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Reculer

Définitions de « reculer »

Trésor de la Langue Française informatisé

RECULER, verbe

A. − Empl. intrans. Qqn, qqc. recule
1. [Indique un mouvement dans l'espace]
a) Aller en arrière. Anton. avancer.Se mettre à reculer. Les dents inférieures avancent et reculent alternativement sur celles de devant (Cuvier,Anat. comp., t. 3, 1805, p. 35).Le train s'arrêta dans un grand bruit de freins. Puis, se mit à reculer (Triolet,Prem. accroc, 1945, p. 31):
1. Je recule donc (...), le dos tourné vers le but où je tendais, et plié en deux pour voir entre mes jambes les inégalités qu'il me fallait éviter. Je reculais, mais avec une lenteur et des efforts incroyables: c'est que les pieds que je traînais en sens contraire sur deux poutres scabreuses, avaient un mouvement convulsif... Dusaulx,Voy. Barège, t. 1, 1796, p. 135.
[Avec un compl. indiquant la distance, introd. par une prép.] Il recula d'un pas, tourna sur lui-même et s'enfuit (Duhamel,Suzanne, 1941, p. 257).Vieilli. [Avec un compl. indiquant la distance, en constr. dir.] Agnès recule quelques pas, lui présente son glaive (Cottin,Mathilde, t. 1, 1805, p. 281).
Empl. pronom. réfl. Annette, effrayée, se recula de quelques pas (Balzac,Annette, t. 2, 1824, p. 122).La fenêtre s'emplit soudain du son des musiques foraines, et l'on vit Lucie se reculer vivement et fermer la fenêtre (Abellio,Pacifiques, 1946, p. 421).
Reculer pour mieux sauter. Aller en arrière afin de prendre de l'élan pour mieux sauter. Au fig. Éviter un inconvénient présent pour devoir y faire face plus tard, alors que la situation s'est aggravée; faire des concessions pour être en meilleure position à l'avenir. Le chancelier d'Ambray y conduisant son fils et sa bru, Louis XIII conseilla que le fils fît lit à part. Le but, c'est sans doute de reculer pour mieux sauter (Michelet,Journal, 1860, p. 541).
b) En partic.
[Le suj. désigne une armée] Revenir sur ses pas, abandonner le terrain. Synon. battre en retraite, se replier.Nous avancions par colonnes à travers l'Alsace; les Autrichiens reculaient et prenaient position en avant de la Lauter (Erckm.-Chatr.,Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 280):
2. ... on ne change pas sur place des vaincus en vainqueurs. Quand on parle d'une armée qui d'abord recule, puis résiste, il ne s'agit là que d'un raccourci de langage, car les troupes qui ont reculé, et celles qui maintenant engagent la bataille, ne sont pas les mêmes. L'armée qui reculait n'était plus une armée. Saint-Exup.,Pilote guerre, 1942, p. 330.
[Le suj. désigne une arme à feu] Avoir du recul. Le canon recule en tirant (Ac.).
c) P. ext. S'éloigner, s'estomper. Nous frémissions aux coups de tonnerre, écoutant si l'orage avançait ou reculait (Pesquidoux,Livre raison, 1932, p. 36).Avec la fin du jour recule le bruit et jusqu'au matin il n'y a plus rien à attendre de cette intimité terrible qui étreint la ville (Morand,Chron. homme maigre, 1941, p. 172).
2. Au fig.
a) Renoncer à ses intentions, à ses ambitions; faire marche arrière. Synon céder, se dérober, flancher (fam.).Que de liens, mon ami, rompus en quelques heures! J'en étais effrayé (...); mais la nécessité me poussait en avant, et il n'y avait plus moyen de reculer (Renan,Souv. enf., 1883, p. 393).Pour lui, c'était un devoir de conscience. − Je me briserai les reins s'il le faut, me dit-il un jour. À mon âge, c'est terrible. Mais je ne reculerai pas. L'histoire dira qu'il n'a pas reculé (Clemenceau,Iniquité, 1899, p. v).
Vieilli. Reculer à.Renoncer à, ne pas oser. J'entre chez Vaton, je recule à l'interroger. Il ne me dit rien (Goncourt,Journal, 1877, p. 1177).
Reculer devant.Ne pas vouloir faire face à; fuir, s'effacer devant. Ne reculer devant aucun danger, aucun sacrifice; reculer devant la défense. Marius avait beau reculer devant la réalité, refuser le fait, résister à l'évidence, il fallait s'y rendre (Hugo,Misér., t. 2, 1862, p. 660).Beaucoup reculent devant les perspectives de l'égalité, hors desquelles il n'est pas d'humanité réelle (Alain,Propos, 1934, p. 1211).
Ne reculer devant rien. Être prêt à tout, employer tous les moyens permettant de parvenir à ses fins. Une femme, quand sa curiosité impatiente est en éveil (...), aura toutes les audaces, ne reculera devant rien (Maupass.,Contes et nouv., t. 1, Avent. paris., 1881, p. 761).M. Rohner, qui ne recule devant rien, a fait d'étonnantes démarches pour que le président Fallières ne vienne pas à la Sorbonne (Duhamel,Maîtres, 1937, p. 206).
b) Ne pas faire de progrès, être en régression. Synon. rétrograder.Épidémie qui recule; l'ignorance a reculé au XIXes.; qui n'avance pas, recule; reculer de trois places dans un classement. Il faut avancer ou reculer, il faut abolir ou reconnaître et légaliser des privilèges iniques et insociaux (Sieyès,Tiers état, 1789, p. 78).Pas le moindre progrès!... Elle recule plutôt!... Elle ne peut même pas jouer une valse dans le mouvement (Gyp,Souv. pte fille, 1927, p. 165).
B. − Empl. trans.
1. [Indique un mouvement dans l'espace] Qqn recule qqc.
a) Porter, faire aller en arrière. Celui-ci recula sa chaise au lieu de l'avancer, mit à terre son chapeau qu'il avait jusque-là tenu entre ses genoux (Gobineau,Pléiades, 1874, p. 198).Je regarde, et recule aussitôt la tête: une cinquième balle vient de frapper la portière (Malraux,Conquér., 1928, p. 140).Rare. Qqc. recule qqc.Le vent apporte ou recule ces sons alpestres (Senancour,Obermann, t. 1, 1840, p. 148).
b) P. ext. Mettre à une certaine distance, plus loin par rapport à une position initiale. Reculer une cloison, une clôture. Je reculerai la porte là. Ah! si vous saviez, c'était une masure, il y avait des brouettes dans le salon (Goncourt,Journal, 1858, p. 508).
En partic. Reculer les bornes, les frontières, les limites d'un État. ,,Les porter plus loin, accroître le territoire de cet État`` (Ac.). Par sa politique hardie et habile, par des conquêtes et des réunions, elle [Catherine II] recula de toutes parts ses frontières (Sainte-Beuve,Nouv. lundis, t. 2, 1862, p. 219).
Au fig. Les hommes (...) s'efforcent, par leurs travaux, de reculer les limites des connoissances humaines (Lamarck,Philos. zool., t. 2, 1809, p. 450).[Élisabeth] essayait de rendre la vie impossible par un excès de ridicule, de reculer les bornes du vivable (Cocteau,Enfants, 1929, p. 185).
2. [Indique un mouvement dans le temps] Qqn ou qqc. recule qqc.
a) Rendre plus lointain, éloigner dans le temps. Le savant conservateur de cette partie du Museum (...) m'a montré (...) le squelette d'un homme fossile dont l'âge reculerait singulièrement l'apparition du règne humain sur notre planète (Michelet,Chemins Europe, 1874, p. 183).[La préhistoire] recule à l'infini la naissance du génie humain (T'Serstevens,Itinér. esp., 1963, p. 308).
b)
α) Remettre à plus tard, différer. Reculer une visite. Elle se flattait de reculer les aveux qu'il exigeait d'elle (Staël,Corinne, t. 2, 1807, p. 169).Tous ces discours pour reculer l'échéance d'une petite réforme dangereuse et qu'on va escamoter, l'impôt sur le revenu (Alain-Fournier,Corresp.[avec Rivière], 1906, p. 144).
β) Rare. Qqc. recule qqn.Éloigner (quelqu'un) du but qu'il se propose. Cet événement l'a fort reculé (Ac.1935).
REM.
Reculage, subst. masc.,mines et carr. Action de transporter le produit abattu du point d'abattage au lieu où on l'évacue. (Dict. xxes.).
Prononc. et Orth.: [ʀ əkyle], (il) recule [-kyl]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1135 « aller en arrière » (Couronnement Louis, éd. Y Lepage, AB, 2428); b) ca 1200 trans. « faire aller quelqu'un en arrière » (Aiol, 2567 ds T.-L.); 2. ca 1209 fig. « ne pas faire ce que l'on avait résolu » (Guiot de Provins, Bible, 1638, ibid.); 1559 reculer à (Amyot, Cam., 52 ds Littré); 3. a) ca 1274 reculer por le plus loing saillir « temporiser pour mieux prendre ses avantages » (Adenet le Roi, Berte as grans piés, éd. A. Henry, 369); 1611 reculer pour mieux saulter « id. » (Cotgr.); b) 1869 id. « éviter un petit inconvénient pour tomber dans un plus grand » (Littré). Formé de l'élém. re-*, de cul* et de la dés. -er. Fréq. abs. littér.: 3 873. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 4 006, b) 7 405; xxes.: a) 6 163, b) 5 376.
DÉR.
Reculement, subst. masc.a) Vieilli ou littér. α) Action de reculer, mouvement en arrière. Synon. usuel recul (v. ce mot A 1).Le reculement d'une charrette (Ac.). La sorte de reculement lointain de la vision en ses immenses yeux bleus (Goncourt,Journal, 1889, p. 1014). β) Au fig. Régression. Synon. usuel recul (v. ce mot A 2).Et vous serez de notre avis, qu'une révolution serait un reculement (Poulot,Sublime, 1870, p. 233).b) Vieilli ou littér. Endroit ou temps reculé, éloigné. Sans qu'on puisse savoir seulement ni pourquoi ni par qui ces pierres ont été ainsi élevées en gradins les unes sur les autres, ni dans quel reculement infini du temps (Lamart.,Tailleur pierres, 1851, p. 472).Il la voyait dans un reculement de brume avec un seul détail de sa figure (A. Daudet,Sapho, 1884, p. 298).c) Spéc. α) Dr. admin. Mur en reculement. ,,Mur construit en arrière de l'alignement lorsqu'une voie publique doit être élargie`` (Barr. 1974). Servitude de reculement. ,,Servitude créée à la charge des terrains bâtis ou clos du fait de l'alignement, lorsque celui-ci se traduit par un élargissement de la voie publique, servitude qui interdit de procéder sur ces immeubles à des travaux pouvant en prolonger la durée`` (Jur. 1981). β) Sellerie. Courroie du harnais d'un cheval qui lui permet d'entraîner l'attelage lorsqu'il recule ou de le retenir dans une descente. Comme on allait arriver au village, un des reculements de la première voiture (...) cassa; les chevaux faillirent s'emballer (Ramuz,A. Pache, 1911, p. 149). [ʀ əkylmɑ ̃]. Att. ds Ac. dep. 1718. 1resattest. a) 1remoit. xives. « action de reculer, mouvement en arrière » (Philippe de Vitri, Chapel des fleurs de lis, 705 ds Romania t. 27, p. 84), b) ca 1393 « action de retarder quelque chose, retard » (Ménagier de Paris, éd. G.-E. Brereton et J.-M. Ferrier, I, VI, p. 79), c) fin xves. « renfoncement » (Chron. et hist. saintes et prof., Ars. 5079, f o133b ds Gdf. Compl.), d) 1680 « pièce du harnais sur lequel le cheval pèse quand il recule » (Rich.); de reculer, suff. -ment1*.

Wiktionnaire

Verbe - français

reculer \ʁə.ky.le\ ou \ʁky.le\ transitif ou pronominal 1er groupe (voir la conjugaison) (pronominal : se reculer)

  1. Tirer ou pousser un objet en arrière.
    • Reculez un peu votre chaise.
    • Reculez la table.
    • Reculez-vous de là.
    • Il se recula bien loin d’eux.
    • Reculer une muraille, une haie, un fossé Les reporter plus loin.
    • Il faut reculer de deux mètres cette muraille.
  2. (Figuré) Porter plus loin, déplacer les limites, les frontières.
    • (Pronominal)Mais nous sommes déjà dans les faubourgs. Les maisons s'espacent, se reculent, s'adossent à la rivière ou à la montagne. — (Jean Giraudoux, Retour d'Alsace - Août 1914, 1916)
  3. (Figuré) Éloigner quelqu’un du but qu’il se propose, retarder, ajourner une affaire.
    • Nous reculons dans le temps d'une République. Nous sommes sous la Troisième qui tire à sa fin. M. Albert Lebrun en est le président. — (Maurice Lelong, Célébration du fumier, Le Jas du Revest-Saint-Martin (Haute-Provence) : chez Robert Morel éditeur, 1966, page 153)
    • Cet événement a fort reculé ses projets, a reculé ses affaires, l’a fort reculé.
    • L’odeur poisseuse, l’aspect désespéré du lieu le reculèrent jusqu’à penser qu’il eût aussi bien pu pousser la porte, là-haut, et de pied ferme attendre le jeune homme dans la chambre. — (André Gide, Les Caves du Vatican, 1914)
    • Ce succès recula sa perte.
    • Il a reculé ses paiements de six mois.
  4. (Rare) Sodomiser de nouveau.
    • Jamais ils n’ont rien enculé, reculé, basculé, masculé, rien du tout. — (Louis-Ferdinand Céline [Louis Ferdinand Destouches], L’École des cadavres, partie I, Denoël, 1938)
  5. (Intransitif) Aller en arrière.
    • Pour arrêter le cheval étant au pas, au trot ou au galop […] et même pour reculer, la tension des rênes, la pression des jambes, la position des mains et des jambes sont les mêmes, c’est-à-dire que les mains doivent être à la même hauteur et les jambes également en arrière. — (Félix van der Meer, Connaissances complètes du cavalier, de l’écuyer et de l’homme de cheval, Lebègue & Cie à Bruxelles & Dumaine à Paris, 1865, page 242)
    • Aussitôt l’intrus recula, baissa les yeux et, relevant les pans de sa pèlerine, affecta de se chauffer. — (Francis Carco, Brumes, Éditions Albin Michel, Paris, 1935, page 87)
    • Recule vite, cherche le dur, le sec, ou tu es perdu. Tu croira t’échapper en avançant […] Tu t’enfonces davantage […] — (Jean Rogissart, Passantes d’Octobre, Librairie Arthème Fayard, Paris, 1958)
    • Toujours positionnés sur leur ligne, les héros ne reculent jamais devant l'ennemi. Entre le 23 et le 25 mai 1940, le 6e RSA perd 99 spahis à Sy, parmi lesquels figurent des tués tels que Saïd Ben Dechina, Mohamed Djoudi, les admirables Hamadi et Lambarek... — (Rachid Bouamara, Le silence tiraillé: À ces guerriers bannis de l’Histoire..., Publishroom, 2017)
  6. (Intransitif) (Figuré) Régresser, en parlant des affaires et des personnes.
    • Ce sont eux qui, dans l'élevage gâtineau, tiennent la vedette et la tiendront jusqu'au jour où les perfectionnements apportés aux méthodes culturales les feront reculer au point d'en amener la quasi-disparition. — (Louis Merle, La métairie et l'évolution agraire de la Gâtine poitevine de la fin du Moyen-Age à la Révolution, collection Les Hommes et la terre, tome 2, S.E.V.P.E.N., 1957, page 153)
    • Vos affaires reculent au lieu d’avancer. — Souvent c’est reculer que de ne point avancer.
    • Il est trop avancé pour reculer.
  7. (Intransitif) (Figuré) Ne pas soutenir avec fermeté ses droits, ses opinions.
    • Il aimerait mieux se faire tuer que de reculer.
    • Cinquante francs d'amende par exemplaire saisi, c'est de quoi faire reculer les plus intrépides. — (Gérard de Nerval, « Angélique », in Les Filles du feu, 1854)
  8. (Intransitif) Différer, éviter de faire quelque chose qu’on exige ou qu’on désire de nous.
    • Eh! bien, ne reculant devant aucune tâche si fastidieuse fût-elle, ils pourvoiront, d'eux-mêmes, à la diffusion de ces ouvrages, en s'en faisant les traducteurs. — (Léon Berman, Histoire des Juifs de France des origines à nos jours, 1937)
    • Je voudrais qu’il me rendît ses comptes, mais il recule toujours.
    • Il n’y a plus moyen de reculer.
    • Je l’ai tellement pressé, qu’il ne peut plus reculer.
    • Quelque proposition que vous lui fassiez, il est homme à ne pas reculer.
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

RECULER. v. tr.
Tirer ou pousser un objet en arrière. Reculez un peu votre chaise. Reculez la table. Reculez-vous de là. Il se recula bien loin d'eux. Reculer une muraille, une haie, un fossé Les reporter plus loin. Il faut reculer de deux mètres cette muraille. Fig., Reculer les bornes, les frontières d'un État, Les porter plus loin, accroître le territoire de cet État.

RECULER signifie au figuré Éloigner quelqu'un du but qu'il se propose, retarder, ajourner quelque affaire. Cet événement a fort reculé ses projets, a reculé ses affaires, l'a fort reculé. Ce succès recula sa perte. Il a reculé ses paiements de six mois.

RECULER est aussi intransitif et signifie Aller en arrière. Faites reculer cette voiture. Comment voulez-vous qu'il recule? Le canon recule en tirant. Reculer d'un pas. Faites reculer tout le monde. Il se dit aussi, figurément, des Affaires et des personnes. Vos affaires reculent au lieu d'avancer. Il n'avance point, il recule tous les jours. Souvent c'est reculer que de ne point avancer. Il est trop avancé pour reculer. Il ne recule jamais, on ne l'a jamais vu reculer se dit d'un Homme très brave; et, figurément, d'un Homme qui soutient avec fermeté ses droits, ses opinions. Il aimerait mieux se faire tuer que de reculer. Prov. et fig., Reculer pour mieux sauter se dit lorsqu'On n'évite un inconvénient, un danger présent qu'en s'exposant pour l'avenir à un inconvénient, à un danger plus grave.

RECULER signifie encore, figurément, Différer, éviter de faire quelque chose qu'on exige ou qu'on désire de nous. Je voudrais qu'il me rendît ses comptes, mais il recule toujours. Il n'y a plus moyen de reculer. Je l'ai tellement pressé, qu'il ne peut plus reculer. Quelque proposition que vous lui fassiez, il est homme à ne pas reculer. Le participe passé

RECULÉ s'emploie adjectivement et signifie Qui est éloigné, lointain. Il loge dans le quartier de la ville le plus reculé. Il se renferme dans la partie la plus reculée de sa maison. Les régions les plus reculées. L'antiquité la plus reculée. La postérité la plus reculée.

Littré (1872-1877)

RECULER (re-ku-lé) v. a.
  • 1Porter en arrière. Reculez la table. Reculez cette chaise de la cheminée.
  • 2Reporter plus loin. Il faut reculer cette muraille.

    Reculer les bornes, les frontières d'un État, l'agrandir. Trajan, qui avait rétabli la gloire du nom romain chez les étrangers, et reculé les frontières de l'empire par des victoires signalées, Condillac, Étud. hist. III, 3. Et toujours créateur même alors qu'il imite, De son art étonné recule la limite, Millevoye, Invent. poét.

  • 3Écarter, éloigner. Mais il est des objets que l'art judicieux Doit offrir à l'oreille et reculer des yeux, Boileau, Art p. III. La lumière du jour …ne renaît que pour éclairer sa nudité, son impuissance [du voyageur perdu dans le désert], et pour lui présenter l'horreur de sa situation en reculant à ses yeux les barrières du vide, Buffon, Quadrup. t. V, p. 15.
  • 4Éloigner quelqu'un du but, une affaire de son issue. La disgrâce de son protecteur l'a bien reculé. Cette indiscrétion de ma part servirait plutôt à reculer vos affaires qu'à les avancer, Voltaire, Lett. d'Argence, 3 sept. 1770.
  • 5Ajourner, retarder. Tous mes soins, tous mes vœux hâtent cette vengeance, Ta perte la recule, et ton salut l'avance, Corneille, Pomp. IV, 4. N'eût-il [Horace] que d'un moment reculé sa défaite, Rome eût été du moins un peu plus tard sujette, Corneille, Hor. III, 6. C'est un accident qui a fait reculer son mariage, Molière, Méd. m. lui, II, 6. Je crois que la pension des menins n'a point été retranchée ni reculée, Sévigné, 23 avr. 1690. [Philopoemen] à voir agir les Romains dans la Macédoine, jugea bien que la liberté de la Grèce allait expirer, et qu'il ne qui restait plus qu'à reculer le moment de sa chute, Bossuet, Hist. III, 6. Sans reculer plus loin l'effet de ma parole, Je vous rends dans trois mois au pied du Capitole, Racine, Mithr. III, 1. Lorsque étendu sur le lit de votre douleur, la mort sera à la porte, vous la croirez encore loin ; vous reculerez encore l'affaire de votre salut et la proposition qu'on vous fera, d'appeler un ministre de Jésus-Christ, Massillon, Carême, Impén. fin.
  • 6Porter au loin dans le temps. Ces peuples [les Japonais] ont eu aussi la manie de reculer leur origine, Diderot, Opin. des anc. philos. [Japonais].
  • 7 V. n. Aller en arrière, exécuter la progression en sens inverse de la direction ordinaire et naturelle. La voiture recula. Ce cheval a de la peine à reculer. Reculez un peu pour la troisième [révérence], Molière, Bourg. gent. III, 19.

    Fig. Les femmes qui se sentent finir d'avance par la perte de leurs agréments, voudraient reculer vers la jeunesse, Montesquieu, Lett. pers. 52.

    Terme de marine. On dit que les vents reculent, lorsque, au lieu de tourner de gauche à droite, comme lorsqu'ils vont du sud au nord en passant par l'ouest, ils reviennent du nord au sud en passant de même par l'ouest.

    S. m. Terme de manége. Le reculer, action par laquelle le cheval se déplace dans un ordre inverse à celui des mouvements progressifs.

  • 8Il se dit des armes à feu que l'explosion fait aller en arrière. Un canon recule par l'effet de la réaction égale à l'action.
  • 9Se retirer en arrière. Pourrait-on reculer en combattant sous vous ? Corneille, Médée, IV, 3. Ah ! coquin ! ah ! canaille ! vous en voulez par là !… soutenez, marauds ; soutenez… comment, vous reculez ! Molière, Fourber. II, 9. Si je me défends, ce n'est qu'en reculant, Molière, F. sav. IV, 3. Hé quoi ! loin d'approcher, vous reculez tous deux ! Racine, Théb. IV, 3. Et toi, soleil… Toi qui n'osas du père éclairer le festin, Recule, ils t'ont appris ce funeste chemin, Racine, Iphig. V, 4. Le flot qui l'apporta recule épouvanté, Racine, Phèdre, V, 6.

    Il ne recule jamais, on ne l'a jamais vu reculer, se dit d'un homme très brave. C'est Merci avec ses braves Bavarois, enflés de tant de succès et de la prise de Fribourg ; Merci qu'on ne vit jamais reculer dans les combats, Bossuet, Louis de Bourbon.

    Cela se dit aussi de celui qui soutient son opinion avec fermeté.

    On dit dans le même sens : Il aimerait mieux se faire hacher en pièces, que de reculer.

  • 10 Fig. Renoncer, céder, en parlant des personnes. J'accepte la proposition, et ne suis point personne à reculer lorsqu'on m'attaque d'amitié, Molière, Fourber. III, 1. Vous reculez, lui dis-je en l'interrompant, vous reculez, mon père : vous abandonnez le principe général, Pascal, Prov. IV. Poursuis, Néron ; avec de tels ministres Par des faits glorieux tu te vas signaler ; Poursuis ; tu n'as pas fait ce pas pour reculer, Racine, Brit. V, 6. Il était dangereux pour vous de reculer, Racine, Bajaz. V, 4. C'est un mauvais orgueil de croire qu'on ne peut avoir tort ; c'est une faiblesse de n'oser reculer, quand on sent qu'on nous a fait faire une mauvaise démarche, Massillon, Pet. carême, Écueils piét. grands. Je crois qu'il ne peut plus reculer sur ce point, Destouches, Irrésolu, I, 2. Quand il devrait un peu m'en coûter [pour le Corneille avec les commentaires], je ne reculerai pas, Voltaire, Lett. d'Argental, 28 juill. 1761. Savoir reculer à propos pour gagner ensuite plus de terrain, D'Alembert, Éloges L. Verjus.

    Reculer pour mieux sauter, temporiser pour mieux prendre ses avantages. Si je recule, c'est pour mieux sauter, Cyrano de Bergerac, Pédant joué, IV, 2. On recule souvent, dit-on, pour mieux sauter, Th. Corneille, D. Cés. d'Avalos, II, 1.

    Il a reculé pour mieux sauter, il a sacrifié un petit avantage présent pour en obtenir plus tard un beaucoup plus grand.

    Cela se dit aussi quand, après un mauvais succès, on en obtient un signalé ; et, en sens inverse, quand on évite un petit inconvénient pour tomber dans un plus grand.

  • 11Il se dit des choses qui ne réussissent pas. Ses affaires reculent au lieu d'avancer.
  • 12Être ajourné. Le baptême de M. le duc de Chartres recule ; et je ne puis partir qu'il ne soit fait, Maintenon, Lett. à l'abbé Gobelin, 3 sept. 1675.
  • 13Perdre l'avance qu'on avait. La civilisation recula dans ce pays sous la domination des conquérants étrangers. Qui n'avance pas dans les voies de Dieu recule, Massillon, Profess. relig. 2. Les Espagnols avancent quand nous reculons ; ils ont fait plus de progrès en deux ans que nous n'en avons fait en vingt, Voltaire, Lett. d'Argental, 6 mai 1768.
  • 14Aller plus loin, s'écarter. L'homme a fait reculer peu à peu les bêtes féroces, il a purgé la terre de ces animaux gigantesques…, Buffon, Anim. domestiques.
  • 15Différer, éviter de faire. On le presse d'agir, il recule toujours. Il recula devant une proposition si hardie.

    Reculer à, ne pas se soumettre à, craindre de. Hé bien ! oui, puis qu'il veut te choisir pour juge, je n'y recule point, Molière, l'Av. IV, 4. Comme je l'avais sur moi, et qu'apparemment je reculais à l'ôter, n'y a-t-il plus rien à mettre, disais-je, est-ce là tout ? Marivaux, Marianne, 3e part.

    Il ne recule à rien, il n'est aucun travail qu'il n'accepte. Je ne recule à rien, tout tombe sur mon dos, Hauteroche, Deuil, SC. 9.

    La Fontaine a dit dans ce sens : reculer de. Avant le coup demandez la cédule : De la donner je ne crois qu'il recule, La Fontaine, Sav.

    Il n'y a plus moyen de reculer, il n'y a plus à reculer, on ne peut plus échapper, différer. Mes révérends pères, il n'y a plus moyen de reculer : il faut passer pour des calomniateurs convaincus, et recourir à votre maxime, que cette sorte de calomnie n'est pas un crime, Pascal, Provinc. X. Comment lui déclarer votre mariage ? cependant il n'y a plus à reculer, D'Allainval, Éc. des bourg. I, 2.

    Reculer trop loin à, trop différer. Ayant rejeté les yeux sur votre lettre, j'ai vu qu'elle était datée du 7 courant, et que ce serait reculer trop loin à vous faire connaître que je l'ai reçue, Corneille, Lett. au P. Boulard, 30 mars 1652.

  • 16Se reculer, v. réfl. Aller en arrière, s'écarter. Et pour la décevoir, il use d'une feinte, Se recule en passant, et se laisse frapper, Mairet, M. d'Asdrub. V, 1. Les premiers jours, il fallait voir comme elle se reculait d'auprès de moi, et puis elle reculait plus doucement, et puis petit à petit elle ne reculait plus, Marivaux, Double inconst. I, 6.
  • 17Être différé. C'est toujours dans cette vue de vous plaire que je me conserve et que j'ai soin de moi, étant très persuadée que l'heure de ma mort ne se peut ni avancer, ni reculer, Sévigné, 318. Le retour du roi se recule toujours, Sévigné, 1er juillet 1676.

HISTORIQUE

XIIe s. Cuidiez vos ore qu'alasse reculant ? Je nel feroie por l'onor d'Abilant, Li coronemens Looys, V. 2438. Plus d'une archiée ont païen reculé, Bat. d'Aleschans, V. 5856.

XIIIe s. L'en doit bien reculer pour le plus loin saillir, Berte, XII. Et fist le flun escluser et reculer contre-mont, Chr. de Rains, 102. Chascuns Turs de bien faire moult forment se pena, Dusqu'au chief d'une rue nos François recula, Ch. d'Ant. VI, 919. Si brisa leur navie [contre une île], et perit grand multitude de l'ost, si que il n'en eschappa que environ XXX mille hommes, qui se reculerent [réfugièrent] sur ceste isle, Marc Pol, p. 545.

XIVe s. Et les etrusques legions n'ont mie reculé, Bercheure, f° 44, recto.

XVe s. Ils ressoignent et reculent, car ils ne sont pas gens pour combattre à nous, Froissart, I, I, 121. Ils se reculerent droit vers les seigneurs, Commines, I, 11. Il [Louis XI] reculla de luy toutes gens que il avoit acoustumé, Commines, VI, 7.

XVIe s. Ilz reculoient tousjours à mettre la main à l'œuvre, Amyot, Cam. 52. Les ennemis s'espouvanterent si fort qu'ilz reculerent arriere… il en fit fouir les uns jusques aux plus reculez quartiers de la ville, les autres de frayeur se rendirent, Amyot, Cor. 10. Ilz se retirerent en reculant pas à pas en arriere, Amyot, Pélop. 59. Il n'y avoit sorte de combat à laquelle il reculast, Amyot, Marcel. 2. Toutes choses estoient si prestes, qu'il ne pouvoit reculer à ce voyage, Amyot, Cimon, 34. À mesure que la mémoire leur fournit la chose entiere et presente, ils reculent si arriere que leur narration…, Montaigne, I, 34. Le reculer leur estant interdict par la foule, Montaigne, II, 38. Ny nostre hardiesse, ny nostre couardise ne la peuvent advancer ou reculer [la mort], Montaigne, III, 131. De cheval qui recule au plus tost te delivre, Cotgrave Pour neant recule qui malheur attend, Cotgrave Qui contre esguillon recule deux fois se poind, Cotgrave

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Étymologie de « reculer »

Re…, et culer ; wallon, reskoulé ; bourguig. requeulai ; provenç. et espagn. recular ; ital. rinculare.

Version électronique créée par François Gannaz - http://www.littre.org - licence Creative Commons Attribution

Mot formé du préfixe re-, de cul et de la désinence verbale -er.
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Phonétique du mot « reculer »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
reculer rœkyle

Fréquence d'apparition du mot « reculer » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « reculer »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « reculer »

  • Le progrès historique est vraiment lent. Il faut parfois tout un siècle Pour reculer de cinquante ans.
    Paavo Haavikko — Les arbres, toute leur vigueur
  • L'athlète est un homme qui a décidé de reculer les murs de sa prison.
    Antoine Blondin
  • Vivre, ce n’est jamais que reculer pour mieux sauter.
    Jacques Sternberg
  • Faire reculer le racisme et l'antisémitisme. Chacun de nous est dépositaire de ce message d'humanisme.
    Anne Hidalgo — discours lors du 70e anniversaire de la libération des camps d'extermination
  • Plus on est avide, plus il est indispensable de reculer coûte que coûte les bornes du merveilleux.
  • La seule chose sur laquelle il ne faut jamais transiger ou reculer : le droit à l'intériorité... Ecoutez couler le temps.
    Olivier Revault d'Allonnes — Musiques - variations sur la pensée juive
  • Si tu avances, tu meurs. Si tu recules, tu meurs. Alors pourquoi reculer ?
    Proverbe africain
  • Ne cesse pas de reculer derrière toi-même.
    René Daumal — Le Contre-ciel, Gallimard
  • La résistance amoureuse consiste à reculer pour mieux sursauter.
    Willy
  • Si tu avances, tu meurs ! Si tu recules, tu meurs ! Alors, pourquoi reculer ?
    Proverbe chinois
Voir toutes les citations du mot « reculer » →

Traductions du mot « reculer »

Langue Traduction
Anglais move back
Espagnol retroceder
Italien andare indietro
Allemand zurückgehen
Chinois 移回
Arabe ارجع للوراء
Portugais voltar
Russe двигаться назад
Japonais 戻ってくる
Basque atzera egin
Corse ritorna
Source : Google Translate API

Synonymes de « reculer »

Source : synonymes de reculer sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « reculer »

Combien de points fait le mot reculer au Scrabble ?

Nombre de points du mot reculer au scrabble : 9 points

Reculer

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