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Rire

Définitions de « rire »

Trésor de la Langue Française informatisé

RIRE1, verbe

I. − Empl. intrans.
A. − [Le suj. désigne une pers.]
1.
a) Manifester un état émotionnel, le plus souvent un sentiment de gaieté, par un élargissement de l'ouverture de la bouche accompagné d'expirations saccadées plus ou moins bruyantes et un léger plissement des yeux. Synon. fam., pop. se bidonner, s'esclaffer, se fendre* la pêche, la pipe, se gondoler, se marrer, pouffer, rigoler1, se tordre.[L'oncle Adolphe] rit de tout son cœur. Ça ne lui arrive pas souvent. Alors, je questionne, inquiète: − Je suis grotesque?... − Non (...) Tu es drôle! (Gyp,Souv. pte fille, 1928, p. 160).
SYNT. Rire doucement, très fort, tout bas, tout haut; rire sans sujet, hors de propos, pour un rien; rire de surprise, d'un jeu de mots; commencer, se mettre, se prendre à rire; partir d'un éclat de rire; ne pouvoir s'empêcher de rire; s'arrêter, finir, faire semblant, avoir envie, donner envie de rire; se mordre, se pincer les lèvres pour ne pas rire; crever, crouler, éclater, étouffer, s'étouffer, s'étrangler, mourir, pisser, pouffer, se tordre de rire.
[Dans une tournure factitive] Faire rire le public, les spectateurs; aimer à faire rire; bouffonnerie, boutade, facétie, plaisanterie qui fait rire. On raconte des historiettes qui font rire ou pleurer (Faure,Hist. art, 1909, p. 114):
L'auteur comique ne doit pas se poser les questions rituelles: « Comment faire rire? − Par le comique. − Comment le comique fait-il rire? − Parce qu'il y a dégradation. − Mais pourquoi la dégradation fait-elle rire? − Parce qu'elle est désharmonique. Arts et litt., 1935, p. 80-12.
Locutions
[Suivi d'un compl. marquant l'intensité] Rire aux éclats (v. éclat); rire à gorge* déployée; rire comme une baleine*, comme un bossu*; rire à se décrocher la mâchoire*; rire de toutes ses dents (v. dent C 5); rire aux larmes, jusqu'aux larmes (v. larme I A 8); rire à ventre déboutonné*; rire comme un fou, comme des fous (v. fou1II B 2).
[Suivi d'un compl. marquant la modalité] Rire de bon cœur. Comme toujours, pendant les entretiens qu'elle avait avec son aîné, Suzanne, oubliant sa colère, se prit à rire de bon cœur, un vrai rire de théâtre, musical et cristallin (Duhamel,Suzanne, 1941, p. 203).Rire à contre-cœur*; rire jaune (v. ce mot II B); rire sous cape (v. cape1); rire dans sa barbe (v. barbe1B 1). Rire du bout des dents, rire du bout des lèvres. Rire sans en avoir envie, avec réticence. Elle ne riait plus de bon cœur, ou bien elle riait du bout des lèvres, mais elle ne riait pas des yeux (Lamart.,Tailleur pierre, 1851, p. 474).
Rire intérieurement. Contenir son envie de rire. Le moudir (...) avec son bec d'aigle qui se recourbe sur sa bouche, ne cessait pas de rire intérieurement (Barrès,Cahiers, t. 10, 1914, p. 392).
Expressions
C'est Jean qui pleure et Jean qui rit. V. pleurer I A 2 a.
Se chatouiller pour se faire rire. V. chatouiller A.
Se tenir les côtes de rire. Rire démesurément. Rouletabille et moi nous n'en pouvions plus et nous nous tenions les côtes de rire (G. Leroux,Parfum, 1908, p. 64).
Être à mourir de rire. Être très ridicule. Avec sa toilette extravagante, elle est à mourir de rire (Ac.1878, 1935).C'est à mourir de rire, c'est à crever de rire (pop.). C'est très drôle ou c'est entrêmement ridicule, grotesque. Tu pleures? Alors ça, c'est à mourir de rire! J'ai couché avec, je ne sais pas, quelques centaines de types (Aragon,Beaux quart., 1936, p. 421).Tu me dirais deux mille francs! Mais trente mille francs, c'est à mourir de rire (Duhamel,Passion J. Pasquier, 1945, p. 86).
Et de rire (en terminant un récit). Et de se mettre à rire. Souvent je tirais ma pipe de ma bouche pour lui demander s'il savait quand Monsieur Barrès s'engagerait pour la durée de la guerre. Et de rire (Alain,Propos, 1936, p. 293).
Proverbes
Tel qui rit vendredi, dimanche pleurera. V. pleurer I A 2 c.
Rira bien qui rira le dernier. L'affaire aura des suites, j'aurai ma revanche. Rira bien qui rira le dernier, murmura sir Williams dont l'œil étincela, et chez qui le nom de Baccarat souleva des tempêtes de haine et de courroux (Ponson du Terr.,Rocambole, t. 3, 1859, p. 313).
b) P. méton. [Le suj. désigne un élément du visage] Avoir une expression de gaieté. Synon. sourire.Ma mère me gronda, mais avec de la gaieté: je le vis à ses yeux qui riaient (A. France,Livre ami, 1885, p. 43).
2. Au fig.
a) Vieilli. [L'action de rire est signe de gaieté, de plaisir, de joie] S'amuser, prendre du bon temps, faire la noce. Aimer à rire; ne penser, ne songer qu'à rire. Les filles y étaient très sages [à Lourdes], il y a quarante ans. Je me souviens que, dans ma jeunesse, lorsqu'un garçon voulait rire, il n'y avait pas ici plus de trois ou quatre dévergondées pour le satisfaire (Zola,Lourdes, 1894, p. 278).
Expr. Avoir le mot pour rire. V. mot II C 2.
Loc. proverbiale. Plus on est de fous, plus on rit. V. fou1II B 2.
b) [L'action de rire exprime la dérision, la moquerie; dans une tournure factitive] Faire rire.Exciter la moquerie. De quelque argumentation qu'on le justifie, un monstre fera toujours rire (Cassou,Arts plast. contemp., 1960, p. 175).
Expr. fam. Vous me faites rire. Vos propos sont ridicules. Quand vous me dites que vous devez à mon oncle cette espèce de sang-froid devant le bien et le mal, vous me faites rire (Bernanos,Mauv. rêve, 1948, p. 880).
Loc. et expr.
Rire au nez de qqn. V. nez II.
Laissez-moi rire (fam.). Ce que vous dites est ridicule. Elle nous a souvent répété que s'il ne s'était agi que de l'argent de ses enfants (...), elle n'aurait jamais eu ce courage... − c'est possible, parce qu'elle a eu à certaines époques, la maladie du scrupule: son seul point faible... Oncle Alfred protesta, d'un air cafard, « que c'était ce qu'il y avait d'admirable en elle ». Dussol haussait les épaules: − Allons, laissez-moi rire (Mauriac,Myst. Frontenac, 1933, p. 217).
c) [P. réf. au caractère gratuit de l'action de rire, p. oppos. à ce qui est sérieux, important] Ne pas agir ou ne pas parler sérieusement. Synon. badiner, blaguer (fam.), plaisanter.Dire, faire qqc. en riant; avoir l'air de rire; ne pas, ne plus rire. Ernest me disait l'autre jour (...) que je marchais façon d'un gendarme à pied. − Il aura voulu rire, protesta Honoré. Un gendarme à pied! − Tu penses aussi? Oui, il aura voulu rire (Aymé,Jument, 1933, p. 294).
Loc. et expr.
Histoire de rire (fam.). En manière de plaisanterie. − Pourquoi que t'as fait ça, Georgina? Pourquoi que t'as fait ça? Elle haussa les épaules: − On blaguait. Histoire de rire... Ça se fait à la fin d'une danse (Van der Meersch,Invas. 14, 1935, p. 175).
Pour rire, pour de rire (pop. ou lang. enf.). Pour plaisanter, pour faire semblant. Dire, faire qqc. pour rire; c'est pour de rire. Petit roi Loc, je veux bien être ta femme pour rire; mais je ne serai jamais ta femme pour de bon (A. France,Balth., Abeille, 1889, p. 227).Avec valeur d'adj. Guerre, roi pour rire. Le maréchal d'Ancre, maréchal pour rire, a, sur le secrétaire, des canons et des attributs de guerre en nacre (Balzac,Lettres Étr., t. 2, 1843, p. 248).Ceci (...) n'est pas un duel pour rire; il faut qu'un des deux reste sur le carreau (A. Daudet,Crit. dram., 1897, p. 60).
Vouloir rire (fam.). Vouloir plaisanter; tenir des propos ridicules ou peu crédibles. Je crois qu'il veut rire. − Oui, oui, c'est vrai, je voulais rire; ne fais plus attention à ce que j'ai dit (Lautréam.,Chants Maldoror, 1869, p. 155).Vous voulez rire. Le Monsieur: Le quartier n'est pas sûr (...). Or, la profession que j'exerce m'oblige à rentrer tard chez moi. Le Commissaire: Exercez-en une autre. Le Monsieur: Je veux bien. Trouvez m'en une. Le Commissaire: Vous voulez rire, j'imagine. Est-ce que vous vous croyez dans un bureau de placement? (Courteline,Client sér., Commissaire bon enfant, 1900, i, p. 155).
Sans rire (loc. adv.). Sans plaisanter, sérieusement. En cette méphitique officine, il lui fut révélé que l'on songeait sans rire à lui donner une femme (Mauriac,Baiser Lépreux, 1922, p. 161).
B. − P. anal.
1. Domaine des sensations auditives
a) [Le suj. désigne un animal] Pousser des cris aigus et saccadés. L'hyène rit, le chacal miaule, Et, traçant des cercles dans l'air, L'épervier affamé piaule, Noire virgule du ciel clair (Gautier,Émaux, 1852, p. 44).Parfois, au dessus de ma tête un vol de canards (...) une mouette qui rit, miaule et grince (Arnoux,Rhône, 1944, p. 369).
b) [Le suj. désigne une chose concr.] Émettre, produire un bruit, un son alerte, gai. Il a probablement cherché une cuiller, car j'ai entendu rire de l'argenterie (Sue,Myst. Paris, t. 1, 1842, p. 302).L'orchestre [dans l'Opéra Fidelio de Beethoven] (...) a son rôle nettement défini, chante sans cesse, rit, pleure, s'agite, souffre (Bruneau,Mus. hier et demain, 1906, p. 197).
2. Domaine des sensations visuelles, au fig., littér.
a) [Le suj. désigne une chose concr., en partic. un élément de végétation en pleine floraison ou fructification] Présenter un air de gaieté, un aspect agréable, plaisant. Tout rit dans cette maison; le ciel rit. L'azur rit sur la haie (Mallarmé,Poés., 1898, p. 34).Des arbres ployaient sous leur charge de fleurs. Les vergers riaient (Estaunié,Solitudes, 1917, p. 99).
b) Poét. Que de choses verrons-nous, chère, Dans ces taudis, Quand la flamme illumine, claire, Les carreaux gris!... − Puis, petite et toute nichée Dans les lilas Noirs et frais: la vitre cachée, Qui rit là-bas... Tu viendras, tu viendras, je t'aime! (Rimbaud,Poés., 1871, p. 68).
[Dans une tournure factitive] Que signifie le mot dessin dans ces surfaces remuantes que le drame tord, convulse et bossèle par le dedans pour amener l'expression spirituelle à quelques saillies dominantes qui font rugir, soupirer, rire ou chanter la couleur? La couleur elle-même bouge. Elle vibre, elle hésite ou s'affaisse, monte et descend comme la mer (Faure,Hist. art, 1921, p. 170).
II. − Empl. trans. indir.
A. − Rire de qqn/de qqc.
1. [L'action de rire exprime la dérision, la moquerie] Rire de qqn, de qqc.Se moquer de, railler. Rire des fous, des gens; rire des manières, de la naïveté, de la sottise de qqn; rire de soi-même. Tout le monde vous hait quand vous êtes difforme (...) Elle m'aime, elle! − elle est ma joie et mon appui. Quand on rit de son père, elle pleure avec lui (Hugo,Roi s'amuse, 1832, p. 484).Les mystiques l'agaçaient un peu. Il riait d'eux (comme un religieux peut rire des mystiques), surtout des femmes (Green,Journal, 1944, p. 96).
Loc. et expr.
Il vaut mieux en rire qu'en pleurer ou mieux vaut en rire qu'en pleurer. Mieux vaut s'en moquer que s'en attrister. Le cas n'est pas unique Chez nous, de ce baron cynique; Et l'on ne saurait dénombrer Tous les contempteurs de la lyre, Dont beaucoup ne savent pas lire. Mieux vaut en rire qu'en pleurer (Ponchon,Muse cabaret, 1920, p. 218).
Pincer sans rire (vieilli). V. pincer I A 4.Pince-sans-rire*.
Il n'y a pas de quoi rire. La chose est grave; c'est très sérieux, il n'y a pas de quoi plaisanter. « (...) R. L. est en train de devenir un mouvement anticommuniste. » Henri se mit à rire: « En effet! Je n'aurais jamais trouvé ça tout seul! − Il n'y a pas de quoi rire! » (Beauvoir,Mandarins, 1954, p. 144).
Absol. Se moquer, railler. Donner matière à rire; apprêter, prêter à rire. Chez lui [Le Sage], point de rancune ni d'amertume (...). Par là surtout il se distingue de Voltaire, qui mord et rit d'une façon âcre (Sainte-Beuve,Caus. lundi, t. 2, 1850, p. 364).
2. [L'action de rire exprime l'indifférence, le dédain] Rire de qqc.Ne pas se soucier, ne pas tenir compte de. Synon. se moquer.Rire des avertissements, des menaces, des remontrances de qqn. Ses menaces ne m'étonnent point, je n'en fais que rire (Ac.).
B. − Rire à qqn.Synon. sourire à.
1. Vieilli. Témoigner de la sympathie, de l'affection... à quelqu'un en lui montrant un visage souriant. Chaque fois que je levais les yeux, je voyais son regard tendre comme celui d'une mère, qui me riait doucement (A. Daudet,Pt Chose, 1868, p. 163).Jeanne et Lucie s'étaient penchées, pour rire encore à leur père, resté debout au bord du chemin (Zola,Germinal, 1885, p. 1395).
Expr. Rire aux anges. V. ange II C.
2. Au fig. [Le suj. désigne une chose]
a) Vieilli. Être agréable à; être favorable à. Tout lui rit; la fortune lui rit. Heureux qui le peut [oublier la mort]! C'est à lui que rit le pouvoir, la popularité, la richesse (Valéry,Lettres à qq.-uns, 1945, p. 81).
b) Littér. Être agréable à la vue de quelqu'un, plaire à. Au bout de l'allée (...) s'élevait un château de pierre et de brique, aussi morose que celui de Madrid (...). − Je vous confesse (...) que le logis ne rit point aux yeux (A. France,Rôtisserie, 1893, p. 64).
C. − Se rire de qqn/qqc.
1. Se gausser, se moquer de. Elles se sont ri de nous. Il se rit de vos vains projets (Ac.).
2. Traiter par le mépris, le dédain; ne pas se soucier, ne pas faire cas de. Synon. faire fi de (fam.), ignorer, mépriser.Ô vieux Denis! Je me ris de ton glaive, Je bois, je chante, et je siffle les vers (Béranger,Chans., t. 3, 1829, p. 79).Le Seigneur se rit du méchant et soutient les justes. Il aime la justice (Théol. cath.t. 4, 11920, p. 974).
D. − Se rire de qqc.Venir facilement à bout de; triompher aisément de. Synon. se jouer de.Se rire des difficultés, des menaces, des obstacles. Chèvres et moutons se rient des murettes et des talus (Meynier,Paysages agraires, 1958, p. 167).Les costumes des paysannes ont une fraîcheur et un éclat qui se rient de la poussière des siècles (Serrière,T.N.P., 1959, p. 112).
III. − Empl. pronom. Se rire (vieilli ou littér.).S'amuser, se divertir. P. métaph. Le lendemain, un pur soleil se riait sur les vagues (Toulet,Mariage Don Quichotte, 1902, p. 25).
Prononc. et Orth.: [ʀi:ʀ], (il) rit [ʀi]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. a) Ca 1100 rire « marquer un sentiment de gaieté... » (Roland, éd. J. Bédier, 302); b) ca 1350 rire dessoubz son chapperon (Tristan de Nanteuil, éd. K. V. Sinclair, 13090); 1643 rire sous cappe (Saint-Amant, Rome ridicule, 840, éd. J. Lagny: la pieté ... rit sous cappe); 1690 rire sous barbe (Fur., s.v. barbe); 1694 rire dans sa barbe (Ac.); c) ca 1440 rire aux anges (L'Amant rendu cordelier, éd. A. de Montaiglon, 456); 1441-47 (P. de Hauteville, La Confession et Testament de l'amant trespassé de deuil, éd. R. M. Bidler, 894); 1867 (Delvau, p. 427: Rire aux anges. Sourire doucement en dormant); d) 1640 (Oudin Curiositez: il rit jaune comme farine); 1740-55 rire jaune (cf. jaune); 2. ca 1165 « se moquer » (Chrétien de Troyes, G. d'Angleterre, éd. M. Wilmotte, 1294: s'i ot moult ris et moult gabé); ca 1165 rire de « se moquer de » (Troie, éd. L. Constans, 14426 var.); 3. 1269-78 « avoir une expression, un aspect joyeux, agréable » (Jean de Meung, Rose, éd. F. Lecoy, 19985: cil jorz ... de clarté presante rit); 4. 1415-18 « se réjouir, se divertir » (Alain Chartier, L. des Quatre Dames, 198, éd. J. C. Laidlaw, p. 204: Il n'y aroit plus de quoy rire); 1556 (Ronsard, Nouv. continuation des Amours ds Œuvres compl., éd. P. Laumonier, t. 7, p. 254, 8: Et toute chose rire en la saison nouvelle); 5. 1464 « ne pas parler ou ne pas faire quelque chose sérieusement » (Pathelin, éd. R. T. Holbrook, 749: sans rire); 1536 (R. de Collerye, Œuvres compl., éd. Ch. d'Héricault, p. 69: disons quelque chose pour rire); 1575 (Ronsard, Au roy Henri III, t. 17, p. 87, 57: par maniere de rire). B. Pronom. 1. ca 1100 « se moquer » (Roland, 303: ore s'en rit Rollant); 2. a) 1536 « traiter par le mépris, le dédain » (R. de Collerye, op. cit., p. 236: l'on verra que vous vous en riez); 1555 (Ronsard, Hymnes, t. 8, p. 231, 39: se rient Des vanitez du monde); b) 1550 « se jouer de » (Id., Odes, t. 2, p. 35, 28: que de ses flammes Je me rie à mon tour). Du lat. pop. ridĕre (lat. class. ridēre) « rire; sourire; avoir un aspect riant, agréable; se moquer de; narguer, se jouer de (une difficulté, un danger) ». Au sens A 1 c, rire aux anges, cf. Victor Le Clerc, L'Image du monde et autres enseignements ds Hist. littér. de la France, t. 23, pp. 313-314 et G. Roques ds R. Ling. rom. t. 47 1983, p. 192. Bbg. Foley (J.). Theoretical morphology of the Fr. verb. Amsterdam, 1979, p. 144, 165, 189. − Lanly (A.). Morphol. hist. des verbes fr. Paris, 1977, pp. 262-264. − Quem. DDL t. 10, 13, 16, 17, 19, 28, 31 (s.v. rire jaune).

RIRE2, subst. masc.

A. − [À propos d'une pers.]
1. Action de rire; résultat de cette action.
a) [Corresp. à rire1I A 1 a] Synon. vx ris1.Le fait est que mêlant la tendresse à la haine, La rage à la stupeur, le rire au désespoir Ma physionomie en face du miroir Passa par tous les tons de la mimique humaine (Rollinat,Névroses, 1883, p. 269):
1. On expliquera le rire par la surprise, par le contraste, etc. (...). La vérité n'est pas aussi simple (...). Pourquoi rions-nous d'une chevelure qui a passé du brun au blond? D'où vient le comique d'un nez rubicond? et pourquoi rit-on d'un nègre? (...) la coloration noire ou rouge a beau être inhérente à la peau: nous la tenons pour plaquée artificiellement, parce qu'elle nous surprend. Bergson,Le Rire, Paris, P.U.F., 1950, p. 30-31.
SYNT. Rire argentin, bruyant, retentissant, sonore; rire charmant, clair, communicatif, contagieux, convulsif, éclatant, émerveillé, épais, gloussant, gras; rire étouffé, inextinguible, incoercible, irrépressible; rire énorme, goguenard, ironique, méchant, moqueur, narquois, nerveux, niais; rire de gorge; accès, bruit, explosion, parties de rire; déclencher, exciter, provoquer le rire.
Locutions
Le rire est le propre de l'homme. V. propre1II A 1 ex. 8.Rire homérique. V. ce mot B 2.Rire jaune. M. Alphonse Humbert, enfant terrible, nous raille d'un bon rire jaune (Clemenceau,Vers réparation, 1899, p. 370).Éclat de rire. V. éclat II A.
Fou rire. Rire prolongé qu'on ne peut contrôler. Fou rire général; accès de fou rire. Certains malades ou certains esprits très affligés, au comble de l'angoisse morale, passent, dans le même instant, du sanglot au fou rire, et réciproprement (Griveau,Élém. beau, 1892, p. 109).V. risible ex. 1.
PATHOL. [Dans certaines maladies physiques (tétanos, etc.) ou psychiques (hystérie, schizophrénie)] Mouvement mécanique et paradoxal des muscles de la face. Rire sardonique*, spasmodique*. Le rire pathologique est mécanique et paradoxal. Il apparaît dans certaines affections caractérisées par une coupure avec le réel, comme la schizophrénie par exemple (Psychol.1969).
b) P. méton. [À propos d'un élément du visage] Expression de gaieté. Synon. sourire.Il a toujours le rire aux yeux et la chanson aux lèvres (Pesquidoux,Livre raison, 1928, p. v).
2. P. ext. Ensemble des éléments comiques d'un auteur, d'une œuvre; le genre comique. Tenté depuis longtemps par le rire de Rabelais, Mariotte voulut transporter à la scène les géants du maître François, et le rideau de l'Opéra-Comique se leva le 15 février 1935 sur Gargantua (Dumesnil,Hist. théâtre lyr., 1953, p. 192).
B. − P. anal.
1. Domaine des sensations auditives
a) [À propos d'un animal] Cri aigu et saccadé qui rappelle le rire de l'homme. Le rire de la chouette, de la fouine, de la hyène, de la mouette, du singe. Un rire brusque éclata, se prolongea en ricochant sur l'eau: nous vîmes un huard tendre le cou, plonger. Mais déjà d'autres huards (...) faisaient retentir le lac de ce même rire limpide et sanglotant (Genevoix,Laframboise, Lac Fou, 1942, p. 95).P. métaph. [À propos d'un inanimé concr., le plus souvent liquide] L'eau tombait en cascade des rocailles, elle gargouillait et riait, et ce rire se répercutait dans mon cœur par petites saccades sèches et dures (Beauvoir,Tous hommes mort., 1946, p. 134).
b) [À propos d'un instrument de mus.] Son alerte, gai. Anton. gémissement.[Danse en ré de 1791] tout connu, tout prévu, sans une ombre de nouveauté. Pourtant le rire aigu d'une petite flûte frétille (Ghéon,Prom. Mozart, 1932, p. 393).
2. Domaine des sensations visuelles, au fig., littér.[À propos d'un élément de la nature] Air de gaieté, aspect agréable, plaisant par sa floraison ou fructification, ses vives couleurs. Autour d'eux, les rosiers fleurissaient. C'était une floraison (...) pleine de rires rouges, de rires roses, de rires blancs (Zola,Faute Abbé Mouret, 1875, p. 1340):
2. Le feuillage éperdu des sites romantiques! Et le rire éclatant des paysages blonds Court sur l'eau des ruisseaux dans le maïs des plaines Et fait tourbillonner les grappes de houblons Et les abeilles d'or autour des ruches pleines... Noailles,Cœur innombr., 1901, p. 78.
Prononc. et Orth.: [ʀi:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. Ca 1209 (Henri de Valenciennes, Hist. de l'Empereur Henri de Constantinople, éd. J. Longnon, § 502: ou juer ne ou rire ne ou solatiier); 1694 rire fou (Ac.); 1718 fou rire (ibid.); 1762 rire sardonique (ibid.); 1825 rire homérique (v. homérique); 1899 rire jaune (Clemenceau, loc. cit.). Empl. subst. de rire1*.
STAT.Rire1 et 2. Fréq. abs. littér. Rire, subst. sing. et verbe: 19 456. Rires: 1 583. Fréq. rel. littér. Rire, subst. sing. et verbe: xixes.: a) 17 551, b) 34 008; xxes.: a) 36 760, b) 27 436. Rires: xixes.: a) 752, b) 3 191; xxes.: a) 3 760, b) 2 118.
DÉR.
Riolle, subst. fém.,arg. ou pop., vieilli. [Surtout dans l'expr. en riolle] Débauche, partie de plaisir; ivresse légère et gaie. En le tambourinant par un bon charivari s'il [le curé] était pris en riolle, son évêque serait forcé de l'envoyer ailleurs (Balzac,Paysans, 1844, p. 237).Être en riolle. − Où donc est Jacques? − Jacques, il est en riolle! Personne ne savait où le drôle était allé (Balzac,Drame bord de mer, 1835, p. 190). [ʀiɔl], [ʀjɔl]. 1resattest. ca 1200 riole « partie de plaisir » (Renaut de Beaujeu, Bel inconnu, éd. G. P. Williams, 4110: en fole riole), 1725 riolle « bonne chère » (Grandval, Vice puni, p. 79: faisons riolle); de rire2, suff. -ole*.

Wiktionnaire

Nom commun - français

rire \ʁiʁ\ masculin

  1. Action de rire.
    • Pour les croyances, pour les formes sociales, comme pour certains malades, le rire c’est la mort ! C’est ce rire qui a tué le Moyen-Âge, car de lui sont nées les deux forces destructrices du XVIe siècle […] ; ces deux forces sont le protestantisme et l’incrédulité, les deux grands marteaux du XVIe siècle ! — (Jean-Jacques Ampère, La Littérature française au Moyen-Âge, Revue des Deux Mondes, 1839, tome 19)
    • Le rire est très-rare dans l’Écriture. Abraham et Sara, ces deux ancêtres de la douloureuse MARIE, Mère des Larmes, sont chargés de l’inaugurer, […]. — (Léon Bloy, Le Salut par les Juifs, Joseph Victorion et Cie, 1906)
    • Elle riait de toute sa voix sonore en luttant des bras et des jambes. Désarmée par son rire, elle se défendait à l’aveuglette. — (Pierre Louÿs, Trois filles de leur mère, René Bonnel, Paris, 1926, chapitre II)
  2. (Par extension) Son produit par cette action.
    • Et le roi éclata de rire, mais d’un rire si faux, que l’écho de la chambre le répéta d’un ton lugubre. — (Alexandre Dumas, La Reine Margot, 1845, volume I, chapitre VI)
    • Des joueurs de belote, assis au fond d’une buvette, comptaient leurs points parmi les rires, les plaisanteries, les grosses bourrades […] — (Francis Carco, Messieurs les vrais de vrai, Les Éditions de France, Paris, 1927)
    • Et dans ce rire acharné, grandissant, dans ce rire pareil à un réveille-matin qui se détraque, j’entendis ces mots, coupés de roulades sonores et de fusées sifflantes : […]. — (Octave Mirbeau, Le colporteur)
    • Je n’ai pas plutôt prononcé le mot que le rire cinglant de Carmen me fouaille de nouveau en pleine peau, comme une lanière. — (Victor Méric, Les Compagnons de l’Escopette, Éditions de l’Épi, Paris, 1930, page 159)
    • Le rire de Yann éclata alors dans la salle. Un rire joyeux qui dégringola le long de ma colonne vertébrale comme une douche rafraîchissante. — (Amina Danton, La tangente, Gallimard (NRF), 2009, p. 184)

Verbe - français

rire \ʁiʁ\ intransitif 3e groupe (voir la conjugaison) (pronominal : se rire)

  1. Marquer un sentiment de gaieté par un mouvement de la bouche accompagné souvent de bruit et par une expression correspondante des regards et des traits du visage.
    • La plus perdue de toutes les journées est celle où l’on n’a pas ri. — (Sébastien-Roch Nicolas de Chamfort, Maximes et pensées, caractères et anecdotes)
    • Le bambin fuyait la chemise ou le bonnet de nuit avec lequel la marquise le menaçait parfois ; il gardait sa collerette brodée, riait à sa mère quand elle l’appelait, en s’apercevant qu’elle riait elle-même de cette rébellion enfantine […] — (Honoré de Balzac, La Femme de trente ans, Paris, 1832)
    • Quand elle fut ivre, son ivresse la parcourait entière, suivait ses nerfs et leur donnait un rire qui la secouait et grinçait comme un ressort serré. Le monde était drôle, les porte-allumettes sur les tables, les becs de gaz, les consommateurs et les banquettes la regardaient avec un air qu’elle ne leur connaissait pas et qui la faisait gesticuler en riant à gros bouillons. — (Charles-Louis Philippe, Bubu de Montparnasse, 1901, réédition Garnier-Flammarion, page 178)
    • L’accueil ne variait point, Mme Bavoil le saluait par l’invariable formule : « voilà notre ami », tandis que le prêtre riait des yeux et lui pressait la main. — (Joris-Karl Huysmans, La Cathédrale, Plon-Nourrit, 1915)
    • Elle riait de toute sa voix sonore en luttant des bras et des jambes. Désarmée par son rire, elle se défendait à l’aveuglette. — (Pierre Louÿs, Trois filles de leur mère, René Bonnel, Paris, 1926, chapitre II)
    • « Vous riez donc toujours, Octavie ?
      – Oh ! disait-elle, je ris pour me faire rire. »
      — (Marcel Arland, Terre natale, 1938, réédition Le Livre de Poche, page 22)
    • Et il se mit à singer le papotage d’une Parisienne, et jusqu’à la mimique, avec tant de gaieté que Zaheira ne put s’empêcher de rire. — (Out-el-Kouloub, Zaheira, dans « Trois contes de l’Amour et de la Mort », 1940)
    • UNE PAYSANNE. – Il faut que je sois contente mais pas trop. Si j’ai envie de rire, Je ris pas fort. Le malheur m'entendrait.
      UNE AUTRE PAYSANNE. – Je ris. J’oserais pas dire pourquoi. C'est si mesquin, ce qui fait rire. On ne sait même pas si on rit bien pour ce qu'on croit. On ne sait pas pourquoi on rit. On rit sans savoir. On rit peut-être parce qu'on ne sait pas. Si on savait : peut-être qu'on pleurerait. Y a bien quelqu'un qui sait. Par exemple, on sait bien pourquoi on pleure.
      — (Marcel Jouhandeau, Chaminadour, Gallimard, 1941 et 1953, collection Le Livre de Poche, pages 273-274)
  2. (Familier) Se divertir ; se réjouir.
    • Les deux couples riaient, bavardaient, cueillaient des fleurs, se cajolaient et se mignotaient, luttaient et se roulaient sur l’herbe, et les jeunes filles fumèrent des cigarettes. — (H. G. Wells, La Guerre dans les airs, 1908, traduction d’Henry-D. Davray et B. Kozakiewicz, Mercure de France, Paris, 1910, page 55 de l’édition de 1921)
    • Alice, dis-moi que tu ne vas pas épouser ce rabat-joie. Tu ne t’amuseras jamais avec un homme comme lui. Il ne te fera jamais rire. — (Amanda Bayle, Tout ce qui brille, éd. CyPLoG, 2017, chap. 19)
    • Nous serons en joyeuse compagnie, nous rirons bien. Venez avec nous, nous rirons. C’est un bon garçon qui aime à rire.
  3. Railler ; badiner ; ne pas parler ou ne pas agir sérieusement.
    • Soit nous choisissons une transcendance qui nous écrase et ne nous laisse d’autre attitude possible que la prosternation et la soumission, et là, on arrête de rire. Soit on affirme que la liberté humaine est à la hauteur de cette transcendance, on la regarde dans les yeux, et on rit. — (Abdennour Bidar, Pour une réforme de l'islam, Télérama no 3393, janvier 2015)
  4. (Figuré) Être agréable, plaire, en parlant des choses.
    • La campagne rit sous le soleil. Tout me rit dans ce projet. Cela rit à l’imagination.
  5. (Transitif) (indirect) (Rire de quelque chose ou de quelqu’un) Ne pas se soucier de quelque chose ; témoigner qu’on n’en tient pas de compte, qu’on ne s’en soucie pas ; s’en moquer.
    • […] : légère, étourdie, folle même, elle riait de tout, ne s’intéressait à rien ; confondait la tristesse avec l’humeur, et ne voyait dans une personne affligée qu’une personne ennuyeuse. — (Marie-Jeanne Riccoboni, Histoire d’Ernestine, 1762, édition Œuvres complètes de Mme Riccoboni, tome I, Foucault, 1818)
    • La musique enivre et règle le danseur, tandis que le curieux voit le mouvement seul et rit de ce pantin qui s’agite sans raison, car le curieux, lui, n’entend pas la musique. — (Alexandre Dumas, La Reine Margot, 1845, volume I, chapitre I)
    • Mais il ne faut pas rire de la choléraphobie. Mme de Boigne affirme que quelques personnes, entre autres la comtesse de Montesquiou-Fesenac, sont littéralement mortes de peur, sans aucune maladie. — (Ange-Pierre Leca, Et le choléra s'abattit sur Paris - 1832, Albin Michel, 1982, p.104)
  6. (Transitif) (indirect) (Rire à quelqu’un) Être favorable.
    • L’occasion lui rit, la fortune lui rit.
  7. (Pronominal) Se divertir.
    • Il a fait cela en se riant.
  8. (Pronominal) Se moquer de quelqu’un.
    • Elle se rit de vous. Il se rit de vos vains projets.
  9. (Pronominal) Ne pas tenir compte d’une chose, la mépriser.
    • Je me ris de ses menaces.
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

RIRE. (Je ris; nous rions. Je riais; nous riions. Je ris. J'ai ri. Je rirai. Je rirais. Ris, rions, riez. Que je rie. Que je risse. Riant. Ri.) v. intr.
Marquer un sentiment de gaieté par un mouvement de la bouche accompagné souvent de bruit et par une expression correspondante des regards et des traits du visage. Éclater de rire. Rire aux éclats. Se tenir les côtes de rire, à force de rire. Rire à gorge déployée. Étouffer de rire. Pouffer de rire. Mourir de rire. Il y a sujet de rire. Qui pourrait s'empêcher, se tenir de rire? Rire de bon cœur. Rire de tout son cœur. Rire aux larmes, jusqu'aux larmes. Rire comme un fou. Un conte pour rire. Tout le monde se prit, se mit à rire. Rire sans sujet. Rire hors de propos. Il ne saurait parler de cela sans rire. Il n'y a pas le mot pour rire, on ne trouve pas le mot pour rire dans cet ouvrage se dit d'un Ouvrage qui ennuie. Fam., Avoir le mot pour rire, Dire habituellement des choses plaisantes qui font rire. Cet homme a toujours le mot pour rire. Fam., Et de rire se dit quelquefois en terminant un récit et signifie Alors on se mit à rire. Fig. et fam., Pincer sans rire s'est dit d'un Homme qui raille les autres en gardant son sérieux. Il ne s'emploie plus que dans l'expression : Pince-sans-rire. Voyez ce mot à son rang alphabétique. Il n'y a pas à rire pour tout le monde se dit en parlant d'une Chose qui donne de la joie à quelques personnes, mais qui fait de la peine à d'autres. On dit dans un sens analogue : Il n'y a pas trop à rire pour vous, de quoi rire pour vous. Il n'y a pas tant à rire. On dit aussi en parlant d'une Chose affligeante : Nous n'avons pas sujet de rire, nous n'avons pas envie de rire, il n'y a pas là de quoi rire. Fam., Être à mourir de rire, Exciter la risée, être d'un ridicule achevé. C'est à mourir de rire. Avec sa toilette extravagante, elle est à mourir de rire. Fig. et fam., Rire du bout des dents, ne rire que du bout des dents, que du bout des lèvres; rire jaune, Rire sans en avoir envie, à contrecœur. Fig. et fam., Rire sous cape, rire dans sa barbe, Éprouver une satisfaction maligne qu'on cherche à dissimuler. J'étais dans l'embarras, et je vis fort bien qu'il en riait sous cape. En voyant que sa ruse tournait contre lui-même, je riais dans ma barbe. Rire intérieurement, Éprouver une envie de rire sans en rien laisser paraître. Fig., Il rit aux anges se dit de Celui qui est tellement transporté de joie qu'il paraît comme extasié. Il se dit aussi de Celui qui rit seul et sans sujet connu. Il se dit particulièrement d'un Petit enfant qui rit en dormant.

RIRE signifie aussi, dans le style familier, Se divertir, se réjouir. Nous serons en joyeuse compagnie, nous rirons bien. Venez avec nous, nous rirons. C'est un bon garçon qui aime à rire. Prov., Plus on est de fous, plus on rit. Rire aux dépens d'autrui, Se divertir à relever les défauts, les ridicules de quelqu'un. Rire de quelqu'un, Se moquer de quelqu'un. Fam., Rire au nez de quelqu'un, Se moquer de quelqu'un en face. Apprêter à rire se dit d'une Personne qui donne sujet de se moquer d'elle. On dit plutôt aujourd'hui Prêter à rire. Fam., Vous me faites rire se dit à une personne qui tient des discours ou qui fait des propositions déraisonnables ou ridicules. Fig. et fam., Se chatouiller pour se faire rire, S'exciter à la gaieté, à la joie, pour un faible sujet ou même sans sujet, se forcer pour rire. Prov. et fig., Rira bien qui rira le dernier se dit en parlant de Quelqu'un qui se flatte du succès dans une affaire où l'on compte l'emporter sur lui. Prov. et fig., Tel qui rit vendredi, dimanche pleurera, Souvent la tristesse succède en peu de temps à la joie.

RIRE signifie encore Railler, badiner, ne pas parler, ne pas agir sérieusement. Je n'ai dit cela que pour rire, vous auriez tort de vous en offenser. Est-ce pour rire que vous dites, que vous faites cela? Fam., Vous voulez rire se dit à quelqu'un qui fait une proposition peu convenable, ou qui dit des choses peu croyables.

RIRE signifie également Ne se point soucier de quelque chose; témoigner qu'on n'en tient pas de compte, qu'on ne s'en soucie pas; s'en moquer. Il rit de toutes les remontrances qu'on lui fait. Ses menaces ne me troublent pas, je ne fais qu'en rire.

RIRE se dit figurément des Choses et signifie Être agréable, plaire. La campagne rit sous le soleil. Tout me rit dans ce projet. Cela rit à l'imagination. L'occasion lui rit, Elle lui est favorable. La fortune lui rit, tout lui rit, tout rit à ses désirs se dit d'un Homme heureux, à qui tout réussit.

SE RIRE signifie Se divertir. Il a fait cela en se riant. Il signifie aussi Se moquer de quelqu'un. Elle se rit de vous. Il se rit de vos vains projets. Il signifie encore Ne pas tenir compte d'une chose, la mépriser. Je me ris de ses menaces.

Littré (1872-1877)

RIRE (ri-r'), je ris, tu ris, il rit, nous rions, vous riez, ils rient ; je riais, nous riions, vous riiez ; je ris, nous rîmes ; je rirai ; je rirais ; ris, rions, riez ; que je rie, que nous riions, que vous riiez ; que je risse, que nous rissions ; riant, ri v. n.
  • 1Faire un certain mouvement de la bouche causé par l'impression qu'excite en nous quelque chose de gai, de plaisant. Je vous assure qu'elle fit bien rire toute la compagnie, et que j'en ai bien ri depuis, soit qu'il y eût véritablement de quoi en rire, ou que je sois de celles qui rient de peu de chose, Scarron, Rom. com. II, 3. N'avez-vous pas vu Niquedouille, qui ne saurait rire sans montrer les dents ? Cyrano de Bergerac, Pédant joué, II, 2. Qu'un pape rie, en bonne foi, Je n'ose l'assurer ; mais je tiendrais un roi Bien malheureux s'il n'osait rire, La Fontaine, Fabl. XII, 12. Vienne l'an neuf, ballade est destinée ; Qui rit ce jour, il rit tout l'année ; Or la ballade a cela, ce dit-on, Qu'elle fait rire, ou ne vaut un bouton, La Fontaine, Poésies mêl. IX. Horace : Je ne puis y songer sans de bon cœur en rire, Et vous n'en riez pas assez à mon avis. - Arnolphe : Pardonnez-moi, j'en ris tout autant que je puis, Molière, Éc. des femm. III, 4. Je fus sur le point d'éclater de rire, Pascal, Prov. VIII. Vous ai-je mandé que M. le président Barantin mourut à sa place du grand conseil, il y a deux jours ? sa femme, qui rit toujours, rira-t-elle de cette aventure ? Sévigné, 525. Et toi [Lamoignon]… Viens d'un regard heureux animer mon projet, Et garde-toi de rire en ce grave sujet, Boileau, Lutr. I. Mais un auteur malin qui rit et qui fait rire…, Boileau, Sat. VII. Il n'est pas ordinaire que celui qui fait rire se fasse estimer, La Bruyère, V. Il faut rire avant que d'être heureux, de peur de mourir sans avoir ri, La Bruyère, IV. Lorsque nous voulons nous empêcher de rire, notre rire redouble à cause du contraste qui est entre la situation où nous sommes et celle où nous devrions être, Montesquieu, Goût, des beautés qui résultent d'un embarras de l'âme. On s'est avisé de jouer à Lyon le Dépositaire ; on y a ri de tout son cœur, et il a fort réussi ; les Lyonnais apparemment ne sont point gâtés par La Chaussée ; ils vont à la comédie pour rire, Voltaire, Lett. d'Argental, 5 sept. 1772. Toute joie ne fait pas rire ; les grands plaisirs sont sérieux ; les plaisirs de l'amour, de l'ambition, de l'avarice n'ont jamais fait rire personne, Voltaire, Dict. phil. Rire. L'homme est le seul animal qui pleure et qui rie, Voltaire, ib. Comme nous ne pleurons que de ce qui nous afflige, nous ne rions que de ce qui nous égaye ; les raisonneurs ont prétendu que ce rire naît de l'orgueil, qu'on se croit supérieur à celui dont on rit… quiconque rit éprouve une joie gaie dans ce moment-là, sans avoir un autre sentiment, Voltaire, ib. L'Égyptien, en riant d'un sot rire, se retira dans son quartier, Voltaire, Pr. de Babyl. 4. Ils l'appelaient tous monseigneur, et ils riaient quand il faisait des contes, Voltaire, Candide, 1. Celui qui ne riait pas aux comédies de Regnard, n'avait pas le droit de rire aux comédies de Molière, Diderot, Salon de 1765, Œuv. t. XIII, p. 183, dans POUGENS. Comme il me faisait rire, il croyait m'amuser ; On ne sait pas toujours faire la différence Des ris de la pitié d'avec ceux du plaisir, La Chaussée, Retour imprévu, II, 8.

    Rire de, avec un infinitif. Je riais de le voir avec sa mine étique, Son rabat jadis blanc et sa perruque antique…, Boileau, Sat. III.

    Rire aux larmes, rire si fort que les larmes coulent des yeux. Nous avons ri aux larmes de votre Mme de la Charce et de Philis, sa fille aînée, âgée de trente-neuf ans, Sévigné, 215. La belle dame est enchantée de cette réponse ; et le roi en a ri aux larmes, Maintenon, Lett. à Mme d'Haudicour, 24 déc. 1672.

    Rire à gorge déployée, rire comme un fou, rire extrêmement. Je suis assuré que, si Térence et Cicéron revenaient au monde, ils riraient à gorge déployée des ouvrages latins des Fernel, des Sannazar et des Muret, Boileau, Lett. à Brossette, XIX. Lorsqu'elles m'eurent reconnu, elles se mirent à rire comme deux folles, en me voyant ajusté comme je l'étais, Lesage, Est. Gonz. 43.

    Avoir le mot pour rire, dire habituellement des choses plaisantes, qui font rire. …Il parle livre, il a le mot pour rire, Régnier, Sat. XII.

    Il n'y a pas le mot pour rire, on ne trouve pas le mot pour rire dans cet ouvrage, se dit d'un ouvrage qui a été fait pour amuser, et où il n'y a rien d'amusant, ou même d'un ouvrage sérieux où l'on cherche mal à propos l'amusement.

    Par extension. Il n'y a pas le mot pour rire au crime, Rousseau, Hél. II, 17.

    Pincer sans rire, voy. PINCER, n° 1.

    Et de rire, se met quelquefois à la fin d'un récit, et signifie : on se mit à rire. La duchesse de Bouillon alla demander à la Voisin un peu de poison pour faire mourir un vieux mari qu'elle avait qui la faisait mourir d'ennui, et une invention pour épouser un jeune homme qui la menait sans que personne le sût ; ce jeune homme était M. de Vendôme, qui la menait d'une main, et M. de Bouillon de l'autre ; et de rire, Sévigné, 31 janv. 1680.

    Mourir de rire, être saisi d'un rire tel qu'on se pâme. Elle en pensa mourir de rire, Hamilton, Gramm. X.

    Mourir de rire, signifie aussi éprouver un vif sentiment de moquerie. J'ai reçu une lettre de Dumesnil ; ils me font tous mourir de rire avec leurs demandes, Mme de Chateauroux, Corresp. t. II, p. 99, dans POUGENS.

    Crever de rire, même sens. Il y a trois mois que je crève de rire en me levant et en me couchant, Voltaire, Lett. Thiriot, 11 août 1760. Plutarque à présent me fait crever de rire : je ne crois plus aux grands hommes, Courier, Lett. à M. de Sacy, 3 oct. 1810.

    Être à mourir de rire, exciter la risée, être très ridicule. Il est à mourir de rire avec ses idées romanesques, Genlis, Théât. d'éduc. Fausses délicat. II, 11.

    Se faire rire, chercher les occasions, les motifs de rire. Celui-ci, qui ne demandait pas mieux que de se faire rire encore, recommença tout de nouveau son histoire, et y ajouta de plus, comme pour me désespérer, la mienne, Lesage, Guzm. d'Alfar. I, 6.

    Se chatouiller pour se faire rire, tâcher de rire sans en avoir sujet.

  • 2 Fig. Rire du bout des dents, du bout des lèvres, ne rire que du bout des dents, du bout des lèvres, rire jaune, se dit d'une personne qui ne rit pas de bon cœur, qui cache sous un rire forcé son déplaisir, qui rit par contrainte, grimace ou politesse. Je te promets, marquis, qu'il fait dessein d'aller sur le théâtre rire, avec tous les autres, du portrait qu'on a fait de lui. - Parbleu ! ce sera du bout des dents qu'il rira, Molière, Impromptu, 3. Je dissimulais, et, riant du bout des dents, je lui dis que je trouvais cette aventure plaisante, Lesage, Guzm. d'Alf. V, 4.
  • 3 Fig. Rire sous cape, rire dans sa barbe, éprouver une satisfaction maligne qu'on dissimule. Au grand plaisir de mes sergents et du geôlier, qui étaient présents et qui riaient sous cape, Lesage, ib. IV, 7.

    Rire intérieurement, éprouver un sentiment de joie qui ferait rire, mais que l'on ne manifeste pas.

    Rire aux anges, voy. ANGE.

    Rire à son mérite, laisser paraître sur sa figure le contentement qu'on a de son propre mérite. Cet indolent état de confiance extrême, Qui le rend en tout temps si content de soi-même, Qui fait qu'à son mérite incessamment il rit, Molière, Fem. sav. I, 3.

  • 4Il n'y a pas à rire pour tout le monde, se dit en parlant d'une chose qui donne de la joie à certaines personnes, mais qui en afflige d'autres.

    On dit dans le même sens : il n'y a pas trop à rire pour vous, de quoi rire pour vous, il n'y a pas tant à rire.

    Nous n'avons pas sujet de rire, il n'y a pas là de quoi rire, se dit d'une chose qui afflige ou inquiète.

    On dit de même : n'avoir pas envie de rire. Oui, vraiment, nous avons fort envie de rire, fort envie de rire nous avons, Molière, Bourg. gent. III, 5.

  • 5Il se dit de l'aspect que prend la physionomie d'une personne qui rit. Vous auriez dit qu'il sortait de la conversation la plus badine, sa bouche et ses yeux riaient encore, Marivaux, Jeux de l'am. et du haz. I, 1.

    Fig. Une certaine audace qui lui rit, qui le venge de son peu de relief et de l'inaction dans laquelle il passe la journée, Marivaux, dans DESFONTAINES.

    Fig. Le cœur me rit, j'éprouve un doux contentement. Le cœur me rit, et il me semble que je me ranime au projet d'aller partager avec vous cette retraite charmante, Rousseau, Lett. à Vernes, 24 juin 1761.

  • 6 Fig. Avoir un aspect gracieux, qui plaît, comme est celui d'un visage riant. La terre ne lui rit plus [à l'homme] comme auparavant, Bossuet, Hist. II, 1. Et les Alpes de loin, s'élevant dans la nue, D'un long amphithéâtre enferment ces coteaux, Où le pampre en festons rit parmi les ormeaux, Voltaire, Ép. à Horace. C'est une chose bien singulière que mon imagination ne se monte jamais plus agréablement que quand mon état est le moins agréable, et qu'au contraire elle est moins riante lorsque tout rit autour de moi, Rousseau, Confess. IV. Quand tout rit de bonheur, d'espérance et d'amour, Delille, Jard. I. Le long de cette haie, de ces sillons où rit la première verdure des blés, Chateaubriand, Mart. X. Il [le soleil] gonfle de ses feux les trésors dont l'automne En riant se couronne, Delavigne, Paria, I, 5.
  • 7Être favorable. L'occasion vous rit, et vous en userez, Corneille, Pomp. II, 3. Par ses soins tout nous rit, tout fleurit, tout succède, Rotrou, Vencesl. V, 9. La fortune vous rit, et ne rit pas toujours, Rotrou, ib. II, 1. Tout riait au chevalier dans la nouvelle tendresse qui l'occupait, Hamilton, Gramm. 7. Les heureux du monde à qui tout rit, Massillon, Pet. carême, Hum.
  • 8Rire à quelqu'un, lui sourire avec bienveillance, lui faire un accueil flatteur. On l'accueille, on lui rit, partout il s'insinue, Molière, Mis. I, 1. Le monde est plus dangereux, lorsqu'il nous rit, que lorsqu'il nous maltraite, Massillon, Carême, Prosp. temp. Le monde, qui jusqu'ici vous a ri, vous aura bientôt oubliée, Massillon, Prof. relig. 4. Ma bienvenue au jour me rit dans tous les yeux, Chénier, la Jeune captive. Fig. La fleur nouvelle Rit aux zéphirs, Quinault, Thés. IV, 7.
  • 9Plaire, être agréable. Cela rit à l'imagination. Il me vient un projet d'une grande importance, Et qui me rit, Collin D'Harleville, Inconst. III, 12.
  • 10Petiller. Casaux… Du plaisir de sa chute a fait rire nos yeux, Malherbe, II, 6. Elle voit le barbier, qui, d'une main légère, Tient un verre de vin qui rit dans la fougère (voy. FOUGÈRE, n° 2), Boileau, Lutr. III.
  • 11Se moquer de, plaisanter de. Mme de Coëtquen est grosse ; voudriez-vous en rire ? riez-en, Sévigné, 370. Et je serai le seul qui ne pourrai rien dire ! On sera ridicule, et je n'oserai rire ! Boileau, Sat. IX. Le théâtre perdit son antique fureur ; La comédie apprit à rire sans aigreur, Boileau, Art p. III. Le fanatisme était si puissant, et Cromwell si respecté, que personne ne rit d'un pareil discours [où Harry disait de Cromwell qui venait de mourir, qu'il serait assis à la droite de Jésus-Christ], Voltaire, Mœurs, 181. Elle rit, et avec raison, des sottises des hommes, dont je ferais bien de rire aussi, et dont je rirais comme elle, si je digérais et si je dormais mieux, D'Alembert, Lett. au roi de Pr. 3 nov. 1780.

    Rire de quelqu'un, se moquer de lui. Ceux-là me parlent de vous, et nous rions un peu de notre prochain, Sévigné, 75.

    Rire au nez de quelqu'un, se moquer de quelqu'un en face. Ragotin se mourait de dépit de ne pouvoir trouver à quereller avec un homme qui lui riait au nez, et lui faisait mille révérences, Scarron, Rom. com. II, 16. Laissez passer les personnes sans leur rire au nez, Molière, Pourc. I, 5. Il veut parler, elle lui éclate de rire au nez, Carmontelle, Prov. posth. Visite du jour de l'an, sc. 17. J'aurais dû leur rire au nez pour toute réponse, je fus assez bête pour me piquer, Rousseau, Conf. XI.

    Apprêter, offrir à rire, se dit de quelqu'un qui donne sujet qu'on se moque de lui. Ceux de qui la conduite offre le plus à rire, Sont toujours sur autrui les premiers à médire, Molière, Tart. I, 1. N'apprêtons point à rire aux hommes, En nous disant nos vérités, Molière, Amph. Prologue.

    Faire rire, exciter les moqueries. Ce mariage doit être heureux, car il donne de la joie à tout le monde, et je fais rire tous ceux à qui j'en parle, Molière, Mar. forcé, 3.

    Vous me faites rire, se dit à quelqu'un qui dit ou fait des choses peu pertinentes. Vous me faites rire ; est-ce qu'il faut être belle pour se croire charmante ? Genlis, Théât. d'éduc. la Mère rivale, I, 1.

  • 12 Absolument. Se divertir, se réjouir. Mais, de retour enfin, que prétendez-vous faire. - Alors, cher Cinéas, victorieux, contents, Nous pourrons rire à l'aise, et prendre du bon temps. - Eh ! seigneur, dès ce jour, sans sortir de l'Épire, Du matin jusqu'au soir qui vous défend de rire ? Boileau, Ép. I. Rions, chantons, dit cette troupe impie ; De fleurs en fleurs, de plaisirs en plaisirs, Promenons nos désirs, Racine, Ath. II, 9. On ne rit point entre les peines présentes et un anéantissement prochain, Voltaire, Lett. d'Argental, 8 mai 1773. Hélas ! je ris et je n'en ai guère envie, D'Alembert, Lett. à Voltaire, 28 déc. 1776.

    Rire aux dépens d'autrui, se divertir à relever les défauts, les ridicules d'autrui.

  • 13Badiner, ne pas parler ou ne pas agir sérieusement. Est-ce que vous riez, ou si c'est tout de bon ? Ces paroles, quoique dites en riant, firent une vive impression dans l'esprit de Madame de Clèves ; elles lui donnèrent du remords, La Fayette, Princ. de Clèves, Œuv. compl. t. II, p. 107, dans POUGENS. Ces hommes, en apparence frivoles, qui détruisent tout en riant, Chateaubriand, Génie, I, I, 1. Dès que le sang coule, on ne rit plus, on blâme, Delavigne, Éc. des vieillards, IV, 6.

    Familièrement. Vous voulez rire, se dit à une personne qui fait une proposition peu convenable, ou qui dit des choses incroyables. Ils [des laboureurs à qui on adressait des questions métaphysiques] ont cru que je voulais rire, et ont continué à labourer leurs champs sans me répondre, Voltaire, Phil. Ignor. 3.

    C'est pour rire, ce n'est pas sérieusement dit ou fait. Si vous la blâmez, c'est pour rire ; Si vous l'aimez, c'est tout de bon, Pannard, Œuv. t. III, p. 405. Ne voyez-vous pas bien que c'est pour rire tout ce qu'ils vous disent ? Loménie de Brienne, Mém. inéd. t. II, p. 401.

    Pour rire, non effectivement. Un roi pour rire En vrais apprentis qui ne le sont pas pour rire, Rousseau, Ém. III.

  • 14Ne point se soucier de quelque chose, n'en tenir compte. Après tout cependant, riez de ma faiblesse, Corneille, Médée, II, 5. Félix, dans la prison j'ai triomphé de toi, J'ai ri de ta menace, Corneille, Poly. IV, 1. Mon âme jouira de ton inquiétude, Je rirai de ta peine, Corneille, Héracl. IV, 5. Elle a cru me braver ; mais je n'en fais que rire, Corneille, la Veuve, II, 6. Cependant Athalie, un poignard à la main, Rit des faibles remparts de nos portes d'airain, Racine, Ath. V, 1. Je vais écrire à M. le maréchal de Richelieu, qui ne fait que rire de toutes les choses qui sont très essentielles pour les amateurs des beaux-arts, Voltaire, Lett. d'Argental, 11 avril 1767.
  • 15Se dit, par plaisanterie, d'une chose qui se fend, qui s'entr'ouvre. Cet habit, cette muraille rit.

    Rire comme un coffre, rire à bouche très ouverte, parce qu'un coffre qu'on ouvre semble présenter une grande bouche.

  • 16Se rire, v. réfl. Se divertir, se jouer. Si quelqu'un après boire avait laissé aller une parole un peu libre, si un autre en se riant avait dit quelque chose de naïf, tout était mis aux tablettes, Malherbe, le Traité des Bienf. de Sénèque, III, 26.
  • 17Se moquer de, ne tenir aucun compte de, mépriser. Ils se sont ri, elles se sont ri de tous ces projets. Le débauché se rit des sermons de son père, Régnier, Sat. V. On se rirait de vous, Alceste, tout de bon, Si l'on vous entendait parler de la façon, Molière, Mis. I, 1. L'esprit d'impiété se rit de ce qu'il y a de plus sacré, Pascal, Prov. X. Les sages les prévirent [les malheurs qui suivraient la réforme en Angleterre] ; mais les sages sont-ils crus en ces temps d'emportement, et ne se rit-on pas de leurs prophéties ? Bossuet, Reine d'Anglet. Le perfide triomphe et se rit de ma rage, Racine, Andr. V, 1.

PROVERBES

C'est le vieux jeu, on n'en rit plus, se dit d'une plaisanterie usée.

Plus on est de fous, plus on rit.

Rira bien qui rira le dernier, se dit en parlant de quelqu'un qui se flatte du succès en une affaire où l'on compte l'emporter sur lui.

Tel qui rit vendredi dimanche pleurera (RAC. Plaid. I, 1), souvent la tristesse succède en peu de temps à la joie.

Marchand qui perd ne peut rire.

REMARQUE

Il se conjugue avec l'auxiliaire avoir.

" Je ris et pleure, pour je ri et pleure " non pas que ny t, ny s soit à telle personne, mais pourtant qu'il plaist ainsi à l'oreille " RAMUS, dans LIVET, Gramm. franç. p. 212. Quoi qu'il en soit de ce dire de Ramus, l's, à la 1re personne du singulier du présent de l'indicatif, est, partout où elle n'est pas radicale, une faute que l'ancienne langue ne commettait pas, mais que la moderne s'est appropriée.

HISTORIQUE

XIe s. Quant ce veit Guenes qu'ore s'en rit Rolanz, Ch. de rol. XXII. Mort il l'abat, qui qu'en plurt ou qu'en rie, ib. CCXLIV.

XIIe s. Quant de moi [elle] rit, et je l'ai tant plorée, Couci, VI.

XIIIe s. Mout fut la vieille aaise, de joie prist à rire, Berte, XI. Ainsinc cum en tel point estoient Mars et Venus qui s'entr'amoient, Des diex i ot mains qui vosissent Que li autres diex se risissent En tel point cum il font de Mars, la Rose, 14364. Dont aucun furent qui disoient Que li petit enfanchon l'oient [le bruit des sphères célestes], Quant il rient en leur dormant, Qu'il dient qu'il oient chantant Les angles Deu en paradis, Qui les ont en tel joie mis, Hist. litt. de la Fr. t. XXIII, p. 314. Teux [tel] rit au main ki au soir pleure, Renart le nouvel, 3250.

XIVe s. Et entendent plus et resgardent à ce que il facent rire les gens, que il ne font à dire choses avenans et honnestes, Oresme, Eth. 136.

XVe s. Quand on les ot lues et entendues [les lettres de Philippe d'Artevelle à Charles VI], on n'en fit que rire, Froissart, II, II, 166. Car se le dire Atrayoit à soy l'esconduire [amenait qu'on fût éconduit], Il n'y auroit plus de quoy rire, Chartier, Livre des quatre dames, p. 599. Jehanne s'en va riant à sa dame : de quoy vous riez-vous, Jehanne ? fait la dame, Les 15 joyes du mariage, p. 52. Ils se prindrent si fort à rire, qu'on les eust peu tous nuds desvestir, Perceforest, t. I, f° 130. Souvent mon cueur de joye rit, Orléans, Bal. VIII. Vous qui devez la loy garder, Faictez le prendre sans tarder ; Sy le faictez tenir de rire, la Pass. de N. S. J. C. Nostre roy [Louis XI] commença à dire au roy d'Angleterre en se ryant…, Commines, IV, 10.

XVIe s. Lycurgus n'estoit point si austere que l'on ne le vist jamais rire : ce fut luy qui dedia la petite image du Ris qui est à Lacedaemone, ayant voulu entremesler le rire parmi leurs convives et autres assemblées, Amyot, Lyc. 54. Pour lors fortune luy rioit, Amyot, Démétr. 31. Au partir de là, comme ses familiers se rissent ensemble et se moquassent de luy, il leur dit…, Amyot, Alex. 22. Rire un ris acheté à prix d'argent à des baladins, Amyot, De la tranq. d'âme, 40. Mieulx est de ris que de larmes escripre, Pour ce que rire est le propre de l'homme, Rabelais, Gar. aux lecteurs. La poësie ne rid point ailleurs comme elle faict en un subject folastre, Montaigne, I, 223. Y meslant quelquefois des mots pour rire, Montaigne, I, 295. Si ma santé me rid et la clarté d'un beau jour…, Montaigne, II, 323. Ce que nous rions en elle [une aveugle qui croyait que c'était le jour qui manquait], je te prie de croire qu'il advient à chascun de nous, Montaigne, III, 106. Le prevost lui dit en riant, mais c'etoit un rire d'hostelier [un rire du bout des dents]… , Despériers, Contes, LXXXIII. Je luy appris à rire du coin des dents, ou comme un chien à qui on presente de l'ail, à parler de la gorge…, D'Aubigné, Conf. II, 1. … Et de rang verse à la troupe Du vin qui rit dedans l'or, Ronsard, 334. Bien dire Fait rire, Bien faire Fait taire, Leroux de Lincy, Prov. t. II, p. 248. Rire sans propos est propre aux fols, Leroux de Lincy, ib. p. 413. Sa mere qui rioit sous son chaperon, Nuits de Straparole, t. II, p. 42, dans LACURNE. Femme rit quand elle peut, et pleure quand elle veut, Cotgrave Tel rit qui mord, Cotgrave

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Étymologie de « rire »

Du moyen français rire, de l’ancien français rire, du latin vulgaire *rīdĕre, du latin classique rīdēre.
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Provenç. rire, rir ; catal. riurer ; espagn. reir ; portug. rir ; ital. ridere ; du lat. ridere. Notre verbe rire suppose une forme vulgaire ridĕre au lieu de ridēre.

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Phonétique du mot « rire »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
rire rir

Fréquence d'apparition du mot « rire » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « rire »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « rire »

  • Le fou rire est immortel.
    Jean-Michel Ribes
  • Le mieux : rire ensemble des mêmes choses.
    Gloria Vanderbilt
  • Le rire est un désinfectant.
    Maurice Chapelan — Lire et écrire
  • Flic : pince sans rire.
    Guy-Guy Bouzoune — Quand les tilleuls mentent
  • L’erreur, comme le rire, est humaine.
    Roland Topor — Journal in Time
  • Mieux vaut rire que pleurer.
    Proverbe français
  • La plus perdue de toutes les journées est celle où l'on n'a pas ri.
    Sébastien Roch Nicolas, dit Nicolas de Chamfort — Maximes et pensées
  • Elle est debout sur mes paupièresEt ses cheveux sont dans les miens,Elle a la forme de mes mains,Elle a la couleur de mes yeux,Elle s’engloutit dans mon ombreComme une pierre sur le ciel.Elle a toujours les yeux ouvertsEt ne me laisse pas dormir.Ses rêves en pleine lumièreFont s’évaporer les soleils,Me font rire, pleurer et rire,Parler sans avoir rien à dire.
    Paul Eluard — Capitale de la douleur
  • Masques ! O Masques !Masque noir masque rouge, vous masques blanc-et-noirMasques aux quatre points où souffle l’EspritJe vous salue dans le silence !Et pas toi le dernier, Ancêtre à tête de lion. Vous gardez ce lieu forclos à tout rire de femme, à tout sourire qui se fane, Vous distillez cet air d’éternité où je respire l’air de mes Pères.Masques aux visages sans masque, dépouillés de toute fossette comme de toute rideQui avez composé ce portrait, ce visage mien penché sur l’autel de papier blanc A votre image, écoutez-moi !Voici que meurt l’Afrique des empires – c’est l’agonie d’une princesse pitoyable Et aussi l’Europe à qui nous sommes liés par le nombril. […]
    Léopold Sédar Senghor — « Masques »
  • Ne faites pas rire au point de prêter à rire.
    Héraclite d'Ephèse
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Traductions du mot « rire »

Langue Traduction
Anglais to laugh
Espagnol reir
Italien ridere
Allemand lachen
Chinois
Arabe لتضحك
Portugais rir
Russe смеяться
Japonais 笑う
Basque barre egin
Corse riri
Source : Google Translate API

Synonymes de « rire »

Source : synonymes de rire sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « rire »

Combien de points fait le mot rire au Scrabble ?

Nombre de points du mot rire au scrabble : 4 points

Rire

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