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Coller

Définitions de « coller »

Trésor de la Langue Française informatisé

COLLER, verbe.

I.− Emploi trans.
A.− Joindre et fixer deux choses ensemble en se servant de colle. Coller du papier; coller une image, une affiche; coller une enveloppe; coller des bois de placage. Une proclamation à coller sur les murs (Sardou, Rabagas,II, 5, 1872, p. 66).Coller une petite bande de papier (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 182):
1. ... tout métier est pénible par la durée. J'ai lu qu'une femme bienfaisante, voulant se donner quelque expérience des métiers de femmes, choisit pour commencer le plus doux, qui consistait à coller des étiquettes sur des bouteilles; deux jours après elle était au lit avec la fièvre. Alain, Propos,1928, p. 772.
1. Spécialement
a) ŒNOLOGIE. Coller du vin, coller des liqueurs. Clarifier ces boissons à l'aide de blanc d'œuf ou de colle de poisson auxquels adhèrent les impuretés flottant dans ces boissons. Il ne faut pas le coller [le vin]. Il vous arrive collé. Et un double collage lui ôte de la qualité (Hugo, Correspondance,1868, p. 112).
b) PEINT. Imprégner de colle une peinture afin d'en fixer les couleurs. J'ai travaillé tous ces jours-ci avec une ténacité extrême, avant d'envoyer mes peintures qu'on colle demain (E. Delacroix, Journal,1852, p. 493).
c) TECHNOL. Enduire de colle du papier pour empêcher qu'il ne boive (cf. collage); imprégner de colle une toile pour lui donner de l'apprêt avant de l'imprimer.
2. P. anal. Faire adhérer, agglutiner au moyen d'une substance collante quelconque. Coller les paupières; sang qui colle les cheveux; eau qui colle les vêtements; la sueur colle la peau. Le sucre vous colle partout (Frapié, La Maternelle,1904, p. 183).Des filaments de mousse collaient les pages humides, à la forte odeur moisie (Gracq, Le Rivage des Syrtes,1951, p. 202):
2. ... l'homme porte une croix, et l'on entend son râle; ses pieds dans les cailloux saignent; ses yeux noyés pleurent, pleins de crachats qu'on n'a pas essuyés; le sang colle et noircit ses cheveux sur sa tempe; et l'homme, que la croix accable, tombe, rampe, se traîne, et sur ses mains retombe, et par moments ne peut plus que lever son front lugubrement. Hugo, La Fin de Satan,Le Gibet, 1885, p. 881.
3. P. ext.
a) [L'obj. désigne une partie du corps] Coller contre qqc.Appliquer étroitement et durant un certain temps. Coller son oreille contre une porte, son œil au trou d'une serrure; le nez collé sur des cartes. Coller sa main contre sa bouche (Flaubert, Salammbô,t. 1, 1863, p. 28).Un adolescent colle ses lèvres sur la nuque d'une jeune fille (Romains, Les Copains,1913, p. 244):
3. Le bruit des essieux scande la fuite. Les essieux battent comme le cœur. On colle son front à la vitre et le paysage s'écoule... Saint-Exupéry, Courrier Sud,1928, p. 41.
Plus figurément. Coller (son œil, son regard) sur qqn ou sur qqc.Regarder longuement et avec beaucoup d'attention. Coller ses yeux sur une passante :
4. Puis nous allions coller nos yeux devant chez Gougy ou chez Champion pour voir passer les érudits, ... Fargue, Le Piéton de Paris,1939, p. 86.
b) JEUX (billard). Coller une bille. La placer tout contre la bande; p. ell. coller son adversaire. Placer sa bille contre la sienne.
B.− P. ext.
1. Au fig. et fam.
a) Coller qqn.L'importuner, lui imposer une présence continuelle :
5. À peine le train arrivé il a sauté aussi dans le dur, derrière moi ... Jusqu'à Paris qu'il m'a collé... Je l'ai perdu un petit moment en sortant de la gare... Je me suis faufilé par une autre porte... Il m'a rejoint tout de suite la canule! ... Céline, Mort à crédit,1936, p. 678.
b) Mettre d'autorité quelqu'un ou quelque chose dans un endroit étroit en l'y serrant. Coller un objet dans un coin, dans une armoire; coller un enfant au lit, en pension; coller un militaire au bloc; coller en taule. Coller la chandelle au mur (Bernanos, Nouvelle Histoire de Mouchette,1937, p. 1307):
6. « J'ai idée que les boches trichent un peu... », disait Alexis pour se venger des pommes de terre que Mme Loiseau lui collait dans son assiette, et Henriette lui faisait des gros yeux : s'il discutait, ça n'en finirait plus... E. Triolet, Le Premier accroc coûte deux cents francs,1945, p. 219.
P. méton., expr. Coller qqn au mur. Le fusiller après l'avoir placé le dos (serré) au mur :
7. On allait coller un homme contre un mur et lui tirer dessus jusqu'à ce qu'il en crève; que ce fût moi ou Gris ou un autre, c'était pareil. Sartre, Le Mur,1939, p. 32.
c) Appliquer un coup à quelqu'un avec vigueur; imposer une obligation, une contrainte à quelqu'un. Coller des gifles, un coup de poing; coller un coup de pied dans le derrière; coller une punition; coller du travail à un élève. Moi, à cause de ma médaille, ils me collaient toujours de planton parce que ça fait riche (Dorgelès, Les Croix de bois,1919, p. 275):
8. − Elle a dit ça, elle a dit ça, hurla Maheu. C'est bon! J'y vais, moi, et si elle dit qu'elle l'a dit, je lui colle ma main sur la gueule. Zola, Germinal,1885, p. 1469.
d) Remettre d'autorité et sans rejet possible quelque chose à quelqu'un; se débarrasser de; donner ou transmettre une chose ennuyeuse ou fâcheuse à quelqu'un. Coller des pièces fausses; coller ses vieilleries, ses rossignols à qqn; coller la grippe. Coller des poux (Sartre, La Mort dans l'âme,1949, p. 248).Je te les colle dans les bras [les enfants] et puis tu te débrouilleras (Druon, Les Grandes Familles,t. 2, 1948, p. 164):
9. − Figure-toi qu'il n'y avait que des bêtes dans la turne... des chats, trois perroquets... un singe... deux chiens... et il fallait soigner tout ça... rien n'était assez bon pour eux... Nous, tu penses, on nous collait de vieux rogatons, kif-kif à la boîte... Mirbeau, Le Journal d'une femme de chambre,1900, p. 259.
Pop. Coller un enfant, un gosse à qqn. Rendre une femme enceinte. Il la suppliait de céder : on verrait bien s'il ne lui collait pas un enfant, et un gros! (Zola, La Terre,1887, p. 310).
e) Se coller qqc. (à soi-même).S'administrer des aliments ou de la boisson. Se coller une indigestion monstre; se coller qqc. dans le gosier. S'en coller deux (verres de Tokai) (Labiche, Les Trente millions de Gladiator,1875, p. 51).Tous s'en collèrent plein l'lampion (L. Stollé, Douze récits hist. racontés en arg.,1947, p. 9):
10. C'est qu'on ne s'est pas collé grand'chose dans le fusil depuis deux jours...! J. Vallès, Jacques Vingtras,L'Insurgé, 1885, p. 204.
Plus rarement [En parlant de connaissances que l'on accumule] S'en coller plein la tête, plein le crâne. Je me demande comment tu peux te coller tout ça dans le crâne! (Druon, Les Grandes Familles,t. 2, 1948, p. 142).
2. Arg. scol.
a) Coller un élève. Lui poser une question embarrassante à laquelle il ne peut répondre et p. ext. mettre une personne quelconque dans l'impossibilité de répondre; la réduire au silence. Être collée du premier coup (Colette, Claudine à l'école,1900, p. 221).Coller Annunzio sur les petits poètes italiens (Barrès, Mes cahiers,t. 11, 1914-18, p. 143).Je le collais tout à l'heure si j'avais voulu le pousser sur les traités de Westphalie! (Aymé, La Jument verte,1933, p. 140):
11. ... l'indignation de Goncourt venait de ce que Sardou l'éclipsait. Car, à un certain moment du dîner, Goncourt ayant voulu contredire, Sardou l'avait tout aussitôt « collé » comme un élève. Il ne savait pas écouter. Il ne comprenait pas ce qui était intéressant. Gide, Journal,1902, p. 121.
b) P. méton. Recaler un élève à un examen (comme s'il n'avait pu répondre aux questions embarrassantes de l'examinateur). Coller qqn au baccalauréat. Collée ou reçue (S. de Beauvoir, Les Mandarins,1954, p. 200):
12. Robert à Pierre : − Et toi, qu'as-tu à me dire? − Collé ou reçu, dès le bachot fini, je partirai. Tu t'en doutais, j'imagine? Mauriac, Les Chemins de la mer,1939, p. 105.
Rem. À signaler le subst. fém. collante. Lettre administrative annonçant à un candidat qu'il est reçu ou « collé » à l'examen écrit; en partic. lettre invitant le candidat reçu (à l'écrit) à se présenter aux épreuves orales; p. ext. convocation à un examen ou concours. J'ai reçu ma collante, je passe lundi (Rob. Suppl.; cf. également Lar. Lang. fr.).
c) Punir un élève d'une consigne en l'obligeant à venir à l'école en dehors des heures de cours normales et y faire des exercices supplémentaires. Coller qqn le dimanche :
13. Quand est-ce que je te revois, puisque tu es collé dimanche? soubrier. − Tu ne peux pas revenir m'attendre à la fin de la colle, à midi? Montherlant, La Ville dont le prince est un enfant,1951, II, 4, p. 900.
II.− Emploi pronom.
A.−
1. [En parlant d'une pers., d'une partie du corps, des vêtements] S'appliquer contre, à, sur quelque chose. Se coller contre la muraille, aux carreaux; se coller contre l'épaule de qqn; vêtement qui se colle sur la peau. Feuilles qui se collaient sur mes yeux (Cocteau, Bacchus,1952, p. 211).Toutes les dames des maisons voisines se collèrent à leurs croisées (G. Sand, Pauline,1841, p. 193):
14. ... elle [Geneviève] s'arrêta en face de moi, les sourcils soulevés, les yeux dilatés. Puis elle se colla au radiateur et, joignant les doigts, elle frottait les paumes de ses mains. Mauriac, Le Nœud de vipères,1932, p. 280.
Plus figurément. Regard, yeux qui se collent sur qqn. Fixer attentivement quelqu'un :
15. Dans ce dernier cas au contraire son regard étroit et velouté [d'Albertine] se fixait, se collait sur la passante, si adhérent, si corrosif, qu'il semblait qu'en se retirant il aurait dû emporter la peau. Proust, La Prisonnière,1922, p. 150.
2. Fig. et fam. Se coller à
a) Se coller à qqn.Imposer sa présence, importuner quelqu'un :
16. Ce n'est pas une mauvaise fille, mais elle est barbante. Elle n'a pas besoin de venir fourrer son nez partout. Pourquoi se colle-t-elle à nous sans qu'on lui demande? Proust, À l'ombre des jeunes filles en fleurs,1918, p. 888.
b) Spéc., JEUX. S'y coller, qui s'y colle? (au jeu de cache cache principalement). Se tenir le visage tourné contre le but choisi et fermer les yeux pendant que les autres joueurs se cachent :
17. Si le cligne-musette touche l'un des fuyards pendant cette course et avant le retour au point de départ, ce joueur doit, à son tour, fermer les yeux tandis que les autres participants se dissimulent en de nouvelles cachettes. On dit alors qu'il s'y colle. Alleau, Dict. des jeux,1964, p. 83.
3. Rare et en emploi abs. Se coller.Se coucher, s'aplatir contre terre :
18. Un 77 s'annonça pour eux. Ils se collèrent, firent un avec la terre, comprirent qu'ils étaient saufs, ... Montherlant, Le Songe,1922, 2epart., p. 151.
B.− Populaire
1. Se coller à qqc., s'y coller.Commencer lestement une chose, se mettre et s'attacher au travail qui vous attend. Il se précipite donc au boulot... Il s'y colle séance tenante (Céline, Mort à crédit,1936, p. 434).
2. Se coller avec qqn.Se mettre en ménage sans se marier. Se coller avec un vieux. Se coller à seize ans (Zola, Germinal,1885, p. 1331):
19. William sourit. C'était vraiment un homme supérieur... − Ne dis donc pas de choses inutiles... Quand nous nous sommes mis ensemble, je ne t'ai rien promis... Tu ne m'as rien promis non plus... On se rencontre... On se colle, c'est bien... On se quitte... On se décolle... C'est bien aussi. La vie est la vie... Et, sentencieux, il ajouta : − Vois-tu, dans la vie, Célestine, il faut de la conduite... Mirbeau, Le Journal d'une femme de chambre,1900, p. 356.
Plus rarement et trivial. Se coller.Avoir des relations physiques avec quelqu'un :
20. Viens-tu à la fin, Louis? Je te dis que nous nous couchons. On se colle, ça soulage... Et que ce nom de dieu de saoulard crève ici de froid tout seul! Zola, Germinal,1885, p. 1359.
Rem. La docum. atteste le syntagme pop. s'en coller de qqc., s'en coller complètement, au sens de « se moquer de quelque chose » dont le rapport avec le verbe coller n'est pas clair. Moi je m'en collais de leurs salades (Céline, Mort à crédit, 1936, p. 297) :
21. Puis après tout, j'm'en colle. J'vous laisse tomber avec votre cuistance, s'il y en a un qui veut la place, il n'a qu'à aller se faire inscrire au burlingue. Dorgelès, Les Croix de bois,1919, p. 64.
III.− Emploi intrans.
A.− Être appliqué exactement, être en contact étroit avec quelque chose.
1. [En parlant d'une substance gluante et compacte] Adhérer à quelque chose. Terre qui colle aux souliers; humidité qui colle aux moelles. Poussière fine et gluante qui colle aux doigts (Green, Journal,1947, p. 94).Les feuilles tombées collaient au sol gras des allées (Genevoix, Raboliot,1925, p. 116):
22. Dehors, un brouillard blanchâtre comme de la bave de limace se traîne lourdement et colle aux branches des sapins. Cendrars, Moravagine,1926, p. 181.
2. P. ext.
a) P. anal.
[En parlant d'un vêtement qui est très ajusté et qui moule le corps] Pantalon qui colle. La botte colle au pied (Montherlant, Les Olympiques,1924, p. 294).Corsage menu qui colle à leur poitrine (T'Serstevens, L'Itinéraire espagnol,1933, p. 107):
23. Flamart souffle, tel un taureau coursé. Sous le maillot qui colle, les pectoraux se soulèvent et retombent comme une poitrine de femme asthmatique. R. Martin du Gard, Vieille France,1933, p. 1068.
Spécialement
AUTOM. Coller à la route. Avoir des pneus qui adhèrent parfaitement à la route (cf. Lar. Lang. fr.).
SP. (cyclisme). Coller à la roue. Suivre de très près son entraîneur ou un autre concurrent; ne pas se laisser distancer. Cycliste qui colle à la motocyclette (Montherlant, Le Songe,1922, p. 35):
24. Renaudin, extasié par un champion politique, « si bien en machine » et dont le style plaisait tant aux connaisseurs, rêve de « coller à sa roue » comme un cycliste à son entraîneur, ... Barrès, Les Déracinés,1897, p. 195.
VÉN. Coller à la voie. Serrer de près un animal (cf. Genevoix, La Dernière harde, 1938, p. 125).
b) Au fig.
[En parlant d'une pers. qui reste fixée à un endroit sans bouger ou sans vouloir agir] Rester collé sur sa chaise (Balzac, La paix du ménage,1830, p. 313).Rester collé aux jupes de sa mère (Gyp, Le Mariage de chiffon,1894, p. 270).Il était coincé dans la foule. collé contre sa mère (Druon, Les Grandes Familles,t. 1, 1948, p. 20).
[En parlant d'une impression, d'un sentiment qui s'attache fortement à une pers., qui l'enveloppe entièrement] Peur qui colle à la peau; pauvreté qui colle aux os. Angoisse qui colle à la chair (Samain, Le Chariot d'or,1900, p. 151).Mais la sale injustice colle à nous comme de la glu (Camus, Les Justes,1950, 5, p. 386):
25. Le pire ... c'était cette menace multiforme, imprécise qui traquait Raboliot partout, qu'il traînait nuit et jour, collée à lui. Genevoix, Raboliot,1925, p. 170.
[En parlant d'un écrivain, d'une œuvre de l'esprit] Convenir, être en contact étroit avec, être fidèle à la pensée de. Coller au réel, paroles qui collent à la pensée; coller aux habitudes. Coller au sujet (Du Bos, Journal,1922, p. 122).Valéry, lui, colle étroitement à la vie (Gide, Journal,1929, p. 930):
26. ... je ne colle pas, je n'ai jamais pu parfaitement « coller » avec la réalité. Il n'y a même pas, à proprement parler, dédoublement qui fasse que, en moi, quelqu'un reste spectateur de celui qui agit. Gide, Ainsi soit-il,1951, p. 1226.
B.− Populaire
1. Convenir parfaitement, bien aller. Ça colle!; ça a l'air de coller entre eux. Trouver un raisonnement qui colle (Abellio, Heureux les pacifiques,1946, p. 171):
27. 5 février. − J'en étais sûre! Je passe mon temps à confronter les leçons et la matière enfantine : voyons si « ça colle »... Frapié, La Maternelle,1904, p. 156.
2. Être d'accord avec quelqu'un. Ça colle! Ça colle! dis-je à Poterloo (Barbusse, Le Feu,1916, p. 161):
28. − Mon capitaine..., dites voir... si y a du boulot, j'suis là pour un coup. Le capitaine répondit : − Tu vas m'habiller ma compagnie. − Ça colle! où sont les frusques? − On va te montrer. Viens avec moi. Benjamin, Gaspard,1915, p. 12.
Prononc. et Orth. : [kɔle], (je) colle [kɔl]. Ds Ac. 1694-1932. Homon. entre collai(en)t et collet, colley; colle(nt) et col; collèrent et colère; collons et colon. Étymol. et Hist. 1. a) 1320 « faire adhérer au moyen de colle » (Mém. Soc. Hist. de Paris, II, 366 ds Barb. Misc. 17, no12); b) xvies. au fig. « se tenir à, rester fixé sur » (Ronsard, 417 ds Littré : Ceux qui, collez sur un livre, N'ont jamais soucy de vivre); c) 1585 au fig. « mettre, placer » (N. du Fail, Contes d'Eutrapel, éd. J. Assézat, II, p. 209 ds IGLF : tu y coleras et joindras, peut estre, ce mot de Reveur); d) [1861 d'apr. Esn.]; 1878 se coller « se mettre en concubinage » (L. Rigaud, Dict. du jargon parisien, p. 93); 2. 1376 « clarifier (du vin en utilisant de la colle de poisson) » (Prost, Inv. mobil. des ducs de Bourgogne, I, no2497 ds Barb. Misc., loc. cit.); 3. [1828 « punir de piquet » c'est-à-dire « coller au piquet » d'apr. Esn.] d'où [ca 1855 « priver de congé » arg. de polytechnique d'apr. Esn.] 1878 « mettre en retenue » (L. Rigaud, loc. cit.); 4. 1839 « interloquer » (Balzac, Béatrix, p. 364); 5. 1863 collant subst. masc. désignant un vêtement (E. et J. de Goncourt, Journal, p. 1213). Dér. de colle*; dés. -er. Fréq. abs. littér. : 2 425. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 883, b) 3 286; xxes. : a) 4 706, b) 4 113. Bbg. Arveiller (R.). R. Ling. rom. 1971, t. 35, no137-138, p. 216. − Gottsch. Redens. 1930, p. 300. − Pauli 1921, pp. 36-37. − Quem. 2es. t. 1, 1970; t. 2, 1971; t. 3, 1972. − Vidos 1939, pp. 325-326.

Wiktionnaire

Verbe - français

coller \kɔ.le\ transitif, intransitif ou pronominal 1er groupe (voir la conjugaison) (pronominal : se coller)

  1. Joindre et faire tenir deux choses ensemble avec de la colle.
    • Coller du papier.
    • Coller une image sur du carton.
    • Coller une pièce d’ébène, une feuille d’acajou sur d’autre bois.
    • Coller contre la muraille, à la muraille.
    • Coller du papier de tenture.
  2. Unir fortement des choses entre elles ou à d’autres.
    • Le sang avait collé ses cheveux.
    • Ses paupières étaient collées ensemble.
  3. Enduire, imprégner de colle.
    • Il faut coller cette toile avant de l’imprimer.
    • Ce papier boit, parce qu’on ne l’a pas bien collé.
  4. (Par extension) Mettre dans du vin, de la gélatine ou quelque autre ingrédient, pour conserver ou rendre sa limpidité.
  5. Être très ou trop proche, adhérer.
    • Coller son adversaire.
    • Ne te colle pas comme ça à moi !
  6. Être longtemps proche.
    • Il est toujours collé à cette porte.
  7. Tenir longtemps appliqué.
    • Avoir les lèvres collées sur quelque chose.
  8. Fixer, regarder une chose ou quelqu’un attentivement et longtemps, en parlant du regard.
    • Avoir les yeux collés sur une chose, sur quelqu’un.
  9. (Figuré) (Familier) Poser une question difficile, faire une objection à laquelle on ne peut répondre.
    • Coller quelqu’un.
  10. (Éducation) (Argot scolaire) Punir un élève tel que le priver de sortie.
    • Être collé.
  11. (Éducation) Refuser à un examen.
  12. (Éducation) Faire passer une colle.
  13. (Familier) Placer, mettre, positionner.
    • Il lui fait enfiler une robe vachement collante en dentelle noire et des bas de soie chair, et il la colle à la barre devant un jury sélectionné de vieux messieurs de plus de soixante-dix piges [...]. — (Peter Cheyney, Les femmes s’en balancent, traduction de Michelle et Boris Vian, Gallimard, 1949, page 77)
    • En attaquant mon nouveau godet de whiskey que l’emmerdeuse venait de me coller sous le nez, j’ai tenté de me livrer à l’exercice où je brille par ma nullité crasse : le calcul mental. — (Norman Ginzberg, Les Captives de la vallée de Zion, Héloïse d’Ormesson, 2017)
  14. (Populaire) Donner à quelqu’un.
    • Tu vas changer le fafiot et, en remontant, tu colleras vingt francs au proprio. Il nous foutra la paix pendant huit jours. — (Victor Méric, Les Compagnons de l’Escopette, Éditions de l’Épi, Paris, 1930, page 23)
    • Ceux qui ont de l’expérience évitent de tomber sur le docteur qui va vous coller une torche électrique, et vous mettre à une extrémité du champ, d’où on ne pourra plus bouger jusqu’au départ des avions, ce qui n’est pas drôle. — (Elsa Triolet, Le premier accroc coûte deux cents francs, 1944, réédition Cercle du Bibliophile, page 357)
    • Le gnon que je lui ai collé dans les tripes l’a un peu réalisé. — (Peter Cheyney, Les femmes s’en balancent, traduction de Michelle et Boris Vian, Gallimard, 1949, page 59)
    • Je suis sûre qu’ils se contenteront de me coller un procès-verbal, comme ils l’ont fait jusqu’alors pour certains de mes camarades. — (Barbara Kingsolver, Une île sous le vent, traduction de Michèle Lévy-Bram, Payot & Rivages, 2004)
  15. (Billard) Pousser ou placer une bille de billard de manière qu’elle s’arrête contre la bande ou très près de la bande.
  16. (Intransitif) Mouler.
    • Ce bas, ce pantalon, cette culotte colle bien, Ce bas s’applique bien sur la jambe ; ce pantalon, cette culotte est juste et dessine bien les formes.
    • Cet habit est collé, semble collé sur le corps, Il est bien fait et prend bien la taille.
  17. (Intransitif) (Figuré) (Familier) Convenir, être cohérent, coïncider.
    • Il ne consentirait jamais à livrer cette phrase telle quelle à un imprimeur., car malgré le contentement qu’elle lui donnait parfois, il se rendait compte qu’elle ne collait pas tout à fait encore à la réalité, et que dans une certaine mesure, elle gardait une facilité de ton qui l’apparentait de loin, mais qui l’apparentait tout de même, à un cliché. — (Albert Camus, La Peste, Éditions Gallimard, 1947)
    • C’est un de ces drôles de trucs, vous savez, où rien ne colle ; mais comme affaire, c’est foutrement intéressant. — (Peter Cheyney, Les femmes s’en balancent, traduction de Michelle et Boris Vian, Gallimard, 1949, page 35)
  18. S’adapter.
    • Maurice Lévy, patron de Publicis, se donne deux ans pour coller au monde numérique. — (Le Figaro, 5/12/2014)
  19. (Pronominal) Se tenir fortement appliqué contre une chose, etc.
    • J’essaie bien de cuire du porridge sur le réchaud à cadran, mais une vague plus forte envoie le porridge se coller au plafond et aux parois du poste. — (Alain Gerbault, À la poursuite du soleil, tome 1 : De New-York à Tahiti, 1929)
  20. (Pronominal) Se tenir constamment auprès d’une chose.
    • La rock star la bouffe du regard un moment puis l’attrape par la taille et se colle derrière elle pour suivre ses mouvements langoureux. Ils finissent par s'embrasser passionnément, […]. — (Emma Green, Jeux imprudents, Éditions Addictives, 2021, chap. 48)
  21. (Pronominal) (Figuré) (Familier) Avoir une liaison hors mariage.
    • Se coller avec une poulette.
    • Je me disais que ce misérable se collerait avec une fille du village, ou épouserait la bonne. — (José Cabanis, Les cartes du temps, Gallimard, 1962, Le Livre de Poche, page 103.)
  22. (Pronominal) (Populaire) S’astreindre à faire quelque chose.
    • Sans les « mouchards », nous aurions beau nous y coller : nous n’arriverions à rien. — (Francis Carco, Messieurs les vrais de vrai, Les Éditions de France, Paris, 1927)
  23. (Informatique) Insérer, dans un champ de saisie ou autre, un objet ou un texte préalablement copié dans un tampon logiciel souvent appelé presse-papiers.
    • Pour que le texte soit formaté comme le reste du paragraphe, collez-le en utilisant la fonction « collage spécial ».
  24. (Argot) Être surpris par quelque chose, fixer quelque chose avec le regard en se perdant dans ses pensées.
    • J'ai eu 2 au contrôle, je colle.
    • Arrête de coller, réveille toi.
  25. (Québec) (Populaire) Mettre à côté de, adjacent à, contigu à.
    • Mon mur était collé sur leur appartement. — (Jonathan Tremblay, Montréal: une ado de 17 ans perd la vie dans l’appart de son copain, dans Le Journal de Montréal, 02 novembre 2020)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

COLLER. v. tr.
Joindre et faire tenir deux choses ensemble avec de la colle. Coller du papier. Coller une image sur du carton. Coller une pièce d'ébène, une feuille d'acajou sur d'autre bois. Coller contre la muraille, à la muraille. Coller du papier de tenture. Il se dit, par extension, en parlant de Choses qui sont fortement unies entre elles ou à d'autres. Le sang avait collé ses cheveux. Ses paupières étaient collées ensemble. Fig., en termes de jeu de Billard, Coller une bille, Pousser ou placer une bille de manière qu'elle s'arrête contre la bande ou fort près de la bande. On dit de même Coller son adversaire. Quand on ne peut pas faire la bille de son adversaire, on cherche à la coller, à le coller. Être collé sous bande. Vous êtes collé. Fig. et fam., Coller quelqu'un, Fermer la bouche à quelqu'un, lui faire une question, une objection à laquelle il ne peut répondre. Être collé signifie, spécialement dans l'argot des écoliers, Être refusé à mon examen ou encore Être l'objet d'une punition telle que privation de sortie. Il signifie aussi Enduire, imprégner de colle. Il faut coller cette toile avant de l'imprimer. Ce papier boit, parce qu'on ne l'a pas bien collé. Coller du vin, Y mettre de la colle de poisson ou quelque autre ingrédient, pour lui conserver ou lui rendre sa limpidité. Il s'emploie aussi intransitivement, Ce bas, ce pantalon, cette culotte colle bien, Ce bas s'applique bien sur la jambe; ce pantalon, cette culotte est juste et dessine bien les formes. On dit de même Cet habit est collé, semble collé sur le corps, Il est bien fait et prend bien la taille. Fig. et fam., Se coller, être collé contre une chose, à une chose, sur une chose, Se tenir fortement appliqué contre une chose, etc., ou Se tenir constamment auprès d'une chose. Se coller, se tenir collé contre un mur. Il est toujours collé à cette porte. Fig., Être collé sur son cheval, collé sur la selle, Avoir une assiette extrêmement solide à cheval. Fig., Avoir les yeux collés sur une chose, sur quelqu'un, Regarder une chose, regarder quelqu'un attentivement et longtemps. Fig., Avoir la bouche collée, les lèvres collées sur quelque chose, Les y tenir longtemps appliquées. Il est mort les lèvres collées sur le crucifix. Elle demeura longtemps la bouche collée sur le visage de sa mère. Fig. et fam., Se coller, être collé, Avoir une liaison irrégulière. En ce sens il est très familier.

Littré (1872-1877)

COLLER (ko-lé) v. a.
  • 1Joindre avec de la colle. Coller du papier. Coller une feuille d'acajou sur du chêne. Coller deux choses ensemble.

    Enduire, imprégner de colle, d'apprêt. Coller du papier, coller de la toile.

    Par extension. Le sang avait collé ses cheveux.

    Coller du vin, y battre de la colle de poisson ou même du blanc d'œuf pour le clarifier. Je croyais savoir coller le vin, Rousseau, Conf. VI.

  • 2Appliquer une chose contre une autre. Il a collé son visage contre le mien. Cette attente d'une bataille en Flandre collait tout le monde aux fenêtres pour voir arriver les courriers, Saint-Simon, 209, 65.

    Fig. Au lieu de les coller sur des livres, Rousseau, Ém. II.

    Terme de billard. Coller une bille, l'envoyer tout près de la bande. On dit aussi : coller son adversaire, pour dire : coller sa bille.

    Populairement. Coller quelqu'un, lui fermer la bouche, lui dire quelque chose qui le fait taire.

    Coller un écolier et surtout un aspirant à une des écoles du gouvernement, lui faire une question à laquelle il ne peut répondre.

  • 3 V. n. Tenir comme avec de la colle. Tout cela avait collé ensemble.

    Ce pantalon colle, il est juste, il dessine les formes.

  • 4Se coller, v. réfl. S'attacher comme avec de la colle. La tunique s'était collée sur sa peau, Fénelon, Tél. X.

    S'appliquer exactement sur une chose. Cette draperie se collait sur le corps.

    S'attacher fortement. Il dit, baise mes pieds, les inonde de larmes, Se colle à nos genoux, Delille, Énéide, III, 830. … Sur sa pâle main [de Laurence] ma lèvre qui se colle La retint à la vie avec une parole, Lamartine, Joc. IV, 160. Il lui est arrivé plusieurs fois de se trouver tête pour tête à la rencontre d'un prince et sur son passage, et n'avoir que le loisir de se coller à un mur pour lui faire place, La Bruyère, XI.

    Fig. Tenir son esprit appliqué à une chose. L'immobile auditeur Se colle à la tribune où tonne l'orateur, Segrais, Georg. III. Tillemont est le guide le plus sûr des faits et des dates pour l'histoire des empereurs ; Gibbon se colle à lui ; il se fourvoie et tombe quand l'ouvrage de Tillemont finit, Chateaubriand, dans le Dict. de DOCHEZ.

HISTORIQUE

XIIIe s. Si collerent [tendirent] les voiles et s'en allerent, Villehardouin, p. 155, dans LACURNE.

XVIe s. Je voy plus de cent ruisseaux Collez de fange et de bourbe, Du Bellay, J. II, 51, recto. Bons dieux ! qui voudroit louer Ceux qui, collez sur un livre, N'ont jamais soucy de vivre ? Ronsard, 417.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

COLLER. Ajoutez :
5 Fig. Se coller, être tenu par un fort sentiment. Les femmes, les enfants, les lieux de notre naissance, et autres objets auxquels notre esprit se colle et s'attache avec tant de passion, Malherbe, Lexique, éd. L. Lalanne.
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Étymologie de « coller »

Colle.

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(Date à préciser) Dénominal de colle.
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Phonétique du mot « coller »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
coller kɔle

Fréquence d'apparition du mot « coller » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « coller »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « coller »

  • Les ordinateurs de bureau présentent d’intéressantes possibilités de communication professionnelle. Vous pouvez coller des Post-it au bord de l’écran !
    Dave Barry — Chroniques déjantées d’internet
  • Un livre est une bouteille jetée en pleine mer sur laquelle il faut coller cette étiquette : attrape qui peut.
    Alfred de Vigny — Journal intime
  • S'il suffisait de se coller un timbre rare sur le dos pour se retrouver à l'étranger !
    Jules Renard — Journal 1887-1892
  • Le comble du cynisme : Assassiner nuitamment un boutiquier, et coller sur la devanture : fermé pour cause de décès.
    Alphonse Allais — Le Tintamarre - 28 Octobre 1877
  • Lucidité, superficialité, vénalité : toutes les qualités pour bien coller à la réalité.
    Philippe Sollers — Femmes
  • Il faut coller à la vie comme à un cheval.
    Guy de Larigaudie
  • Je ne collerai pas à la mode.
    William Sheller — Interview dans Le Figaro, 27 octobre 2015
  • La vérité est toujours plus surprenante que la fiction, parce que la fiction doit coller à ce qui est possible, alors que la vérité, elle, n’y est pas obligée.
    Mark Twain
  • Je suis toujours étonné de voir le peu de liberté que chacun s'autorise, cette manière de coller sa respiration à la vitre des conventions.
    Christian Bobin — La plus que vive
  • Saviez-vous que copier du texte depuis le navigateur Chrome sur un ordinateur pour le coller ensuite sur son smartphone Android est désormais possible ? Nous vous expliquons la marche à suivre pour profiter de cette fonctionnalité bien pratique dans ce…
    PhonAndroid — Chrome : comment copier-coller du texte depuis son PC vers son smartphone Android ?
Voir toutes les citations du mot « coller » →

Traductions du mot « coller »

Langue Traduction
Anglais paste
Espagnol pegar
Italien incolla
Allemand einfügen
Chinois
Arabe معجون
Portugais colar
Russe вставить
Japonais ペースト
Basque itsatsi
Corse pasta
Source : Google Translate API

Synonymes de « coller »

Source : synonymes de coller sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « coller »

Combien de points fait le mot coller au Scrabble ?

Nombre de points du mot coller au scrabble : 8 points

Coller

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