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Esclave

Variantes Singulier Pluriel
Masculin et féminin esclave esclaves

Définitions de « esclave »

Trésor de la Langue Française informatisé

ESCLAVE, subst.

Celui, celle qui est privée de sa liberté.
A.− Personne qui n'est pas de condition libre et se trouve sous la dépendance absolue d'un maître dont elle est la propriété. Esclave nègre, noir; une esclave chrétienne; vendre comme esclave. Là, l'esclave étoit hors de la loi commune à tous les citoyens, hors de la société par conséquent (Bonald, Législ. primit.,t. 2, 1802, p. 14).Le mouvement en faveur de la libération des esclaves avait commencé dans nos États du sud et bien avant la Guerre de Sécession (Green, Journal,1938, p. 130):
1. Le fait que des serfs, véritables esclaves, ont appartenu longtemps à des maîtres, dont ils dépendaient totalement et qui disposaient discrétionnairement de leurs personnes et de leurs biens, a fait naître cette opinion, répandue chez beaucoup de nos contemporains, que le Moyen Âge, pour tout ce qui n'était pas noblesse ou clergé, a été une époque d'étroit asservissement physique, intellectuel et moral. Faral, Vie temps st Louis,1942, p. 255.
SYNT. Esclave barbare, grec, turc; esclave affranchi; esclave enchaîné; le maître des esclaves; la guerre, la révolte des esclaves; la traite des esclaves; marché aux esclaves; être, devenir, se faire esclave; acheter, affranchir, vendre des esclaves; travailler comme un esclave.
Emploi adj. (notamment en fonction d'attribut ou d'appos.). La classe la plus nombreuse des hommes étoit esclave (Chateaubr., Génie,t. 2, 1803, p. 592).Une foule de comédies antiques roulent sur des questions d'état; il s'agit presque toujours de savoir si une personne est née libre ou esclave (Michelet, Hist. romaine,t. 1, 1831, p. 125).
P. hyperb. Personne au service d'une autre personne, et astreinte à des tâches pénibles, parfois humiliantes. Et les domestiques, que sont-ils donc, eux, sinon des esclaves? ... Esclaves de fait, avec tout ce que l'esclavage comporte de vileté morale (Mirbeau, Journal femme ch.,1900, p. 260):
2. Un patron se trouve toujours un peu rassuré par l'ignominie de son personnel. L'esclave doit être coûte que coûte un peu et même beaucoup méprisable. Un ensemble de petites tares chroniques morales et physiques justifient le sort qui l'accable. Céline, Voyage,1932, p. 527.
B.− P. ext. [Souvent avec un compl. prép. indiquant celui ou ce qui restreint la liberté] Personne qui, tout en étant de condition libre, est dans un état de dépendance totale vis-à-vis de quelqu'un ou de quelque chose et ne dispose pas librement de soi.
1. [Le compl. de nom exprimé ou sous-entendu désigne une pers. ou un groupe humain]
a) Domaine soc. et pol.Celui, celle qui est soumise à un pouvoir tyrannique. Le citoyen s'était constitué en quelque sorte l'esclave de la nation dont il faisait partie (Constant, Esprit conquête,1813, p. 205).De chefs en sous-chefs, le crime descend jusqu'à l'esclave qui, lui, reçoit les ordres sans en donner à personne (Camus, Homme rév.,1951, p. 228):
3. À partir d'un certain degré d'oppression, les puissants arrivent nécessairement à se faire adorer de leurs esclaves. Car la pensée d'être absolument contraint, jouet d'un autre être, est insoutenable pour un être humain. Dès lors, si tous les moyens d'échapper à la contrainte lui sont ravis, il ne lui reste plus d'autre ressource que de se persuader que les choses mêmes auxquelles on le contraint, il les accomplit volontairement... Weil, Pesanteur,1943, p. 157.
Emploi adj. (attribut ou apposé). Femmes esclaves; nations, pays esclaves. L'homme est né pour le bonheur et pour la liberté, et partout il est esclave et malheureux (Robespierre, Discours,Sur la constitution, 1793, p. 495).Vous êtes, non le plus esclave, mais le plus valet de tous les peuples (Courier, Pamphlets pol.,Pamphlet des pamphlets, 1824, p. 218).
b) Domaine mor.
[Avec un compl. prép. exprimé ou sous-entendu, avec ou sans valeur péj.] Celui, celle qui se soumet entièrement à la volonté de quelqu'un, s'emploie exclusivement à le servir par intérêt, par passion. Obéir, se soumettre à qqn en esclave. Un vieux bigot, esclave du prince par éducation, par devoir, par habitude (Marat, Pamphlets,Nouv. dénonciation contre Necker, 1790, p. 80).Tous les jours près d'elle, j'étais un esclave, un jouet sans cesse à ses ordres (Balzac, Peau chagr.,1831, p. 147).Marie Immaculée, ma Souveraine et Maîtresse, voici la prière très-humble de votre esclave (Bloy, Journal,1901, p. 74):
4. Jupiter, roi des Dieux et des hommes, mon roi, prends-moi dans tes bras, emporte-moi, protège-moi. Je suivrai ta loi, je serai ton esclave et ta chose, j'embrasserai tes pieds et tes genoux. Défends-moi contre les mouches, contre mon frère, contre moi-même, ne me laisse pas seule... Sartre, Mouches,1943, III, 3, p. 104.
Emploi adj. (attribut ou appos.). Mon âme est triste; mon cœur est esclave, et mon imagination m'effraie (Napoléon Ier, Lettres Joséph.,1796, p. 21).Ils sont tous plus ou moins esclaves : de leur mari, de leur femme, de leurs enfants; c'est ça leur malheur (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 524).
Emploi absol., péj., subst. ou adj. (attribut ou appos.). (Celui, celle) qui est porté à obéir servilement. Une âme d'esclave; une mentalité, une morale d'esclave. L'homme est tyran ou esclave par la volonté, avant de l'être par la fortune (Proudhon, Syst. contrad. écon.,t. 1, 1846, p. 331).La cohorte ricanante de ces petits rebelles, graine d'esclaves, qui finissent par s'offrir, aujourd'hui, sur tous les marchés d'Europe, à n'importe quelle servitude (Camus, Homme rév.,1951, p. 376):
5. Cinq ou six savants qui se trouvaient là se mirent à faire bassement la cour aux ministres, et même aux députés. Ils eurent bientôt pour rivaux deux ou trois littérateurs célèbres, un peu moins plats dans la forme et peut-être plus esclaves au fond, mais cachant leur bassesse sous des formes de parfaite urbanité. Stendhal, Leuwen,t. 3, 1836, p. 14.
c) P. métaph., domaine de l'inanimé.(Ce) qui est subordonné à la volonté de l'homme ou à une chose considérée comme ayant un pouvoir. Le corps esclave. L'esprit est tout. Le matériel est esclave du spirituel (Martin du G., Thib.,Cah. gr., 1922, p. 615).La machine exige. D'abord moyen d'action, esclave, elle a peu à peu retenti sur le maître qui la maniait (Huyghe, Dialog. avec visible,1955, p. 41).
2. [Le compl. prép. exprimé ou sous-entendu désigne une chose] Personne dont la volonté personnelle, la liberté de jugement ou d'action sont entravées ou abolies par l'action de forces contraignantes, bonnes ou mauvaises, intérieures ou extérieures à l'individu (passions, instincts, contraintes sociales, valeurs morales, déterminismes physiques ou historiques, etc.). Esclave de ses habitudes, de ses passions. Esclave de l'équité, quand elle avait une affaire devant les juges (Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 4, 1859, p. 435).J'étais devenu un esclave de l'opium (Baudel., Paradis artif.,1860, p. 372).Cet air égaré, à quoi se reconnaissent les esclaves d'une passion et les prisonniers évadés (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 383):
6. L'expérimentateur vrai (...) n'est l'esclave ni des faits, ni des idées. Il domine son sujet avec un esprit calme et le critique sainement. Il cherche la vérité et et non la confirmation d'une théorie ou d'une idée préconçue. C. Bernard, Princ. méd. exp.,1878, p. 251.
SYNT. Esclave des convenances, de préjugés, de son milieu; esclave du règlement, de son travail; esclave du devoir, de sa parole; esclave des circonstances, de la nécessité.
Emploi adj. Les Français sont, de tous les peuples de l'Europe, le plus esclave des préjugés et le plus asservi à la routine (Jouy, Hermite,t. 1, 1811, p. 47).Un plus grand poëte encore que lui [Byron] n'aurait pas, je crois, été si esclave des choses extérieures et si admirateur de la nature (Barb. d'Aurev., 4eMemor.,1858, p. 97):
7. ... dans les manières de M. de Guermantes, homme attendrissant de gentillesse et révoltant de dureté, esclave des plus petites obligations et délié des pactes les plus sacrés, je retrouvais encore intacte après plus de deux siècles écoulés cette déviation particulière à la vie de cour sous Louis XIV et qui transporte les scrupules de conscience du domaine des affections et de la moralité aux questions de pure forme. Proust, Guermantes 2,1921, p. 437.
Prononc. et Orth. : [εskla:v]. Voyelle de syll. finale post. ds Passy 1914, Barbeau-Rodhe 1930, Pt Rob. (var.) et Warn. 1968 (var.); v. aussi Fouché Prononc. 1959, p. 61. Enq. : /esklav/. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. Ca 1175 subst. (B. de Ste-Maure, Ducs Normandie, éd. C. Fahlin, 17065). Empr. au lat. médiév. sclavus « id. » (xes. ds Nierm.), proprement « slave » (viies., Jonas de Bobbio, Vita Columbani, éd. B. Krusch, I, 27) prob. formation régressive à partir de *sclavone « slave » pris pour un accus. et issu du slave primitif *slovēninŭ « id. »; la même évolution a eu lieu en gr. médiév. : cf. formes Σ κ λ α ́ β ο ς, Σ κ λ α β η ν ο ́ ς, Σ θ λ α β η ν ο ι ́ citées ds FEW t. 20, p. 46b. Le changement de sens « slave » > « esclave » s'explique par le grand nombre de Slaves réduits en esclavage dans les Balkans par les Germains et les Byzantins pendant le haut Moyen Âge. V. FEW t. 20, pp. 46b-47 et P. Skok ds Mél. A. Thomas, pp. 413-416. Fréq. abs. littér. : 4 136. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 9 254, b) 6 430; xxes. : a) 3 724, b) 4 007. Bbg. Aebischer (P.). Les Premiers pas du mot « sclavus » esclave. Archivum Romanicum. 1937, t. 20, pp. 484-490. − Darm. Vie 1932, pp. 94-95. − Jänicke (O.). Zu den slavischen Elementen im Französischen. In : [Mél. Wartburg (W. von)]. Tübingen, 1968, pp. 440-441.

Wiktionnaire

Nom commun 2 - français

esclave \ɛs.klav\ masculin, au singulier uniquement

  1. Langue amérindienne de la famille dénée.
    • La plupart des langues dénées (ou athabascanes) sont menacées, même si le chipewyan, l’esclave, le dogrib et le gwich’in sont langues officielles dans les Territoires du Nord-Ouest. — (L’actualité, 21 février 2007)

Nom commun 1 - français

esclave \ɛs.klav\ masculin et féminin identiques

  1. Celui ou celle qui par sa naissance ou par sa capture n’est pas de condition libre ou que la violence a mis sous la puissance absolue d’un maître.
    • Le second document n’est pas plus exact que le premier, car il ne dit pas si tous les esclaves entrés dans le port de Rio ont été le produit d’un commerce direct entre cette place et l’Afrique. — (Anonyme, Brésil. - situation financière, Revue des Deux Mondes, 1829, tome 1)
    • Dans les premiers âges historiques, on ne voit pas seulement les maîtres frapper et fouetter leurs esclaves ; les rois eux-mêmes administrent le supplice de la bastonnade. — (La bastonnade et la flagellation légales, dans le Le Magasin pittoresque, 1854, volume 8, page 54)
    • Le Concile de Mâcon (581) recommande aux chrétiens de racheter les esclaves chrétiens servant chez les juifs, pour le prix de 12 sols. — (Léon Berman, Histoire des Juifs de France des origines à nos jours, 1937)
    • Les marchés d’esclaves les plus importants étaient ceux de Fez et de Marrakech. Je n’ai vu que ce dernier. — (Frédéric Weisgerber, Au seuil du Maroc Moderne, Institut des Hautes Études Marocaines, Rabat : Les éditions de la porte, 1947, page 33)
    • La masse servile, issue des deux dernières castes, représente près de 10 % de la population, faisant de la Mauritanie le pays qui connaît le taux d’esclaves le plus élevé au monde. — (Zineb El Rhazoui, Mauritanie : esclaves contre dieux et maîtres, Charlie Hebdo, 7 janvier 2015)
  2. (Par hyperbole) Prolétaire opprimé et exploité.
    • Enfin, c’est celui qui veut remplacer la loi tutélaire de la majorité par l'arbitraire tyrannique du petit nombre, faire le peuple esclave du parti & écraser la démocratie tout entière sous une despotique kakistocratie. — (Le Député de l'opposition, ce qu’il est, ce à quoi il sert, ce qu'il coûte, Paris : chez Dentu, 1867, page 21)
    • Au vrai j’entrevoyais que le conflit politique était le même en tous pays, et qu’il n’était autre qu’une révolte des esclaves contre les maîtres, chose qu’il fallait attendre, après cette tuerie imbécile. — (Alain, Souvenirs de guerre, page 229, Hartmann, 1937)
  3. (Figuré) Personne qui par flatterie, par intérêt, se met dans la dépendance de quelqu’un et suit aveuglément ses volontés.
    • Yasmina pria Chérif de répondre à Jacques qu’elle aussi l’aimait toujours, qu’elle lui resterait fidèle tant qu’elle vivrait, qu’elle restait son esclave soumise et aimante. — (Isabelle Eberhardt, Yasmina, 1902)
    • (Par extension)Doux esclave de ses habitudes, l’idée seule de l’imprévu le faisait se recroqueviller prudemment, comme si quelque gros nuage menaçait de répandre son déluge sur la divine monotonie des choses. — (Alphonse de Châteaubriant, Monsieur des Lourdines, chapitre 1, 1910)
  4. (Informatique) Élément vers lequel on synchronise, par opposition au maître.
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

ESCLAVE. n. des deux genres
. Celui, celle qui par sa naissance n'est pas de condition libre ou que la violence a mis sous la puissance absolue d'un maître. Un jeune, une jeune esclave. Esclave turc. Esclave chrétien. Vendre, acheter, délivrer, racheter des esclaves. Affranchir un esclave. Chez les Romains, le maître avait droit de vie et de mort sur ses esclaves. Les Grecs traitaient plus humainement les esclaves que les Romains. Il se dit figurément de Ceux qui par flatterie, par intérêt, se mettent dans la dépendance de quelqu'un et suivent aveuglément ses volontés. Il est esclave de tous ceux qui peuvent contribuer à sa fortune. Avoir une âme d'esclave, Avoir une âme vile et basse. On dit aussi adjectivement Avoir une âme esclave. Fig., Être esclave, Être tellement attaché au service de quelqu'un, ou à quelque emploi, qu'on ne peut s'éloigner, ni faire autre chose. On est esclave auprès de ce maître-là. On est esclave, tout à fait esclave dans cet emploi. Fig., Être esclave de la faveur, être esclave de ses intérêts, de ses passions, Faire tout pour la faveur, pour ses intérêts, pour satisfaire ses passions. Il peut se prendre aussi en bonne part. Être esclave de son devoir, Se soumettre scrupuleusement à toutes les obligations d'une fonction, d'une charge. Être esclave de sa parole, Tenir religieusement ce qu'on promet.

Littré (1872-1877)

ESCLAVE (è-skla-v') s. m.
  • 1Celui, celle qui est sous la puissance absolue d'un maître, par achat, par héritage ou par la guerre. Délivrer, racheter des esclaves. Platon vendu comme esclave. Le trafic des esclaves à la côte d'Afrique. On trouve la sainteté dans les emplois les plus bas, et un esclave s'élève à la perfection dans le service d'un maître mortel, pourvu qu'il y sache regarder l'ordre de Dieu, Bossuet, le Tellier. De mon rang descendue, à mille autres égale, Ou la première esclave enfin de ma rivale, Racine, Baj. v, 4. Aristote veut prouver qu'il y a des esclaves par nature ; ce qu'il dit ne le prouve guère, Montesquieu, Esp. XV, 7. Les Athéniens traitaient leurs esclaves avec une grande douceur ; on ne voit point qu'ils aient troublé l'État à Athènes, comme ils ébranlèrent celui de Lacédémone, Montesquieu, ib. XV, 17. Chaque nation européenne a une manière de traiter ses esclaves qui lui est propre : l'Espagnol en fait les compagnons de son indolence ; le Portugais, les instruments de ses débauches ; le Hollandais, les victimes de son avarice, Raynal, Hist. phil. XI, 22. Il est prouvé que quatorze ou quinze cent mille noirs, aujourd'hui épars dans les colonies européennes du nouveau monde, sont les restes infortunés de huit ou neuf millions d'esclaves qu'elles ont reçus, Raynal, ib. Les esclaves de tout âge, de tout sexe et de toute nation sont un objet considérable de commerce dans toute la Grèce, Barthélemy, ch. 6.

    Terme de droit romain. Esclaves de la peine, ceux qui étaient condamnés à travailler dans les mines, ou à combattre des animaux féroces pour divertir le peuple.

    Par extension. Esclave couronnée, Je partis pour l'hymen où j'étais destinée, Racine, Mithr. I, 3. Ce n'est donc point, Ismène, un bruit mal affermi ? Je cesse d'être esclave et n'ai plus d'ennemi, Racine, Phèdre, II, 1.

    Fig. Il [un livre] est esclave né de quiconque l'achète, Boileau, Sat. IX. La rime est une esclave et ne doit qu'obéir, Boileau, Art p. I.

  • 2Celui qui est soumis à une domination étrangère, à un gouvernement despotique. Fut-il jamais au joug esclaves plus soumis ? Racine, Esth. III, 4. Quand l'esclave imprudent pour ses maîtres combat, Tout son sang prodigué se répand sans éclat, Delavigne, Vêpres sicil. I, 2. D'anciens Gaulois, pauvres esclaves, Un soir qu'autour d'eux tout dormait, Levaient la dîme sur les caves Du maître qui les opprimait, Béranger, Escl. gaulois.

    En esclave, à la façon des esclaves, servilement. Je prétends n'être point obligée à me soumettre en esclave à vos volontés, Molière, G. Dandin, II, 4. Le sang des Ottomans Ne doit point en esclave obéir aux serments, Racine, Baj. III, 3.

  • 3Dominé par, assujetti à. Vous seriez devenu, pour avoir tout dompté, Esclave des grandeurs où vous êtes monté, Corneille, Cinna, II, 1. Elle a trop de vertus pour n'être pas chrétienne… Pour vivre des enfers esclave infortunée, Corneille, Poly. IV, 3. Père dénaturé, malheureux politique, Esclave ambitieux d'une peur chimérique, Corneille, ib. v, 6. Vil esclave toujours sous le joug du péché, Au démon qu'il redoute il demeure attaché, Boileau, Épît. XI. Triste destin des rois, esclaves que nous sommes Et des rigueurs du sort et des discours des hommes, Racine, Iphig. I, 5. Esclave d'une lâche et frivole pitié, Racine, Athal. II, 7. L'empereur soupçonneux, esclave de son rang, Campistron, Andron. I, 8. Plus une âme mondaine est esclave de ses passions, Massillon, Car. Respect hum. Elle n'en est pas moins l'esclave des vanités d'Égypte, Massillon, ib. Prosp. J'eusse été près du Gange esclave des faux dieux, Chrétienne dans Paris, musulmane en ces lieux, Voltaire, Zaïre, I, 1. Mais le reste du monde, esclave de la crainte, Voltaire, Alz. I, 1. En arrivant à la cour, il se vit entouré une seconde fois des esclaves de la faveur, Condorcet, Maurepas.

    Être esclave de sa parole, tenir religieusement la promesse qu'on a faite.

    Être esclave de son devoir, l'accomplir scrupuleusement. Tout cela part d'un cœur toujours maître de soi, D'un héros qui n'est point esclave de sa foi, Racine, Andr. IV, 5.

  • 4Qui est volontairement asservi aux volontés de quelqu'un. Tous les hommes vivants sont ici-bas esclaves ; Mais, suivant ce qu'ils sont, ils diffèrent d'entraves, Régnier, Sat. III. Qui est plus esclave qu'un courtisan assidu, si ce n'est un courtisan plus assidu ? La Bruyère, VIII. Les hommes veulent être esclaves quelque part et puiser là de quoi dominer ailleurs, La Bruyère, ib. Vous exigez que vos esclaves vous servent avec tant de respect, Massillon, Car. Temples. Diderot s'est fait esclave des libraires, et est devenu celui des fanatiques, Voltaire, Lett. à d'Alembert, 15 oct. 1759. Je ne désire pas des amis ; il ne me faut que des dupes et des esclaves, Genlis, Veillées du chât. t. III, p. 381, dans POUGENS.

    Dans le langage de la galanterie, amant et serviteur d'une dame. Je ne souffrirai point qu'Hypsipile me brave, Et m'enlève ce cœur que j'ai vu mon esclave, Corneille, Tois. d'or, IV, 3. Une aventure me fit voir la charmante Élise ; cette vue me rendit esclave de ses beautés, Molière, l'Avare, v, 5. Mais enfin je ne puis… … esclave d'un coup d'œil Par des soumissions caresser son orgueil, Voltaire, Alz. I, 1.

  • 5Qui n'a aucun moment de libre. Cet emploi le rend esclave. Les domestiques sont esclaves dans cette maison.
  • 6 Adj. Les nègres esclaves. Ô malheureuse et respectable reine, comment vous retrouvé-je en ce lieu écarté, vêtue en esclave et accompagnée d'autres femmes esclaves qui cherchent un basilic pour le faire cuire dans de l'eau rose par ordonnance du médecin ? Voltaire, Zadig, 1.

    Fig. Avoir une âme esclave, avoir une âme vile et basse.

    Par extension. Qui obéit comme ferait un esclave. Sylla peut en effet quitter sa dictature ; Mais il peut faire aussi des consuls à son choix, De qui la pourpre esclave agira sous ses lois, Corneille, Sertor. IV, 3. L'air tient les vents tous prêts à suivre sa colère [de Médée] ; Tant la nature esclave a peur de lui déplaire, Corneille, Méd. III, 1. Il est beau d'étaler cette prérogative Aux yeux du Rhône esclave et de Rome captive, Corneille, Sert. IV, 2.

HISTORIQUE

XIIe s. Qui estoit franc est devenu esclave, Machab. I, 2.

XIIIe s. Et qui cele rançon ne porroit paer, si seroit esclas, Hist. occid. des croisades, t. I, p. 89. Quant Seif Eddin ot les mil esclaz, ib. p. 97. L'on se peut clamer par l'assise de esclaf ou de esclave qui est mesel [lépreux] ou meselle, ou qui cheit dou mauvais mau [épilepsie], Ass. de Jér. I, 129.

XIVe s. Le royaume de Rome estoit abandonné non pas seulement à gens estranges et pelerines, mes encores à serfs et à esclaves, Bercheure, f° 20, verso. Voulons que lesdits Cathelans qui vouldront venir en nostre dit royaume le puissent faire seurement et sauvement avec leurs femmes, enfans, serviteurs, esclaux [valets], esclaves, bagues, joyaulx, Ordonn. avril 1486.

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Étymologie de « esclave »

Provenç. esclau, s. m. ; esclava, s. f. ; espagn. esclavo ; portug. escravo ; ital. schiavo ; allem. Sclave ; angl. slave ; de slavus ou sclavus, Slave, nom de peuple, qui fut employé pour désigner un serf après les guerres qu'Othon le Grand et ses successeurs firent aux peuples slaves et dans lesquelles une partie de ces peuples furent emmenés en captivité, distribués aux guerriers de l'empire d'Allemagne et réduits en servitude. Un très grand nombre de Slaves étant devenus serfs, le mot de slave fut employé pour synonyme de serf. Les premiers exemples de l'usage de slavus en cette signification remontent au Xe siècle ; voy. GUÉRARD, Polyptyque d'Irminon, I, 283.

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Du latin médiéval sclavus signifiant « slave » au VIIe siècle et prenant le sens d’« esclave » au Xe siècle. Les Slaves des Balkans faisaient l’objet d’un commerce intensif à partir du haut Moyen Âge. Ce terme est probablement né par formation régressive à partir de *sclavone (« slave ») pris pour un accusatif et issu du vieux slave словѣнинъ, slověninŭ (« slave »).
Sur une base identique, et pour les mêmes raisons linguistiques et commerciales, le grec médiéval a créé σκλάβος, sklávos (« esclave ») et σλαβικός, slavikós (« slave »). À la même époque, le latin servus s’est spécialisé pour désigner les serfs qui, bien qu’ils fussent également dans un rapport de dépendance vis-à-vis du seigneur, n’étaient pas totalement dénués de droits, contrairement aux esclaves (en droit, un serf reste une personne, mais l’esclave est une chose).
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Phonétique du mot « esclave »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
esclave ɛsklav

Fréquence d'apparition du mot « esclave » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « esclave »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « esclave »

  • Le mensonge est la religion des esclaves et des patrons.
    Alekseï Maksimovitch Pechkov, dit Maksim Gorki — Dans les bas-fonds, IV, 1, Satine
  • Le commissionnaire est un esclave qui doit livrer un message et aussi en rendre compte : esclave, il l'est deux fois.
    Massa Makan Diabaté — Le boucher de Kouta
  • D'esclave, l'homme de crime peut devenir tyran, mais jamais il ne devient libre.
    Félicité de La Mennais — Paroles d'un croyant
  • Les hommes veulent être esclaves quelque part, et puiser là de quoi dominer ailleurs.
    Jean de La Bruyère — Caractères
  • Je ne suis ni mon maître ni mon esclave.
    Louis Scutenaire — Mes inscriptions I
  • Il faut que l'homme libre prenne quelquefois la liberté d'être esclave.
    Jules Renard — Journal
  • Qui se dit mon valet, je me dis son esclave ; Qui se hausse d'un pied, je me hausse de deux.
    Claude de Trellon — Discours à Monsieur de la Broue
  • Dieu, qui a créé le fer, N'a pas voulu d'esclaves.
    Ernst Moritz Arndt — Chant patriotique Vaterlandslied
  • Un soldat est un esclave en uniforme.
    Juan Donoso Cortes — Discours
  • Il n'y a plus de patrie ; je ne vois d'un pôle à l'autre que des tyrans et des esclaves.
    Denis Diderot — Le Neveu de Rameau
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Traductions du mot « esclave »

Langue Traduction
Anglais slave
Espagnol esclavo
Italien schiavo
Allemand sklave
Chinois 奴隶
Arabe عبد
Portugais escravo
Russe рабыня
Japonais 奴隷
Basque morroi
Corse schiavu
Source : Google Translate API

Synonymes de « esclave »

Source : synonymes de esclave sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « esclave »

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Esclave

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