La langue française

Accueil > Dictionnaire > Définitions du mot « horreur »

Horreur

Variantes Singulier Pluriel
Féminin horreur horreurs

Définitions de « horreur »

Trésor de la Langue Française informatisé

HORREUR, subst. fém.

I. − [Impression ressentie par une pers.]
A. −
1. Violent saisissement d'effroi accompagné d'un recul physique ou mental, devant une chose hideuse, affreuse. Synon. effroi (v. ce mot A), épouvante (v. ce mot A), panique, peur, terreur.Mes os craquent d'horreur, toute ma chair frissonne comme un tremble au grand vent (Gautier, Comédie mort,1838, p. 16).La pensée du grand trou noir le mouillait d'une sueur froide et dressait ses cheveux d'horreur (Zola, Joie de vivre,1884, p. 1056) :
1. Plus près de nous, plus familier, le mot même de terreur est bien loin de livrer tout son contenu. Horreur dit tout, et ne dit rien; mais ici la physiologie est assez éloquente; je sens en moi une défense comme du hérisson... Alain, Propos,1930, p. 962.
SYNT. Horreur indicible, inexprimable, instinctive, insurmontable, grandissante, infinie, panique, muette; angoissante, secrète, silencieuse, soudaine, véritable, vive horreur; accent, cris, exclamations, frisson, geste, mouvements, regards, signes, souffle, spasme d'horreur; degré, espèce, sorte d'horreur; image, impression, sentiment, scène, spectacle, vision d'horreur; horreur et angoisse, crainte, désolation, épouvante, malédiction, stupéfaction, stupeur, surprise, terreur; être abruti, béant, fixe, fou, frappé, ivre, muet, (r)empli, plein, blême, pâle, glacé, cloué, paralysé, pétrifié, saisi, stupéfait d'horreur; être étreint, gagné, pénétré par l'horreur; crier, se récrier, se dresser, s'écarter, reculer, frémir, frissonner, hurler, tomber, trembler, tressaillir, défaillir, s'évanouir d'horreur; causer, inspirer, éprouver de l'horreur; considérer, imaginer, regarder, voir qqc. avec horreur.
Loc., vieilli. Faire horreur à qqn (infra B). Produire chez quelqu'un un saisissement d'effroi, de répulsion. Synon. horrifier (v. ce mot A).Actes, personnes, spectacles qui font horreur. Isaac bas avec dégoût : Cet homme fait horreur! (Lamart., T. Louverture,1850, III, 4, p. 1328).P. métaph. ou au fig. Tes pas lourds font horreur aux grands bois chevelus, Et, lasse de te voir, la terre ne veut plus Cacher au fond du lac pâle ou de la caverne Ta moisson de corps morts (Banville, Exilés,1874, p. 31).Emploi pronom. À chaque fois que l'humanité acquiert une plus haute révélation d'elle-même, elle se fait horreur (Proudhon, Confess. révol.,1849, p. 193).
Loc., vx et littér. Devenir, être en horreur à qqn (infra B). Inspirer de la répulsion mêlée d'effroi à quelqu'un. Aussitôt (...) je devins en horreur à toute la population. Le curé prêcha contre moi (Balzac, Méd. camp.,1833, p. 25).
2. Littér. [Avec un adj. caractérisant; correspond à horrible A 1 littér.] Profond saisissement de crainte mêlée d'admiration respectueuse devant le sublime, le mystérieux. Une divine, pieuse, religieuse, secrète horreur. Le vaste océan (...) formait un ensemble qui saisissait d'une sainte horreur (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 2, 1823, p. 525).Il en revenait toujours à une certaine horreur de Jean Valjean. Horreur sacrée peut-être, car (...) il sentait un quid divinum dans cet homme (Hugo, Misér., t. 2, 1862, p. 680).
B. −
1. Violent sentiment d'aversion morale, de dégoût. Synon. exécration, répulsion.J'appris qu'un Sarrazin pouvoit être regardé sans horreur (Cottin, Mathilde, t. 1, 1805, p. 331).Le désespoir, la politique et la rage durent le peindre dans tous les pays, comme un objet d'horreur et d'effroi (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 115).
SYNT. Horreur et cruauté, dédain, dégoût, honte, indignation, mépris, pitié; semer l'horreur; expressions, murmures d'horreur; fuir, repousser qqn ou qqc. avec horreur; se détourner, s'écarter avec horreur de qqn ou de qqc.
Expr. verb. Avoir, concevoir, professer de l'horreur pour qqn (ou qqc.). Synon. abhorrer, exécrer.Je consens (...) du fond de mon cœur (...) que vous n'ayez que de la haine, du mépris, de l'horreur pour la malheureuse Clémentine (Chateaubr., Génie, t. 1, 1803, p. 383).Mon horreur physique pour cette sorte de papiers (...). Leur aspect seul me déséquilibre, me désespère (Bloy, Journal,1903, p. 191).Avoir (l')horreur de qqc. ou de qqn, avoir qqc. ou qqn en horreur. Éprouver un sentiment de forte aversion devant quelque chose ou quelqu'un. Il [Dieu] hait souverainement le désordre; il l'a en horreur, comme l'homme a horreur de sa destruction (Lamennais, Indifférence, t. 1, 1817-23, p. 380).J'ai toujours eu horreur de toi, toujours peur de toi (Drieu La Roch., Rêv. bourg.,1939, p. 288).Prendre en horreur qqn ou qqc. Synon. prendre en aversion.Eugénie revint pour cet enterrement et prit en horreur l'Indienne qui était la cause de cette mort (Barrès, Cahiers, t. 3, 1903, p. 75).Faire horreur à (qqn) (supra A 1). Provoquer chez quelqu'un une nette aversion. Combien je me déteste, combien je me fais horreur et dégoût dans mon passé (Goncourt, MmeGervaisais,1869, p. 277).Je n'aime pas mon mari. Je pense même qu'il me fait horreur (Duhamel, Cécile,1938, p. 241).
2. P. ext. et p. hyperb. Synon. antipathie (vx), répugnance.L' horreur allait jusqu'à me faire faire des grimaces et me donner en spectacle (Stendhal, Souv. égotisme,1832, p. 66).Le peintre ici (...) professe une horreur profonde pour tout accent banal et lourd (Lhote, Peint. d'abord,1942, p. 159).
Expr. verb. Avoir horreur de qqc., avoir en horreur qqc.; avoir en horreur le tabac; avoir horreur de devoir se lever tôt. Synon. détester (v. ce mot B), exécrer (v. ce mot B).De tous les genres celui que j'ai le plus en horreur est le genre grisette (Flaub., Corresp.,1839, p. 43).Je crois qu'ils ont horreur des campements, redoutant les poux qui s'y trouvent (Gide, Retour Tchad,1928, p. 913).Nous avons vécu très intelligemment tous les deux, Éliane, avec la même horreur du drame. Ce n'est pas qu'il nous faisait peur, mais il nous paraissait de mauvais goût (Anouilh, Répét.,1950, V, p. 115).Prendre en horreur qqn ou qqc. Synon. Prendre en grippe.Elle prit en horreur toute activité (Goncourt, Ch. Demailly,1860, p. 313).Vieilli. Être en horreur à qqn (ou qqc.). Être odieux, détestable pour (quelqu'un ou quelque chose). Elle étudiera votre caractère (...); et cette étude, en horreur à l'amour, se découvrira par les mille petits pièges (Balzac, Physiol. mar.,1826, p. 107).La doctrine du perfectionnement par la souffrance était une cruauté barbare, en horreur au beau ciel de l'Italie (A. France, Lys rouge,1894, p. 133).Faire horreur à qqn (supra A 1 et B 1). Synon. dégoûter, écœurer, répugner; anton. enchanter, plaire (à).La différence entre ce que portaient les trois quarts des femmes et qui lui faisait horreur et une jolie chose qui le ravissait (Proust, J. filles en fleurs,1918, p. 900).
Rem. À l'horreur, loc. adv., région. (Suisse). Horriblement mal. Cette nouvelle robe lui va à l'horreur (Pierreh. 1926).
3. En partic. Horreur de + subst. (indiquant l'objet de ce sentiment d'aversion)
a) PHYS., vx. (La nature a) horreur du vide. Antipathie (v. ce mot I) autrefois prêtée à la nature et grâce à laquelle s'expliquaient tous les problèmes relatifs à la pesanteur de l'air (d'apr. Ac. Compl. 1842, Besch. 1845). [P. allus. à cette théorie] La conscience a horreur du vide (Valéry, Tel quel II,1943, p. 224).
b) Dans le domaine de la médecine.Synon. phobie.L'horreur de l'eau, des espaces clos, vides, de la foule, de la lumière. Malgré l'horreur qu'elle avait pour l'humidité du soir (Stendhal, Lamiel,1842, p. 92).
II. − [Caractère de ce qui est susceptible d'inspirer cette impression, de ce qui est horrible (v. ce mot A)]
A. − L'horreur de + subst. (désignant une chose ou l'acte d'une pers.)
1. Caractère de ce qui cause un profond saisissement d'effroi mêlé de recul.
a) [Supra I A 1] Synon. atrocité, cruauté; anton. attrait, charme.L'horreur d'un cachot, d'une prison; l'horreur d'un supplice, des combats. Les rayons qu'il lance (...) pour nous accoutumer à son absence et nous épargner l'horreur d'une nuit subite (Dupuis, Orig. cultes,1796, p. 99).Arrivé à Jérusalem, j'y ai trouvé la peste dans toute son horreur (Lamart., Corresp.,1832, p. 318).
b) Littér. [Avec un adj. caractérisant; supra I A 2] Caractère de ce qui provoque un saisissement de crainte mêlée d'admiration respectueuse. Les Germains adoroient la secrète horreur des forêts (Chateaubr., Ét. disc. hist., t. 3, 1831, p. 139).Leur ombre nous couvrit de cette sainte horreur D'un temple où du Très-haut habite la terreur (Lamart., Chute,1838, p. 813).L'Hydre antique au souffle meurtrier Dans la livide horreur des brumes et des fanges (Leconte de Lisle, Poèmes ant.,1874, p. 244).
2. Caractère de ce qui suscite l'aversion morale, de ce qui est infâme ou horrible (v. ce mot A 2). Synon. abjection, infamie, noirceur.L'horreur de son acte, de sa conduite, de son crime. Il est sans cesse bourreau et assassin. Là est l'horreur de son métier (Vigny, Journal poète,1851, p. 1287) :
2. Se représente-t-on l'horreur de ces deux ou trois cents voitures hideuses lancées comme des boulets et triturant (...) les mêmes lambeaux sanglants! Il y a des consolations. Une de ces voitures a pris feu et le chauffeur a été heureusement carbonisé. Bloy, Journal,1903, p. 172.
P. ext. et p. hyperb., fam. (supra I B 2).Elle eût conservé dans son cœur la sainte horreur du despotisme! (Staël, Consid. Révol. fr., t. 2, 1817, p. 182).Elle était mariée, bien entendu, car j'ai une sainte horreur des filles (Maupass., Contes et nouv., t. 2, Misti, 1884, p. 908).
B. − P. méton., au sing. ou au plur.
1. La personne ou la chose même qui inspire un sentiment d'horreur, de répulsion, d'indignation. Synon. monstruosité.Nulle réponse de cette Chambre des Horreurs (Verlaine, Corresp., t. 3, 1887, p. 196).Gilberte n'a jamais aimé son mari. C'est une petite horreur. Elle a aimé la situation, le nom (Proust, Temps retr.,1922, p. 1027).
Emploi avec valeur d'adj., fam. Horreur de + subst.Les femmes seulement me regardent comme « une horreur d'homme » (Flaub., Corresp.,1856, p. 135) :
3. L'abbé Guibourg officiait, consacrait l'hostie, (...) la mêlait à ce sang obscurci de cendre; c'était là la matière du Sacrement. − Quelle horreur de prêtre! s'écria la femme de Carhaix, indignée. Huysmans, Là-bas, t. 1, 1891, p. 100.
Horreur! horreur vivante! [Expressions traduisant l'effroi mêlé de dégoût, de répulsion scandalisés] C'est une horreur!... − C'est une infamie!... Et une foule d'autres exclamations partirent (...) de tous côtés (Balzac, Annette, t. 1, 1824, p. 171).C'est ta mort! horreur! malédiction! sauve-toi! (Hugo, N.-D. Paris,1832, p. 543).Horreur! plus, plus qu'horreur! spectacle détestable, lamentable, effroyable, pitoyable! (Claudel, Tête d'Or,1890, 3epart., p. 146).
2. Fam. et souvent p. hyperb. [Correspond à horrible B 1] Être animé ou chose dont l'aspect (généralement laid ou sale) provoque la répulsion, le dégoût. Synon. laideron, mocheté (pop.), monstre.Cette personne est une véritable horreur. Pour la viande, poisson salé et autres horreurs dont il nous empoisonnait régulièrement (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 2, 1823, p. 522).Le chien continuait de gronder. − Il est affreux, ma chère. Où as-tu pêché cette horreur? (Zola, Joie de vivre,1884, p. 1049) :
4. Elle rapportait de tout (...) des cabochons, des ciboires, des empaillés, des armures et des ombrelles, des horreurs dorées du Japon (...) et des fourbis qui n'ont plus de noms... Céline, Mort à crédit,1936, p. 60.
Musée des horreurs
Fam. Collection, amas d'objets affreux. Nous retrouvons Troost et son talent minutieux mais gâté, dans une salle latérale qui pourrait s'appeler musée des horreurs (Verlaine, Œuvres compl., t. 5, Quinze jours en Holl., 1893, p. 269).
Arg. Figures antipathiques (d'apr. Car. Argot 1977).
C. − Au plur.
1. Les horreurs de + subst.Les aspects horribles (v. ce mot A 1), effrayants, horrifiants, tragiques présentés ou représentés par quelque chose. Synon. affres (v. ce mot B), atrocités (v. ce mot B), épouvantes (v. ce mot B 2).Les horreurs de la guerre, de l'enfer, de la maladie, de la mort. Mathilde demeure indifférente aux charmes de cette nature, comme elle l'a été aux horreurs de celle du désert (Cottin, Mathilde, t. 1, 1805, p. 311).Neiges et pluies changées en ruisseaux, horreurs de l'hiver devenues les grâces du printemps (Hugo, Rhin,1842, p. 186) :
5. Mais les vieux, qui se rappelaient les horreurs de l'invasion, le bétail enlevé et les fermes pillées, le pullulement des Saxons et des Bavarois, secouaient tristement la tête et souhaitaient tout haut qu'on ne revît jamais de pareilles horreurs. Moselly, Terres lorr.,1907, p. 137.
2. Actes infâmes, criminels propres à provoquer la répulsion. Synon. abominations (v. ce mot II).Commettre, faire des horreurs. Vous osez vous enrichir du fruit de ces horreurs... Vous n'avez aucune honte (Chénier, Amérique,1794, p. 100).Je n'ai pas été un grand guerrier, n'ai eu part à aucun exploit et n'ai pas même été témoin de rares horreurs (Guéhenno, Journal homme 40 ans,1934, p. 159) :
6. ... de son passé de forfaits et d'horreurs, Londres a gardé une ambiance qui donne le frisson; est-ce cette nuit soudaine et opaque du brouillard qui appelle le meurtre en promettant l'impunité, ou ces légendes de malfaiteurs insaisissables... Morand, Londres,1933, p. 94.
3. Propos déshonorants, outrageants répandus sur le compte de quelqu'un. Synon. calomnies, infamies, médisances.Colporter, débiter, dire, raconter, répandre des horreurs contre/sur qqn. Les bêtises qu'entend dire un tableau de musée, mais les horreurs qu'entend peut-être un cadavre (Renard, Journal,1902, p. 748).J'ai raconté du mal de vous, des horreurs. Vous devriez me battre (Bernanos, Journal curé camp.,1936, p. 1200) :
7. − Un ramas de faussetés, de commérages, tous les mensonges que nos ennemis ont lancés autrefois contre nous, enragés par notre triomphe!... (...) Sur nous tous, (...) tant d'horreurs! Zola, Dr Pascal,1893, p. 21.
4. Propos ou actes libertins, indécents. Synon. cochonneries (pop.), grossièretés, obscénités.Dire, faire des horreurs; ouvrage plein d'horreurs. On s'était fichu d'elle pendant le souper, on avait dit des horreurs pour montrer qu'on la méprisait. Un tas de salopes qui ne lui allaient pas à la cheville! (Zola, Nana,1880, p. 1187).Leurs cérémonies se continuaient par des débordements, des horreurs, des lubricités, qui ne vaudraient rien à être retracés (Pourrat, Gaspard,1922, p. 77).
Prononc. et Orth. : [ɔ ʀ œ:ʀ]. [ɔ ʀ ʀ œ:ʀ] affectif. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1175 « sentiment d'effroi, de répulsion, de crainte » (Benoît de Ste-Maure, Ducs Normandie, éd. C. Fahlin, 14558); 2. 1547 « frisson » (M. Scève, Saulsaye, p. 4 ds Hug.); 3. 1565 « ce qui inspire l'effroi, la crainte » ici masc. (R. Belleau, La Bergerie, le journ., I, 188, ibid.). Empr. au lat.horror « hérissement, frissonnement; frisson d'effroi; frisson religieux ». Fréq. abs. littér. : 6 518. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 9 284, b) 8 391; xxes. : a) 9 951, b) 9 316. Bbg. Quem. DDL t. 19.

Wiktionnaire

Nom commun - français

horreur \ɔ.ʁœʁ\ féminin

  1. Mouvement de l’âme généralement accompagné d’un frémissement physique, d’un frisson du corps et causé par quelque chose d’affreux, de révoltant ou de terrible.
    • […], tout ce désordre fantastique et grimaçant au milieu des ténèbres et de l’humidité froide qui tombe comme un suaire, laisse dans le cœur et dans les nerfs un long sentiment d’horreur. — (Hippolyte Taine, Voyage en Italie, volume 2, 1866)
    • Privé de tout accommodement, […], le vice a peu de chance de séduire la vertu la plus chancelante. Elle s’en détourne avec horreur et trouve soudain dans cet instinctif revirement son équilibre et son salut — (Francis Carco, Images cachées, Éditions Albin Michel, Paris, 1928 ; Préface de la 3e édition de 1929)
    • Brrr ! fit Bert, en se cramponnant à la balustrade, et quelques soldats auprès de lui firent entendre un murmure d’horreur. — (H. G. Wells, La Guerre dans les airs, 1908, traduction d’Henry-D. Davray et B. Kozakiewicz, Mercure de France, Paris, 1910, page 204 de l’édition de 1921)
    • À terreur je préfère horreur. Le mot n’est guère plus précis mais il se trouve qu’il marque le dégoût et qu’il témoigne de la haine. — (Pascal Quignard, La haine de la musique, Gallimard, 1996, collection Folio, page 47)
    • J’ai horreur de le dire.
    • Cela fait horreur à penser.
    • On n’y saurait penser sans horreur, qu’avec horreur.
    • L’horreur d’un supplice signifie aussi la Cruauté d’un supplice.
    • L’horreur d’un tel supplice, l’horreur de ces tourments n’émut point son courage.
  2. (Familier) (Par hyperbole) Chose extrêmement laide dans son genre, ou faite sans goût, sans habileté.
    • Cela fait horreur, est à faire horreur,
    1. (Familier) Personne extrêmement laide
      • C’est une horreur,.
      • Vous disiez que c’était une jolie femme, c’est une horreur.
    2. Il se dit également d’une chose extrêmement laide ou défectueuse dans son genre.
      • Vous vantiez ce logement comme agréable et commode, mais c’est une horreur!
  3. (Familier) Exclamation utilisée lorsqu’on veut marquer la répugnance qu’on a pour quelqu’un ou pour quelque chose.
    • Fi! L’horreur!
    1. On l’emploie quelquefois en plaisantant :
      • Petite horreur!
  4. Il se dit des choses qui font éprouver un sentiment d’effroi mêlé d’admiration, comme une grande tempête, un vaste incendie, etc.
    • C’est une belle horreur.
  5. Il signifie aussi répulsion violente que vous cause une personne ou une chose effrayante ou haïssable.
    • Avoir horreur du vice, du péché.
    • Avoir, concevoir de l’horreur pour quelqu’un, pour quelque chose.
    • Avoir, prendre une chose en horreur.
    • Inspirer l’horreur du vice.
    • On ne saurait inspirer trop d’horreur pour le mensonge.
    • C’est un objet d’horreur.
    • Avoir l’horreur de la solitude.
    • L’existence lui est en horreur.
    • Il est l’horreur de ses semblables.
    • C’est l’horreur du genre humain.
  6. Sentiment de saisissement , de crainte mystérieuse et de mystère.
    • Il n'avait pas de chemise quand les visiteurs entrèrent. Il tenait une bible à la main. Il nous reçut poliment, dit l'auteur, et nous exposa avec tristesse, mais avec calme, l’horreur de sa condition. — (Amédée Renée, « Critique de La misère des classes laborieuses en Angleterre et en France, par Eugène Buret », dans La Revue de Paris, nouvelle série : tome 36, Paris, décembre 1841, page 124)
    • Elle ne voulait pas être seule. Elle sentait déjà l’horreur de sa solitude, l’insomnie prolongée, le tête-à-tête décevant avec Dieu. — (Albert Camus, L’Envers et l’Endroit, Gallimard, 1958, page 41)
    • La forêt, la lande, la solitude, les ténèbres inspirent une certaine horreur.
  7. Ce qu’ont d’horrible, d’effrayant ou de sinistre certains lieux ou certains objets.
    • L’horreur d’un cachot.
    • L’horreur des combats.
    • Partout régnaient le carnage et l’horreur.
    • Un silence plein d’horreur.
    • Il comprit alors toute l’horreur de sa situation.
    • Quand vous connaîtrez toute l’horreur de ma misère.
    • Pour comble d’horreur.
    1. (Figuré) Nom d’un genre théâtral et cinématographique où règnent le sinistre, l’effrayant et le macabre.
      • Quel spectacle d’horreur!
      • L’exorciste est le meilleur film d’horreur.
  8. Énormité d’une mauvaise action, d’une action cruelle, infâme, etc.
    • L’horreur du crime, du vice, du péché, est telle que… Pour vous faire comprendre l’horreur de cette action, il suffit de dire que…
  9. Il se dit également des choses mêmes qui sont atroces, infâmes, etc.
    • Ce qu’il a fait est une horreur.
    • La vie de ce tyran n’est qu’un tissu d’horreurs.
    • Le récit de tant d’horreurs épouvante.
    • Il a fait, il a dit, il a vomi des horreurs, mille horreurs.
    • On prétend qu’il se commet des horreurs dans ce pays-là.
    • De telles horreurs se conçoivent à peine.
  10. (Au pluriel) Choses horribles ou désastreuses, maux extrêmes, privations cruelles.
    • Après un instant de réflexion, il avait ajouté :
      — L'ennemi, lui, ne s'en prive pas. Vous connaissez comme moi les horreurs dont ces gens sont coutumiers. […]. Mais naturellement, c'est de bonne guerre que de mettre sur le dos de l'adversaire ses propres forfaits, rituels ou non.
      — (Roger Ikor, Les Murmures de la guerre, Éditions Albin Michel, 1961)
    • Les horreurs de la guerre, du carnage ou de la captivité.
    • Cette ville éprouva toutes les horreurs de la famine.
    • Être en proie aux horreurs de la misère.
    • Les horreurs de la mort, — Les angoisses que l’on éprouve ordinairement au moment de mourir.
    • Au milieu des horreurs de la mort, il souriait encore à ses amis.
  11. Il se dit, particulièrement, des choses déshonorantes qu’on attribue à quelqu’un; et alors il s’emploie toujours au pluriel.
    • On m’a dit des horreurs de cet homme-là.
    • Ces deux hommes publient des horreurs l’un contre l’autre.
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

HORREUR. (On prononce les deux R.) n. f.
Mouvement de l'âme généralement accompagné d'un frémissement physique, d'un frisson du corps et causé par quelque chose d'affreux, de révoltant ou de terrible. Je frémis d'horreur. Ses cheveux se hérissent d'horreur. Être saisi d'horreur. Pâlir d'horreur. Ce spectacle nous glaça d'horreur. Un cri d'horreur. L'horreur de la mort, l'horreur du supplice ébranla son courage. J'ai horreur de le dire. Cela fait horreur à penser. On n'y saurait penser sans horreur, qu'avec horreur. L'horreur d'un supplice signifie aussi la Cruauté d'un supplice. L'horreur d'un tel supplice, l'horreur de ces tourments n'émut point son courage. Fam., Cela fait horreur, est à faire horreur, se dit par exagération, d'une Chose extrêmement laide dans son genre, ou faite sans goût, sans habileté. Fam., C'est une horreur, se dit d'une Personne extrêmement laide. Vous disiez que c'était une jolie femme, c'est une horreur. Il se dit également d'une Chose extrêmement laide ou défectueuse dans son genre. Vous vantiez ce logement comme agréable et commode, mais c'est une horreur! Fam., Fi! l'horreur! se dit quelquefois lorsqu'on veut marquer la répugnance qu'on a pour quelqu'un ou pour quelque chose. On l'emploie quelquefois en plaisantant : Petite horreur! C'est une belle horreur, se dit des Choses qui font éprouver un sentiment d'effroi mêlé d'admiration, comme une grande tempête, un vaste incendie, etc. Il signifie aussi Répulsion violente que vous cause une personne ou une chose effrayante ou haïssable. Avoir horreur du vice, du péché. Avoir, concevoir de l'horreur pour quelqu'un, pour quelque chose. Avoir, prendre une chose en horreur. Inspirer l'horreur du vice. On ne saurait inspirer trop d'horreur pour le mensonge. C'est un objet d'horreur. Avoir l'horreur de la solitude. Être en horreur à quelqu'un, être l'horreur de quelqu'un, Lui inspirer une répulsion mêlée de haine. L'existence lui est en horreur. Il est l'horreur de ses semblables. C'est l'horreur du genre humain. Il désigne encore Un certain saisissement de crainte mystérieuse et de mystère. La forêt, la lande, la solitude, les ténèbres inspirent une certaine horreur. Une divine horreur s'emparait de la prêtresse. Il se dit également de Ce qu'ont d'horrible, d'effrayant ou de sinistre certains lieux ou certains objets. L'horreur d'un cachot. L'horreur des combats. Partout régnaient le carnage et l'horreur. Un silence plein d'horreur. Quel spectacle d'horreur! Fig., Il comprit alors toute l'horreur de sa situation. Quand vous connaîtrez toute l'horreur de ma misère. Pour comble d'horreur. Il se dit souvent, au pluriel, des Choses horribles ou désastreuses, des maux extrêmes, des privations cruelles. Les horreurs de la guerre. Les horreurs du carnage. Les horreurs de la captivité. Cette ville éprouva toutes les horreurs de la famine. Être en proie aux horreurs de la misère. Les horreurs de la mort, Les angoisses que l'on éprouve ordinairement au moment de mourir. Au milieu des horreurs de la mort, il souriait encore à ses amis. Il se prend encore pour l'Énormité d'une mauvaise action, d'une action cruelle, infâme, etc. L'horreur du crime, du vice, du péché, est telle que... Pour vous faire comprendre l'horreur de cette action, il suffit de dire que... Il se dit également des Choses mêmes qui sont atroces, infâmes, etc. Ce qu'il a fait est une horreur. La vie de ce tyran n'est qu'un tissu d'horreurs. Le récit de tant d'horreurs épouvante. Il a fait, il a dit, il a vomi des horreurs, mille horreurs. On prétend qu'il se commet des horreurs dans ce pays-là. De telles horreurs se conçoivent à peine. Il se dit, particulièrement, des Choses déshonorantes qu'on attribue à quelqu'un; et alors il s'emploie toujours au pluriel. On m'a dit des horreurs de cet homme-là. Ces deux hommes publient des horreurs l'un contre l'autre.

Littré (1872-1877)

HORREUR (o-rreur) s. f.
  • 1La sensation physique qui fait que la peau devient chair de poule et que les cheveux se hérissent. La peau, se retirant sur elle-même, fera dresser les cheveux, dont elle enferme la racine, et causera ce mouvement qu'on appelle horreur, Bossuet, Conn. II, 12. D'une subite horreur leurs cheveux se hérissent, Boileau, Lutr. III.
  • 2Se dit des choses qui causent un sentiment d'effroi mêlé d'admiration, de respect, etc. Après cela, docteur, va pâlir sur la Bible… Perce la sainte horreur de ce livre divin, Boileau, Sat. VIII. Et, dans la sacristie entrant, non sans terreur, En percent jusqu'au fond la ténébreuse horreur, Boileau, Lutr. III. Le ciel brille d'éclairs, s'entr'ouvre, et parmi nous Jette une sainte horreur qui nous rassure tous, Racine, Iph. V, 6. Il est saisi d'une horreur divine, Fénelon, Tél. XVIII. Saisie d'une horreur de religion à la seule présence du sanctuaire, Massillon, Av. Disp. Mais, quand il m'accablait de cette sainte horreur, La persuasion n'a point rempli mon cœur, Voltaire, Fanat. IV, 2. Tout en fait sentir la religieuse horreur [de l'église gothique], Chateaubriand, Génie. III, I, 8. [Byron] La nuit est ton séjour, l'horreur est ton domaine, Lamartine, Médit. I, 2.
  • 3Mouvement accompagné de frémissement et causé par quelque chose d'affreux. Ce spectacle nous glaça d'horreur. Et délivre mes yeux de l'horreur de te voir, Corneille, Héracl. III, 2. Mais par la sainte horreur que vous fait l'infamie, Corneille, Théod. III, 3. Malgré la juste horreur que son crime me donne, Racine, Andr. IV, 3. Quel jour mêlé d'horreur vient effrayer mon âme ! Racine, Esth. III, 4. Le ciel avec horreur voit ce monstre sauvage, Racine, Phèdre, V, 6. Dans l'infidèle sang baignez-vous sans horreur, Racine, Athal. IV, 3. Sais-tu l'excès d'horreur où je me vois livrée ? Voltaire, Mérope, IV, 4. La pitié, non l'horreur, doit régner sur la scène, Voltaire, Prude, prol. (Ce prologue a été attribué à la Prude dans l'édit. de Kehl ; il appartient à la comédie de l'Échange). On sut par lui [un général blessé et abandonné] ce crime : un frémissement d'horreur se propagea dans la colonne, il parvint jusqu'à l'empereur, Ségur, Hist. de Nap. IX, 8.

    Sentiments d'horreur. Que d'horreurs vous me jetez dans l'âme ! Corneille, Sur. V, 4.

    Faire horreur, exciter le sentiment de l'horreur. Trouvez-vous doux les noms de perfide et de traître ? - Je sais qu'aux généreux ils doivent faire horreur, Corneille, Héracl. III, 5. Cette âme qui s'est tant aimée et tant cherchée, ne se peut plus supporter aussitôt qu'elle est seule avec elle-même ; sa solitude lui fait horreur, Bossuet, la Vallière. Dont les proscriptions font horreur en les lisant, Bossuet, Hist. I, 9. Vices qui font horreur à la nature, Bossuet, ib. II, 12. Elle a craint qu'Hippolyte, instruit de ma fureur, Ne découvrît un feu qui lui faisait horreur, Racine, Phèdre, V, 7. Va, je la désavoue, et tu me fais horreur, Racine, Andr. V, 3. Les rameurs chantaient à l'honneur de Vénus et de Cupidon des vers qui devaient faire horreur à ceux qui aiment la vertu, Fénelon, Tél. IV. Le vice grossier fait horreur, Fénelon, ib. VII.

    Familièrement et par exagération. Cela fait horreur, est à faire horreur, se dit d'une chose extrêmement laide, ou faite sans goût, sans habileté. Vous êtes aujourd'hui coiffée à faire horreur, Gresset, Méch. I, 5.

    Familièrement. C'est une horreur, c'est une personne, une chose affreuse.

    Fi ! l'horreur ! se dit pour marquer la répugnance.

    Ah ! l'horreur, se dit dans le même sens. L'une d'elles, qui le connaissait un peu, dit en le regardant de côté [Memnon devenu borgne] : Ah ! l'horreur ! Voltaire, Memnon.

  • 4Haine, aversion, dégoût, exécration. L'injuste horreur qu'elle [Rome] eut toujours des rois, Corneille, Pomp. IV, 3. Que la vertu du fils… Vainque la juste horreur que vous avez du père, Corneille, Héracl. I, 4. Vous avez aimé cette erreur Pour qui vous ne deviez avoir que de l'horreur, Molière, Psyché, IV, 5. Elle [l'Église] a pour le meurtre une horreur toute particulière, Pascal, Prov. 14. Sait-il toute l'horreur que ce Juif vous inspire ? Racine, Esth. III, 1. Burrhus pour le mensonge eut toujours trop d'horreur, Racine, Brit. I, 2. Vous trouverez partout l'horreur du nom romain, Racine, Mithr. III, 1. Il te manquait encor ces perfides amours Pour être le supplice et l'horreur de mes jours, Racine, Mithr. III, 1. J'ai pris la vie en haine et ma flamme en horreur, Racine, Phèdre, I, 3. Quelle innocence ! quelle vertu ! quelle horreur du vice ! Fénelon, Tél. VII. Il [l'éléphant] a une horreur si grande pour le cochon, que le seul cri de cet animal l'émeut et le fait fuir, Buffon, Quadrup. t. XIV, p. 291. Presque toutes les femmes ont une horreur invincible pour les araignées, les crapauds, les couleuvres, Genlis, Adèle et Théod. t. I, p. 140, dans POUGENS.

    Avoir horreur de, éprouver une aversion mêlée de dégoût. Celles de ma naissance ont horreur des bassesses, Corneille, Rodog. III, 3. Les infamies qu'il [le nouveau quiétisme] a héritées de la secte des béguards… je pourrais dire d'abord qu'on a horreur de traiter de telles matières, Bossuet, Ét. d'orais. X, 3. On frémirait en le prononçant, et l'on aurait horreur de soi-même, Bourdaloue, 9e dim. après la Pentec. Dom. Le roi eut horreur de tout ce qu'il entendait, Fénelon, Tél. XI.

    Être en horreur à quelqu'un, lui inspirer une haine mêlée d'horreur. David m'est en horreur, Racine, Athal. II, 7. Baal est en horreur dans la sainte cité, Racine, ib. V, 6. Il nous croit en horreur à toute la nature, Racine, Esth. I, 3. Ma mémoire est en horreur, Fénelon, Télém. XVIII.

    Objet d'horreur. Il ne peut endurer que l'horreur de la Grèce Pour prix de ses forfaits épouse la princesse, Corneille, Méd. II, 5. Il devint l'horreur du genre humain, Bossuet, Hist. I, 10.

  • 5Horreur du vide, antipathie par laquelle on supposait que la nature tendait toujours à combler les vides à mesure qu'ils se formaient. Que la pesanteur de la masse de l'air produit tous les effets qu'on a jusques ici attribués à l'horreur du vide, Pascal, Pes. de l'air, II. C'est d'un semblable raisonnement que l'horreur de la nature pour le vide et cent autres chimères prirent naissance, Mairan, Élog. abbé de Molières.
  • 6Ce que certaines choses ont d'effrayant, de sinistre. L'horreur d'un cachot. L'horreur des combats. Après que j'aurai vu trébucher son orgueil De son char de triomphe en l'horreur du cercueil, Rotrou, Bélis. II, 17. L'hiver est ici dans toute son horreur ; je suis dans les jardins ou au coin de mon feu ; on ne peut s'amuser à rien, Sévigné, 22 nov. 1671. Ces secondes vies que notre faiblesse nous fait inventer pour couvrir en quelque sorte l'horreur de la mort, Bossuet, le Tellier. Partez ; mais à ces mots les champions pâlissent, De l'horreur du péril leurs courages frémissent, Boileau, Lutrin, IV, vers supprimés. Mais à mes tristes yeux votre mort préparée Dans toute son horreur ne s'était pas montrée, Racine, Baj. II, 5. C'était pendant l'horreur d'une profonde nuit : Ma mère Jésabel devant moi s'est montrée, Comme au jour de sa mort pompeusement parée, Racine, Ath. II, 5. Et que les mêmes coups Dans l'horreur du tombeau nous réunissent tous, Voltaire, Adél. IV, 5. Il n'y a pas trois cents ans que je [Phénix] vis ici la nature sauvage dans toute son horreur, Voltaire, Princ. de Babyl. 6. Ainsi de Mahomet vous regrettez les fers, Le tumulte des camps, cette horreur des déserts, Voltaire, Fanat. I, 2. Quoi ! j'ai percé l'horreur de cette nuit profonde, Delavigne, Paria, I, 2.

    L'horreur d'un supplice, la cruauté d'un supplice.

    Fig. Il se dit des souffrances morales. Vous ne connaissez pas toute l'horreur de sa situation. Pour comble d'horreur. L'horreur de ma misère.

    Une belle horreur, se dit des choses qui font éprouver un sentiment d'effroi mêlé d'admiration. La belle horreur d'un orage. Bien que les poëtes excellents, qui ont quelquefois le secret de nous faire sentir des chagrins délicieux et des tristesses agréables, aient encore celui de nous faire voir de belles horreurs, Brébeuf, Pharsale, Avert. sur la 3e partie. Enfin le jour, un jour sombre parut ; il vint s'ajouter à cette grande horreur [l'incendie de Moscou], la pâlir, lui ôter son éclat, Ségur, Hist. de Nap. VIII, 6.

    Il se dit au pluriel dans un sens analogue. Les horreurs de la guerre, de la famine. Être en proie aux horreurs de la misère. Il a dans ces horreurs [les agitations d'une insomnie cruelle] passé toute la nuit, Racine, Esth. II, 1. Lucrèce, chez les Romains, avait fait son poëme de la nature ; Virgile, ses Bucoliques ; Cicéron, ses livres de philosophie, dans les horreurs de la guerre civile, Voltaire, Mœurs, 82. Peux-tu mêler l'amour à ces moments d'horreurs ? Voltaire, Alz. IV, 4. Ô frère, ô triste objet d'un amour plein d'horreurs, Voltaire, Fanat. V, 4. Tu [France] ne sens point du nord les glaçantes horreurs, Chénier, Hymne à la France.

    Les horreurs de la mort, les angoisses de l'agonie.

    Par extension. Le duc de Grammont était lors dans les horreurs de la taille [l'opération par laquelle on extrait la pierre de la vessie], Saint-Simon, 33, 129.

  • 7L'énormité d'une action cruelle, infâme. Quelle horreur d'embrasser un homme dont l'épée De toute ma famille a la trame coupée ! Corneille, Hor. V, 3. On fait plus, on m'impute un coup si plein d'horreur Pour me faire un passage à vous percer le cœur, Corneille, Rod. V, 4. Un tel excès d'horreur rend mon âme interdite, Racine, Phèdre, IV, 2. La multitude et l'horreur de vos iniquités, Massillon, Carême, Fausse conf. Hélas ! le crime veille et son horreur me suit, Voltaire, Zaïre, V, 8. Dans quel palais profane a-t-on vu plus d'horreur ! Voltaire, Olympie, V, 7. Tant d'horreur n'entre point dans une âme si belle, Voltaire, Tancr. III, 3. Il se trame ici quelque horreur, Beaumarchais, Mère coup. I, 2.

    Il se dit au pluriel dans le même sens. La vie de ce tyran n'est qu'un tissu d'horreurs. Il faut que le courroux du ciel l'accable quelque jour… il me fait voir tant d'horreurs que je souhaiterais qu'il fût déjà je ne sais où, Molière, D. Juan, I, 1. Mon esprit ne se résoudrait jamais à se jeter parmi tant d'horreurs [les excès des révolutionnaires anglais], si la constance admirable avec laquelle cette princesse a soutenu ces calamités ne surpassait de bien loin les crimes qui les ont causées, Bossuet, Reine d'Anglet. Et je l'ai vue aussi cette cour peu sincère Des crimes de Néron approuver les horreurs, Racine, Bérén. II, 2. De toutes les horreurs, va, comble la mesure, Racine, Athal. III, 5. Il retrace vivement à notre imagination les horreurs d'une vie entière de crime, Massillon, Carême, Lazare. C'était un débordement de l'armée qui se mit à piller, violer, massacrer, et faire toutes les horreurs que la licence la plus effrénée inspire, Saint-Simon, 29, 88. On ne connaît que trop les étonnantes horreurs d'Alexandre VI, Voltaire, Jenni, 11. Les horreurs qui accompagnèrent la conquête de cet État et la tyrannie qui la suivit en firent un désert, Raynal, Hist. phil. II, 19. Si l'ennemi échappait à ce danger [l'incendie de Moscou], du moins n'aurait-il plus d'asile, plus de ressources ; et l'horreur d'un si grand désastre, dont on saurait bien l'accuser, soulèverait toute la Russie, Ségur, Hist. de Nap. VIII, 2.

  • 8Les choses déshonorantes qu'on attribue à quelqu'un. On m'a dit des horreurs de cet homme-là. Pour moi qui, quoique très jeune alors, ai vu naître toutes ces horreurs [libelles diffamatoires], je sais très bien que l'envie en fut la seule cause, Voltaire, Mélang. litt. Mém. sur la satire, la sat. après Despréaux. Existe-t-il, a-t-il jamais existé un méchant assez artificieux pour donner de la consistance aux horreurs qu'il débite d'autrui par les horreurs qu'il confesse de lui-même ? Diderot, Claude et Nér. I, 61. Y pensez-vous, monsieur ? quoi ! Florise et Géronte Vous comblent d'amitié, de plaisirs et d'honneurs, Et vous mandez sur eux quatre pages d'horreurs ! Gresset, Méchant, II, 1. Basile : De toutes les choses sérieuses, le mariage étant la plus bouffonne, j'avais pensé… - Suzanne : Des horreurs, Beaumarchais, Mar. de Fig. I, 9.

    Par extension et plaisanterie. On m'a dit mille horreurs de cette montagne de Tarare, Sévigné, 23.

  • 9Très familièrement. Injure. Il nous a dit des horreurs.

    Propos obscènes. Il s'approcha de cette femme et lui débita mille horreurs.

HISTORIQUE

XIIe s. De poür [de peur] li cuilverz trestremble, Fremist, mue colors sovent…, Quant de l'orror sis cuers [son cœur] s'effreie, Benoit de Sainte-Maure, II, 12380. El horror [en l'horreur] de la nocturneil vision, cant li songes suet [a coutume de] parpenre les hommes…, Job, p. 481.

XIVe s. Et comme je pleins de paour et de horreur o [avec] grant reverence…, Bercheure, f° 12.

XVe s. Li crestien n'ont pas horreur De mariage, ains à honneur Le tiennent et à chose honneste, Mystère de Barl. et Josaph. dans GUI DE CAMBRAI, p. 410.

XVIe s. Encores qu'il n'y eust point d'enfers, si a elle [l'âme] horreur de l'offenser [Dieu], Calvin, Instit. 6. Ainsi combien que de propos deliberé il s'estudiast à mespriser Dieu, si falloit-il que maugré ses dens il l'eust en horreur [en eût peur], Calvin, ib. 7. Estans prests de commettre toute vilenie et turpitude, sinon que l'horreur de la loy les restreint, Calvin, ib. 263. … ce qui est fait pour nous engendrer un plus grand horreur de toutes autres especes d'en abuser, Calvin, ib. 289. Ô la belle chose que ce seroit, de ne voir point le païsan s'effrayer des gens de guerre, qui sont aujourd'hui l'horreur des villages ! Lanoue, 271. En cette inconstance que les horreurs de la mort lui apportoient, il lui eschappa que, si le coup estoit à faire, il le feroit encore, D'Aubigné, Hist. I, 181. L'horreur est moindre que la rigueur : aussi elle n'esbranle que la peau et le cuir, Paré, XX, 20. Sain, j'ay eu les maladies beaucoup plus en horreur que lors…, Montaigne, I, 82.

Version électronique créée par François Gannaz - http://www.littre.org - licence Creative Commons Attribution

Encyclopédie, 1re édition (1751)

* HORREUR, sub. fém. (Gram.) ce mot designe l’aversion, quand elle est extrème : les hypocrites s’empressent plus à témoigner l’horreur qu’ils n’ont pas pour le vice, que les gens de bien à témoigner celle qu’ils en ont. L’épouvante portée à son dernier degré, il faut avoir l’ame bien ferme, & la pensée de la mort bien familiere, pour en voir l’image sous ses yeux & la soutenir sans horreur. Nous appliquons encore la même expression à une sorte de sensation particuliere, mêlée de frémissement, de respect, & de joie, que nous éprouvons à la présence de certains objets, ou dans certains lieux ; & nous disons alors le sombre d’une forêt épaisse, le silence & l’obscurité qui y regnent, nous inspirent une horreur douce & secrette. Nous transportons cette horreur aux choses mêmes, dans l’horreur de la nuit ; la sainte horreur des temples. L’horreur prise en ce sens, vient moins des objets sensibles, que des idées accessoires qui sont réveillées sourdement en nous. Entre ces idées, sont l’éloignement des hommes, la présence de quelques puissances célestes, &c.

Horreur du vuide, (Phys.) mot vuide de sens, principe imaginaire dont on se servoit dans l’ancienne philosophie, pour expliquer l’ascension de l’eau dans les pompes, & d’autres phénomenes semblables. On disoit : l’eau monte dans les pompes, parce que la nature a horreur du vuide. Lorsqu’on se fut apperçu que l’eau ne montoit dans les pompes qu’à la hauteur de 32 piés on en vint jusqu’à ce point d’absurdité, de dire que la nature n’avoit horreur du vuide, que jusqu’à la hauteur de 32 piés. Mais on ne fut pas long-tems sans découvrir que le mercure ne s’élevoit dans les tuyaux qu’à la hauteur de 27 à 28 pouces ; & comme il eût été trop ridicule de dire que la nature avoit horreur du vuide pour l’eau jusqu’à 32 piés, & pour le mercure jusqu’à 28 pouces seulement, on fut obligé d’abandonner cette étrange explication ; & bien-tôt après, M. Pascal démontra dans son traité de l’équilibre des liqueurs, que tous ces effets étoient produits par la pesanteur de l’air. Cette vérité étant unanimement reconnue aujourd’hui, n’a pas besoin ici d’un plus long article. Voyez Air, Tube de Torricelli, & le traité cité de M. Pascal. (O)

Horreur, horror, (Med.) se dit d’une sorte d’affection de l’ame, qui consiste dans une forte aversion que l’on conçoit pour quelque sorte d’aliment, de médicament ; à l’égard desquels on se sent un dégoût, une répugnance insurmontable, qui portent non-seulement à ne pas en user, mais à les éloigner de soi le plus que l’on peut ; tant on est affecté desagréablement par la sensation qu’ils excitent.

C’est ainsi que dans l’hydrophobie, l’aversion pour la boisson de l’eau, & souvent de toute sorte de liquide, est poussée jusqu’à l’horreur.

Il est un symptome de fievre qu’on appelle horreur. Voyez Fievre horrifique.

Wikisource - licence Creative Commons attribution partage dans les mêmes conditions 3.0

Étymologie de « horreur »

(XVe siècle) Du latin horror (« hérissement, frissonnement, frisson »).
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Provenç. horror, orror ; espagn. horror ; ital. orrore ; du lat. horrorem, horrere, avoir en horreur, se hérisser, causatif du radical sanscrit, harsch, hérisser. Suivant un mauvais désir de latinisme, on tenta, au XVIe siècle, de faire horreur du masculin comme tant d'autres noms en eur.

Version électronique créée par François Gannaz - http://www.littre.org - licence Creative Commons Attribution

Phonétique du mot « horreur »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
horreur ɔrœr

Fréquence d'apparition du mot « horreur » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « horreur »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « horreur »

  • L'horreur des bourgeois est bourgeoise.
    Jules Renard — Journal
  • On est puceau de l’horreur comme on l’est de la volupté.
    Louis-Ferdinand Céline
  • […] Il faut aller jusqu'à l'horreur quand on se connaît.
    Jacques Bénigne Bossuet — Lettre au maréchal de Bellefonds
  • Après la trentaine, les humais sombrent dans l'horreur.
    Witold Gombrowicz — Ferdydurke
  • La nature a horreur du vide.
    Adage cartésien
  • L’inquiétude présente est moindre que l’horreur imaginaire.
    William Shakespeare — Macbeth
  • Les hommes mentent quand ils assurent qu'ils ont horreur du sang.
    Ivan Alekseïevitch Bounine — Un crime
  • J'ai horreur de la rime. Surtout en prose.
    Jules Renard
  • Quand vous voyez qui certaines femmes épousent, ça vous fait mesurer leur horreur du travail.
    Helen Rowland
  • L'horreur ne va pas sans l'imagination.
    Arthur Conan Doyle — Sherlock Holmes
Voir toutes les citations du mot « horreur » →

Traductions du mot « horreur »

Langue Traduction
Anglais horror
Espagnol horror
Italien orrore
Allemand grusel
Chinois 恐怖
Arabe رعب
Portugais horror
Russe ужастик
Japonais ホラー
Basque beldurrezko
Corse horrore
Source : Google Translate API

Synonymes de « horreur »

Source : synonymes de horreur sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « horreur »

Combien de points fait le mot horreur au Scrabble ?

Nombre de points du mot horreur au scrabble : 10 points

Horreur

Retour au sommaire ➦

Partager