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Excès

Définitions de « excès »

Trésor de la Langue Française informatisé

EXCÈS, subst. masc.

A.− Usuel
1. [Suivi d'un compl. prép. de formé d'un subst. non précédé de l'article; gén. avec une idée de jugement défavorable] Fait, acte d'aller au-delà de ce qui est permis, convenable dans le cadre d'une réglementation ou au regard des normes de la morale, de l'esthétique ou des convenances sociales. Excès de vitesse, de travail, de zèle. Chacun s'affairait au delà même des bornes de ses attributions avec un excès débordant de zèle et de bonne volonté où entrait une part de jeu et l'enivrement de l'activité pure (Gracq, Syrtes,1951, p. 134):
1. J'admirais, en théorie du moins, les grands dérèglements, les vies dangereuses, les hommes perdus, les excès d'alcool, de drogue, de passion. Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 340.
2. Spécialement
a) Excès de langage (gén. au plur.). Propos discourtois ou injurieux. Poutillard se laisse aller à des excès de langage, peut-être même à des sévices (Duhamel, Cécile,1938, p. 99).
b) Excès de pouvoir. Acte ou décision d'une administration, d'un magistrat qui outrepasse ses pouvoirs légaux ou réglementaires. Recours pour excès de pouvoir; annulation d'un acte pour excès de pouvoir. Le ministre ne peut pas, sans commettre un excès de pouvoir, substituer son action à celle du préfet (Baradat, Organ. préfect.,1907, p. 86).
c) Faire un/des excès de table. Manger ou boire (un peu) trop.
d) [Le compl. désigne un sentiment] Manifestation violente d'un sentiment intense. (Quasi-)synon. accès, débordement.Il le bourrait de coups, comme emporté par un excès de tendresse (Zola, Nana,1880, p. 1199).Des excès de fureur voluptueuse qui ne pouvaient épuiser ni détruire leurs substances incorruptibles (Valéry, Variété V,1944, p. 188).Je me laissai aller à un excès de bonne humeur qui la déconcerta (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 287).
3. [P. ell. du compl. prép. introd. par de]
a) Vieilli. Acte de débauche, dérèglement de conduite. Vous serez coupable des excès où vous me porterez (Staël, Lettres de L. Narbonne,1794, p. 236).J'ai vu cette maladie survenir après des excès immodérés auprès des femmes (Geoffroy, Méd. pratique,1800, p. 364).On a souvent remarqué que les fêtes populaires entraînent aux excès, font perdre de vue la limite qui sépare le licite et l'illicite (Durkheim, Formes élém. vie relig.,1912, p. 547).P. anal., dans le domaine artistique.Les excès des Picasso, des Matisse (...) ne sont pas imputables à Cézanne (Mauclair, Maîtres impressionn.,1904, p. 232).
b) Acte de violence, de cruauté. Se livrer, se porter à des excès. Les conséquences des excès révolutionnaires sont incalculables (Hugo, Travaill. mer,1866, p. 59).Les marins génois se livrèrent au pillage et au massacre. Malgré ces excès, (...) ils reçurent de Bertrand des privilèges commerciaux étendus (Grousset, Croisades,1939, p. 86).
Rem. La docum. atteste la constr. excès de + subst. abstr. précédé de l'article défini désignant la cause de l'excès. [Le] même drame romantique (...) a (...) ouvert la voie aux excès de l'individualisme, en créant le héros anti-social (Arts et litt., 1936, p. 3002). Le gouvernement de Sa Majesté craignait les excès du totalitarisme (H. Bazin, Vipère, 1948, p. 172).
4. [Au sing. et sans compl.]
a) Type de comportement caractérisé par le dépassement de la mesure. En tout l'excès nuit. (Quasi-)synon. démesure; anton. mesure.Ils [les Grecs] veulent contempler l'homme proportionné à ses organes et à sa condition (...) le reste leur eût semblé excès, difformité ou maladie (Taine, Philos. art,t. 2, 1865, p. 166).La plus grande épreuve pour l'homme, est d'être toujours ramené à sa mesure. L'excès lui est fatal (Chardonne, Dest. sent., III, 1936, p. 251):
2. L'excès caractérise et nos douleurs et nos joies; il produit et nos vertus et nos forfaits. Nous portons en tout une sorte d'enthousiasme, un certain besoin de nous livrer à toute la fougue du penchant, dans la colère comme dans la joie, dans la bienveillance, l'amour, les vengeances. Nos vertus sont extrêmes comme nos erreurs; car il n'est point de détermination sans passion, de passion sans excès, ni d'homme sans passion. Senancour, Rêveries,1799, p. 84.
Locutions
Homme d'excès. Homme excessif. Je n'ai jamais pu emboîter Vénus avec Apollon. C'est l'un ou l'autre, étant un homme d'excès, un monsieur tout entier à ce qu'il pratique (Flaub., Corresp.,1870, p. 116).
Loc. adv., par excès. En en faisant trop. Ah! ces convertis! Ils exagèrent, ils pèchent toujours par excès (Arnoux, Crimes innoc.,1952, p. 31).
Proverbe. L'excès en tout est un défaut (Proust, Sodome,1922, p. 641).
b) [Précédé de l'article indéf. ou déf. non générique] Comportement dépassant la mesure. Tomber, verser dans l'excès contraire, opposé. Il en est des révolutions dans les mœurs comme de celles des états : le mouvement se fait le plus souvent d'un excès à l'autre (Marmontel, Essais sur rom.,1799, p. 309).Aussitôt cette exagération de pureté le lança dans un excès opposé; en vertu de la loi des contrastes, il sauta d'un extrême à l'autre (Huysmans, À rebours,1884, p. 135).
B.− Littér. [Suivi d'un compl. prép. de formé d'un subst. gén. précédé de l'article déf.]
1. [Gén. avec une idée de jugement défavorable; le compl. désigne un phénomène de la nature, une situation sociale, politique, un sentiment] Fait que quelque chose est excessif; caractère excessif de (v. excessif A 1). Le faste des monuments et des fêtes, l'excès des impôts, l'injustice des guerres (Chateaubr., Natchez,1826, p. 226).Ils l'égalaient en effet par le courage, dans l'excès constant des souffrances, du dénuement et de la misère (France, Clio,1900, p. 90):
3. L'excès du désespoir ajoute encore aux causes du désespoir pour mener la révolte à cet état de haineuse atonie, qui suit la longue épreuve de l'injustice, et où disparaît définitivement la distinction du bien et du mal. Camus, Homme rév.,1951, p. 69.
Rem. Le syntagme l'excès de + subst. est gén. équivalent au syntagme subst. + excessif.
2. Vieilli, p. hyperb. [Sans idée de jugement défavorable]
a) Haut degré de. Enfin, monsieur, jugez de l'excès de mon avilissement : pour vivre, je suis espion de police (Chamfort, Caract. et anecd.,1794, p. 101).Puisse l'excès de mon repentir et de ma douleur émouvoir ta pitié (Genlis, Chev. Cygne,t. 1, 1795, p. 61).
b) Le dernier excès. Le plus haut degré de. La passion patriotique poussée au dernier excès (Gobineau, Nouv. asiat.,1876, p. 4).La pauvreté est si infâme que c'est le dernier excès du cynisme ou le cri suprême d'une conscience au désespoir d'en faire l'aveu (Bloy, Lieux communs,1902, p. 19).
3. Locutions
a) verbale. Porter à l'excès. Rendre excessif. Condillac (...) enchérit sur la doctrine de son maître, porta à l'excès la manière aride et glacée qui caractérise l'école de métaphysique « matérialiste » (Bonald, Législ. primit.,t. 1, 1802, p. 63).Il était réservé à un architecte français, André Le Nôtre, de montrer dans tout leur éclat les beautés du style classique, mais en les portant à l'excès (Blanc, Gramm. arts dessin,1876, p. 311).
b) prép. Par excès de. À cause d'un excès de, en faisant preuve d'un excès de. Ils attendirent sur des chaises, (...) reculant leurs sièges par excès de politesse, chaque fois qu'un garçon de bureau passait (Zola, Assommoir,1877, p. 435).Elle devenait romantique par excès d'infortune (France, Mannequin,1897, p. 347).
c) adverbiales
À cet excès, à quel excès (vieilli). Tellement, combien. Cela me confond de voir craindre à cet excès la fin de la vie (Staël, Lettres jeun.,1790, p. 414).Je lui cachois à quel excès elle me rendoit malheureux (Genlis, Chev. Cygne,t. 2, 1795, p. 89).
À l'excès
D'une manière exagérée, trop. Je consens que ce souci constant de tenue puisse à la longue devenir irritant. Il tient compte à l'excès de l'opinion d'autrui (Gide, Ainsi soit-il,1951, p. 1239).
Très, beaucoup. Je suis grossie à l'excès, mais je cours cependant tout le jour avec mon père (Staël, Lettres jeun.,1787, p. 172).Ignoble autant que possible et lugubre à l'excès, ce souillon à nul autre pareil (Cladel, Ompdrailles,1879, p. 264).
Avec excès. D'une manière exagérée, outre-mesure. Tu sais qu'il avait l'habitude déplorable d'aimer le thé froid avec excès (Gobineau, Nouv. asiat.,1876, p. 233).Il me fallait le dérégler un peu, le mettre en colère, faire l'imbécile avec excès (Abellio, Pacifiques,1946, p. 322).
Jusqu'à l'excès. Synon. un peu trop.Constants et invincibles dans l'adversité, nés pour tous les arts, civilisés jusqu'à l'excès durant le calme de l'état (Chateaubr., Essai Révol.,t. 1, 1797, p. 111).Esprit délicieux et délié jusqu'à l'excès, amant passionné de ce qui fut de plus beau (Valéry, Variété IV,1938, p. 47).
Sans excès. Point trop. Elle est rieuse, mais sans excès, point évaporée ni précoce (Taine, Notes Paris,1867, p. 152).Grande, bien en chair, sans excès (Duhamel, Cécile,1938, p. 25).
C.− [L'idée principale est celle d'une mise en rapport de deux données considérées sous l'angle quantitatif]
1. Excès de qqc. sur qqc.Fait qu'une quantité en dépasse une autre; différence en plus. Synon. excédent; anton. défaut, déficit.Les accidents de chaudières sont toujours dus à l'excès de pression interne sur la résistance des enveloppes (Champly, Nouv. encyclop. prat.,t. 1, 1927, p. 262).La devise prêtée ne devient produit utilisable que par un excès d'importations de l'emprunteur sur ses exportations (Perroux, Écon. XXes.,1964, p. 381).
[P. ell. du compl. prép. sur] Les statistiques indiquent un léger excès de garçons à la naissance (Cuénot, Rostand, Introd. génét.,1936, p. 37).
2. [Construit avec un compl. prép. introduit par dans, par rapport, pour, etc., ou sans compl. avec une idée de mise en rapport avec une quantité considérée comme optimale] Volume ou quantité de quelque chose se trouvant en surplus. Synon. excédent.
− Dans le domaine sc. et techn.L'action du gypse [sur le ciment] serait (...) nulle ou peu marquée sur un ciment mal dosé, c'est-à-dire renfermant un excès d'alumine par rapport à la silice (J. Cahen, Bruet, Carrières,1926, p. 190).L'accumulation d'un excès d'énergie sexuelle insatisfaite par suite d'une répression violente? (Mounier, Traité caract.,1946, p. 234).L'excès de neutrons disponibles dans une pile peut entraîner la formation de plus de matières fissiles qu'il n'en est consumé pour produire ces neutrons (Goldschmidt, Avent. atom.,1962, p. 206):
4. ... l'acier est une combinaison de fer et de charbon que l'on tire, soit de la fonte, en enlevant à celle-ci l'excès de charbon, soit du fer, en ajoutant à celui-ci le charbon qui lui manque. Verne, Île myst.,1874, p. 141.
Littér. [Avec une idée de mise en rapport avec une quantité considérée comme optimale en se référant à une norme morale, soc. ou esthétique] Quantité anormale ou excessive de quelque chose. Dîner chez M. de Noailles. Excès de paroles inutiles. Quelle perte de temps que ces dîners! (Dupanloup, Journal,1863, p. 236).Vos sociétés folles meurent presque toujours par un excès d'idoles chargeant l'esprit humain (Hugo, Légende,t. 4, 1877, p. 559).L'excès de poudre noiera (...) la courbe de son nez (Colette, Music-hall,1913, p. 79).
3. Locutions
a) adj. Subst. + en excès.L'excès de + subst.La chaux en excès peut se fixer, par adsorption, sur le silicate (Cléret de Langavant, Ciments et bétons,1953, p. 39).
b) Locutions adverbiales
α) En excès. En trop grande quantité, en trop grand nombre. Une tumeur (...) sécrétant en excès l'hormone de croissance (QuilletMéd.1965, p. 488).
β) Par excès (math.). En arrondissant l'expression d'une mesure à un nombre supérieur. Des valeurs approchées (...) par excès et par défaut (Lebesgue, Intégration et rech. fonctions primit.,1904, p. 37).
P. métaph. En faisant une approximation large. Même les plus heureuses de nos intuitions sont en quelque sorte des résultats inexacts par excès, à l'égard de notre clarté ordinaire (Valéry, Variété I,1924, p. 189).En deçà et au delà nous n'avons qu'une perception confuse par excès ou par défaut, nous tendons alors vers le maximum de visibilité (Merleau-Ponty, Phénoménol. perception,1945, p. 348).
D.− PHILOS., PSYCHANAL. Excès de qqc. sur qqc.Fait de dépasser, déborder par sa complexité, son intensité ou son dynamisme interne (v. excéder A 2). Excès du signifié sur le signifiant (Merleau-Ponty, Phénoménol. perception,1945p. 447).La parole est l'excès de notre existence sur l'être naturel (Merleau-Ponty, Phénoménol. perception,1945p. 229).
Prononc. et Orth. : [εksε]. [e] initial uniquement ds Passy 1914 et Dub., l'influence de la syll. finale ouverte étant très forte sur l'initiale. Cf. ex-. Enq. : /ekse, (D)/. Ds Ac. 1694-1932. Les éd. de 1694 et 1718 écrivent excés. Étymol. et Hist. 1. Fin xiies. « acte qui dépasse la mesure, dérèglement », le plus souvent au plur. (Nicole, Règle de S. Benoît, 466, Héron ds R. Hist. litt. Fr. t. 12, p. 145 : Por lor pechié, por lor excès Emporterent si grief colee Qu'andous furent ocis d'espée); 2. 1370 « ce qui dépasse une quantité, surplus » exces ou sourmont (N. Oresme, Ethiques, éd. A. D. Menut, livre 8, 96c, p. 288). Empr. au lat. excessus, subst. formé sur le supin excessum de excedere (excéder*), en lat. class. « sortie »; en lat. chrét. surtout au plur. « écarts; fautes, péchés ». Fréq. abs. littér. : 3 050. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 5 705, b) 3 699; xxes. : a) 2 926, b) 4 360.

Wiktionnaire

Nom commun - français

excès \ɛk.sɛ\ masculin

  1. Ce qui est en trop.
    • Cette combinaison chimique laisse un excès d’eau, un excès d’oxygène.
  2. Différence en plus de deux quantités inégales.
    • L’excès d’une ligne sur une autre.
    • Car l’excès ou le défaut d’une idée sur une autre, ou, pour me servir des termes ordinaires, l’excès ou le défaut d’une grandeur n’est pas proprement une raison, ni les excès ou les défauts égaux des grandeurs, des raisons égales. — (Nicolas Malebranche, De la recherche de la vérité, VI, I, 5)
  3. (Arithmétique) (Vieilli) Excédent, reste, différence en plus d’une quantité sur une autre ; résultat d’une soustraction.
  4. (Figuré) Ce qui dépasse une limite ordinaire, une mesure moyenne, et particulièrement ce qui dépasse le degré convenable, raisonnable et juste.
    • Ce très léger excès, péché de gourmandise dont il s’accusait d’ailleurs véhémentement, et duquel il n’était guère coutumier, l’avait vivement dérangé, […]. — (Louis Pergaud, Le Sermon difficile, dans Les Rustiques, nouvelles villageoises, 1921)
    • Le problème de l’excès de sel se pose dans de nombreux périmètres irrigués des régions sèches. Leur amélioration peut se faire par des apports de gypse ou de phosphogypse. — (Mémento de l'agronome, Ministère des affaires étrangères (France), CIRAD & GRET (Éditions Quae), 2002, p. 635)
    • J’espère que vous m’avouerez que la pension que le roi me fait, n’est pas un excès qui doive être sujet à réformation. — (Jean-Louis Guez de Balzac, livre VI, lettre 6)
    • Pour voir à quel excès irait ton insolence. — (Pierre Corneille, Héraclius empereur d’Orient, I, 2)
    • Un excès de plaisir nous rend tout languissants. — (Pierre Corneille, Le Cid, IV, 5)
    • Et de sa digne ardeur [de l’âme dévote] le salutaire excès,
      Égal aux fortunes diverses,
      M’adore autant dans les traverses,
      Que dans les plus heureux succès.
      — (Pierre Corneille, Imitation de Jésus-Christ, III, 6)
    • Néron tant détesté
      N’a point à cet excès poussé sa cruauté.
      — (Jean Racine, Bérénice, IV, 6)
    • Ma douleur, à cette triste vue, à son dernier excès est enfin parvenue. — (Jean Racine, Bérénice, V, 6)
    • […] Qui sait même, qui sait si le ciel irrité
      A pu souffrir l’excès de ma félicité ?
      — (Jean Racine, Iphigénie, III, 6)
    • Et qu’Aman soit admis à cet excès d’honneur. — (Jean Racine, Esther, II, 7)
    • Madame, je sais trop à quel excès de rage
      La vengeance d’Hélène emporta mon courage.
      — (Jean Racine, Andromaque, IV, 5)
    • Protésilas ne disait rien ; mais il tâchait de me faire entrevoir le danger et l’excès de toutes ces réformes que vous me faisiez entreprendre. — (François de Salignac de La Mothe-Fénelon, Les Aventures de Télémaque, XIII, 1699)
    • Peut-être que la bonté de Dieu vous a réservé pour être un monument public de l’excès de ses miséricordes envers les plus grands pécheurs. — (Jean-Baptiste Massillon, Homélie sur l’Évangile de Lazare : Deuxième Partie)
    • Redoutez du moment le conseil mensonger :
      Un excès de prudence est souvent un danger.
      — (Jacques Delille, Malheur et pitié, IV)
  5. (Absolument)
    • Et toujours d’un excès vous vous jetez dans l’autre. — (Molière, Le Tartuffe, V, 1)
    • Toujours il va d’un excès dans un autre. — (Jean de la Fontaine, Contes : Troisième Partie : II : La Mandragore)
    • Je veux avec excès vous aimer et vous plaire. — (Voltaire, Zaïre, I, 2)
    • Tout excès mène au crime. — (Voltaire, Alzire, ou les Américains, IV, 1)
  6. Se dit quelquefois au pluriel.
    • Mais tels sont les excès du malheur qui m’opprime. — (Pierre Corneille, Clitandre, II, 6)
  7. (Familier)
    • Il n’y a pas d’excès : Se dit quand on veut rabattre quelque chose d’une louange.
    • Il se montre fort aimable. - Vraiment, il n’y a pas d’excès.
  8. (Au pluriel) Débauche ; dérèglement.
    • Les excès amoureux donnent plus d’entraînement que de lassitude et sont moins difficiles à recommencer le lendemain que la semaine suivante. — (Pierre Louÿs, Trois filles de leur mère, René Bonnel, Paris, 1926, chapitre VIII)
    • Malheureux humains, qui ne savez ce qui vous est bon, vous avez beau vouloir sanctifier vos passions ; elles vous punissent toujours des excès qu’elles vous font commettre ; et c’est en exauçant vos vœux injustes que le ciel vous les fait expier. — (Jean-Jacques Rousseau, Le Lévite d’Éphraïm : Chant Troisième)
    • J'offre ici aux moralistes une occasion facile de triompher de moi. Mes censeurs s'apprêtent à montrer dans mon malheur les suites d'un égarement, le résultat d'un excès : il m'est d'autant plus difficile de les contredire que je vois mal en quoi consiste l'égarement, et où se situe l’excès. Je m'efforce de ramener mon crime, si c'en est un, à des proportions justes : […]. — (Marguerite Yourcenar, Mémoires d'Hadrien, éditions Plon, 1951)
  9. (Au singulier) (Familier) Partie de table entre gourmets.
    • Nous avons fait hier un petit excès.
  10. (Au pluriel) Violences, outrages.
    • Il prévit à quels excès ils se porteraient quand il ne serait plus au monde […] — (Jacques-Bénigne Bossuet, Histoire, III, 5)
  11. (Droit) Séparation de corps pour cause d’excès, de sévices et d’injures graves.
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

EXCÈS. n. m.
Ce qui est en trop. Cette combinaison chimique laisse un excès d'eau, un excès d'oxygène. En termes de Mathématiques, il se dit pour Excédent, reste, différence en plus d'une quantité sur une autre. Le résultat de la soustraction se nomme différence ou excès. Il se dit aussi de Ce qui dépasse les bornes, la mesure accoutumée, le degré ordinaire et, par extension, le degré convenable, raisonnable et juste. L'excès est blâmable, regrettable en toutes choses. Excès de froid, de chaleur. Il y a dans ce sol un excès d'humidité. Il se dit en particulier des Abus, surtout de nourriture. Excès de boire, de manger. Excès de bouche. Excès de table. Excès de travail. Il se dit aussi en parlant des Choses morales. Excès de joie, de bonté, d'indulgence. Excès de zèle. L'un pèche par défaut, l'autre par excès. Louer, blâmer avec excès. Tomber d'un excès dans un autre. Fuir l'un et l'autre excès. Excès de précautions. Excès de pouvoir, Action d'excéder le pouvoir que l'on a reçu, l'autorité dont on est investi. Il signifie souvent absolument Débauche, dérèglement. Il a fait des excès, beaucoup d'excès. Il s'est ruiné l'estomac par ses excès. Des excès préjudiciables à la santé. Faire un petit excès. Il signifie aussi, surtout en termes de Palais, Outrage, violence. Se porter à des excès. Les excès commis sur sa personne. Demande en séparation de corps pour cause d'excès, de sévices et d'injures graves.

À L'EXCÈS, JUSQU'À L'EXCÈS, loc. adv. Outre mesure, à l'extrême. Être ménager, être économe à l'excès. Être libéral jusqu'à l'excès. Prudent jusqu'à l'excès. Pousser la vengeance à l'excès, jusqu'à l'excès. Porter l'insolence jusqu'à l'excès.

Littré (1872-1877)

EXCÈS (è-ksê ; l's se lie : des è-ksê-z indignes) s. m.
  • 1Différence en plus de deux quantités inégales. L'excès d'une ligne sur une autre. L'excès ou le défaut d'une idée sur une autre, ou, pour me servir des termes ordinaires, l'excès ou le défaut d'une grandeur, Malebranche, Rech. VI, I, 5.

    Il se dit, en arithmétique, pour exprimer le résultat d'une soustraction.

  • 2 Fig. Ce qui dépasse une limite ordinaire, une mesure moyenne. L'excès du froid. L'excès du chaud. J'espère que vous m'avouerez que la pension que le roi me fait, n'est pas un excès qui doive être sujet à réformation, Guez de Balzac, liv. VI, lett. 6. Pour voir à quel excès irait ton insolence, Corneille, Héracl. I, 2. Un excès de plaisir nous rend tout languissants, Corneille, Cid, IV, 5. Et de sa digne ardeur [de l'âme dévote] le salutaire excès, Egal aux fortunes diverses, M'adore autant dans les traverses, Que dans les plus heureux succès, Corneille, Imit. III, 6. Néron tant détesté N'a point à cet excès poussé sa cruauté, Racine, Bérén. IV, 6. Ma douleur, à cette triste vue, à son dernier excès est enfin parvenue, Racine, ib. v, 6. … Qui sait même, qui sait si le ciel irrité A pu souffrir l'excès de ma félicité ? Racine, Iphig. III, 6. Et qu'Aman soit admis à cet excès d'honneur, Racine, Esth. II, 7. Madame, je sais trop à quel excès de rage La vengeance d'Hélène emporta mon courage, Racine, Andr. IV, 5. Protésilas ne disait rien ; mais il tâchait de me faire entrevoir le danger et l'excès de toutes ces réformes que vous me faisiez entreprendre, Fénelon, Tél. XII. Peut-être que la bonté de Dieu vous a réservé pour être un monument public de l'excès de ses miséricordes envers les plus grands pécheurs, Massillon, Car. Lazare. Un excès de prudence est souvent un danger, Delille, Pitié, IV.

    Absolument. Et toujours d'un excès vous vous jetez dans l'autre, Molière, Tart. v, 1. Toujours il va d'un excès dans un autre, La Fontaine, Mandr. Je veux avec excès vous aimer et vous plaire, Voltaire, Zaïre, I, 2. Tout excès mène au crime, Voltaire, Alz. IV, 1.

    Il se dit quelquefois au pluriel. Mais tels sont les excès du malheur qui m'opprime, Corneille, Clit. II, 6.

    Familièrement. Il n'y a pas d'excès, se dit quand on veut rabattre quelque chose d'une louange. Il se montre fort aimable. - Vraiment, il n'y a pas d'excès.

    Excès de pouvoir, fait de rendre une décision ou d'agir en dehors des attributions légales.

  • 3 Au plur. Débauche, dérèglement. Faire des excès. Ses excès ont ruiné sa santé. Des excès de table. Vous avez beau vouloir sanctifier vos passions ; elles vous punissent toujours des excès qu'elles vous font commettre, Rousseau, Lév. d'Éphr. 3.

    Au sing. Familièrement. Nous avons fait hier un petit excès, se dit d'une partie de table.

  • 4 Au plur. Violences, outrages. Il prévit à quels excès ils se porteraient, Bossuet, Hist. III, 5.

    En termes de jurisprudence, séparation de corps pour cause d'excès, de sévices et d'injures graves.

  • 5À l'excès, jusqu'à l'excès, loc. adv. Outre mesure, à l'extrême. Vous montrez un chagrin qui va jusqu'à l'excès, Corneille, Cid, I, 2. Le respect pour l'autorité allait jusqu'à l'excès, Bossuet, Hist. III, 5. Ses débordements allèrent à l'excès, Bossuet, ib. II, 1. Ils [les Scythes] aiment le vin au point que, pour dire boire à l'excès, on dit boire comme un Scythe, Barthélemy, Anach. ch. 20.
  • 6Dans l'excès, au delà de la limite ordinaire. Et lorsque la valeur ne va point dans l'excès, Elle ne produit point de si rares succès, Corneille, Cid, IV, 3. Madame de Nesles est affligée dans l'excès, Sévigné, 487.

    PROVERBE

    L'excès en tout est un défaut.

REMARQUE

Peut-on dire trop d'excès ? Voy. la remarque à EXCESSIF.

HISTORIQUE

XIVe s. Se dix estoit le plus grand excès en aucune matiere et deux estoit la plus grant deffaute, Oresme, Eth. 44. Puisque il a ja fait les excès et se est mal gouverné, Oresme, ib. 74. On dit que excès n'est corrigé que parexcès, c'est à dire que oultrage ne se corrige fors que par oultrage, Ménagier, I, 9. Pour eschever [éviter] le gast et excès des mesnies, ib. II, 4.

XVe s. Vous excitez tous excès en nature Que ne pourroit souffrir chevaulx ne ours, Deschamps, Vie dissipée. Le grant Alexandre jadis Et plusieurs roys en firent gloire [de boire] ; L'excès [je] n'en appreuve pourtant, Basselin, I. Commocions de peuple et autres deliz et excès contre nostre dit seigneur, Bibl. Des ch. 5e série, t. I, p. 81.

XVIe s. Ceulx qui disent qu'il n'y a jamais d'excès en la vertu, d'autant que ce n'est plus vertu si l'excèz y est…, Montaigne, I, 223. Commettre des excès, Amyot, Cam. 51. Il commença à parler et à nommer celui qui lui avait fait cet excès [violence], Paré, VIII, 31.

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Encyclopédie, 1re édition (1751)

* EXCÈS, s. m. (Grammaire.) au physique, c’est la différence de deux quantités inégales.

Au moral, l’acception n’est pas fort différente. On suppose pareillement une mesure à laquelle les qualités & les actions peuvent être comparées ; & c’est par cette comparaison qu’on juge qu’il y a excès ou défaut.

Excès, s. m. (Commerce.) signifie quelquefois ce qui excede une mesure, c’est-à-dire ce qui est au-delà de la dimension ou capacité qu’elle doit avoir.

Ce terme n’est guere en usage en ce sens que dans les bureaux des cinq grosses fermes du roi, établis sur les ports de mer pour y recevoir les droits de sortie des vins & eaux-de-vie qu’on y embarque pour l’étranger.

Les commis de ces bureaux appellent excès, ce que les barriques contiennent au-delà des cinquante veltes, qui est le pié ordinaire sur lequel le tarif regle les droits de sortie. Ainsi quand la barrique est de 60 veltes, l’excès est de dix veltes, que le commis fait payer à raison de tant par velte, à proportion du droit que les cinquante veltes ont payé. Voy. Velte. Dictionn. de Comm. de Trév. & Chamb. (G)

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Étymologie de « excès »

Provenç. exces ; espagn. exceso : ital. eccesso ; du lat. excessus, de excessum, supin de excedere (voy. EXCÉDER).

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(Date à préciser) Du latin excessus (« sortie, digression »).
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Phonétique du mot « excès »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
excès ɛkssɛ

Fréquence d'apparition du mot « excès » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « excès »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « excès »

  • La langue française, dès cette époque, commençait à être choisie par les peuples comme intermédiaire entre l'excès de consonnes du nord et l'excès de voyelles du midi.
    Victor Hugo — L'Homme qui rit
  • Malheur aux incertains et aux parcimonieux ! On périt par défaut bien plus que par excès.
    Marie-René Alexis Saint-Leger Leger, dit, en diplomatie, Alexis Leger, et, en littérature Saint-John Perse — Sur l'optimisme en politique, Gallimard
  • Tout est bon quand il est excessif.
    Marquis de Sade — La Nouvelle Justine
  • Il n'y a pas de lieu où l'on mente plus que dans un confessionnal : les pénitents par excès de pudeur, les pénitentes par excès d'imagination.
    Anonyme
  • Les excès de la liberté mènent au despotisme ; mais les excès de la tyrannie ne mènent qu'à la tyrannie.
    François René de Chateaubriand
  • La passion est un excès de vie, un excès de lumière, impossible à étaler dans un quotidien.
    Tahar Ben Jelloun — Entretien avec Catherine Argand - Mars 1999
  • Qui chérit à l'excès sait haïr à l'excès.
    Aristote
  • L’excès de sommeil fatigue.
    Homère — L’Odyssée
  • L'excès en tout est la vertu de la femme.
    Jules Huot de GoncourtEdmond Huot de Goncourt — Journal, Fasquelle
  • Il* a porté toutes les vertus des héros à un excès où elles sont aussi dangereuses que les vices opposés.
    François Marie Arouet, dit Voltaire — Histoire de Charles XII
Voir toutes les citations du mot « excès » →

Traductions du mot « excès »

Langue Traduction
Anglais excess
Espagnol exceso
Italien eccesso
Allemand überschuss
Chinois 过量
Arabe فائض
Portugais excesso
Russe избыток
Japonais 過剰
Basque gehiegizko
Corse eccessivu
Source : Google Translate API

Synonymes de « excès »

Source : synonymes de excès sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « excès »

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Nombre de points du mot excès au scrabble : 13 points

Excès

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