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Fatiguer

Définitions de « fatiguer »

Trésor de la Langue Française informatisé

FATIGUER, verbe.

I.− Emploi trans.
A.− Dans le domaine physiol.
1. [En parlant de l'homme]
a) [Le compl. d'obj. dir. désigne une pers.] Provoquer une diminution des forces de l'organisme, généralement par une activité excessive ou trop prolongée. Fatiguer un malade. La chaleur nous fatigue beaucoup (Lamart., Voy. Orient,t. 1, 1835, p. 382).Des courses en ville m'avaient fatigué et je suis tombé sur mon lit où j'ai essayé de lire (Green, Journal,1945, p. 258):
1. ... je ne vous conseillerais pas de monter nos quatre-vingt-dix-sept marches, juste la moitié du célèbre dôme de Milan. Il y a de quoi fatiguer une personne bien portante, d'autant plus qu'on monte plié en deux si on ne veut pas se casser la tête... Proust, Swann,1913, p. 105.
P. métaph. Le vent, sans repos, fatigue la mer, fatigue la côte nue, rongée par lui, à peine vêtue d'herbe (Maupass., Contes et nouv.,t. 1, Vendetta, 1883, p. 117).
Fam. [Forme impers. + de + inf.] Celui-là ne passait jamais au soleil parce que ça le fatiguait de traîner son ombre (Pagnol, Marius,1931, I, 3, p. 30).
[Emploi fréq. au part. passé exprimant un état] Corps fatigué. Je suis fatigué à la mort (Stendhal, Rouge et Noir,1830, p. 386).
[suivi d'un compl. désignant la cause introduit par une prép.] [+ par] Il souffla un instant, fatigué par la montée du large perron (Zola, Nana,1880, p. 1282).
[+ à] Fatiguée au moindre effort, Mme de Guermantes disait énormément de bêtises (Proust, Temps retr.,1922, p. 1005).
[+ de + subst. ou verbe à l'inf.] Il se sentait fatigué d'avoir tant marché avec moi (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène,t. 1, 1823, p. 571).
b) [Le compl. d'obj. dir. désigne une partie de l'organisme] Affecter (un organe) de manière pénible au point d'en empêcher le fonctionnement normal. J'ai cruellement toussé cette nuit, ce qui m'a fatigué la poitrine, les yeux et la tête du même coup (Amiel, Journal,1866, p. 59).Mon édition de Shakespeare est en trop petits caractères et me fatiguait les yeux (Gide, Journal,1914, p. 423).
[Au part. passé exprimant un état] J'ai le cœur fatigué depuis quelques jours (Gide, Journal,1914p. 450).L'air vif pénétrait leurs poumons fatigués (Gracq, Argol,1938, p. 92).
[Suivi d'un compl. désignant la cause introduit par une prép.]
[+ par] L'estomac encore tout fatigué par le plantureux déjeuner que les Cattan m'avaient offert (Gide, Journal,1914p. 169).
[+ de + subst. ou verbe à l'inf.] J'ai les yeux fatigués de tant chercher (Saint-Exup., Courr. Sud,1928, p. 75).
c) [En parlant d'un attribut de la pers. emploi fréquent au part. passé exprimant un état] Qui manifeste la fatigue d'une personne.
[En parlant d'un comportement humain] Il faut bien en finir, dit Vallagnosc, avec un mouvement fatigué des paupières (Zola, Bonh. dames,1883, p. 453).Jacques errait à travers la chambre, d'un pas fatigué (Martin du G., Thib.,Sorell., 1928, p. 1245).
P. méton. Ce n'est pas pour vous, mon cher Lefebvre, que ma plume est fatiguée (Lamart., Corresp.,1834, p. 25).
[En parlant d'une partie du corps] Air fatigué; traits, yeux fatigués; figure, voix fatiguée. Je vous trouve le visage fatigué (Arland, Ordre,1929, p. 195).
P. anal. [En parlant d'une plante] Qui montre des signes d'épuisement. [Les anémones] laissaient se courber leurs tiges fatiguées (Maurois, Ariel,1923, p. 19).
d) Emploi pronom.
α) [Le suj. désigne une pers.]
Se donner de la fatigue. Tu te fatigues toutes les fois que tu sors (Maupass., Contes et nouv.,t. 2, Soirée, 1883, p. 585).Très vite, les prisonniers se fatiguaient, épuisés par leur jeûne (Zola, Débâcle,1892, p. 469).Le malade fait signe qu'il se fatigue (Martin du G., J. Barois,1913, p. 256).
[Suivi d'un compl. désignant la cause ou la finalité]
[+ à + verbe à l'inf. ou + subst.] Dis à mon bon père qu'il ne se fatigue pas trop aux travaux de tête (Hugo, Corresp.,1825, p. 410).Ne te fatigue donc pas à parler (Proust, Guermantes 1,1920, p. 312).
[+ en (qqc.)] Il préférait sortir, se fatiguer en promenades lointaines (Zola, Germinal,1885, p. 1351).
[+ par] L'âme se fatigue par trop de contemplation (Staël, Allemagne,t. 2, 1810, p. 150).
[+ pour] Comme tout chasseur qui s'est fatigué pour rien (Dumas père, Monte-Cristo,t. 1, 1846, p. 380).
Loc. fam., p. iron. Ne pas se fatiguer. Ne rien faire.
Pronom. réfl. indir. Provoquer la fatigue (d'un de ses organes, d'une de ses facultés). Ça permettait de manger douze heures à la file, sans se fatiguer l'estomac (Zola, Assommoir,1877, p. 567).Ils parlèrent (...) de toutes les choses courantes sur lesquelles on peut discourir indéfiniment sans se fatiguer l'esprit (Maupass., Bel-Ami,1885, p. 33).Vous allez encore vous fatiguer les yeux (Duhamel, Passion J. Pasquier,1945, p. 95).
β) [Le suj. désigne une partie du corps] Devenir fatigué. Décidément, disait-il, ma pauvre tête se fatigue (Balzac, Lys,1836, p. 75).
[Suivi d'un compl. désignant la cause, introduit par une prép.] C'était l'heure où les yeux se fatiguent à vouloir discerner les contours (Martin du G., Thib., Belle sais., 1923, p. 982).Si loin et si droit fuyait la ligne du fossé que la vue se fatiguait à la suivre (Green, Journal,1941, p. 68).
P. anal. [En parlant d'une plante] Toute tête qui n'est point rafraîchie à temps par la taille se fatigue (Pesquidoux, Livre raison,1925, p. 1).
2. [En parlant d'un animal] Imposer un effort pénible (à un animal) au point de le rendre incapable d'exécuter plus longtemps ce qui lui est demandé. Il est inutile de fatiguer les chevaux (Mille, Barnavaux,1908, p. 291).
Spéc. Manœuvrer (un animal) de façon à diminuer sa résistance pour le maîtriser. Leurs passades propres à fatiguer et éberluer le taureau (Gide, Thésée,1946, p. 1423).[En partic. d'un poisson] Cf. Schreiner 1975.
[Au part. passé exprimant un état] Des laboureurs ramènent leurs bœufs fatigués à leur chaumière (Chateaubr., Natchez,1826, p. 311).
P. anal. Le canon fatigué n'aboyait plus (Dorgelès, Croix de bois,1919, p. 245).
[Suivi d'un compl. désignant la cause, introduit par une prép.] Les flancs du cheval fatigué d'une longue course (Lamart., Voy. Orient,t. 1, 1835, p. 71).
B.− P. anal. et au fig.
1. [En parlant de l'homme]
a) [Le compl. d'obj. dir. désigne une pers.]
Décourager quelqu'un, lui enlever l'envie de poursuivre ce qu'il a commencé. Fatiguer le lecteur. J'y suis dans une position fausse et avec un rôle incertain, qui me fatigue et me rend malheureux (Maine de Biran, Journal,1816, p. 109).Le paysage monotone, qui fatigue le passager, est déjà autre pour l'équipage (Saint-Exup., Terre hommes,1939, p. 153):
2. Maintenant, il préférerait être serrurier. La serrurerie le fatigua. En deux années, il tenta plus de dix métiers. Florent pensait qu'il avait raison, qu'il ne faut pas se mettre dans un état à contre cœur. Zola, Ventre Paris,1873, p. 642.
[Au part. passé exprimant un état; avec un compl. désignant le moyen ou la cause, introduit par une prép. de + subst. ou verbe à l'inf.] Fatigué de ce plaisir usé, il rentra dans son hôtel de la rue de Lille (Maupass., Contes et nouv.,t. 1, Rencontre, 1884, p. 937).Je suis fatigué de lire des livres qui me parlent de notre monde absurbe et criminel (Green, Journal,1943, p. 17).Un homme prématurément fatigué de l'existence (Camus, Possédés,1959, 1repart., 4etabl., p. 983).
[Avec l'idée d'une diminution du pouvoir d'attention, d'écoute ou de compréhension de qqn] Importuner, lasser.
[Suivi d'un compl. de moyen introduit par une prép. de, par] Comme un voyageur qui débarque au port, et que tous les courtiers d'hôtellerie fatiguent de leurs recommandations (Balzac, Cous. Pons,1847, p. 282).Il fatiguait le ministre par ses demandes continuelles de secours (Flaub., Éduc. sent.,t. 1, 1869, p. 25).Elle a déjà dit l'an passé que vous la fatiguiez de vos avances (Proust, Prisonn.,1922, p. 277).
Au passif. Elle était aussi dégoûtée de lui qu'il était fatigué d'elle (Flaub., Mme Bovary,t. 2, 1857, p. 142).Je suis fatigué de vous, Soubrier, affreusement fatigué de vous (Montherl., Ville dont prince,1951, I, 1, p. 857).
b) [Le compl. d'obj. dir. désigne une faculté psychique, une attitude, un comportement, etc.] Atténuer la vivacité (de quelque chose). Elles se blasent ainsi souvent d'elles-mêmes en fatiguant leurs désirs dans le vide (Balzac, Illus. perdues,1843, p. 136).Pour fatiguer mon ennui, je me donnais à mes amis politiques (Barrès, Jard. Bérén.,1891, p. 169):
3. Ce mot-là, je devine qu'il va bientôt prendre la place de plusieurs images que j'aime. Aussitôt je m'arrête, je pense vite à autre chose; je ne veux pas fatiguer mes souvenirs. En vain, la prochaine fois que je les évoquerai, une bonne partie s'en sera figée. Sartre, Nausée,1938, p. 52.
Au part. passé. Pour rafraîchir les images que ma mémoire fatiguée ne retrouvait plus (Proust, Swann,1913, p. 401).Dans ses gestes, il y avait un charme fatigué (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 244).Je voyais peu de monde, entretenais la survie pénible d'une ou deux liaisons fatiguées (Camus, Chute,1956, p. 1528).
P. ext. [En parlant d'un comportement social] Le goût moderne fatigué vomit les bibelots (Mauriac, Journal,1934, p. 66).
c) Emploi pronom. à valeur passive
Se décourager, ne plus avoir envie de poursuivre. Ma tendresse est inaltérable et ne se fatiguera jamais (Balzac, Lettres Étr.,t. 2, 1850, p. 78).
[Avec un compl. de moyen introduit par une prép. de + subst. ou verbe à l'inf.] Le petit prince se fatigua de la monotonie du jeu (Saint-Exup., Pt Prince,1943, p. 445).On se fatigue de vivre toujours seul (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 450).
Être importuné (par quelqu'un), ne plus pouvoir le supporter. Ils finissent par se fatiguer l'un de l'autre et chacun se marie de son côté (Lemaitre, Contemp.,1885, p. 314).Après s'être fatigué des inconnus qu'il rencontrait (Proust, Prisonn.,1922, p. 210).
2. [Le compl. d'obj. dir. désigne une chose]
a) Dans le domaine phys.[Avec l'idée d'affecter le fonctionnement normal d'une chose] Diminuer la résistance (d'une chose), sa solidité, par une trop longue ou trop violente utilisation. Sur le pont d'un esquif, qu'a fatigué la lame (Lamart., Harmonies,1830, p. 328).Tel que t'es, t'as pas dû fatiguer les bancs du catéchisme (Bernanos, Crime,1935, p. 778):
4. Je retroussai mes manches, et je me mis à fatiguer à tour de bras une espèce de pompe qui sifflait, soufflait, râlait comme un poitrinaire pour lâcher un filet d'eau pareil à l'écoulement d'une fontaine Wallace. Maupass., Contes et nouv.,t. 1, Père Mongilet, 1885, p. 542.
[Au part. passé exprimant un état; en parlant d'un obj., d'un vêtement, etc., qui n'est plus ce qu'il devrait être] Qui est usagé, voire assez usé. Reliure fatiguée; volume, ressort fatigué. Dans la rouge cabine, meublée d'un divan fatigué (Huysmans, Art mod.,1883, p. 123).Tous ces gens rassemblés là, avec leurs soutanes fatiguées (Barrès, Colline insp.,1913, p. 139).La petite glace que Juliette sortait de son sac fatigué (Triolet, Prem. accroc,1945, p. 61).
[Avec un compl. désignant la cause, introduit par une prép.] Il s'est allongé dans un lit fatigué par les voyageurs de commerce (Romains, Hommes bonne vol.,1932, p. 65).C'était de vieilles machines fatiguées par la guerre (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 217).
Emploi pronom. à valeur passive. Malgré qu'il se fatigue et commence à branler, Le monument sait faire encore une assemblée (Romains, Vie unan.,1908, p. 74).
P. ext. Diminuer l'importance (d'une chose), la réduire. Ma vie de garçon a fatigué mon patrimoine encore plus que moi (Augier, Beau mar.,1859, p. 137).
Emploi pronom. Ils attendaient que la chaleur se fatiguât (Beauvoir, Mandarins,1954p. 224).
b) Dans le domaine abstr.,emploi factitif. Rendre fatigant. Le rôle du romancier est de voir et de dire ce qu'il a vu. S'il veut « penser », qu'il le fasse ailleurs que dans un roman. Cette parade intellectuelle alourdit et fatigue le récit (Green, Journal,1946-50, p. 213).
c) Spécialement
Vx. Fatiguer la terre. La retourner plusieurs fois. L'homme en la fatiguant fertilise la terre (Lamart., Chute,1838, p. 959).
Région. Fatiguer la salade. La remuer, la tourner après l'avoir assaisonnée. Je n'aurais qu'à mettre à réchauffer le potage et à fatiguer la salade (Arnoux, Double chance,1958, p. 37).
PEINT. Retoucher à plusieurs reprises jusqu'à affadir le contraste des tons. Un peintre peut fatiguer sa toile; un écrivain ne fatigue pas son manuscrit (Martin du G., Souv. autobiogr.,1942, p. cxv).
II.− Emploi intrans.
A.− Rare. [Le suj. désigne une pers. ou un de ses attributs] Se donner de la fatigue par une activité ou un travail excessif. Il fatigue trop (Ac.). Ma tête fatigue encore facilement (Nerval, Corresp.,1830-55, p. 254).On ne fatigue pas. On n'a pas besoin de manger beaucoup (Renard, Journal,1906, p. 1062).Quand on débarque à Paris, continuait Louise, les premiers temps, on fatigue (Dabit, Hôtel Nord,1929, p. 185).
P. anal. Le moteur fatigue dans la montée (Rob.).
B.− [Le suj. désigne une chose concr.] Se déformer à la suite d'un effort trop grand. Cette poutre fatigue (Ac.)
MAR. [Le suj. désigne un bateau, sa mâture] Être fortement ébranlé par l'effet du vent ou de la mer déchaînée. Un bâtiment fatigue lorsque (...) ses liaisons sont fortement ébranlées et éprouvent des actions autres que celles qu'elles devraient supporter (Gruss1952).
Rem. On rencontre ds la docum. fatiguoir, subst. masc., rare. Lieu où l'on se fatigue. Dites donc, Marcel, (...) on ne peut pas le visiter en votre absence, votre petit reposoir? − Mon petit fatiguoir? (Colette, Cl. ménage, 1902, p. 232).
Prononc. et Orth. : [fatige], (je) fatigue [fatig]. Ds Ac. 1694-1932. Les verbes en -guer conservent gu dans toute la conjug., même devant a et o, contrairement à la règle gén. qui veut que [g] ne se traduise par gu que devant e, i, y : nous fatiguons, il fatiguait, en se fatiguant. Les adj. verbaux (parfois subst.) se distinguent ainsi des part. prés. correspondants. Ex. : Adj. (subst.) verbal : extravagant (un homme), fatigant (un travail), fringant (un air), intrigant (un conseiller, un), navigant (le personnel, un). Part. prés. : extravaguant, fatiguant, fringuant (vx verbe fringuer), intriguant, naviguant (cf. Gak, Orth. du fr., Paris, Selaf, 1976, p. 159). Étymol. et Hist. 1. Début xives. pronom. « épuiser ses forces par un effort long ou pénible » (Aimé de Montcassin, Hist. des Normands, éd. V. de Bartholomaeis, II, 7, p. 65); 2. av. 1660 « rebuter par l'ennui » (Scarr[on] ds Rich.). Empr. au lat. class. fatigare « épuiser; tourmenter ». Fréq. abs. littér. : 1 744. (fatiguant : 37). Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 2 227, b) 2 857; xxes. : a) 2 664, b) 2 386. Bbg. La Landelle (G. de). Le Lang. des marins, Paris, 1859, p. 271.

Wiktionnaire

Verbe - français

fatiguer \fa.ti.ɡe\ transitif, intransitif ou pronominal 1er groupe (voir la conjugaison) (pronominal : se fatiguer)

  1. Affaiblir par une trop grande dépense de force.
    • « Citoyens, je vous apporte le mot d’ordre de la résistance. — « Ne pas se lever ; attendre ; laisser se fatiguer la troupe ! » — (Jules Vallès, Le Bachelier, G. Charpentier, 1889)
    • J’y trouve des Othello couverts de raisins, on a même la précaution de supprimer les mannes pour ne pas fatiguer le cépage. — (M. A. Bouchard, Une Mission viticole, imprimerie Lachèse & Dolbeau, Angers, 1891, page 31)
    • Fatiguer un cheval.
    • Cette charge me fatigue beaucoup.
    • Fatiguer l’ennemi.
    • Cette étude fatigue l’esprit.
    • Une lumière trop vive fatigue la vue.
    • Vous me fatiguez les oreilles avec vos contes.
    • Je me fatigue inutilement à lui expliquer cela.
    • Mes yeux commencent à se fatiguer.
  2. Abimer par l'usage.
    • A quoi je répondrai qu'un bibliophile sérieux ne communique pas ses livres. Lui-même ne les lit pas, de crainte de les fatiguer. — (Gérard de Nerval, Les Filles du feu, Angélique, 1854)
    • Un volume fatigué : Un volume qui a beaucoup servi.
    • Une voix fatiguée : Une voix qui a perdu sa fraîcheur, son éclat.
  3. (Peinture, Sculpture) Travailler, refaire fréquemment quelque chose.
    • Fatiguer la couleur, peindre, repeindre, changer les teintes, et les changer encore, sans une intention bien arrêtée, de manière que les tons perdent leur franchise et le coloris sa fraîcheur.
  4. (Figuré) Assourdir, atténuer.
    • Coloris fatigué, couleur qui a perdu son éclat, demi-teinte.
  5. (Figuré) Ennuyer ; lasser.
    • Cette liaison nouée sur les tombes dura trois semaines environ. Mais on se fatigue de tout, et principalement des femmes. — (Guy de Maupassant , Les Tombales, dans La maison Tellier, 1891, collection Le Livre de Poche, page 69)
    • Lorsqu'il est fatigué de rêver à Marion et au bonheur qui sera le leur, il songe à ceux qui, au cours de ces dernières années, l'ont aidé. — (Charles Exbrayat, Les Bonheurs courts, tome 1 : La Lumière du matin, éd. Albin Michel, 1981)
    • Il fatigue tout le monde du récit de ses aventures.
    • Il me fatigue par ses visites.
    • Cet auteur fatigue le public.
  6. (Figuré) Épuiser.
    • Fatiguer un champ : L’épuiser en le forçant à produire une même récolte plus souvent qu’il ne faudrait.
  7. (Figuré) (Cuisine) Remuer fréquemment.
    • Fatiguer une salade, la remuer fortement pour y mêler l’assaisonnement.
  8. (Intransitif) Se donner de la fatigue, éprouver de la fatigue.
    • Il fatigue trop.
    • Les soldats fatiguèrent beaucoup dans cette marche.
  9. (Intransitif) Avoir à supporter un trop grand effort.
    • Cette poutre fatigue : Elle plie sous le poids.
    • Ce navire fatigue : Il a à lutter contre la violence des vagues.
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

FATIGUER. v. tr.
Affaiblir par une trop grande dépense de force. Fatiguer un cheval. Cette charge me fatigue beaucoup. Fatiguer l'ennemi. Cette étude fatigue l'esprit. Une lumière trop vive fatigue la vue. Vous me fatiguez les oreilles avec vos contes. Se fatiguer trop. Je me fatigue inutilement à lui expliquer cela. Mes yeux commencent à se fatiguer. Je me sens très fatigué. Des troupes fatiguées. J'ai le bras fatigué. Un volume fatigué, Un volume qui a beaucoup servi. Une voix fatiguée, Une voix qui a perdu sa fraîcheur, son éclat. En termes de Peinture et de Sculpture, Fatiguer un ouvrage, Le travailler, le retoucher fréquemment et avec un soin pénible qui se laisse apercevoir quand l'ouvrage est terminé. Fatiguer la couleur, Peindre, repeindre, changer les teintes, et les changer encore, sans une intention bien arrêtée, de manière que les tons perdent leur franchise et le coloris sa fraîcheur. Tableau fatigué, se dit aussi d'un Tableau qui, à force d'être nettoyé, a perdu quelque chose de ses demi-teintes. Fatiguer une salade, La remuer fortement pour y mêler l'assaisonnement. Il signifie au figuré Ennuyer, lasser. Il fatigue tout le monde du récit de ses aventures. Il me fatigue par ses visites. Cet auteur fatigue le public. Fig., Fatiguer un champ, L'épuiser en le forçant à produire une même récolte plus souvent qu'il ne faudrait. Il est aussi intransitif et signifie Se donner de la fatigue, éprouver de la fatigue. Il fatigue trop. Les soldats fatiguèrent beaucoup dans cette marche. Il signifie aussi Avoir à supporter un trop grand effort. Cette poutre fatigue, Elle plie sous le poids. Ce navire fatigue, Il a à lutter contre la violence des vagues.

Littré (1872-1877)

FATIGUER (fa-ti-ghé), je fatiguais, nous fatiguions, vous fatiguiez ; que je fatigue, que nous fatiguions, que vous fatiguiez v. a.
  • 1Causer de la fatigue. Fatiguer un cheval. Fatiguer l'ennemi. Ces ouvrages avaient été achevés sans fatiguer les sujets, Bossuet, Hist. III, 3. Des bourreaux son courage a fatigué la main, Legouvé, Épich. et Nér. v, 8.

    Fig. On dit qu'une poignée de chrétiens font suer les Ottomans et fatiguent leur empire, Montesquieu, Lett. pers. 19. Agiter l'Europe pour n'être pas oisif, serait le métier d'un intrigant qui fatigue la renommée un jour, parce qu'il n'a pas le crédit de vivre sur une administration bienfaisante, Mirabeau, Collection, t. v, p. 315.

  • 2Causer un certain malaise comparé à la fatigue. Cette écriture fatigue les yeux. Ce long discours lui a fatigué la voix. Ce professeur a fatigué l'attention de ses auditeurs. Cette étude fatigue l'esprit.

    Absolument. C'est une étude qui fatigue.

  • 3Fatiguer un champ, lui faire produire une même récolte plus souvent qu'il ne faudrait.

    Terme d'horticulture. Fatiguer un arbre, lui laisser trop de fruits ou trop de bois.

    Terme de boulangerie. Fatiguer les levains, les prendre trop petits à proportion de la pâte dans laquelle on les fait entrer pour la faire lever.

  • 4Importuner. Ainsi donc mes bontés vous fatiguent peut-être ? Racine, Bérén. II, 4. Elle m'a fatigué de ce nom ennemi, Racine, Brit. IV, 3. Leur prompte servitude a fatigué Tibère, Racine, ib. IV, 4. Ce sceptre, cet empire… fatiguent souvent leur triste possesseur, Racine, Esth. II, 7. Je n'ose fatiguer M. le duc d'Aiguillon de cette affaire particulière ; il est assez occupé de celles du Nord, Voltaire, Lett. d'Argental, 28 juin 1773.

    Dans le style élevé, fatiguer le ciel de ses vœux, de ses prières, adresser au ciel des demandes incessantes. [Elle]… fatigue le ciel par des vœux superflus, Corneille, Othon, v, 6. Ce fils, je l'obtins en fatiguant le ciel de vœux, Molière, le Fest. IV, 1. Et je m'en vais pleurer leurs faveurs meurtrières Sans plus les fatiguer d'inutiles prières, Racine, Phèdre, v, 7. Sans fatiguer le ciel par des vœux inutiles, Massillon, Carême, Prière 2.

  • 5 Familièrement. Fatiguer une salade, la retourner longtemps.

    Fatiguer la terre, la retourner souvent. J'ai dans mon voisinage des camarades qui fatiguent un terrain ingrat avec quatre bœufs, Voltaire, Mél. littér. à M. Dupont.

    Racine a dit, en un sens analogue, fatiguer la mer. Et la rame inutile Fatigua vainement une mer immobile, Racine, Iphig. I, 1.

    Terme d'arts. Fatiguer un ouvrage, le retoucher avec un soin trop minutieux. Saint Chrysostome fatigue son style à la manière d'Isocrate, Chateaubriand, Génie, III, IV, 2.

    Fatiguer la couleur, y porter à diverses reprises le pinceau, de sorte que le coloris perd sa fraîcheur et les tons leur franchise.

  • 6 V. n. Se donner, éprouver de la fatigue. Quoique le roi ne fût pas en état de fatiguer, Vaugelas, Q. C. 427. Certain fou poursuivait à coups de pierre un sage, Le sage… lui dit… reçois cet écu ; Tu fatigues assez pour gagner davantage, La Fontaine, Fabl. XII, 22. Plus les troupes fatiguaient, plus il semblait qu'elles redoublassent de vigueur, Racine, Siége de Namur.
  • 7 Par extension. Ce support fatigue beaucoup. Une poutre qui fatiguait rompit.

    Se dit d'un vaisseau qui, violemment tourmenté par les lames, a de grands mouvements de tangage ou de roulis, et, par cette raison, éprouve, dans ses liaisons et dans sa mâture, de certains désordres qui peuvent avoir de fâcheuses conséquences pour leur solidité, Jal

    On dit que l'argent fatigue, quand il est constamment placé à intérêt. Plus notre argent fatigue, et plus il nous rapporte, Regnard, Joueur, II, 14.

  • 8Se fatiguer, v. réfl. Ressentir de la fatigue. Je me suis fatigué à la chasse. Mes yeux commencent à se fatiguer. Je me fatiguerais à te tracer le cours Des outrages cruels qu'il me fait tous les jours, Boileau, Lutr. II.

    On dit aussi se fatiguer de. On se fatigue même du plaisir.

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Encyclopédie, 1re édition (1751)

FATIGUER un arbre, (Jardinage.) en laissant trop de fruit ou trop de bois à un arbre, on le fatigue trop ; on l’expose à avorter, à devenir rabougri, & enfin à périr. (K)

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Étymologie de « fatiguer »

Provenç. et espagn. fatigar ; ital. faticare ; du latin fatigare, d'un radical fat, fass ou fess (fessus, las, fatiscere, se lasser), et un suffixe igare, comme fumigare, lævigare. Igare paraît représenter agere, pousser.

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(Siècle à préciser) Du latin fatigare.
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Phonétique du mot « fatiguer »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
fatiguer fatige

Fréquence d'apparition du mot « fatiguer » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « fatiguer »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « fatiguer »

  • La paresse ne peut se passer de travail ; on se repose voluptueusement que si l'on a pu se fatiguer.
    Antoine de Rivarol
  • La gêne du commandement fatiguera comme celle de l'obéissance.
    Montesquieu
  • Le troisième empereur de la vingt et unième dynastie, à qui on apporta des pierres précieuses trouvées dans une mine, la fit fermer, ne voulant pas fatiguer son peuple à travailler pour une chose qui ne pouvait ni le nourrir ni le vêtir.
    Montesquieu — De l’esprit des lois
  • La technologie comporte son lot d’avantages, mais il y a un prix à payer. « Huit heures par jour devant un écran, c’est trop, affirme François Courcy, professeur titulaire au Département de psychologie de l’Université de Sherbrooke. Il est normal de se fatiguer quand on passe des heures à faire la même chose. »
    Le Devoir — Comment combattre la «fatigue Zoom»? | Le Devoir
  • Avant tout, on ne plaisante pas avec les réglages. L’élève du jour n’est pas super bien partie : sa sonnette, pourtant obligatoire, est cassée et ses pneus sont quasiment à plat… « Il faut les gonfler tous les quinze jours, recommande Laurent Chailloy, formateur chez Place au vélo. Sinon, vous allez avoir un risque de crevaison, du mal à garder votre direction, et allez vous fatiguer. » Après un petit coup de pompe et avoir enfilé son gilet jaune (recommandé mais pas obligatoire en ville), on peut démarrer.
    Nantes : « Attention aux portières ! » On a testé les cours de vélo pour apprendre à se débrouiller en ville
  • Coralie Dubost. Il y avait peut-être besoin d’une nouvelle incarnation, d’une nouvelle énergie. Ces derniers mois, le gouvernement n’a pas démérité, loin de là. Il a géré avec succès des évènements historiques tels que les gilets jaunes ou la crise sanitaire. Dans le même temps, il est parvenu à concrétiser l’immense majorité des promesses de campagne d’Emmanuel Macron ; ce qui peut essouffler et fatiguer. La nouvelle équipe pourra permettre de redonner une nouvelle impulsion à notre action. Mais il s’agit d’un changement dans la continuité puisque deux tiers des ministres restent en poste.
    http://www.magazine-decideurs.com — Coralie Dubost (députée LREM) : "le nouveau gouvernement est plutôt gaulliste social" - Magazine Decideurs
  • La méthode reflète tout son intérêt dans le suivi des sportifs, car la fatigue et les capacités de récupération sont fortement liées à la variabilité cardiaque. L’entraînement est un stress qui a pour but de fatiguer l’organisme afin qu’il s’adapte. Mais trop de fatigue induit une stagnation ou une baisse de performance.
    Le Temps — Entre les battements du cœur, découvrir la clé de la fatigue - Le Temps
  • Le troisième empereur de la vingt et unième dynastie, à qui on apporta des pierres précieuses trouvées dans une mine, la fit fermer, ne voulant pas fatiguer son peuple à travailler pour une chose qui ne pouvait ni le nourrir ni le vêtir.
    Montesquieu — De l’esprit des lois
  • La paresse ne peut se passer de travail ; on se repose voluptueusement que si l'on a pu se fatiguer.
    Antoine de Rivarol
  • La gêne du commandement fatiguera comme celle de l'obéissance.
    Montesquieu
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Traductions du mot « fatiguer »

Langue Traduction
Anglais tire
Espagnol cansado
Italien stanco
Allemand müde
Chinois
Arabe متعبه
Portugais cansado
Russe усталый
Japonais 疲れた
Basque nekatuta
Corse stancu
Source : Google Translate API

Synonymes de « fatiguer »

Source : synonymes de fatiguer sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « fatiguer »

Combien de points fait le mot fatiguer au Scrabble ?

Nombre de points du mot fatiguer au scrabble : 12 points

Fatiguer

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