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Charme

Variantes Singulier Pluriel
Masculin charme charmes

Définitions de « charme »

Trésor de la Langue Française informatisé

CHARME1, subst. masc.

A.− Arbre vivace, à bois dur et blanc, très répandu en France. Bois, futaie de charmes. Les érables, les frênes, les charmes, les cornouillers, étaient un peuple de colosses, une foule d'une douceur fière (Zola, La Faute de l'Abbé Mouret,1875, p. 1378).
B.− P. méton. Le bois de cet arbre, utilisé en charpenterie, en menuiserie. Un robot en charme (Catal. d'instruments de lab. (Prolabo), 1932, p. 176).
Prononc. et Orth. : [ʃaʀm]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. Ca 1170 (Chr. de Troyes, Erec et Enide, 3157 ds T.-L.). Du lat. class. carpĭnus « id. ».
DÉR.
Charmoie, charmeraie, subst. fém.Lieu planté de charmes; bois où le charme domine. Ils [les mâles] passèrent la Fontaine Pierrée, la charmeraie des Écossoires (Genevoix, La Dernière harde,1938, p. 119). Dernière transcr. de charmoie ds DG : chàr-mwà; Land. 1834 transcrit encore : char-mœ. Pour [a] ant. final cf. Buben 1935, § 57. Aucune transcr. de charmeraie. Charmoie ds Ac. 1762-1932. Ac. n'atteste pas charmeraie. Noter les var. charmoise et charmois à côté de charmoie ds Lar. 19eet Nouv. Lar. ill. Pour Littré, charmoie constitue une exception, qui n'est qu'apparente, à la règle selon laquelle les n. de lieux plantés d'une certaine espèce d'arbres se terminent par -aie : aunaie, châtaigneraie. Cette exception s'explique par l'évolution phonét. de la diphtongue oi en > [we] > [ε] ou > [wa] selon les mots, [ε] s'orthographiant ai, mais [wa] conservant la graph. anc. oi (à ce sujet cf. Bourc.-Bourc. 1967, § 54 hist.). 1resattest. a) 1257 topon. (Cart. de l'év. d'Autun, 1rep., LXXXV ds Gdf. Compl. : La Charmoye), 1611 charmoye (Cotgr.); b) 1938 charmeraie id.; de charme nom d'arbre, a suff. -oie anc. forme du suff. -aie*, b suff. -eraie (v. -aie).
BBG. − Millepierres (F.). Promenade philol. parmi les arbres. Vie Lang. 1969, p. 131.

CHARME2, subst. masc.

A.− Vx, littér. Formule incantatoire. Craindre, enseigner les charmes. Tiens, voici un talisman sur lequel Ruggieri a prononcé des charmes (A. Dumas Père, Henri III et sa cour,1829, IV, 7, p. 188):
1. ... jadis le charme était une mélodie capable (...) de changer les phénomènes visibles de la nature : c'était le carmen des latins, l'α ̓ ο ι δ η ́ des Grecs, la formule du Zammaru assyrien. J. Combarieu, La Mus.,1910, p. 106.
2. Chaque moment de l'existence avait son charme particulier. Certains chants accompagnaient les jeux des enfants; tel pêcheur ne pouvait rien prendre avant qu'il n'eût récité sa formule; (...). Ces charmes n'étaient pas seulement un assemblage de paroles dont le résultat était aussi certain que celui des recettes de cuisine ou d'une formule de chimie appliquée. (...). (...) une seule erreur dans la récitation d'un charme annule une fête compliquée et est cause de désastre pour ceux qui la célèbrent, ... R.-H. Lowie, Manuel d'anthropol. culturelle,1936, pp. 326-343.
1. Puissance magique ainsi produite. Synon. enchantement, ensorcellement, envoûtement.Un horrible charme la tenait prisonnière dans la forêt spectrale [la Reine] (J. Lorrain, Sensations et souvenirs,1895, p. 256):
3. ... il emmenait avec lui [le duc de Lorraine] l'évêque de Nancy et douze membres du chapitre en cas de charmes à rompre et d'exorcismes à opérer. J. Lorrain, Sensations et souvenirs,1895p. 262.
SYNT. Être, tenir qqn sous un charme; briser, dissiper, rompre un charme. Charme de taciturnité (Tondr.-Vill. 1968).
Spéc., MÉD. État de charme. État second de l'hypnose.
En partic. Le mauvais charme. Faut-il qu'il l'aime [Elle] (...) pour l'embrasser, tout imprégnée du mauvais charme! [la fièvre] (Colette, Sept dialogues de bêtes,1905, p. 89).
P. métaph. Un charme m'a guéri : j'aime et je suis aimé (Chateaubriand, Mélanges et poésies,L'Esclave, 1828, p. 341):
4. Réveille-toi, Maldoror! Le charme magnétique qui a pesé sur ton système cérébro-spinal, pendant les nuits de deux lustres, s'évapore. Lautréamont, Les Chants de Maldoror,1869, p. 320.
5. Pour la première fois depuis que j'étais au monde, j'avais l'impression de n'être plus seul. Le charme qui m'enfermait en moi-même se rompait enfin. Green, L'Autre sommeil,1931, p. 183.
6. ... Debussy a su rompre le charme et exorciser son art en se désenchantant lui-même. R. Dumesnil, Hist. illustrée du théâtre lyrique,1953, p. 146.
2. P. méton. Objet ou breuvage qui produit cet effet magique. Un collier de charmes. Bien plus tard, ce soir-là (...) Arlette de Morêtre confectionnait des « charmes » (J. de La Varende, La Sorcière,1954, p. 57):
7. Sa mère, Sycorax, était sorcière (...) elle composait des charmes efficaces avec des crapauds, des escarbots et des chauves-souris. A. France, La Vie littér.,t. 2, 1892, p. 300.
3. P. compar. et ell., fam. Comme un charme. Comme par l'effet d'un charme, parfaitement. Se porter, pousser comme un charme.
B.− P. ext.
1. Littér. Attrait puissant, fascination qu'exerce sur nous une personne ou une chose; qualité qui le produit :
8. J'ai été pénétrée d'un tel charme, que j'ai eu simplement conscience d'une joie sans nom, tombant des feuillages, dormant sur les herbes. Zola, La Faute de l'Abbé Mouret,1875, p. 1402.
9. ... elles [les aubépines] m'offraient indéfiniment le même charme avec une profusion inépuisable, mais sans me laisser approfondir davantage, comme ces mélodies qu'on rejoue cent fois de suite sans descendre plus avant dans leur secret. Proust, Du côté de chez Swann,1913, p. 137.
10. La musique suspend à elle-même toute notre vie; cela ne veut point dire qu'elle plaise; c'est mal parler. Une belle fugue n'est pas toujours plaisante; je crois même qu'on y trouverait toujours quelque chose de déplaisant, surtout en ses départs. Un charme? Je veux bien. Mais il faut redresser tous ces mots-là; un charme est ce qui subjugue, plutôt que ce qui plaît. Alain, Propos,1929, p. 835.
11. ... la musique révèle le sens du sens, qui est charme, en le soustrayant. Telle est cette divine éternité d'un quart d'heure qui s'appelle la Ballade en Fa dièse de Gabriel Fauré; (...) : de cette œuvre de charme et d'inexistence, de ce sortilège bergamasque (...), de ce presque-rien surnaturel, en « balbutiant », ... Jankélévitch, Le Je-ne-sais-quoi et le presque-rien,1957, p. 44.
SYNT. Le charme des eaux, de la lune, d'un paysage, des vieilles rues; le charme d'une parole, d'un regard; le charme du génie, de l'horrible, de l'inconnu, de la mort, du passé; charme captivant, douloureux, étrange, indéfinissable, musical, profond, sauvage, séducteur, secret, sensuel, slave; un charme de tristesse, d'enchantement et de mystère; éprouver un charme; céder au charme de qqn; être retenu par un charme. Sa voix avait alors une douceur indéfinissable, un bizarre charme de pénétration et de tristesse (Loti, Le Mariage de Loti, 1882, p. 252). Une douceur étrange, une sorte de charme magique s'élevèrent des eaux touchées par le soleil (Genevoix, Éva Charlebois, 1944, p. 53). Synon. littér. (xviies.) le je-ne-sais-quoi.
2. Usuel (en corrélation avec l'adj. charmant). Qualité de grâce, de beauté, de rêve, de noblesse qui a pouvoir de plaire extrêmement :
12. Jamais je n'avais tant compris cette poésie bretonne, le charme paisible et suranné de ce pays. Loti, Journal intime,t. 1, 1878-81, p. 175.
13. On ne peut pas laisser sous le boisseau éternellement ce charme, cette grâce, cette merveille de dix-neuf printemps [Edmée]! Colette, Chéri,1920, p. 26.
SYNT. Le charme de la fleur, du printemps; le charme de l'amitié, de la beauté, de la bonté, du cœur, de l'illusion, de la nouveauté, de la vie; charme aérien, berceur, caressant, délicieux, discret, enivrant, exquis, familier, ravissant; un souvenir plein de charmes. Synon. douceur, délicatesse, bonheur, plaisir. M. de Pomponne (...) homme aimable, plume excellente, le charme des sociétés de mesdames de Sévigné et de Coulanges (Sainte-Beuve, Portraits contemp., t. 5, 1846-69, p. 245). Cet esprit de charme et de grâce [Fénelon] n'en a pas l'air, mais il est moralement plus hardi que Bossuet (Sainte-Beuve, Nouveaux lundis, t. 2, 1863-69, p. 123). Leur charme original [d'Azay-le-Rideau et de Chenonceaux] est tout entier dans l'élégance de leur silhouette, leurs heureuses proportions (L. Hourticq, Hist. gén. de l'Art, La France, 1914, p. 152).
Loc. Avoir, faire du charme; faire un numéro de charme; être tout au charme, sous le charme de qqn; trouver un grand charme à...
Au plur. Les attraits physiques d'une femme. Elle avait serré ses charmes dans un corset majestueux (Jouve, La Scène capitale,1935, p. 36):
14. Jupiter [dans le tableau du Titien], qui a pris les oreilles et les pieds du satyre, lève le voile de la dormeuse [Antiope] et en contemple les charmes d'un œil avide. T. Gautier, Guide de l'amateur au Musée du Louvre,1872, p. 96.
3. Le caractère particulier, agréable, poétique d'une atmosphère, d'un art, d'une occupation :
15. [dans les rues de Paris, toiles peintes par Pissarro] Les perspectives, les éclairages, les tonalités des maisons, des foules, (...) sont d'une intense vérité, et on y sent l'atmosphère, le charme et l'âme de Paris. C. Mauclair, Les Maîtres de l'impressionnisme,1904, p. 149.
16. − Ça a son charme la bicyclette. En un sens, c'est même mieux que l'auto. On allait moins vite; mais les odeurs d'herbe, de bruyère, de sapin, la douceur ou la fraîcheur du vent vous pénétraient jusqu'aux os; ... S. de Beauvoir, Les Mandarins,1954, p. 219.
SYNT. Le charme de la conversation, de la flânerie; le charme de l'aquarelle, d'un climat, du football, d'un jardin, d'un pays, des voyages. La vie n'a qu'un charme vrai : c'est le charme du Jeu. Mais s'il nous est indifférent de gagner ou de perdre? (Baudelaire, Fusées, 1867, p. 630). Ce charme qui ne ressemble à rien, cette poésie subtile et particulière de la banlieue parisienne (Courteline, Femmes d'amis, 1888, p. 138). Le charme suprême de cette œuvre [de Prud'hon] tient à la tendre séduction de la couleur et de la lumière (L. Hourticq, Hist. gén. de l'Art, La France, 1914, p. 322).
Prononc. et Orth. : [ʃaʀm]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1160 « formule magique » dire un charme (Enéas, éd. J. J. Salverda de Grave, 2598); d'où début xviiies. jeter un charme (Saint-Simon, Mémoires, IX, 315 ds IGLF) et lever le charme (Saint-Simon, Mémoires, IX, 213, dsIGLF); b) xvies. « objet auquel on attribue une puissance magique » (Brantôme, Discours sur les duels, VI, 259 ds Hug.); 2. 1578 plur. « moyen de séduire (d'une femme) » amoureux charmes (Garnier, Marc-Antoine, I, p. 175 ds IGLF); 3. ca 1605 « attrait » charmes de l'espoir (Montchrestien, Hector, p. 45, dsIGLF). Du lat. class. carmen, -inis, au sens de « formule magique, incantation ».
STAT. − Charme1 et 2. Fréq. abs. littér. : 5 607. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 11 611, b) 7 422; xxes. : a) 6 983, b) 5 760.
BBG. − Darm. Vie 1932, p. 155. − Duch. Beauté 1960, pp. 68-70, 73-75. − Gall. 1955, p. 60, 455, 461. − Gir. t. 2 Nouv. Rem. 1834, p. 18. − Gohin 1903, p. 334. − Gottsch. Redens. 1930, p. 21, 453. − Goug. Mots t. 1 1962, pp. 13-14. − Quem. 2es. t. 1 1970.

Wiktionnaire

Nom commun 2 - français

charme \ʃaʁm\ masculin

  1. Genre d'arbres et d'arbustes de la famille des bétulacées des régions tempérées de l'hémisphère nord, d'Asie Mineure et d'Europe qui sont des arbres pouvant mesurer jusqu'à 25 mètres, à feuilles caduques, alternes, petites (de 3 à 10 cm de long), simples, avec le bord du limbe finement denté, aux fleurs regroupées en inflorescences, en forme de chatons pendants, pollinisées par le vent et dont les fruits sont des akènes.
    • Le Charme très abondant forme parfois avec la Clématite des fourrés obscurs presque impénétrables. — (Gustave Malcuit, Contributions à l’étude phytosociologique des Vosges méridionales saônoises : les associations végétales de la vallée de la Lanterne, thèse de doctorat, Société d’édition du Nord, 1929, p. 174)
    • Le domaine médio-européen est caractérisé par quelques arbres qui y trouvent leur aire essentielle : le Charme, l’Érable plane, le Mélèze. — (Henri Gaussen, Géographie des Plantes, Armand Colin, 1933, p.90)
    • Le charme perdit quelques branches mais ses racines étaient si profondes qu'il arrivait à puiser de l'eau dans les couches les plus lointaines de la terre. — (Dominique Schwob, Contes de la grande yeuse: Paroles d'arbres des quatre coins du monde, 1998)
  2. (Par métonymie) Bois du même arbre.
    • Le charme s'emploie beaucoup dans le charronnage.

Nom commun 1 - français

charme \ʃaʁm\ masculin

  1. (Au pluriel) Qualités aimables, attraits, séduction ou ascendant qu’exercent sur l’imagination les objets qui la frappent vivement et qui produisent sur elle l’admiration, l’enthousiasme.
    • Belle Rowena, répondit de Bracy sur le même ton, c’est à vous, à vos propres charmes, qu’il faut attribuer tout ce que j’ai fait, […]. — (Walter Scott, Ivanhoé, traduit de l’anglais par Alexandre Dumas, 1820)
    • François se dévoyait auprès des filles publiques, […]. On dit que ces professionnelles ont des charmes secrets, des recettes magiques pour exaspérer la volupté de leurs clients et leur procurer des extases sans pareilles. — (Jean Rogissart, Hurtebise aux griottes, L’Amitié par le livre, Blainville-sur-Mer, 1954)
  2. Pouvoir de séduction ; talent de charmer.
    • Son plus grand charme venait d’une physionomie dont le calme trahissait une étonnante profondeur dans l’âme. — (Honoré de Balzac, La Femme de trente ans, Paris, 1832)
    • Les Liméniennes ont toutes de belles couleurs, […], des yeux noirs d’une expression indéfinissable d’esprit, de fierté et de langueur ; c’est dans cette expression qu’est tout le charme de leur personne. — (Flora Tristan, Les Femmes de Lima, dans Revue de Paris, tome 32, 1836)
    • Comme tous ceux qui écrivent beaucoup, Balzac parlait peu... Mais, dès qu'il parlait, le charme opérait. Il y avait, dans sa parole, une telle autorité, une telle séduction, qu'on oubliait très vite ses disgrâces physiques. — (Octave Mirbeau, La Mort de Balzac, 1907)
  3. (Au pluriel) Attraits sexuels d’une fille ou d’une femme.
    • Et cependant les sabots garnis de dentelles découvraient admirablement ses bras nus, la gorge s’encadrait dans le pur corsage aux tulles jaunis, aux rubans passés, qui n’avait serré que bien peu les charmes évanouis de la tante. — (Gérard de Nerval, Les Filles du feu, Sylvie, 1854)
    • Des messieurs, […], auscultaient des paumes les charmes de ces demoiselles servantes, impassibles mais souriantes. Il y avait aussi des femmes qui les expertisaient d'un doigt agile, les yeux endiamantés de concupiscence. — (Victor Méric, Les Compagnons de l’Escopette, Éditions de l’Épi, Paris, 1930, page 81)
    • La bergère, après bien des larmes,
      Pour se consoler prit un mari,
      Et ne dévoila plus ses charmes
      Que pour lui…
      — (Georges Brassens, Brave Margot, in Le Vent, 1953)
  4. Sentiment délicieux que fait éprouver ce qui intéresse le cœur, ce qui fait naître de douces sensations.
    • Quand on traverse pour la première fois une rivière islandaise, on ne peut se défendre de la crainte; mais on s’accoutume vite à ce genre d’émotion, et l'on finit même par y trouver un certain charme. — (Jules Leclercq, La Terre de glace, Féroë, Islande, les geysers, le mont Hékla, Paris : E. Plon & Cie, 1883, p.11)
    • Par exemple arriver chez sa nouvelle blonde avec un tétrapack de vin rouge… ça brise le charme d'un souper en tête à tête. — (Eau d'érable sur les tablettes, sur le forum Les sucriers.com : Forum acéricole, mai 2013)
  5. Sort lancé sur une personne ; sortilège, enchantement.
    • Par la messe ! je crois que le vieux Lucas de Beaumanoir a bien deviné juste, quand il affirme qu’elle a jeté un charme sur vous. — (Walter Scott, Ivanhoé, traduit de l’anglais par Alexandre Dumas, 1820)
    • Mon fils, mon cher fils ! […] c'est Dieu qui nous a envoyé cette jeune fille pour détruire l'horrible charme dont vous étiez environné, et vous venger du mal qui vous a été fait, à vous et à votre mère. — (Les Mille et Une Nuits, traduction Antoine Galland,1704. Ve nuit)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

CHARME. n. m.
Enchantement, ce qu'on suppose fait par art magique pour produire un effet extraordinaire. Opérer un charme, des charmes. Rompre, ôter, lever un charme. User de charmes. Fig., Le charme est rompu, L'illusion est détruite. Les manières de cette femme m'avaient d'abord séduit, mais le charme est rompu. Il signifie aussi figurément Ce qui plaît beaucoup, ce qui touche sensiblement. Un charme irrésistible. Un charme secret, indéfinissable. Cette personne a du charme, elle est pleine de charme. Il fait le charme de ma vie. Être sous le charme. Cela a son charme. Il s'emploie souvent au pluriel dans le sens d'Attraits, d'appas en parlant d'une femme. Les charmes d'une belle femme. On ne peut se défendre de ses charmes. Rien ne résiste au pouvoir de ses charmes. Par extension, Les charmes de la vertu, de l'étude. La musique, la poésie a de grands charmes. Ces lieux ont pour moi bien des charmes. La mélancolie a des charmes.

Littré (1872-1877)

CHARME (char-m') s. m.
  • 1Effet prétendu d'un art magique qui change l'ordre naturel. Le charme se rompit ; le pilote vit le rivage tel qu'il était, Fénelon, Tél. IX. … Un charme ordinaire a trop peu de pouvoir Sur les spectres parlants qu'il faut vous faire voir, Corneille, Illusion, I, 3. Mais je crains des chrétiens les complots et les charmes, Corneille, Poly. I, 3. Je n'ai que des attraits et vous avez des charmes [en parlant à Médée], Corneille, Tois. d'or, III, 4. Un démon… Fit un charme si souverain Que…, La Fontaine, Ch. imposs. Toute l'antiquité se servait de charmes contre la morsure des serpents, Voltaire, Mœurs, préj. Une Thessalienne a composé des charmes, Chénier, 41. On avait saigné l'enfant, sa mère lui avait mis des charmes, Chateaubriand, Itin. 74. Vous croyez donc que les déplaisirs et les plus mortelles douleurs ne se cachent pas sous la pourpre, ou qu'un royaume est un remède universel à tous les maux, un baume qui les adoucit, une charme qui les enchante ? Bossuet, Marie-Thérèse.
  • 2 Par extension. Ces prières apostoliques qui, par un espèce de charme divin, suspendent les douleurs les plus violentes, Bossuet, Duchesse d'Orl. Il se tait et ces mots semblent être des charmes, Corneille, Hor. III, 2. Quel est ici ton charme, odieuse princesse ? Corneille, Rod. IV, 7. N'attendez point de moi de regrets ni de larmes ; Un grand cœur à ses maux applique d'autres charmes, Corneille, Pomp. V, 1. Et contre ma douleur j'aurais senti des charmes, Quand une main si chère eût essuyé mes larmes, Corneille, Cid, III, 4. À ma douleur je chercherai des charmes, Racine, Baj. II, 5. Quel charme l'attirait sur ces bords redoutés ? Racine, Phèdr. II, 1. Par quel charme secret laissé-je retenir Ce courroux si sévère et si prompt à punir ? Racine, Mithr. IV, 4. Par un charme fatal vous fûtes entraînée, Racine, Phèdr. IV, 6. Ils s'aiment ! par quel charme ont-ils trompé mes yeux ? Racine, ib. Par quel charme, oubliant tant de tourments soufferts, Pouvez-vous consentir à rentrer dans ses fers ? Racine, Andr. I, 1.

    Fig. Le charme est rompu, l'illusion est détruite. Il n'appartient qu'à vous de rompre le charme qui les éblouit, Fléchier, Mont. Il est nécessaire que cet esprit lève le charme de l'amour-propre, Bossuet, II, Fr. de P. 1. À peine y touchez-vous que le charme cesse, Massillon, Car. Prosp. Rompez le charme fatal qui vous endort, Massillon, ib. Tiédeur, sermon 2.

  • 3Ce qui plaît, ce qui touche, ce qui attire. Reine, puisque ce titre a pour vous tant de charmes, Corneille, Nic. III, 1. Tous ces charmes de langage Dont on s'offre à la servir, Me l'assurent [ma dame] davantage, Au lieu de me la ravir, Malherbe, V, 3. Pour un cœur généreux ce trépas a des charmes, Corneille, Hor. II, 1. Qui veut que dans sa mort je trouve encor des charmes, Corneille, ib. IV, 5. Le mérite a toujours des charmes éclatants, Corneille, Sert. II, 1. Et s'il met à vos pieds ce charme de vos yeux [le diadème], Corneille, Pulch. I, 1. Mais c'était à l'insu de leurs parents cruels ; La défense est un charme, La Fontaine, Filles de Minée. C'est proprement un charme [l'apologue] ; il rend l'âme attentive, Ou plutôt il la tient captive, Nous attachant à des récits, La Fontaine, Fabl. VII, Dédic. Ne sentirai-je plus de charme qui m'arrête ? Ai-je passé le temps d'aimer ? La Fontaine, ib. IX, 2. Sa conversation était un charme, parce qu'il savait parler à chacun selon ses talents, Bossuet, Louis de Bourbon. Jamais personne n'a jeté des charmes dans l'amitié comme vous faites, Sévigné, 477. Il y a un charme pour les peuples dans la vue du prince, Bossuet, Polit. Tout cédait au charme secret de ses entretiens, Bossuet, Duch. d'Orl. Ce charme victorieux qui les entraîne, Pascal, dans COUSIN. La simplicité qui fait le plus grand charme de la beauté, Fénelon, Tél. IV. Et prête à mon discours un charme qui lui plaise, Racine, Esth. I, 4. Retiens tes cris, et, par d'indignes larmes, De cet heureux moment [la mort] ne trouble pas les charmes, Racine, Mithr. V, 2. Dans mon désespoir trouvez-vous tant de charmes ? Racine, Bér. V, 5. Qu'après un long hiver le printemps a de charmes ! Racine, Poésies, 1. Pour l'homme de bien la vertu a mille fois plus de charmes que le vice, Massillon, Car. Avenir. La vérité a des charmes dont un bon cœur a peine à se défendre, Massillon, ib. Vous plaignez mon exil, il a pour moi des charmes, Voltaire, Œdipe, V, 1. La vie a ses attraits, mais la mort a ses charmes, Voltaire, Triumv. I, 2. Il enchante ces lieux par un charme invincible, Voltaire, Henr. IX. Rougis-tu d'être belle, ô charme de mes yeux ? Lamartine, Méd. II, 24.
  • 4 S. m. plur. En parlant d'une femme, attraits, appas. Celle dont mes ennuis avaient leur guérison S'en va porter ailleurs ses appas et ses charmes, Malherbe, V, 7. Elle pleure en secret le mépris de ses charmes, Racine, Andr. I, 1. Hermione à Pyrrhus prodiguait tous ses charmes, Racine, ib. I, 1. Il commençait à trouver des charmes dans sa personne, Hamilton, Gramm. 4. Vénus avait répandu sur elle de nouveaux charmes, Fénelon, Tél. VII.

REMARQUE

1. D'après les grammairiens, ce mot ne se dit qu'au pluriel dans le sens d'attraits, d'appas, et qu'au singulier quand il signifie cette puissance secrète qui attire, ce qui plaît, ce qui touche. La première partie de la remarque est vraie ; mais la seconde ne l'est pas, comme on peut s'en assurer en parcourant les exemples. Cette distinction, qui n'a rien en soi de logique ou de grammatical, ne pourrait être qu'une affaire d'usage ; or l'usage même est contre elle.

2. Des grammairiens prétendent que charme ne se dit pas des personnes comme des choses. Cette remarque n'est pas fondée. Lamartine a très bien dit : ô charme de mes yeux. Corneille a dit charme à, par une tournure poétique, aujourd'hui archaïque : Si vous n'avez un charme à [un moyen de] vous justifier, Corneille, Rod. V, 4.

SYNONYME

1. CHARME, ENCHANTEMENT., Le charme (carmen) est une formule en vers ou en prose mesurée à laquelle on attribue la vertu de troubler l'ordre de la nature. L'enchantement (incantamentum) est l'action de prononcer cette formule. Comme à tout moment, dans le discours, on prend la cause pour l'effet ou l'antécédent pour le conséquent, la différence des deux mots disparaît, et ils sont la plupart du temps synonymes.

2. CHARMES, APPAS., On est très porté à confondre absolument ces deux termes. Mais, à une époque où l'on était plus près du sens primitif des mots, Malherbe n'a pas hésité à mettre : ses appas et ses charmes. En effet, appas se dit des beautés qui attirent ; et charmes, de celles qui agissent par une vertu occulte, magique.

HISTORIQUE

XIIe s. Il dit un charme que il avoit aprins, Garin, II, 104. E uns charmes truvad, par unt il soleit asuager les mals, Rois, 241.

XIIIe s. Mès or sai bien que je feré ; Un bon charme vos aprendré, Ren. 7650.

XVe s. Les aucuns de ces arioles affirmoient que le roi estoit demené par sorts et par carmes, Froissart, III, IV, 54. À l'amour ne suys adonné, Et j'ame encore moins les armes, Mais le vin, dès que je fus né ; C'est pourquoi j'en fai tous mes carmes [vers], Basselin, 1.

XVIe s. Conjurations, charmes, characteres…, Paré, Introd. 27.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1. CHARME. Ajoutez :
5 Aimer comme un charme, s'est dit pour aimer beaucoup, être ensorcelé par la passion, Vadé, Œuvr. compl. t. II, p. 303, dans CH. NISARD, Parisianismes, Paris, 1876, p. 45.

On dit se porter comme un charme, pour se porter bien, par une fausse analogie avec aimer comme un charme, Ch. Nisard, ib.

REMARQUE

Ajoutez :

3. Charmes, au pluriel, ne se dit qu'en parlant des femmes. Cependant Racine l'a dit, non malheureusement, d'un homme. Je plaignis Bajazet, je lui vantai ses charmes, Qui, par un soin jaloux dans l'ombre retenus, Si voisins de ses yeux, leur étaient inconnus, Racine, Baj. I, 1.

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Étymologie de « charme »

(Nom commun 1) Du moyen français charme, de l’ancien français charme, du latin carmen (« chanson, formule magique, incantation »), de canere (« chanter »).
(Nom commun 2) Du latin carpinus (« charme »), mot féminin en latin classique, pris pour un mot masculin en latin populaire, en raison de sa déclinaison en -us.
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Carmen, chant, vers, formule d'enchantement, anciennement casmen, sanscrit çasman, de çañs, célébrer.

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Phonétique du mot « charme »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
charme ʃarm

Fréquence d'apparition du mot « charme » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « charme »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « charme »

  • Le charme du passé, c'est l'oubli.
    Pierre Baillargeon — Commerce
  • Le seul charme du passé, c'est qu'il est le passé.
    Oscar Wilde
  • Le pouvoir sans abus perd le charme.
    Paul Valéry — Cahier B
  • On appelle charme féminin le cache-sexe de la connerie.
    Julien Torma — Euphorismes
  • […] Certains hommes répandent, pour ainsi dire de naissance, un fluide d'autorité dont on ne peut discerner au juste en quoi il consiste […] Il en va de cette matière comme de l'amour qui ne s'explique point sans l'action d'un inexprimable charme.
    Charles de Gaulle — Le Fil de l'épée, Plon
  • Le sublime touche, le beau charme.
    Emmanuel Kant — Observations sur le sentiment du beau et du sublime
  • En pays d’exil, même le printemps manque de charme.
    Proverbe russe
  • Une femme repousse parfois ce qui la charme le plus.
    William Shakespeare — Les deux gentilshommes de Vérone
  • C'est l'élégance simple qui nous charme.
    Ovide — Conseils aux femmes
  • Il n'y a pas de charme égal à la tendresse du cœur.
    Jane Austen
Voir toutes les citations du mot « charme » →

Traductions du mot « charme »

Langue Traduction
Anglais charm
Espagnol encanto
Italien fascino
Allemand charme
Portugais charme
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Synonymes de « charme »

Source : synonymes de charme sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « charme »

Combien de points fait le mot charme au Scrabble ?

Nombre de points du mot charme au scrabble : 13 points

Charme

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