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Émouvoir

Définitions de « émouvoir »

Trésor de la Langue Française informatisé

ÉMOUVOIR, verbe trans.

I.− Emploi trans.
A.− Vieilli, domaine phys.Mouvoir, mettre en mouvement, bouger. Émouvoir une porte. Un léger souffle émouvait les peupliers; je les entendais frémir (Mauriac, Journal occup.,1944, p. 333):
1. ... une pierre, jetée dans un gouffre obscur rencontre une nappe souterraine. Elle y émeut un clapotis... Bourget, Némésis,1918, p. 269.
B.− Au fig. Remuer, toucher, éveiller. Une chose manquait à l'art égyptien : la vie (...) Il était réservé à la Grèce de réveiller cette majestueuse momie, de l'assouplir, de l'émouvoir (Ch. Blanc, Gramm. arts dessin,1876, p. 443):
2. Arrivera-t-il jusqu'à la surface de ma claire conscience, ce souvenir, l'instant ancien que l'attraction d'un instant identique est venue de si loin solliciter, émouvoir, soulever tout au fond de moi? Proust, Du côté de chez Swann,1913, p. 46.
1. [En parlant d'une émotion qui s'extériorise le plus souvent avec violence] Agiter, bouleverser, ébranler (cf. émotion B 1).Être ému de colère, d'indignation. Ce geste, qui me bouleversa, ne parut point émouvoir extrêmement Rouletabille (G. Leroux, Myst. ch. jaune,1907, p. 105).Il ne livrait rien qui parût spontané. Pas moyen de l'émouvoir, de le faire rire, de l'irriter (De Gaulle, Mém. guerre,1954, p. 197):
3. Les émotions fondamentales (...) ont un pouvoir d'ébranler l'action, d'émouvoir l'être, qui ne consiste pas d'abord à le jeter hors de soi, mais à le tirer de l'inertie par une spontanéité toujours périlleuse pour la maîtrise de soi; ... Ricœur, Philosophie de la volonté,1949, p. 237.
Emploi abs. Un affreux accident comme celui-là émeut, bouleverse, effare (Maupass., Contes et nouv., t. 2, Horrible, 1884, p. 240).
2. [En parlant d'une émotion plus diffuse, vécue au niveau des sensations] Attendrir, troubler. Émouvoir les sens; émouvoir les entrailles. Au printemps la campagne émeut la chair (Maupass., Contes et nouv., En voyage, 1883, p. 325).L'être que je pressens ne pouvoir émouvoir charnellement cesse aussitôt de m'émouvoir moi-même (Gide, Ainsi soit-il,1951, p. 1241):
4. ... cet ami dont un éclat d'obus a détruit le visage, qui a ainsi renoncé pour la vie à jamais émouvoir une femme, frustré d'un droit fondamental aussi bien qu'on en est frustré derrière les murs d'une prison... Saint-Exupéry, Pilote de guerre,1942, p. 334.
3. [En parlant d'une émotion vécue sur le mode affectif, sentimental] Plaire, toucher. Émouvoir le cœur de qqn, les juges; être ému de compassion, par le spectacle de la misère. Tout cela, qui vous émeut et vous charme et vous prend le cœur (Mirbeau, Journal femme ch.1900, p. 345).Cette merveilleuse découverte que je faisais : être capable d'intéresser, de plaire, d'émouvoir (MauriacNœud vip.,1932p. 46).
Emploi abs. Rien n'émeut comme une lettre de vous et je vous demande à genoux de me les prodiguer (StaëlLettres L. de Narbonne,1792p. 19).
4. [En parlant d'une émotion vécue au niveau esthétique, spirituel] Émouvoir l'âme, l'esprit. Nous avons été charmés, émus, éblouis, touchés, transportés, heureux, en un mot (Gobineau, Pléiades,1874, p. 6).La musique [de Michel Hayden] module, émeut (Ghéon, Prom. Mozart,1932, p. 93).
Emploi abs. Le désert est plus beau que tout. Lui seul émeut comme la mer (Colette, Pays connu,1949, p. 145).
Expr. Émouvoir les frelons : Il ne faut pas émouvoir les frelons, pour dire il ne faut pas se faire d'ennemis, quelque petits qu'ils soient (J.-F. Rolland, Dict. mauv. lang.,1813, p. 57).Émouvoir les pierres. [P. allus. à Orphée, en parlant de qqn qui a le pouvoir de toucher ce qui est réputé insensible] L'illustre lyre antique émeut les pierres (Ch. GuérinCœur solit.,1904, p. 168).Fam. Être ému. Avoir bu, être gris. Percy Larousselle, déjà ému de divers spiritueux (Mauriac, Préséance,1921, p. 244).
Rem. On rencontre ds la docum. a) L'adj. émouvable. Qui s'émeut facilement, émotionnable. Je me sens devenir de jour en jour plus sensible et plus émouvable (Flaub., Corresp., 1850, p. 237). b) Le subst. masc. émouveur. Agitateur. Que personne n'eût à recueillir ces conspirateurs et émouveurs du peuple (Barante, Hist. ducs de Bourg., t. 3, 1821-14, p. 112).
II.− Emploi pronom. réfl.
A.− Vieilli
1. Domaine phys.Se mettre en mouvement, bouger, s'agiter, se soulever. La mer s'émeut, le plancher qui s'émeut. Tout à coup voilà que la terre s'émeut; les tombes s'ouvrent, les morts se lèvent (Lamennais, Paroles croyant,1834, p. 234).Il n'y a point d'écorce si rude qui ne s'émeuve, point de brin d'herbe si fragile qui ne frémisse (Pesquidoux, Livre raison,1928, p. 31):
5. ... le feuillage noir à son tour s'émeut; il ondule; il monte; il se tord comme la flamme qui danse; ... Huyghe, Dialogue avec le visible,1955, p. 91.
2. [En parlant de querelles, de conflits de pers.] Être soulevé, s'élever, naître. Il va s'émouvoir entre M. de Florac et Cavalier une haine qui engendre la guerre des Cévennes (Balzac, Œuvres div.,t. 3, 1836-48, p. 288).Une grande discussion s'est émue à ce sujet entre les érudits (Sainte-Beuve, Nouv. lundis,t. 3, 1863-69, p. 379).
3. [En parlant d'un groupe de pers.] Se mettre en branle, réagir, passer à l'action, au travail. Le parlement s'émeut. Le scandale fut tel, que le parquet s'émut et saisit son livre (Zola, Doc. littér.,Les Poëtes contemp., 1881, p. 147).L'opinion s'émeut et demande des comptes à nos simili-potentats, qui s'effarent (Clemenceau, Iniquité,1899, p. 70).
B.−
1. Se troubler. S'émouvoir de frayeur. Tout s'agite, tout s'ébranle, tout s'émeut en elle; elle vit trois fois plus qu'auparavant (Balzac, Physiol. mar.,1826, p. 101).Celle-ci [Mmede Staël] sait peu plaisanter, elle s'émeut trop vite (Sainte-Beuve, Chateaubr.,t. 1, 1860, p. 186).
Expr. S'émouvoir à propos de tout et de rien. À la forme négative. Sans s'émouvoir de rien.
2. S'attendrir, s'émerveiller. S'émouvoir à la vue, à la beauté de qqn, de qqc. Un merveilleux ami vivant, qui souffre de nos peines, s'émeut de nos joies (Bernanos, Journal curé camp.,1936, p. 1051).Quand il naît par mutation dans les jardins une rose nouvelle, voilà tous les jardiniers qui s'émeuvent (Saint-Exup., Terre hommes,1939, p. 260).
SYNT. S'émouvoir de qqc., à qqc.; s'émouvoir à la pensée de qqc., de qqn; s'émouvoir d'admiration, de compassion, de pitié.
S'émouvoir sur qqc. Se pencher avec émotion sur quelque chose. Je m'émus sur mon enfance, sur ma vie, sur ma mort (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 264).S'émouvoir en faveur de qqn. Parler pour lui, faire quelque chose pour lui. Une chance insigne dut s'émouvoir en ma faveur, afin que je puisse dire en rentrant, à votre Assemblée, non pas « j'arrive » mais bien « je reviens » (Colette, Belles saisons,Discours de réception, 1936, p. 214).
Prononc. et Orth. : [emuvwa:ʀ], (j')émeuṣ [emø]. Ds Ac. 1694-1932. Conjug. cf. mouvoir mais le part. passé ému ne porte pas d'accent circonflexe. Comparer avec mû. Étymol. et Hist. 1. Ca 1100 « mettre en mouvement » (Roland, éd. J. Bédier, 2813 : Li amirals, ki trestuz les esmut); 2. a) ca 1170 « troubler, porter à certains sentiments » (Rois, éd. E.-R. Curtius, III, 3, 26, p. 118); b) 1834 adj. émouvant (Sainte-Beuve, Volupté, t. 1, p. 122). Du lat. pop. *exmovere, lat. class. emovere « remuer, ébranler » au propre et au fig., formé de ex et movere « mouvoir, remuer ». Fréq. abs. littér. : 1 847. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 2 157, b) 2 071; xxes. : a) 3 512, b) 2 790. Bbg. Duchácek (O.). L'Interdépendance et l'interaction du contenu et de l'expr. Orbis. 1972, t. 21, p. 476. − Thomas (A.). Nouv. Essais 1904, p. 259.

Wiktionnaire

Verbe - français

émouvoir \e.mu.vwaʁ\ transitif 3e groupe (voir la conjugaison) (pronominal : s’émouvoir)

  1. Provoquer une émotion.
    • Je ne viens point aussi, par un récit funeste,
      Émouvoir à pitié cette vertu céleste,
      Émouvoir à fureur ce noble mouvement
      Qui prévient ma prière, et mon ressentiment.
      — (Jean Chapelain, La Pucelle ou La France délivrée, livre sixième ; chez Augustin Courbé, Paris, 1656, page 251.)
  2. Agiter, disposer à la sédition.
    • Mr Balfour écrivait jadis: « Il est regrettable que seuls les enthousiastes puissent émouvoir les peuples, car les enthousiastes sont presque toujours des imbéciles. » — (André Maurois, Chantiers américains, 1933)
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

ÉMOUVOIR. (Il se conjugue comme MOUVOIR.) v. tr.
Exciter quelque mouvement, quelque passion dans le cœur, causer du trouble, de l'altération dans l'âme. Il sait l'art d'émouvoir les passions. Émouvoir la colère. Par extension, Émouvoir quelqu'un. C'est un homme que rien ne peut émouvoir. Il s'émeut à la vue de la souffrance. Être ému de compassion. Être ému de joie. Absolument, C'est un maître dans l'art d'émouvoir. On n'émeut pas sans être ému. Fig. et fam., Émouvoir la bile de quelqu'un, Exciter sa colère. Il signifie quelquefois Agiter, disposer à la sédition. Les factieux tentèrent d'émouvoir la multitude. Émouvoir les esprits. Le peuple commençait a s'émouvoir.

Littré (1872-1877)

ÉMOUVOIR (é-mou-voir), j'émeus, tu émeus, il émeut, nous émouvons, vous émouvez, ils émeuvent ; j'émouvais ; j'émus ; j'émouvrai ; j'émouvrais ; émeus, qu'il émeuve, émouvons, émouvez, qu'ils émeuvent ; que j'émeuve, que nous émouvions, que vous émouviez, qu'ils émeuvent ; que j'émusse ; émouvant ; ému v. a.
  • 1Mettre en mouvement. Six chevaux attelés à ce fardeau pesant Ont peine à l'émouvoir sur le pavé glissant, Boileau, Sat. VI.
  • 2Agiter, troubler. Cette drogue émeut les humeurs. Cela lui émut un peu le pouls. Ayant ému les flots, apaisez la tempête, Tristan, Panthée, III, 1. Il ne faut rien pour vous émouvoir en l'état où vous êtes, Molière, Mal. imag. II, 3.

    Fig. Émouvoir la bile, exciter la colère. Et je vais lui dicter une lettre d'un style Qui de madame Argante émouvra bien la bile, Regnard, Légat. II, 6.

  • 3Faire naître, susciter. Souffrez qu'on vous appelle Pour être entre nous deux juge d'une querelle, D'un débat qu'ont ému nos divers sentiments Sur ce qui peut marquer les plus parfaits amants, Molière, Fâch. II, 4. Si je ne vous vois arriver, je croirai que cela vient de la guerre que cette préférence aura émue entre eux, Sévigné, 92. On émeut des troubles contre eux, Bossuet, Avert. 5. S'était-on avisé d'émouvoir une question si frivole ? Bossuet, Var. 15. Ces jours passés, chez un vieil histrion, Un chroniqueur émut la question, Quand dans Paris commença la méthode De ces sifflets qui sont tant à la mode, Racine, l'Origine des sifflets (Épigr. contre Fontenelle) On a ému la question si…, Voltaire, Dict. philos. IV, 487.
  • 4Pousser au soulèvement, à la sédition. M. de Beaufort ne savait pas que qui assemble le peuple l'émeut toujours, Retz, IV, 169. [Ils] courent parmi la ville Émouvoir le soldat et le peuple imbécile, Corneille, Sert. V, 3. Il lui faut me bannir, de crainte que mes cris Du peuple et de la cour n'émeuvent les esprits, Corneille, Perthar. V, 3. Antoine émut le peuple contre ceux qui l'avaient tué [César], Bossuet, Hist. III, 7. La guerre émut l'Asie et l'Égypte alarmée ; Et la terreur s'accrut comme ta renommée, Lemercier, Louis IX, III, 3.

    Exciter des troubles, des séditions. Si tu n'étais qu'un lâche, on aurait quelque espoir Qu'en fin tu pourrais vivre et ne rien émouvoir, Corneille, Perthar. V, 5.

  • 5 Fig. Produire sur l'âme un mouvement comparé au mouvement physique. Mais mon déplaisir ne vous peut émouvoir, Corneille, Poly. I, 2. Il émut le sénat pour des rois outragés, Corneille, Pomp. III, 2. Je ne saurais voir d'honnêtes pères chagrinés par leurs enfants que cela ne m'émeuve, Molière, Fourber. II, 8. … Le cœur qu'un vrai mérite émeut, Th. Corneille, Ariane, IV, 2. Ces yeux que n'ont émus ni soupirs, ni terreur, Racine, Brit. V, I. Quand mes larmes en vain tâchaient de l'émouvoir, Racine, Bajaz. III, 3. Mais, si mes vœux ardents vous peuvent émouvoir, Racine, Phèd. III, 5.

    Émouvoir à, porter à un sentiment. On prend plaisir à se sentir émouvoir à toutes sortes de passions, Descartes, Pass. 94. Pour vous émouvoir à compassion, Perrot D'Ablancourt, Tac. 93. Si rien à la pitié ne peut vous émouvoir, Crébillon, dans DESFONTAINES.

    Absolument. On n'émeut point sans être ému ; et le langage de l'enthousiasme a cela de commun avec toutes les passions, qu'il est ridicule lorsqu'il n'est qu'imité, Turgot, Ébauche du 2e disc. Progrès de l'esprit humain, p. 305.

    Il se dit aussi des sentiments qu'on met en mouvement. Mon père tout caduc émouvant ma pitié, Corneille, Médée, I, 1. Mon crime redoublé n'émeut point ta colère, Corneille, Hor. IV, 7. Je pourrai de mon père émouvoir la tendresse, Racine, Phèd. III, 6. Je ne cherche qu'à émouvoir sa sensibilité, et je ne veux point exciter sa crainte, Genlis, Adèle et Théod. t. I, lett. 25, dans POUGENS.

  • 6S'émouvoir, v. réfl. Éprouver une émotion. À ces souvenirs de son enfance il s'émut. L'un s'émeut de pitié, l'autre est saisi d'horreur, Corneille, Hor. III, 2. L'orateur recourut à ces figures violentes Qui savent exciter les âmes les plus lentes ; Il fit parler les morts, tonna, dit ce qu'il put ; Le vent emporta tout, personne ne s'émut, La Fontaine, Fabl. VIII, 4. Tantôt à son aspect je l'ai vu s'émouvoir, Racine, Athal. V, 2. Votre cœur malgré vous s'émeut et s'adoucit, Voltaire, Alz. I, 1.

    Par extension. La terre s'en émeut, l'air en est infecté, Racine, Phèd. V, 6.

  • 7S'emporter, s'irriter. Le jeune homme s'émeut voyant peint un lion : Ah ! monstre ! cria-t-il, c'est toi qui me fais vivre Dans l'ombre et dans les fers, La Fontaine, Fabl. VIII, 16. Rebuté, il s'émeut contre eux, Bossuet, Hist. II, 4. Sans doute à cet aspect sa rage s'est émue, Racine, Andr. V, 6.
  • 8S'inquiéter. Cléopatre s'enferme en son appartement, Et, sans s'en émouvoir, attend son compliment, Corneille, M. de Pomp. III, 1. Viriate, il est vrai, pourra s'en émouvoir, Corneille, Sertor. I, 2. Le lendemain, il apprit qu'on disputait à Delzons la possession de Malo-Iaroslavetz ; il ne s'en émut guère, soit confiance, soit incertitude dans ses projets, Ségur, Hist. de Nap. IX, 2.
  • 9S'agiter, s'insurger. À ce spectacle, le peuple s'émut : les statues de l'empereur furent renversées en divers endroits, Bossuet, Hist. I, 11. Tout l'empire s'émeut contre l'Église naissante, Bossuet, ib. II, 7. On vit les Gaules, les Espagnes, tous les royaumes dont l'empire était composé, s'émouvoir tout à coup, Bossuet, ib. II, 9.
  • 10S'élever, être suscité. Entre deux bourgeois d'une ville, S'émut jadis un différend, La Fontaine, Fabl. VIII, 19.

    Impersonnellement. Son voisin devint amoureux de sa femme et l'enleva ; il s'émut une grande querelle, Montesquieu, Lett. pers. 11.

  • 11On dit que la graine des vers à soie s'émeut quand elle commence à blanchir.

    PROVERBE

    Il ne faut pas émouvoir les frelons, c'est-à-dire il ne faut point aller irriter des gens irritables.

HISTORIQUE

XIe s. Li amirals qui trestouz les esmut [mit en mouvement], Ch. de Rol. CXCVII.

XIIe s. [Cil] Qui plus ont esmeü la tanson [querelle] et l'envie, Sax. X. Cume ço vit la mere que l'um l'enfant dut detrenchier, tut le quer [cœur] li fud esmeüd, Rois, p. 237.

XIIIe s. La comtesse Marie… si acoucha d'une fille, et après, quant ele fu relevée, si s'esmut [se mit en marche] et ala outre-mer après son seigneur, Villehardouin, CXXX. Et par ce que cis pardons fu si grans, s'esmurent moult li cuer des gens, si que maint s'en croisierent par le monde, Villehardouin, I. Quant la roine vit que li rois s'esmevoit, si l'en pesa, Chr. de Rains, 192. Raison ne s'esmovra jamais à chose qui contre vous aille, la Rose, 10388. Ne m'esmovez pas à ire, Psautier, f° 115. À l'esmouvoir l'ost le roy, r'ot [il y eut de nouveau] grant noise [bruit] de trompes et de cors sarrazinois, Joinville, 227. Garde toy de esmouvoir guerre, sanz grant conseil, contre home crestien, Joinville, 301.

XIVe s. Et la ville s'esmuit ; cascuns keurt [court] tangrement, Pour assalir le [la] tour, que Bauduin deffent, Beaud. de Seb. VII, 783. Frere, dit Gloriant, par Dieu vous dites voir ; Pensons de nous haster et de nous esmouvoir ; Car, s'il se ravisoit, trop nous porroit doloir, ib. IX, 800.

XVe s. Et voyoient tout le pays tourner avec la roine et son ains-né fils, et dresser et emouvoir contre eux, Froissart, I, I, 20. L'un ravist tout, l'autre pert son demaine ; Peuples s'esmuet, l'eglise est subournée ; Noblece fault, tant est mal ordonnée, Deschamps, Souffr. du peuple. Guerre s'esmeut entre eulx pour leur auctorité, qui a duré par longues années, Commines, I, 7. [Louis XI avait recommandé que quand on le verrait en danger de mort] on ne luy dist fors tant seullement : parlez peu, et que on l'esmeut seullement à soy confesser sans luy prononcer ce cruel mot de mort, Commines, VI, 12. Elle alloit et venoit, maintenant ci, maintenant là, tant emue qu'il sembloit qu'elle fust ravie de son sens, Louis XI, Nouv. C.

XVIe s. Charger la parole de Dieu des seditions qu'esmeuvent à l'encontre d'icelle les fols et escervelez - On accusoit les apostres comme s'ils eussent esmeu le populaire à tumulte - Ce ne sommes pas nous qui esmouvons les troubles, Calvin, Instit. dédic. Il estoit esmeu comme la fueille de l'arbre, Calvin, ib. 434. Esmouvoir à commiseration et à pitié - Un trouble s'estant esmeu pendant ce parlement, Montaigne, I, 25. Preparé d'une belle oraison pour l'esmouvoir à la guerre contre…, Montaigne, I, 189. Socrates va tousjours demandant et esmouvant la dispute, jamais l'arrestant, Montaigne, II, 239. Et s'estant esmeu d'adventure quelque debat et different entre les pasteurs, Amyot, Rom. 7. Amulius, esmeu de ces raisons, luy livra entre ses mains Remus pour en faire punition, Amyot, ib. 8. Il ne s'esmeut point autrement de cette nouvelle, Amyot, Public. 27. Il se levoit un grand vent du costé de la mer, qui emouvoit de grosses vagues dedans le canal, Amyot, Thém. 28. Les fondements des plus hautes montagnes Tous esbranlés s'esmurent grandement, Marot, IV, 253.

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Étymologie de « émouvoir »

Berry, émouver ; provenç. esmover, esmovre ; du latin emovere, de e, et movere, mouvoir (voy. MOUVOIR).

Version électronique créée par François Gannaz - http://www.littre.org - licence Creative Commons Attribution

(XVIe siècle) Du latin emovere.
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Phonétique du mot « émouvoir »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
émouvoir emuvwar

Fréquence d'apparition du mot « émouvoir » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « émouvoir »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « émouvoir »

  • L'homme qui n'a pas de musique en soi et que n'émeut pas un concert de doux accords est capable de trahisons, de complots et de rapines.
    William Shakespeare — Le Marchand de Venise, V, 1, Lorenzo The Merchant of Venice, V, 1, Lorenzo
  • Un monde qui ne pourrait s’émouvoir de sa beauté serait bien près de la faillite.
    Edmond Gréville
  • Ne s'émouvoir de rien.
    Horace
  • Pour ce deuxième épisode, nous retournons la carte du père. Il vient après la mère que nous avons évoquée hier en chanson, à rebours de siècles de patriarcat et de construction de l'image de la mère réconfortante. Plus difficile alors de s'épancher, de réchauffer le chemin qui mènera jusqu'à la froideur du père, et d'émouvoir celui qui apprit à maîtriser ses sentiments et ses larmes.
    France Culture — Le père - Ép. 2/5 - QLF : "Que La Famille"
  • Que sont les serviteurs de Dieu, sinon comme ses jongleurs qui doivent élever les coeurs des hommes et les émouvoir de la joie spirituelle ?
    Saint François d'Assise
  • Il y a tout d'abord la littérature de la connaissance, et secondement, la littérature de la puissance. La fonction de la première est d'enseigner ; la fonction de la seconde est d'émouvoir.
    Thomas de Quincey — Essais sur les poètes : Pope
  • Il ne faut émouvoir les frelons.
    Proverbe français
  • La jeunesse grandit dans un domaine qui n'est qu'à elle, où ni l'ardeur du ciel, ni la pluie, ni les vents ne viennent l'émouvoir.
    Sophocle — Les Trachiniennes, 144-146 (traduction Mazon)
  • Ecrire : la seule façon d'émouvoir autrui sans être gêné par un visage.
    Jean Rostand
  • Les hommes que les passions peuvent le plus émouvoir sont capables de goûter le plus de douceur en cette vie.
    René Descartes — Traité des passions
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Images d'illustration du mot « émouvoir »

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Traductions du mot « émouvoir »

Langue Traduction
Anglais move
Espagnol moverse
Italien mossa
Allemand bewegung
Chinois 移动
Arabe نقل
Portugais mover
Russe шаг
Japonais 動く
Basque mugimendu
Corse move
Source : Google Translate API

Synonymes de « émouvoir »

Source : synonymes de émouvoir sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « émouvoir »

Combien de points fait le mot émouvoir au Scrabble ?

Nombre de points du mot émouvoir au scrabble : 12 points

Émouvoir

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