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Large

Variantes Singulier Pluriel
Masculin et féminin large larges

Définitions de « large »

Trésor de la Langue Française informatisé

LARGE, adj., subst. masc. et adv.

I. − Adjectif
A. − [En parlant de choses concr.]
1. Qui concerne la largeur d'une surface, d'une ouverture.
À peine, juste assez large. Dont la dimension est à peine, juste suffisante. Le caïque de Mehmed Pacha est un superbe caïque à trois paires de rames, long d'une douzaine de mètres, large juste assez pour qu'on puisse s'y asseoir à deux (Farrère, Homme qui assass.,1907, p. 72).L'artillerie devait traverser un défilé de rochers calcaires à peine assez large pour un homme très mince (Maurois, Silences Bramble,1918, p. 22).
Large de + compl. indiquant la mesure (de la plus petite dimension).Un plafond blanchi à la chaux, long de cent vingt pas, large de soixante (Erckm.-Chatr., Ami Fritz,1864, p. 161).Nous nous glissâmes dans une calanque, large à peine de quelques mètres et si profonde qu'elle paraissait un trait de scie dans la masse du plateau (Gracq, Syrtes,1951, p. 159).
2. Dont la largeur est supérieure à la moyenne. Anton. étroit.Allée, escalier, fleuve, rue, sillon large. On (...) creusa trois larges fosses où furent enterrés cinq mille huit cents hommes (Barante, Hist. ducs Bourg., t. 4, 1821-24, p. 82).En descendant, nous rencontrons la rivière, très large ici, sans doute à cause d'un barrage (Michelet, Journal,1835, p. 179):
1. Selon leur écartement on a des lignes à voie normale, à voie large [it. ds le texte] ou à voie étroite. On attribue généralement à la voie normale 1 m 44, à la voie large 1 m 46, à la voie étroite de 1 mètre à 0 m 60. Albitreccia, Gds moyens transp.,1931, p. 45.
[En parlant d'un orifice] Large bec, échancrure, fente. Quand il entendait une saillie ou un trait comique, son visage s'épanouissait, ses yeux se fermaient et ouvrant une bouche aussi large que le pavillon d'un cor, il en faisait sortir un son prolongé (Brillat-Sav., Physiol. goût,1825, p. 319).S'il y a une chose au monde, dit-il, dont les chèvres ne peuvent se passer, c'est l'air. Il faut des étables très hautes avec de larges ouvertures! (Maurois, Silences Bramble,1918, p. 235).On est venu m'apporter un énorme « Goliath » que j'ai le plus grand mal à faire entrer dans mon flacon de cyanure, si large que soit son embouchure (Gide, Voy. Congo,1927, p. 770).
Ouvrir une fenêtre toute large. L'ouvrir en grand :
2. ... Marc songeait à cette maison humaine, dont on s'efforce depuis des siècles de tenir les portes et les fenêtres hermétiquement closes, lorsqu'il faudrait les ouvrir toutes larges, pour laisser entrer à torrents le grand air libre... Zola, Vérité,1902, p. 69.
En partic.
[En parlant d'un vêtement] Qui ne serre pas, ample, lâche. Anton. étroit, étriqué.Le chirurgien relève la manche du malade : celle-ci doit être assez large pour ne point comprimer et étrangler le bras après avoir été convenablement repliée (Nelaton, Pathol. chir., t. 1, 1844, p. 20).Sa culotte à choux, large et fendue comme les pantalons des dames du temps jadis, commençait à le quitter (H. Bazin, Vipère,1948, p. 68).
[En parlant du corps humain] Qui a, dans le sens horizontal, une dimension considérable. Carrure d'épaules large; figure, front, nez, visage large; épaules larges. Un col de taureau, large et court, assurait sur la carrure des épaules une tête osseuse, taillée à coups de serpe (Vogüé, Morts,1899, p. 295).Madame de Chalais, une grosse petite femme plus large que haute, couperosée, (...) avait un gros ventre, des bras trop courts, et, malgré tout, assez bonne façon (Gyp, Souv. pte fille,1928, p. 82):
3. On trouve (...) une tête longue avec une face large dans le type de Cromagnon et chez les Esquimaux, au lieu qu'une tête large et une face étroite sont caractéristiques des Basques français. Haddon, Races hum.,1930, p. 21.
PHYS., RADIO-ÉLECTR. [En parlant d'une bande de fréquence] Dont la différence entre la fréquence la plus haute et la fréquence la plus basse est importante. La caractéristique essentielle du tube à onde progressive est son aptitude à amplifier des ondes sur une très large bande de fréquences (Hist. gén. sc.,t. 3, vol. 2, 1964, p. 279).
Large de + subst. (indiquant ce qui est large).Large d'épaules. Gérard contemplait la mine sensuelle et réjouie de Marius, large des épaules, rablé et maflu comme Frère Jean des Entommeures (Theuriet, Mariage Gérard,1875, p. 18):
4. C'était un coq de perdrix rouge magnifique, haut en couleur, le bec et les pieds rouges et durs comme du corail, avec des ergots comme un coq et large de poitrail presque autant qu'un poulet bien nourri. Fromentin, Dominique,1863, p. 6.
Au fig. et fam. Large d'/des épaules. Généreux :
5. ... un matin, Gervaise l'avait surprise vidant là [dans une bouche d'égout] son panier plein d'écailles d'huîtres. Ah! non, pour sûr, ces rapiats n'étaient pas larges des épaules, et toutes ces manigances venaient de leur rage à vouloir paraître pauvres. Zola, Assommoir,1877, p. 563.
Par antiphrase. Avare. (Dict. xixeet xxes.).
3. P. ext.
a) [En parlant d'une chose concr., d'un lieu, d'un espace] Qui a une grande étendue, dans quelque sens que ce soit, vaste, grand. Anton. petit, exigu.Large (demi-)cercle, chapeau, étendue, pluie, puits, surface, tache, terrain, trait; larges flocons, parapluies, plateaux. Ces crêpes qu'on nous faisait ressemblaient à la lune, tant elles étaient larges (Loti, Mon frère Yves,1883, p. 100).Les officiers seront libres de se déplacer dans un large périmètre autour de la résidence fixée à leur groupe (De Gaulle, Mém. guerre,1954, p. 434):
6. Le pont franchi, il aperçut un peu à droite des chantiers devant lui; il y marcha. Pour y arriver, il fallait s'aventurer dans un assez large espace découvert et éclairé. Il n'hésita pas. Hugo, Misér., t. 1, 1862, p. 540.
[En parlant du mouvement que peut faire un membre du corps] Qui parcourt un grand espace, ample. Larges coups d'ailes; faire un geste large de la main. Solide, il avançait à larges enjambées; le gros Bouffioux, au contraire, allait à petits pas pressés (Dorgelès, Croix de bois,1919, p. 32).Ses mouvements étaient larges, libres et plus rythmés et plus musicaux que ceux des autres femmes (France, Vie fleur,1922, p. 528):
7. Un instant couché sur la page, il décrivit dans le vide une large arabesque, puis, se rejetant en arrière et repoussant d'une chiquenaude la visière de son képi, il s'absorba dans une méditation profonde. Courteline, Train 8 h. 47,1888, 1repart., III, p. 30.
En partic. Arborer un large sourire. Arborer un sourire épanoui :
8. ... il releva la tête avec sa longue barbe, ses épaisses lèvres, ses dents noires et aiguës, et son large sourire qu'il avait conservé précieusement, sans doute pour s'éviter la peine d'en recommencer un second. Janin, Âne mort,1829, p. 162.
Respirer à larges poumons. Respirer à pleins poumons. Délivré des horribles transes qui l'avaient hanté toute la nuit (...) il respirait à larges poumons (A. Daudet, Tartarin Alpes,1885, p. 105).
b) Abondant, en grande quantité. Aspirer une large bouffée d'air; diffuser de larges extraits; accorder de larges emprunts. Nous avions une chambre au château, notre voiture et de larges rétributions pour nos frais quand nous étions obligés de voyager (Balzac, Lys,1836, p. 183).Ils ont bu, avidement, de larges coups de vin frais (Giono, Colline,1929, p. 79).
B. − Au fig.
1. Domaine de la vie spirituelle.[P. réf. à l'Évangile selon st Matthieu, VI, 13-14 (cf. étroit A 3 a)] Voie large. Voie de la perdition. Il y aurait quelque chose à écrire sur la voie large qui mène à l'enfer. Ce n'est pas du tout l'agréable promenade dont il est question dans les livres, mais une route affreuse, dure, difficile (Green, Journal,1950, p. 284).
2. Dont l'importance est très grande; qui a une grande extension. Anton. restreint, limité.Le printemps de 1919 est marqué par un grand marasme économique. Le chômage s'étend. Le monde du travail est secoué par toute une série de grèves de large envergure (Cacérès, Hist. éduc. pop.,1964, p. 72):
9. ... les éditeurs cherchent normalement à n'éditer que des livres dont la diffusion sera assez large pour qu'ils soient assurés de couvrir leurs frais d'impression et de conserver même leur marge de bénéfices. Civilis. écr.,1939, p. 16-13.
SYNT. Large expérience, succès; sur une large échelle, dans une large mesure; larges perspectives, possibilités; faire, laisser large place à qqc.; prendre large place; faire une (très) large place à qqc.; faire une/la part bien large à qqc., à qqn.
LING. Qui ne se limite pas à l'objet désigné. Anton. restreint, étroit.Acception, définition, expression large :
10. Bien que la Constitution ne parle que des Ministres, on doit considérer comme faisant partie du personnel ministériel ou du Cabinet au sens large du mot non seulement les Ministres, mais les secrétaires et sous-secrétaires d'État. Vedel, Dr. constit.,1949, p. 439.
3. [En parlant de la vie intellectuelle ou morale]
a) Qui n'est pas strict, rigoureux; accommodant. Conscience large. Il avait le christianisme assez large et coulant, et n'était rien moins que rigoriste, soit pour la doctrine, soit pour les mœurs (Sainte-Beuve, Caus. lundi, t. 14, 1851-62, p. 111):
11. Même chez les Bricard, gens un peu frustes, l'amitié de Juliette et d'Alain faisait l'objet de plaisanteries indulgentes, − les Bricard professant une morale assez large et facile, surtout quant aux enfants des autres. Van der Meersch, Invas. 14,1935, p. 241.
PHILOS. Devoirs larges. Devoirs dont l'accomplissement ne comporte pas une mesure déterminée, ou dont le champ d'application est laissé à notre libre choix. Anton. devoirs stricts (d'apr. Lal. 1968).
b) Qui n'est pas étriqué, borné. Large compréhension, intelligence, pensée, point de vue; large ouverture d'esprit; larges idées, opinions, théories. Il semblait vouloir faire oublier sa situation de vainqueur, se montrait d'esprit dégagé et large, plaisantait volontiers certaines réquisitions qui prêtaient à rire (Zola, Débâcle,1892, p. 550).Ébloui tout d'un coup parce qu'il découvre qu'il existe des vues larges, étonnantes pour une pensée comme la sienne occupée de minuties (J. Bousquet, Trad. du silence,1935-36, p. 29).
Être large d'idées. Je suis très large d'idées et, selon moi, pourvu qu'on les pratique sincèrement, toutes les religions sont bonnes (Proust, Sodome,1922, p. 1040).
4. [En parlant de manifestations de l'activité intellectuelle ou artistique] Ample; qui est fait à grands traits. Exécution large; pages, vers larges. Le style du poëme [Il Pianto d'Auguste Barbier] est large, abondant, et jaillit comme d'une source, en débordant quelquefois (Sainte-Beuve, Portr. contemp., t. 2, 1833, p. 241):
12. Il y a dans cette esquisse un faire plus libre, une manière plus large, plus de sentiment, une flamme douce, une fraîcheur de chair, une tendresse, une vénusté qui ne se retrouvent point dans la grande composition du Louvre. France, Vie fleur,1922, p. 460.
En partic. [En parlant d'un chant] Qui donne l'impression de remplir un grand espace. La cantatrice se donna la peine de chanter de son mieux, et l'expression de son chant large et sublime transporta Joseph jusqu'aux cieux (Sand, Consuelo, t. 3, 1842-43, p. 27).Il me plaît (...) de louer [chez Benjamin Godard] (...) les mélodies de grâce si pénétrante qui foisonnent en des recueils peu connus, les larges chants d'orchestre qui quelquefois dominent le bavardage instrumental (Bruneau, Mus. fr.,1901, p. 111).
5. Domaine de la vie matérielle
a) Qui est aisé, qui ne restreint pas. Mener une large existence dorée. Leur existence serait facile et large comme leurs vêtements de soie (Flaub., MmeBovary, t. 2, 1857, p. 35).Presque sans fortune, mais habitué à la vie relativement large et facile des provinces bretonnes (Gyp, Souv. pte fille,1928, p. 192).Nous avons parlé d'autrefois, des vacances de 1920 en Virginie, dans la maison de mon grand-père. La vie était alors si belle, large, ensoleillée, sans menaces visibles (Green, Journal,1943-46, p. 203).
b) Qui est généreux, qui donne sans compter. Bonté large; avoir la bourse large. Il y aurait aussi les trente francs du retour, pour l'enfant. Très large, Valentine promit de doubler la somme (Zola, Fécondité,1899, p. 314).Les places de domestiques chez les Juifs sont bonnes, ces gens-là étant très larges (Renard, Journal,1901, p. 696).Vous n'avez pas payé cher sa trahison, d'ailleurs. Vous n'avez pas été très larges, mes enfants. Douze mille francs de rente à un garçon qui vous restitue une fortune, c'est pour rien (Mauriac, Nœud vip.,1932, p. 243).
Au fig. et fam. Être (bien) large. Être généreux. Sur ces vingt-cinq la moitié (...) seront mariées, c'est-à-dire, douze et demie. Et sur ces douze et demie, je serai bien large en en supposant la moitié de vertueuses (Miomandre, Écrit sur eau,1908, p. 13).
II. − Subst. masc. sing.
A. − Synon. de largeur (v. ce mot A 1).Il marchait doucement sur les trottoirs de cinquante centimètres de large, et en descendait aussitôt quand une porte de cabaret s'ouvrait (Jouve, Scène capit.,1935, p. 56).
Loc. adv.
En large. Dans le sens de la largeur; dans toute sa largeur. Je voyais les ouvriers s'en aller bras dessus, bras dessous, dans le faubourg, en prenant le trottoir tout en large (A. Daudet, Contes lundi,1873, p. 229).Il n'avait même pas crié, ayant seulement tiré sa bouche en large, découvrant des dents muettes, blanches extraordinairement pour son âge (Giono, Batailles ds mont.,1937, p. 172).
En long et en large. Alternativement dans un sens, puis dans l'autre. Le général (...), comme le Malade imaginaire, se remettait à arpenter la chambre tantôt en long, tantôt en large (A. Dumas père, Comment je devins auteur dramatique,1833, introd. I, p. 6).
Au fig. Sous tous ses aspects, dans tous les sens. Exposer qqc. en long et en large. Vous m'avez expliqué en long et en large après votre dispute avec Lafaurie pourquoi il était hors de question que vous cédiez. Qu'est-ce qui s'est passé de neuf? (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 193).Il se peut même qu'après avoir exploré en long et en large pendant des années, le savant le plus érudit ne trouve rien (P. Rousseau, Hist. techn. et invent.,1967, p. 321).
De long en large. En longueur, puis en largeur; p. ext. en parcourant sans cesse un espace limité en allant et en venant. Se promener de long en large. Il marchait de long en large depuis la porte jusqu'à la caserne d'octroi (Verlaine, Œuvres compl., t. 4, L. Leclercq, 1886, p. 128).Sur le quai de la Gare de l'Est, (...) il marchait de long en large devant le train qui allait l'emmener vers Strasbourg, et la neige des vacances de Noël (Nizan, Conspir.,1938, p. 244).
Vx et rare. [En parlant d'un tissu] Au grand large. En grande largeur. Ayez la bonté de m'acheter (...) une aune de lévantine noire au grand large : c'est pour faire un tablier sans couture (Sand, Corresp., t. 1, 1829, p. 75).
B. − Grand espace. Ces gibiers de forêt ont tant de cachettes (...). J'avoue que j'aurais aimé être au fond d'un de ces trous-là; mais mon compagnon préférait rester à découvert, avoir du large, voir de loin et sentir l'air ouvert devant lui (A. Daudet, Contes lundi,1873, p. 292):
13. ... les deux côtés de la scène étaient encore envahis par des spectateurs privilégiés (...). Déblayer les planches de cet encombrement (...), donner du large et de l'importance à la décoration, à la mise en scène (...) telle est la préoccupation constante de Diderot. A. Daudet, Crit. dram.,1897, p. 208.
Au fig. Ampleur. L'École normale en plein exercice et développement de son professeur modèle, dans tout le large de la tradition régulière et directe (Sainte-Beuve, Nouv. lundis, t. 12, 1869, p. 173).
Loc. adv.
Au large (de + subst.). Au delà (de), à distance (de). On entendait la mer, qui baissait alors, mugir contre la lisière des premières roches, au large du littoral (Verne, Île myst.,1874, p. 54).La muraille passerait au large, dans la forêt de la Tour-du-Lay, filerait le long d'Hédouville, remonterait sur le plateau, redescendrait à la Naze (Duhamel, Suzanne,1941, p. 211).
Passe(z), gagne(z) au large! [Interjection intimant l'ordre de s'écarter, de partir] Le sergent se rapprocha vivement du prisonnier et lui dit vite et bas : − On n'y voit pas clair. C'est un endroit noir. À gauche il y a des arbres. Gagne au large! (Hugo, Hist. crime, t. 2, 1877, p. 134).
Elliptiquement. Au large! :
14. − Vit-il? interrogea-t-on, vit-il? − Hé! non! répondit l'un, ânonnant comme les bègues, non pas! − Si, si fait, cria l'autre d'une voix enrouée et terrible en soulevant entre ses bras le grand corps inanimé; de l'air, au large! de l'air, place!... arrière! Il respire... Cladel, Ompdrailles,1879, p. 77.
En partic. (Être) au large. (Être) à l'aise, avoir suffisamment de place. Mon homme était emprisonné, quoique au large, dans une redingote lie de vin, accrochée sur le ventre et retenue par un seul bouton (Vallès, Réfract.,1865, p. 84):
15. C'est à ce moment qu'elle vit les mains maigres et le visage brûlé des Arabes qui étaient devant elle [dans l'autocar], et qu'elle remarqua qu'ils semblaient au large, malgré leurs amples vêtements, sur les banquettes où son mari et elle tenaient à peine. Camus, Exil et roy.,1957, p. 1559.
Au fig. Dans l'aisance, dans l'opulence matérielle. Elle éparpilla devant elle ses titres, refaisant encore ses calculs : « Avec 2.600, ils [mes enfants] pourront vivre (...). Même, elle partie, ils seraient plus au large... » (Estaunié, Bonne Dame,1891, p. 256).
C. − La haute mer. Air du large; odeur du (grand) large; être entraîné au large. La haute vague du large venait se briser à son pied, l'entourant d'une fleur d'écume (Maupass., Contes et nouv., t. 1, MmeParisse, 1886, p. 728).La côte, ravagée par les souffles du large, ou stérile parce que les rivières n'y arrivaient pas, restait presque nue (Mille, Barnavaux,1908, p. 96):
16. Le cimetière s'élevait sur une éminence qui dominait la mer, une grossière enceinte carrée de murs bas, balayée de bout en bout par le vent du large et toute remplie du froissement de houle des roseaux. Gracq, Syrtes,1951, p. 69.
Loc. verb., fam. Prendre, gagner le large. Partir, s'en aller; s'enfuir. Jacques s'entendit appeler; c'était son frère qui sortait de la chambre, gagnait le large (Vogüé, Morts,1899, p. 300).Tu redoutais de voir Michel prendre le large. Tu le voulais dans tes jupes. Tu voulais qu'il quitte la roulotte le moins possible. Et tu l'as découragé de chercher une situation (Cocteau, Par. terr.,1938, I, 2, p. 198).
III. − Adv. Synon. de largement.
A. − Dans un espace étendu, profondément. Il s'approcha de la lisière jusqu'à découvrir au dehors, s'enfonçant large dans la bruine, la friche de bruyère et d'ajoncs qui par les champs montait vers Buzidan (Genevoix, Raboliot,1925, p. 98).
MAN. ,,Ce cheval va large, va trop large. Il décrit un trop grand cercle dans la volte`` (Ac.).
Au fig. et fam. Ne pas en mener large. Être mal à l'aise, plein de crainte, d'inquiétude; ne pas être rassuré. Le colonel l'avait menacé de le relever de ses fonctions, et il n'en menait pas large (Ambrière, Gdes vac.,1946, p. 285).Marino était dans tous ses états. Et ce ton sec qu'il prend dans les grandes occasions, à vous geler le sang. Je n'en menais pas large, je te le jure (Gracq, Syrtes,1951, p. 66).
Large ouvert. Qui est ouvert en grand, grand ouvert. Anton. entrouvert.D'un bout à l'autre de la place du Capitole, les yeux étaient large ouverts, et chaque oreille aux écoutes (Cladel, Ompdrailles,1879, p. 167):
17. Mademoiselle de Quinconas se mettait (...) volontiers à cheval sur une chaise qu'elle approchait du feu le plus possible; et les yeux large ouverts sur quelque charbon scintillant... Boylesve, Leçon d'amour,1902, p. 215.
Rem. Bien qu'employé adv., large s'accorde parfois comme un adj. Toute la longueur du château, par ses portes-fenêtres, larges ouvertes sur le vaste perron seigneurial, s'étalait à l'admiration des arrivants (A. Daudet, Nabab, 1877, p. 208). Elle se trouva tragiquement en face d'une grande femme inconnue qui l'observait, les yeux et la bouche larges ouverts (Cocteau, Enf. terr., 1929, 1repart., p. 58).
B. − D'une façon ample, à l'aise. Elle gonfle sa poitrine, pour respirer plus large (Farrère, Homme qui assass.,1907, p. 235).
En partic. [En parlant d'un son] Les cloches sonnaient large et toutes, comme des gouttes d'orage (Jammes, De l'angélus,1898, p. 55).Il entendit l'eau. Les fontaines venaient de s'ouvrir. Le bassin se remplissait en chantant large. Sous le canon de bronze il vit luire la longe de l'eau (Giono, Chant monde,1934, p. 253).
Loc. verb.
Faire large. Agir d'une façon généreuse. Avec deux cents francs par mois, le docteur Barbentane croyait faire très large pour son fils (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 245).
Voir large. Voir grand. Vous avez des yeux arméniens, des yeux immenses! Vous voyez trop large. « Des catastrophes »! Quelles catastrophes! (Farrère, Homme qui assass.,1907p. 210).
Prononc. et Orth. : [laʀ ʒ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. Adj. 1. ca 1050 « qui a une étendue importante; vaste » larges terres (Alexis, éd. Chr. Storey, 402); 2. ca 1050 « généreux; qui traduit la générosité » larges almosnes (ibid., 93); 3. a) ca 1100 « qui a une étendue supérieure à la moyenne dans le sens de la largeur » (Roland, éd. J. Bédier, 1217 : mult ont large le front); b) 1585 large de + compl. « qui a telle dimension dans le sens latéral » (N. Du Fail, Contes d'Eutrapel, II, p. 167 : large de trois pieds) 4. ca 1135 « qui n'est pas rigoureux, tolérant » le cuer si large (Couronnement Louis, éd. Y. G. Lepage, 402); 5. fin xiies. « qui a une large extension, important » large folie (Raoul de Cambrai, 1872 ds T.-L.); 6. 1478-80 « qui ne serre pas, lâche » robe ... large assez (G. Coquillart, Droits nouveaux, 1473 ds Œuvres, éd. M. J. Freeman, 204). II. 1. 1176-81 au large « en liberté » (Chr. de Troyes, Chevalier Charrette, éd. M. Roques, 6631); 2. ca 1200 « étendue ou largeur » (Jourdain de Blaye, éd. P. F. Dembowski, 1065); 3. 1395 « partie de la mer qui est loin des côtes » (Voyage de Jérusalem du seigneur d'Anglure, 310 ds T.-L.); 1409 prendre le large de la mer (Livre des faicts du maresch. de Boucicaut, 2ep., ch. 21, Buchon ds Gdf.); ca 1470 fig. prendre le large « s'éloigner à la hâte » (G. Chastellain, Chron., éd. Kervyn de Lettenhove, I, 101, 13). III. Adv. 1. 1376 « d'une façon ample » (Modus et Ratio, 9 ds T.-L.); ca 1260 larges overtes (Ph. de Novare, Quatre Ages, 117, ibid.); 2. a) 1683, 7 sept. « d'une façon qui n'est pas étriquée » habiller large (Mmede Maintenon, Lett. à d'Aubigné ds Littré); b) 1866 fam. n'en pas mener large (Delvau, p. 249); c) 1936 « d'une façon généreuse » (Aragon, Beaux quart., p. 245). IV. Loc. adv. 1. 1580 en large « dans le sens de la largeur » (Montaigne, Essais, éd. A. Thibaudet, I, XXXI, p. 245); 2. 1807 en long et en large (Chênedollé, Journal, p. 24); 3. 1811 de long en large (Jouy, Hermite, t. 1, p. 41). I forme fém. de l'a. fr. larc (nominatif lars), du lat. largus « abondant, copieux, libéral, généreux »; le masc. larc est rare (quelques attest. de 1188-fin xiiies. ds T.-L.). A supplanté l'anc. adj. (< lat. latus « large ») encore attesté au xvies., ne subsistant que comme subst., v. ce mot. II, III, IV emplois subst. et adv. de I. Fréq. abs. littér. : 10 410. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 12 886, b) 19 679; xxes. : a) 15 775, b) 13 243. Bbg. Gohin 1903, p. 367. - Grundt (L.-O.). Ét. sur l'adj. invarié en fr. Bergen-Oslo-Tromsø, 1972, p. 118, 151, 234; pp. 305-313. - Juneau (M.). R. Ling. rom. 1973, t. 37, p. 481. - Quem. DDL t. 19.

Wiktionnaire

Adjectif - ancien français

large \Prononciation ?\ masculin

  1. Généreux.
    • Chevaliers pruz e vaillanz
      Larges, curteis, e despendanz
      — (Chaitivel, Marie de France, f. 149v, 1re colonne de ce manuscrit de 1275-1300)
    • Li dus fu larges et courtois — (Hervis de Metz, édition de E. Stengel, page 1)

Nom commun - français

large \laʁʒ\ masculin, (Indénombrable)

  1. (Courant) Largeur.
    • Cet état a trois cents lieues de long et deux cents de large.
    • Cette étoffe a deux mètres de large.
  2. (Marine) Partie de la mer qui est éloignée des côtes ; haute mer.
    • […] et debout près de la barre, Jean Donnard, grave et sombre, se signa, comme il avait coutume de faire chaque fois qu’il partait vers le large. — (Octave Mirbeau, Les eaux muettes )
    • Il pleuvait presque sans discontinuer depuis la Toussaint et quand, d’aventure, l’horizon se décrassait, les vents du large opprimaient tout l'espace […]. — (Charles Le Goffic, Bourguignottes et pompons rouges, 1916, p.117)
    • Une simple tartane, servant sans doute de vivandière au Saint-Jean-Baptiste, […], parcourut tous les petits bras de mer qui précèdent le détroit de Magellan. Cette tartane fit plusieurs découvertes au large de la Terre de Feu ; […]. — (Étienne Dupont, Le vieux Saint-Malo : Les Corsaires chez eux, Édouard Champion, 1929, page 53)

Adverbe - français

large \laʁʒ\ invariable

  1. À grands traits, en parlant de peindre, de dessiner, etc.
    • Peindre large.
  2. (France) (Populaire) Façon familière d’acquiescer.
    • Ça te dit d’aller au restaurant ce soir ? - Large !

Adjectif - français

large \laʁʒ\ masculin et féminin identiques

  1. Qui a une dimension déterminée dans le sens de la largeur, par opposition à long, à haut, à profond.
    • Ce champ, ce jardin est plus long que large. — La rivière est plus large en cet endroit.
    • Une étoffe large. — Du ruban large. — Un homme large des épaules.
  2. (Par extension) Qui a une largeur trop grande par rapport à une autre largeur, ou de référence, ou attendue, ou espérée.
    • Il allongeait sa jambe, sèche comme un échalas, qui flottait dans une molletière trop large et sans couleur, pour montrer fièrement sa chaussure. — (François Barberousse, L'Homme sec, Paris : Gallimard, 1935 & Romorantin : Marivole Éditions, 2013, chapitre 7)
  3. (Art) Qui est fait par masses et à grands traits, qui n’a rien de maigre, de mesquin, de timide.
    • Des contours, des draperies, des lumières larges.
    • Une touche, une manière large.
    • Un pinceau large.
  4. Qui est étendu ou qui est de grande amplitude.
    • Il semble donc qu'on est en droit de conclure à l’existence d'un large mouvement humain se dirigeant, vers l'époque quaternaire, de l'Est du vieux monde à l'Ouest du nouveau. — (René Thévenin et Paul Coze, Mœurs et Histoire des Indiens Peaux-Rouges, Payot, 1929, 2e édition, page 15)
    • Une étude plus large et plus scientifique des dialectes locaux établira que, par son origine et par ses caractères essentiels, le slovaque appartient au groupe yougoslave. — (Ernest Denis, La Question d’Autriche ; Les Slovaques, Paris, Delagrave, 1917, in-6, page 97)
  5. (Sens étymologique) Qui aime à donner.
    • Il mène une vie trop large. — Il est large envers ses serviteurs.
  6. Qui est peu scrupuleux, qui se donne beaucoup de liberté.
    • Il a la conscience large. — Ses opinions sont un peu larges.
  7. Qui n'a pas de prévention, qui est tolérant.
    • Avoir l’esprit large, être large d’esprit.
  8. (Parfois) Facultatif.
    • Des devoirs larges.
  9. (Populaire) Qui éprouve une sensation de bien-être, de sérénité.
    • Tu verrais Jean-Mi dans son hamac, il est large !
  10. (Populaire) (Familier) Qui a du temps devant soi, qui n'est pas pressé.
    • J'ai un rendez-vous dans deux heures. — Oh, bah ça va, t'es large !
  11. (Textile) (Québec) (Populaire) Grande taille.
    • La police recherche un voleur de vêtements de forte taille. Le suspect est au large. — (Michel Beaudry, La leçon virale, Le Journal de Montréal, 22 mai 2021)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

LARGE. adj. des deux genres
. Il se dit d'un Corps considéré dans l'extension qu'il a d'un de ses côtés à l'autre, et par opposition à Long ou à Étroit. Ce champ, ce jardin est plus long que large. Un chemin large. La rivière est plus large en cet endroit. Une étoffe large. Du ruban large. Un homme large des épaules. Par extension, il signifie aussi Qui a une largeur trop grande par rapport à une autre largeur. Prendre des souliers, des bas trop larges, un chapeau trop large. Il signifie aussi, en termes de Beaux-Arts, Qui est fait par masses et à grands traits, qui n'a rien de maigre, de mesquin, de timide. Des contours, des draperies, des lumières larges. Une touche, une manière large. Un pinceau large. On dit adverbialement Peindre large. En termes de Manège, Ce cheval va large, va trop large, Il décrit un trop grand cercle dans la volte. Adv. et fig., Il n'en mène pas large, Il est dans une situation fâcheuse, embarrassante et le fait voir. Il signifie figurément Qui est étendu. Je vous ferai une large concession. Ce gouvernement a donné à son ambassadeur les pouvoirs les plus larges. Avoir l'esprit large, être large d'esprit, N'avoir pas de préventions. Avoir la conscience large, Être peu scrupuleux. Devoirs larges, Qui sont facultatifs, par opposition à Devoirs stricts. Il signifie encore figurément Qui aime à donner. Il mène une vie trop large. Il est large envers ses serviteurs. Il n'est pas large. Il signifie aussi Qui est peu scrupuleux, qui se donne beaucoup de liberté. Il a la conscience large. Ses opinions sont un peu larges.

LARGE s'emploie souvent comme nom masculin pour largeur. Cet État a trois cents lieues de long et deux cents de large. Cette étoffe a tant de large. De la toile qui a un mètre de large. Mettre au large, Être au large, Établir, être établi plus spacieusement. Vous êtes trop pressé, trop serré, mettez-vous un peu au large. Il signifie aussi figurément Mettre, être dans un état plus commode, plus opulent. Il est au large maintenant. Il lui est venu une succession qui la mis plus au large qu'il n'était. En termes de Marine, il se dit de la Haute mer, de la partie de la mer qui est éloignée des côtes. La brise du large. Gagner le large. Prendre le large. Ces deux dernières locutions signifient aussi figurément S'enfuir. La mer vient du large, Les vagues sont poussées par le vent de la mer, et non par celui de la terre. Au large! Sorte d'interjection, cri d'une sentinelle qui ordonne à des passants de s'éloigner. On dit de même Passez au large!

AU LONG ET AU LARGE, loc. adv. En tout sens et avec autant de développement qu'il est possible. S'étendre au long et au large, Prendre, acquérir beaucoup de terrain, d'espace autour de soi.

EN LONG ET EN LARGE, loc. adv. En longueur et en largeur alternativement. On ne l'emploie guère que dans cette phrase, Se promener, aller en long et en large. On dit plus souvent aujourd'hui, dans le même sens, De long en large.

Littré (1872-1877)

LARGE (lar-j') adj.
  • 1Ample, étendu, par une dérivation facile du latin largus qui signifie copieux, abondant, considérable. Une large base. Il tombait de larges gouttes de pluie. Quoi ? se peut-il, monsieur, qu'avec l'air d'homme sage, Et cette large barbe au milieu du visage…, Molière, Tart. II, 2. Vous les auriez vus tous, retournant en arrière Laisser entre eux et nous une large carrière, Racine, Mithr. V, 4. Il lui fit dans le flanc une large blessure, Racine, Phèd. V, 6. Sa barbe était négligée ; de larges pleurs tombaient de ses yeux, Chateaubriand, Mart. XVIII.

    Fig. Il ouvre un champ plus large à ces guerres d'esprit, Corneille, Prol. de la Toison d'or, 5. Et puis, te voilà donc mon rival ! un moment Entre aimer et haïr je suis resté flottant ; Mon cœur pour elle et toi n'était pas assez large, Hugo, Hernani, I, 4.

    Accommodez-vous, le pays est large, c'est-à-dire vous êtes en un lieu où vous pouvez prendre vos commodités, ou bien, ironiquement et par antiphrase, vous prenez vos aises là où l'on ne doit pas les prendre.

  • 2 Particulièrement. Qui est étendu dans la dimension dite largeur. Ce morceau de bois est large de 30 centimètres. La rivière est large en cet endroit. Il a les épaules larges.

    On dit familièrement de quelqu'un qui n'est pas généreux : il est large… des épaules.

    Un cheval large du devant, un cheval qui a beaucoup de poitrail.

    Terme d'anatomie. Ligaments larges, nom donné, à cause de leur largeur, aux ligaments sous-lombaires de l'utérus. Le muscle large du cou, ou, substantivement, le large du cou, nom donné par quelques anatomistes au muscle peaucier.

    On dit d'une lieue qu'on s'ennuie à parcourir, qu'elle n'est guère large, mais qu'elle est bien longue.

    Familièrement. Avoir la conscience large comme la manche d'un cordelier, ou, simplement, avoir la conscience large, et, encore, avoir la manche large, n'être pas scrupuleux. L'un et l'autre avaient la conscience assez large, Scarron, Rom. com. I, 13.

    Faire du cuir d'autrui large courroie, être libéral du bien d'autrui.

    Terme de fauconnerie. Fort large, se dit d'un oiseau qui écarte bien ses ailes, ce qui est regardé comme une preuve de santé et de vigueur.

  • 3 Fig. Qui a une grande extension. Je vous fais une large concession. Ou Rome à ses agents donne un pouvoir bien large, Ou vous êtes bien long à remplir votre charge, Corneille, Nicom. III, 3. Et jamais fils d'Adam, sous la sainte lumière, N'a de l'est au couchant promené sur la terre Un plus large mépris des peuples et des rois, Musset, Rolla.

    Discussion large, discussion sans subtilité ni minutie.

  • 4 Fig. Peu scrupuleux, d'une trop grande liberté. Vous croyez beaucoup faire en leur faveur [des jésuites] de montrer qu'ils ont de leurs pères aussi conformes aux maximes évangéliques que les autres y sont contraires, et vous concluez de là que ces opinions larges n'appartiennent pas à toute la société, Pascal, Prov. V. Voilà ce que disent des mondains séduits par la fausse prudence de la chair, et qui se conduisent par les principes les plus larges, dans un point où la religion est plus resserrée et moins indulgente, Bourdaloue, Pensées, t. II, p. 291.
  • 5 Fig. Abondant, fastueux. MM. les ecclésiastiques menaient une vie trop large, Bossuet, Var. II.

    Dans l'ancienne langue, large signifiait libéral, qui aime à donner, à dépenser ; d'où le proverbe : Autant dépend [dépense] chiche que large, c'est-à-dire l'économie mal entendue ne fait point de profit.

    Il se dit encore quelquefois en ce sens dans la forme négative. Il n'est pas large.

  • 6Dans les arts du dessin. Qui n'a rien de mesquin, de timide. Des contours, des draperies, des lumières larges. Une touche, une manière large.

    Il se dit en littérature dans un sens analogue. Sa manière [à Sénèque] est précise, vive, énergique, serrée ; mais elle n'est pas large, Diderot, Claude et Nér. I, 127.

    Terme d'architecture. Qui présente une disposition hardie des masses.

  • 7Prononciation large, prononciation dans laquelle on donne toute leur valeur aux voyelles. Par le jeu d'une prononciation large et ouverte [dans le Cyclope de Théocrite], on croirait sentir le calme des tableaux de la nature, Chateaubriand, Génie, II, III, 6.
  • 8Large de loi, se disait des monnaies qui étaient au-dessus du titre réglé par l'ordonnance.
  • 9 Adv. D'une manière large. Il faut l'habiller large pour qu'un enfant soit à son aise, Maintenon, Lett. à d'Aubigné, 7 sept. 1683.

    Terme de manége. Aller large, s'éloigner du centre de la volte. Un cheval va trop large lorsqu'il fait un grand cercle, et qu'il s'étend sur un trop grand terrain.

    Peindre large, peindre d'une manière large. Il [Carle Vanloo] a peint large ; son coloris est vigoureux et sage, Diderot, Salon de 1767, Œuvres, t. XIII, p. 40, dans POUGENS. Cela est savant de détails, dessiné large, à ce que croit l'artiste, Diderot, ib. t. XV, p. 62, dans POUGENS.

  • 10 S. m. Largeur. Ce royaume a deux cents lieues de large. Cette étoffe a tant de large.

    Donner du large, donner de l'espace. Mettez les trois enfants à une table à part, cela nous donnera du large.

  • 11 Terme de marine. La partie de la mer qui est éloignée des côtes. Mais hâtez-vous de grâce, et faites bien ramer, Car déjà sa galère a pris le large en mer, Corneille, Nicom. V, 7. Il [Tourville] présuma avec capacité que le vent qui mènerait à Brest obligerait les vaisseaux qui étaient à l'île d'Ouessant de sortir de ce poste, parce qu'il les repoussait et les rompait contre l'île ; cela fut si vrai qu'ils en sortirent pour se mettre au large derrière, Sévigné, 571. Les vents sont toujours bons pour en sortir [d'un port], et l'escadre la plus nombreuse serait au large en moins d'une heure, Raynal, Hist. phil. XIII, 8.

    La mer vient du large, les vagues sont poussées par le vent de la mer, et non par celui de la terre.

    Terme de marine. Au large ! sorte d'interjection à l'aide de laquelle on intime à une embarcation l'ordre soit de s'éloigner du bord, d'un quai, d'une cale, soit de ne pas s'en approcher.

    Au large ! est aussi le cri d'une sentinelle ordonnant aux passants de prendre l'autre côté de la rue.

    Passez au large ! même sens.

    Fig. et familièrement. Prendre le large, gagner le large, s'enfuir. À cette vue, les ravisseurs se hâtèrent si bien de prendre le large, que l'empressement des cavaliers fut inutile, Lesage, Diable boit. ch. 13, dans POUGENS.

  • 12Au large, loc. adv. Spacieusement. Il est logé bien au large. Feignez un homme de la taille du mont Athos ; pourquoi non ? une âme serait-elle embarrassée d'animer un tel corps ? elle y serait plus au large, La Bruyère, XII.

    Fig. et familièrement. Être au large, être dans l'opulence. Qui cherche à vivre au large est toujours à l'étroit, Corneille, Imit. I, 25. Je suis riche, dites-vous, me voilà au large, et je commence à respirer, La Bruyère, XIII.

    Mettre au large, mettre dans un état plus commode, plus opulent.

    Au large, à son aise, sans gêne, sans embarras. Peut-être que cette humeur me passera, et que mon cœur, qui est toujours pressé, se mettra un peu plus au large, Sévigné, 30 oct. 1673. Vos règles vous mettront au large, Bossuet, Lett. abb. 184. [Dans le socinianisme] on ôte tous les mystères, on éteint les feux éternels, et on ne cherche qu'à se mettre au large, Bossuet, 6e avert. III, 15. L'auteur de la réponse… conclut que j'ai été fort embarrassé sur tous les autres sujets, et que, m'étant trouvé plus au large sur ceux-ci [la présence réelle et l'autorité de l'Eglise], j'ai donné plus de liberté à mon style, Bossuet, Euchar. I, 1.

    D'une façon qui n'est pas scrupuleuse, sévère. Nous voici bien au large, mon révérend père ; grâces à vos opinions probables, nous avons une belle liberté de conscience, Pascal, Prov. V. Les efforts que nous tâchons de faire en cette vie ne sont que pour nous mettre plus au large et pour nous éloigner de l'unique chemin du ciel, Fénelon, t. XVIII, p. 31. [Le roi dit] que, outre la compassion, les scrupules de prendre ainsi les biens de tout le monde l'avaient fort tourmenté ; qu'à la fin il s'en était ouvert au père Tellier, qui… était revenu avec une consultation des plus habiles docteurs de Sorbonne, qui décidait nettement que tous les biens de ses sujets étaient à lui en propre ; … qu'il avouait que cette décision l'avait mis fort au large, Saint-Simon, ch. CCLXXXIV.

  • 13Au long et au large, loc. adv. En tout sens.

    S'étendre au long et au large, prendre, acquérir beaucoup de terrain autour de soi.

  • 14En long et en large, loc. adv. En longueur et en largeur alternativement. Aller en long et en large.

    On dit plus souvent aujourd'hui, dans le même sens : de long en large.

  • 15Du long et du large, loc. adv. qui n'est guère usitée que dans cette phrase populaire : Il en a eu du long et du large, il a été bien battu, très maltraité, il a fait quelque grosse perte, etc. Donnons-en à ce fourbe et du long et du large, Molière, l'Ét. IV, 7.

HISTORIQUE

XIe s. Vairs [il] ot les iex [yeux], et les costez ot larges, Ch. de Rol. X. Grant est la plaine et large la contrée, ib. LI.

XIIe s. Et iaulz [eux] de plus larghe carité nous convient rewarder [récompenser], qui par le jugement de Dieu sont en griet affliction…, Tailliar, Recueil, p. 500.

XIIIe s. Se nous en alons à terre ferme, la terre est grande et large, et nostre ost est povre, Villehardouin, LXII. Li autres ot non Richars, qui fu preus et hardis, larges [libéral] et chevalereus, Ch. de Rains, p. 8. Ne porquant il porroit bien estre si fol largues [prodigues] et tant doner, que li rois ne l'auroit pas à soufrir, Beaumanoir, LXX, 4. Li larges se tient emmi ces deux estremitez [la prodigalité et l'avarice], Latini, Trésor. p. 272.

XIVe s. Des plaies penetrantes [du crâne] l'une est large, apparante…, H. de Mondeville, f° 53. Le faucon doit seoir large sur le poing, et doit estre un peu revers, mordant et familleux [affamé], Modus, f° LXXVII, verso.

XVIe s. Car de bien faire tu es large à l'homme juste, o vrai sauveur, Marot, IV, 235. Il fit marcher ses gens en bataille plus longue que large, Amyot, Lysand. 53. L'amiral avoit fait large [s'était étendu] à droitte, quant Monsieur l'avoit fait à gauche, D'Aubigné, Hist. I, 306. Sa cavalerie, aiant trouvé un champ à la droitte où il y avoit quelque large, vint menacer les costez du combat, D'Aubigné, ib. II, 454. Celui qui semera largement aura large moisson, Calvin, Inst. 652. La rue ne lui estoit pas assez large, tant ivre estoit, Despériers, Contes, LXXIX. Cent lieues ou environ d'estendue en large, Montaigne, I, 236. Natures fortes, enrichies d'une large instruction de sciences utiles, Montaigne, I, 390. Large de bouche et estroit de ceinture [donnant de belles paroles et rien de plus ; la ceinture représentait la bourse], Cotgrave

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

LARGE.
6Dans les arts du dessin. Ajoutez :

Substantivement, le large. M. Parrocel, d'autre part, l'emporte par le feu de l'imagination, par la vigueur du coloris, et par la facilité et le large du pinceau, Ch.-N. Cochin, dans Mém. inéd. sur l'Acad. de peint. publiés par Dussieux, etc. t. II, p. 408. Il eut le sentiment du grand en même temps qu'il eut la chaleur et le large du faire qui caractérise le genre de l'histoire, Haillet de Couronne, ib. p. 430.

HISTORIQUE

XIIe s. Ajoutez : Si estoit si lars li rivages C'on n'i peüst passer sans nages, Perceval le Gallois, V. 22297.

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Encyclopédie, 1re édition (1751)

LARGE, adj. (Gram.) voyez l’article Largeur.

Large, pour au large, (Marine.) cri que fait la sentinelle pour empêcher une chaloupe, ou un autre bâtiment, d’approcher du vaisseau.

Courir au large, c’est s’éloigner de la côte ou de quelque vaisseau.

Se mettre au large, c’est s’élever & s’avancer en mer.

La mer vient du large, c’est-à-dire que les vagues sont poussées par le vent de la mer, & non pas par celui de la terre.

Large, grand & petit large, (Draperie.) voyez l’article Draperie.

Large, (Maréch.) se dit du rein, des jarrets, de la croupe, & des jambes. Voyez ces mots. Aller large, voyez Aller.

Large, Largement, (Peinture.) peindre large n’est pas, ainsi qu’on le pourroit croire, donner de grands coups de pinceau bien larges ; mais en n’exprimant point trop les petites parties des objets qu’on imite, & en les réunissant sur des masses générales de lumieres & d’ombres qui donnent un certain spécieux à chacune des parties de ces objets, & conséquemment au tout, & le font paroître beaucoup plus grand qu’il n’est réellement ; faire autrement, c’est ce qu’on appelle avoir une maniere petite & mesquine, qui ne produit qu’un mauvais effet.

Large, (Vénerie.) faire large se dit en Fauconnerie de l’oiseau lorsqu’il écarte les aîles, ce qui marque en lui de la santé.

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Étymologie de « large »

Wall. lauge ; provenç. larg, larc ; catal. llarg ; espagn. et ital. largo ; du lat. largus, abondant, copieux.

ÉTYMOLOGIE

Ajoutez : La forme lars montre qu'il y a eu un masculin larc, régulièrement formé de largus.

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Du latin largus (« abondant, copieux, libéral, généreux »), qui donne, au masculin, l’ancien français larc, lars et large au féminin. Il a supplanté l'ancien adjectif (du latin latus « large ») encore attesté au seizième siècle, ne subsistant que comme substantif.
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Phonétique du mot « large »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
large larʒ

Fréquence d'apparition du mot « large » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « large »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « large »

  • L’esprit porte le corps comme un vêtement incommode, trop large, trop long et raide de partout.
    Ernst Theodor Amadeus Hoffmann — Princesse Brambilla
  • Le monde, c'est un bateau norvégien rempli de réfugiés afghans en rade au large de l'Australie.
    Marie Darrieussecq — L’Humanité - 13 Septembre 2001
  • On est si bien, tout nu dans une large chaise.
    Alfred de Musset — Namouna
  • Une baleine amputée de sa nageoire caudale est de retour en mer Méditérannée. Elle a été aperçue par des plaisanciers au large de Saint-Tropez le samedi 27 juin. 
    France 3 Provence-Alpes-Côte d'Azur — VIDEO - Fluker, la baleine sans nageoire caudale aperçue au large de Saint-Tropez dans le Var
  • La barque que l’on retient au port n’apprend pas à naviguer. Laissons-la donc prendre le large...
    Jean Maër — Prends le large !
  • La méditation nous permet d'entrer en relation avec une plus large dimension de soi.
    Anonyme
  • Plus large la vision, plus étroite la parole.
    Al Niffari
  • Vivre, c’est transformer en conscience une expérience aussi large que possible.
    André Malraux
  • L'avenir, large porte ouverte sur un horizon aussi vaste que la mer !
    Michelle Le Normand — La plus belle chose du monde
  • La sagesse de la vie est toujours plus profonde et plus large que la sagesse des hommes.
    Alekseï Maksimovitch Pechkov, dit Maksim Gorki — Les Vagabonds, Mon compagnon
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Images d'illustration du mot « large »

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Traductions du mot « large »

Langue Traduction
Anglais large
Espagnol grande
Italien grande
Allemand groß
Chinois
Arabe كبير
Portugais ampla
Russe большой
Japonais
Basque handiak
Corse grande
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Synonymes de « large »

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Antonymes de « large »

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