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Comprendre

Définitions de « comprendre »

Trésor de la Langue Française informatisé

COMPRENDRE, verbe trans.

I.− [L'idée dominante est celle d'un rapport quantitatif de contenant à contenu; le suj. désigne une chose ou une pers.] Emploi trans. Inclure dans sa nature propre ou dans un système telle et telle choses ou personnes.
A.− [Le suj. désigne une chose] Avoir en soi tel et tel éléments constitutifs. Comprendre telles choses, telles personnes :
1. ... dans tous nos jugemens quelconques, l'extension des deux idées comparées étant la même, parce qu'elle est toujours égale à celle du sujet, l'opération intellectuelle consiste à sentir que le sujet comprend l'attribut; (...) nos raisonnemens sont des séries de jugemens successifs par lesquels on voit que ce premier attribut en comprend un second, le second un troisième, et ainsi de suite, en sorte que le premier sujet renferme le dernier attribut. Destutt de Tracy, Élémens d'idéologie,Logique, 1805, p. 165.
2. L'œil se compose de parties distinctes, (...). Pour ne parler que de la rétine, on sait qu'elle comprend trois couches superposées d'éléments nerveux, − cellules multipolaires, cellules bipolaires, cellules visuelles, − dont chacune a son individualité et constitue sans doute un organisme fort complexe : encore n'est-ce là qu'un schéma simplifié de la fine structure de cette membrane. Bergson, L'Évolution créatrice,1907, p. 89.
SYNT. Comprendre + adv. : comprendre environ, essentiellement, généralement, notamment, uniquement; comprendre + subst. : comprendre un (certain/grand) nombre de, comprendre l'ensemble/la totalité de, comprendre (tant de) dépenses/divisions/éléments/espèces/grades/membres/opérations/parties/périodes/phases/représentants/sections/séries/sortes; subst. + comprendre : appareil, catégorie, équipe, groupe, liste, programme, traitement (qui comprend...). PARAD. a) (Quasi-)synon. comporter, compter, contenir, embrasser, enclore, impliquer. b) (Quasi-)anton. exclure.
En partic. emploi pronom. passif. [Le contenant est un mot, une expression; le contenu est une chose abstr.] Être inclus dans tel mot, telle expression, etc. Mille difficultés qui se comprenaient toutes dans ce mot terrible : − et de l'argent? (Balzac, Les Illusions perdues,1843, p. 154).
Rem. Un tel emploi sert de transition entre les emplois I et II; cf. en outre : Il dit [Saint Jean] : « la lumière luit dans les ténèbres et les ténèbres ne l'ont pas comprise » (...) Or le verbe grec, de même que le verbe français comprendre, signifie renfermer, tenir en soi, de même que, entendre, avoir connaissance (Mérimée, Lettres à Madame de la Rochejacquelein, 1870, p. 123).
B.− [Le suj. désigne une pers.] Faire entrer dans une catégorie, dans un ensemble d'éléments nombrables. Comprendre qqn/qqc. dans/sous qqc. :
3. ... l'homme, qu'ils [des savants trop accrédités] rangent parmi les animaux, n'est lui-même qu'une matière organisée, soumise aux simples lois de la physique, (...). Quant aux puissances élémentaires, ils ont omis de les comprendre dans leur système; de sorte que le temple qu'ils ont prétendu élever à la nature manque à la fois de comble et de fondements. Où placeront-ils donc les lois de la morale, qui doivent régir les sociétés humaines, s'ils n'aperçoivent dans l'univers que quelques lois physiques? Bernardin de Saint-Pierre, Harmonies de la nature,1814, p. 260.
SYNT. Comprendre sous (tel) terme (tant de sens). PARAD. a) (Quasi-)synon. englober, envelopper, inclure, incorporer, intégrer, mêler. b) (Quasi-)anton. excepter, omettre.
Rem. Comprendre est parfois employé en ce sens avec un compl. de lieu désignant un ensemble considéré dans son extension. Enfermé dans l'art et dans l'amour (...) j'ai peine à monter, à étendre l'amour, à élargir mon cœur pour y comprendre l'amour universel (Michelet, Journal, 1850, p. 128).
II.− [L'idée dominante est celle d'un rapport qualitatif d'intellection entre une fonction mentale et les objets sur lesquels elle s'exerce]
A.− Emploi trans. [Le suj. désigne une pers.] Avoir, élaborer, recevoir dans son esprit la représentation nette d'une chose, d'une pers.
1. [Par réflexe acquis, par actualisation d'une connaissance mémorisée antérieurement] Saisir intellectuellement le rapport de signification qui existe entre tel signe et la chose signifiée, notamment au niveau du discours. Comprendre qqc.; p. ell. comprendre qqn (comprendre ce que dit qqn) :
4. ... il [un moderne, en entendant prononcer le mot arbre] logera ce signe en sa tête, dans une case étiquetée et distincte; c'est là ce qu'aujourd'hui nous appelons comprendre. H. Taine, Philos. de l'art,t. 1, 1865, p. 152.
5. Comprendre consiste dans la substitution plus ou moins rapide d'un système de sonorités, de durées et de signes par tout autre chose, qui est en somme une modification ou une réorganisation intérieure de la personne à qui l'on parle. Et voici la contre-épreuve de cette proposition : c'est que la personne qui n'a pas compris répète, ou se fait répéter les mots. Par conséquence, la perfection d'un discours dont l'unique objet est la compréhension consiste évidemment dans la facilité avec laquelle la parole qui le constitue se transforme en tout autre chose, ... Valéry, Variété V,1944, p. 143.
SYNT. Comprendre + loc. adv. : comprendre à demi-mot. Il avait l'esprit prompt et comprenait à demi-mot (R. Rolland, Jean-Christophe, L'Adolescent, 1905, p. 353), comprendre de travers; comprendre + subst. : comprendre un document, une explication, les finesses de la langue, une idée, le langage de, une langue, le latin, un mot (ne pas comprendre un mot de), les paroles de, une pensée, une question, un raisonnement, le sens de, un signe, la signification de; verbe + comprendre : affecter de (ne pas) comprendre, (n')avoir (pas) l'air de comprendre, avouer (ne pas) comprendre, croire comprendre (je crois comprendre), faire semblant de (ne pas) comprendre, feindre de (ne pas) comprendre, paraître (ne pas) comprendre, se faire comprendre (s'exprimer clairement); comprendre + prop. a) comprendre + prop. compl. : comprendre ce que dit (telle pers.), ce que signifie (telle chose), comprendre ce que parler veut dire; b) comprendre + prop. suj. : comprenne qui pourra (formule utilisée à propos d'une matière délicate, quand on ne veut s'expliquer davantage, cf. J. Bousquet, Traduit du silence, 1935-36, p. 76 et Gide, Journal, 1946, p. 290, avec la var. comprenne qui peut ou qui veut).
PARAD. (Quasi-)synon. déchiffrer, entendre, interpréter, traduire; pop. entraver, piger.
En interj. (dans un dialogue fam.). Je comprends! Tu comprends! Vous comprenez! (Marque ou appelle l'approbation). Citoyens nous avons soupé de (...) Je comprends! y dit un. Oui, oui, y crient les autres tous (Musette, Cagayous partout,1905, p. 21).
2. [Par effort de réflexion]
a) Se faire une idée claire des causes, des conséquences, etc., qui se rattachent à telle chose et qui l'expliquent. Comprendre qqc. (à qqc.).L'intelligence (...) cette faculté de comprendre les relations des choses (Carrel, L'Homme, cet inconnu,1935, p. 141):
6. Les expériences scientifiques sont faites d'après une idée préconçue qu'il s'agit de vérifier ou de contrôler afin de comprendre le phénomène et de saisir dans toutes les circonstances qui accompagnent la production du phénomène celle qui constitue réellement son déterminisme et qui doit être appelée sa cause prochaine. C. Bernard, Principes de méd. exp.,1878, p. 4.
7. ... il est vain d'espérer « comprendre » le fonctionnement du système nerveux, c'est-à-dire de prétendre déduire ce fonctionnement de la seule structure « visible » (actuellement ou virtuellement), et de notre habitude des liaisons mécaniques et physiques. Ruyer, La Conscience et le corps,1937, p. 37.
SYNT. Comprendre + adv. : comprendre admirablement, aisément, bien (fort bien), clairement, difficilement, facilement, mal (fort mal), parfaitement, pleinement, vaguement; comprendre + loc. : comprendre à peine, à merveille, à moitié, sans peine, ne pas comprendre grand chose à, ne rien comprendre à rien, n'y comprendre goutte; comprendre + subst. : comprendre la cause, le fonctionnement, la genèse, le lien, le mécanisme, l'origine, la raison, le rapport, le rôle (de telle chose); subst. + de + comprendre : difficulté, faculté de comprendre; verbe + comprendre : vouloir comprendre; verbe + à + comprendre : aider, arriver, avoir peine, chercher, parvenir à comprendre; verbe + de + comprendre : s'efforcer, essayer, permettre, tâcher de comprendre; prop. + comprendre : il est aisé/difficile/facile/impossible de comprendre, vous êtes assez intelligent pour comprendre/trop intelligent pour ne pas comprendre. (Il ne) faut pas chercher à comprendre ou essayer de comprendre (cf. Esn. Poilu 1919, p. 575 et Bernanos, Journal d'un curé de campagne, 1936, p. 1033), il n'y a rien à comprendre. PARAD. a) (Quasi-) synon. appréhender, pénétrer. b) (Quasi-)anton. embrouiller, enchevêtrer.
En partic. [D'un point de vue métaphysique] Comprendre le passé, les phénomènes, la vie, etc. Comprendre leur principe, leur finalité :
8. La vie, je la comprends de moins en moins, et je l'aime de plus en plus. (...) on ne vieillit pas. Pour le cœur, c'est entendu : on le savait, du moins en amour. Eh bien, pour l'esprit, c'est la même chose. Il reste toujours jeune. On ne comprend pas plus la vie à quarante ans qu'à vingt, mais on le sait, et on l'avoue. C'est ça, de la jeunesse. Renard, Journal,1907, p. 1106.
Absol. Comprendre = comprendre le sens caché de tout ce qui est. Comprendre est le tout de l'homme (Amiel, Journal intime,1866, p. 207):
9. J'ai reconnu que j'étais peu de chose : raison, sentiment, instinct réunis, cela fait encore un être si fini et une action si bornée, qu'il faut en revenir à l'humilité chrétienne jusqu'à ce point de dire : « Je sens vivement, je comprends fort peu et j'aime beaucoup ». Mais il faut quitter l'orthodoxie catholique quand elle dit : je prétends sentir et aimer sans rien comprendre. G. Sand, Histoire de ma vie,t. 4, 1855, p. 306.
b) Se faire une conception personnelle idéale de telle chose. Comprendre qqc. de telle façon, manière de comprendre (telle chose), voilà comme je comprends telle chose :
10. On demande quelle est cette plénitude de bonheur céleste, promise à la vertu par le christianisme; on se plaint de sa trop grande mysticité : « Du moins, dans le système mythologique, dit-on, on pouvoit se former une image des plaisirs des ombres heureuses; mais comment comprendre la félicité des élus? » Fénelon l'a cependant devinée cette félicité, lorsqu'il fait descendre Télémaque au séjour des mânes : son Élysée est visiblement un paradis chrétien. Chateaubriand, Génie du Christianisme,t. 1, 1803, p. 270.
SYNT. Comprendre l'amour, le bonheur, la vie (de telle façon).
PARAD. Imaginer, se figurer, interpréter, se représenter (telle chose ou telle façon).
En partic., domaine des arts.Concevoir un sujet et l'exprimer de telle façon. La Madone telle que le peintre d'Urbin la comprenait dans les derniers temps de sa vie, au sommet de sa troisième manière (T. Gautier, Guide de l'amateur au Musée du Louvre,1872, p. 33).Comprendre les statues comme l'expression fixée d'une certaine sensibilité (Barrès, Le Voyage de Sparte,1906, p. 66).
3. [Par intuition, dans une saisie spontanée (gén. après une longue maturation plus ou moins inconsciente de l'observation, du jugement, de l'expérience personnelle)]
a) Se rendre compte de la réalité de telle chose, prendre conscience de son importance. Comprendre qqc. :
11. La proposition du prêtre venait de remuer en elle ce coin obscur, où elle évitait de lire; et, à la douleur qu'elle éprouvait, elle comprenait enfin la gravité de son mal, elle avait l'effarement de pudeur d'une femme qui sent glisser son dernier vêtement. Zola, Une Page d'amour,1878, p. 874.
12. ... tout à coup, j'eus le sentiment que le visage de ma mère avait changé. (...) dans la conjugaison de tous ces signes, il me fallait bien distinguer quelque chose de nouveau, de très triste et de très angoissant. (...). Je compris tout cela soudain... G. Duhamel, Chronique des Pasquier,Le Jardin des bêtes sauvages, 1934, p. 36.
SYNT. Comprendre + adv. : comprendre immédiatement, rapidement, sur-le-champ, tout de suite, vite; comprendre + subst. : comprendre son devoir, son erreur, comprendre le danger/l'étendue/la gravité/l'importance/l'intérêt/la nécessité/la portée/le prix/l'utilité/la valeur de; verbe + comprendre : faire comprendre (nettement), ne pas oser comprendre, commencer/ne pas tarder à comprendre, refuser de comprendre, finir par comprendre; comprendre + prop. : comprendre qu'il s'agit de. PARAD. a) (Quasi-)synon. apercevoir, discerner, y être (j'y suis!), réaliser, remarquer, se représenter, saisir, voir. b) (Quasi-)anton. ignorer, laisser échapper, méconnaître.
Rem. gramm. (relative aux emplois II B 1, 2, 3). Comprendre que peut se construire avec l'ind. (s'il s'agit d'un jugement de fait) ou, plus fréquemment dans la lang. littér., le subjonctif (s'il s'agit d'un jugement de valeur). Vous comprenez que je ne suis pas la première venue (Bloy, La Femme pauvre, 1897, p. 116).
b) Appréhender quelqu'un ou quelque chose dans toute la vérité de sa nature profonde, par une communion affective, spirituelle. Comprendre qqn, qqc.
[Le compl. d'obj. désigne une pers., son tempérament, son comportement, etc.] Percevoir la vraie nature de telle personne par une disposition d'esprit très favorable, voire complice, en allant parfois jusqu'à reconnaître explicitement le bien-fondé de ses motivations particulières et même jusqu'à excuser ses travers avec une extrême indulgence. Comprendre profondément, comprendre l'Homme. Comprendre et approuver ce qu'est une existence vouée à la galanterie (Proust, À l'ombre des jeunes filles en fleurs,1918, p. 606):
13. Quel mystère que la pensée inconnue d'un être, la pensée cachée et libre, que nous ne pouvons ni connaître, ni conduire, ni dominer, ni vaincre! Et moi, j'ai beau vouloir me donner tout entier, ouvrir toutes les portes de mon âme, je ne parviens point à me livrer. Je garde au fond, tout au fond, ce lieu secret du moi où personne ne pénètre. Personne ne peut le découvrir, y entrer, parce que personne ne me ressemble, parce que personne ne comprend personne. Maupassant, Contes et nouvelles,t. 2, Solitude, 1884, p. 926.
14. ... je n'oublierai plus ce que je pense et ce que je sens, ce à quoi j'adhère, en épousant jusqu'à me perdre complètement le point de vue de chacun de ceux que j'étudie, ce point de vue, je l'épouserai tout autant pour le comprendre, et pour le comprendre sympathiquement; mais ceci fait, je ne m'interdirai plus de dégager dans chaque cas mon équation ou ma différence personnelle : ... Du Bos, Journal,1927, p. 243.
Absolument :
15. Je suis heureux. Et je vais vous confier le secret de mon bonheur. Il est simple. J'aime autrui. J'aime aimer. Je hais la haine. Je m'efforce de comprendre et d'admettre. Cocteau, Poésie critique 2,1960, p. 16.
SYNT. Comprendre + subst. : comprendre l'attitude, le caractère, l'esprit, les inquiétudes, les intentions, les motifs, la position, les scrupules, les sentiments, la situation de (telle pers.). Un brave homme qui comprendra ma situation et qui me tendra la main (Maupassant, Contes et nouvelles, t. 2, Une lettre, 1885, p. 584); comprendre son temps. Opiniâtre attachement au passé, qui le rendait incapable de comprendre son temps (Michelet, Hist. romaine, t. 2, 1831, p. 221); verbe + comprendre : devoir comprendre (vous devez me comprendre), être apte à comprendre/être capable, incapable de (tout) comprendre, falloir comprendre (il faut me comprendre), pouvoir comprendre (tu ne peux pas comprendre, etc.), savoir comprendre.
PARAD. (Quasi-)synon. a) se mettre à la place de, participer, saisir, sentir; b) disculper, excuser, justifier, pardonner.
En partic.
[Le compl. d'obj. désigne un artiste, son art] Vibrer de la même sensibilité, partager les mêmes goûts esthétiques, savoir apprécier. Le type tout fait de l'homme riche incapable de comprendre et d'aimer sincèrement les œuvres d'art (Larbaud, A. O. Barnabooth,1913, p. 127):
16. Il ne peut être question pour lui [le snob] d'acquérir les talents qu'il convoite; (...). C'est donc, dans la faculté d'apprécier, dans le goût, dans le jugement qu'il fait tenir le sentiment de sa valeur. Avec soin il évite les œuvres. Il a pour devise « comprendre c'est égaler » et tout bas ajoute « c'est surpasser ». Gaultier, Le Bovarysme,1902, p. 87.
SYNT. Comprendre l'art, le charme, le génie, l'harmonie, l'originalité de.
[Le compl. d'obj. désigne une entité plus ou moins personnifiée] Comprendre Dieu, la nature :
17. ... quelque chose de la vie des éléments émanant d'eux-mêmes, sans doute à l'attraction de nos regards, arrivait jusqu'à nous, et, s'y assimilant, faisait que nous les comprenions dans un rapport moins éloigné, que nous les sentions plus avant, grâce à cette union plus complexe. À force de nous en pénétrer, d'y entrer, nous devenions nature aussi, nous nous diffusions en elle, elle nous reprenait, nous sentions qu'elle gagnait sur nous et nous en avions une joie démesurée; nous aurions voulu nous y perdre, être pris par elle ou l'emporter en nous. Flaubert, Par les champs et par les grèves,1848, p. 256.
P. ext. [Le compl. d'obj. désigne une chose abstr.] Madame Dorval, qui eût très-bien compris et senti les idées générales, mais qui en repoussait vivement l'examen et la préoccupation (G. Sand, Histoire de ma vie,t. 4, 1855, p. 228).Faire immédiatement le point, comprendre vivement des objets nouveaux, situer d'un coup d'œil le cœur des circonstances (Mounier, Traité du caractère,1946, p. 627).
SYNT. Comprendre les choses (= avoir l'esprit large, se montrer tolérant). Demeure ouvert à toutes les raisons qu'on lui donne (...) comprend les choses (Mauriac, Journal du temps de l'occupation, 1944, p. 322); comprendre la plaisanterie (= l'accepter sans se formaliser et même la pratiquer volontiers). Tel qui ne comprend pas la plaisanterie a pris au tragique une expression jetée en passant (Jankélévitch, Le Je-ne-sais-quoi et le presque-rien, 1957, p. 160).
B.− Emplois pronom.
1. Emploi pronom. passif
a) Être appréhendé par l'intelligence dans toute sa signification. Pour m'expliquer n'importe quoi... tout ce qui peut se comprendre et se résoudre, et s'assimiler (Céline, Mort à crédit,1936, p. 424).
b) Être saisi par l'intuition dans toute la vérité de sa nature; être approuvé dans le bien-fondé de ses motivations particulières. Cela se comprend. Cet acte se comprend (Lautréamont, Les Chants de Maldoror,1869, p. 151).
2. Emploi pronom. réfléchi
a) Se représenter nettement la signification de ses propres paroles (même si elle reste obscure pour autrui). Fam. Je me comprends (Colette, Claudine à Paris,1901, p. 225).
b) Se saisir intuitivement dans toute la vérité de sa nature profonde :
18. Je vais essayer de tracer à la hâte quelques lignes moins incohérentes que celles que tu viens de lire, je voudrais que tu me comprisses et je ne me comprends pas moi-même. Va, mon Adèle, je suis bien malheureux. Au milieu du tumulte de mes sentiments, je ne puis distinguer qu'une chose, c'est une passion insurmontable. Hugo, Lettres à la fiancée,1820, p. 13.
Rem. On rencontre parfois la construction se comprendre + adj. qualificatif, employée pour comprendre que l'on est caractérisé par telle qualité. Elle se comprenait bien coupable (Karr, Sous les tilleuls, 1832, p. 300). Elle se comprit belle (Sainte-Beuve, Portraits de femmes, 1844, p. 503).
3. Emploi pronom. réciproque
a) Se représenter nettement le sens de ce que l'on se dit l'un à l'autre. Ils ne se comprenaient qu'assez difficilement les uns les autres, parce qu'ils ne parlaient pas tout à fait le même patois (Ramuz, Derborence,1934, p. 105).
b) Se saisir intuitivement l'un l'autre jusqu'au fin fond de l'être, s'approuver mutuellement avec une indulgente sympathie. Deux cœurs faits pour se comprendre. Nous nous sommes de suite entendues et comprises et aimées (E. de Guérin, Lettres,1839, p. 339).Quand on vit ensemble, il faut s'aider, se comprendre (...) se faire des concessions mutuelles et savoir fermer les yeux (G. Duhamel, Chronique des Pasquier,Le Jardin des bêtes sauvages, 1934, p. 220).
PARAD. a) (Quasi-)synon. s'accorder, s'harmoniser, sympathiser. b) (Quasi-)anton. se heurter, s'opposer.
Prononc. et Orth. : [kɔ ̃pʀ ɑ ̃:dʀ ̥], (je) comprends [kɔ ̃pʀ ɑ ̃]. Enq. : /kõprã/ (il) comprend. Ds Ac. 1694-1932. Cf. prendre. Étymol. et Hist. 1. Ca 1120 « saisir, prendre » (Psautier d'Oxford, éd. Fr. Michel, 58, 13 : e seient cumpris en la lur superbe [et comprehendantur in superbia sua]) − 1604 ds Gdf.; 2. fin xiie-début xiiies. « concevoir, saisir par l'intelligence » (S. Gregoire, Sermo de Sapientia, éd. Foerster, 286, 3), rare av. le xves. (ca 1450 Mistère Viel Testament, éd. J. de Rothschild, t. 1, p. 210); 3. fin xiies. « inclure, contenir en soi, englober » (Clemence Barking, Vie Ste Catherine, 1164 ds T.-L.). Empr. au lat. class. compre(he)ndere (composé de cum « avec » et prehendere « prendre, saisir ») littéralement « saisir ensemble, embrasser quelque chose, entourer quelque chose » d'où « saisir par l'intelligence, embrasser par la pensée ». Fréq. abs. littér. : 29 948. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 25 445, b) 40 041; xxes. : a) 48 196, b) 55 191.
DÉR.
Compreneur, subst.,rare. Personne qui comprend, qui est capable de comprendre. Mon livret politique (...) n'aura ni ne doit avoir de lecteurs et de compreneurs à présent (Lamartine, Correspondance,1831, p. 216). 1resattest. 1495 « celui qui comprend » (Miroir hist., Maz. 557, fo22a ds Gdf.), attest. isolée; à nouv. 1831 (Lamartine, loc. cit.); du rad. de comprendre, suff. -eur2*. Fréq. abs. littér. : 1.
BBG. − Darm. Vie 1932, p. 53, 136.

Wiktionnaire

Verbe - français

comprendre \kɔ̃.pʁɑ̃dʁ\ transitif 3e groupe (voir la conjugaison) (pronominal : se comprendre)

  1. Contenir en soi.
    • L’univers comprend tout ce qui est.
    • Les pays compris entre la Loire et la Seine.
    • L’enseignement de la philosophie comprend celui de la logique, de la morale, de la psychologie et de la métaphysique.
  2. Faire entrer dans un ensemble.
    • Il a tant de revenu, sans y comprendre ce que sa place lui donne.
    • Dans ce tableau de la population, on n’a pas compris les étrangers.
    • Comprendre plusieurs choses sous une même dénomination.
  3. (Figuré) Embrasser ou saisir par l’intelligence.
    • La faculté de comprendre ou l’impossibilité de comprendre, dit fort judicieusement M. Mill, ne peut, dans aucun cas, être considérée comme un critérium de Vérité axiomatique. — (Edgar Poe, Eureka, 1848, traduction de Charles Baudelaire, 1864)
    • On comprenait alors pourquoi les commerces de chapeaux et de chaussures existent en aussi grand nombre dans cette artère grouillante et relativement courte. — (Francis Carco, L’Homme de minuit, Éditions Albin Michel, Paris, 1938)
    • La victime, face contre terre, était coincée dans la ruelle du lit, fesses en l’air. Pas besoin d’être diplômé de la faculté Xavier-Bichat pour comprendre qu’il était raide mort. — (Patrick de Funès, médecin malgré moi, 2008)
  4. (En particulier) Saisir le sens d’un mot, d’une langue, etc.
    • Bien qu’il n’eût pu comprendre un seul mot de ce qui avait été dit, Bert éprouva un choc en remarquant le ton qu’avait pris l’homme. — (H. G. Wells, La Guerre dans les airs, 1908, traduction d’Henry-D. Davray et B. Kozakiewicz, Mercure de France, Paris, 1910, page 247 de l’édition de 1921)
  5. Concevoir ou se faire une juste idée de quelque chose.
    • Moi, c’était assis, et la môme à genoux, à mes pieds. Tu m’as compris ! — (Robert Merle, Week-end à Zuydcoote, 1949, réédition Le Livre de Poche, page 20)
    • 4 avril 1871. Ils n’ont encore rien compris. De toute façon les vaincus, ça n'a pas besoin de comprendre. Ça doit accepter. — (Jean-Pierre Brésillon, Le père Leuleu Troglodyte, Avallon : éd. de Civry, 1981, page 11)
    • J'aimerais que vous sacrifiiez un haut-parleur, et donc les quelques euros qu'il vous aura coûté. De toute façon, ce sacrifice ne sera pas inutile, car pour comprendre comment fonctionne un composant, rien de mieux que de le démonter. — (Charles Platt, L'électronique en pratique: 36 expériences ludiques, Éditions Eyrolles, 2013, page 242)
    • Angie avait bien vite compris les raisons de cette attitude : Petrina ne supportait pas que sa propre enfant lui volât la vedette en société et entendait bien rester le centre d'intérêt de tous... — (Lynne Graham , Un réveillon chez les Demetrios, traduit de l'anglais (Irlande du Nord), éd. Harlequin, 2014)
    • Ils comprirent que le moment était venu.
    • Comprenez-vous un tel langage ?
    • Je ne comprends pas qu’on puisse être fâché de cela. Dans ce sens, on emploie souvent Ne rien comprendre à.
    • Je ne comprends rien à ce que vous dites.
  6. Bien saisir les explications, les ordres qu’il donne, la langue qu’il parle, etc., en parlant de quelqu’un.
    • Après le plaisir d’être apprécié par les gens intelligents, il n’y en a pas de plus grand que celui de n’être pas compris par les brouillons qui ne savent exprimer qu’en charabia ce qui leur tient lieu de pensée ; […]. — (Georges Sorel, Lettre à Daniel Halévy, 15 juillet 1907, dans Réflexions sur la violence, 1908)
    • Contrairement à des accusations plus ou moins calomniatrices, leurs dépositions au cours du procès doivent être comprises comme des déclarations minimales et non comme des exagérations ; […]. — (Jean Wirth, La jeune fille et la mort, Librairie Droz, 1979, page 140)
    • Il faut que vous ne m’ayez pas compris, que vous m’ayez mal compris.
  7. Croire à tort, se méprendre.
    • "J’avais commencé un petit saint Georges pour Mme de Gabry, un tout petit saint Georges avec une cuirasse dorée. Mais les petites filles ont compris que c’était une poupée, elles ont joué avec et l’ont mis en pièces. » — (Anatole France, Le crime de Sylvestre Bonnard, Calmann-Lévy ; réédition Le Livre de Poche, 1967, page 154)
  8. (Pronominal) Se dit de deux personnes qui ont une grande connaissance l’une de l’autre, avec une nuance de sympathie, d’intimité.
    • Quoique leurs goûts fussent différents, ces deux amis se comprenaient à merveille.
    • Deux cœurs faits pour se comprendre.
  9. (Pronominal) Être compréhensible, imaginable ou concevable.
    • Que les feuilles de tolérance tirant à quelques milliers d’exemplaires hurlent et mentent pour forcer leur tirage, cela se comprend, cela ne fait d’ailleurs qu’un mal restreint. — (Émile Zola, Lettre à la France)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

COMPRENDRE. (Il se conjugue comme PRENDRE.) v. tr.
Contenir en soi. L'univers comprend tout ce qui est. L'Europe comprend plusieurs grands États. Cette famille de plantes comprend un grand nombre de genres. Les pays compris entre la Loire et la Seine. L'enseignement de la philosophie comprend celui de la logique, de la morale, de la psychologie et de la métaphysique. Il signifie aussi Faire entrer dans un ensemble. Il a compris dans sa quittance tout ce qui lui était dû. Il a tant de revenu, sans y comprendre ce que sa place lui donne. Dans le dénombrement de ses dettes, je n'entends pas comprendre celles qu'il a faites depuis un an, je comprends seulement les plus anciennes. Dans ce tableau de la population, on n'a pas compris les étrangers. Comprendre plusieurs choses sous une même dénomination. Il signifie aussi figurément Embrasser, saisir par l'intelligence. Je comprends fort bien ce que vous me dites. Cela est difficile à comprendre. Cela se comprend. Il ne comprend rien de ce qu'on lui dit. Tout ce que j'ai pu comprendre, c'est que... Cette maxime n'a pas été comprise, a été mal comprise. Absolument, Comprenez-vous? Je commence à comprendre. Je vois qu'il n'a pas compris. Il se dit, dans un sens particulier, de l'Intelligence des langues, des mots, etc. Comprenez-vous l'anglais? Il comprend cette langue, mais il ne sait pas encore la parler. Je ne comprends pas ces deux mots. Ce passage est très difficile à comprendre. Il signifie également Concevoir, se faire une juste idée de quelque chose. Les méchants ne peuvent comprendre la vertu. Il sut comprendre ses devoirs. Je compris alors toute la grandeur du péril. Comprenez-vous tout ce qu'il faut de prudence et d'habileté pour réussir dans une telle entreprise? Vous ne comprenez pas la difficulté de l'affaire. Pour bien vous faire comprendre l'état de la question. Ils comprirent que le moment était venu. Il signifie encore Se rendre raison d'une chose, en découvrir le motif. Je ne comprends pas sa conduite. Comprenez-vous un tel langage? Je ne comprends pas comment il peut faire, comment il ose se montrer. Vous comprenez que cela doit m'inquiéter. Je ne comprends pas qu'on puisse être fâché de cela. Dans ce sens, on emploie souvent Ne rien comprendre à ou interrogativement Comprendre à. Je ne comprends rien à sa conduite. Je ne comprends rien à ce langage. Je ne comprends rien à ce que vous dites. Comprenez-vous quelque chose à tout cela? Comprendre quelqu'un, Bien saisir les explications, les ordres qu'il donne, la langue qu'il parle, etc. Il faut que vous ne m'ayez pas compris, que vous m'ayez mal compris. Je ne vous comprends pas. Expliquez-vous plus clairement, si vous voulez qu'on vous comprenne. Cet étranger a beaucoup de peine à se faire comprendre. Il ne se comprend pas lui-même. Il signifie aussi Se rendre raison de la conduite, des discours de quelqu'un. C'est un homme difficile à comprendre. Il tient une conduite si bizarre et si contraire à ses intérêts, que je ne le comprends pas. Comprenez-vous cette femme, avec ses caprices? Il se dit, dans le même sens, mais avec une nuance de sympathie, d'intimité, de la Connaissance que deux personnes ont l'une de l'autre. Quoique leurs goûts fussent différents, ces deux amis se comprenaient à merveille. Deux cœurs faits pour se comprendre. Y compris, En y comprenant ; et Non compris, Sans y comprendre. Il a dix mille francs de revenu, y compris les profits de sa place, non compris la maison où il loge. Depuis tel article du code jusques et y compris tel autre. On dit également, en faisant accorder, Les indications y comprises. La maison où il loge non comprise.

Littré (1872-1877)

COMPRENDRE (kon-pran-dr'), je comprends, nous comprenons ; je comprenais ; je compris ; je comprendrai ; comprends ; que je comprenne ; que je comprisse ; comprenant ; compris v. a.
  • 1Prendre en soi, contenir. Il a compris dans son parc plusieurs pièces de vignes. Quand on dit : jusqu'à tel jour inclusivement, le jour est compris dans le terme. Une maxime qui comprend toutes les autres, Pascal, Prov. 14. La Rancune eut assez de crédit pour nous faire comprendre dans son passe-port, en qualité de comédiens, Scarron, Rom. com. I, 18. C'est comprendre dans sa pensée tout ce qu'il y a de grand parmi les hommes, Bossuet, Hist. préf. Ce temps [de la mort] embrasse tous les temps : Qu'on le partage en jours, en heures, en moments, Il n'en est point qu'il ne comprenne Dans le fatal tribut ; tous sont de son domaine, La Fontaine, Fabl. VIII, 1. La basse Égypte, qui comprenait ce que les Grecs appellent Delta, Rollin, Hist. anc. Œuvres, t. I, p. 11, dans POUGENS. Tout cela pourquoi ? parce que le christianisme veut tout cela, comprend tout cela, Bourdaloue, 2e dimanche après Pâques, Dominic.
  • 2Mettre ensemble dans la même catégorie. Vous traitez ces personnes d'hérétiques pour me comprendre dans cette accusation. On a fait comprendre dans l'inventaire plusieurs meubles qui n'appartenaient pas au défunt. Il a été compris dans la capitulation.
  • 3 Fig. Saisir par l'esprit. Je comprends fort bien ce que vous me dites. La plupart des hommes estiment ce qu'ils ne comprennent pas. Mon exemple vous doit apprendre qu'il y a des choses très excellentes et très admirables qui échappent à notre vue et qui n'en sont ni moins vraies ni moins désirables, quoiqu'on ne les puisse ni comprendre ni imaginer, Bossuet, Anne de Gonz. Je comprends fort aisément qu'il est naturel à de tels esprits de tomber dans l'indifférence [religieuse], et de faire servir Dieu à la religion et à la politique, c'est-à-dire à l'ordre et à la décoration de ce monde, la seule chose, selon eux, qui mérite que l'on y pense, La Bruyère, XVI. Si c'est là sa largeur [du globe solaire] en tous sens, quelle peut être toute sa superficie ! quelle est sa solidité ! comprenez-vous bien cette étendue, et qu'un million de terres comme la nôtre ne seraient toutes ensemble pas plus grosses que le soleil ? La Bruyère, ib. Si je vous comprenais, mon Dieu, vous ne seriez plus ce que vous êtes, ou je ne serais plus ce que je suis, Bourdaloue, Myst. Trinité. Vous en comprenez la raison, mes chers auditeurs ; et, si vous ne la comprenez pas bien encore, je ne puis trop vous le redire, afin que vous puissiez une fois la concevoir, Bourdaloue, 2e dim. après Pâques, Dominic. Ce que l'esprit comprend, il le comprend par assimilation, ou par comparaison, ou par analogie, Diderot, Opin. des anc. philos. Stoïcisme. Tenez-moi lieu d'un Dieu que je ne comprends pas, Voltaire, Fanat. IV, 3. Si nous ne comprenons pas certaines choses un peu délicates, c'est apparemment qu'il n'était pas nécessaire que nous les comprissions, Voltaire, Lett. d'Argenson, 6 nov. 1770.

    Absolument. Plus heureux que tu ne peux comprendre, Racine, Bérén. II, 2.

    Plus particulièrement. Avoir l'intelligence d'une langue, des mots. Comprenez-vous l'anglais ? Voilà un mot que je ne comprends pas. Passage difficile à comprendre.

    Faire comprendre, montrer, prouver, faire que l'on comprenne. Je n'ai point dit ceci pour diminuer rien de la distance infinie qu'il y a entre les vices et les vertus : à Dieu ne plaise ! j'ai seulement voulu faire comprendre que tous les vices politiques ne sont pas des vices moraux, et que tous les vices moraux ne sont pas des vices politiques, Montesquieu, Esp. XIX, 10.

  • 4Se rendre raison d'une chose, se l'expliquer. Je ne comprends pas sa conduite. Comprenez-vous un tel langage ? Vous comprenez que cela doit m'inquiéter. Témoin de mes erreurs, vous n'avez pu comprendre Comment j'abandonnai l'amante la plus tendre, Gresset, Sidnei, II, 6.

    Comprendre à. Je ne comprends rien à sa conduite. À cela que comprenez-vous ? je n'y comprends pas grand'chose.

    Absolument. Tu comprends ? J'ai compris. Oh ! je commence à comprendre : le comte s'en va, le notaire reste, et vous vous mariez, Marivaux, Seconde surprise de l'amour, III, sc. dern.

  • 5Comprendre quelqu'un, comprendre ce qu'il dit, ce qu'il veut, ce qu'il ordonne. Vous ne m'avez pas compris. Cet étranger ne se fait guère comprendre. Parlez plus clairement, nous ne vous comprenons pas. Quoi ! l'art qui nourrit les hommes est méprisé en Europe ! je ne vous comprends pas, Bernardin de Saint-Pierre, Paul et Virg.

    Comprendre quelqu'un, pénétrer dans les idées, dans les vues de quelqu'un. Je ne le comprends plus. On ne le comprend pas avec ses prétentions exorbitantes.

  • 6Se comprendre, avoir la connaissance l'un de l'autre. Les hommes ne se comprennent pas les uns les autres. Des cœurs faits pour se comprendre. Bien que les goûts d'Oswald fussent, à quelques égards, différents de ceux de Corinne, ils se comprenaient mutuellement d'une façon merveilleuse, Staël, Corinne, IV, 1.

    Être compris. Cela se comprend.

    Avoir la connaissance de soi-même. Cet homme ne se comprend pas lui-même.

HISTORIQUE

XIIe s. Parsevet [que poursuive] li enemis la meie aneme [âme], e comprenget et defult en terre la meie vie, Liberpsalm. p. 6. Es ovres de ses mains compris est li peccherre, ib. p. 9. Je parsiwerai mes enemis, e cumprendrai les [je les saisirai], e ne returnerai desque il defisent, ib. p. 21.

XIIIe s. Biaus mestiers est, quant il content lor fet, que il comprengnent lor fet au mains [moins] de paroles qu'il porront, Beaumanoir, V, 11.

XIVe s. Se nous avions un non qui compresist toutes teles choses, Oresme, Eth. 144. Tele amisté est permanente et durable, car elle comprent en soi toutes les choses qui appartienent et conviennent à amis, Oresme, ib. 235. Ceste science comprend et contient les fins de toutes les aultres ars et doctrines, Oresme, ib. 111.

XVe s. Et se logea le dit duc devant Tournay, et comprenoit son ost grande quantité de terre, Froissart, I, I, 127. Et fut la cité [de Tournay] partie pour loger les seigneurs le roi à St Martin, et comprenoient ses gens un quart de la ville, Froissart, II, II, 203. Fortune ainsy des compaignons s'esbat, Qui au delit de la char les comprent, Puis les destruit con [comme] la souris le chat, Deschamps, Poésies mss, f° 208, dans LACURNE.

XVIe s. Celuy qui a bien compris que la mort n'est pas mal, Montaigne, I, 77. Qui se peult plaindre d'estre comprins où touts sont comprins ? Montaigne, I, 87. Il banda son ame à comprendre l'essence de la folie, Montaigne, I, 91. Et cas advenant qu'aucun compris en ceste presente association reçoive outrage ou violence, Condé, Mém. p. 647.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

COMPRENDRE. Ajoutez :
7Comprendre quelqu'un, entrer dans ses pensées et dans ses sentiments. Au nom de Dieu, monsieur, aidez-moi de vos lumières, vous l'avez connu [M. de Lamoignon qui venait de mourir] et vous l'avez compris, Bussy-Rabutin, Lettre au P. Rapin, 12 déc. 1677, citée par M. Regnier, SÉV., t. V, p. 405.
8Se comprendre, avoir l'intelligence de soi-même. Vaincue, elle [notre âme] ne peut se rendre, Et ne saurait ni se comprendre, Ni consentir à s'ignorer, Lamotte, Odes, l'Homme.
9Se comprendre, comprendre exactement ce que l'on veut dire et ce que l'on dit.

HISTORIQUE

XIIe s. Ajoutez : [comprendre au sens de saisir par la pensée, intelligere] La pense [pensée] ki… soi travailhet, anz ke [avant que] ele alcune chose en [de Dieu] puist compenre, Job, p. 473.

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Encyclopédie, 1re édition (1751)

* COMPRENDRE, v. act. terme de Philosophie, c’est appercevoir la liaison des idées dans un jugement, ou la liaison des propositions dans un raisonnement. Ainsi cet acte de l’entendement doit précéder l’affirmation ou la négation. Ce que l’on comprend peut être vrai ou faux ; s’il est vrai, on en convient ; s’il est faux, on le nie. Voyez Juger, Raisonner. Il a, en Théologie, une autre acception relative à l’étendue de nos facultés ; ainsi comprendre Dieu, c’est connoître de cet être infini tout ce qui en peut être connu par une créature finie dans ce monde & dans l’autre.

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Étymologie de « comprendre »

Picard, copendre ; bourguig. comprare ; provenç. comprendre, compenre, comprener ; catal. compendrer ; espagn. comprender ; portug. comprehender ; ital. comprendere ; du latin comprendere, syncopé lui-même de comprehendere, de cum, avec, et prehendere, prendre (voy. PRENDRE). Le provençal, le français et l'italien sont les seuls qui aient été fidèles à la conjugaison latine.

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Du latin comprehendere, dérivé de prehendere (« saisir »), avec le préfixe cum- (« avec »).
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Phonétique du mot « comprendre »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
comprendre kɔ̃prɑ̃dr

Fréquence d'apparition du mot « comprendre » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « comprendre »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « comprendre »

  • C'est surtout ce qu'on ne comprend pas qu'on explique.
    Jules Amédée Barbey d'Aurevilly — L'Ensorcelée
  • Comprendre c'est compliquer. C'est enrichir en profondeur. C'est élargir de proche en proche. C'est mêler à la vie.
    Lucien Febvre — Combats pour l'histoire, Armand Colin
  • Le but de la science est de prévoir et non, comme on l'a dit souvent, de comprendre.
    Pierre Lecomte du Noüy — L'Homme et sa destinée, La Colombe
  • La jeunesse a cela de beau qu'elle peut admirer sans comprendre.
    Anatole François Thibault, dit Anatole France — La Vie littéraire, Calmann-Lévy
  • Il faut affirmer si nous voulons comprendre, et nous donner si nous voulons sentir.
    Jean-Paul Sartre — Situations II, Gallimard
  • À qui sait comprendre, peu de mots suffisent.
    Anonyme — le Rouge et le Noir de Stendhal
  • C'est embêtant, dit Dieu. Quand il n'y aura plus ces Français, Il y a des choses que je fais, il n'y aura plus personne pour les comprendre.
    Charles Péguy — Le Mystère des saints Innocents, Gallimard
  • Il faut souffrir pour comprendre la souffrance.
    Albertine Hallé — La vallée des blés d'or
  • Le privilège de l'Anglais est de ne comprendre aucune autre langue que la sienne. Et même s'il comprend, il ne doit en aucun cas s'abaisser à le laisser croire.
    Pierre Daninos — Les Carnets du major W. Marmaduke Thompson, Hachette
  • Juger est quelquefois un plaisir, comprendre en est toujours un.
    Henri de Régnier
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Images d'illustration du mot « comprendre »

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Traductions du mot « comprendre »

Langue Traduction
Anglais understand
Espagnol entender
Italien comprendere
Allemand verstehen
Chinois 理解
Arabe تفهم
Portugais compreendo
Russe понять
Japonais 理解する
Basque ulertu
Corse capisce
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Synonymes de « comprendre »

Source : synonymes de comprendre sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « comprendre »

Combien de points fait le mot comprendre au Scrabble ?

Nombre de points du mot comprendre au scrabble : 17 points

Comprendre

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