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Raser

Définitions de « raser »

Trésor de la Langue Française informatisé

RASER, verbe trans.

A. − Couper avec un rasoir.
1.
a) [Le compl. d'obj. dir. désigne un système pileux] Raser les cheveux, la barbe de qqn. Elle lui fait raser sa moustache (Renard, Journal, 1900, p. 604).
Empl. pronom. Se raser la moustache. Il se rase la barbe, mais avec négligence (Duhamel, Maîtres, 1937, p. 122).
Part. passé en empl. adj. Ras, tondu. Les cheveux courts ou longs, la barbe épaisse ou rasée (Jouy, Hermite, t. 4, 1813, p. 264).Elles avaient autant et plus à souffrir que lui. Cheveux rasés, condamnés à des années de détention (Ambrière, Gdes vac., 1946, p. 206).
b) [Le compl. d'obj. dir. désigne une surface du corps poilue (généralement le visage ou le crâne)] Cette malheureuse femme s'est fait raser la tête (Hugo, L. Borgia, 1833, iii, 3, p. 178).
Empl. pronom. Se raser le cou, le menton. Il se rase les mollets et les bras (Dabit, Hôtel Nord, 1929, p. 220).Elle se mit à se raser les jambes avec une application frénétique (Beauvoir, Mandarins, 1954, p. 325).
Part. passé en empl. adj. Crâne, menton rasé; tête rasée. Sa nuque rasée d'officier allemand faisant des plis comme un front (Malraux, Espoir, 1937, p. 620).La face était complètement rasée. Les sourcils touffus et les cheveux gris, presque blancs (Duhamel, Passion J. Pasquier, 1945, p. 12).
c) [Le compl. d'obj. dir. désigne une pers.] Raser un malade, un soldat, un condamné, une parturiente. L'homme qui me rase et à qui je donne cinq sous m'est alors apparu comme une majorité (Goncourt, Journal, 1861, p. 883).
Empl. pronom. Se faire la barbe. Les hommes, qui se rasaient près des fenêtres, se retenaient de chanter, sifflotaient (Romains, Hommes bonne vol., 1932, p. 26).Devant une glace ébréchée, je me rase attentivement (Saint-Exup., Terre hommes, 1939, p. 191):
1. À présent, il faut que je me rase. Il ramasse sa musette, s'approche d'une fenêtre, prend son rasoir, pose le morceau de miroir de biais sur le rebord de la fenêtre et se rase à sec; la douleur lui ferme à moitié les yeux. Sartre, Mort ds âme, 1949, p. 232.
Part. passé en empl. adj. Être bien, mal rasé; être rasé de frais (v. frais1), de près*. Je devais être toujours fraîchement rasé, fraîchement coiffé (Giraudoux, Simon, 1926, p. 59).Les acteurs comme les prêtres sont rasés (Aragon, Beaux quart., 1936, p. 78).
d) Absol. − L'étrenne de ma barbe, Suzanilla? − Non, merci, vous êtes beaucoup trop maladroit. Vous vous êtes encore coupé. − J'ai voulu raser de trop près (Duhamel, Suzanne, 1941, p. 188).
Demain* on rase gratis.
Crème, mousse à raser. Crème, mousse amollissant la peau et le poil avant un rasage. Les produits de toilette et de beauté (crèmes à raser, fards, parfums, rouge à lèvres...) (Quillet Méd.1965, p. 313).
2. P. anal. ou au fig.
a) Vieilli, pop.
Guillotiner. On n'a pas assez rasé de riches pendant la Révolution, voilà tout (Balzac, Paysans, 1844, p. 72).
Voler, ruiner. Synon. plumer, tondre.Si la princesse s'avisait d'avoir un favori? Boum. Nous serions rasés!... Il ne faut pas qu'elle en ait! (Meilhac, Halévy, Gde-duchesse Gérolstein, 1867, i, 7, p. 199).
b) Fam. Ennuyer, importuner par des propos oiseux. Synon. bassiner, embêter, emmerder, enquiquiner, faire suer, faire chier.Le digne homme n'imagine pas combien il peut raser les élèves avec des propos de ce genre; chez lui si sincères qu'ils découragent l'ironie (Gide, Faux-monn., 1925, p. 1015).Bien avant mon départ de Toulouse, il nous rasait déjà avec cette histoire (Vailland, Drôle de jeu, 1945, p. 102).
Empl. pronom. S'ennuyer. Vrai, ce qu'on se rase, ici. Il n'y a pas une autre usine encore plus folâtre? (Colette, Cl. s'en va, 1903, p. 179).
B. − P. anal.
1. Mettre à ras.
a) [Le compl. d'obj. dir. désigne une constr. ou un ensemble de constr.] Détruire jusqu'au niveau du sol. La tour du château de Lusignan, en Poitou, rasé par ordre du roi à la fin du XVIesiècle (Durry, Nerval, 1956, p. 170).[La bombe H] peut sur le plan stratégique brûler et raser n'importe quelle ville au monde, détruire la civilisation, détruire peut-être l'humanité (Billotte, Consid. strat., 1957, p. 4016).Part. passé en empl. adj. Immeuble, quartier rasé; ville rasée. Le vieux château, rasé à une certaine hauteur, sauf la tour du diable (Michelet, Journal, 1831, p. 98).Une enceinte assez vaste, mais rasée à fleur de terre (Fromentin, Été Sahara, 1857, p. 246).
b) Spécialement
BOT. [Le compl. d'obj. dir. désigne une plante, une végétation] Couper au ras du sol. [Henri] se trouva bientôt dans l'avenue du fond, que la Bricoline avait l'habitude de parcourir pendant des heures entières, et dont l'herbe avait été rasée par ses pieds en certains endroits (Sand, Meunier d'Angib., 1845, p. 239).
Part. passé en empl. adj. Le gazon rasé, se collait misérablement contre les pentes (Taine, Voy. Ital., t. 1, 1866, p. 34).
MAR. [Le compl. d'obj. dir. désigne un navire] Couper les mâts. Les navires, ou démâtés, ou rasés au niveau des vagues, dérivent en brûlant (Chateaubr., Natchez, 1826, p. 276).Un vaisseau construit fut rasé (Michelet, Journal, 1847, p. 669).
Part. passé en empl. adj. Le lendemain, 20, les bastingages, les pavois, les œuvres-mortes, la plus grande partie du pont, furent dévorés. L'Henrietta n'était plus qu'un bâtiment rasé comme un ponton (Verne, Tour monde, 1873, p. 199).
MÉD. VÉTÉR., empl. intrans. [Le suj. désigne un cheval] Avoir la cavité des incisives usée. (Dict. xixeet xxes.). Ce cheval rase, commence à raser (Ac.).
TEXT. [Le compl. d'obj. dir. désigne une étoffe] Soumettre au rasage. Raser le drap, le velours (DG).
2. Passer très près (d'une surface ou d'une ligne). Des jupes rasaient le parquet, soulevant dans la chaleur des bougies la fine poussière et l'odeur musquée des toilettes (Zola, Pot-Bouille, 1882, p. 157):
2. Voilà l'errante hirondelle Qui rase du bout de l'aile L'eau dormante des marais Voilà l'enfant des chaumières Qui glane sur les bruyères Le bois tombé des forêts. Lamart., Harm., 1830, p. 335.
Raser les murs. V. mur A 3.
BALIST. [Le suj. désigne un projectile, une balle] Passer très près, effleurer. Un boulet de canon lui rasa l'épaule. Une balle lui rasa le visage (Ac.).
CHASSE, empl. pronom. Se tapir à terre pour ne pas être vu. La bête se rase à peine sous les feuilles (Giono, Colline, 1929, p. 136).Elle tiendra l'arrêt en se rasant sur le sol avec lequel elle espère se confondre (Vidron, Chasse, 1945, p. 59).
HIPP. [Le suj. désigne un cheval] Raser le tapis. Élever très peu les membres (d'apr. Tondra Cheval 1979).
Prononc. et Orth.: [ʀ ɑze], [ʀa-], (il se) rase [ʀ ɑ:z], [ʀa-]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. Ca 1140 « remplir à ras bord » (Voyage de Charlemagne, éd. G. Favati, 570), seulement au Moy. Âge, v. Gdf., T.-L., v. aussi araser; 2. 1176-81 « couper en passant tout près de » (Chrétien de Troyes, Chevalier Lyon, éd. M. Roques, 950); 3. fin xiies. « passer près de, effleurer » (Alexandre de Paris, Alexandre, I, 1264 ds Elliott Monographs t. 37, p. 29); 1678 ligne de défense razante (Guillet); 1788 vûe râsante (Fér.); 4. ca 1200 reseies barbes (Moralités sur Job, 303, 24 ds T.-L.); 5. fin xiiies. « détruire (une ville) » (Alexandre, éd. H. Michelant, 45, 34, ms. H [cf. Elliott Monographs t. 37, p. 38: enbrasee]); 6. a) 1355 « polir (une pierre) » (Ord., IV, 166 ds Gdf.) − 1459, ibid.; b) 1678 « avoir la cavité des dents qui ne paraît plus (des chevaux) » (Guillet); 7. 1665 « soumettre une étoffe au rasage » (Statuts de la Communauté des Brodeurs Chasubliers ds Havard); 8. 1671 mar. (Pomey); 9. a) 1851 « importuner » (d'apr. Esn.); 1857 (Furpille, Dict. de la lang. bleue ds Klein Vie paris., p. 128); b) 1872 rasant (Touchatout, Hist. de France tintamarresque, p. 312 ds Quem. DDL t. 15); c) 1903 se raser (Colette, loc. cit.). Du lat. pop. *rasare, altér. (d'apr. le supin rasum) du class. radere « raser », « gratter, polir, ratisser » et « toucher en passant, effleurer, côtoyer ». Fréq. abs. littér.: 607. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 607, b) 770; xxes.: a) 982, b) 1 063.
DÉR. 1.
Rasance, subst. fém.a) Caractère de ce qui est rasant. (Dict. xxes.). Rasance d'un rayon lumineux. b) Balist. Rapport entre la hauteur de la trajectoire et celle de l'objectif. La rasance est d'autant plus grande que la trajectoire s'élève moins au-dessus du sol (Lar. encyclop.). [ʀ ɑzɑ ̃:s], [-a-]. 1reattest. 1940 (A. Arnoux, Relève d'infanterie, Revue de Paris, 1erjanvier, p. 45 ds A. François, La Désinence « -ance », p. 65); de raser, suff. -ance*.
2.
Rasement, subst. masc.a) Action d'abattre jusqu'au sol. Rasement d'un édifice, d'un monument. b) Méd. vétér. ,,Période de disparition du carnet dentaire par usure de la dent`` (Villemin 1975). [ʀ ɑzmɑ ̃], [-a-]. Att. ds Ac. dep. 1762. 1resattest. a) 1372 « action d'abattre une construction jusqu'au niveau du sol » (Baill. du Cotentin, Mont-Saint-Michel, A. Manche ds Gdf. Compl.); b) 1520 « action de raser » (Le Guidon en françois... de Jean Falcon, p. 274 ds Sigurs, p. 540); c) 1845 « mesure progressive des dents du cheval » (Besch.); de raser, suff. -ment1*.

Wiktionnaire

Verbe - ancien français

raser \Prononciation ?\

  1. Raser.
    • Char et caviax jus de son cief rasé — (Hervis de Metz, édition de E. Stengel, p. 353, 1200-25. Jus, préposition, vers le bas, ici traduit par le verbe tomber.)
      Chair et cheveux tombent de sa tête rasée

Verbe - français

raser \ʁɑ.ze\ (voir la conjugaison) (voir la conjugaison) ou \ʁa.ze\ transitif ou pronominal 1er groupe (voir la conjugaison) (pronominal : se raser)

  1. Tondre, couper le poil ou les cheveux tout près de la peau avec un rasoir.
    • […] que Dieu permettait bien aux Juifs de se marier avec leurs captives et de changer des Moabites en filles de Sion, pourvu qu'ils leur rognassent les ongles, qu'ils leur rasassent les cheveux, et qu'ils pratiquassent à leur égard diverses purifications : […]. — (Pierre Bayle, Pensées diverses sur la comète, 1682, éd. E. Cornély et cie, tome 1, 1911, p. 223)
    • Le front de Victor Hugo fera raser autant de crânes, que la gloire de Napoléon a fait tuer de maréchaux en herbe. — (Honoré de Balzac, Modeste Mignon, 1844)
  2. (En particulier) (Absolument) Couper le poil de la barbe au plus près de la peau.
    • Toilette du bataillon. Le barbier passe pour particulièrement francophile. Tout le monde va se raser chez lui. — (Jean Giraudoux, Retour d’Alsace - Août 1914, 1916)
    • Par un mystérieux tour de force, il avait réussi à se raser et à lisser ses cheveux dorés. Son visage était tout à fait séraphique. — (H. G. Wells, La Guerre dans les airs, 1908, traduction d’Henry-D. Davray et B. Kozakiewicz, Mercure de France, Paris, 1910, page 262 de l’édition de 1921)
    • Son imperméable fripé détonnait avec sa nouvelle élégance : il en fit une boule et la jeta dans la corbeille à papiers. Qu'on le rasât de près, qu'on lui fît un massage facial, et une manucure : il serait d'attaque. — (Claude Cariguel, L'insolence, Éditions Robert Laffont, 1967, chap. 2)
  3. Abattre à ras de terre, en parlant d’un édifice ou d’un bâtiment.
    • Le cardinal ne se contenta pas de faire raser les fortifications de la Rochelle , il voulut encore que celles du Fort-Louis, et la citadelle de Saint-Martin dans l'isle de Rhé fussent entièrement démolies. — (Henri Griffet, Histoire du règne de Louis XIII, roi de France et de Navarre, tome 1, Paris : chez les Libraires associés, 1758, page 624)
    • Il allait falloir raser la maison pour construire un nouveau bâtiment à sa place. — (Salman Rushdie, La Maison Golden, roman traduit de l'anglais par Gérard Meudal, Actes Sud Littérature, 2018, chap. 35)
  4. (En particulier) (Marine) Ôter à un navire la partie supérieure de ses œuvres mortes.
    • […]; vous êtes de la même année que cette pauvre Junon, le meilleur voilier qui soit jamais entré dans le port de Saint-Malo; et je me souviens même que, peu de jours après notre mariage, on la fit raser pour en faire un ponton. — (Germaine de Staël, « Le Capitaine Kernadec ou Sept années en un jour », acte 1, scène 2, fin de 1810, dans les Œuvres complètes de Madame la baronne de Staël-Holstein, tome 2, Paris : chez Firmin Didot frères & chez Treuttel & Würst, 1836, p. 662)
  5. Passer tout près ; effleurer.
    • Je me rappelai le vol dans le fameux « pot au noir », le long de la côte de l’Amérique du Sud, où je fus obligé de raser les flots jusqu’à tremper les roues du Nungesser-Coli dans la crête d’une haute vague. — (Dieudonné Costes et Maurice Bellonte, Paris-New-York, 1930)
    • Un boulet de canon lui rasa l’épaule.
    • Une balle lui rasa le visage.
    • Une hirondelle qui rase le sol, la surface de l’eau.
    • La balle du joueur a rasé la corde, le filet.
    • Nous rasâmes le rocher de bien près.
  6. (Par ellipse) (Hippologie) Ne presque plus marquer; la cavité des incisives ne paraissant plus, ou presque plus.
    • Il y a lieu de remarquer que la béguité des coins est très prononcée, et extrêmement commune; le plus souvent ces dents n’ont pas encore rasé à 10, 11 ans et même plus tard. — (Journal de médecine vétérinaire et de zootechnie, vol. 67, A. Rey, 1921, page 745)
  7. (Populaire) Ennuyer par des propos longs et oiseux.
    • Le docteur me rase avec les sciences exactes ou soi-disant exactes. — (Jehan Rictus, Journal quotidien, cahier 24, p. 18, 21 juin 1902)
    • - D’accord. Je passerai les prendre plus tard, dit-il en se frottant la joue du dos de la main pour montrer à quel point elle le rasait. — (Tito Topin, Shanghai Skipper, Série noire, Gallimard, 1986, page 30)
  8. (Populaire) Enlever, soustraire.
    • Rivaux comme tous bons chasseurs, c’était à qui raserait à l’autre le lièvre indiqué, et le roulé subissait naturellement les quolibets du vainqueur. — (Louis Pergaud, Un renseignement précis, dans Les Rustiques, nouvelles villageoises, 1921)
  9. (Pronominal) Se dit d’une perdrix ou d’un lièvre qui se tapit le plus qu’il peut contre terre pour se cacher. Se dit aussi du chasseur.
    • Les perdrix se rasent quand elles aperçoivent l’oiseau.
    • « Rase-toi ! Rase-toi ! » me dit le vieux en se baissant. — (Alphonse Daudet, Les émotions d’un perdreau rouge, dans Contes du lundi, 1873, Fasquelle, collection Le Livre de Poche, 1974, page 220.)
    • La chasse même ne l'intéressait plus qu'à peine. S'il lui arrivait à présent de trahir un lapin au taillis, assis sur son derrière [...], son cœur ne battait pas plus fort, il ne se rasait plus soudain comme un renard ou un chat à l'affût. — (Maurice Genevoix, Raboliot, 1925, quatrième partie, chapitre 2, p. 221 de l'édition du Livre de Poche)


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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

RASER. v. tr.
Tondre, couper le poil tout près de la peau avec un rasoir. Se raser, se faire raser la barbe. Se faire raser la tête. On condamnait autrefois les femmes convaincues d'adultère à être rasées et enfermées dans un couvent. Il se dit particulièrement en parlant de la Barbe; et alors il s'emploie toujours absolument. Un coiffeur qui rase bien, qui rase mal, qui ne rase pas assez près. Un rasoir qui rase mal. Se faire raser. Se raser soi-même. Prov. et fig., Un barbier rase l'autre, se dit Lorsque des gens d'une même profession, ou ayant un intérêt commun, se soutiennent, se louent réciproquement.

RASER, en parlant d'un Édifice, d'un bâtiment, signifie Abattre à ras de terre. Raser une maison. On a rasé les fortifications, les défenses de cette ville. Raser une place. Raser un vaisseau, Ôter à un vaisseau la partie supérieure de ses œuvres mortes. On a rasé ce bâtiment pour en faire un ponton.

RASER signifie encore Passer tout auprès, effleurer. Un boulet de canon lui rasa l'épaule. Une balle lui rasa le visage. Une hirondelle qui rase le sol, la surface de l'eau. Ce charretier a rasé la borne. La balle du joueur a rasé la corde, le filet. Le bâtiment rasa un écueil. Nous rasâmes le rocher de bien près. Raser la côte, Naviguer le long de la côte. La flotte rase la côte. Raser les murs se dit de Quelqu'un qui, en marchant, passe tout près des murs, afin d'échapper le plus possible aux regards. Figurément, il se dit de Quelqu'un qui essaie de passer inaperçu. En termes de Manège, Ce cheval rase le tapis, Ses épaules ont peu de mouvement, et il ne relève point assez en marchant; les pieds sont trop près de terre, il va butter. Absolument, Ce cheval rase, commence à raser, Il ne marque presque plus; la cavité des dents incisives ne paraît plus, ou presque plus. En termes de Chasse, Se raser, être rasé, se dit d'une Perdrix ou d'un lièvre qui se tapit le plus qu'il peut contre terre pour se cacher. Les perdrix se rasent quand elles aperçoivent l'oiseau. Ce lièvre était rasé dans son gîte.

RASER, dans le langage populaire, signifie Ennuyer par des propos longs et oiseux.

Littré (1872-1877)

RASER (ra-zé) v. a.
  • 1Couper le poil tout près de la peau. Raser la tête. Ils ne se rasent jamais le menton. Une des plus difficiles entreprises du fondateur [le czar Pierre Ier] fut d'accourcir les robes, et de faire raser les barbes de son peuple ; ce fut là l'objet des plus grands murmures, Voltaire, Russie, Anecdotes.

    Absolument, raser se dit pour raser la tête, en parlant des personnages politiques qu'au moyen âge on enfermait dans les couvents. Après cette réponse favorable [du pape], Pépin fut sacré roi à Soissons par les évêques, avec le suffrage unanime des grands et du peuple, et Childéric rasé et mis dans un monastère, Dumarsais, Œuv. t. VII, p. 121. Les vainqueurs se contentèrent de faire raser l'impératrice, de la mettre en prison en Lombardie…, Voltaire, Mœurs, 23.

    Familièrement. Ruiner, anéantir. Toutes ces belles espérances ont été rasées par une dyssenterie, Patin, Nouv. lett. t. I, p. 169, dans POUGENS.

  • 2Il se dit particulièrement de la barbe, et alors il se dit sans le mot barbe. Que le prédicateur vienne à paraître ; si… et que son barbier l'ait mal rasé, Pascal, Pens. III, 3, éd. HAVET. Il sollicitait l'autre jour à Rennes avec une grande barbe ; quelqu'un lui demanda pourquoi il ne se faisait point raser…, Sévigné, 58.

    Absolument. Un perruquier qui rase bien. Ce rasoir rase mal.

  • 3Abattre, démolir une construction rez terre. Si vous ne me remettez Judas lié entre les mains, je raserai jusqu'en terre ce temple de Dieu, Sacy, Bible, Machab. II, 14, 33. Rien ne fut plus capable de flatter ce peuple [romain] que la promptitude avec laquelle le consul Publicola fit raser dans une nuit sa maison, sur quelques murmures qu'on faisait contre sa situation élevée, Rollin, Traité des Ét. V, III, 2.

    On dit de même : raser une place. On lui impose [au landgrave de Hesse] pour condition de venir embrasser les genoux de l'empereur, de raser toutes ses forteresses, à la réserve de Cassel ou de Ziegenheim…, Voltaire, Ann. Emp. CharlesQuint, 1547.

  • 4Il se dit du canon qui démolit les parties supérieures d'une fortification. Ceux qui raisonnent croient communément qu'on sera sur la contrescarpe la nuit du samedi au dimanche, après avoir rasé avec le canon une partie des ouvrages, Pellisson, Lett. hist. t. III, p. 9.

    Terme de marine. Raser un navire, lui enlever une certaine partie de ses œuvres mortes pour l'alléger.

    Lui abattre ses mâts dans un combat.

  • 5Passer tout auprès. Harlay rasait toujours les murailles pour se faire place avec plus de bruit, Saint-Simon, 17, 198. Il [Cassini] avait pris ses mesures si justes, que la méridienne alla raser les deux dangereuses colonnes qui avaient pensé faire tout manquer, Fontenelle, Cassini. Je les y menai en rasant la muraille, Marivaux, Pays. parv. 5e part. …Une lame de couteau ou de verre dont la pointe est rasée par les rayons du soleil dans une chambre obscure ; on sait que les rayons s'infléchissent, se portent vers cette lame…, Voltaire, Nat. du feu. I, 4. Les rayons du soleil levant rasaient déjà les plaines, Rousseau, Ém. IV. D'abord un bruit léger rasant le sol de la terre comme l'hirondelle avant l'orage, Beaumarchais, Barb. de Sév. II, 8.

    Raser la côte, naviguer le long de la côte. Montons sur ma barque légère, Que ma main guide sans efforts, Et de ce golfe solitaire Rasons timidement les bords, Lamartine, Médit. I, 21.

    Fig. Raser la terre, se tenir dans une condition humble et retirée. Je ne fais que raser la terre, et je m'en console, Caraccioli, Lett. recréat. et mor. t. I, p. 27, dans POUGENS.

  • 6Passer tout auprès avec rapidité. Ce cocher a rasé la borne. La balle du joueur a rasé la corde. Une balle lui rasa le visage, et, familièrement, lui rasa la moustache. [Mercure] Vient, rasant le bord lybien, Fondre où le prince phrygien, Avec Didon d'amour ravie, Menait une fort laide vie, Scarron, Virg. IV. Boirude fuit le coup : le volume effroyable Lui rase le visage, Boileau, Lutr. V. Sur l'herbe tendre elles formaient leurs pas, Rasant la terre et ne la touchant pas, Voltaire, Ce qui plaît, etc. Les hirondelles qui rasent la terre annoncent la pluie, Voltaire, Dict. phil. Augure. Je demande s'il n'est pas probable qu'il tombe de temps à autre des comètes dans le soleil, puisque celle de 1680 en a, pour ainsi dire, rasé la surface, Buffon, 1re ép. nat. Œuv. t. XII, p. 79. [Un oiseau qui] Rase tantôt la rive et tantôt les prairies, Delille, Én. XI.

    Terme de fauconnerie. Raser l'air, se dit de l'oiseau qui plane. L'herbe l'aurait portée ; une fleur n'aurait pas Reçu l'empreinte de ses pas ; Elle semblait raser les airs, à la manière Que les dieux marchent dans Homère, La Fontaine, Poés. mêl. LXV.

  • 7 Terme de manége. On dit qu'un cheval rase le tapis, lorsque, dans ses allures, il ne relève pas assez les pieds et semble glisser à la surface du sol.
  • 8 Terme de métallurgie. Faire raser la tuyère dans un fourneau, en diminuer l'inclinaison.
  • 9Dans l'argot des artistes actuels, raser, contraindre quelqu'un à vous écouter en lui tenant des discours ennuyeux ; la métaphore est prise du barbier qui vous tient dans son fauteuil et vous force d'entendre ses bavardages pendant qu'il opère.
  • 10 V. n. En termes de vétérinaire, on dit qu'un cheval rase ou a rasé, lorsque la cavité de ses incisives s'efface ou est déjà effacée ; alors on ne peut plus connaître son âge à ses dents.
  • 11Se raser, v. réfl. Se faire la barbe. Savoir se raser. Scipion Émilien fut le premier romain qui se rasa tous les jours, Pastoret, Inst. Mém. hist. et litt. anc. t. III, p. 334.

    Il signifie quelquefois se faire raser. Il se rase rarement. Quand voulez-vous vous raser ? Je ne veux me raser que demain.

  • 12 Terme de chasse. Se raser, se dit du gibier qui s'étend à ras le sol pour n'être pas vu.

    Il se dit d'une semblable attitude chez tout animal. Il [le tigre] avait pris l'attitude que les chasseurs de tigres et de panthères appellent se raser ; il était resté immobile sous les branches, les yeux fixés sur son ennemi, et le corps aplati contre terre, Anaïs Ségalas, Feuilleton de l'Écho d'Oran, du 16 mai 1867.

  • 13 En termes de construction de chemin de fer, se raser, suivre le niveau du sol. Quand on se rase au niveau des vallées, on ne trouve certainement ni tunnel, ni viaduc à faire, Moniteur universel, 5 juin 1868, p. 776, 4e col.

    PROVERBE

    Un barbier rase l'autre, se dit de gens qui se soutiennent et se louent réciproquement.

HISTORIQUE

XIIe s. Cil rasarent lor barbes, Job, p. 446. Il i out mis du feu tout rasé un tonel [un tonneau plein de feu à ras] ; Les douves sont emprises, si rompent li cercel, Sax. IX. Mout [ils] ont lor ennemis rasez et damagiez ; Mout ferirent bien tuit [tous] de bonne volenté, Rou, ms. p. 58, dans LACURNE.

XIIIe s. Le fort haubert [il] lui dessartit, L'espée lui rase au costé, Si que du cuir lui a osté, Bl. et Jeh. 4151.

XIVe s. [à] ung chevallier [il] donna De l'espée tel cop que le bras ly rasa, Hugues Capet, V. 3799. Sire, dit un bourjois, qu'on nommoit Tolomer, Avez-vous si tost fait telle ville raser ? Guesclin. 21416.

XVe s. De venir les queues [tonneaux] raser [racler], Deschamps, Poésies mss. f° 474. Et fit razer toutes les tours et murailles, Commines, II, 4. Le suppliant, pour doute que icellui Jouel ne lui fist pis, se rasa de lui [se rangea], et sacha son espée du fourreau, Du Cange, rasare.

XVIe s. Et ne convient que le los on me rase [enlever, faire perdre], D'avoir passé le haut mont de Caucase, Marot, IV, 129. Aultrement le coup, qui ne lui raza que le dessus de la teste…, Montaigne, I, 50. On leur rasoit les cheveux, on les faisoit aller deschaux, Amyot, Lyc. 34. En parlant des vertus royales, il met ceste-ci au nombre, de raser les meschans de la terre, Calvin, Instit. 1199. Lansac faisant lever ses ancres fit contenance de descendre en Ré, et en rasant l'isle…, D'Aubigné, Hist. II, 294.

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Encyclopédie, 1re édition (1751)

RASER, v. act. (Gramm.) c’est abattre une chose au ras d’une autre. Raser la barbe, c’est la couper au ras du visage ; une maison, c’est l’abattre à ras de terre. Raser signifie aussi toucher légerement. Cette balle a rasé la corde. Voyez les articles suivans.

Raser, (Critique sacrée.) La loi portoit que les lévites pour exercer leurs fonctions fussent purifiés, & eussent tout le poil du corps rasé. Nomb. viij. 7. Les lépreux, au septieme jour de leur purification, devoient en faire autant. Lév. xiv. 9. Dans les grandes calamités, tout le peuple ne devoit paroître que rasé. Is. xv. 2. Les prêtres seuls étoient exceptés de la loi. Lév. xxj. 5. Quelquefois cependant on laissoit croître sa barbe pour marquer le deuil, ou la part qu’on prenoit aux malheurs d’un ami. Raser toute la barbe & tous les cheveux de quelqu’un, ou la moitié de l’un & de l’autre, c’étoit chez les Juifs une très grande insulte. II. Rois, x. 4. Ainsi raser tous les poils est une expression figurée qui veut dire outrager, maltraiter avec la derniere rigueur ; c’est pourquoi quand Isaïe, vij. 20, déclare que l’Eternel empruntera un rasoir pour raser le poil du corps de son peuple, ces paroles signifient que Dieu se servira pour punir son peuple du glaive des Assyriens. Raser la poussiere d’une ville, dans le langage du même prophete, ch. xij. v. 25, c’est ruiner une ville de fond en comble. (D. J.)

Raser la maison, (Hist. anc. & mod.) c’étoit chez les Romains une des peines de celui qui aspiroit à la tyrannie. Valere Maxime, liv. VI. ch. iij. rapporte que Sp. Cassius convaincu d’avoir tenté de se rendre maître de la république, fut condamné par le sénat & par le peuple à la mort, dont trois consulats & un magnifique triomphe ne purent le garantir. Le peuple n’étant point encore satisfait, on abattit sa maison pour augmenter son supplice, par la destruction de ses dieux domestiques : Ut penatium quoque strage puniretur.

On sévit aujourd’hui de la même maniere contre les coupables de lése-majesté ; & l’assassinat du roi de Portugal vient d’être suivi du bannissement de l’ordre entier des Jésuites hors de ce royaume, & de la démolition de toutes leurs maisons.

Raser, (Marine.) c’est ôter à un vaisseau ce qu’il a d’œuvres mortes sur les hauts.

Raser, terme de Maréchal. Ce mot se dit en parlant des coins ou dents du cheval. Un cheval qui rase ou qui a rasé, est un cheval qui n’a plus les coins creux, c’est-à-dire dont la dent est rase & unie : ce qui arrive environ à la huitieme année du cheval. Ecole du manege. (D. J.)

Raser, en terme de Layettier, c’est mettre l’extrémité des planches de niveau entr’elles.

Raser, terme de Chasse. Ce mot se dit du gibier qui se tapit contre terre pour se cacher. La perdrix se rase quand elle apperçoit des oiseaux de proie.

Raser l’air, terme de Fauconnerie. Il se dit de l’oiseau lorsqu’il vole sans remuer presque les aîles, & sans daguer.

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Étymologie de « raser »

Ras 1 ; wallon, rezé. Radere avait donné raire.

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(Date à préciser) Du latin vulgaire *rasare (fréquentatif fait sur le supin rasum) de radere (« raser », « gratter, polir, ratisser »).
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(Date à préciser) Du latin vulgaire *rasare (fréquentatif fait sur le supin rasum) de radere (« raser », « gratter, polir, ratisser »).
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Phonétique du mot « raser »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
raser raze

Fréquence d'apparition du mot « raser » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « raser »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « raser »

  • Femme. C’est pire que paysan - semis, arrosage, arrachage... Jambes à épiler, aisselles à raser, ongles à limer... Un programme si rigoureusement exigeant qu’il suffit de se laisser aller quelques jours pour se retrouver en jachère.
    Helen Fielding — Le Journal de Bridget Jones
  • Quand on est encore trop jeune pour se raser, l'optimisme est une réaction tout à fait légitime à l'échec.
    Stephen King
  • Barbe. Poils qui sont habituellement coupés par ceux qui estiment à juste titre que la coutume chinoise de se raser la tête est absurde.
    Ambrose Bierce — Le dictionnaire du Diable
  • Paniquée, elle tente de retirer ce qu’elle a sur sa tête… En vain. Emmenée à l’hôpital, les soignants lui apprennent qu’elle a probablement reçu de la colle sur la tête. Ce qui lui a laissé des brûlures au second degré et l’a forcée à se raser entièrement le crane, rapporte Lad Bible.
    Metro — Agressée par un inconnu qui arrivait avec des fleurs, elle souffre de brûlures au deuxième degré
  • Il sera possible d’assister virtuellement à cette activité pendant laquelle Arianne se fera raser la tête en allant sur la page Facebook : «Un Défi tête rasée pour ses 18 ans».
    La Nouvelle Union et L'Avenir de l'Érable — Elle se fera raser la tête pour ses 18 ans... pour une bonne cause! - La Nouvelle Union et L'Avenir de l'Érable
  • Objet de tensions diplomatiques entre les Etats-Unis et la Corée du Sud, la moustache de l'ambassadeur américain à Séoul n'est plus. Harry Harris est allé faire un tour ce week-end chez un barbier pour la raser, après des mois de polémiques.
    CNEWS — Pourquoi l'ambassadeur américain en Corée du Sud a dû raser sa moustache | CNEWS
  • Avec la tendance des culottes de maillot échancrées, on a souvent pas trop le choix de raser cette région intime avec délicatesse, et précision.
    billie — Voici comment éviter les boutons et l’irritation du bikini lors du rasage | billie
  • Quand on est encore trop jeune pour se raser, l'optimisme est une réaction tout à fait légitime à l'échec.
    Stephen King
  • Barbe. Poils qui sont habituellement coupés par ceux qui estiment à juste titre que la coutume chinoise de se raser la tête est absurde.
    Ambrose Bierce — Le dictionnaire du Diable
  • Jambes à épiler, aisselles à raser, ongles à limer.
    Helen Fielding — Le Journal de Bridget Jones
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Images d'illustration du mot « raser »

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Traductions du mot « raser »

Langue Traduction
Anglais shave
Espagnol afeitar
Italien radere
Allemand rasieren
Chinois 刮胡子
Arabe للحلاقة
Portugais barbear
Russe бриться
Japonais ひげをそる
Basque bizarra egiteko
Corse da rasà
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Synonymes de « raser »

Source : synonymes de raser sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « raser »

Combien de points fait le mot raser au Scrabble ?

Nombre de points du mot raser au scrabble : 5 points

Raser

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