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Forcé

Définitions de « forcé »

Trésor de la Langue Française informatisé

FORCÉ, ÉE, part. passé et adj.

I.− Part. passé de forcer*.
II.− Adjectif
A.− Qui dépasse la bonne limite. Synon. excessif, exagéré, outré.Alors nous jouons la comédie. Qu'elles sont bêtes, ô ma chérie, les pièces de salon du répertoire actuel. Tout y est forcé, grossier, lourd (Maupass., Contes et nouv.,t. 1, Moustache, 1883, p. 616).
Marche* forcée.
Rare. [Qualifiant un subst. désignant une pers.] [D'Annunzio] est tout le temps au bout de lui-même, tendu, forcé, paroxysé, et par moments il en est ridicule, car on craint une apoplexie (Rivière, Corresp.[avec Alain-Fournier], 1906, p. 85).
B.−
1. Qui est exécuté sous la contrainte, qui est dû à une pression. Synon. obligatoire; anton. libre, volontaire.Rougon se prêta à ce nouvel interrogatoire, espérant tirer d'elle quelque confidence forcée (Zola, E. Rougon,1876, p. 74).Il ne s'agissait pas ici d'une retraite forcée, mais d'un mouvement préparant les opérations ultérieures (Joffre, Mém.,t. 1, 1931, p. 365):
1. N'était-ce point plutôt, pour une dernière et miséricordieuse tentative, l'écluse levée aux secrets hideux de l'âme, aux pensées venimeuses étouffées vingt ans, trente ans, l'aveu forcé, involontaire, matériel, pourtant encore libérateur... Bernanos, Imposture,1927, p. 368.
2. Et la vertu, ou puissance intime, par laquelle nous résistons à cet attrait de voler, c'est la justice. Non pas justice forcée, par gendarmes et juges, mais justice libre, justice de soi à soi... Alain, Propos,1935, p. 1247.
Carte forcée. Imposée par prestidigitation (cf. carte II C 1).
Conduite forcée. V. conduite C 1.
Spéc. Exécuté par décision de justice, par obligation légale. Arrêts forcés (v. arrêt I A 2); cours forcé (v. cours II B); emprunt forcé (v. emprunt A 2); résidence* forcée; travaux* forcés; vente* forcée.
2. Qui se produit indépendamment de la volonté; non voulu, non décidé. Synon. involontaire.Le bain forcé qu'elle avait pris sous le pont de Passy (Ponson du Terr., Rocambole,t. 5, 1859, p. 337).Pendant cette halte forcée, la conversation roula sur les incidents de la guerre (Verne, Enf. cap. Grant,t. 3, 1868, p. 77).Ce séjour forcé à Paris, toute l'année, m'entraînerait à plus de dépenses (Flaub., Corresp.,1875, p. 205).Des jours de chômage forcé (R. Bazin, Blé,1907, p. 196):
3. Elle [la peste] veut que nous soyons heureux comme elle l'entend, non comme nous le voulons. Ce sont les plaisirs forcés, la vie froide, le bonheur à perpétuité. Tout se fixe, nous ne sentons plus sur nos lèvres l'ancienne fraîcheur du vent. Camus, État de siège,1948, p. 226.
Nécessaire, inéluctable. Le sentiment religieux n'existe pas naturellement, (...) il est le résultat forcé de l'éducation (Delécluze, Journal,1825, p. 190).L'action de la machine est une conséquence forcée des forces de la vapeur (C. Bernard, Notes,1860, p. 491).Ce fait décisif dont il restera à déterminer les conséquences forcées (Blondel, Action,1893, p. 335).
C'est, c'était forcé (fam.). Cela ne peut, ne pouvait être autrement. Elle vous expose, avec une conviction irrécusable, des nécessités stupéfiantes : − Le père était alcoolique; n'est-ce pas? C'était forcé : il avait été au Tonkin cinq ans (Frapié, Maternelle,1904, p. 255):
4. − (...) Et j'ai été sûr de t'avoir. Il respira, la moustache allumée d'un rire. Et il fit encore un pas : − Tu reviendrais chez toi, c'étais forcé. Genevoix, Raboliot,1925, p. 347.
C.− Qui n'est pas spontané, qui est le résultat d'un effort sur soi-même. Synon. affecté, contraint, factice.Et l'on organisait sans ardeur, avec une gaîté forcée, toutes ces petites surprises si douces dans une famille unie (Maurois, Ariel,1923, p. 30).Sur son vieux visage l'amabilité forcée du sourire de la marchande contrastait avec l'expression anxieuse du regard (Bourget, Actes suivent,1926, p. 155):
5. Comme votre ton est différent de celui d'autrefois! Il y a dans vos manières présentes je ne sais quoi de contraint et de forcé. Bernanos, Dialog. Carm.,1948, 3etabl., 8, p. 1629.
Fréq. abs. littér. : 4 688. Fréq. rel. littér. : xixes. a) 8 566, b) 7 748; xxes. : a) 6 368, b) 4 645.

Wiktionnaire

Adjectif - français

forcé

  1. Qui découle de la contrainte, de l’usage de la force, et non du libre arbitre.
    • En 1477, le duc René II expulse les juifs ; en 1686, les dragons du roi procèdent à la conversion forcée des protestants de Metz, provoquant une fuite clandestine et définitive principalement vers les États allemands. — (Jérôme Estrada, Une terre de migration et de passage, Le Mag, supplément de Vosges Matin, 10 décembre 2017, page 30)
  2. Qui manque de naturel ; qui est contraint, affecté.
    • Être forcé dans toutes ses manières. — Elle n’a rien de gauche ni de forcé.
    • Contenance forcée. — Un rire, un sourire forcé.
    • Il en recule jusqu’au-dessus du canapé et pour dissimuler son embarras, il étale machinalement la couverture sur le dossier du canapé, tout en riant d’un rire forcé qui lui donne l’air absolument sot. — (Georges Feydeau, Monsieur chasse !, 1892)
  3. Qualifie ce qui s’éloigne du naturel, de la vérité ; ce qui est mal amené, tiré de trop loin, en parlant des ouvrages de l’esprit,.
    • Style forcé. — Il y a, dans cette pièce de théâtre, des situations forcées.
    • Comparaison forcée. — Rapprochement forcé. — Donner à un passage, à une expression un sens forcé.
  4. (Peinture) (Vieilli) Dont l’attitude est outrée, en parlant d’une figure de tableau
  5. (Peinture) (Vieilli) Excessif, en parlant du coloris d’un tableau.
  6. (Peinture) (Vieilli) Trop cherché, en parlant de l’effet d’un tableau.
  7. (Populaire) Inévitable ; immanquable ; imparable ; obligatoire.
    • […], et chaque fois que, dans un lieu public, quelqu’un déclarait à haute voix, d’un ton assuré et confiant : « C’est forcé qu’ils y arrivent ! » il y avait dix chances contre une qu’il s’agit de vol aérien. — (H. G. Wells, La Guerre dans les airs, 1908, traduction d’Henry-D. Davray et B. Kozakiewicz, Mercure de France, Paris, 1910, page 17 de l’édition de 1921)
  8. (Jardinage) Qualifie une plante à laquelle ont fait donner artificiellement plus qu’elle ne donnerait naturellement.
    • Par jeu, j’entourais de mes deux mains « sa taille de guêpe » ; mais l’épanouissement du buste et des hanches aurait paru aujourd’hui presque monstrueux : les femmes d’alors ressemblaient à des fleurs forcées. — (François Mauriac, Le Nœud de vipères, Grasset, 1933, réédition Le Livre de Poche, page 73)
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Littré (1872-1877)

FORCÉ (for-sé, sée) part. passé de forcer
  • 1À quoi on a fait violence, qu'on a tordu, brisé avec violence. Un coffre forcé. Une serrure forcée. Ils [les Juifs] répandirent dans le monde que le sépulcre [de Jésus] avait été forcé ; mais le mensonge était si visible que la résurrection du Sauveur ne laissa pas de passer pour constante parmi le peuple, Bourdaloue, Myst. Résurr. de J. C. t. I, p. 331. Un ministre est excusable du mal qu'il fait lorsque le gouvernail de l'État est forcé dans sa main par les tempêtes ; mais dans le calme il est coupable de tout le bien qu'il ne fait pas ; Mazarin ne fit de bien qu'à lui et à sa famille, Voltaire, Louis XIV, 6.

    Terme de marine. Mâts forcés, mâts qui prennent un pli sur l'avant pour avoir porté trop de voile par un grand vent, ou pour avoir été trop tenus en étais.

    Fig. Sens forcé, sens qu'on a tordu, détourné de l'acception directe et naturelle. Donner les sens forcés à des passages clairs, c'est le sûr moyen de ne jamais s'entendre, Voltaire, Dict. phil. Résurrection.

  • 2Enlevé de vive force. Que de remparts détruits ! que de villes forcées ! Boileau, Art p. IV. Le temple est-il forcé ? Racine, Athal. V, 1. Ayant appris que les lignes [de l'ennemi] avaient été forcées, Hamilton, Gramm. 5.
  • 3À qui on a fait violence. Une femme forcée par des soldats ivres.
  • 4Dont la résistance a été impuissante. Des troupes forcées dans leurs retranchements.

    Par extension. Les éléments forcés, la nature forcée, les éléments, la nature obligée d'obéir à l'homme. Quoi ! mon père trahi, les éléments forcés… Lui font-ils présumer mon audace épuisée ? Corneille, Médée, I, 4. Trianon et Marly bâtis ; la nature forcée dans tous ces lieux de délice, et des jardins où l'art était épuisé, Voltaire, Louis XIV, 27.

  • 5 Terme de chasse. Pris à la course et à la fatigue. Un cerf forcé par les chiens.

    Rendre forcé, obliger la bête à se rendre. Un sanglier poussé vigoureusement par une meute de vingt bons chiens et prêt à rendre forcé par eux.

  • 6Qui fait malgré soi quelque chose. La comédie du médecin forcé [malgré lui], Sévigné, 227. Après t'être couvert de leur sang et du mien, Tu te verras forcé de répandre le tien, Racine, Brit. v, 6. L'hérésie, depuis si longtemps redoutable au trône par la faiblesse des règnes précédents forcés à la tolérer, Massillon, Or. fun. Louis XI.

    Avoir la main forcée, voy. FORCER n° 1.

    Terme de jeux. Être forcé, être obligé de jouer de la couleur demandée ou de prendre.

    Mat forcé, position telle, aux échecs, que le roi ne peut plus changer de place sans être fait mat au coup suivant.

    Au domino, dé forcé, celui qu'on est obligé de mettre, n'en ayant pas d'autre. J'ai joué à dé forcé. Fermeture forcée, celle qui ne peut s'éviter.

  • 7Qui n'est pas volontaire. Mais, s'il se dédisait d'un outrage forcé, Corneille, Sertor. I, 3. Le Mariage forcé, titre d'une comédie de Molière. J'irai, bien plus content et de vous et de moi, Détromper son amour d'une feinte forcée, Racine, Bajaz. III, 4. Les métis qui résultent de ces unions forcées ressemblent plus à leur père par la forme du bec, par les couleurs de la tête, des ailes, en un mot par les extrémités, et à leur mère par le reste du corps, Buffon, Ois. t. VII, p. 275, dans POUGENS.

    Emprunt forcé, somme qu'un gouvernement force à lui apporter sous forme d'emprunt, et dont il paye les intérêts.

    Travaux forcés, voy. TRAVAIL.

  • 8Marche forcée, marche plus rapide ou plus prolongée que la marche ordinaire. Le régiment gagna la ville à marches forcées.
  • 9 Terme d'horticulture. Arbre forcé en serre, arbre dont on a hâté la végétation dans une serre.

    Cultures forcées, celles qui ont pour but de produire des fruits ou des légumes précoces.

  • 10Qui manque de sincérité et de liberté. Et je ne voulais pas de sentiments forcés, Corneille, Poly. IV, 3. Et sans plus te parer d'une vertu forcée, Corneille, Héracl. III, 3. Vous avez vu le reste et mes raisons forcées, Corneille, Sertor. IV, 2. Ne m'importune plus de tes raisons forcées ; Je vois combien tes vœux sont loin de mes pensées, Racine, Bajaz. II, 1. Déjà plus d'une fois dans vos plaintes forcées J'ai dû voir et j'ai vu le fond de vos pensées, Racine, Iphig. II, 5. Je tremble qu'Athalie… d'un respect forcé ne dépouille les restes, Racine, Athal. I, 1. Il a un ris forcé, des caresses contrefaites, La Bruyère, VIII. Vous vous moquez, me dit-il d'un air forcé, ne savez-vous pas le plaisir que j'ai d'être avec vous ? Marivaux, Marianne, 8e part. Vous connaissez ce sourire forcé et cette fausse douceur que la politesse imprime sur le visage, Genlis, Ad. et Théod. t. I, lett. 23, p. 183, dans POUGENS.
  • 11Qui n'a ni souplesse ni liberté, éloigné du naturel, en parlant des ouvrages d'esprit. Je ne puis arracher du creux de ma cervelle Que des vers plus forcés que ceux de la Pucelle, Boileau, Sat. VII. Et dans un vers forcé que surcharge un vieux mot, Couvre son peu d'esprit des phrases de Marot, Voltaire, Disc. 3.

    Tiré de trop loin. Rapprochement forcé. Comparaison forcée.

    Style forcé, style où l'on sort du naturel, où l'on cherche à exagérer l'énergie au moyen de mots inaccoutumés ou de figures excessives.

    Terme de peinture. Figures forcées, figures dont l'attitude est gênée sans nécessité. Coloris forcé, coloris outré. Effet forcé, effet où l'artifice du peintre pour l'augmenter est grossièrement employé.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

FORCÉ. Ajoutez :
12 Terme de marine. Temps forcé, très mauvais temps. Il est rare qu'un banquier se résigne à ne pas expédier ses chaloupes ; on est souvent confondu de les voir tenir la mer par grande brise et temps forcé, Rev. des Deux-Mondes, 1er nov. 1874, p. 116.
Version électronique créée par François Gannaz - http://www.littre.org - licence Creative Commons Attribution

Étymologie de « forcé »

Participe passé de forcer.
(XVIe siècle) De l’italien forzato pour la locution travaux forcés → voir forçat.
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Phonétique du mot « forcé »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
forcé fɔrse

Fréquence d'apparition du mot « forcé » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « forcé »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « forcé »

  • Son emprisonnement à Fénestrelles, son exil forcé dès le début du mouvement insurrectionnel, à la suite de son évasion spectaculaire, l'avaient placé dans la situation du héros pur.
    Jean Giono — Le bonheur fou
  • Et pourtant il est bien forcé de constater qu’ils ont un mal de chien à fixer leur attention plus d’une vingtaine de minutes sur un exercice ou une lecture.
    Jean-Marie Alfroy — Le professeur est nu
  • Entre parents et enfants, le collage des collages forcé. Cohabitation forcenée. Jusqu’à l’âge d’homme, on vous accouche au forceps. Tête-à-tête de fauve à dompteur dans une cage, à l’infini des jours, féroce. Tendre. Toujours tendu. Le fouet rapproche. Qui aime bien châtie bien. Qui est bien châtié aime. La règle, ainsi que fonctionne le système. Mon système. Pas moi qui l’ai inventé, je fonctionne à mon tour dedans. À plein.
    Serge Doubrovsky — Le Livre brisé
  • Il y avait eu un repli forcé suivi d'une contre-offensive destinée à regagner le terrain perdu, si bien qu'après la bataille les positions s'étaient retrouvées identiques, la présence des morts mise à part.
    Ernest Hemingway — Histoire naturelle des morts et autres nouvelles
  • Près de Frenchman Bay, à l'extrémité de l'avant-scène, forcé par un violent orage de capituler à Las Vegas, je posai quelques questions au rentier en congé qui m'hébergeait.
    Alcide Mara — Boire les miroirs
  • Tout le monde n'est pas forcé de se contenter de la pelure que le ciel lui a donnée: quand on est délicat et difficile, on tâche de s'améliorer au physique et au moral, suivant le procédé d'un marchand de perlimpinpin dont j'ai avalé le nom.
    Louis Reybaud — Jérôme Paturot

Traductions du mot « forcé »

Langue Traduction
Anglais strength
Espagnol fortaleza
Italien forza
Allemand stärke
Chinois 力量
Arabe قوة
Portugais força
Russe сила
Japonais 強さ
Basque indarra
Corse forza
Source : Google Translate API

Antonymes de « forcé »

Combien de points fait le mot forcé au Scrabble ?

Nombre de points du mot forcé au scrabble : 9 points

Forcé

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