son trait. ... on a Montesquieu qui aiguise et qui brusque son trait (Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 3, 1848, p. 57).
Rem. On rencontre dans la docum. les néol. : a) Brusquailler, verbe trans. Malmener. Une voiture toute neuve en rodage, la brusquailler à ce point-là! (J. de La Varende, Le Souverain Seigneur, 1953, p. 141). b) Brusquiaire, subst. masc., vx. Homme brutal. ... il lui eût été plus que facile alors de brusquer le brusquiaire encore étourdi (L. Cladel, Ompdrailles, 1879, p. 16; attesté uniquement chez cet aut.). 1reattest. 1866 (Lar. 19e). Prob. empr. au prov. brusquiaire « celui, celle qui brusque tout le monde, emporté » (Mistral, s.v. brusquejaire), dér. du verbe brusquia « brusquer, rudoyer » v. brusquer, avec suff. -aire* issu du suff. -átor au cas sujet.
PRONONC. : [bʀyske], (je) brusque [bʀysk].
ÉTYMOL. ET HIST. − Mil. xviies. d'apr. DG signalé par Bouhours comme récent en 1692, Suites des Rem. 334 [et non comme le signale Lar. Lang. fr. dep. 1589, Chron. bordeloise qui renferme le verbe brusquer2, v. ce mot]. Dér. de brusque*; dés. -er.
STAT. − Fréq. abs. littér. : 239. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 157, b) 307; xxes. : a) 359, b) 497.

BRUSQUER2, verbe trans.

Chercher, partir à la conquête de. Brusquer la fortune :
... vous me voyez souvent si étourdie ou si audacieuse, brusquer la fortune que je pouvais attendre, changer d'idée au moment du succès, me lancer dans des périls que je connais... que je prévois... Scribe, La Camaraderie,1837, II, 3, p. 270.
Rem. Ce sens n'est pratiquement plus attesté que dans cette expr. figée.
Prononc. et Orth. Cf. brusquer1. Étymol. et Hist. Av. 1571 brusquant fortune (Carl. V, 6 dans Littré); 1589 brusquer (la) fortune « tenter la fortune par des moyens prompts mais hasardeux » (Chron. bordeloise, I, 296, Delpit. dans R. Hist. litt. Fr., 1898, p. 305). Altération sous l'infl. de brusquer1*, de busquer2*.
BBG. − Duch. 1967, § 28.

BRUSQUER3, verbe trans.

MAR. Brusquer un navire. Chauffer la carène d'un navire à l'aide de fagots de bruyère, pour l'assainir.
P. ext., ART CULIN., vx. Brusquer une volaille. La flamber.
Prononc. et Orth. Cf. brusquer1. Étymol. et Hist. 1. 1382 mar. brusquer, brusquier (Compte du clos des galées de Rouen, 96 dans R. Hist. litt. Fr., 1898, p. 305); 2. 1845 art culin. brusquer une volaille (Besch.). Empr. − soit à l'a. prov. bruscar « brûler l'extérieur d'un navire avec de la bruyère » (Pt Levy; cf. lat. médiév. bruscare, Marseille dans Du Cange t. 1, p. 761b), dér. de l'a. prov. brusc « bruyère » (xiies. Marcabru, forme brus), lui-même issu du b. lat. bruscus « fragon » seulement attesté en lat. médiév. : ixes. dans Mittellat. W. s.v., 1592, 12; bruscus est prob. issu du croisement du b. lat. des gloses brucus (bruyère*) et du lat. rūscum « fragon épineux » (d'où prov. rusc « houx » Pézénas, FEW t. 10, p. 586a); l'hyp., pour bruscus, brusc, de l'étymon lat. bruscum « nœud de l'érable » paraît moins vraisemblable du point de vue sém., cf. cependant les développements sém. de son dér. *bruscia, v. brosse et broussaille; − soit à l'a. ital. bruscare (EWFS2) attesté comme terme de mar. « brûler la carène d'un navire » dep. 1270, Venise dans DEI, lui-même dér. de l'ital. brusco « fragon épineux », de même orig. que l'a. prov. brusc (REW3, no7460).

Wiktionnaire

Verbe - français

brusquer \bʁys.ke\ transitif 1er groupe (voir la conjugaison)

  1. Traiter d’une manière brusque.
    • C’est un homme grossier, il brusque tout le monde.
  2. Précipiter les événements avant le temps voulu.
    • Le capitaine, loin de renoncer à ses projets, avait au contraire résolu d’en brusquer l’exécution, …. — (Gustave Aimard, Les Trappeurs de l’Arkansas, Éditions Amyot, Paris, 1858)
    • Il a brusqué son affaire, il l’a faite vite, sans préparation, sans ménagement.
  3. (En parlant d’une place de guerre) L'emporter d’emblée.
  4. (Chantier naval ancien) (Désuet) Chauffer un navire pour le caréner. [2]
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

BRUSQUER. v. tr.
Traiter d'une manière brusque. C'est un homme grossier, il brusque tout le monde. Il se dit aussi des choses et signifie Précipiter les événements avant le temps voulu. Brusquer la fortune, Tenter de réussir par des moyens prompts, mais hasardeux. Brusquer l'aventure, Prendre brusquement son parti, au hasard de ce qui peut en arriver. Brusquer une affaire, La faire vite, sans préparation ou sans ménagement. On dit de même Brusquer le dénouement d'une pièce de théâtre.

Littré (1872-1877)

BRUSQUER (bru-ské) v. a.
  • 1Avoir, à l'égard de quelqu'un, un langage brusque, un ton brusque. Pour peu que j'eusse parlé, je n'aurais pu m'empêcher de le brusquer, Montesquieu, Lett. pers. 48. Les ministres du roi (Sully entre les autres) ne furent point d'avis qu'on brusquât ce jeune imprudent, Anquetil, Ligue, III, 170. On ne saurait lui dire une parole qu'il n'éclate tout d'un coup et qu'il ne vous brusque sans modération et sans ménagement, Bourdaloue, Pensées, t. II, p. 240.

    Absolument. Il semble toujours commander et brusquer, Diderot, S. l. caract.

  • 2Presser, hâter. C'était le moment de brusquer l'entreprise. Brusquer la victoire.

    Brusquer la fortune, chercher fortune et principalement la chercher par des moyens prompts et hasardeux. En différents pays j'ai brusqué la fortune, Sans que l'on ait de moi reçu nouvelle aucune, Regnard, Ménechmes, I, 2. Ce furent les Anglais et les Hollandais qui brusquèrent fortune, Des Font. Mém. de Trév. 1724.

    Brusquer une affaire, la faire vite et avec peu d'examen. J'avais un voyage en tête à brusquer dont je parlerai tout à l'heure, Saint-Simon, 41, 222.

    Familièrement. Brusquer l'aventure, prendre brusquement son parti, au hasard de ce qui peut arriver.

    Terme de théâtre. Brusquer un dénoûment, l'amener sans préparation.

    Terme militaire. Brusquer une place de guerre, essayer de l'emporter par un coup de main.

  • 3Surprendre en violentant. Nous avons, pour ainsi dire, brusqué la nature en amenant dans nos climats des chevaux d'Afrique ou d'Asie, nous avons rendu méconnaissables les races primitives de France, Buffon, Cheval.

    Brusquer les dés, jeter les dés vivement et tout d'un coup. Le joueur qui pouvait, par un art illicite, flatter ou brusquer les dés selon l'occasion, Montesquieu, Correspondance, 1.

HISTORIQUE

XVIe s. Il se trouva 200 italiens etc. …tuez, qui s'escartoient par les villaiges deça de-là, brusquant fortune et leurs commoditez, par trouppes, Carloix, V, 6.

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Étymologie de « brusquer »

Brusque ; Berry, bruquer, heurter, choquer. Dans l'historique, brusquer a le sens de chercher, proprement aller par les broussailles ; ce qui tend à confirmer l'étymologie latine indiquée pour l'italien brusco (voy. BRUSQUE). Bouhours remarque que l'emploi de brusquer dans le sens de rudoyer est récent, et que sans doute, du discours familier, il ne tardera pas à passer dans les livres ; cela est en effet arrivé.

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Phonétique du mot « brusquer »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
brusquer bryske

Fréquence d'apparition du mot « brusquer » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « brusquer »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « brusquer »

  • A brusquer on s’expose, on offre, on se donne...
    Maryline Desbiolles
  • Une fois que l'on se sent prêt à en parler autour de soi, il est préférable d'amener le sujet en petit comité, dans un moment où vous sentez que vous pouvez avoir toute l'attention de votre interlocuteur. Évitez de commencer directement en disant que vous avez une maladie grave pour ne pas brusquer trop rapidement votre entourage ni en utilisant un vocabulaire trop technique.
    www.pourquoidocteur.fr — Comment annoncer à ses proches une maladie grave ?
  • À une époque où il ne fallait surtout pas brusquer le public, le jeune Tsubasa Ōzora s'appelait "Olivier Atton", et s'il se déplaçait, c'était a priori pour gagner. Plus fort que les ravages du temps, le numéro 10 de la Nankatsu SC n'a pas raccroché les crampons (ni les wagons), bien au contraire.
    Gameblog — Captain Tsubasa Rise of New Champions récapitule ses nombreux modes dans un GROS trailer

Traductions du mot « brusquer »

Langue Traduction
Anglais rush
Espagnol apurar
Italien affrettare
Allemand überstürzen
Portugais apressar
Source : Google Translate API

Synonymes de « brusquer »

Source : synonymes de brusquer sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « brusquer »

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Nombre de points du mot brusquer au scrabble : 19 points

Brusquer

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