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Soumettre

Définitions de « soumettre »

Trésor de la Langue Française informatisé

SOUMETTRE, verbe trans.

[Les indices 1, 2, 3, 4 qui marquent les suj. ou compl. de soumettre dans les schémas syntaxiques renvoient respectivement: 1 à ce, celle, celui qui soumet (agent); 2 à ce, celle, celui qui est soumis (patient); 3 à ce à qui, à quoi se trouve soumis le patient; 4 à l'instrument, au moyen du procès concerné]
I. − Empl. trans.
A. − Soumettre
1. Imposer dépendance, obéissance, par la contrainte, par la force, à quelqu'un. Synon. assujettir.
a) Qqn1soumet qqn2.Un autre comte de Hollande, Guillaume IV (...) avait aussi tenté de soumettre les Frisons. Son entreprise fut plus malheureuse encore (Barante, Hist. ducs Bourg., t. 2, 1821-24, p. 161):
1. ... le 24 septembre 1791, la Constituante avait de nouveau abandonné aux assemblées coloniales le soin de régler la condition des hommes de couleur, le maintien de l'esclavage restant hors de conteste; mais ses commissaires ne réussirent pas à rétablir l'ordre, ni à soumettre les noirs révoltés. Les Girondins reconnurent aux hommes de couleur et aux noirs libres la pleine condition de citoyens... Lefebvre, Révol. fr., 1963, p. 427.
Empl. abs. Qqn1soumet.Cette doctrine de soumission, ceux qui soumettent s'en emparent par un abominable abus. La religion est mauvaise parce qu'en désarmant l'opprimé elle le livre à l'oppresseur (Gide, Journal, 1932, p. 1125).
[P. méton.] C'est la sauvage intolérance du Moyen Âge: soumettre les hérésies (Michelet, Journal, 1849, p. 10).Lorsque César eut soumis l'Égypte, il imposa les joyaux de verre comme tribut de guerre (Cl. Duval, Verre, 1966, p. 6).
b) Qqn1/qqc.1soumet qqn2à qqn3ou qqc.3(au moyen de qqc.4).Pour soumettre un peuple au joug d'un maître infâme, Il faut de l'eau du vice empoisonner son âme! (Lamart., Chute, 1838, p. 930).
[P. méton.] Les calculs de l'ambition et de l'avidité n'auraient pas suffi pour soumettre la France à Bonaparte; il faut quelque chose de grand pour remuer les masses, et c'était la gloire militaire qui enivrait la nation (Staël, Consid. Révol. fr., t. 2, 1817, p. 88).
En partic. [Chez les animaux, pendant la période du rut; le compl. d'obj. dir. désigne la femelle] Couvrir. (Dict. xxes.).
2. Qqn1soumet qqn2(au moyen de qqc.4)Imposer sa volonté par la contrainte psychologique, la persuasion, à quelqu'un. Par l'épée de la parole je soumettrai tous les ennemis de mon Dieu, je les lierai, et je les empêcherai de faire de la peine à mon Dieu (Saint-Martin, Homme désir, 1790, p. 7).Elle pensait qu'au lieu de calmer ces accès d'irritation maladive, ma mère, excitant trop ma sensibilité, me soumettait sans me corriger (Sand, Hist. vie, t. 2, 1855, p. 284).
3. Qqn1soumet qqc.2.Diriger, dominer. Souvent elle devenait une fée qui me soumettait la nature (Chateaubr., Mém., t. 1, 1848, p. 126).Mort de ma mère. Après de tels chocs, on se rallie à la thèse catholique: il faut dompter, soumettre nos passions (Barrès, Cahiers, t. 5, 1906, p. 249).
B. − Soumettre à
1. Contraindre à.
a) Qqn1soumet qqn2à qqc.3.Le docteur augmenta à plaisir l'indisposition de la grande dame, il la rendit folle de douleur, il est vrai que tous les jours, pendant une heure, il la soumettait à l'horrible magnétisme de son éloquence infernale (Stendhal, Lamiel, 1842, p. 76).V. bourrage ex. 2.
Soumettre à la question V. question2.Quelques hommes de race gauloise et d'un rang inférieur furent arrêtés comme suspects, et soumis à la question (Thierry, Récits mérov., t. 2, 1840, p. 185).
b) Qqn1soumet qqc.2à qqc.3[Qqc.2désigne un attribut de la pers., un affect]Je ne pensais pas soumettre ta constance à une pareille épreuve (Gide, Symph. pastor., 1919, p. 883).
En partic. Soumettre à l'impôt, à une taxe. Assujettir à l'impôt, à une taxe. Il est inique de soumettre toutes les terres à une taxe, qui s'applique dans une proportion invariable au revenu le plus faible, comme au revenu le plus élevé (Monopole et impôt sel, 1833, p. 24).
2. Présenter à l'avis, au jugement, à la décision (de quelqu'un dont on reconnaît l'autorité). Soumettre un article, un manuscrit, une observation, une option, un programme, un projet, une proposition, une question au conseil, au comité.
a) Qqn1soumet qqc.2à qqn3.Bouvard l'épia, - et, l'ayant arrêté, dit qu'il voulait lui soumettre un point curieux d'anthropologie (Flaub., Bouvard, t. 1, 1880, p. 97).Gallimard m'offrit de lire mon roman et de le soumettre à l'aréopage de la N.R.F.; spécifiant bien que ce n'était rien de plus qu'une chance qu'il m'aidait à courir (Martin du G., Souv. autobiogr., 1955, p. lviii).
b) Qqn1soumet qqc.2à qqc.3Louis XII, surnommé le Père du peuple, soumit à la décision des états généraux le mariage du comte d'Angoulême (Staël, Consid. Révol. fr., t. 1, 1817, p. 22).
Au part. passé. [Dans une constr. passive] Nul supplice cependant n'égalait pour elle celui de voir à chaque repas la nourriture soumise au jugement du Survenant (Guèvremont, Survenant, 1945, p. 46).
3. Qqn1/qqc.1soumet qqc.2à qqc.3
a) Rendre dépendant de. Si, demain, résolvant d'une façon aussi limpide les antinomies du travail, nous parvenions (...) à soumettre pour jamais le capital au travail, n'aurions-nous pas singulièrement avancé la solution du problème de notre époque (Proudhon, Syst. contrad. écon., t. 2, 1846, p. 70).En tout cas, et je m'empresse de le dire tout de suite, un théâtre qui soumet la mise en scène et la réalisation, c'est-à-dire tout ce qu'il y a en lui de spécifiquement théâtral, au texte, est un théâtre d'idiot, de fou, d'inverti, de grammairien, d'épicier, d'anti-poète et de positiviste, c'est-à-dire d'occidental (Artaud, Théâtre et son double, 1938, p. 50).
Au passif. Madame de Mortsauf voulait habituer ses enfants aux choses de la vie, et leur donner connaissance des pénibles labeurs par lesquels s'obtient l'argent; elle leur avait donc constitué des revenus soumis aux chances de l'agriculture (Balzac, Lys, 1836, p. 128).
b) Exposer à, appliquer à. Soumettre au calcul, à l'analyse, à la critique, à l'épreuve.
α) [Qqc.2désigne un concept, une activité intellectuelle] Si Kant eût entrepris de soumettre à l'analyse cette donnée de la raison (Cournot, Fond. connaiss., 1851, p. 589).Son argument-massue est que la science avance par l'« intuition », laquelle n'est pas rationnelle. Il oublie qu'elle n'est science que si elle soumet l'intuition à la vérification, opération éminemment rationnelle (Benda, Fr. byz., 1945, p. 38).
β) [Qqc.2désigne une action] La forme de ces dents influe elle-même beaucoup sur la nature des corps que l'animal peut soumettre à sa mastication (Cuvier, Anat. comp., t. 1, 1805, p. 39).Christine soumit la salle à manger à un balayage rapide (Malègue, Augustin, t. 2, 1933, p. 291).
Au passif. Il est très vraisemblable que chaque étoile a des planètes soumises à son attraction (Bern. de St-P., Harm. nat., 1814, p. 367).
II. − Empl. pronom.
A. − Empl. pronom. réfl. dir.
1. Qqn1se soumet.[Corresp. à soumettre I A] Céder, obéir à un principe supérieur ou par contrainte, ne pas offrir de résistance, se résigner. Se soumettre de bonne, de mauvaise grâce, sans murmure, sans résistance. Comme elle refusait de le suivre dans la chambre, il la renversa brutalement au bord de la table; et elle se soumit, il la posséda, entre l'assiette oubliée et le roman (Zola, Pot-Bouille, 1882, p. 76).De semblables discussions étaient soulevées parfois au sujet de l'obéissance, ma mère restant d'avis que l'enfant doit se soumettre sans chercher à comprendre, mon père gardant toujours une tendance à tout m'expliquer (Gide, Si le grain, 1924, p. 354).
P. allus. hist. Se soumettre ou se démettre*.
− Domaine milit.Se rendre parce que l'on est vaincu. De vos douze tribus les chefs se sont soumis, Ils se sont fait chrétiens (Bornier, Fille Rol., 1875, i, 3, p. 22).Aussitôt le dauphin commença l'investissement de Paris, Étienne Marcel ayant refusé de se soumettre. C'était la guerre civile, la dispute pour le pouvoir (Bainville, Hist. Fr., t. 1, 1924, p. 99).
2. Qqn1se soumet à qqn3/qqc.3[Corresp. à soumettre I B; qqn3/qqc.3désigne une pers., un coll., un inanimé abstr.]Céder, obéir de manière volontaire ou parce que l'on y est contraint, à quelqu'un ou quelque chose dont on reconnaît la force, l'autorité, la nécessité. Se soumettre aux conditions, aux lois, au jugement, aux règles, à une simple formalité. J'ai senti qu'on pouvait en même temps aimer un autre que soi, au point de se soumettre à lui et s'aimer soi-même, au point de ressentir de la haine contre celui qui nous subjugue (Sand, Lélia, 1833, p. 172):
2. ... mais il faut bien, si nous voulons trouver cette architecture de notre époque tant réclamée, que nous la cherchions non plus en mêlant tous les styles passés, mais en nous appuyant sur des principes de structure nouveaux. On ne fait une architecture qu'à la condition de se soumettre à des nécessités nouvelles avec une rigueur inflexible, en se servant des progrès déjà obtenus ou tout au moins en ne les dédaignant pas. Viollet-Le-Duc, Archit., 1872, p. 61.
Rare, littér. [Qqc.3désigne un inanimé concr.] Le forgeron se soumet au fer; le marin se soumet au vent, au courant et à la houle (Alain, Propos, 1921, p. 343).
3. Qqn1se soumet à qqc.3[Qqc.3est un inf.]S'engager, se plier à. Je vais vous parler le cœur sur la main, monseigneur: voulez-vous vous soumettre à manger votre dîner froid tous les jours? (Stendhal, Chartreuse, 1839, p. 331).Son père et sa mère l'ayant apparemment violentée pour se marier, elle ne voulut pas se soumettre à cohabiter avec son mari (Sainte-Beuve, Port-Royal, t. 5, 1859, p. 413).
4. Qqc.1se soumet à qqc.3.Des rinceaux qui n'offriraient pas quelque régularité, dont le tracé ne se soumettrait pas à quelque loi mathématique simple et saisissable (...) n'éveilleraient aucun sentiment de beauté (Hamelin, Élém. princ. représ., 1907, p. 448).
B. − Empl. pronom. réfl. indir. Qqn1/qqc.1se soumet qqn2/qqc.2(au moyen de qqc.4).Soumettre à soi-même. De son incomparable intelligence il se sert pour se soumettre les bêtes dont il a besoin (France, Vie fleur, 1922, p. 498).Il faut alors se demander (...) si, du fait que la moitié environ des ressources de la presse proviennent des annonces, les publicitaires ne se soumettent pas les journaux (Belorgey, Gouvern. et admin. Fr., 1967, p. 143).
En partic. [Chez les animaux, pendant la période du rut] Se soumettre une femelle. Couvrir. (Ds Rob., Lar. Lang. fr.).
Prononc. et Orth.: [sumεtʀ], (il) soumet [-mε]. Ac. 1694, 1718: sous-; 1740: soû-; dep. 1762: sou-. Étymol. et Hist. 1. 1remoit. xiies. suzmetre « mettre dans un état de dépendance (par la force) » (Psautier Oxford, éd. Fr. Michel, LIX, 9, p. 78); 2. ca 1190 soi suzmetre a « se mettre dans l'obligation d'obéir à » (Guernes de Pont-Sainte-Maxence, St Thomas, éd. E. Walberg, 4809); 1828-29 fille soumise « prostituée » (Raban, Marco Saint-Hilaire, Mém. forçat, t. 1, p. 194); 3. 1580 soubmettre « présenter à l'examen » (Montaigne, Essais, I, 56, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p. 317); 4. 1625 soubsmettre « faire subir une opération » (A. d'Aubigné, Lettre, 17 febvrier, éd. E. Réaume et F. de Caussade, t. 1, p. 315). Du lat. submittere « envoyer dessous, placer sous » (cf. le m. fr. submettre « placer sous l'autorité » 1431, P. Champion, Procès de condamnation de Jeanne d'Arc, I, 268 ds Fonds Barbier: qu'elle ne se submecte point a l'eglise − 1521, Pap. de Granvelle, I, 235, ibid.: Aussi n'est ne coustume de tellement submectre par compromis les differentz des royaumes; et dès le xiiies. le part. passé subst. submis « subordonné » ds Gdf., s.v. submettre), dér. de mittere, v. mettre, préf. sub- marquant la position inférieure, d'apr. la prép. corresp. sous*. Fréq. abs. littér. : 2 703. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 5 072, b) 2 864; xxes.: a) 3 165, b) 3 726. Bbg. Clédat (L.). Contribution à un nouv. dict. hist. et « de l'usage ». R. Philol. fr. 1915-16, t. 39, pp. 180-181. − Evenou (J.). La Sixième demande du Notre Père... Foi Lang. 1977, n o3, pp. 181-186.

Wiktionnaire

Verbe - français

soumettre \su.mɛtʁ\ transitif 3e groupe (voir la conjugaison) (pronominal : se soumettre)

  1. Réduire, ranger sous la puissance, sous l’autorité, mettre dans un état de dépendance.
    • C'est ce qui permit à une minorité conquérante, politiquement et socialement dominante, de populations surtout chrétiennes, païennes et zoroastriennes, de consolider l'Islam et de soumettre rapidement les mondes sémitiques et iranien. — (Panayiotis Jerasimof Vatikiotis, L’Islam et l’État, 1987, traduction d’Odette Guitard, 1992)
    • Soumettre à l’obéissance d’un souverain, une province à ses lois, à son empire, tout un pays, les rebelles.
    • Après une longue résistance, les provinces révoltées se soumirent.
  2. (Figuré) Subordonner.
    • Un projet qui reste soumis aux circonstances.
    • Je soumets cette proposition à votre agrément.
    • L’écriture oblige les hommes à soumettre leur esprit à Dieu.
    • Soumettre ses idées à celles de quelqu’un : subordonner ses idées à celles d’un autre, être prêt à s’en désister, s’il y est contraire.
    • Je soumets dans cette affaire mes idées aux vôtres.
    • Soumettre ses lumières, ses opinions, ses sentiments à ceux d’autrui.
    • Soumettre une chose au jugement, à la critique de quelqu’un : s’engager à déférer au jugement qu’il en portera.
    • Je vous prie de lire toute la pièce, je la soumets à votre jugement.
    • Se soumettre à un jugement arbitral.
    • Se soumettre aux ordres, à la volonté de quelqu’un : conformer ses actions, ses sentiments.
    • Nous devons nous soumettre entièrement à la volonté de Dieu.
    • Se soumettre à quelque chose, à souffrir quelque chose : s’engager, consentir à subir quelque chose.
    • Je me soumets à tout ce qu’il vous plaira.
    • Se soumettre à une intervention chirurgicale.
  3. (Figuré) Remettre ou livrer à l’examen ou à la décision de quelqu’un.
    • À l’encontre des autres routes d’Europe, celles du Royaume Uni n’avaient jamais été soumises à aucun essai organisé de redressement et d’aplanissement, et c’est à cela sans doute qu’il faut attribuer leur caractère pittoresque. — (H. G. Wells, La Guerre dans les airs, 1908, traduction d’Henry-D. Davray et B. Kozakiewicz, Mercure de France, Paris, 1910, page 47 de l’édition de 1921)
    • La France demande que soit soumise au Tribunal de La Haye la question de savoir si le pacte franco-soviétique est compatible avec Locarno. — (Victor Margueritte, Le cadavre maquillé : La S.D.N. (Mars-Septembre 1936), Flammarion, 1936, p.34)
    • Soumettez-lui votre article, votre manuscrit.
    • Ce projet fut soumis à l’examen d’une commission.
  4. Considérer en détail, pour juger.
    • Un travail conduit démocratiquement serait réglementé par des arrêtés, surveillé par une police et soumis à la sanction de tribunaux distribuant des amendes ou de la prison. — (Georges Sorel, Réflexions sur la violence, Chap.VII, La morale des producteurs, 1908, p.347)
    • Soumettre une chose à l’analyse : l’analyser, la décomposer, pour connaître de quels éléments elle est formée.
  5. Appliquer un procédé ou une procédure sur.
    • Avant d'être envoyé au moulin, le blé est préalablement soumis chez les cultivateurs à un vannage qui en sépare une partie des corps les plus légers. — (Edmond Nivoit, Notions élémentaires sur l’industrie dans le département des Ardennes, E. Jolly, Charleville, 1869, page 107)
    • Les insectes qui consomment du S. demissum, ou que l'on soumet au jeûne, n'arrivent pas à cette chitinisation et leurs élytres restent molles. — (René Guy Busnel, Études physiologiques sur le Leptinotarsa decemlineata Say, Paris : libr. E. Le François, 1939, p.110)
  6. (Foresterie, Droit) (France) Faire acte de soumission d’une parcelle au régime forestier.
    • En application des articles L.211-1 et R.214-1 du nouveau code forestier, les bois et forêts susceptibles d’aménagement, d’exploitation régulière ou de reconstitution, et les terrains à boiser des collectivités locales ou des établissements publics locaux peuvent être soumis au régime forestier […]. — (Banque des territoires, Forêt communale, mai 2015 → lire en ligne)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

SOUMETTRE. (Il se conjugue comme METTRE.) v. tr.
Réduire, ranger sous la puissance, sous l'autorité, mettre dans un état de dépendance. Soumettre à l'obéissance d'un souverain. Soumettre une province à ses lois, à son empire. Soumettre tout un pays. Soumettre les rebelles. Après une longue résistance, les provinces révoltées se soumirent. Il s'emploie aussi figurément et signifie Subordonner. Un projet qui reste soumis aux circonstances. Je soumets cette proposition à votre agrément. L'Écriture oblige les hommes à soumettre leur esprit à Dieu. Soumettre ses idées à celles de quelqu'un, Subordonner ses idées à celles d'un autre, être prêt à s'en désister, s'il y est contraire. Je soumets dans cette affaire mes idées aux vôtres. On dit dans le même sens : Soumettre ses lumières, ses opinions, ses sentiments à ceux d'autrui. Soumettre une chose au jugement, à la critique de quelqu'un, S'engager à déférer au jugement qu'il en portera. Je vous prie de lire toute la pièce, je la soumets à votre jugement. Se soumettre à un jugement arbitral. Se soumettre aux ordres, à la volonté de quelqu'un, Y conformer ses actions, ses sentiments. Nous devons nous soumettre entièrement à la volonté de Dieu. Se soumettre à quelque chose, à souffrir quelque chose, S'engager, consentir à subir quelque chose. Je me soumets à tout ce qu'il vous plaira. On dit de même : Se soumettre à une intervention chirurgicale.

SOUMETTRE signifie encore, figurément, Remettre, livrer à l'examen, à la décision de quelqu'un. Soumettre une chose à quelqu'un, à l'attention de quelqu'un. Permettez-moi de vous soumettre une observation. Je lui soumettrai votre demande. Soumettez-lui votre article, votre manuscrit. Ce projet fut soumis à l'examen d'une commission. Soumettre une question à l'examen, La considérer en détail, pour la juger. Soumettre une chose à l'analyse, L'analyser, la décomposer, pour connaître de quels éléments elle est formée. Le participe passé

SOUMIS signifie adjectivement Qui est disposé à l'obéissance ou qui en a pris le parti après avoir résisté. Des sujets soumis. Un fils soumis et respectueux. Les tribus, hier encore rebelles, et maintenant soumises. On dit, dans un sens analogue : Un air soumis, des paroles soumises. Fille soumise, Prostituée inscrite à la police.

Littré (1872-1877)

SOUMETTRE (sou-mè-tr') v. a.

Il se conjugue comme mettre.

  • 1Mettre sous la puissance, sous l'autorité ; mettre dans un état de dépendance. Ta main qui nous soumet sous le pouvoir suprême De ceux que la naissance orne du diadème, Racan, Ode à la reine. Je suis le Seigneur… et maintenant j'ai voulu soumettre ces terres à Nabuchodonosor, roi de Babylone, mon serviteur, Bossuet, Reine d'Anglet. Les guerres continuent, et les Romains soumettent après cinq cents ans les Gaulois cisalpins leurs principaux ennemis, et toute l'Italie, Bossuet, Hist. III, 7. La fortune, qui voulait leur faire éprouver toute sa rigueur, soumit don Fadrique au corsaire de Tunis et don Juan à celui d'Alger, Lesage, Diable boit. 15. Il ne faut pas croire que ce fut par modération qu'Attila laissa subsister les Romains ; il suivait les mœurs de sa nation, qui le portaient à soumettre les peuples, et non pas à les conquérir, Montesquieu, Rom. 19. Cortez soumet le puissant empire du Mexique, Voltaire, Mœurs, 118.

    Se soumettre quelque chose ou quelqu'un, le soumettre à soi. Soumettez-vous les lieux que dore le Pactole, Rotrou, Antig. II, 4.

  • 2Il se dit des femelles mises sous le mâle. Pourquoi donc le cerf et le chevreuil d'Angleterre usent-ils de violence pour se soumettre leurs femelles ? Bonnet, Consid. corps organ. Œuvr. t. VI, p. 394, dans POUGENS.
  • 3 Fig. Faire obéir, en parlant de choses abstraites. Il [le livre de l'Écriture] veut obliger les hommes à soumettre leur esprit à Dieu, Bossuet, Hist. II, 13. Jules, qui le premier la soumit [la liberté] à ses armes, Qui fit taire les lois dans le bruit des alarmes…, Racine, Bérén. II, 2. Soit qu'à tant de bienfaits ma mémoire fidèle Lui soumette [à Agrippine] en secret tout ce que je tiens d'elle, Racine, Brit. II, 2. Le christianisme nous donne l'habitude de soumettre cet orgueil ; le monde nous donne l'habitude de le cacher, Montesquieu, Déf. Espr. lois, part. 3. Pour vous soumettre la fortune et les choses, commencez par vous en rendre indépendant, Rousseau, Ém. III. Ils ont beau me crier : soumets ta raison, autant m'en peut dire celui qui me trompe ; il me faut des raisons pour soumettre ma raison, Rousseau, ib. IV.
  • 4Soumettre à, suivi d'un infinitif, dans le sens de contraindre à. Il est question de soumettre les professeurs [de l'université de Paris] à profiter des bons livres écrits sur cette matière, Bachaumont, Mém. secr. 27 déc. 1762.
  • 5 Fig. Il se dit de l'acte de déférence à la décision de quelqu'un. Soumettre une chose au jugement, à la censure, à la critique de quelqu'un. Je soumets tout ce que j'ai fait et ferai à l'avenir à la censure des puissances tant ecclésiastiques que séculières, sous lesquelles Dieu me fait vivre, Corneille, Attila, Préf. Si on soumet tout à la raison, notre religion n'aura rien de mystérieux et de surnaturel ; si on choque les principes de la raison, notre religion sera absurde et ridicule, Pascal, Pens. XIII, 3, éd. HAVET.

    Soumettre ses idées à celles d'un autre, les subordonner à celles d'un autre. Je sais combien je dois soumettre mes vues aux vôtres, Maintenon, Lett. au card. de Noailles, 7 août 1698.

    On dit dans le même sens : soumettre ses lumières, ses opinions, ses sentiments à ceux d'autrui.

    Soumettre une chose à quelqu'un, à l'attention, à l'examen de quelqu'un, appeler l'attention de quelqu'un sur une chose, la lui faire examiner. Permettez-moi de vous soumettre une observation. Je pourrai bien me repentir de mon œuvre [Tancrède] comme Dieu ; mais je ne me repentirai pas de l'avoir soumise à vos lumières et à vos bontés, Voltaire, Lett. Chauvelin, 6 déc. 1761. J'ai voulu vous soumettre un doute qui m'arrête, Delavigne, Vêpres sicil. IV, 4.

  • 6 Fig. Il se dit des moyens logiques qu'on emploie pour juger quelque chose. Soumettre une question à l'examen.

    Soumettre une chose au calcul, la déterminer à l'aide du calcul.

    Soumettre une chose à l'analyse, l'analyser, la décomposer, pour connaître de quels éléments elle est formée.

  • 7Faire subir une opération, pour analyser, disséquer. Nous avons nourri l'un de ces animaux pendant quelques mois pour l'observer, et ensuite on l'a soumis à la dissection…, Buffon, Quadrup. t. VI. Quand on soumet le peroxyde à l'action de la pile, comme on y soumet l'eau, Thenard, Instit. Mém. acad. scienc. t. III, p. 411.
  • 8Se soumettre, v. réfl. Se ranger sous l'autorité. Se soumettre à la raison. La raison ne se soumettrait jamais, si elle ne jugeait qu'il y a des occasions où elle se doit soumettre ; il est donc juste qu'elle se soumette, quand elle juge qu'elle se doit soumettre, Pascal, Pens. XIII, 4. La reine se soumit plus que jamais à cette main souveraine qui tient du haut des cieux les rênes de tous les empires, Bossuet, Reine d'Anglet. Dieu même a mis en nous quelque chose qui peut se soumettre à sa souveraine puissance, Bossuet, Duch. d'Orl. Il faut se soumettre à l'autorité de l'Église, parce qu'elle ne peut jamais se tromper ; mais il ne faut pas se soumettre aveuglément à l'autorité des hommes, parce qu'ils peuvent toujours se tromper, Malebranche, Rech. vér. IV, 3. M. de Voltaire, à mesure qu'il avance l'ouvrage [Commentaire sur Corneille], en envoie les cahiers à l'Académie française ; il se soumet au jugement de cette compagnie, qui trouve jusqu'à présent plus à admirer qu'à critiquer, Bachaumont, Mém. secr. 8 mai 1762.

    Se soumettre aux ordres, à la volonté de quelqu'un, y conformer ses actions, ses sentiments.

    Absolument. Se soumettre, reconnaître l'autorité, accepter la dépendance. Bérenger se soumit ; et le premier qui fit une secte de l'hérésie des sacramentaires fut aussi le premier qui la condamna, Bossuet, Variat. XV, 129. Demandez à ceux qui ont dans le cœur quelque passion violente, s'ils conservent quelque fierté en présence de ce qu'ils aiment ; on ne se soumet que trop, on n'est que trop humble, Bossuet, la Vallière. Tu as eu longtemps l'avantage de croire qu'un cœur comme le mien s'était soumis, Montesquieu, Lett. pers. 161. Aimons la vérité qui gêne ; adorons-la, et soumettons-nous, Condillac, Hist. anc. X. Vous n'avez payé ma tendresse d'aucun retour, vous vous êtes soumise, et ne vous êtes jamais donnée, Riccoboni, Œuvr. t. III, p. 207, dans POUGENS.

    Se soumettre à une chose, à souffrir une chose, consentir à la subir. Je me soumets à payer ce que l'on voudra, si cela est. Valens : L'impérieuse humeur ! vois comme elle me brave, Comme son fier orgueil m'ose traiter d'esclave ! - Paulin : Seigneur, j'en suis confus, et vous le méritez ; Au lieu d'y résister, vous vous y soumettez, Corneille, Théod. II, 7. La princesse Anne renonça à tous les jeux même les plus innocents, se soumettant aux sévères lois de la pénitence chrétienne, Bossuet, Anne de Gonz.

    Se soumettre à un jugement, l'accepter, en reconnaître la validité.

SYNONYME

SOUMETTRE, SUBJUGUER. Il y a dans subjuguer le mot joug qui donne à subjuguer une idée plus dure qu'à soumettre.

HISTORIQUE

XIIe s. E en lui medesme esperai, chi suzmet mun pople suz mei, Liber psalm. p. 222. Tutes choses tu suzmisis suz ses piez, ib. p. 8. Jà puisqu'il [le clerc] est sacrez, n'est à vos leis suzmis, Th. le mart. 33.

XIIIe s. Li autre, par lor orgoil, sozmetoient les plus foibles au joug de servage, Latini, Trésor, p. 575. Soies souzmis à nostre Seigneur en simplece, Psautier, f° 44.

XVe s. Le jeune duc de Savoye mourut en celui an assez merveilleusement ; dont depuis il fut grand question, et en vouloit on sousmettre [accuser] messire Othe de Grantson, Froissart, IV, p. 45, dans LACURNE. Afin que les Liegeois dessus dits et leur evesque se voulsissent soumettre du discord qu'ils avoient l'un contre l'autre sur le roi et sur son grand conseil, Monstrelet, II, 50.

XVIe s. Je soubmets ces questions au jugement de ceux à qui…, Montaigne, I, 394.

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Étymologie de « soumettre »

Provenç. sobmetre, sotzmetre ; catal. sometrer ; espagn. someter ; portug. sometter ; ital. sottomettere ; du lat. submittere, de sub, sous, et mittere, mettre.

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De l'ancien français suzmetre.
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Phonétique du mot « soumettre »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
soumettre sumɛtr

Fréquence d'apparition du mot « soumettre » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « soumettre »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « soumettre »

  • Se soumettre ou se démettre.
    Léon Gambetta — Lille - 15 Août 1877
  • Il faut essayer de soumettre les circonstances et non s'y soumettre.
    Horace — Epîtres
  • L'homme est une bête qui a un esprit permettant de soumettre les autres bêtes et les autres hommes.
    Jacques Poirier — Kosmose
  • Celui qui peut se soumettre aux mystères s'adjuge le pouvoir de les créer.
    Marc Cholodenko — Cent chants à l'adresse de ses frères
  • Les autres, qui viennent de douze pays dont Israël, le Brésil, l'Algérie et la Turquie doivent se soumettre à un test PCR dès leur arrivée en France. À Roissy, c'est au moment de montrer son passeport. Ils doivent ensuite laisser leurs coordonnées. Les résultats du test sont communiqués en 36 heures. Si le résultat est positif le voyageur doit s'isoler jusqu'à 10 jours. Les Agences régionales de santé et l'Assurance maladie surveillent cette quatorzaine et retracent les contacts éventuels sur le sol français.
    Europe 1 — Coronavirus : test obligatoire dans les aéroports pour les voyageurs revenant de 16 pays
  • Il n'appartient qu'à Dieu de soumettre à la mesure la beauté absolue.
    Albrecht Dürer — Melancholia
  • La liberté, c'est l'homme. Même pour se soumettre, il faut être libre ; pour se donner, il faut être à soi.
    Jules Michelet — Les Jésuites
  • OTTAWA, Ont. – Les camionneurs qui entrent au Canada peuvent désormais soumettre leurs coordonnées à l’Agence de la santé publique du Canada avant d’atteindre la frontière, à l’aide de la nouvelle application ArriveCAN.
    Transport Routier — ArriveCan permet aux camionneurs de soumettre leurs informations d'avance - Transport Routier
  • L'humilité n'est souvent qu'une feinte soumission, dont on se sert pour soumettre les autres.
    François de La Rochefoucauld — Maximes
  • Les hommes, dans leur quête du divin, cherchent moins à admirer et à se soumettre à un dieu qu'à obtenir de lui aide et soutien.
    Marek Halter — Le Judaïsme raconté à mes filleuls
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Traductions du mot « soumettre »

Langue Traduction
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Synonymes de « soumettre »

Source : synonymes de soumettre sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « soumettre »

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Nombre de points du mot soumettre au scrabble : 11 points

Soumettre

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