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Serrer

Définitions de « serrer »

Trésor de la Langue Française informatisé

SERRER, verbe trans.

I. − Vieilli ou région. Qqn serre qqc.Mettre à l'abri en lieu sûr, ranger. Serrer du linge dans un placard, du vin dans une cave; serrer des sous dans un mouchoir; hangar où l'on serre des outils; serrer des papiers dans un coffre-fort. Tout l'ameublement d'une famille arabe consiste en un ou deux coffres où l'on serre les hardes et les bijoux (Lamart., Voy. Orient, t. 2, 1835, p. 227).Papadakis (...) serre les miches de pain frais dans sa cambuse (Cendrars, Bourlinguer, 1948, p. 170).
II. − Qqn/qqc. serre qqc.
A. −
1. Tenir ou maintenir étroitement en exerçant une pression.
a) Qqn serre qqc.1(contre, dans, entre, etc. qqc.2)
[Le compl. d'obj. dir. désigne un inanimé concr.] Serrer un morceau de fer dans un étau, avec une tenaille; serrer qqc. dans sa main, contre son flanc; serrer sa pipe entre ses dents, son stylo entre ses doigts. Il tient son bâton, il serre son bâton dans son poing « pour si on cherchait à l'arrêter » (Ramuz, Gde peur mont., 1926, p. 211).Laure serre entre ses doigts une tige d'herbe (Duhamel, Nuit St-Jean, 1935, p. 179).
En partic., vieilli. Presser, écraser pour exprimer un liquide. Un troisième [voisin], qui avait un pressoir, serrait le marc (Zola, Terre, 1887, p. 355).
[Le compl. d'obj. dir. désigne un animé ou une partie du corps] Serrer le bras, la taille de qqn. La fermière, sur un escabeau, serrait entre ses jambes une dinde qu'elle empâtait avec des gobes de farine (Flaub., Bouvard, t. 1, 1880, p. 22).Trois fois, en vue d'immobiliser ma main pour allumer sa cigarette à la mienne, elle me tient et me serre le poignet (Montherl., Pte Inf. Castille, 1929, p. 656).
Empl. pronom. réfl. indir. Le vieux Rebbe (...) imitait la façon de rire de Kobus avec des grimaces si grotesques que (...) Fritz lui-même dut se serrer l'estomac pour ne pas éclater (Erckm.-Chatr., Ami Fritz, 1864, p. 33).
Loc. verb. Serrer qqn (dans ses bras, contre soi, contre son cœur). Prendre quelqu'un dans ses bras et le tenir contre soi. Synon. étreindre.Petite fille qui serre une poupée. Il serre Mathilde dans ses bras; elle frémit et le repousse (Cottin, Mathilde, t. 1, 1805, p. 296).Prends-moi dans tes bras, mon bien-aimé, et serre-moi de toutes tes forces (Sartre, Mouches, 1943, ii, 2etabl., 8, p. 83).Serrer le cou, le kiki (fam.) à qqn. V. kiki, quiqui I B.Serrer la main, la cuiller (pop.), la pince (fam.) à qqn. V. main 1reSection I E 2 c.Serrer les pouces à qqn (au fig.). V. pouce I B 2.
b) Loc. verb. fig.
Serrer le cœur (à/de qqn). Provoquer de l'angoisse ou une profonde tristesse chez quelqu'un. Chagrin, douleur, émotion, souvenir qui serre le cœur. Il ne sentait que le profond isolement qui serre le cœur quand vous entrez dans une ville étrangère, quand vous voyez cette multitude de personnes à qui votre existence est inconnue (Staël, Corinne, t. 1, 1807, p. 48).Il y a des gens qui en sont tourmentés [d'être treize à table]. Moi-même, cela me serre le cœur (Duhamel, Nuit St-Jean, 1935, p. 156).
Serrer la gorge de/à qqn. V. gorge I B 2 a.
2.
a) Maintenir vigoureusement appliqué; assujettir fortement.
IMPR. Serrer (une forme). Assujettir solidement la composition dans la forme à l'aide de coins de bois ou de métal. Empl. abs. On serre également à l'aide de (...) coins mécaniques qui se meuvent avec une clef sur ou dans une crémaillère (Des.-MullerImpr.1912).
MAN. Serrer l'éperon (à un cheval). ,,Lui donner de l'éperon`` (Littré). Serrer la botte (à un cheval) (vx). V. botte2.
b) Rapprocher les bords, les extrémités de quelque chose. On utilise des agrafes métalliques spéciales que l'on place à cheval sur la fente et que l'on serre à la pince (Garcin, Guide vétér., 1944, p. 165):
1. Il ployait la maille à la pince, la serrait d'un côté, l'introduisait dans la maille supérieure déjà en place, la rouvrait à l'aide d'une pointe (...) la chaîne s'allongeait peu à peu... Zola, Assommoir, 1877, p. 426.
3. [Le compl. d'obj. dir. désigne une partie du corps et, en partic., des parties symétriques] Maintenir fortement rapproché ou fermé. Serrer les épaules, les genoux, les mâchoires, les paupières. Il est bien décidé à tout affronter. Il prend une pose raide, serre ses jambes et s'enhardit, au mépris d'une gifle (Renard, Poil Carotte, 1894, p. 140):
2. Tu ne sais même pas très bien dire papa. Tu retires à la consonne p une grande part de sa force explosive. P... P... Serre les lèvres, puis desserre-les brusquement. Duhamel, Combat ombres, 1939, p. 35.
Loc. fig. Serrer les dents. V. dent C 5.Serrer les fesses. V. fesse A 1 b.Serrer les poings. V. poing A 4 a.
En partic. [Le suj. désigne un animal] Serrer la queue. Porter la queue entre les jambes, en signe de peur, de soumission, de désappointement. (Dict. xixeet xxes.).
B. −
1. Diminuer le volume d'une chose en rapprochant les différents éléments qui la constituent, et les maintenir étroitement assemblés à l'aide d'un lien. Serrer un bouquet, un fagot, un paquet.
MAR. Serrer (une voile). Plier une voile et l'assujettir le long d'une vergue ou d'un mât. En haut, dans la mâture, on essayait de serrer les huniers (Loti, Mon frère Yves, 1883, p. 131).
2. Tendre un lien ou en réduire la longueur pour qu'il s'applique étroitement autour de quelque chose. Serrer une courroie; serrer un câble sur un treuil, une corde avec un garrot; serrer les lacets de ses chaussures. Il serre chaque jour, d'un cran, son ceinturon (Rostand, Cyrano, 1898, v, 2, p. 206).Serre un peu ta cravate, ça te fera venir le sang aux joues et on croira que tu es heureux (Montherl., Songe, 1922, p. 52).V. garrot ex. de Barrès.
Empl. abs. Il entortille son poignet d'un chiffon, serre tant qu'il peut. Les doigts sont violets maintenant (Bernanos, Mouchette, 1937, p. 1280).
Serrer un nœud. Tirer sur l'extrémité ou les extrémités d'un nœud pour le rendre plus solide, plus difficile à défaire. Un nœud qu'on serre en voulant le délier (Renan, Avenir sc., 1890, p. 370).
Loc. verb. fig. Serrer le bouton à qqn (vx). V. bouton C 2 a.Serrer, tenir serrés les cordons de la bourse. Être très économe ou manquer de générosité. (Dict. xxes.). Se serrer la ceinture (fam.). V. ceinture I A 1.
3.
a) [Le compl. d'obj. dir. désigne un vêtement] Appliquer étroitement contre le corps; réduire l'ampleur d'un vêtement et le maintenir près du corps.
Qqn serre qqc.1(avec, au moyen de, etc. qqc.2).Serrer un peignoir autour de la taille. On serre son manteau contre soi, vu que le froid vous pince fort (Flaub., Corresp., 1849, p. 135).Tiens bon! serre tes jupes! méfie-toi du salopiaud, derrière toi!... Sacré tonnerre, la voilà culbutée, et ces mufes [mufles] qui rigolent! (Zola, Assommoir, 1877, p. 698).
Empl. pronom. réfl. Celle-ci se serre pauvrement dans son châle (Claudel, Feuille Saints, 1925, p. 629).
Qqc.2serre qqc.1Des épingles de bicyclette serrent le bas de son pantalon (Alain-Fournier, Meaulnes, 1913, p. 283).Il me reçoit vêtu d'une longue blouse bleue que serre à la taille une ceinture de cuir (Green, Journal, 1946, p. 78).
P. anal. [Le compl. d'obj. dir. désigne la chevelure] Une bandelette où s'implantaient deux plumes d'autruche divergentes serrait leur épaisse chevelure (Gautier, Rom. momie, 1858, p. 216).La vieille femme était là, toute seule. Un bonnet rond, immaculé, serrait ses cheveux en arrière (Genevoix, Raboliot, 1925, p. 236).
b) [Le compl. d'obj. dir. désigne le corps ou, souvent, une partie du corps]
Qqn serre qqc.1(avec, dans, au moyen de, etc. qqc.2).Maintenir à l'étroit, comprimer. On serra dans des guêtres de soie rouge ses jambes (About, Roi mont., 1857, p. 227).Comme toute véritable femme elle avait serré ses charmes dans un corset majestueux (Jouve, Scène capit., 1935, p. 36).
Empl. pronom. réfl. Se serrer la taille dans une ceinture. La belle Lisa se serrait davantage dans ses corsets (Zola, Ventre Paris, 1873, p. 675).
Empl. pronom. réfl. indir., au fig., pop., fam. Se serrer la ceinture, le ventre. Se priver par souci d'économie. Quand on n'avait pas su mettre un sou de côté, on faisait comme les camarades, on se serrait le ventre (Zola, Assommoir, 1877, p. 523).
Qqc.2serre qqc.1Épouser (trop) étroitement la forme du corps. Robe, veston qui serre la taille; large ceinture qui serre les hanches; chaussure qui serre le pied. Un corsage de soie bleue qui serre et marque la taille et remonte un peu entre les deux seins (Taine, Notes Paris, 1867, p. 152).Nous raccourcirons les manches, dit le tailleur (...): le pantalon ne vous serre pas trop? (Green, Moïra, 1950, p. 71).
C. − Agir sur une pièce mobile, un dispositif de fixation ou de fermeture, de manière à rapprocher deux éléments l'un de l'autre pour obtenir un blocage plus ou moins complet. Serrer un écrou, une vis; serrer un joint; serrer un robinet; serrer un frein à fond. Un bruit sourd, (...) comme en voiture lorsque l'on serre les freins des roues! (Loti, Pêch. Isl., 1886, p. 133):
3. Pour le serrage correct d'un joint (...), on rapproche les deux pièces l'une de l'autre, puis on serre modérément deux boulons d'assemblage opposés. Ensuite, perpendiculairement à ceux-ci, on serre également deux autres boulons opposés et ainsi de suite jusqu'à mise en place de tous les boulons d'assemblage. Ambroise, Monteur mécan., 1949, p. 47.
Au fig. Serrer la vis* à qqn.
D. − Disposer des choses, placer des personnes le plus près possible les unes des autres; rapprocher.
1. [Le compl. d'obj. dir. désigne une ou plusieurs choses] Je serre ma chaise tout près de la sienne, et je pose ma tête sur son épaule (Colette, Cl. école, 1900, p. 37).On serre les planches en longues chaînes bossuées qui permettront de rouler ensuite le foin (Pesquidoux, Chez nous, 1923, p. 81).
En partic. Serrer les lettres (en écrivant); serrer son écriture. Leuwen eut soin de ne pas serrer ses mots et ses lignes, et fit si bien qu'il supprima les sept lignes relatives au général Fari sans qu'il y parût (Stendhal, L. Leuwen, t. 3, 1835, p. 252).Pour apprécier la valeur de la philologie, il ne faut pas se demander ce que vaut (...) telle note que l'érudit serre au bas des pages de son auteur favori (Renan, Avenir sc., 1890, p. 144).Empl. abs. Serrez, tout doit tenir sur une seule page. (Dict. xxes.).
Spécialement
IMPR., empl. abs. ,,Diminuer l'espacement, restreindre les blancs afin de gagner de la place dans la page`` (Comte-Pern. 1974).
JEUX (tric-trac). Serrer son jeu. Ne pas étendre son jeu, pour ne pas se découvrir. (Dict. xixeet xxes.). Au fig. Serrer son jeu. Se montrer prudent. Ah! il faut serrer son jeu dans les affaires (Reybaud, J. Paturot, 1842, p. 446).
2. [Le compl. d'obj. dir. désigne une ou plusieurs pers.] Serrer des convives autour d'une table. Réponds, le Borgne, combien peut-il tenir de noirs... en plus dans la goëlette? − Mais, en les serrant un peu... trente... − Pas plus?... − Non, car ils n'auraient pas même leurs coudées franches (Sue, Atar-Gull, 1831, p. 21).Il faudrait élever la barricade de cinquante centimètres, moins serrer les tireurs, et en mettre aux fenêtres (Malraux, Espoir, 1937, p. 537).
Empl. pronom. Se serrer (contre qqn ou qqc.).Se presser, se blottir. Satin s'était serrée contre Nana, dans un petit frisson (Zola, Nana, 1880, p. 1374).Elle se serre contre le grand poêle de fonte, et bien que la chaleur du feu la pénètre elle continue à frissonner en pensant au pays glacé qui l'entoure (Hémon, M. Chapdelaine, 1916, p. 152).
Se serrer (autour de qqn/qqc., l'un contre l'autre, entre deux personnes). Se rapprocher de quelqu'un/les uns des autres pour occuper le moins d'espace possible. Serrez-vous, pour que tout le monde puisse entrer; se serrer autour d'une table. Les cuisiniers nous dévisagent, (...) d'un même mouvement, on se serre autour d'eux et des demandes se bousculent: − T'en es sûr? Mais on devait être relevés demain... (Dorgelès, Croix de bois, 1919, p. 79).J'eus droit (...) à me serrer sur la banquette, entre le douanier mal réveillé et quelques bureaucrates (Saint-Exup., Terre hommes, 1939, p. 146).
Loc. verb. fig., empl. pronom. réciproque indir. Se serrer les coudes. V. coude I B 1 a.
En partic., dans le vocab. milit. Serrer les rangs. V. rang A 1 b α.
3. Au fig. Parler ou écrire d'une manière concise. Serrer son style; serrer l'expression. Serre, serre les dialogues, on parle trop, et tes personnages parlent un peu tous de la même façon (Flaub., Corresp., 1858, p. 293).Empl. abs. Ne te laisse pas tant aller à ton lyrisme. Serre, serre, que chaque mot porte (Flaub., Corresp., 1852, p. 9).
E. −
1. Passer au plus près de quelque chose.
a) [Le suj. désigne une pers. ou un moyen de locomotion] Longer, passer au plus près de (quelque chose). Voiture qui serre le bas-côté; serrer le trottoir en garant sa voiture. (Dict. xxes.).
Serrer sa droite/sa gauche. Marcher, conduire un véhicule en se tenant le plus près possible du côté droit ou gauche de la route (Dict. xxes.). Empl. abs. Serrer à droite, à gauche (Dict. xxes.).
MAR. Serrer la côte, la terre. Naviguer aussi près que possible de terre. Ils évitèrent les bancs de sable (...), puis ils se rabattirent sur la droite, à serrer la côte, pour chercher le courant (Queffélec, Recteur, 1944, p. 51).Serrer le vent [Dans la navigation à voiles] Naviguer aussi près que possible du lit du vent (d'apr. Le Clère 1960). Bientôt la Hyène orienta ses voiles, et, serrant le vent au plus près, mit le cap au sud (Sue, Atar-Gull, 1831, p. 12).Papadakis (...) redonnait un coup de barre, serrait le vent, remontait grand large, plein nord (Cendrars, Bourlinguer, 1948, p. 215).
b) P. anal. (sans mouvement). Serrer de près. Border étroitement. Montagne qui serre de près une côte. À Blois finit la jetée. La route serre de moins près la Loire (Michelet, Journal, 1831, p. 102).À Nantes la barre de granit serre de près le fleuve et la ville (Vidal de La Bl., Tabl. géogr. Fr., 1908, p. 321).
c) Au fig. Serrer (de près). Analyser, définir, saisir (quelque chose), rendre compte (de quelque chose) avec exactitude et précision. Serrer de près un sujet, un problème, une notion, une question; serrer un texte, une traduction; serrer les idées de plus près. Pour M. Zola, le roman doit serrer la réalité du plus près qu'il se peut (Lemaitre, Contemp., 1885, p. 250).L'opinion (...) selon laquelle tout nouveau concept mathématique a son interprétation dans la nature, (...) serre la vérité de très près (Gds cour. pensée math., 1948, p. 325).
2. Qqn serre qqn
a) Serrer qqn (contre, dans,... qqc.).Pousser, presser quelqu'un contre un obstacle de manière à lui couper la retraite ou à gêner ses mouvements. Automobiliste qui serre un cycliste contre le bas-côté d'une route; serrer qqn dans un coin; serrer l'ennemi contre le fleuve, la montagne. (Dict. xixeet xxes.).
Spéc. et p. anal.
ART MILIT. Serrer une place, une ville. L'entourer, en couper les communications. (Dict. xixeet xxes.).
ESCR. Serrer la botte. Presser vivement son adversaire (Dict. xixeet xxes.).
b) Serrer qqn de près. Se rapprocher de quelqu'un, le talonner. Les Prussiens nous suivaient (...). On mit huit pièces en avant du village de Roedelheim, et l'ennemi (...) fut reçu par quelques décharges à mitraille, qui le dégoûtèrent de nous serrer d'aussi près (Erckm.-Chatr., Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 85).Après quatre jours de courses dans la neige (...), j'arrive me réfugier ici. Je n'ai ni bu ni mangé ces quatre jours. Bougrelas me serrait de près (Jarry, Ubu, 1895, v, 1, p. 83).
En partic. Serrer une femme de près. Lui faire une cour pressante. Votre monsieur ne vous a jamais proposé la chose? (...) Même, la matinée où il vous serrait de si près, dans le jardin? (Mirbeau, Journal femme ch., 1900, p. 168).Un peu plus loin, je dépasse Conan qui serre de près une belle fille rieuse (Vercel, Cap. Conan, 1934, p. 45).
c) Arg. Serrer qqn.Incarcérer. Donnez-moi cinq cents francs, et, demain matin, votre homme est serré, car nous l'avons couché hier (Balzac, Comédiens, 1846, p. 312).
REM. 1.
Serrante, subst. fém.,arg. Serrure (d'apr. Esn. 1966).
2.
Serreur, subst. masc.,rare, technol. Ouvrier chargé de serrer quelque chose (supra II C). L'ancienne équipe de laminage est ainsi une équipe fortement structurée: autour du premier lamineur, le serreur de vis et les machinistes obéissent à ses ordres et agissent de concert (Traité sociol., 1967, p. 455).
Prononc. et Orth.: [sε ʀe], [se-], (il) serre [sε:ʀ]. Passy 1914, Barbeau-Rodhe 1930, Martinet-Walter 1973 [sε-], [se-], Martinet-Walter dans la proportion de 7 à 11. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. Verbe trans. 1. a) ca 1155 « fermer avec le verrou » (Wace, Brut, 5516 ds T.-L.); b) déb. xiiies. « enfermer, mettre en lieu sûr » (Audefroi li Bastars, Bartsch, Rom. et Past., I, 57, 67 ds Gdf.); c) ca 1485 « ranger, remiser » (Mist. Viel Testament, éd. J. de Rothschild, 5783: ou on serre les sciences par nous escriptes); 1507 (Eloy, Diablerie, 172, 17 ds IGLF: Fauche son foin ou le serre); 2. déb. xiies. « saisir vigoureusement » (Benoît de Ste-Maure, St Brendan, 498 ds T.-L.); 1616 serrer la main (d'Aubigné, Histoire, II, 272 ds Littré); 3. ca 1160 « joindre » part. passé (Eneas, 3999 ds T.-L.: menu serrees ot les denz); 1176 en parlant de soldats part. passé (Chrétien de Troyes, Cligès, éd. A. Micha, 1667); d'où a) 1636 serrer son écriture, serrer les lignes (Monet); b) id. serrer les rangs du bataillon (ibid.); 1807 fig. (Staël, Corinne, t. 3, p. 164); 4. a) 1276 « rapprocher vigoureusement » (Rutebeuf, Voie de Paradis, 237, éd. E. Faral et J. Bastin, t. 1, 349: Que toz jors sont ses denz serrees, Qui ja ne seront desserrees Se n'est por felonie dire); 1548 serrant de rage les dens (N. Du Fail, Baliverneries, p. 149 ds IGLF); b) 1480 genoulx serrez (G. Coquillart, Monologue, 135, éd. M. J. Freeman, p. 279); c) id. serrer les fesses (Id., Nouveaulx Droitz, 1757, p. 218); 5. 1527 « tenir à l'étroit en rapprochant à l'aide d'un lien » (1eroct.-30 mars, Compte d'ouvrages, 6esomme de mises, A. Tournai ds Gdf. Compl.); 6. a) 1540 « pousser, presser quelqu'un contre un obstacle de manière à gêner ses mouvements » (Amadis de Gaule, p. 207 ds IGLF: à force de le serrer l'ayant embrassé estoit tombé du cheval à terre); b) 1648 « longer, passer au plus près de » (Scarron, Virgile travesti, V ds Littré); 1678 terme de mar. serrer le vent (Guillet 3epart., p. 307); c) id. terme d'équit. serrer la demy-volte (ibid. 1repart., p. 207); d) 1679 terme d'escr. serrer les mesures ici fig. (Cardinal de Retz, Mémoires, éd. A. Feillet et J. Gourdault, t. 3, p. 145); 7. 1690 « faire mouvoir un élément mobile de manière à rapprocher deux choses l'une de l'autre » (Fur.). B. Verbe intrans. ca 1165 « être contracté par la tristesse (en parlant du cœur) » (Benoît de Ste-Maure, Troie, éd. L. Constans, 15851). C. 1. Ca 1165 « s'approcher de très près » (Id., ibid., 22804); 2. 1170-83 « se contracter par une émotion douloureuse (en parlant du cœur) » (Wace, Roman de Rou, 3epart., 2372, éd. A.-J. Holden); 3. a) 1593 « se comprimer la taille à l'aide d'un bandage » (G. Bouchet, Serées, XXV ds Gdf. Compl.); b) 1825 (Brillat-Sav., Physiol. goût, p. 45: se serrer le nez); 4. 1678 équit. « ne pas prendre assez de terrain (d'un cheval) » (Guillet 1repart., p. 207). Du lat. pop. *serrare, altér. du lat. tardif serare « fermer » (dér. de sera « serrure », à l'orig. « barre de bois qu'on fixait derrière la porte »), peut-être sous l'infl. de ferrum « fer » ou barra « barre » (v. FEW t. 11, p. 507a). Fréq. abs. littér.: 7 474. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 7 035, b) 14 868; xxes.: a) 13 308, b) 9 814. Bbg. Kemna 1901, p. 91 (s.v. serreur). − Quem. DDL t. 7 (s.v. serreur). − Sculpt. 1978, p. 628 (s.v. serreur).

Wiktionnaire

Verbe - français

serrer \se.ʁe\ ou \sɛ.ʁe\ transitif 1er groupe (voir la conjugaison) (pronominal : se serrer)

  1. Renfermer, ranger, mettre en lieu sûr, à l’abri.
    • […] je craignais qu’en serrant son argent dans sa bourse il ne nous annonçât qu’il ne reviendrait pas le lendemain. — (Jean Rogissart, Hurtebise aux griottes, L’Amitié par le livre, Blainville-sur-Mer, 1954, p. 39)
    • Au moment où ils traversaient cette chambre, madame Magloire serrait l’argenterie dans le placard qui était au chevet du lit. — (Victor Hugo, Les Misérables, 1862, tome 1, livre II, chapitre 5)
    • La moisson estant faite, ce peuple serre son blé dans la terre en des fosses qu'ils font en quelque pendant de colline ou tertre, pour l'égout des eaux, garnissans de nattes icelles fosses : et cela font ils pource qu'ils n'ont point de maisons à étages, ni de coffres pour le serrer autrement : puis, le blé conservé de cette façon est hors la voye des rats et souris. — (Marc Lescarbot, Histoire de la Nouvelle-France, 1612)
    • Puis, avec un gros soupir, il replia les originaux, les serra dans la poche de côté de son veston […]. — (H. G. Wells, La Guerre dans les airs, 1908, traduction d’Henry-D. Davray et B. Kozakiewicz, Mercure de France, Paris, 1910, page 152 de l’édition de 1921)
    • Un simple grenier, où, du temps de Jacques, on serrait en hiver les jeux de jardin, et dans lequel deux chambres de domestiques avaient été mansardées. — (Pierre Benoit, Mademoiselle de la Ferté, Albin Michel, 1923, Cercle du Bibliophile, page 65)
    • C’était une assez grande pièce, au rez-de-chaussée, toujours fermée à clef, où on serrait les provisions et où il y avait une immense glacière de boucher que les patrons avaient achetée à une vente. — (Georges Simenon, Marie qui louche, Première partie, ch. 1, Presses de la Cité, Paris, 1952)
    • Heureux en ménage, il n’avait jamais trouvé dans le lit conjugal ces débauches de soie et de coloris chantants, dont il raffolait pourtant, et que la divine créature devait serrer dans sa garde-robe. — (Christophe Carlier, L’Euphorie des places de marchés, Serge Safran Éditeur, Paris, 2013, p. 141)
  2. Étreindre ; presser.
    • Les sables sont les matières que l’on mélange le plus habituellement à la chaux pour former les mortiers ; ils doivent être rudes au toucher et crier quand on les serre dans la main. — (Edmond Nivoit, Notions élémentaires sur l’industrie dans le département des Ardennes, E. Jolly, Charleville, 1869, page 21)
    • C'est un vieil homme debout à l'arrière d'un bateau. Il serre dans ses bras une valise légère et un nouveau-né, plus léger encore que la valise.— (Philippe Claudel, La Petite Fille de Monsieur Linh, Éditions Stock, 2005, page 9 ISBN 9782253115540)
    • Serrer la main à quelqu’un.
    • Je l’ai serré dans mes bras, contre mon cœur.
    • Ces souliers sont trop étroits : ils me serrent. Cette robe serre un peu au niveau du ventre.
    • Vous serrez trop fort.
    • Ne serrez pas.
  3. Mettre près l’un de l’autre, rapprocher étroitement.
    • Nous sommes trop serrés à cette table.
    • Reculez-vous un peu, nous serons moins serrés.
    • Serrez-vous les uns contre les autres.
    • Il faut nous serrer davantage.
    • Serrer les dents, presser la mâchoire d’en bas contre la mâchoire d’en haut.
    • Serrer son écriture, rapprocher les lettres ou les lignes les unes des autres.
    • Votre écriture est trop lâche, serrez-la davantage.
    • Serrez davantage vos lignes.
    • Serrer son style, retrancher ce qu’il y a de superflu dans le style, écrire d’une manière très concise.
    • On dit simplement Serrez ! à des troupes qui marchent et qu’on veut faire avancer plus diligemment.
    • Se serrer contre le mur, se mettre tout à fait contre.
    • Serrer la muraille, passer très près de la muraille.
    • Serrer quelqu’un de près, le poursuivre vivement.
    • Serrer une femme de près, lui faire une cour assidue et pressante.
    • Serrer de près une ville, un fort, en presser le siège.
  4. (Marine)
    • Serrer les voiles, ramener les voiles plus près de l’axe du vaisseau.
    • Serrer la terre, longer la terre de plus près.
    • Serrer la ligne, tenir très près les uns des autres les vaisseaux qui forment une ligne de combat.
    • Chaque vaisseau doit serrer sur son matelot d’avant, pour empêcher l’ennemi de couper la ligne.
  5. (Marine) Replier et ranger une voile sur sa vergue.
    • Le grand hunier, tendu sous l’effort du vent, eût contrarié le dégagement du navire. Il fallut le serrer, ce qui se fit tant bien que mal. — (Jules Verne, Les Enfants du capitaine Grant, 1846)
  6. (Argot) Perdre son sang froid, son calme, faire n’importe quoi (référence au moteur qui serre lorsqu’il n’y a plus d’huile, serrer désigne la personne qui ne se maîtrise plus, par sa conduite ou ses paroles).
    • « Faut qu’il arrête de rester enfermé chez lui à jouer à la PS3, il va finir par serrer ! ».
  7. (Argot) (Souvent pronominal) Séduire, réussir à sortir avec quelqu’un, à flirter, etc.
    • Cyril s’était battu, le cousin était resté pour serrer une meuf et Lyas était rentré. — (Golda John,C’est l’histoire de nos vies‎, Éditions Le Manuscrit, 2004, page 167)
    • […] un conseil ouvre les rideaux, éteins ta ps3 et sors dehors te serrer des meufs […] — (psm3blog.fr, 2007)
  8. (Argot policier) Attraper ; interpeller.
    • Les témoignages relatifs à cet incident sont assez différents et, à part le flic qui les a serrés, les protagonistes de cette affaire se sont montrés plutôt énigmatiques. — (Laurent de Wilde, Monk, 1996, collection Folio, page 304)
    • Le commissaire continue : « Jacques et l'Ours ont serré un des deux gus au niveau de la sous-préf, poursuit le commissaire. L'autre a réussi à descendre sur le port de commerce et, là, on a perdu sa trace. — (Lann Stereden, Sang Issue, Neowood Éditions, 2014, chapitre 2)
  9. (Cinéma) Diminuer l’angle de champ d’une prise de vue ou d’un plan.
    • La caméra serre la scène au plus près.
  10. Économiser, épargner, se restreindre.
    • « L'hôtel me reviendrait trop cher : je ne suis pas riche, je dois serrer. » — (Hervé Bazin, Cri de la chouette, Grasset, 1972, réédition Le Livre de Poche, page 33)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

SERRER. v. tr.
Étreindre, presser. Serrer la main à quelqu'un. Je l'ai serré dans mes bras, contre mon cœur. Ces souliers sont trop étroits : ils me serrent. Absolument, Vous serrez trop fort. Ne serrez pas. Fig., Serrer les pouces à quelqu'un, Le contraindre, à force de menaces, à avouer la vérité. S'il n'avoue pas, serrez-lui les pouces. Il est vieux. Fig. et fam., Serrer la vis à quelqu'un, Exercer sur lui une contrainte rigoureuse. Fig., Cela serre le cœur se dit d'une Chose qui excite vivement la sensibilité, qui cause une grande pitié. Que la fièvre le serre! s'est dit, par imprécation, en parlant d'un Homme de qui l'on a à se plaindre.

SERRER signifie aussi Mettre près l'un de l'autre, rapprocher étroitement. Nous sommes trop serrés à cette table. Reculez-vous un peu, nous serons moins serrés. Serrez-vous les uns contre les autres. Il faut nous serrer davantage. Serrer les dents, Presser la mâchoire d'en bas contre la mâchoire d'en haut. Serrer son écriture, Rapprocher les lettres ou les lignes les unes des autres. Votre écriture est trop lâche, serrez-la davantage. Serrez davantage vos lignes. Fig., Serrer son style, Retrancher ce qu'il y a de superflu dans le style, écrire d'une manière très concise. Serrer les rangs se dit d'une Troupe de soldats ou de collégiens en marche dont les rangs tendent à s'espacer et qui les rapproche. On dit simplement Serrez à des troupes qui marchent et qu'on veut faire avancer plus diligemment. Se serrer contre le mur, Se mettre tout à fait contre. Serrer la muraille, Passer très près de la muraille. Serrer quelqu'un de près, Le poursuivre vivement. Serrer une femme de près, Lui faire une cour assidue et pressante. Serrer de près une ville, un fort, En presser le siège. En termes de Marine, Serrer les voiles, Plier les voiles. Serrer la terre, Ranger la terre. Serrer le vent, Aller au plus près du vent. Serrer la ligne, Tenir très près les uns des autres les vaisseaux qui forment une ligne de combat. Chaque vaisseau doit serrer sur son matelot d'avant, pour empêcher l'ennemi de couper la ligne.

SERRER signifie aussi Renfermer, ranger, mettre en lieu sûr, à l'abri. Serrer des vêtements, du linge. Serrez vos bijoux, votre argent. Je ne sais où j'ai serré ce papier. Le participe passé

SERRÉ s'emploie adjectivement. Un style serré. Un jeu serré, Un jeu où l'on s'applique à ne pas faire de faute. Une logique serrée, un raisonnement serré, Une logique rigoureuse, un raisonnement rigoureux. Avoir le cœur serré de douleur, de tristesse, etc., ou absolument Avoir le cœur serré, Avoir le cœur saisi de douleur. Un cheval serré du devant, du derrière, Un cheval étroit du devant, du derrière. Fig. et fam., Un homme serré, Un homme parcimonieux, qui ne dépense qu'à regret.

SERRÉ s'emploie aussi adverbialement. Jouer serré, Jouer avec une attention rigoureuse à ne pas faire de fautes, à ne rien négliger. Il signifie, figurément, Agir avec circonspection, de manière à ne pas donner prise sur soi.

Littré (1872-1877)

SERRER (sê-ré) v. a.
  • 1Étreindre, presser. Serrer un nœud. Ouf ! vous me serrez trop, Molière, Tart. III, 3. Ce qu'on sent, ce qu'on touche, c'est ce qui échappe continuellement des mains qui le serrent ; plus on serre les choses glissantes, plus elles échappent, Bossuet, Méd. sur l'Év. la Cène, 90e jour. Matta lui serra la main [à sa maîtresse], Hamilton, Gramm. 4. Cresphonte en expirant me serra dans ses bras, Voltaire, Mérope, I, 1. On ne serre point ses membres délicats [de l'enfant] avec des liens qui en suspendraient les mouvements, Barthélemy, Anach. ch. 47. Paul, les yeux enflammés de colère, criait, serrait les poings, frappait du pied, ne sachant à qui s'en prendre, Bernardin de Saint-Pierre, Paul et Virg.

    Absolument. Et votre don de l'assemblée ? madame, il est accordé à huit cent mille francs ; voilà qui est fort bien ; notre pressoir est bon, il n'y a qu'à serrer, Sévigné, 331. Ces animaux mordent quand on s'y expose, sans cependant serrer beaucoup, Buffon, Quadrup. t. IX, p. 23.

    Serrer le cou, étrangler. Et qu'un heureux sultan, dans le sein du loisir, Ait le droit de serrer le cou de son vizir, Voltaire, Ép. 98.

    Autrefois, serrer les pouces à un accusé, le soumettre à une torture où les pouces étaient violemment serrés pour le forcer à faire des aveux.

    Fig. Serrer les pouces à quelqu'un, exercer sur lui une contrainte morale, lui faire avouer ce qu'il veut taire.

    Fig. et familièrement. Serrer le bouton à quelqu'un, le presser vivement sur quelque chose. À Valère de près j'ai serré le bouton, Regnard, le Joueur, IV, 9.

    Fig. Serrer la bourse, rendre économe, empêcher de dépenser de l'argent. M. de Montmartel me mande que c'est une opération de finance fort difficile [le commentaire sur Corneille, pour Mlle Corneille]… voilà ce que c'est que d'être battu dans les quatre parties du monde ; cela serre les cœurs et les bourses, Voltaire, Lett. d'Argental, 28 août 1761.

    Fig. Serrer les nœuds de l'amitié, rendre l'amitié plus intime entre deux personnes. Dès nos plus jeunes ans… L'amour serra les nœuds par le sang commencés, Racine, Bajaz. I, 4. M. de Beauvilliers tenait au Dauphin [duc de Bourgogne] par tous les liens les plus forts qui peuvent former et serrer les unions les plus étroites, Saint-Simon, 326, 17.

    Dans le langage poétique, serrer les nœuds de l'hymen, épouser. Si le don de ma main peut contenter vos vœux, Je pourrai me résoudre à serrer de tels nœuds, Molière, Mis. V, 7.

    Fig. Serrer le cœur, causer une vive douleur. Il me serre toujours le cœur, quand il me demande si je ne sais point de nouvelles, Sévigné, 401. Je sens une main qui me serre le cœur, Sévigné, 25 mai 1680. Le monde est rempli de misères qui serrent le cœur, Vauvenargues, la Simplicité.

    Que la fièvre le serre, se dit par imprécation d'un homme de qui on a à se plaindre. Que la fièvre te serre, chien de vilain, à tous les diables ! Molière, l'Avare, II, 6. Que la fièvre quartaine puisse serrer bien fort le bourreau de tailleur, Molière, Bourg. gent. II, 7.

  • 2Joindre près à près, mettre près à près. Vous nous avez trop serrés.

    Serrer les dents, presser les deux mâchoires l'une contre l'autre.

    Familièrement, en parlant des animaux, serrer la queue, mettre la queue entre les jambes, ce qui est un signe de peur, de désappointement. Il lui fallut à jeun retourner au logis… Serrant la queue et portant bas l'oreille, La Fontaine, Fabl. I, 18.

    Serrer son écriture, rapprocher les lettres ou les lignes les unes des autres. Votre écriture est trop lâche, serrez-la davantage.

  • 3 Terme d'art militaire. Serrer les rangs, les rapprocher. Serrez vos rangs : marche.

    Fig. Mon Dieu ! que vous me dites bien sur la mort de M. de la Rochefoucauld et de tous les autres : on serre les files, il n'y paraît plus, Sévigné, à Mme de Grignan, 5 juin 1680. On avait serré les rangs, et la génération des enfants croissait pour remplacer celle des pères, Staël, Corinne, I, 7.

    Absolument. Serrez, serrez les rangs. Celui qui a dit qu'à la cour comme à l'armée, quand on voit tomber à droite et à gauche, on crie : serre, et on avance, n'a eu que trop raison, Voltaire, Lett. Mme Denis, 3 mars 1752.

    Serrez, se dit aussi à des troupes qui marchent et qu'on veut faire avancer plus diligemment

    Serrer sur, marcher à la suite d'une troupe en s'en tenant fort près. Ce n'est que vers trois heures qu'il [le 4e corps] a commencé à marcher ; il a constamment serré sur le 3e corps, Le Général Gérard, Quelques documents.

    Serrer sur, se dit aussi avec le même sens en terme de marine. Chaque vaisseau doit serrer sur son matelot d'avant, pour empêcher l'ennemi de couper la ligne.

  • 4 Terme du jeu de trictrac. Serrer son jeu, ne pas l'étendre, couvrir autant qu'on le peut toutes ses dames.

    Serrer trop son jeu, s'ôter à soi-même ses meilleures chances, pour ne laisser aucune dame à battre.

  • 5 Terme d'escrime. Serrer la mesure, serrer la botte, presser vivement son adversaire.

    Fig. Serrer la mesure, serrer la botte, presser son adversaire dans la dispute.

  • 6 Terme d'équitation. Serrer l'éperon à un cheval, lui donner de l'éperon.

    Serrer la volte, s'approcher du centre de la volte.

    Serrer la demi-volte, faire revenir le cheval avec justesse sur le terrain où il commence la demi-volte.

    Serrer la botte, serrer les jambes pour presser un cheval d'avancer.

  • 7Rendre étroit. Les deux mers, venant à serrer la terre des deux côtés, font une langue, Vaugelas, Q. C. III, 1.
  • 8Serrer une place, la gêner, en couper les communications. La dernière sortie n'a pas été faite du côté où est la redoute, mais d'un autre côté qui serrait la ville de plus près, Pellisson, Lett. hist. t. II, p. 162. Tes ennemis [de toi, Jérusalem] t'environneront de tranchées, et t'enfermeront, et te serreront de toutes parts, Bossuet, Hist. II, 8. Mahomet II commença par serrer la ville [Constantinople] du côté de l'Europe et du côté de l'Asie, Voltaire, Mœurs, 91. Il [Dion] serrait la citadelle de si près, que la garnison, faute de vivres, n'observait plus aucune discipline, Barthélemy, Anach. ch. LX. Chargé de m'emparer d'une hauteur voisine, Qui voit le camp romain, le serre et le domine, Saurin, Spartac. IV, 1.

    Serrer de près une ville, en presser le siége.

  • 9Pousser, presser. Notre armée est retournée au camp de Bischen, qui était celui où M. de Turenne était si bien fortifié, et dont il était sorti pour serrer les ennemis contre la montagne et les combattre, Pellisson, Lett. hist. t. II, p. 389. Le marquis de la Fare, capitaine des gardes du régent, se présente entre la porte et le maréchal [Villeroy], l'arrête, lui demande son épée ; Leblanc lui remit l'ordre du roi ; et, dans le même instant, le comte d'Artagnan, commandant des mousquetaires gris, le serre du côté opposé à la Fare, Duclos, Œuvr. t. VI, p. 147. Son second cri [du goëland] qu'il ne jetait que quand on le poursuivait ou qu'on le serrait de près, ce qui par conséquent était une expression de crainte ou de colère, Buffon, Ois. t. XVI, p. 191.

    Serrer de près une femme, lui faire une cour assidue. Serrait de près sa servante aux yeux doux, Boileau, Épigr. III.

  • 10 Fig. Être pressant dans une discussion. Voici un témoignage pour les protestants qui les serrera de plus près ; ce sera celui de Bucer, Bossuet, Var. V, 14. Le maraud m'embarrassait ! en disputant il prend son avantage, il vous serre, vous enveloppe, Beaumarchais, Mar. de Figaro, III, 8.
  • 11Passer très près de… Serrer la muraille. Et s'écrie écumant de rage : Serre, serre donc le rivage, Scarron, Virg. V. Le courant nous portait malgré nous de ce côté, et nous obligeait de serrer la rive, Chateaubriand, Amér. 6e partie.

    Terme de marine. Serrer la terre, s'approcher de la terre. Nous avons serré la terre de Feu d'assez près pour apercevoir, avec nos lunettes, des sauvages qui attisaient de grands feux, seule manière qu'ils avaient d'exprimer leurs désirs de voir relâcher les vaisseaux, La Pérouse, Voy. t. II, p. 50, dans POUGENS.

    Serrer le vent, s'approcher beaucoup de la direction du vent. Je crus devoir attendre une circonstance plus favorable, et serrer le vent qui battait en côte, La Pérouse, ib. t. II, p. 137.

    Serrer de la voile, gouverner aussi près du vent que possible.

    Serrer un bâtiment, s'en approcher.

    Serrer la ligne, tenir très près les uns des autres les vaisseaux qui forment une ligne de combat.

  • 12 Fig. Serrer son style, en retrancher tout ce qui est inutile, écrire avec concision.

    Serrer un sujet, le traiter sans digression.

    Serrez, serrez, réduisez votre évaluation qui est trop forte, rabattez-en. On parla beaucoup de Thèbes aux cent portes et du million de soldats qui sortait par ces portes… Serrez, serrez, disait M. André ; je soupçonne, depuis que je me suis mis à lire, que le même génie qui a écrit Gargantua écrivait autrefois toutes les histoires, Voltaire, l'Homme aux 40 écus, d'un bon souper.

  • 13Mettre une chose en un lieu où elle ne court aucun risque. Serrer des hardes. Serrer sa bourse, son argent. Serrer quelque chose sous la clef Laurent, serrez ma haire avec ma discipline, Molière, Tart. III, 2.

    Serrer les foins, les blés, les mettre à couvert dans le grenier, dans la grange.

  • 14 Terme de marine. Serrer une voile, la plier et l'attacher avec des cordelettes.
  • 15Se serrer, v. réfl. Exercer sur soi-même une étreinte, une constriction. Se serrer avec une ceinture.

    Absolument. Se serrer, porter un corset trop étroit, des vêtements trop étroits. Cette jeune fille s'abîme la santé à force de se serrer.

  • 16Se joindre près à près, se mettre près à près. Se serrer les uns contre les autres. Serrez-vous contre moi, Mairet, Soliman, V, 5. Labérius [après avoir joué dans les mimes par l'ordre de César] alla pour prendre sa place parmi les chevaliers, qui se serrèrent de telle sorte qu'il n'en trouva point, Rollin, Hist. anc. liv. XXV, ch. I, 2, § 2. Et d'un cri de menace, Défiant les Romains, qui se serrent, font face, Saurin, Spartacus, I, 4. Les rangs éclaircis par la mort, par la fuite, se sont serrés et restent fermes, Charras, Waterloo, 12.

    Se serrer contre le mur, se mettre tout contre.

  • 17Se serrer, se dit de l'action du cheval qui s'étrécit, ne s'étend pas assez d'une main à l'autre, et ne prend pas assez de terrain.
  • 18Devenir serré, clos. Cette bourse se serre avec des cordons.

    Fig. Le cœur se serre, on est saisi d'affliction.

HISTORIQUE

XIIe s. E mult [des assiégés] li crient grant merci, Qu'il les secore e ne lor faille ; Kar grant sofraite [manque] unt de vitaille ; Mandent cum l'om les a serrez, Clos e assis [assiégés] e estopez, Benoit de Sainte-Maure, V. 32517. [Il] N'ot ne entent, tant a ploré, E si par a le cuer serré, Que c'est merveilles qu'il ne muert, Benoit de Sainte-Maure, V. 12533. [Un haubert] Fort et espais et serré et entier, Ronc. p. 49. Li cuers li faut, s'a la bouche serée, ib. p. 117. [Elle] Ferma les huis et serra durement, ib. p. 172.

XIIIe s. Elle aura, dist li rois, bateüre prochaine, Puis la ferai serrer ens en la tour hautaine, Audefroi le Bastard, Romancero, le bast. p. 14. Li premier est travail d'aquerre [les richesses] ; Li second qui le cuer lor serre, C'est paor qu'en nes tole ou emble, la Rose, 5214.

XIVe s. S'en eu [j'eus d'ivresse] si serrée la teste, Que riens ne veoie, n'ooie, Jean de Condé, t. III, p. 19.

XVe s. Les ennemis se tenoient moult serrés, leurs lances retaillées de cinq pieds par devant eux, Froissart, I, I, 328. N'a home nul qui ait esté restraint [à qui on ait fait des retranchements], Fors Eustace, qui de ce se complaint, à qui on a vingt jours serré le ventre, Sans croix avoir. .. Deschamps, Poésies mss. f° 210. Entre les deux maisons y avoit une grande granche, en laquelle il serra trois cens hommes d'armes, Commines, II, 11. Que la fievre quartaine serre Celluy qui vous a mis icy, Villon, Archer de Bagnolet. Un jour advint que le preux Nabel s'en alloit esbatre aux champs, armé et monté, la lance au poing et l'escu au col, auprès d'un grant mont qu'estoit serré [voisin] du tref [de la tente] de Luces, Perceforest, t. III, f° 102. La responce amoureuse fut si grande qu'elle leur serra la bouche, ib. t. VI, f° 107. Si fut tenu conseil serré [secret], Vigiles de Charles VII, p. 105, dans LACURNE. Cette escarmouche dura tant qu'il fut nuict serrée et obscure, Hist de la Puc. d'Orl. p. 527, dans LACURNE.

XVIe s. Le pere estoit si serrant [avare], qu'il lui sembloit que ce qu'il tenoit en une main, l'autre lui deroboit, Marguerite de Navarre, Nouv. XLIV. Empaqueter et serrer soigneusement quelque chose, Montaigne, I, 110. Un parler court et serré, Montaigne, I, 191. Tant le cœur luy serroit de condamner un homme à mort, Montaigne, II, 1. En ce fait, il faut considerer deux sortes de païs, l'un plein et l'autre serré, Lanoue, 424. Il s'approcha à quatre lieues près du camp, logeant assez serré ; d'où il commençoit à nous molester grandement, Lanoue, 634. … Et partit-on pour serrer [assiéger] Poictiers, Lanoue, 680. Le pont levis fut haussé et la porte serrée, avecques peu de perte, Lanoue, 601. Le roy de Navare fut adverti par un intime du duc de Guise qu'on le vouloit serrer [emprisonner], D'Aubigné, Hist. I, 102. Purgez vostre conseil, où il ne se delibere rien de si serré que le duc d'Albe ne le sache aussitôt, D'Aubigné, ib. II, 14. Ce vieux capitaine serre la main à son homme, D'Aubigné, ib. II, 272. Ils s'embrasserent par plusieurs fois bien serré, Carloix, I, 21. Quant à Pirithous, il le feit incontinent desfaire par son chien, et feit serrer Theseus en estroite prison, Amyot, Thés. 39. Y eut des tonnoires horribles, qui feirent fouyr le menu peuple, et l'escarterent çà et là ; mais les senateurs se serrerent ensemble, Amyot, Rom. 44. Fabius, qui cognoissoit le païs, luy serra le pas par où il pouvoit sortir de ceste vallée, avec 4000 hommes de pied qu'il y ordonna, Amyot, Fab. 15. Il le mordit si serré qu'il sembloit qu'il luy voulut manger la main, Amyot, Alc. 3. Il s'endormit si serré, qu'à peine se peut il esveiller pour le bruit de la roupte et fuitte de ses gens, Amyot, Sylla, 60. Son stile est partout serré, et n'y a rien qui ne presse et qui ne poigne à bon escient, Amyot, Cicéron et Démosth. 2. On les met dans des boëtes bien serrées [fermées], De Serres, 684. Il n'y a rien sur la terre qu'en temps et lieu ne se serre, Génin, Récréat. t. II, p. 241.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

SERRER. - HIST.

XIIIe s. Ajoutez : Le [la] maison Jehan de Lens… qui siet en vies markiet, serant de le maison Gerart [touchant à la maison de Gerart], Charte du Vermandois, dans Bibl. de l'École des ch. 1874, XXXV, p. 451.

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Étymologie de « serrer »

Wallon, seré ; bourg. sarrai ; Berry, sarrer ; picard, sérer, fermer, tout sérant, tout près ; provenç. sarrar, serrar ; espagn. et portug. cerrar ; ital. serrare ; du lat. serare, de sera, barre. La double rr dans serre, serrer, serrare, etc. est fautive ; il n'en faut qu'une ; cette erreur vient de ce que les peuples romans ont confondu sera, serrure, avec serra, scie. En Normandie, serrer signifie cueillir, récolter : serrer des pois. Malherbe remarque qu'en Provence serrer a la signification de fermer : Serrer n'a pas la signification de fermer en France, mais en Provence et autres tels lieux où l'on dit : serrer les yeux, serrer la porte, serrer la fenêtre, pour clore, Comm. sur Desportes, t. IV, p. 382.

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(Date à préciser) Du bas-latin serare (« fermer avec une barre »), dérivé de sera (« barre de clôture », « serrure », « verrou », « cadenas »). Ce verbe est progressivement passé du sens d’enfermement à celui de maintien ferme, (comme dans les serres d’un rapace) pour aussi embrasser celui de rapprocher.
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Phonétique du mot « serrer »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
serrer sere

Fréquence d'apparition du mot « serrer » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « serrer »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « serrer »

  • On meurt dans l'état précis où on est né : avec des mains faites pour saisir et incapables de serrer.
    Italo Svevo — Une vie
  • Il m'arrive encore de refuser de serrer une main, mais c'est plus par hygiène que par conviction.
    Pierre Drachline — Fin de conversation
  • Les femmes ont une force herculéenne pour serrer les genoux.
    Louis Teissier Du Cros — L'amour, les femmes et nous
  • Je regrette, militaire, mais je refuse de serrer une main qui foule aux pieds les droits imprescriptibles de la personne humaine !...
    Hergé — Tournesol dans Tintin et les Picaros
  • Qui serre toujours serre mal.
    Émile Chartier, dit Alain — Minerve ou De la sagesse, Gallimard
  • L'amusant, au théâtre, c'est de sortir aux entractes, de saluer, de serrer des mains, d'entendre des opinions et de s'en faire une moyenne, avec toutes les extrêmes, sans effort, sur la pièce.
    Jules Renard — Journal 1893 - 1898
  • Le mort est encore en morceaux. Le jour où l’on enterre, nous nous dispersons en piétinements, en mains d’amis vrais ou faux à serrer, en préoccupations matérielles. Le mort mourra demain seulement, dans le silence. Il se montrera à nous dans sa plénitude, pour s’arracher, dans sa plénitude, à notre substance. Alors nous crierons à cause de celui-là qui s’en va, et que nous ne pouvons retenir. Je n’aime pas les images d’Épinal de la guerre.
    Antoine de Saint-Exupéry — Pilote de guerre
  • Il n’y a que deux choses à faire avec un drapeau : ou le brandir à bout de bras ou le serrer avec passion contre son coeur.
    Paul Claudel — Positions et propositions
  • A trop serrer son bonheur, on le broie.
    Julie Stanton — Ma fille comme une amante
  • « Avec excitation forcément. On est content de revoir tout le monde, le staff, les joueurs, les nouveaux qui arrivent. Ça fait bien de reprendre au stade. On a hâte que ça recommence. Enfin à moitié car on sait très bien que la préparation physique va entrer en jeu, mais il faut passer par là (sourire). On va serrer les dents et avancer ensemble. »
    Sport | Jean Paul (Stade dijonnais) : "On va serrer les dents et avancer ensemble"
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Traductions du mot « serrer »

Langue Traduction
Anglais tighten
Espagnol apretar
Italien serrare
Allemand spannen
Chinois 紧缩
Arabe شد
Portugais apertar
Russe затянуть
Japonais 締めます
Basque estutu
Corse stringe
Source : Google Translate API

Synonymes de « serrer »

Source : synonymes de serrer sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « serrer »

Combien de points fait le mot serrer au Scrabble ?

Nombre de points du mot serrer au scrabble : 6 points

Serrer

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