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Essuyer

Définitions de « essuyer »

Trésor de la Langue Française informatisé

ESSUYER, verbe trans.

A.− [Le compl. désigne qqc. de mouillé ou qui mouille]
1. [Le compl. désigne qqc. de mouillé] Sécher en frottant avec une éponge, un linge qui absorbe l'humidité.
a) [Le compl. désigne un obj.] Essuyer une gamelle, un plat, la vaisselle. La chandelle que la petite servante avait emportée pour laver les cuillers, essuyer les verres (Maupass., Contes et nouv.,t. 1, Père Amable, 1886, p. 219).Bon! Ouvrez le placard, et donnez-moi une assiette, n'importe laquelle. Si vous essuyez comme il faut votre vaisselle, pourquoi cette buée? (Renard, Poil Carotte,1894, p. 81).
b) [Le compl. désigne une pers., le corps ou une partie du corps] Essuyer sa bouche, ses doigts, sa figure, ses mains; essuyer la face, le front de qqn. Il [Armand] essuyait gentiment les grands yeux baignés [de sa mère] avec ses petites mains malhabiles (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 52).Il essuyait délicatement, du bout de ses doigts, ses tempes luisantes de sueur (Bernanos, Mauv. rêve,1948, p. 942):
1. ... debout et mouillée, [Chrysis] dit à l'esclave : « Essuie-moi. » La Malabaraise prit une large éponge à la main, et la passa dans les doux cheveux d'or de Chrysis, tout chargés d'eau et qui ruisselaient en arrière; elle les sécha, les éparpilla, les agita moelleusement... Louÿs, Aphrodite,1896, p. 19.
Emploi pronom. réfl. [Abs. ou suivi d'un compl. désignant le corps ou une partie du corps du suj.] Elle sanglota. Elle avait tiré son mouchoir, s'essuyait les yeux (Maupass., Contes et nouv.,t. 1, Mais. Tellier, 1881, p. 1195).Le grand-oncle patriarche (...) passait (...) pour s'essuyer une fois de plus dans l'essuie-mains de la cuisine (Malègue, Augustin,t. 1, 1933, p. 194).La dernière bouchée avalée, elle s'essuya la bouche d'un geste large (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 52).
c) P. anal. [Le suj. désigne le vent ou le soleil] Synon. sécher.Une verdure débarbouillée par la pluie et essuyée par le rayon (Hugo, Misér.,t. 2, 1862, p. 464).Parfois, d'une traînée lumineuse, le soleil essuie lentement un pré, un village, un bois (Renard, Journal,1960, p. 1025).
Emploi pronom. à sens passif. [Avec un compl. circ. désignant le vent ou le soleil] Sous les haleines vives qui emportaient les nuages, les trottoirs s'étaient essuyés (Zola, Bonh. dames,1883, p. 469).Une couche de terre de lande, blanche, légère, que les averses dament au lieu de l'entraîner, qui s'essuie vite, au premier coup de soleil, au premier souffle de vent (Pesquidoux, Livre raison,1928, p. 126).
d) Loc. fig. Essuyer les plâtres. Occuper le premier une habitation qui vient d'être achevée en en subissant les éventuels inconvénients. [Nana] occupait (...) le second étage d'une grande maison neuve, dont le propriétaire louait à des dames seules, pour leur faire essuyer les plâtres (Zola, Nana,1880, p. 1122).
P. compar. Une femme ne peut aimer passionnément qu'après avoir été mariée. Si je la pouvais comparer à une maison, je dirais qu'elle n'est habitable que lorsqu'un mari a essuyé les plâtres (Maupass.Contes et nouv., t. 1, Ruse, 1882, p. 832).
P. ext. Subir les premiers inconvénients d'une situation nouvelle, d'un fait nouveau. Goncourt a complètement terminé sa « Fille Élisa ». Seulement, il ne veut paraître qu'en Avril, sans doute pour laisser « L'Assommoir » essuyer les plâtres (Zola, Corresp.,1877, p. 464).Les deux grandes dames qui avaient l'habitude d'essuyer les plâtres dans les salons nouvellement ouverts (Proust, Sodome,1922, p. 871).
2. [Le compl. désigne qqc. qui mouille] Ôter en séchant. Essuyer l'eau, la buée; essuyer les larmes sur le visage de qqn. [Françoise] détachait de son cou sa serviette, la pliait en essuyant à ses lèvres un reste d'eau rougie et de café (Proust, Guermantes 1,1920, p. 17).La sueur coulait en si grande abondance sur mon visage et sur mon corps qu'au bout d'un moment, j'ai renoncé à l'essuyer (Green, Journal,1944, p. 121):
2. Henriette avait renversé l'un des deux minces vases posés sur cette commode, avec chacun un lourd dahlia, et l'eau avait coulé sur le bois ciré et la serviette brodée, et quand Henriette voulut enrayer le désastre, elle renversa le deuxième... Ce fut Alexis qui essuya l'eau avec son grand mouchoir de linon, bien soigneusement... Triolet, Prem. accroc,1945, p. 212.
Au fig. Essuyer les larmes de qqn. Calmer son affliction, le consoler. ,,Essuyer ses larmes, se consoler`` (Ac. 1835-1932).
B.− P. ext.
1. [Le compl. désigne qqc. qui est poussiéreux, sali, souillé] Nettoyer en frottant afin d'enlever la poussière, ce qui souille.
a) [Le compl. désigne un obj.] Essuyer ses lunettes, une armoire, le sol. Débouchant les bouteilles avec précaution, essuyant le goulot de la paume de sa main pour en faire tomber les parcelles de cire (Moselly, Terres lorr.,1907, p. 43).J'ai infatigablement, rituellement essuyé les mêmes meubles cirés avec un torchon de laine, jusqu'à s'y mirer parfaitement (Péguy, V.-M., comte Hugo,1910, p. 691):
3. Tantôt elle oubliait de mettre son couvert, tantôt elle lui donnait une fourchette sale, ou bien, encore, en essuyant la table, elle laissait à dessein des miettes devant sa bru. Au besoin, elle y amassait en tas celles des autres. Renard, Journal,1889, p. 22.
Essuyer ses chaussures, ses semelles, ses souliers, ses pieds. Frotter ses semelles sur un paillasson ou ce qui peut en tenir lieu. Essuyez vos pieds, Caporal, parce que, voyez-vous, ils font un tas d'histoires avec la propreté (Zola, Terre,1887, p. 296).Il essuie soigneusement contre le talus ses semelles pleines de boue (Bernanos, M. Ouine,1943, p. 1482).Emploi pronom. réfl. S'essuyer les pieds. Joseph, après s'être essuyé les pieds sur un confortable tapis brosse, heurta le battant de la porte (Duhamel, Passion J. Pasquier,1945, p. 142).
Rem. On rencontre ds la docum. qq. emplois pronom. où le suj. désigne les souliers. Un bruit de sabots claquant ou s'essuyant sur le seuil (Alain-Fournier, Meaulnes, 1913, p. 31).
b) [Le compl. désigne le corps ou une partie du corps] J'essuie mes paumes remplies de boue à un mur ou à un tronc d'arbre (Sartre, Nausée,1938, p. 35).[Ils] essuyèrent dans l'herbe mouillée leurs mains noires de cambouis et de boue (Abellio, Pacifiques,1946, p. 24).
Emploi pronom. réfl. [Abs. ou suivi d'un compl. désignant le corps ou une partie du corps du suj.] Je venais enfin de faire une bonne pointe à mon crayon et je m'essuyais les doigts sur le fond de ma culotte, où la mine de plomb ne marque pas (Duhamel, Confess. min.,1920, p. 10):
4. Cette poussière de foin est partout, on se dirait noire de puces (...) Elle enleva sa chemise, prit le bon torchon rude pour s'essuyer, puis elle souffla la bougie et elle s'approcha de la fenêtre qui soufflait des étoiles et du vent. Elle passa le torchon épais sous ses seins, bien autour, puis dessus avec la main ronde. Elle faisait comme quand on essuie des petits melons tachés par la boue d'arrosage. Giono, Gd troupeau,1931, p. 49
Rem. On rencontre ds la docum. qq. emplois métaph. ou fig. Ce visage de chrétienne dévorée que la chaude pluie des larmes semblait avoir essuyé de sa pâleur (Bloy, Femme pauvre, 1897, p. 50). La lune qu'essuie une charpie de nuages (Pourrat, Gaspard, 1931, p. 227).
2. [Le compl. désigne la poussière, ce qui salit ou souille] Ôter en frottant. Essuyer la poussière. Toute la blancheur de son mouchoir passa à essuyer les taches de confiture (Romains, Copains,1913, p. 40).Sa soutane a une petite tache de boue qu'il essuie soigneusement, longtemps (Bernanos, Imposture,1927, p. 515).
Rem. On rencontre ds la docum. qq. emplois métaph. La misère est géante, elle se sert pour essuyer les ordures du monde de votre figure comme d'une toile à laver (Céline, Voyage, 1932, p. 270).
C.− Au fig.
1. [Le compl. désigne qqc. de fâcheux ressenti physiquement, matériellement] (Quasi-)synon. éprouver, subir, supporter.Essuyer un assaut, une défaite, des pertes, une tempête; essuyer un coup de feu, le feu de l'ennemi. Il est à remarquer que, pour avoir essuyé les plus effroyables revers, une armée ne déchoit pas de son rang de première du monde (France, Île ping.,1908, p. 220).Nous avons eu le temps (...) de préparer en douce notre mobilisation, sans avoir essuyé cette fameuse attaque brusquée qui était la terreur de notre état-major (Martin du G., Thib.,Été 14, 1936, p. 483):
5. Le vieux Bélisaire, attaché trop bas, s'était pris une patte de devant dans sa longe (...) il s'était débattu furieusement; les deux hommes avaient essayé de le délivrer, mais si maladroitement qu'ils avaient réussi à l'empêtrer davantage, tout en risquant d'essuyer de dangereux coups de sabots. Alain-Fournier, Meaulnes,1913, p. 271.
2. [Le compl. désigne un désagrément ressenti moralement, intellectuellement] (Quasi-)synon. endurer, souffrir.Essuyer un affront, une offense, un refus. Le mépris qu'avait essuyé La Brière, et surtout l'irrespectueux discours de la fille au père, contristaient tellement ce pauvre jeune homme (Balzac, M. Mignon,1844, p. 215).Une sorte de résignation dédaigneuse qui me permit d'essuyer sans rougir le sermon de MmeBertrand (Gide, Si le grain,1924, p. 449):
6. Jallez aurait bien voulu, disait-il, pour son propre confort moral, se représenter l'immense foule des poilus bleu-horizon comme d'émouvantes victimes qui, non contentes de payer les sottises politiques du temps de paix, devaient encore essuyer en silence les éclaboussures de sottise du temps de guerre. Romains, Hommes bonne vol.,1938, p. 219.
Rem. 1. On rencontre ds la docum. a) Le subst. masc. essuiement ou essuyement. Action d'essuyer; résultat de cette action. [Une toile] où l'admirable palette des tons jaunâtres et azurés est comme faite d'essuiements de pinceaux (Goncourt, Journal, 1886, p. 572). b) Le subst. fém. essuyette. Action d'essuyer sommairement, légèrement. Claudette en astique une partie à fond, chaque samedi, et la servante n'en a que l'essuyette (La Varende, Manants du Roi, 1938, p. 142). c) Le subst. fém. essuyure. Ce qu'on essuie. Une tasse mal lavée, ces essuyures, ces ronds laissés par les verres (Mauriac, Chemin mer, 1939, p. 67). d) Qq. mots composés α) Essuie-voitures, subst. masc. Chiffon servant à essuyer une voiture. Son imperméable (...) chiffonné, de sa grosse main qui le serre comme un torchon essuie-voitures (Butor, Modif., 1957, p. 19). β) Essuie-tout, subst. masc. Torchon, de tissu ou de papier, utilisé pour essuyer. L'essui-tout têtu qui n'abandonne pas avant d'avoir fini son travail (Jour de France, 29 sept. 1970 ds A. Clas, Néologismes publicitaires ds Meta, t. 17, no1, 1972, p. 74). 2. Les dict. récents attestent les composés α) Essuie-pieds, subst. masc. Grille, paillasson métallique pour décrotter la semelle des chaussures. β) Essuie-meubles, subst. masc. ,,Torchon, morceau d'étoffe destiné à enlever la poussière des meubles`` (Lar. Lang. fr.).
Prononc. et Orth. : [esɥije], (j')essuie [esɥi]. Prononc. [εs-] ds Fér. 1768, Fér. Crit. t. 2 1787, Land. 1834, Littré et, à titre de var., ds Barbeau-Rodhe 1930 et ds Warn. 1968. Cf. essai. Ds Ac. 1694-1932. Conjug. Change y en i devant syll. muette : j'essuie, j'essuierai(s). Étymol. et Hist. 1. 1135 « sécher » (Cour. Louis, 752 ds T.-L.); 2. av. 1630 fig. « avoir à supporter quelque chose de fâcheux » (A. d'Aubigné, Le Printems, livre III, Odes, éd. Réaume et Caussade, p. 119 : J'ay trop essuié mon désastre). Du b. lat. exsuccare « tirer le suc de ». Fréq. abs. littér. : 2 521. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 3 368, b) 3 873; xxes. : a) 3 985, b) 3 372. Bbg. Orr (J.). Two cases of pseudo-semantic development : OFr. aerdre, Fr. essuyer. Rom. Philol. 1952/53, t. 6, pp. 294-298. − Simonis (F.). Von altfranzösisch terdre zu neufranzösisch essuyer. Köln, 1963, 194 p.

Wiktionnaire

Verbe - français

essuyer \ɛ.sɥi.je\ ou \e.sɥi.je\ transitif 1er groupe (voir la conjugaison)

  1. Sécher en frottant avec un objet absorbant.
    • Elle s’est éclipsée ; elle est revenue, tiède et savonneuse ; puis, toute fraîche, la figure rosissante, essuyant des gouttelettes d’eau. — (Henri Barbusse, L’Enfer, Éditions Albin Michel, Paris, 1908)
    • Les deux travailleurs essuyèrent leurs visages trempés, réendossèrent leurs tuniques, bouclèrent leurs ceinturons, […]. — (H. G. Wells, La Guerre dans les airs, 1908, traduction d’Henry-D. Davray et B. Kozakiewicz, Mercure de France, Paris, 1910, page 357 de l’édition de 1921)
    • Au fond de la pièce, le barman mélomane refait le plein de son distributeur de cacahuètes et essuie une dernière fois le comptoir, après avoir ravitaillé le présentoir d’œufs durs. — (Michel Bernascolle , Les rapegons de Sainte-Victoire, Éditions Cheminements, 2006, page 177)
    • Oui, comment quelqu’un a-t-il pu entrer ici et en ressortir, répéta le vieil humme en s’essuyant le front du revers de sa manche. — (John Dickson Carr, La Chambre ardente, traduction de Maurice-Bernard Endrèbe, 1962, chapitre VI)
    • J'essayais de me frayer un passage entre les faroteurs qui se trémoussaient en s’essuyant le front avec des billets de dix mille francs CFA. — (Nathalie Etoké, Je vois du soleil dans tes yeux, Presses de l'UCAC, 2008, p. 43)
  2. (Par analogie) Sécher en parlant du vent, du soleil, etc.
    • Le vent, le soleil essuie les chemins, essuie la terre qui a été trempée par la pluie. [1]
  3. Enlever la poussière ou la saleté en frottant.
    • Le cabaretier, très digne, essuya le marbre d'un coup de torchon. — (Francis Carco, Brumes, Éditions Albin Michel, Paris, 1935, page 142)
  4. (Figuré) Devoir supporter, éprouver, subir.
    • Puisque j'ai essuyé, dit-il, un si cruel caprice d'une fille élevée à la cour, il faut que j'épouse une citoyenne. — (Voltaire, Zadig ou la Destinée, I. Le borgne, 1748)
    • On sait qu'il a essuyé bien d'autres aventures qui ont été fidèlement écrites. — (Voltaire, Zadig ou la Destinée, XXI. Les yeux bleus, 1748)
    • Nous essuyâmes un grain de quelques heures qui me donna une idée d’une tempête sur mer. — (François-Xavier Garneau, Voyage en Angleterre et en France dans les années 1831, 1832 et 1833, 1855)
    • Essuyer le feu nourri de l’adversaire.
    • Essuyer de lourdes pertes.
    • Essuyer des affronts, des outrages.
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

ESSUYER. v. tr.
Frotter avec un linge pour ôter l'eau, la sueur, l'humidité, la poussière, etc., en frottant. Il est tout en sueur, tout en eau, il faut l'essuyer. S'essuyer les mains, les yeux, le visage. Essuyer ses mains à une serviette, avec une serviette. Essuyer de la vaisselle. Essuyer la table. Par extension, Il essuya ses larmes. Fig., Essuyer les larmes de quelqu'un, Calmer son affliction, le consoler, et Essuyer ses larmes, Se consoler. Fig. et fam., Essuyer les plâtres, Habiter une maison nouvellement bâtie; et, plus figurément, S'exposer au premier inconvénient d'une situation ou d'une entreprise. Par analogie, il signifie Sécher en parlant du Vent et du soleil. Le vent, le soleil essuie les chemins, essuie la terre qui a été trempée par la pluie.

ESSUYER signifie au figuré Souffrir, éprouver, subir, et se dit tant au sens physique qu'au sens moral. Essuyer le feu d'une place. Essuyer un assaut. Essuyer une rude tempête, une défaite. Essuyer l'ennui des visites. Essuyer des affronts, des outrages. Essuyer la honte d'une réprimande publique. Essuyer des reproches. Essuyer des pertes. Essuyer les dédains d'un parvenu.

Littré (1872-1877)

ESSUYER (è-sui-ié), j'essuie, nous essuyons ; j'essuyais, nous essuyions, vous essuyiiez ; j'essuierai ; j'essuierais ; essuie, essuyons ; que j'essuie, que nous essuyions, que vous essuyiez ; essuyant ; essuyé v. a.
  • 1Ôter l'eau, la sueur, l'humidité, etc. en frottant. Essuyer une table. Essuyer de la vaisselle. Essuyer ses mains à une serviette, avec un linge.

    Fig. Louis seul court au-devant d'eux [le roi Jacques II et sa femme], les essuie du naufrage, offre un asile à la religion et à la royauté fugitives, Massillon, Or. fun. Louis le Grand.

    Essuyer les larmes, les ôter du visage avec un mouchoir, un linge. Puisque vous le voulez, je veux bien essuyer mes pleurs, Molière, Scap. I, 3.

    Par extension. [Elle] Trouble à regret le repos de Narcisse, Par cent baisers essuie à son réveil, Sur ses beaux yeux, les restes du sommeil, Malfilâtre, Narc. III.

    Fig. Essuyer les larmes, les pleurs, consoler. Qu'au milieu de mes pleurs qu'il devrait essuyer…, Corneille, Rod. v, 4. Ses larmes n'auront plus de main qui les essuie, Racine, Phèd. I, 5. Tant de larmes répandues, les essuyez-vous ? Massillon, Car. Pâq. Le regret les répand [les larmes], et l'espoir les essuie, Delille, Par. perdu, XI.

    Essuyer les plâtres, occuper le premier un appartement dans une maison nouvelle ; et fig. s'exposer au premier inconvénient d'une affaire.

    S'essuyer, essuyer à soi. Il s'essuyait les yeux à la dérobée. S'essuyer le front d'où la sueur dégoutte. Elle s'est essuyé les mains.

  • 2Sécher, en parlant de l'action du soleil, du vent. Le vent, le soleil essuie la terre qui a été trempée par la pluie.
  • 3Ôter une tache, un enduit. Il essuya la sauce qu'il s'était mise sur le visage.
  • 4Subir, supporter, souffrir. Qu'il me faut de la sorte essuyer vos caprices, Molière, l'Étour. I, 10. La quantité de sottes visites qu'il faut essuyer est cause que je prends plaisir d'être seule, Molière, Critique, 1. Ces conversations ne font que m'ennuyer, Et c'est trop que vouloir me les faire essuyer, Molière, Mis. II, 4. On n'a point à louer les vers de messieurs tels, à donner de l'encens à madame une telle, Et de nos francs marquis essuyer la cervelle, Molière, ib. III, 7. C'est un supplice assez fâcheux que de se produire à des sots, que d'essuyer, sur des compositions, la barbarie d'un stupide, Molière, Bourg. gent. I, 1. Plus d'une fois essuyant les dangers Des pirates, des vents, du calme et des rochers, La Fontaine, Fabl. VII, 12. Elle a essuyé toutes mes humeurs et toutes mes lassitudes, Maintenon, Lett. à M. de Villette, 23 mai 1683. Fallut-il essuyer à sa porte de mauvaises heures ? Fléchier, Lamoignon. Je ne sais point en lâche essuyer un outrage, Boileau, Sat. I. Essuyer l'inconstance au Parthe si commune, Racine, Mithr. III, 1. Il est des contre-temps qu'il faut qu'un sage essuie, Racine, Esth. III, 1. Il faisait un frais délicieux, qui nous récompensait d'une journée fort chaude que nous avions essuyée, Fontenelle, Mond. 1er soir. J'essuyai tranquillement ce discours, parce qu'il ne m'eût servi de rien de m'en fâcher, Lesage, Gil Blas, I, 6. Ah ! c'est trop essuyer tes indignes murmures, Voltaire, Brutus, IV, 3. On n'essuya jamais des épreuves plus dures, Voltaire, Tancr. v, 3. La flotte d'Alexandre, partant de Patale au mois de juillet, essuya bien des tempêtes, et le voyage fut long, parce qu'elle navigua dans une mousson contraire, Montesquieu, Esp. XXI, 9.

    Essuyer le feu de l'ennemi, recevoir des décharges de canons et de fusils ; et fig. essuyer le premier feu, recevoir le premier des manifestations de colère, des reproches, etc.

  • 5S'essuyer, v. réfl. Ôter l'humidité, les taches, l'enduit qu'on a sur soi. Tandis que dans un coin en grondant je m'essuie [d'éclaboussures], Souvent, pour m'achever, il survient une pluie, Boileau, Sat. VI.

HISTORIQUE

XIIIe s. Je la vueil au soleil porter, Por le cuir en fere essuer… Ters tes iex [yeux], essue ta face, Fabl. et contes anc. t. IV, p. 11 et 474. Jupiter, ce dist, le lavoit, Et Phebus la toaille avoit, Et se penoit de l'essuier, la Rose, 6533.

XVe s. Souffrez qu'assuisse à bandon Cez piez [de Jésus], quant il me fist pardon De mes pechiez, dont tant avoie, Rés. de J. C.

XVIe s. Adonc estoyent tres-bien essuez et frottez, changeoyent de chemise, Rabelais, Garg. I, 23. Ilz commençarent cryer, myault, myault, feignans cependant s'essuer les œilz, comme s'ilz eussent plouré, Rabelais, Pant. IV, 54. Sus donc et qu'on essuye Les pleurs et le soucy, Du Bellay, J. II, 46, verso. Il falut se sauver dans les bateaux et gagner Orleans, non sans essuyer quelques arquebusades, que la commune leur tira vers Boteilles, D'Aubigné, Vie, VIII. Vos larmes sont-elles des-jà essuiées ? D'Aubigné, Hist. III, 186. …Jusques à ce que les rayons du soleil eussent essuyé l'aigail de la fraiche rosée, Yver, p. 523.

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Étymologie de « essuyer »

Du latin exsucare (« extraire le suc »).
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Berry, essuger, et au participe essui, essuite, essuyé, essuyée ; bourguig. à l'essôtte, à l'abri ; provenç. eisugar, essugar, echucar, issugar ; espagn. enjugar ; portug. enxugar ; ital. asciugare ; du latin exsuccare, ôter le suc, l'humidité ; de ex, et succus (voy. SUC). D'après Scheler, essuyer au sens de supporter est un tout autre mot et vient de exsequi, qui, entre autres, signifie en effet supporter : exsequi aerumnas ; mais sequi a donné plusieurs formes dans le français, et aucune n'est suier. Il faut donc ne pas séparer ce mot en deux ; en effet, dans cet exemple de Mme de Maintenon, " Elle a essuyé toutes mes humeurs, toutes mes lassitudes, " par rapport à Mme de Maintenon qui parle, elle les a enlevées ; essuyer est ici au sens du n° 1 ; par rapport à elle-même, elle les a reçues, elle s'en est chargée, elle en a souffert, c'est le sens du n° 4. Il n'y a là qu'un changement de rapport, assez commun chez nous, par exemple saisir, dans saisir une chose et le mort saisit le vif.

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Phonétique du mot « essuyer »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
essuyer ɛsµije

Fréquence d'apparition du mot « essuyer » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « essuyer »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « essuyer »

  • L'avantage du drapeau rouge, c'est que les assassins peuvent y essuyer leurs mains sanglantes sans le souiller.
    Jean Cau — Réflexions dures sur une époque molle
  • Un fils qui fait verser des larmes à sa mère peut seul les essuyer.
    Proverbe chinois
  • Quand je regarde mon écriture, il me semble qu'une légion de fourmis est sortie de l'encrier et a traversé la feuille sans s'essuyer les pieds.
    Sydney Smith
  • Mieux vaut essuyer une larme de pauvre que d'obtenir cent sourires de ministre !
    Proverbe chinois
  • Il se peut qu'un enfant unique soit gâté, non pas tant en cadeaux qu'à cause du temps consacré à ses problèmes, mais croyez-moi, il y a des moments où il souhaiterait avoir un frère ou une soeur pour essuyer les chocs avec lui.
    Peter Ustinov — Cher moi
  • Quand tu veux te laver, prépare d’abord la serviette pour t’essuyer.
    Jérôme Cardan — Ma vie
  • Alors que son jeune parti, La République en marche, vient d’essuyer une déroute aux élections municipales, Emmanuel Macron fait tapis. Il mise tout sur sa personne et sa force d’impulsion pour tenter de faire durer au-delà de trois ans le macronisme, qui a fait irruption en 2017 dans le paysage politique sans parvenir à s’y ancrer. Même si la crise économique le pousse à quelques inflexions sociales, écologiques ou culturelles, la ligne affichée reste la même : sociale-libérale, axée sur le travail et la responsabilité individuelle.
    Le Monde.fr — Le premier ministre renvoyé à l’art de l’exécution
  • « Beaucoup de pratiquants se sont en effet demandé dans quelle catégorie était classé le squash, sport de balle sans filet où on a tendance à beaucoup transpirer et donc à s’essuyer sur la vitre du terrain. Les communications ministérielles indiquant que la transpiration pourrait accroître la transmission du virus, on pouvait s’attendre à des règles plus restrictives. Il a fallu batailler auprès du ministère des sports pour faire accepter que le squash n’était pas un sport de combat mais bien un sport de salle, classé dans la catégorie ‘’sport d’intérieur ».
    Sport | Serge Parbaud : « Pour pouvoir taper dans la balle, on a construit un mur de squash en bois ! »
  • Très souvent, c’est quand nous croyons essuyer un échec que nous remportons notre plus grande victoire.
    Françoise Gourdon — Tant qu’il y aura la peur
  • Aujourd’hui et demain, les estivants doivent essuyer des vents contraires. Des vents forts avec des pointes de 60km/h dans les régions côtières. La mer sera très agitée dans les côtes Est où les baignades sont absolument déconseillées. Et pour compléter le décor, les températures sont en baisse. Cela devrait se poursuivre jusqu’au début de la semaine prochaine. Mehrez Ghannouchi, ingénieur prévisionniste à l’institut national de ma météorologie au micro de Zied Mahjoub.
    RTCI - Radio Tunis Chaîne Internationale — Mehrez Ghannouchi: "Aujourd’hui et demain, les estivants doivent essuyer des vents contraires" - RTCI - Radio Tunis Chaîne Internationale
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Traductions du mot « essuyer »

Langue Traduction
Anglais wipe
Espagnol limpiar
Italien pulire
Allemand wischen
Chinois 擦拭
Arabe مسح
Portugais limpar
Russe протирать
Japonais ワイプ
Basque garbitu
Corse sguassà
Source : Google Translate API

Synonymes de « essuyer »

Source : synonymes de essuyer sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « essuyer »

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Essuyer

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