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Retourner

Définitions de « retourner »

Trésor de la Langue Française informatisé

RETOURNER, verbe

I. − Empl. trans.
A. −
1. Faire tourner, pour mettre le dessus dessous, l'intérieur à l'extérieur (ou inversement). Retourner une crêpe, un matelas, un sablier. Superstitieux jusqu'à retourner le pain, quand il est sur le dos, signe de malheur! (Goncourt, Journal, 1861, p. 966):
1. Ce muscle pénètre dans l'intérieur de la corne et va se fixer à son extrémité, en sorte que lorsqu'il se contracte (...), il tire cette extrémité de la corne en dedans, comme lorsqu'on veut retourner un bas. Cuvier, Anat. comp., t. 2, 1805, p. 435.
[Le suj. désigne un inanimé] Une bourrasque de vent retourna son parapluie (Malègue, Augustin, t. 1, 1933, p. 96).
En partic.
Retourner une carte; p. méton., retourner atout, trèfle, etc. Obtenir une carte indiquant telle valeur, telle couleur. Je connaissais leurs points, je savais celui des deux qui retournait le roi comme si j'eusse vu les cartes (Balzac, Peau chagr., 1831, p. 86).P. métaph. Le Christ (...) demandait à l'homme de tout risquer sur une carte retournée, celle de l'autre monde (J.-R. Bloch, Dest. du S., 1931, p. 299).
Retourner (la terre, un champ). Bêcher, labourer. J'avais retourné la terre sur une superficie de plus de vingt pieds carrés et sur une profondeur de plus de deux pieds (Dumas père, Monte-Cristo, t. 2, 1846, p. 116).P. anal. [Avec un compl. désignant un meuble, une pièce ou leur contenu] Fouiller, mettre le désordre. Synon. bouleverser, mettre sens dessus dessous (v. dessous1II B 1 b).− Enfile voir... pas si vite... ça colle pas... ôte-moi ça. − Tu ne vas pas tout retourner?... − J'ferai c'que j'ai à faire! (Benjamin, Gaspard, 1915, p. 14).La fureur d'Henri Mouraud fut insensée. Il retourna tout le grenier, dénicha l'engin, le mit en pièces à coups de talon (Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p. 221).
Retourner (un vêtement). Le refaire, en mettant à l'extérieur l'envers moins usagé. Napoléon était à Sainte-Hélène, et, comme l'Angleterre lui refusait du drap vert, il faisait retourner ses vieux habits (Hugo, Misér., t. 1, 1862, p. 144).
LUTTE. Retourner qqn. Mettre l'adversaire sur le dos. Sur une ceinture de côté, il est retourné (L'Auto-vélo, 6 déc. 1901ds Petiot 1982).Fam. Retourner qqn comme une crêpe. Elle avait du répondant, un poitrail d'athlète, elle m'aurait retourné comme une crêpe si j'étais devenu très méchant! (Céline, Mort à crédit, 1936, p. 261).
Au fig., pop., fam.
Retourner les mains devant l'ouvrage. Refuser de travailler. Un gentil petit gars, tout franc et dessalé, qui ne r'tournait pas les mains devant l'ouvrage (Barbusse, Feu, 20 août 1916ds l' Œuvre ds Esn. Poilu 1919, p. 466).
Retourner les poches (à qqn). Voler. Synon. faire les poches (v. poche1).La femme retournait les poches de son amant (Pesquidoux, Livre raison, 1928, p. 91).
Retourner sa veste. Renier ses idées par opportunisme. Cela paraît excessif à beaucoup: notamment aux ministres de Brisson, qui ont retourné leur veste gentiment (Clemenceau, Vers réparation, 1899, p. 153).Retourner son habit (vieilli). Et pour Zola, toutes les tendresses!... pour Zola, en train de retourner son habit comme on ne l'a jamais si cyniquement retourné (Goncourt, Journal, 1893, p. 354).
Retourner (qqn) sur le gril. Le presser de questions. Synon. mettre à la question (v. question2).C'est un casse-tête, un attrape-nigaud, un piège à cons. Et toi qui t'amuses, depuis deux heures à me retourner sur le gril (Vailland, Drôle de jeu, 1945, p. 93).
Retourner (qqn) comme une peau de lapin, comme un gant. Changer complètement, de fond en comble. En huit jours de temps (...) le godelureau fut retourné comme une peau de lapin! Non-seulement il avait une mine prospère, mais encore il jabotait, il batifolait, il godaillait à ravir (Cladel, Ompdrailles, 1879, p. 153).Vous m'avez retourné comme un gant (Bernanos, Soleil Satan, 1926, p. 133).
2.
a) Tourner une chose dans la direction opposée à celle vers laquelle elle était orientée.
Retourner les chevaux (vx). Faire faire demi-tour. [Fabrice] se trouvait à dix pas du valet de chambre qui ne chantait plus: il vit dans ses yeux qu'il avait peur; il allait peut-être retourner ses chevaux (Stendhal, Chartreuse, 1839, p. 164).
Retourner la tête, le visage. Tourner la tête, le visage dans la direction opposée à celle où l'on regardait. Lélia laissa retomber son bras et retourna lentement son visage vers l'homme de Dieu (Sand, Lélia, 1833, p. 65).Elle a dépassé la porte sans même retourner la tête (Céline, Voyage, 1932, p. 581).
Au fig. Inverser le sens. Si, en inversant brusquement le champ, on retourne l'aimantation d'un petit barreau de fer doux, on renverse le sens de rotation, le moment d'impulsion de ses électrons magnétiques (Hist. gén. sc., t. 3, vol. 2, 1964, p. 245):
2. Le Maître de forges, c'est l'antique roman de la fille noble conquise par le beau roturier: seulement, ici, la conquête commence après le mariage: c'est, au fond, le Gendre de M. Poirier, les rôles étant retournés. Lemaitre, Contemp., 1885, p. 341.
Retourner un adage, une définition. Inverser le sens, en permutant l'ordre des mots ou des propositions. Les passions sont des femmes qui nous bercent et nous endorment dans leurs caresses. En retournant l'idée, on peut dire aussi que les femmes sont des passions (Chênedollé, Journal, 1808, p. 36).
Retourner la situation. Prendre l'avantage alors qu'on avait le dessous. Les Américains comptaient sur lui pour prendre le commandement des troupes françaises d'Afrique du Nord et retourner la situation (De Gaulle, Mém. guerre, 1956, p. 42).
b) Utiliser contre quelqu'un (les armes qu'il a fournies ou qu'on lui a prises). Les Vendéens avaient retourné nos pièces. Quel malheur d'être balayé par ses propres munitions (Erckm.-Chatr., Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 188).P. métaph. Ces armes que la bourgeoisie me fournit, je saurai bien les retourner contre elle (Mauriac, Journal 2, 1937, p. 148).
Retourner une arme contre soi, sur soi. Se suicider. Il vient de tuer sa femme et ses enfants et a erré dans la campagne durant des heures sans trouver la force de retourner son arme sur lui (Le Monde, 9 déc. 1987, p. 23, col. 1).
P. anal. Retourner une accusation contre qqn. Imputer à l'accusateur le crime dont il a porté accusation. Ce fut contre les conservateurs qu'il [le parti républicain] retourna l'accusation d'être le parti de la guerre (Bainville, Hist. Fr., t. 2, 1924, p. 235).Retourner un argument, une critique, etc. à qqn. Les appliquer à la personne qui les formule. Tu me maudis, vieux fantôme? Et moi, je te retourne ta malédiction dans les dents! (Claudel, Tête d'Or, 1901, 2epart., p. 195).
c) Retourner qqn. Changer radicalement ses dispositions vis-à-vis de quelqu'un, le faire changer de camp. Ne te donne pas la peine, va! J'ai compris... Oh! du reste, je n'avais pas beaucoup d'illusions en partant. Je pensais bien qu'elle viendrait à bout de te retourner! (Bourdet, Sexe faible, 1931, iii, p. 453).Retourner (un agent, un espion). Le contraindre à travailler contre son camp. Après avoir « retourné » un agent, elle [la Gestapo] le fait rouler en voiture, des heures durant, dans les quartiers où il a eu ses rendez-vous (G. Perrault, L'Orchestre rouge, 1971 [1967], p. 340).
3. Tourner (quelque chose) de façon continue ou répétitive. Retourner la salade.
Tourner et retourner. Tourner dans un sens puis dans l'autre. Elle revient à la vie, se laisse cajoler, tourne et retourne de gros yeux langoureux (Boylesve, Leçon d'amour, 1902, p. 226).Un moment, elle tourna et retourna la langue dans sa bouche sèche (Bernanos, Crime, 1935, p. 867).
Retourner dans tous les sens. Le mouvement de bascule a pour effet de retourner le linge en tous sens, de le frotter sur lui-même, de le projeter sur les parois du tonneau (Lar. mén.1926, p. 196).
Loc. fig.
Retourner le couteau, le fer dans la plaie, dans le cœur. Insister sur ce qui fait souffrir. Il reprit tout son sang-froid, et n'hésita point à retourner le poignard dans son cœur (Stendhal, Rouge et Noir, 1830, p. 467).Corignon: (...) Ah! Je ne t'aime plus... je ne t'aime plus...! Je n'en sais rien, si je ne t'aime plus!... La Môme, retournant le couteau dans la plaie: − Puisque tu te maries! (Feydeau, Dame Maxim's, 1914, ii, 9, p. 52).
Retourner sept fois sa langue (usuel avec tourner, v. langue I B 1 b). Prendre le temps de réfléchir avant de parler. Cela doit apprendre (...) à votre sagesse, à retourner sept fois votre folle de langue dans sa jolie prison avant de la mettre à l'essor (M. de Guérin, Corresp., 1837, p. 261).
Retourner (un problème, une question) dans tous les sens. Les examiner longuement et sous tous leurs aspects. L'étudiant retournait dans sa tête des idées contradictoires (Aragon, Beaux quart., 1936, p. 326).
4. Provoquer (chez quelqu'un) une intense émotion. Synon. bouleverser, mettre dans tous ses états (v. état I A 2).La première fois qu'on entame la peau d'un mort à la Clinique (...) je vous assure que cela fait un effet (...) ça vous retourne (Goncourt, Sœur Philom., 1861, p. 138).
Retourner le cœur à qqn. Provoquer un sentiment de dégoût. Une nausée me retourne le cœur, me monte à la gorge impérieusement, m'affadit la bouche, me serre les tempes (Mirbeau, Journal femme ch., 1900, p. 67).
Retourner l'estomac à qqn. Même sens. À présent, rien que la vue d'un verre de vin lui retournait l'estomac (A. Daudet, Évangéliste, 1883, p. 96).
Retourner les sangs à qqn. Bouleverser. Elle a vu dans la rue Vivienne un cheval emballé! Elle est revenue décomposée! Ça lui a retourné tous les sangs! (Céline, Mort à crédit, 1936, p. 383).Avoir (les sangs, le cœur) retourné(s). Il n'avait guère mangé tant il se sentait le cœur retourné (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Père Amable, 1886, p. 232).
Être retourné. Être troublé profondément. Pour toute défense, elle mit sa main devant elle et murmura: « Jacquot... » d'une voix si déchirante que Jacques en fut d'un coup retourné (Martin du G., Thib., Mort père, 1929, p. 1349):
3. Il y avait si longtemps que les Slavsky étaient sans nouvelles de Montparnasse, que la rencontre avec Mizzi les émut l'un comme l'autre, toute leur ancienne vie leur revenait, ils en étaient tout retournés. Triolet, Prem. accroc, 1945, p. 130.
5. Empl. impers. Comprendre, savoir de quoi il retourne, ce dont il retourne. Comprendre, savoir les données cachées d'une situation. Synon. comprendre, savoir le dessous des cartes (v. carte II A 2).Savez-vous de quoi il retourne? dit-il à Julien; ce maître de poste est un fripon. Tout en me promenant, j'ai donné vingt sous à un petit polisson qui m'a tout dit (Stendhal, Rouge et Noir, 1830, p. 387).Le peuple, comprenant ce dont il retournait, écouta (Cladel, Ompdrailles, 1879, p. 186).
B. −
1. Renvoyer quelque chose (à l'expéditeur). Synon. réexpédier.Retourner les invendus. Souvent ils allaient alors voir charger les paniers vides sur les camions, qui, chaque après-midi, viennent les reprendre, pour les retourner aux expéditeurs (Zola, Ventre Paris, 1873, p. 782).Aussitôt votre choix fait, relativement à ce dernier point, veuillez bien lui retourner, avec votre commande, un morceau de l'étoffe marqué de son prix (Mallarmé, Dern. mode, 1874, p. 792).
Retourner le compliment. Répondre à un compliment par un compliment. Je dois noter qu'à mon arrivée, quand je me suis incliné pour lui baiser la main, MmeValavert m'a dit − sur un ton de déjà vieille camarade −: « Vous êtes éblouissant! » Je lui aurais bien retourné le compliment, mais c'était un peu bête; et surtout ce n'eût pas été tout à fait exact (Romains, Hommes bonne vol., 1939, p. 103).P. antiphr. Répliquer. Mais chaque changement trouve, hélas, ses prophètes, qui, par amour de l'humanité, comme dit Aurelle, mettent à feu et à sang ce globe misérable! − Cela est fort bien dit, docteur, dit Aurelle, mais je vous retourne le compliment: pourquoi, si tel est votre sentiment, vous donnez-vous la peine d'être vous-même homme de parti? (Maurois, Sil. Bramble, 1918, p. 31).
Retourner la politesse. Rendre la politesse. Il n'aimait pas qu'on lui rendît service, parce que cela l'obligeait à retourner la politesse (Montherl., Célibataires, 1934, p. 803).
2. SPORTS (tennis). Retourner (une balle, un service), ou simpl., retourner. C. retourne toujours aussi bien (L'Équipe, 2 juin 1980ds Petiot 1982).
II. − Empl. intrans.
A. −
1. Vieilli, empl. abs. Faire le chemin en sens inverse. Synon. faire demi-tour*, rebrousser chemin (v. rebrousser I A 3).Le cocher retourna pour prendre le chemin de Chinon qui était meilleur que celui de Saché (Balzac, Lys, 1836, p. 265).À chaque pas, on rencontrait des gens effarés qui vous criaient: « N'avancez pas, retournez, retournez! La troupe arrive, on tire sur tout le monde » (Sand, Hist. vie, t. 4, 1855, p. 113).
Retourner en arrière (cour.). Un mur lui barra la route: elle était dans une impasse. À la hâte elle voulut retourner en arrière (Louÿs, Aphrodite, 1896, p. 148).P. métaph. Tout, dans la société actuelle, se dresse, à chacun de nos pas, pour nous humilier, pour nous faire retourner en arrière (Éluard, Donner, 1939, p. 86).
Retourner sur ses pas (cour.). La paix faite, nous retournâmes sur nos pas, sous les ordres du prince Joseph, aujourd'hui roi (Courier, Lettres Fr. et Ital., 1806, p. 731).
2. ARCHIT. [En parlant d'un corps de bâtiment] Former un angle. Être retourné d'équerre. Être orienté perpendiculairement à un autre corps de bâtiment. Si un bâtiment B, double en profondeur, est retourné d'équerre, il sera difficile d'éclairer la surface F (Viollet-Le-Duc, Archit., 1872, p. 292).
B. − Retourner + compl. locatif
1. Se rendre à nouveau dans le lieu d'où l'on est venu. Synon. repartir.Retourner à la maison, à sa place, chez soi. La campagne, une fois quittée, on n'y retourne guère (Michelet, Peuple, 1846, p. 74).
[Le compl. désigne une activité, le lieu d'une activité] Retourner au lit, au travail. [Le verbe est suivi d'un inf.] Retourner dormir, travailler. La fusillade devenait plus pressée. Les marchands de vins étaient ouverts; on allait de temps à autre y fumer une pipe, boire une chope, puis on retournait se battre (Flaub., Éduc. sent., t. 2, 1869, p. 110).
Locutions
Retourner à Dieu. [Dans la lang. des croyants] Mourir. Près de retourner à Dieu, il commanda de lever les stores de ses fenêtres et dit: « Quelle belle journée! » (Chateaubr., Mém., t. 3, 1848, p. 158).
Retourner à ses moutons. V. mouton D 3.
Retourner avec qqn (pop.). Reprendre la vie commune, renouer une liaison amoureuse. Et vous croyez que je vais retourner avec vous? Ah! Tenez! Sous le couteau, je dirai non, non, jamais! (Zola, Débâcle, 1892, p. 527).
2. Aller à nouveau dans un lieu où l'on est déjà allé. Je ne suis pas retourné en Algérie depuis la guerre. Je suis retournée deux fois chez elle sans la rencontrer (Sénac de Meilhan, Émigré, 1797, p. 1631).
3. Rare. [Le suj. désigne un inanimé] Revenir à un état antérieur. Puis la maison retourna à son silence sourd (Guèvremont, Survenant, 1945, p. 80):
4. Le Négus alluma une cigarette; et tous ceux qui les suivaient firent de même à la fois: le retour à la vie. Chaque homme apparut une seconde dans la courte lueur de l'allumette ou du briquet; puis tout retourna à la pénombre. Malraux, Espoir, 1937, p. 544.
Dans la lang. jur. Redevenir la propriété de, la possession de. Les actions en reprise, s'il en existe, ou le prix de ces biens aliénés, s'il est encore dû, retournent également aux frères et sœurs légitimes (Code civil, 1804, art. 766, p. 140).
III. − Empl. pronom.
A. − [Corresp. à supra I]
1. Faire un demi-tour. Il se tut enfin et je sentis ses yeux se poser sur moi, me suivre obstinément alors que, m'étant retournée, j'allai vers la fenêtre (F. Tristan, Le Dieu des mouches, 1984 [1958], p. 64).
Se retourner sur soi-même. Pivoter. Le venimeux roublard avait fini par accrocher au cou son naïf adversaire, et, prompt comme l'éclair, s'était retourné sur lui-même avec furie, pensant bien le « basculer » sur les reins, puis, coup sur coup, l'envoyer à terre en plein sur le dos (Cladel, Ompdrailles, 1879, p. 20).
2. Tourner la tête ou le haut du corps vers l'arrière. Les hommes qui l'avaient regardée de face se retournaient pour la voir par derrière (Zola, Th. Raquin, 1867, p. 218).Ils virent passer une femme à bicyclette, qui se retourna sur eux par deux fois (Triolet, Prem. accroc, 1945, p. 229).
Faire retourner ou se retourner qqn. Mais, tandis qu'Edward chevauche lentement, le trot d'un cheval le fait retourner; c'est Stephen qui le rejoint (Karr, Sous tilleuls, 1832, p. 293).Ce côté belle créature resplendissante qui fait se retourner les hommes (Sagan, Bonjour tristesse, 1954, p. 99).
3. Prendre une position opposée, en roulant sur soi-même. Je me retournerai sur l'autre flanc et me rendormirai (Musset, Confess. enf. s., 1836, p. 79).Il se retourna avec l'aide d'un infirmier, et il s'appuya sur une cuisse (Benjamin, Gaspard, 1915, p. 72).
Se tourner et se retourner (tour fréq.). Un sommeil agité, où je me tourne et me retourne, me détends, me renoue (Cendrars, Bourlinguer, 1948, p. 109).
Se retourner dans sa tombe. [Expr. hyperbolique par laquelle on exprime que ce qui est dit est partic. scandaleux] Mais, nom de Dieu! Si la famille avait eu le mauvais cœur de tolérer ça, les os du père Fouan se seraient retournés entre leurs quatre planches (Zola, Terre, 1887, p. 505).
4. Empl. pronom. passif. [Le suj. désigne un inanimé] Se mettre à l'envers. Son parapluie s'est retourné. La feuille imprimée d'un côté se retourne en passant au second cylindre qui imprime alors le verso (Civilis. écr., 1939, p. 8-12).
[Le suj. désigne un véhicule, un bateau ou p. méton., les occupants] Son kayak s'est retourné. Le plus adroit peut se retourner (L'Auto, 17 nov. 1905ds Petiot 1982).
Au fig. [En parlant d'une tendance] Le marché boursier s'est retourné. Puis, au fur et à mesure que se développait l'expérience nouvelle [de la IVeRépublique], l'opinion se retourna et (...) revint à une appréciation plus favorable du régime de 1875 (Vedel, Dr. constit., 1949, p. 93).
5.
a) Vieilli. Manœuvrer pour faire face à une agression par surprise, ou lors d'une retraite. Les lions devenus chevreuils. Telle fut cette fuite. À Genappe, on essaya de se retourner, de faire front, d'enrayer (Hugo, Misér., t. 1, 1862, p. 409).
b) Cour., au fig., fam. Prendre des dispositions face à un événement imprévu, un changement de situation. Quant aux 200 fr. d'Henri, laissez-moi quelques jours pour me retourner (Balzac, Corresp., 1835, p. 781).D'ici huit mois nous avons largement le temps de nous retourner (Montherl., Célibataires, 1934, p. 747).
6. Se retourner contre qqn.S'opposer, après avoir été allié, ami. Rien n'égale (...) le scandale et l'ignominie de la trahison des saxons, qui, nos frères de périls et de fortune, dans nos rangs mêmes se retournent subitement contre nous pour nous égorger (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 2, 1823, p. 31).Cependant la population arabe, dit-on, commence à déchanter, à se retourner contre ceux qu'elle fêtait d'abord (Gide, Journal, 1943, p. 197).
[Le suj. désigne un moyen] Devenir dangereux, nuisible pour la personne qui a d'abord utilisé le moyen, avoir un effet de boomerang. Aujourd'hui, cette preuve, mensongère contre Dreyfus, se retourne contre ceux qui, en étant détenteurs, ont trahi les secrets d'État − sans avoir été jamais inquiétés (Clemenceau, Vers réparation, 1899, p. 168).
Dans la lang. jur. Agir en justice contre une personne pour la rendre responsable d'une faute ou d'un dommage dont les charges pèsent sur soi, ou faute d'un responsable direct. Si l'auteur est inconnu, ou ne peut être déterminé, on pourra alors se retourner contre l'éditeur ou l'imprimeur, mais ceux-ci ne seront pas considérés de plein droit comme responsables de l'article incriminé (Civilis. écr., 1939, p. 44-13).
7. Se retourner vers.Avoir recours (à quelqu'un ou quelque chose) après avoir échoué ailleurs. La première crise déclencha dans le midi de la France des troubles assez graves, puis, à la suite de l'échec prévisible de l'émeute, le vigneron se retourna vers le législateur, le syndicalisme et la coopération, toutes choses assez nouvelles dans les milieux agricoles (Levadoux, Vigne, 1961, p. 84).On s'était vite rendu compte que la force musculaire humaine était décidément insuffisante pour fournir la propulsion, et l'on s'était retourné vers le seul moteur connu, la machine à vapeur (P. Rousseau, Hist. techn. et invent., 1967, p. 356).
B. − [Corresp. à supra II] S'en retourner. Aller là d'où l'on vient, là où l'on vit habituellement. Synon. repartir, rentrer.Je suis encore ici pour douze jours, après quoi je m'en retourne dans la capitale avec mon livre achevé (Flaub., Corresp., 1862, p. 280).Vous allez partir? Quand reviendrez-vous? À l'automne, pour cueillir mon raisin. Revenez. Vous allez prendre le tramway pour vous en retourner, c'est plus commode (Jouve, Paulina, 1925, p. 261).
S'en retourner comme on est venu. Repartir sans avoir obtenu ce qu'on souhaitait. Il n'avait pu rien distinguer. Et il s'en retourna comme il était venu... avec son rêve (Barb. d'Aurev., Memor. pour l'A... B..., 1864, p. 439).
S'en retourner gros Jean comme devant. Même sens. On rit à belles dents de « l'aspirant au trône », qui s'en retournerait Gros-Jean comme devant (Cladel, Ompdrailles, 1879, p. 297).
REM.
Retournable, adj.,comm. [En parlant d'un matériau, d'un produit, d'un emballage] Qui peut être retourné à l'expéditeur. Le conditionnement moderne des fruits tend vers l'usage généralisé de l'emballage dit « perdu » (non retournable à l'expéditeur), qui est propre et limite beaucoup les manutentions (Boulay, Arboric. et prod. fruit., 1961, p. 107).
Prononc. et Orth.: [ʀ ətuʀne], (il) retourne [-tuʀn]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. Trans. A. 842 returnar « détourner (quelqu'un de quelque chose) » (Serments de Strasbourg ds Bartsch Chrestomathie 1908, n o2, 19: si io returnar non l'int pois). B. 1. a) Ca 1165 retorner « renvoyer, rendre » (Troie, éd. L. Constans, 27011: qu'il retorna sa fille ariere); b) 1832 « renvoyer, réexpédier » (Balzac, Corresp., p. 135: il faut me retourner le manuscrit); 2. 1170-83 « orienter, diriger dans un sens opposé » (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, III, 2844: returné vers vostre vis); 3. a) xives. [ms.] « utiliser (ses propres armes) contre quelqu'un » (Psautier [Mazarine 258], f o64 ds Littré: Sire Dieux, retorne à mes anemis leur maus [Ps. 53, 7]); 1466 (Henri Baude, Vers, éd. J. Quicherat, p. 28: ses coups on luy retourne); b) av. 1564 « répliquer à quelqu'un en utilisant ses arguments, ses critiques, etc. » (Calvin, s. réf. ds Dochez: nous retournerons leur argument contre eux-mesmes); 1563 (Ronsard, Responce, 640 ds Œuvres, éd. P. Laumonier, t. 11, p. 149); 1662 (A. Arnauld et P. Nicole, Log., p. 286: retourner [un dilemme]); c) 1872 iron. (Flaub., Corresp., p. 339: te retourner ton aimable mot); 1918 retourner le compliment (Maurois, Sil. Bramble, p. 31); d) 1878 fam. (Rigaud, Dict. jargon paris., p. 17: Retourner atout, donner une gifle); 1964 retourner une gifle (Lar. encyclop.). C. 1. a) Déb. xiiies. retourner qqn « le faire changer d'avis » (Vie des Pères, ms. Lyon, 772, Bullet. A. T., 1885, p. 79 ds Gdf. Compl.); b) fin xves. fig. retourner sa robe « changer d'opinion, de parti » (J. Molinet, Chron., éd. G. Doutrepont et O. Jodogne, t. 2, p. 215); 1870 retourner sa veste (Zola, La Fortune des Rougon, ch. IV, in Le Siècle, 21 juill., p. 1 ds Quem. DDL t. 16); c) 1862 retourner la situation (Hugo, Misér., t. 1, p. 112); 2. a) déb. xives. « tourner à l'envers » (De la damoisele qui n'ot parler, 52 ds J. Rychner, Contribution à l'ét. des fabliaux, t. 2, p. 122: sa busche au soloil retorne); b) 1680 « tourner (une carte) pour qu'on en voie la figure » (Rich.); 1680 retourner de pique (ibid.); 1718 qu'est-ce qui retourne? il retourne cœur (Ac.); 1739 fig. de quoi il retourne « de quoi il est question » (Caylus, Écosseuses ds Œuvres badines, t. 10, p. 587); 3. a) fin xives. « mettre sens dessus dessous » (Froissart, Chron., éd. G. Raynaud, t. 11, p. 73: la ville retourner toute che desoulx deseure), attest. isolée; à nouv. 1822 (Delacroix, Journal, t. 1, p. 18: une idée [...] retourne les résolutions); b) 1660 retourner la terre (Oudin Fr.-Esp. ds FEW t. 13, p. 64a); c) 1761 retourner la salade (J.-J. Rousseau, Nouvelle Héloïse, VI, 2, éd. H. Coulet, Bibl. Pléiade, p. 644); 4. 1560 « modifier (un mot) par la permutation de ses éléments » (Ronsard, Continuation des Amours ds Œuvres, t. 7, p. 123, var.); 5. 1851 fam. « bouleverser, causer une violente émotion à » (Sainte-Beuve, Caus. lundi, t. 5, p. 132); av. 1860 (Scribe, s. réf. ds Dochez: votre récit m'a tout retourné). D. 1. Ca 1320 « tourner dans tous les sens » (Watriquet de Couvin, Dits, éd. A. Scheler, p. 74, 26: Fortune [...] le plus haut tourne et retourne); 2. fin xives. fig. « revenir sur, examiner, débattre » (Froissart, op. cit., p. 104: pluiseurs parolles retournées); 1573 (Garnier, Hippolyte, éd. W. Foerster, 1571: Elle tourne et retourne en elle Mainte mensongere cautelle). II. Pronom. A. 1. a) fin xes. « repartir, s'en aller » (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 422: cum se retornent); b) ca 1050 (Alexis, éd. Chr. Storey, 120: s'en returnerent); 2. 1130-40 « tourner la tête, faire demi-tour » (Wace, Ste Marguerite, éd. E. A. Francis, 401: au deable se retorna); 3. 1188 « changer de position » (Aimon de Varenne, Florimont, éd. A. Hilka, 7733 ds T.-L., 1151: El lit se viret et retorne). B. 1. Ca 1200 au fig. « se rapprocher de nouveau de quelqu'un » (Poème moral, éd. A. Bayot, 910: de tot vostre cuer a moi [Dieu] vos returneiz); 2. 1407-27 « changer d'opinion, de parti » (P. de Fenin, Mém., éd. E. Dupont, 1413 ds Littré); 3. a) 1563 se retourner contre « lutter contre » (Palissy, Recepte, Dédicace, éd. A. France, p. 15), attest. isolée; à nouv. 1794 (Staël, Lettres L. de Narbonne, p. 217); b) 1804 se retourner contre « retomber sur, être néfaste à (sujet inanimé) » (Constant, Journaux, p. 75); 4. 1723 « s'adapter à des circonstances nouvelles, prendre d'autres dispositions » (Marivaux, Spectateur fr., XIX, éd. F. Deloffre et M. Gilot, p. 219: une femme se retourne comme elle peut dans ces occasions-là); 5. a) 1834 « regarder en pensée ce qui a été accompli, vécu » (Musset, On ne badine pas, p. 50: on se retourne pour regarder en arrière); b) 1835 « redescendre en soi-même, se replier sur soi-même » (Vigny, Chatterton, p. 235: [le grand écrivain] se tait [...] se retourne sur lui-même). III. Intrans. A. 1. ca 1100 returner « aller de nouveau (où on est déjà allé) » (Roland, éd. J. Bédier, 1060); 2. ca 1160 retorner « revenir sur ses pas, aller en arrière » (Eneas, éd. J. J. Salverda de Grave, 208); 3. ca 1170 « aller au lieu d'où l'on est venu, où l'on devrait être normalement » (Chrétien de Troyes, Erec, éd. M. Roques, 2229: qu'au plus tost qu'il porra retort); 4. 1276 « (en parlant de quelque chose) être restitué à, redevenir la propriété de » (Hist. de Bourgogne, II, 44 ds Gdf. Compl.: li heritages [...] retorneroit [...] a Robert). B. 1. Ca 1180 « retrouver son état initial, revenir à un stade antérieur » (Marie de France, Fables, éd. K. Warnke, p. 249, 80: Or me covient a returner E rencliner a ma nature); 2. a) ca 1180 « se remettre (à une activité), adopter de nouveau (une croyance, un comportement) » (Id., ibid., p. 82, 59: voldreit a lui [sun malvais us] returner); b) ca 1200 « se convertir, revenir à (Dieu) » (Poème moral, éd. A. Bayot, 921: a Deu returneir); 3. a) ca 1200 « aborder de nouveau (un sujet dont on s'était éloigné) » (ibid., 475: a ce dont voliens dire tens est de returner); ca 1230 (Fille du Comte de Ponthieu, réd. remaniée, éd. C. Brunel, SATF, p. 50: retournerons a parler de la Mulaine); ca 1480 retournons à nos moutons (v. mouton); b) 1376 « recommencer à, faire de nouveau » (Modus et Ratio, éd. G. Tilander, § 97, 98: retourne à lui donner plume). Dér. de tourner*; préf. re-*. Fréq. abs. littér.: 12 228. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 14 665, b) 20 425; xxes.: a) 19 861, b) 16 595.
DÉR. 1.
Retournage, subst. masc.a) Cout. Action de refaire un vêtement, une pièce d'étoffe en retournant l'étoffe. [Le] retournage des paletots (Montherl., Pte Inf. Castille, 1929, p. 625).b) Brass. Opération qui consiste à retourner l'orge en germination pour l'aérer, l'homogénéiser. L'installation du retournage mécanique [des couches d'orge] (Boullanger, Malt., brass., 1934, p. 141). [ʀ ətuʀna:ʒ]. 1resattest. a) 1715 « action de retourner » (Décl., 22 oct., Tarif ds Littré: retournage de bateau), b) 1842 « action de retourner des boyaux » (Ac. Compl.), c) 1871-72 « action de soumettre de nouveau une pièce au tour » (Almanach Didot-Bottin, 4ecol. ds Littré Suppl. 1877), d) 1927 cout. (affiche à Paris en 1927 d'apr. Gall. 1955, p. 352: retournage de pardessus), 1929 (Montherl., loc. cit.), e) 1934 brass. (Boullanger, loc. cit.); de retourner, suff. -age*.
2.
Retourneur, -euse, subst.[Corresp. à supra I] a) α) P. iron. Garde-malade, infirmier. Autant voudrait être caniche d'aveugle (...), culotteur de pipes, retourneur d'invalides, promeneur de chiens convalescents (Gautier, Jeunes-Fr., Contes humoristiques, 1839, p. 311). β) Au fém. Couturière qui retourne les vêtements. Une retourneuse d'habits (Lar. 19e). b) Subst. masc., brass. Appareil utilisé pour retourner automatiquement l'orge en germination. La technique de la germination [de l'orge] est variée. Elle s'effectue soit sur aire, soit dans des cases munies de retourneurs mécaniques ou dans des tambours tournants [germination pneumatique] (Industr. fr. brass., 1955, p. 7). [ʀ ətuʀnœ:ʀ], fém. [-ø:z]. 1resattest. a) xves. « celui qui retourne, qui revient » (Gloss. lat.-fr., ms. Montpellier, H 110, f o221 v ods Gdf.: Redius, retourneur ou messagier), attest. isolée, b) 1770 « celui qui retourne, ressasse (des idées, des paroles) » (Grimm, Corresp., Paris, Buisson, 1812, IIepart., t. 1, p. 169: des retourneurs d'idées et de paroles), attest. isolée, c) 1839 p. iron. (Gautier, loc. cit.), d) 1875 « personne qui retourne les habits » (Lar. 19e), e) 1934 brass. (Boullanger, Malt., brass., p. 138); de retourner, suff. -eur2*.
BBG.Gall. 1955, p. 352 (s.v. retournage). − Quem. DDL t. 16, 32. − Sankoff (G.), Thibault (P.). L'Alternance entre les auxil. avoir et être en fr. parlé à Montréal. Lang. fr. 1977, n o34, pp. 99-100.

Wiktionnaire

Verbe - français

retourner \ʁə.tuʁ.ne\ intransitif ou transitif 1er groupe (voir la conjugaison) (pronominal : se retourner)

  1. Aller de nouveau en un lieu.
    • Mordi ! dit-il, j’espère qu’il est mort, ou sans cela je retournerais au Louvre pour l’achever. — (Alexandre Dumas, La Reine Margot, 1845, volume I, chapitre IX)
    • Il nous semble être retourné au collège, de nouveau nous marchons en rang, nous faisons des devoirs et surtout des pensums, et l’on nous astreint au silence… — (Jean Heimveh, Question d’Alsace, 1889)
  2. Revenir au lieu d’où l’on est venu.
    • Rosebud se cherche toujours. Elle ne sait pas exactement ce qu’elle veut, mais elle sait très bien ce qu’elle refuse : retourner à Aix et devenir la parfaite épouse d'un pinardier. — (Michel Lebrun, Les ogres, French Pulp éditions, 2014, chap. 21)
    • (Figuré)Dès qu'il s'éloigne du sol natal, sa pensée y retourne avec un charme douloureux et persistant. Dole, Dijon, Auxerre, Joigny, Sens, Fontainebleau, tous ces grands relais de poste, n'intéressaient que médiocrement les deux enfants. — (René Vallery-Radot, La vie de Pasteur, Hachette, 1900, Flammarion, 1941, p. 16)
    • C'est au moment où les eaux retournent à la mer qu'on fait dans ces graux la singulière pêche du turbot, qui rappelle celle des Écossais, décrite dans le Redgauntlet de Walter-Scott. — (M. de Rivière, « Mémoire sur la Camargue », dans les Annales de l'agriculture française, 2e série, tome 34, Paris : chez Madame Huzard, avril 1826, p. 74)
    • En effet, mon arrière-arrière-grand-père avait fui la Chine, vers 1890, pour aller au Cambodge, à cause de la misère et de la pauvreté. Il n’est jamais retourné en Chine. — (David Lepoutre, avec ‎Isabelle Cannoodt, Souvenirs de familles immigrées, Éditions Odile Jacob, 2005)
  3. Recommencer à faire les mêmes choses, les mêmes actions.
    • Retourner à l’ouvrage.
    • Retourner au travail.
    • Retourner au combat.
    • Retourner à la charge.
  4. (Droit) Faire retour.
    • Les biens, en certains cas, retournent au propriétaire qui en a disposé.
  5. Tourner d’un autre côté.
    • Les hommes, y disait-on, ne valent pas mieux que la pâte que tourne et retourne dans le pétrin, la main de la ménagère. — (Out-el-Kouloub, « Zariffa », dans Trois Contes de l’Amour et de la Mort, 1940)
    • Alors les retournant et les soupesant : « Charcot, me dit-il, y a-t-il de l’or ou de l’argent là-dedans ? » et devant ma négation, il me les rendit avec mépris. — (Jean-Baptiste Charcot, Dans la mer du Groenland, 1928)
    • Le donneur distribue 7 cartes à chaque joueur et retourne la première carte de la pioche, qui constitue l’entame. — (Yann Caudal, Le grand guide des jeux de cartes, Éditions Eyrolles, 2011, p.71)
    • Dans « Remarques sur le rapport de D. Lagache », Lacan donne à penser le corps comme un gant que l'on pourrait retourner, ce qui donne à la peau cette réversibilité à partir des anneaux orificiels : […]. — (Bernard Andrieu, La Nouvelle Philosophie du corps, Toulouse : éd. Erès, 2002, chap. 5)
  6. (Par analogie) Imputer à autrui ses propres turpitudes.
    • Lorsque a commencé en Afrique la colonisation à proprement parler, la métaphore du cannibalisme a été adoptée par les Européens, qui l’ont retournée contre les Africains. C’étaient maintenant les Africains qui étaient les cannibales, mangeurs de missionnaires. — (Françoise Vergès, À vos mangues !, traduction de Dominique Malaquais, dans Politique africaine, 2005/4, n° 100, p. 320)
  7. (Vieilli) (Couture) Refaire, réparer, un vêtement, en mettant en dehors l’envers du tissu quand l’endroit est usé.
    • Exemple d’utilisation manquant. (Ajouter)
  8. (Cuisine) Remuer en tous sens pour lui faire prendre l’assaisonnement, en parlant d’une salade.
    • Exemple d’utilisation manquant. (Ajouter)
  9. (Agriculture) Bêcher, labourer, pour implanter une culture.
    • Retourner la terre, le sol.
    • Retourner de la luzerne, du gazon.
  10. (Figuré) (Familier) Faire changer d’avis ou de parti à quelqu’un.
    • J’ai su depuis qu’elle m’accusait d’avoir, pendant ces quelques secondes, « retourné » Janine et de m’être amusé « à lui mettre un tas d’idées en tête ». — (François Mauriac, Le Nœud de vipères, Grasset, 1933, réédition Le Livre de Poche, page 154)
    • Il fallait l'entendre ! En trois coups de cuiller à pot, il les a tous retournés. Il leur a boni un coup de sentiment à faire renifler le diable et l’enfer ! — (Marcel Aymé, Vogue la galère, Éditions Bernard Grasset, 1944, page 117)
    • En quarante-huit heures la môme le retourne comme un vieux pardessus et depuis il n’a plus jamais été le même. — (Peter Cheyney, La Môme vert-de-gris, chapitre V, traduction de Marcel Duhamel, Gallimard, 1945)
    • S’il a peu d’affinités avec l’impénétrable Robespierre que tous ces jeunes queutards traitent d’eunuque, il est fasciné en revanche par l’éloquence de l’avocat Danton qui n’a pas son pareil pour retourner un auditoire hostile. — (Alain Bouzy, La loi de la guillotine: La véritable histoire de la bande d’Orgères, Le Cherche-Midi, 2016, part. 4, chap. 1)
  11. (Figuré) Remuer pour chercher.
    • Il a dû retourner son appartement de fond en comble pour trouver cette lettre.
  12. (Anglicisme) (Informatique) Renvoyer une information, une valeur après l’exécution d’une commande ou d’une instruction dans le cadre d’une fonction.  (anglicisme : à préciser ou à vérifier)
    • Cette option retourne VRAI si la commande exécutée retourne un code retour (exit code) valant 0. — (Martial Bornet, Expressions régulières, Éditions ENI, 2015, page 75)
  13. (Figuré) Renvoyer.
    • Retourner un envoi, un compliment.
  14. (Figuré) (Familier) Émouvoir.
    • Ce qui tourmentait et désolait et retournait le curé de Melotte, c’était le dévergondage des filles et des garçons du pays. — (Louis Pergaud, Le Sermon difficile, dans Les Rustiques, nouvelles villageoises, 1921)
  15. (Impersonnel) De quoi il retourne équivaut à de quoi il s’agit, ce dont il est question.
    • le consentement de l’enfant est maintenant nécessaire si l’enfant comprend suffisamment de quoi il retourne. — (fiche d’information sur l’adoption du Conseil de l’Europe)
    • Je m’étais dit : « Je vais faire un tour du côté des coulisses, pour savoir ce qui en retourne. » (au lieu de : ce qu’il en est) — (Jo Barnais [Georges Auguste Charles Guibourg, dit Georgius], Mort aux ténors, ch. II, Série noire, Gallimard, 1956, p. 16)
  16. (Anjou) Ressembler à l’un de ses parents.
    • Eh bien le petit Édouard, je trouve qu’il retourne sur sa mère.
  17. (Pronominal) Se tourner dans un autre sens.
    • Elle était couchée auprès de moi. Elle se retourna sans aucun dessein de me proposer une posture ; […]. — (Pierre Louÿs, Trois filles de leur mère, René Bonnel, Paris, 1926, chapitre IV)
    • Durant ces années, tu t'imagines, j'ai vécu tous les cas de figure possibles. Les louloutes qui s'éloignent sans un mot, celles qui se retournent brusquement et vous fusillent du regard. Celles qui vous traitent calmement de vieux salaud. — (Marc Bressant, Assurez-vous de n'avoir rien oublié, éd. de Fallois, 2010, page 128)
  18. (Pronominal) (Figuré) (Familier) Prendre d’autres moyens, prendre d’autres arrangements en rapport avec des circonstances, des conditions nouvelles.
    • Ses affaires traversent une crise ; mais il saura bien se retourner.
    • Laissez- lui le temps de se retourner.
  19. (Familier) Donner un coup.
    • Léodagan : Sans blague ? Et vous avez rien d'autre à foutre, à part retourner le pain ?
      Arthur : Si… j’peux vous retourner une tarte si le cœur vous en dit…
      — (Alexandre Astier, Kaamelott, Livre III, épisode Le Porte-bonheur)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

RETOURNER. v. intr.
Aller de nouveau en un lieu. Retournez-vous cet été à Deauville? Je retourne cette semaine à Marseille. Il y a longtemps que je n'y suis allé, je serai content d'y retourner. Il signifie aussi Revenir au lieu d'où l'on est venu. Il est retourné dans son pays. Il veut retourner aux colonies. Retourner sur ses pas. Retourner en arrière. Fig., Retourner en arrière, Abandonner une entreprise dont on est rebuté. Fig., Retourner à Dieu, Se convertir.

RETOURNER signifie encore Recommencer à faire les mêmes choses, les mêmes actions. Retourner à l'ouvrage. Retourner au travail. Retourner au combat. Retourner à la charge. En termes de Jurisprudence, il signifie Faire retour. Les biens, en certains cas, retournent au propriétaire qui en a disposé.

RETOURNER s'emploie aussi comme verbe transitif et signifie Tourner d'un autre côté. Retourner une crêpe. Retourner du foin pour qu'il sèche. Retourner un vêtement, Le refaire, en mettant en dehors l'envers du tissu quand l'endroit est usé. Retourner la salade, La remuer en tous sens pour lui faire prendre l'assaisonnement. En termes d'Agriculture, Retourner la terre, le sol, Bêcher un terrain pour le disposer à recevoir une culture. On dit dans le même sens : Retourner de la luzerne, du gazon, Bêcher un terrain semé de luzerne, etc. Fig., Retourner une situation, Rendre bonne une situation qui était mauvaise, ou inversement. Fig., Retourner à quelqu'un le poignard dans le cœur, lui retourner le poignard dans la plaie. Voyez POIGNARD. Fig. et fam., Retourner quelqu'un, Lui faire changer d'avis, de parti. Il était de notre avis, mais on l'a retourné. Il s'est laissé retourner. Fig. et fam., Je l'ai tourné et retourné en tous sens et le n'en ai pu tirer aucun éclaircissement. J'ai pris différents biais, je lui ai tenu différents discours pour le faire parler, sans qu'il ait jamais voulu rien dire.

RETOURNER signifie encore Renvoyer. Retourner un envoi. Fig., Retourner un compliment. Il signifie encore, figurément et familièrement, Émouvoir. Cette nouvelle m'a tout retourné.

RETOURNER se dit, en termes de jeu de Cartes, de la Carte qu'on montre à la fin de la distribution. Il faut retourner une carte. J'ai retourné carreau. Fig. et fam., Vous ne savez pas de quoi il retourne, Vous ne savez pas ce qui se passe, quel est l'état des choses. Voyons de quoi il retourne, Voyons de quoi il est question, voyons ce qui se passe.

SE RETOURNER signifie Se tourner dans un autre sens. Quand je l'appelai, il se retourna vers moi, il se retourna. Il ne fait que se tourner et se retourner dans son lit. Il signifie figurément et familièrement Prendre d'autres moyens, prendre d'autres arrangements en rapport avec des circonstances, des conditions nouvelles. Ses affaires traversent une crise; mais il saura bien se retourner. Laissez-lui le temps de se retourner.

S'EN RETOURNER signifie S'en aller. Retourne-t'en. Retournez-vous-en. Il s'en retourna comme il était venu. Elle s'en est retournée.

Littré (1872-1877)

RETOURNER (re-tour-né)
  • 1 V. a. Tourner dans un autre sens. Retourner une rôtie.

    Retourner un habit, le découdre et le refaire en mettant en dehors l'envers du drap quand l'endroit est usé.

  • 2Aux jeux, retourner une carte, tourner une carte de manière qu'on en voie la figure.

    Retourner cœur, pique etc. se dit, à certains jeux, de la carte qu'on retourne, après que tous les joueurs ont eu les cartes qu'ils devaient avoir.

    Impersonnellement et neutralement. Il retourne cœur. Le coup précédent il a retourné pique. Qu'est-ce qui retourne ? De quoi retourne-t-il ?

    Fig. et familièrement. Vous ne savez pas de quoi il retourne, vous ne savez ce qui se passe, quel est l'état des affaires. Je lui demanderai nettement de quoi il retourne, Mirabeau, Lett. orig. t. III, p. 294.

    Voyons de quoi il retourne, voyons de quoi il est question, voyons ce qui se passe.

    Populairement. De quoi il retourne, ce qui se produit de nouveau. Voici de quoi il retourne pour le quart d'heure.

  • 3 Terme de tailleur de pierres. Retourner une pierre, lui faire un second parement opposé au premier, de sorte qu'ils soient parallèles entre eux.
  • 4Retourner la salade, remuer la salade dans le saladier, jusqu'à ce qu'elle ait bien pris tout l'assaisonnement. Il ne me reste que six mois à retourner la salade avec les doigts [au XVIIIe siècle les jeunes dames retournaient la salade avec leurs doigts], Rousseau, Hél. VI, 2.
  • 5 Terme d'agriculture. Retourner le sol, le bêcher profondément. Le père mort, les fils vous retournent le champ Deçà, delà, partout ; si bien qu'au bout de l'an Il en rapporta davantage, La Fontaine, Fabl. V, 9. Car le manant avec peine et sueur La retournait [la terre] et faisait son labeur, La Fontaine, Papefig. Vois-tu d'ici ces gens dont la fortune Est dans leurs bras, qui, la bêche à la main, Le dos courbé, retournent ce jardin ? Voltaire, Enf. prodigue, III, 1.

    On dit dans le même sens : retourner de la luzerne, du gazon, bêcher un terrain semé de luzerne, de gazon.

  • 6Donner une seconde trempe à la chandelle à la baguette.
  • 7Tourner en arrière. Je retournais souvent la tête pour revoir encore le jeune homme que je laissais derrière moi ; mais je ne croyais pas me retourner pour lui, Marivaux, Marianne, 2e part.
  • 8 Fig. et familièrement. Retourner quelqu'un, lui faire changer d'avis, de parti.

    On dit de même : il s'est laissé retourner.

    Tourner et retourner quelqu'un de tous sens, prendre différents biais pour le faire parler. Je lui donnai votre lettre ; elle montra la plus grande surprise en la voyant, et nia formellement le fait ; je la retournai de toutes les manières, Genlis, Mères riv. t. II, p. 18, dans POUGENS. Après avoir examiné strictement cet homme comme espion, et l'avoir retourné en tout sens, en lui faisant peur…, Corresp. du général Klinglin, I, 455.

    Retourner quelqu'un, signifie aussi lui causer une vive émotion. Votre récit m'a tout retourné.

  • 9Tourner et retourner quelque chose, l'examiner à différents points de vue. Plus je tourne et retourne cette idée [que Dieu peut communiquer la pensée à la matière], plus elle me paraît vraie, Voltaire, Lett. Formont, avril 1734.
  • 10Retourner une chose, la redire de plusieurs façons différentes. Quand les gens coupables tiennent une pauvre petite vérité pour eux, ils la retournent de cent façons, et sont insupportables, Sévigné, 118. Il dit et il retourne en quatre vers sans force, qu'il fera un sujet fidèle, Voltaire, Lett. Thibouville, 8 févr. 1773.
  • 11Rétorquer. Celui qui se sert d'un dilemme doit prendre garde qu'on ne le puisse retourner contre lui-même, Logique de Port-Royal, V, 15.

    Familièrement. Retourner à quelqu'un les paroles dans la bouche, se servir contre lui des mêmes raisons que celles dont il se sert contre nous.

  • 12 Terme de commerce. Retourner des effets de commerce, des marchandises, les renvoyer à un correspondant.
  • 13 V. n. Aller de nouveau dans un lieu. Retourner en arrière. Vous êtes déjà allé à Lyon ; retournez-y.

    Aller là d'où on était venu. Retournez à l'armée, et, pour me protéger, Montrez cent mille bras tout prêts à me venger, Corneille, Nicom. I, 1. Il lui fallut à jeun retourner au logis, Honteux comme un renard qu'une poule aurait pris, La Fontaine, Fabl. I, 18. Le soleil baisse fort, et je suis étonné Que mon valet encor ne soit point retourné, Molière, Fâch. II, 1. Je suis bien aise de les venir voir [M. et Mme de Chaulnes à Rennes]… mais il faut que l'espérance de retourner dans mon repos [aux Rochers] me soutienne, Sévigné, 20 juill. 1689. Acomat, c'en est fait, Vous pouvez retourner, je n'ai rien à vous dire, Racine, Baj. II, 2. Il me faut sans honneur retourner sur mes pas, Racine, Iphig. II, 5. Retournez, consolez ce vieillard que j'honore, Voltaire, Tancr. IV, 4. Je vous défends de retourner sans mon ordre, Rousseau, Hél. I, 15.

    Retourner, avec un infinitif. Retournez dès ce jour apprendre à Corbulon Comme on reçoit ici les ordres de Néron, Crébillon, Rhadamiste, II, 2.

  • 14Il se dit de ce qui est comparé à un retour. Rome, depuis trois ans, par ses soins [de Néron] gouvernée, Au temps de ses consuls croit être retournée, Racine, Brit. I, 1. Retournez, retournez à la fille d'Hélène, Racine, I, 4.

    Retourner en arrière, renoncer à une entreprise dont on est rebuté.

    Retourner à Dieu, se convertir. Suivez-la [une âme pénitente] dans tous les pas qu'elle fait pour retourner à lui [Dieu], Bossuet, la Vallière.

    En un sens opposé. Un Achab, qui, averti par Élie, tantôt se couvre de cendre et de cilice, puis retourne à ses idoles, Massillon, Carême, Inconst.

    Retourner à son vomissement, voy. VOMISSEMENT.

  • 15Retourner à. Recommencer à. Retourner au travail, au combat. Je le prie [M. de Grignan]… de prendre soin d'accourcir les lignes que je veux de vous ; il me paraît que vous l'avez trompé… je vous demande tendrement de n'y plus retourner, Sévigné, 2 févr. 1680. Ce serait une folie impardonnable à son âge ; mais il n'y retournera plus, madame ; et je vous demande pardon de sa témérité, Pont de Vesle, Somnamb. 16.

    Retourner à, avec un infinitif. C'est ce qui fait que je retourne encore à vous envoyer une de ces lettres, Sévigné, à d'Hérigoyen, 23 avr. 1687.

    Par manière de réprimande. N'y retournez plus, ne retombez plus dans la même faute. Si vous y retournez, on vous apprendra le respect que vous devez à votre femme, Molière, G. Dand. III, 14.

  • 16S'occuper de nouveau de, penser à, parler de. Elle [Mademoiselle] retourna sur la maison et sur les bonnes qualités de M. de Lauzun, Sévigné, 12. Je ne veux point retourner sur tout ce que j'ai souffert pendant mon grand mal, Sévigné, 15 mars 1676. Cette Providence me retient ; car, sans cela, on n'aurait jamais fait de retourner sur le passé ; c'est un écheveau qui ne finirait point, Sévigné, 24 juill. 1689.
  • 17Retourner sur, retomber sur. Et souvent la perfidie Retourne sur son auteur, La Fontaine, Fabl. IV, 11. Je ne comprends que trop toutes vos peines ; elles retournent sur moi, de sorte que je les sens de deux côtés, Sévigné, 17 avril 1689.

    Dans un sens opposé. Toutes les louanges que je lui donne retournent à Dieu, qui en est la source, Fléchier, Turenne.

  • 18Être renvoyé, être répété, être mentionné dans une réponse. Parlez-moi de vous, de vos affaires… tout est sûr, rien ne se voit, rien ne retourne, Sévigné, 29 nov. 1684. Je suis bien aise que vous ayez vu le dessous des cartes du procédé de M. de Pompone et de Mme de Vins, et que vous soyez entrée dans leur politique, sans en avoir rien fait retourner à Paris, Sévigné, 16 fév. 1676. Voilà bien des folies que je ne voudrais dire qu'à vous… je vous prie que cela ne retourne jamais, Sévigné, 19 janv. 1674.
  • 19Être restitué à, faire retour à. Terres qui doivent retourner au propriétaire qui en a disposé. Cette terre est retournée depuis à la maison de Luxembourg, Duclos, Œuv. t. III, p. 294.
  • 20 Terme de maçon. Retourner d'équerre, établir une perpendiculaire en un point d'une ligne droite réelle ou fictive.

    Retourner, v. n. se conjugue avec être ; rarement avec avoir ; cependant il y en a des exemples. J'ai retourné depuis à Versailles avec Mme de Verneuil, pour faire ce qui s'appelle sa cour, Sévigné, 7 août 1675.

  • 21Se retourner, v. réfl. Se tourner dans un autre sens. Il est si faible qu'il ne peut se retourner dans son lit. Horace, les voyant l'un de l'autre écartés, Se retourne, et les croit déjà demi-domptés, Corneille, Hor. IV, 2. La Mothe le Vayer se retourna vers lui [Saint-Sorlin, qui lui reprochait de n'avoir point de religion], et daigna lui dire : Mon ami, j'ai tant de religion, que je ne suis pas de ta religion, Voltaire, Poëme, Lisbonne, préface. Il [le moyen duc] se retourne sur le dos, pour se défendre quand il est assailli par un ennemi trop fort, Buffon, Ois. t. II, p. 138. J'ai coupé à des feuilles de vigne quelques-unes des principales nervures, elles n'ont pas laissé de se retourner, Bonnet, Us. feuilles, 2e mém.

    Fig. Dégoûtés du monde et de nous-mêmes, nous nous sommes souvent retournés vers le Seigneur, Massillon, Carême, Inconst.

  • 22 Fig. et familièrement. Prendre d'autres mesures. Et je voulus après cette aventure Me retourner vers la magistrature, Voltaire, le Pauvre diable.

    Absolument. Il saura bien se retourner. Une longue et cruelle indigence, de grands airs et un grand usage du monde lui avaient [à de Guiche] appris à se retourner, Saint-Simon, 421, 75.

  • 23Se retourner d'équerre, mener une perpendiculaire sur une ligne effective ou supposée.
  • 24S'en retourner, s'en aller. Il eut permission de faire rapporter les coffres chez lui, et il s'y en retourna aussi avec Raymond, Audebert et Hortensius, qui avaient toujours été présents, Francion, liv. XII, p. 532. Je n'ai qu'à m'en retourner d'où je viens, Molière, Festin, I, 3. Et, dès devant l'aurore, Vous vous en êtes retourné, Molière, Amph. II, 2. Pour moi je suis ravie, et, si vous en doutez, écrivez-le-moi à Lyon, afin que je m'en retourne sur mes pas, Sévigné, 154. Si vous me retirez la main qui me protége, Tel que je suis venu, tel m'en retournerai-je, Boursault, És. à la cour, V, 2. Et de leur vain projet les chanoines punis S'en retournent chez eux éperdus et bénis, Boileau, Lutr. V. Ostorius : On m'a vu à l'hôtel de Bourgogne…Pluton : Retourne-t-y-en, Boileau, Héros de romans. Je m'en retournerai seule et désespérée, Racine, Iph. IV, 4.

    S'en retourner comme on est venu, faire un voyage, une visite, une tentative inutiles.

    PROVERBE

    C'est le ventre de ma mère, je n'y retourne plus, se dit d'une chose qu'on se repent d'avoir faite.

REMARQUE

Ne dites pas : je me suis en retourné ; mais : je m'en suis retourné.

HISTORIQUE

IXe s. Si io [je] returnar non l'int pois [ne l'en puis détourner], Serment.

XIe s. Si l'orrat [ouira] Charles, si returnerat l'ost, Ch. de Rol. LXXXI.

XIIe s. Il quereient lui, e returnowent, e le matin veneient à lui, Liber psalm. p. 108. Tuz murrums, et sumes cume l'ewe ki esculurge sur la terre et puis ne returne, Rois, p. 169. Et à Rome vouloit aler, Mais Mordret l'en a retourné [détourné], Brut, f° 99, dans LACURNE. Comment que longue demeure [interruption] [j'] Aie faite de chanter, Ore est bien raison et heure Que m'i doie retorner, Couci, IV. Quant de la terre sauvage [je] Ne voi nului retorner, Où cil est qui m'assoage Le cuer, quant j'en oi [ouis] parler, Dame de Faiel, dans Couci. Il est en pelerinage ; Moult [j'] atent son retorner, ib.

XIIIe s. Pour ce di-je qu'amors ne vaut neant, De neant vient et à neant retorne, Quesnes, Romancero, p. 86. Li serjant s'en retournent, n'i font arestoison, Berte, XXIII. Que trestous lor malices lor retourne à contraire, ib. LXIX. Vers la maison Simon [elle] a son vis [visage] retourné, ib. CXIV. Li Commain et li Grieu et li Blac retornerent arrieres, Villehardouin, CLVII. Sire dieux, retorne à mes anemis leur maus, Psautier, f° 64. Et endementieres que [pendant que] je aloie à Blechicourt, je ne voz [voulus] onques retourner les yex vers Joinville, Joinville, 209.

XIVe s. Lequel Jehan, qui s'estoit mis en franchise ou cimittire de St-Goudart, fut gité hors dudit cimittire, et le retournerent en la prison, Du Cange, retornare. Lessons ceste question, et retournons à la premiere, Oresme, Éth. 23. Telz espargne le sien et est bien enfermez, Qui pour moy aïdier retournera ses clefs, Guesclin. 13460.

XVe s. Il commença à varier et ne repondit point bien à leurs propos ; ils le retournerent [le pressèrent de questions], et lui dirent qu'il convenoit qu'il vinst parler à leur seigneur, Froissart, II, III, 119. À ce parlement qui fut à Gand, eut plusieurs paroles dites et retournées ; et conseillerent adonc les seigneurs que…, Froissart, I, I, 97. Si sommes chargés de vous dire que vous retournez arriere [restituiez] à messire Olivier de Clisson son heritage…, Froissart, liv. III, p. 217, dans LACURNE. Croire vous vueil sans plus doubter, Et tout le courroux et soussy Qu'il m'a convenu endurer, En joye le vueil retourner, Orléans, Bal. 57. Item fut prins messire Pierre Des Essars qui estoit prevost de Paris et avoit eu gouvernement vers le duc Jehan, et mout avoit tenu son party ; mais il se retourna …, Fenin, 1413. Ainsi faut conclure que ce voyage fut conduit de Dieu, tant à l'aller qu'au retourner, Commines, VII, Prol. Lors toutes les joies du temps passé retournent en tristesses, Les 15 joyes du mariage, p. 104. Vat-en, mon ami, ne retourne Jamais, pour serjent qui t'ajourne, Patelin.

XVIe s. La dame, ces propos achevez, se retourna vers ses gentilzhommes et leur dist…, Rabelais, Pant. V, 23. Retournons arriere ; je meurs de male paour, Rabelais, ib. V, 36. Mais que sert tant de peine, o mortels insensez ? Il faut tous à la fin retourner à la terre, Desportes, Œuvres chrestiennes, sonnets, 4. Jamais Pantasilée ne feut receue en tel honneur, lequel procede de vous à qui je le retourne [renvoie], Marguerite de Navarre, Lett. 127. Vous pouvez estre seur que, sy vous estes malade, je retourneray à vous, Marguerite de Navarre, ib. 128. Avecques vostre lectre sa santé est retournée, et, combien qu'elle garde le lict, je n'y voy point de dangier de la lesser, Marguerite de Navarre, ib. 104. Nous sentons un plaisir singulier à escouter ceulx qui retournent de quelque loingtain voyage, Amyot, Préf. XIV, 42. Parquoy, estant retourné en sa convalescence, il donna congé aux medecins, Amyot, ib. XV, 43. Ayant occis le Minotaure, il s'en retourna dont il estoyt party, Amyot, Thés. 22. Le vaisseau sur lequel Theseus alla et retourna, estoit une galiotte à trente rames, Amyot, ib. 27. Ils fouyoient tousjours, et n'y en avoit pas un qui ozast se retourner, Amyot, Rom. 28. Sertorius feit un tel effort qu'il retourna toute l'armée des Romains entierement en fuite, Amyot, Sertor. 27. Aussi facilement que le timon fait retourner la navire, Montaigne, II, 195. Les ames particulieres en estoient extraictes [de l'âme du monde], et s'y en retournoient, Montaigne, II, 295. Qu'est-ce que promet Moyse au peuple, quand il se retournera à Dieu après avoir decliné en idolatrie ? Calvin, Inst. 831. Il craignoit aussi la retraite de quelques soldats françois, qui aux adversitez sont assez prompts de retourner leur robbe, Lanoue, 599. Ces coups sont bons à faire une fois, et n'y retourner pas souvent, pour le hazard qu'il y a, Lanoue, 651. Nos ans sans retourner s'en-volent comme un trait, Ronsard, 792. Si ces verrues retournent après estre gueries, Paré, V, 21. Il n'est chance qui ne retourne, Cotgrave Il ne va pas du tout à honte, qui de demie voye retourne, Cotgrave Qui mieux ne peut à sa vieille retourne, Cotgrave

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Encyclopédie, 1re édition (1751)

RETOURNER, v. act. & neut. (Gram.) c’est revenir au lieu d’où l’on étoit parti ; il s’en est retourné comme il étoit venu : faire plusieurs fois le même voyage ; Tavernier est retourné plusieurs fois aux Indes : interroger avec finesse ; je le retournerai de tant de façons que j’en arracherai la vérité : après avoir donné au breland & à d’autres jeux, montrer la derniere carte, & la placer sur le talon ; de quelle couleur retourne-t-il ? Se tirer d’une question, d’un pas embarrassant ; il sait se retourner : retomber dans ses anciennes habitudes ; il est retourné à son vomissement : mettre le dessus d’une étoffe dessous, & son envers dessus ; il a fait retourner son habit ; si vous le chassez avec maladresse, il retournera sur vous avec plus d’acharnement : on retourne sur soi-même : on retourne une pierre : on retourne une roue : on retourne une piece d’argent, une tabatiere pour la voir en-dessous : on retourne la terre.

Retourner une pierre, c’est la jauger ou lui faire une surface parallele, ou à-peu-près, à un lit ou à un parement donné.

Retourner, (Jardinage.) on se retourne d’équerre en traçant, lorsque l’on change l’alidale d’un instrument, & qu’on le met sur 90 degrés.

On dit retourner une planche, un gazon, une terre, quand on lui donne un nouveau labour un peu profond, ou que l’on la renverse sens-dessus-dessous. Voyez Améliorer.

Retourner, en terme de Blanchisserie, c’est l’action de mettre la cire suffisamment blanchie par-dessus en-dessous, & ce qui étoit dessous où le soleil n’a pu pénétrer, en-dessus pour les exposer à son tour. Cette opération se fait avec une main de bois. Voyez Main.

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Étymologie de « retourner »

Re…, et tourner ; bourg. retonnai ; Berry, ratourner, artourner ; wallon, ritourné ; provenç. et espagn. retornar ; ital. ritornare.

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(Siècle à préciser) Dérivé de tourner, avec le préfixe re-.
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Phonétique du mot « retourner »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
retourner rœturne

Fréquence d'apparition du mot « retourner » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « retourner »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « retourner »

  • Il se mit à manquer de respect aux femmes : à ne plus se retourner sur leur passage.
    Gilbert Cesbron
  • L'amitié est un parapluie qui a le défaut de se retourner quand il fait mauvais temps.
    Pierre Véron
  • Rien ne sert de se retourner pour attraper les idées qu’on a derrière la tête.
    Elie Semoun — Plaisantristes
  • Un homme n’est pas rivière et peut retourner en arrière.
    Proverbe italien
  • Révolution : c’est retourner le sablier.
    Jean Dubuffet
  • Il est bon de regarder en arrière, pas de se retourner.
    David Katan
  • Un incinéré ne peut pas se retourner dans sa tombe.
    José Artur — Les Pensées
  • Un homme n'est pas rivière, pour ne retourner en arrière.
    Miguel de Cervantès — Nouvelles Exemplaires
  • Un homme qui part ne doit jamais se retourner.
    Marc Levy — Et si c’était vrai...
  • Ne suivez jamais les traces du malheur, il pourrait bien se retourner et faire volte-face.
    Proverbe japonais
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Images d'illustration du mot « retourner »

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Traductions du mot « retourner »

Langue Traduction
Anglais return
Espagnol regreso
Italien ritorno
Allemand rückkehr
Chinois 返回
Arabe إرجاع
Portugais retorna
Russe возвращение
Japonais 返す
Basque ordainetan
Corse ritorna
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Synonymes de « retourner »

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Antonymes de « retourner »

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Nombre de points du mot retourner au scrabble : 9 points

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