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Entendre

Définitions de « entendre »

Trésor de la Langue Française informatisé

ENTENDRE, verbe trans.

I.− Domaine de l'audition
A.− [Le suj. a une attitude passive, son oreille est frappée par un son ou un bruit perceptible dans son aspect purement physique ou dont on ne retient que l'aspect physique] Percevoir par l'oreille.
1. [Le compl. d'obj. est un subst.]
a) [L'objet de la perception est un bruit dont on identifie plus ou moins bien l'orig., la nature]
α) [L'obj. désigne le bruit directement, souvent en le spécifiant] Entendre un cri; entendre un bruit (de), n'entendre aucun bruit. Le tiers-point et la lime sonnent, et on entend aussi le cliquetis des anneaux bruts d'aluminium (Barbusse, Feu,1916, p. 191).Bientôt je commençai à entendre sa respiration égale (Proust, Prisonn.,1922, p. 360).Sans doute, en entendant des pas, l'homme suivant mon conseil s'était réfugié dans les granges (Bosco, Mas Théot.,1945, p. 238).
β) [L'obj. désigne le bruit indirectement par la source de ce bruit (personne, animal, élément naturel, instrument, arme, machine, etc.)] Entendre le rossignol, les grillons, le tonnerre, le cor, la cloche. J'entendais les grives dans le lierre du peuplier carolin (Mauriac, Nœud vip.,1932, p. 19).Elle n'était descendue qu'en entendant la voiture (Sagan, Bonjour tristesse,1954, p. 28).
SYNT. Entendre les battements de son cœur, un râle, une toux; entendre des aboiements, un bourdonnement, des clameurs, des sanglots, des craquements, un grincement, un piétinement, un sifflement, le ronron (d'une voix), le tic-tac (d'une montre); pénible à entendre; empêcher d'entendre; entendre à peine, confusément, faiblement, vaguement, clairement, distinctement, nettement, parfaitement.
Emploi pronom. à sens passif :
1. Ainsi secoué par elle, le vieil instrument, dont les cordes frisaient, s'entendait jusqu'au bout du village si la fenêtre était ouverte, ... Flaubert, Madame Bovary,t. 1, 1857, p. 46.
Se faire entendre. (Quasi-)synon. de être entendu (mais plus expressif, avec insistance sur l'effort ou sur l'événement qui se produit).Enfin, un mouvement de pas se fit entendre en dehors du cachot (Hugo, Han d'Isl.,1823, p. 546).Mais vient un moment où un chant trop uniforme ne se fait plus entendre et où il faut un cri pour attirer l'attention (Mounier, Traité caract.,1946, p. 732).
Expressions
Faire entendre un son (un cri, un rire). Faire en sorte qu'on l'entende. (Quasi-)synon. émettre.Augustin fit entendre ce léger hum! nasal qui ressemble à un petit rire triste (Malègue, Augustin,t 2, 1933, p. 254).
Entendre qqc. de ses (propres) oreilles (pour souligner l'authenticité d'un témoignage). Je ne fais que raconter en témoin ce que j'ai vu de mes yeux et entendu de mes oreilles (Tocqueville, Corresp.[avec Henry Reeve], 1851, p. 122):
2. En ce moment-là, ô prodige! j'ai entendu, mais entendu de mes propres oreilles, ce qui s'appelle entendu, un vague frémissement métallique, le son faible et à peine distinct d'une cloche, ... Hugo, Le Rhin,1842, p. 131.
Proverbe. Qui n'entend qu'une cloche n'entend (ou n'a) qu'un son. Une opinion qui ne se fonde que sur une seule version des faits est sujette à caution :
3. Il paraît que ce grabuge a été causé précisément par votre bonhomme de musicien, qui a voulu déshonorer, par vengeance, la famille du président. Qui n'entend qu'une cloche n'a qu'un son... Votre malade se dit innocent, mais le monde le regarde comme un monstre... Balzac, Le Cousin Pons,1847, p. 183.
b) [L'objet de la perception est la parole hum.]
α) [L'obj. désigne une pers.] Mais entrez donc, on nous entend de tout l'escalier (Verlaine, Œuvres compl., t. 4, L. Leclercq, 1886, p. 151).Oui, docteur... Allo, docteur, je ne vous entends pas bien (Simenon, Vac. Maigret,1948, p. 164).
Emploi pronom. réfl. :
4. Il est rare que l'on reconnaisse sa propre voix, voyez-vous, lorsqu'on l'entend pour la première fois. − Le phono déforme? − Ce n'est pas cela, car chacun reconnaît sans peine la voix des autres. Mais on n'a pas l'habitude, voyez-vous, de s'entendre soi-même... Malraux, La Condition humaine,1933, p. 190.
Expression
[Avec une idée d'agacement] On ne s'entend pas/plus. ,,Le bruit empêche ceux qui veulent converser d'entendre mutuellement leurs paroles`` (Ac. 1835-1932). Avec le vacarme de la rue, on ne s'entend plus (Gide, Faux-monn.,1925, p. 1060).
On n'entend que (qqn). C'est toujours la même personne (dans un groupe) qui parle. À jeun, je parle. À jeun on n'entend que moi (Giraudoux, Électre,1937, I, 4, p. 78).
Il faut l'entendre :
5. ... à présent, elle tremblait, car son affaire était claire, si on la pinçait encore. Il fallait l'entendre. Les agents, pour avoir des gratifications, arrêtaient le plus de femmes possible; ... Zola, Nana,1880, p. 1314.
[Avec une idée de réprobation, parfois iron.] Si (qqn) vous entendait. − Voulez-vous vous taire? Si ma femme vous entendait! (Proust, Sodome,1922, p. 922).
β) [L'obj. désigne ce qui est dit] Entendre une conversation, un mot, une question, une réponse; n'avoir jamais rien entendu de pareil, d'aussi drôle. Leurs yeux sont morts et leurs lèvres sont molles, Et l'on entend à peine leurs paroles (Verlaine, Œuvres compl.,t. 1, Fêtes gal., 1869, p. 97).« Assassin!... Assassin! » qu'elle m'a appelé (...). La fille en entendant ça elle avait comme peur que je la bute sur place sa mère (Céline, Voyage,1932, p. 560).
Expressions
[Avec une idée d'authenticité] Entendre qqc. de la bouche de qqn. Beaucoup de gens allèrent se faire inscrire chez Mmede Villefort afin d'avoir le droit de renouveler leur visite en temps utile et d'entendre alors de sa bouche tous les détails de cette pittoresque aventure (Dumas père, Monte-Cristo,t. 1, 1846, p. 702).
[Avec une idée de divulgation large, mais indéterminée] Dire à qui veut l'entendre. Je disais aussi, à qui voulait l'entendre, mon regret qu'il ne fût plus possible d'opérer comme un propriétaire russe dont j'admirais le caractère (Camus, Chute,1956, p. 1520).
[Dans des énoncés de la lang. parlée, souvent fam.]
En entendre. Essuyer des reproches. Il eût fait beau voir qu'un camarade invoquât l'amour pour s'excuser d'un retard dans le service, il en eût entendu (Vailland, Drôle de jeu,1945, p. 242).
En entendre de vertes et de pas mûres, en entendre de raides (p. ell. de histoires). Les quatre messieurs avaient fini par verser du vin fin à une demi-douzaine de ménages, rêvant de les griser, pour en entendre de raides (Zola, Nana,1880, p. 1303).
En entendre (bien) d'autres (p. ell. de choses). Parlez-moi comme on parle à un mur (...). D'ailleurs, j'en ai entendu bien d'autres! (Bernanos, Joie,1929, p. 641).
Ce qu'il faut entendre! Qu'est-ce qu'il faut pas entendre! Cf. Queneau, Zazie, 1959, p. 117.
Il vaut mieux entendre ça que d'être sourd! (p. iron. pour marquer son désaccord avec ce qui vient d'être dit). Et le gaullisme peut être un régime anticapitaliste si des hommes de gauche en prennent les commandes. − Il faut mieux entendre ça que d'être sourd, dit Henri; mais c'est tout juste! (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 459).
2. [Le compl. d'obj. est une forme verbale ou un syntagme verbal]
a) [Le suj., agent du procès (différent de celui d'entendre), n'est pas exprimé] En m'entendant annoncer, elle se leva par un mouvement brusque (Balzac, Gobseck,1830, p. 424).J'ai entendu remuer dans les broussailles, et il m'a semblé que c'était un pas de biche (Musset, On ne badine pas,1834, II, 5, p. 37).
Entendre dire qqc. Tout à l'heure j'ai entendu dire que les pêcheurs venaient de ramasser dans l'eau une jeune fille (Claudel, Soulier,1929, 4ejournée, 11, p. 927).Ce qu'il faut entendre dire! et par une jeune personne qui dit au premier venu qu'il est beau! (Giraudoux, Apollon,1942, 5, p. 58).
Entendre parler de qqn, de qqc. Avoir des nouvelles de quelqu'un, être informé de quelque chose. Je serais venu sûrement, si j'avais entendu parler d'un crime dans le quartier (Romains, Hommes bonne vol.,1932, p. 134).Vous n'entendriez plus parler de moi, si vous le désiriez (Montherl., J. filles,1936, p. 1001).
Ne pas vouloir en entendre parler. Rejeter quelque chose sans même l'examiner. Cette visite m'effraye (...). Tu m'as dit que ta mère ne voulait pas en entendre parler. Une minute après, elle se décide (Cocteau, Par. terr.,1938, II, 1, p. 236).
b) [Le suj., agent du procès, est exprimé]
α) [Dans une prop. rel.] Je l'entendis qui parlait longuement à son cheval (Bosco, Mas Théot.,1945, p. 168):
6. On n'entend aucun ruisseau, aucune chute; on n'entend que le vent qui souffle là rude et violent, ... Pesquidoux, Le Livre de raison,1925, p. 178.
β) [Dans une constr. part.] Rare. Ne t'ai-je pas entendu causant avec Lisbeth du baron Montès (Balzac, Cous. Bette,1846, p. 361).
γ) [Dans une constr. inf.]
[Le suj. précède l'inf.] On n'entendait que la pluie tomber sur le pavé (Flaub., 1reÉduc. sent.,1845, p. 233).Quand il entendait son fils chanter dans la maison, il lui semblait que la maison volait par les airs (Montherl., J. Filles,1936, p. 989).
Expressions
Ne pas entendre Dieu tonner (pour souligner que quelqu'un est sourd ou que le bruit environnant est assourdissant). Faisant un vacarme à ne pas entendre Dieu tonner (Mérimée, Carmen,1847, p. 32).
Entendre qqn venir avec ses gros sabots. Au fig. (pour souligner que les intentions de quelqu'un sont trop claires) :
7. Dès lors Mathilde avait été en alerte : Félicité n'avait jamais su cacher son jeu, et sa belle-fille se flattait de « l'entendre toujours venir de loin avec ses gros sabots. » Mauriac, Génitrix,1923, p. 367.
[Le subst. suit l'inf.] Je me mis au travail, sans répondre; et bientôt on entendit craquer la paille, et grincer le rouleau sur son essieu de fer (Bosco, Mas Théot.,1945, p. 163).
Expr. Entendre voler une mouche (au cond., pour souligner le silence régnant dans un lieu). Si profond était le recueillement de la foule immobile sur les gradins, qu'on eût entendu voler une mouche dans l'enceinte (Cladel, Ompdrailles,1879, p. 136).
Rem. 1. Quand l'inf. qui suit entendre est un verbe d'affirmation l'agent du procès qu'il exprime peut être construit soit directement entendre qqn dire qqc., l'entendre dire qqc., soit indirectement entendre dire à qqn qqc., lui entendre dire qqc., la constr. indir. présentant un caractère plus recherché. J'ai entendu dire la même chose au roi, il y a seize ans (Vigny, Journ. poète, 1846, p. 1243). Cf. aussi dire ex. 1. 2. Comme le souligne Littré, la constr. j'ai entendu dire à qqn, je lui ai entendu dire est amphibologique, car elle peut signifier aussi bien j'ai entendu qu'il disait que j'ai entendu qu'on lui disait. Ainsi dans l'ex. de Vigny (supra) seul le cont. permet de déterminer qu'il s'agit d'une phrase prononcée par le roi et l'ambiguïté de la phrase : je m'entendis répondre : − oui ... (Daniel-Rops, Mort, 1934, p. 364) n'est levée qu'à l'aide du cont. qui fait apparaître que le suj. de répondre est le même que celui d'entendis.
δ) [Dans une prop. complétive (+ ind. ou cond.)]
[L'obj. de la perception est un bruit] Le silence de la seule voix qui importât pour eux, les détournait d'entendre que le reste du monde les acclamait (Mauriac, Journal 1,1934, p. 6).
[Le compl. d'obj. désigne ce qu'on apprend par ouï-dire] Ayant entendu des médecins qu'un air salubre exercerait une action bienfaisante sur sa santé (D'Esparbès, Chevauchée Gd S.,1937, p. 11).
ε) [Le compl. d'obj. désigne ce qu'on apprend par ouï-dire : Par un énoncé en discours dir. (p. ell. de ces mots ou du verbe dire)]. De temps en temps, on entendait : « passez-moi le sel. » (Renard, Journal,1895, p. 259):
8. Et tout à coup je faisais silence, je m'arrêtais, attentif, quand dans le lointain j'entendais : − gâteaux, gâteaux, mes bons gâteaux tout chauds! Loti, Le Roman d'un enfant,1890, p. 102.
3. Emploi abs. Percevoir les sons produits par les ondes sonores qui frappent le tympan :
9. L'audition est l'impression produite par les mouvements oscillatoires sur les organes de l'ouïe; (...) s'ils arrivent jusqu'à notre oreille nous en percevons une image exacte et fidèle en un mot, nous entendons; ... Kastner, Gramm. mus.,1837, p. 1837.
a) [En réponse à la question implicite : son ouïe fonctionne-t-elle normalement? Fait habituel (ant. et post. à la situation présente) qui concerne le fonctionnement normal du sens de l'ouïe] Jouir (plus ou moins bien) du sens de l'ouïe.
Entendre exactement, juste. Synon. de avoir l'oreille musicale.Oui, il faut entendre d'abord, entendre bien exactement et juste, pour pouvoir reproduire (Melchissédec, Pour chanter,1913, p. 121).
Entendre mal (usuel), entendre dur (vx). Être un peu sourd. Les étourdissements surtout m'inquiètent, la vue baisse, j'entends mal (Bernanos, Imposture,1927, p. 489).
Rem. Le part. prés., empl. subst. s'écrit en 1 mot un malentendant*.
Ne pas entendre. Être sourd. Mais moi, je suis sourde et je n'entends pas! (Claudel, Annonce,1912, III, 3, p. 77).
Au fig., vieilli. Ne pas entendre de cette oreille. Feindre d'ignorer une demande, agir à l'encontre de ce qui est souhaité. Il était le gendre rêvé. Malheureusement, Gaspard ne paraissait pas entendre de cette oreille (Sandeau, Sacs,1851, p. 11).
Loc. Avoir des oreilles pour ne pas entendre, p. allus. à la Bible (notamment Ézéchiel XII 2, Marc VIII 18). Se refuser par obstination au témoignage de l'évidence :
10. Eveline (...) sortit de cette épreuve méconnaissant la grâce de Dieu et plus entêtée qu'auparavant, pareille à ceux que signale l'Écriture, qui ont des yeux pour ne point voir, des oreilles pour ne pas entendre... Gide, Robert,1930, p. 1340.
Proverbe. (Il n'y a ou il n'est) point de pire sourd que celui qui ne veut pas entendre :
11. « L'Empereur sait − mieux que personne − l'innocence de Dreyfus; et (...) il cherche à le crier aussi souvent et aussi haut qu'il le peut. « Il n'y a pire sourd que celui qui ne veut pas entendre... » Martin du Gard, Jean Barois,1913, p. 423.
b) [En réponse à la question implicite : perçoit-il ce qui est dit au moment du discours? Fait relatif à la situation actuelle, le compl. est suggéré par le cont. ant. et concerne en gén. des paroles] Ne pas avoir bien entendu, avoir entendu de travers. J'ai du coton dans les oreilles, j'ai peut-être mal entendu, répète ce que tu as dit (Hugo, Travaill. mer,1866, p. 420).Otto attendit une réflexion de Christophe; mais celui-ci semblait n'avoir pas entendu (Rolland, J.-Chr.,Matin, 1904, p. 164).San Antonio entend très mal à cause des parasites. J'entends mal aussi (Saint-Exup., Vol nuit,1931, p. 114).
En partic. [En prop. incise sous forme interr. ou exclam., avec ou sans inversion du suj., pour attirer l'attention de l'interlocuteur sur un mot, un propos, pour appuyer un avertissement] Vous entendez? Entendez-vous? Vous entendez (bien)! Tu n'as rien d'elle, rien de rien, entends-tu? ni la couleur des cheveux, ni le grain de la peau, ni l'odeur, ni un geste, ni une inflexion de voix (Mauriac, Mal Aimés,1945, p. 194).Qu'est-ce qu'il dit, qu'on va rentrer chez nous, bien sûr qu'on va rentrer chez nous, merde, Julien, t'entends, on rentre chez nous (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 202):
12. « Julie, dit-il, je ne te permets point de parler ainsi de ta maîtresse. Tu entends, n'est-ce pas? ne l'oublie plus à l'avenir. » Maupassant, Contes et nouvelles,t. 2, M. Parent, 1886, p. 590.
Rem. Dans cet emploi, à l'idée de la perception du propos, s'ajoute celle de sa compréhension (on pourrait parfois remplacer la formule par le synon. fam. compris?).
4. P. ext.
a) [L'obj. de la perception par le suj. n'est pas contrôlable par autrui] Je ne dois pas mourir sans avoir fait rugir quelque part un style comme je l'entends dans ma tête (Flaub., Corresp.,1852, p. 440).Vous développerez votre faculté d'entendre dans le silence les sonorités simultanées que font les accords (Koechlin, Harm.,t. 1, 1927, p. 2).
Entendre des cloches. Avoir la tête qui bourdonne (souvent après un coup). De prêter comme ça l'oreille lui faisait entendre des cloches (Triolet, Prem. accroc,1945, p. 170).
Entendre des voix. Elle était immobile, l'œil fixe, comme si elle avait entendu des voix (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 344).
b) [L'obj. de la perception est un fait de mémoire ou d'anticipation]
(Croire) entendre encore, toujours; il me semble entendre encore. Mais le bon chevalier (...) me fit un signe de la tête Et me cria (j'entends encore cette voix) : « Du moins, prudence! Car c'est bon pour une fois. » (Verlaine, Œuvres compl.,t. 1, Sagesse, 1881, p. 182).
Entendre d'avance, d'ici, déjà. J'entends d'avance l'objection (Flaub., Corresp.,1859, p. 363).J'entends le lecteur qui se récrie (Thibaudet, Réflex. litt.,1936, p. 258):
13. J'entends d'ici MmeLouise : « Votre neveu s'est toqué de MmeAlfieri... » Bernanos, Un Mauvais rêve,1948, p. 878.
c) P. anal. Percevoir une chose par une voie autre que celle de l'oreille. L'œil qui entend (Pourtalès, Vie Liszt,1925, p. 88).Vous avez devant vous des spectateurs-auditeurs qui entendent aussi bien par les yeux que par les oreilles (Wicart, Orateur,1936, p. 382).
En partic. Percevoir une chose dont l'appréhension ne relève pas du sens de l'ouïe (inanimé concret, pensées, désirs). Entendre pousser l'herbe, entendre son âme. Il [l'ouvrier] marche sous l'averse, sans la sentir, n'entendant que sa faim (Zola, Contes Ninon,1864, p. 113).C'est aux repas qu'il [le « Monsieur-seul »] me gêne le plus, parce que je l'entends penser à moi pendant qu'il mange (Colette, Entrave,1913, p. 12).Il y a tout d'un coup tellement de silence qu'on entend marcher la fumée (Giono, Gd troupeau,1931, p. 248).
B.− [Le suj., tout en percevant par l'oreille des sons, a une attitude active en prêtant attention au contenu de ce qu'il perçoit]
1. Prendre connaissance de quelque chose.
a) [L'obj. désigne soit un propos, un message, un rapport destiné au suj., soit la pers. qui le lui adresse] Ce sont là de ces choses qu'il ne faut pas entendre (Sainte-Beuve, Poisons,1869, p. 24).Chaque compagnie était convoquée immédiatement à l'effet d'entendre son capitaine (Verlaine, Œuvres compl.,t. 4, L. Leclercq, 1886, p. 132):
14. Jean Valjean l'écoutait sans l'entendre. Il entendait la musique de sa voix plutôt que le sens de ses paroles; ... Hugo, Les Misérables,t. 2, 1862, p. 729.
Spécialement
ADMIN. Le Conseil (des Ministres/d'État) entendu, après consultation du Conseil. Le Président de la République française, sur le rapport du Ministre des Travaux publics; vu la loi du (...); le Conseil d'État entendu, décrète (Code pêche fluv.,1875, p. 53).
DR. Recueillir les dépositions d'un témoin, d'un accusé dans une des phases de la procédure de jugement. Citoyens, je demande que la citoyenne Tison soit entendue; je demande qu'elle parle (Dumas père, Chev. Maison-Rouge,1847, II, 3, p. 86).Non, non, il convient d'entendre d'abord la fille de vaisselle. Nous allons savoir par elle (Giraudoux, Ondine,1939, III, 4, p. 208).
Une cause est entendue. Une cause est jugée (après audition des témoins, du procureur, des avocats et des juges). Cf. cause I B 1 et, pour le sens p. ext., entendu II C 2.
RELIG. [En parlant d'un prêtre] Entendre qqn (en confession); entendre la confession de qqn. Elle l'entraîna dans la chapelle, où fra Cattaneo l'entendit en confession (France, Puits ste Claire,1895, p. 252).Je n'ai pas besoin de confidences qui vous font souffrir et je ne suis pas un prêtre pour entendre votre confession (Bloy, Femme pauvre,1897, p. 201).
b) [Le suj. assiste comme auditeur à une représentation, qui ne lui est pas particulièrement destinée] Entendre une conférence, un concert, un opéra. Et cette merveille du grand rire, « Les Héritiers de Rabourdin, » quatre actes de Zola, qu'il faut entendre (Mallarmé, Dern. mode,1874, p. 790).
Entendre la messe. Assister à sa célébration. Petite pièce terrible où ils entendaient la messe avant de se mettre en route [pour l'échafaud] (Green, Journal,1935, p. 31).
[P. méton. de l'obj.; le compl. désigne un acteur, un conférencier, un musicien] Entendre qqn jouer, parler. Quand j'ai entendu Talma, j'attends que le feuilleton me dise qu'il a bien joué (Jouy, Hermite,t. 1, 1811, p. 65).On m'a dit que vous étiez musicien, et j'ai eu envie de vous entendre... Voulez-vous vous mettre au piano? (Feuillet, Scènes et prov.,1851, p. 157).
2. Accueillir avec sympathie les propos de quelqu'un et agir en conséquence.
a) [Entendre + compl. d'obj. dir.]
α) De manière à comprendre quelqu'un, à donner son adhésion à ce qu'il dit. Quelqu'un m'avait entendu, compris. Nous nous étions rejoints (Mauriac, Nœud vip.,1932, p. 286).
À l'entendre. Si on l'en croit. La semaine ne pouvait, à l'entendre, se passer sans que nous allions à Doncières (Proust, J. filles en fleurs,1918, p. 867).
β) De manière à satisfaire une demande.
[Le compl. désigne une pers.] :
15. − Oh! encore, dit Rodolphe. Ne partons pas! restez! (...) − J'ai tort, j'ai tort, disait-elle [Emma]. Je suis folle de vous entendre. Flaubert, Madame Bovary,t. 1, 1857, p. 183.
[Le compl. désigne une chose]
Ne vouloir rien entendre. Mais je suis un infirme aussi, de ces mauvais qui ont leur idée et qui ne veulent rien entendre (Claudel, Otage,1911, II, 1, p. 252).
Entendre la voix de la raison, entendre raison. Prêter attention à des conseils judicieux, avoir un comportement dicté par la raison. Puisque tu ne veux entendre raison, je saurai bien te soustraire à cette influence (Lacretelle, Silbermann,1922, p. 145):
16. C'est le malheur des temps où toutes les passions sont follement déchaînées qu'on ne veut pas entendre la voix de la raison, qu'on s'injurie, qu'on s'accuse. Clemenceau, L'Iniquité,1899, p. 208.
,,N'entendre ni rime, ni raison. Refuser par humeur, par entêtement, etc. de se rendre aux propositions les plus raisonnables`` (Ac. 1798-1878).
γ) [En parlant de la puissance divine] De manière à exaucer quelqu'un, une prière. Dieu vous entende! Que le ciel vous entende! Oh! que le ciel et l'enfer m'entendent, et qu'ils soient tous maudits (Hugo, Han d'Isl.,1823, p. 446).Dans un jour de prospérité qui ne tardera pas à se lever pour toi, si Dieu daigne entendre les prières que je lui adresserai journellement (Balzac, C. Birotteau,1837, p. 335).
b) [Entendre + compl. d'obj. indir.] Vieilli
Ne savoir auquel entendre. ,,Avoir affaire à plusieurs personnes à la fois et éprouver quelque embarras à les satisfaire`` (Ac. 1835-1932). Synon. ne savoir à qui entendre (Ac. 1932).Et son idée lui réussissait, car il ne savait plus auquel entendre. En effet, les villageois, qui avaient chaud, se disputaient ces sièges (Flaub., MmeBovary,t. 1, 1857, p. 159).
Ne vouloir entendre à rien. Et elle dit tout ce qu'elle put imaginer pour le consoler. Il ne voulait entendre à rien (Sand, Pte Fad.,1849, p. 36).
II.− Domaine de l'intellection, en gén. dans la lang. soutenue
A.− Comprendre, indépendamment de la perception physique.
1. [Le compl. désigne une chose] Saisir intellectuellement la signification, la portée de quelque chose.
a) [Le compl. est un subst.] Daubenton le représente [Buffon] comme n'ayant pas bien entendu la méthode de Linné (E. Perrier, Philos. zool. av. Darwin,1884, p. 56):
17. Ces hommes qui passent leur temps à établir des textes, l'idée ne leur viendra jamais de servir un texte, d'entendre un texte... Péguy, Clio,1914, p. 199.
Emploi pronom. à sens passif. Être compris. Il se gardera pourtant de la frapper [sa femme] et de la maltraiter (...) car elle a deux vengeances toutes prêtes. L'une s'entend assez; l'autre est le poison (France, Rabelais,1924, p. 15).
b) [Le compl. est une prop. interr.] Il fut besoin d'un peu de temps pour que Madeleine entendît ce que son mari voulait dire (Sand, F. le Champi,1850, p. 77).
P. ext. Comprendre quelque chose par intuition. Qui l'obligeoit à se battre, ce vieux roi aveugle? L'honneur : toute l'armée entendra ceci (Chateaubr., Mél. pol.,1816-24, p. 126).
Expressions
Entendre (qqc.) au premier mot. Comprendre dès la première explication. À six ans, M. le curé lui enseigna lui-même à lire [à Méniquette] (...) je la menais garder la chèvre dans les champs, lui montrant à coudre, à tricoter, à filer (...) Elle entendait toutes choses au premier mot, cette petite tête (Fabre, J. Savignac,1863, p. 167).
Entendre la plaisanterie, entendre raillerie. Savoir accepter une plaisanterie, une raillerie quand on en est l'objet. Bon! bon! Riez à votre aise; j'entends raillerie (Ponsard, Honn. et argent,1853, II, 7, p. 46).On le blaguait. Il entendait la plaisanterie (Van der Meersch, Empreinte dieu,1936, p. 102).
P. ext. Ne pas entendre raillerie sur qqc. Ne pas admettre que l'on prenne quelque chose à la légère. Cf. assassiner ex. 6.
Entendre (ou n'entendre pas) la devise (vx). ,,Se laisser (ou non) conter fleurette`` (Rat, Vieilles loc., mais qui vivent toujours ds Déf. Lang. fr., 1965, no27, p. 10).
Faire entendre, donner à entendre, laisser entendre (qqc. à qqn). Induire plus ou moins explicitement quelqu'un à comprendre quelque chose. Il ne veut même point dire, ni laisser entendre que le miracle lui fera plaisir (Alain, Propos,1923, p. 467).Il m'a fait entendre quelque chose de ce genre une fois, à sa manière étrange et détournée (Claudel, Soulier,1929, 1rejournée, 5, p. 670).Quelques mots brefs, presque durs, m'ont aussi donné à entendre qu'elle regrettait ses confidences de l'autre nuit (Gracq, Beau tén.,1945, p. 44).
Rem. 1. Au lieu de laisser entendre, on dit aussi, plus rarement, laisser à entendre, p. anal. avec donner à entendre. Je laisse donc à entendre dans mon article que... (Musset, Lettres Dupuis Cotonet, 1837, p. 751). 2. On rencontre ds la docum. un emploi subst. de l'inf. laisser entendre. Il n'y a cependant rien d'officiel, tout est en demi-mots; même moins que cela : en laisser entendre (Stendhal, Journal, 1805, p. 197).
Loc. fam. Entendre ce que parler veut dire. Comprendre la signification d'une chose dite à mots couverts. Synon. plus cour. savoir ce que parler veut dire.Il me faut du poussier (...) ou si tu aimes mieux, je t'enverrai des chalands de la préfecture... Tu entends ce que parler veut dire (Vidocq, Mém.,t. 2, 1828-29, p. 227).
2. [Le compl. désigne une pers.]
a) Par un acte d'attention particulier, réussir à comprendre la pensée de quelqu'un, les mobiles de ses actes. Mais vous ne m'entendez guère, si vous vous imaginez que je crois à l'effondrement final, parce que je montre les plaies et les lézardes (Zola, Dr Pascal,1893, p. 98):
18. ... il m'a, sans doute, mal entendu, quoique je pense m'être expliqué très-clairement; ce mot de Brutus, isolé de ce que j'ai dit, pourroit présenter une équivoque qui n'étoit ni dans mes pensées, ni dans mes paroles... Robespierre, Discours,Sur la guerre, t. 8, 1792, p. 146.
Se faire entendre. Faire en sorte qu'on soit compris. Mais que ce terrain est brûlant! Qu'il est difficile de se faire entendre entièrement! (Barrès, Cahiers,t. 10, 1913, p. 31).
Je vous entends (bien). Je comprends ce que vous voulez dire (sans avoir besoin d'un discours plus explicite). Lieutenant, ma patience est plus courte que mon épée. − Je vous entends, mon brave damoisel (Hugo, Han d'Isl.,1823, p. 60).Oh! vous m'entendez bien! Oh! vous savez comme on y vient (Laforgue, Poés.,1887, p. 141).
Entendre (qqn) à demi-mot. Comprendre ce que quelqu'un veut dire sans qu'il se soit entièrement expliqué. Gaspard n'avait parlé que de soupçons sur le bossu, mais elle l'avait entendu à demi-mot (Pourrat, Gaspard,1931, p. 215).
P. ext. (pour d'autres moyens d'expression que la parole). Plus Mozart est pur et parfait et moins il supporte l'enflure. Il faut savoir l'entendre à demi-mot (Ghéon, Prom. Mozart,1932, p. 154).
Emploi pronom. à valeur réciproque. Se comprendre mutuellement. Tous retranchés dans leur façon de s'entendre à demi-mot, de se référer à des rites connus d'eux seuls (Montherl., J. filles,1936, p. 1061).
Emploi pronom. à valeur réfl. Saisir sa propre pensée. À force de vouloir s'écarter des opinions reçues (...) on finit par ne plus s'entendre soi-même (Fontanes, Œuvres,t. 2, Litt. et crit., 1821, p. 192).
Je m'entends (pour indiquer que l'on refuse de s'expliquer plus clairement ou que l'on en est incapable). Synon. je sais ce que je veux dire.− Pour vivre! interrompit Marius. Vous n'avez pas besoin de ce nom pour vivre? − Ah! je m'entends, répondit Jean Valjean (Hugo, Misér.,t. 2, 1862, p. 667):
19. « (...) Les femmes honnêtes... c'est-à-dire nos femmes... sont... ne sont pas... manquent de... enfin ne connaissent pas assez leur métier de femme. Voilà... Je m'entends. » Maupassant, Contes et nouvelles,t. 1, La Porte, 1887, p. 1077.
En partic. Avoir une pleine compréhension de l'œuvre d'un artiste et de sa personnalité. À Venise, on penche pour Véronèse; en Flandre, on entend mieux Rubens (Fromentin, Maîtres autrefois,1876, p. 11).
b) Emploi pronom. réciproque. [La compréhension va au-delà de l'acte d'intellection et vise l'action; l'accent est mis sur l'idée d'accord]
α) Se mettre d'accord avec quelqu'un
par la discussion, à propos de l'emploi ou du sens d'un mot, en vue de prévenir un malentendu. Mais, si le fer est « prescrit », − non « proscrit », entendons-nous bien (Viollet-le-Duc, Archit.,1872, p. 125).Enten-dons-nous d'ailleurs. Je n'appelle pas beyliste quiconque écrit sur Stendhal (Thibaudet, Réflex. litt.,1936, p. 256).
Fam. Il faut, il faudrait s'entendre! (pour souligner la contradiction entre les affirmations de deux antagonistes) :
20. − Alors, qu'il dit comme ça Gabriel, alors comme ça vous êtes flic? − Jamais de la vie, s'écria l'autre d'un ton cordial, je ne suis qu'un pauvre marchand forain. − Le crois pas, dit Zazie, c'est un pauvre flic. − Faudrait s'entendre, dit Gabriel mollement. Queneau, Zazie dans le métro,1959, p. 79.
en nouant une entente momentanée avec quelqu'un. S'entendre à l'amiable. C'est « avant » qu'on risque de compromettre une femme (...) Après, on s'entend, on se concerte, on s'avertit (France, Pt bonh.,1898, p. 12):
21. Un jour, lorsqu'il aurait monté au Matterhorn une charge suffisante de clients, il aurait peut-être assez d'argent pour s'entendre avec son beau-frère, et exhausser le chalet. On s'arrangeait ainsi, dans les familles. Peyré, Matterhorn,1939, p. 38.
Péj. Être de complicité avec quelqu'un. S'entendre avec les ennemis. Seuls les faux coupables qui s'entendent répondent par les mêmes mots (Giraudoux, Ondine,1939, III, 4, p. 203).
Loc. S'entendre comme larrons en foire (pour faire qqc., gén. pour des actions plus ou moins malhonnêtes) :
22. Albrecht et lui étaient bons camarades, s'entendaient comme larrons en foire pour piller les produits de la ferme. Van der Meersch, Invasion 14,1935, p. 23.
β) Avoir des affinités de caractère l'un avec l'autre, vivre en bonne intelligence. Notre différence d'âge s'effaçait d'année en année. On s'entendait à merveille (Martin du G., Confid. afric.,1931, p. 1116).
Loc. fam. S'entendre comme chien et chat. Ne pas vivre en bonne intelligence (cf. chat II A 4).
B.− Comprendre quelque chose dans un sens donné.
1. Interpréter d'une certaine manière (un mot, une phrase). Ce que nous entendons en France par type espagnol n'existe pas en Espagne, ou du moins je ne l'ai pas encore rencontré (Gautier, Tra los montes,1843, p. 92).Si l'on entend ce mot selon l'usage, l'imagination n'est pas seulement (...) un pouvoir contemplatif de l'esprit, mais surtout l'erreur et le désordre (Alain, Beaux-Arts,1920, p. 15).
Entendre (par là) que. Si le seigneur vivait mieux que le paysan, il faut surtout entendre par là qu'il était nourri plus abondamment (Bergson, Deux sources,1932, p. 318).
Emploi pronom. à sens passif. (Devoir) être interprété d'une certaine manière. Cette dernière expression [puissance de la pauvreté] peut surprendre, mais pas longtemps. Pauvreté s'entend dans un sens relatif (Perroux, Écon. XXes.,1964, p. 585).Ces prix (...) s'entendent retouches éventuelles en sus (Jours de France, no1240, 22 sept. 1978, p. 115).
(Cela) s'entend. Que cela soit bien entendu, cela va de soi. Et vous, monsieur l'abbé, il ne vous déplaira pas sans doute de traduire du grec : moyennant salaire, s'entend (France, Rôtisserie,1893, p. 60).
Expr. Ne pas entendre finesse/malice à qqc. Faire ou dire quelque chose sans mauvaise intention, ne pas voir de mal dans quelque chose qui est dit ou fait par autrui. Bon, sans défiance, je n'y entendais pas finesse (Restif de la Bret., M. Nicolas,1796, p. 180).Il se souvint d'une parole que Solange avait dite à sa mère, et que celle-ci avait répétée sans y entendre malice (Montherl., Lépreuses,1939, p. 1418).
2. En partic. Se faire de quelque chose une certaine conception qui retentit sur le comportement. Entendre la vie d'une certaine façon. Est-ce comme cela que vous entendez la justice? (Chateaubr., Lib. presse,1818, p. 155).Parbleu, pour un début, voici qui n'est pas mal, et vous entendez vos futures fonctions comme il faut (Gide, Faux-monn.,1925, p. 1040):
23. Ceux-ci et Désaugiers le dernier, dans leur manière d'entendre le vin, c'est-à-dire de le boire et de le chanter, tenaient un peu plus directement (...) des façons du bon Homère et de celles du bon Rabelais. Sainte-Beuve, Portraits contemporains,t. 5, 1846-69, p. 45.
3. Donner une interprétation précise à un terme, à une phrase lorsqu'on s'exprime et vouloir la faire partager par ses auditeurs (pour éviter un malentendu). Par « sentiment national », M. Boulenger entend le sentiment du pays, le sentiment de la terre natale (Thibaudet, Réflex. litt.,1936, p. 226):
24. célimare. − Je dis que madame Bocardin est une femme un peu légère. emma. − Qu'est-ce que tu entends par là? célimare. − Elle a des intrigues... Labiche, Célimare le bien-aimé,1863, III, 7, p. 114.
J'entends (par là). Synon. je veux dire, comprenez.Cet effort suprême, pour la victoire, la liberté et le renouveau, exige l'union de tous les Français. J'entends l'union sincère et fraternelle (De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 421):
25. ... un artiste consommé dans le bel art de faire des vers à l'état pur. Je dis : Faire des vers à l'état pur, et j'entends par là qu'il n'y a de lui dans l'œuvre dont je parle, exactement que la façon de la forme. Valéry, Variété V,1944, p. 178.
C.− Bien comprendre une technique ou une activité, être compétent dans un domaine donné.
1. [Entendre + compl. d'obj. dir. (désignant un art, une science)]Entendre l'architecture, entendre les affaires. Ah! la duchesse entendait à merveille son métier de femme (Balzac, Langeais,1834, p. 255).Personne n'entend, comme Boucher, l'art de la lumière et des ombres (Nolhac, Boucher,1907, p. 168):
26. Don Juan me donne à l'esprit le fin et délicat plaisir que doit donner, je suppose, à ceux qui entendent la musique, la musique de Rossini. Goncourt, Journal,1859, p. 523.
Rem. On rencontre ds la docum. un emploi de entendre avec un compl. désignant des pers. − Ce bon docteur! Voilà un homme qui entend les malades! (Zola, Hérit. Rabourdin, 1874, I, 1, p. 139).
2. [Entendre + compl. d'obj. indir.]Entendre qqc. à, ne rien entendre à.Le XVIIIesiècle n'a rien entendu à la poésie, rien entendu au cœur humain (Flaub., Souv.,1841, p. 52).Comment! Vous avez entendu quelque chose à toute cette science, madame? (Pailleron, Monde où l'on s'ennuie,1869, II, 1, p. 81).
Rem. On rencontre chez Fabre l'emploi région. adj. du part. prés. entendant à, synon. de entendu (cf. ce mot II A 1 b) : entendant aux bêtes (Chevrier, 1867, p. 223); entendant à la terre (ibid., p. 241).
3. Emploi pronom. à valeur subjective
[Le compl. est un subst.] S'entendre à, en.S'entendre aux affaires. Il ne s'entendait guère plus en culture qu'en indienne (Flaub., MmeBovary,t. 1, 1857, p. 5).« Vous entendez-vous aux vers? (...) Feriez-vous rimer trône et couronne? » (France, Servien,1882, p. 162):
27. Et comment se mêler de peindre la femme, si l'on ne s'entend un peu aux paniers, aux rubans et aux mouches : MM. de Goncourt s'y entendent beaucoup. Sainte-Beuve, Nouveaux lundis,t. 4, 1863-69, p. 5.
[Le compl. est un syntagme verbal] S'(y) entendre à.Elle s'y entendait déjà, l'Évangéliste, à détacher les âmes de leurs affections naturelles (A. Daudet, Évangéliste,1883, p. 82).
4. En partic. [L'obj. désigne une langue] Connaître, après avoir étudié :
28. Il ne suffit pas d'entendre l'anglais pour comprendre ce grand homme, il faut entendre le Shakespeare, qui est une langue aussi. Le cœur de Shakespeare est une langue à part. Vigny, Le Journal d'un poète,1838, p. 1098.
N'entendre un (traître) mot de/à qqc. Ne pas comprendre un mot de/à quelque chose (en raison de l'ignorance d'une langue ou de la difficulté d'une science). Que je sois pendu, dit-il, si j'entends un mot de ce patois infernal! (Verne, Enf. cap. Grant,t. 1, 1868, p. 130).Les personnes qui ont introduit sa gloire [celle de Sidney Webb] en France n'entendaient pas un mot au socialisme (Sorel, Réflex. violence,1908, p. 175).Tu lisais avidement, sans y entendre un traître mot, les privilèges hollandais des in-folio de Diafoirus (Bachelard, Poét. espace,1957, p. 134).
III.− Domaine de la volition, dans la lang. soutenue.Avoir une certaine conception de quelque chose et vouloir faire partager son point de vue à autrui.
A.− [Dans des loc. figées]
Faire, agir comme on l'entend. Faire, agir comme on le juge à propos, comme il vous plaît. Chacun fait comme il l'entend (Ac.1798-1932) :
29. Enfin, Grandet, vous ferez comme vous l'entendrez. Nous sommes de vieux amis : il n'y a pas, dans tout Saumur, un homme qui prenne plus que moi d'intérêt à ce qui vous concerne; j'ai donc dû vous dire cela. Maintenant, arrive qui plante, vous êtes majeur, vous savez vous conduire, ... Balzac, Eugénie Grandet,1834, p. 209.
Ne pas l'entendre ainsi. Avoir sur un point donné une volonté différente de celle d'autrui. D'Athis (...) voulut prendre la chose en riant et ramener tout de suite ses deux fugitifs avec lui. Mais Irma ne l'entendit pas ainsi (A. Daudet, Femmes d'artistes,1874, p. 218).
Rem. On rencontre aussi, par croisement entre ne pas l'entendre ainsi et ne pas entendre de cette oreille (cf. entendre I A 3 a), l'expr. ne pas l'entendre de cette oreille-là « refuser de faire ce qui est demandé, en raison d'une volonté contraire » :
30. Isabelle (...) fixait sur lui ses yeux bleus pleins de caresses et de supplications muettes pour arracher le serment désiré; mais le baron ne l'entendait pas de cette oreille-là, ... Gautier, Le Capitaine Fracasse,1863, p. 253.
B.− [Le compl. est un inf.] Avoir la ferme intention, la volonté arrêtée de faire une chose. Il [Fred] sait qu'à sa majorité il sera duc de Nevers, et il entend porter haut ce titre et ce nom (Gyp, M. Fred,1891, p. 7):
31. Et Françoise, en bonne et honnête servante qui entend faire respecter son maître comme elle le respecte elle-même, s'était drapée de cette majesté qui ennoblit les entremetteuses dans les tableaux des vieux maîtres, ... Proust, La Prisonnière,1922, p. 141.
C.− [Le compl. est une prop. complétive dont le verbe est au subj.] Avoir la volonté arrêtée qu'une chose se réalise. La France qui combat entend que la victoire soit le bénéfice de tous ses enfants (De Gaulle, Mém.,1954, p. 677).
[En tournure négative] Ne pas admettre, refuser absolument qu'une chose se fasse. Or la grande Mademoiselle n'entendait pas qu'on la plaisantât de la sorte (...) son premier soin fut de chasser impitoyablement Lully (Grillet, Ancêtres violon,t. 2, 1901, p. 51).
Rem. Entendre dénote gén. une volonté plus nettement affirmée que vouloir, exiger, impliquant le refus de toute objection, de toute discussion.
Prononc. et Orth. : [ɑ ̃tɑ ̃:dʀ ̥], (j')entends [ɑ ̃tɑ ̃]. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. Ca 1050 « percevoir par l'ouïe » (Alexis, éd. C. Storey, 422); 2. a) ca 1100 « prêter attention, obéir à » (Roland, éd. J. Bédier, 3782); b) 1636 jur. (Monet); c) 1668 « exaucer » (La Fontaine, Fables, V, 1 ds Œuvres, éd. F. Gohin, t. 1, p. 172). B. 1. a) ca 1100 « comprendre » (Roland, éd. cit., 2098); b) 1549 pronom. « se comprendre, se mettre d'accord » (Est.); 2. 1225-50 pronom. soi entendre de (Venus, 180c ds T.-L.); 3. 1370 « vouloir dire » (Oresme, Ethiques, 1. III, chap. 14, note 6, éd. A. D. Menut, p. 205). C. Ca 1121 « avoir l'intention de » (Voyage de Saint Brendan, éd. E. G. R. Waters, 160). Du lat. class. intendere « étendre, tendre (quelque chose) vers », fig. « tendre, diriger (regard, esprit, attention, etc.) vers »; intrans. « se tourner vers, se diriger vers; viser à »; lat. chrét. « faire attention à, comprendre; vouloir, décider; écouter, entendre ». Fréq. abs. littér. Entendre : 42 421. Entendant : 1 340. Fréq. rel. littér. Entendre : xixes. : a) 54 478, b) 62 698; xxes. : a) 64 121, b) 61 768. Entendant : xixes. : a) 2 212, b) 2 349; xxes. : a) 1 964, b) 1 369. Bbg. Darm. Vie 1932, p. 53, 136. − Gottschalk (F.). Lat. audire im Französischen. Giessen, 1921. − Gougenheim (G.). Chang. lex... J. de psychol. normale et pathol. 1966, t. 63, pp. 309-315. − Johansson (A.). Ét. syntaxique sur le verbe faire en fr. mod. In : [Mél. Wahlund (K.)]. Mâcon, 1896, pp. 102-103. − Laboriat (J.). Un Arrêté mal compris. Déf. Lang. fr. 1973, no67, pp. 16-18. − Margerie (C. de), Moirand (S.), Porquier (R.). Les Constr. verbales avec faire, laisser voir, etc. Fr. Monde. 1973, no98, pp. 33-41. − Rat (M.). Vieilles loc., mais qui vivent toujours. Déf. Lang. fr. 1965, no27, pp. 9-10. − Rivière (P.). Fantaisie sur le part. passé. Déf. Lang. fr. 1972, no65, pp. 10-11. − Stefenelli (A.). Der Synonymenreichtum der altfranzösischen Dichtersprache. Wien. 1967.

Wiktionnaire

Verbe - ancien français

entendre \Prononciation ?\

  1. Entendre.
  2. Essayer, avoir l’intention de faire.
  3. Comprendre.
    • ou propos 2 choses sont a entendre — (H. de Mondeville, Chirurgie, page 54r., fin de la 2e colonne)
      à propos, 2 choses sont à comprendre

Verbe - français

entendre \ɑ̃.tɑ̃dʁ\ transitif 3e groupe (voir la conjugaison) (pronominal : s’entendre)

  1. Percevoir un son.
    • Et je n’entendis plus qu'un murmure confus, semblable au murmure de la marée montante, ou au rugissement sauvage qui s'élève dans le bestiaire quand on vient d'ouvrir l’arène. — (Charles Nodier, — (L'Apocalypse du Solitaire), dans le Bulletin du bibliophile, Paris : chez J. Techener, 1844, page 1205)
    • On entendait vers Noisseville des hourras et des accents lointains d’une musique allemande. — (Paul et Victor Margueritte, Le Désastre, 86e éd., Plon-Nourrit & Cie, page 168)
    • De tradition ardennaise, la fête de l’Assomption est un jour d’orage. Ce dicton, aujourd’hui, se confirmera: le tonnerre commence de se faire entendre. — (Isabelle Rimbaud, Dans les remous de la bataille (Journal de guerre), volume 1 : 28 juillet-28 août 1914, Le Mercure de France, 15 Juillet 1916)
    • La portée de cet appareil est assez considérable; il permet de faire entendre les auditions des radioconcerts à un auditoire de plusieurs centaines de personnes dans une très grande salle. — (Bulletin de la Société française des électriciens, éd. Gauthier-Villars et Cie, 1924, volume 4, page 166)
    • — Le langage du Père Duchesne… Ces ordures que, de sa cellule de l’Abbaye, Manon Roland entendait crier à son sujet. Et les crieurs en remettaient ! C’est impardonnable. — (Claude Mauriac, Le temps immobile, tome 7 : Signes, rencontres et rendez-vous, Éditions Bernard Grasset, Paris, 1982)
  2. (En particulier) Percevoir un son qui n’existe pas.
    • Semblable au déplorable malade d’Edgar Poë, Durtal entendait avec terreur des frôlements de pas dans les escaliers, des cris plaintifs derrière les portes. — (Joris-Karl Huysmans, La Cathédrale, Plon-Nourrit, 1915)
  3. Écouter d’une oreille attentive.
    • Aussi à Lima, tous les étrangers vont-ils à l’église, non pour entendre chanter aux moines l’office divin, mais pour admirer, sous leur costume national, ces femmes d’une nature à part. — (Flora Tristan; Les Femmes de Lima, dans Revue de Paris, tome 32, 1836)
    • La concierge logeait au premier. Elle ne pouvait pas entendre. D’ailleurs elle n’était pas là, […]. — (Michel Lambert, La rue qui monte, L’Âge d’Homme, 1992, page 25)
  4. (Désuet) Comprendre.
    • — C’était avant tout un financier. Il entendait les affaires mieux que personne. — (Anatole France, L’Étui de nacre, 1892, réédition Calmann-Lévy, 1923, page 96)
    • Je ne saisis pas, quant à moi, un seul mot de leur jargon. Ni le maire, ni le curé je ne les entends. — (Jean Rogissart, Passantes d’Octobre, Librairie Arthème Fayard, Paris, 1958)
    • La rue de Jérusalem, entendez la police, tient ces garnis à l’œil : hôtes de passage, ouvriers journaliers ou escarpes n’échappent pas à sa surveillance […]. — (Ange-Pierre Leca, Et le choléra s’abattit sur Paris - 1832, Albin Michel, 1982, page 23)
    • À quoi sert le MacBook ? Certes, il est plus léger, mais c’est bien là son seul avantage par rapport au MacBook Air. Il aurait été mis à jour avec un port Thunderbolt 3 et une puce T2, son maintien dans la gamme aurait pu s’entendre — (Christophe Laporte, Le keynote de la rédemption ?, MacGeneration, 4 novembre 2018 → lire en ligne)
    • (Absolument)Bonaparte, qui s’y entendait, changeait le titre des gens: il cachait le nom de M. de Talleyrand sous celui de prince de Bénévent; il baronnifiait les marquis et ducalisait les comtes. La recette est assez bonne , et nous la recommandons fortement à qui de droit. — (Les nouvelles recrues du Château, dans La Mode: revue des modes, jeudi 25 décembre 1845, Paris : imprimerie d’Edouard Proux & Cie, page 540)
  5. Apprendre, prendre connaissance de quelque chose (l’objet désigne soit un propos, un message, un rapport destiné au sujet, soit la personne qui le lui adresse).
    • Ce sont là de ces choses qu’il ne faut pas entendre. — (Charles-Augustin Sainte-Beuve, Poisons, 1869, page 24)
    • Chaque compagnie était convoquée immédiatement à l’effet d’entendre son capitaine. — (Verlaine, Œuvres complètes, tome 4, L. Leclercq, 1886, page 132)
    1. (Administration) Consulter.
      • le Conseil d’État, entendu, décrète... — (Code pêche fluv., 1875, page 53)
    2. (Droit) Recueillir les dépositions d’un témoin, d’un accusé dans une des phases de la procédure de jugement.
      • La cause, l’affaire est entendue, les débats sont clos, il ne reste qu’à délibérer et à prononcer le jugement.
      • Citoyens, je demande que la citoyenne Tison soit entendue ; je demande qu’elle parle. — (Alexandre Dumas, Chevalier de Maison-Rouge, 1847, II, 3, page 86)
    3. (Religion) (En parlant d’un prêtre) Écouter la confession d’un pécheur.
      • Elle l’entraîna dans la chapelle, où fra Cattaneo l’entendit en confession. — (France, Puits Ste Claire, 1895, page 252)
    4. (En particulier) (Péjoratif) Apprendre un fait, une nouvelle bizarre ou stupéfiante.
      • J’en ai entendu de fortes, mais jamais comme celle-là !… — (Marcel Pagnol, Le temps des secrets, 1960, collection Le Livre de Poche, page 348)
      • J’en aurai entendu, pendant plus de dix ans en tant que maire, mais celle-ci dépasse beaucoup de limites ! — (Raphaëlle Rérolle, « Beaucoup de gens, à Paris, sont moins bien logés que mes vaches » : le désarroi du monde agricole face à l’« agribashing », Le Monde. Mis en ligne le 7 novembre 2019)
  6. Assister à un spectacle public en tant qu’auditeur (sens actif : donner).
    • Tu n’as pas une vilaine voix et la mienne est très bien. De tous les chanteurs de plages que j’ai entendus, il n’y en a pas un seul que je n’aurais dégoté facilement. — (H. G. Wells, La Guerre dans les airs, 1908, traduction d’Henry-D. Davray et B. Kozakiewicz, Mercure de France, Paris, 1910, page 69 de l’édition de 1921)
    • (Religion) Prenons Notre-Dame de Paris ; […] cette Cathédrale n’a plus d’âme ; elle est un cadavre inerte de pierre ; essayez d’y entendre une messe, de vous approcher de la Table, et vous sentirez une chape de glace tomber sur vous. — (Joris-Karl Huysmans, La Cathédrale, Plon-Nourrit, 1915)
    • Entendre une conférence.
    • Je n’ai jamais entendu cet orateur.
    • J’ai entendu plusieurs fois ce chanteur à la Scala.
  7. (Religion) Exaucer.
    • Que Dieu vous entende !
  8. Être d’accord, accepter.
    • (Figuré) Il ne l’entend pas de cette oreille-là, se dit de quelqu’un à qui l’on fait une proposition qu’il ne veut pas l’accepter.
    • Il n’a rien voulu entendre. Il n’est pas tombé d’accord avec moi.
    • C’est entendu, je viendrai à trois heures!
    • Je n’entends pas que tu tombes malade, toi aussi… — (Émile Zola, Le Docteur Pascal, G. Charpentier, 1893, chapitre XIII)
  9. Vouloir dire.
    • Un courtisan est un homme de la cour du roi, j’entends un homme qui a une charge ou un emploi domestique dans le palais, qui est le premier écuyer, chambellan, grand veneur, […]. — (Hippolyte Taine, Philosophie de l’art, Germer Baillière, Paris, 1865, page 134)
    • Qu’entendez-vous par là ? Que voulez-vous dire par là ?
  10. Exiger.
    • Je vous le promets, mais aussi j’entends que vous fassiez telle chose.
    • J’entends que vous restiez avec moi.
  11. Vouloir ; avoir l’intention de.
    • Le projet était hardi, mais le fait de l’entreprendre prouvait que le Danemark entendait conserver son hégémonie sur tout le Groenland. — (Jean-Baptiste Charcot, Dans la mer du Groenland, 1928)
    • La foule entend désormais jouir des raffinements réservés naguère à de peu nombreux privilégiés. — (Ludovic Naudeau, La France se regarde : le Problème de la natalité, Librairie Hachette, Paris, 1931)
    • Nous préparions la Fête-Dieu avec une ardeur et une fébrilité d’autant plus vive que chaque quartier entendait exhiber le plus beau reposoir. Quelle mobilisation ! — (Yanny Hureaux, Bille de chêne: Une enfance forestière, Jean-Claude Lattès, 1996)
    • Angie avait bien vite compris les raisons de cette attitude : Petrina ne supportait pas que sa propre enfant lui volât la vedette en société et entendait bien rester le centre d'intérêt de tous... — (Lynne Graham , Un réveillon chez les Demetrios, traduit de l'anglais (Irlande du Nord), éd. Harlequin, 2014)
    • Si certains songent à revenir dans l’Hexagone, d’autres n’entendent pas retraverser la Manche. — (Cécile Ducourtieux, Entre le Covid-19 et le Brexit, les Français de Londres en plein doute, Le Monde. Mis en ligne le 9 septembre 2020)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

ENTENDRE. v. tr.
Percevoir par l'ouïe. Entendre une voix, un bruit. Entendre le canon, le son des cloches. Nous les entendions marcher, parler, crier, rire, chanter, etc. J'entends venir quelqu'un. Je l'ai entendu dire. J'en ai entendu parler. J'ai entendu faire votre éloge. Au milieu du bruit, il ne put parvenir à faire entendre sa voix, à se faire entendre. Absolument, Je suis trop loin pour entendre. Entendre la messe, les vêpres, le sermon, Assister à la messe, aux vêpres, au sermon. Entendre quelqu'un, L'entendre discourir, plaider, professer, déclamer, chanter, jouer d'un instrument, etc. Je n'ai jamais entendu cet orateur, cet avocat, ce professeur. J'ai entendu plusieurs fois ce chanteur, ce musicien, cet acteur. Le bruit est si grand qu'on ne s'entend pas, Le bruit empêche ceux qui veulent converser d'entendre mutuellement leurs paroles. On dit dans un sens analogue et figurément, Il se fait tant de bruit qu'on n'entendrait pas Dieu tonner. Prov. et fig., Qui n'entend qu'une cloche n'entend qu'un son. Voyez CLOCHE. Prov., Il n'est pire sourd qui ne veut entendre, se dit au propre en parlant d'une Personne qui feint de ne pas entendre; et, figurément, d'une Personne qui fait semblant de ne pas comprendre une proposition, une demande à laquelle elle ne veut pas répondre. Fig., Il n'entend pas de cette oreille-là, se dit de Quelqu'un à qui l'on fait une proposition qu'il ne veut pas écouter. Il signifie aussi Écouter d'une oreille attentive. Je suis prêt à vous entendre. Il n'a rien voulu entendre. Veuillez entendre mes raisons. Spécialement, en termes de Jurisprudence, Entendre les avocats des deux parties. Entendre des témoins. On condamna l'accusé sans l'entendre. Entendre les parties ou Les parties entendues. La cause, l'affaire est entendue, Les débats sont clos, il ne reste qu'à délibérer et à prononcer le jugement. À l'entendre, Si on l'en croit. À les entendre, ils ne sont pas coupables. Entendre à quelque chose, Y donner son consentement, l'approuver, y acquiescer. Il ne veut entendre à aucun arrangement. Fam., Ne savoir auquel entendre, à qui entendre, Avoir affaire à plusieurs personnes à la fois et éprouver quelque embarras à les satisfaire. Vous me questionnez, vous me pressez tous à la fois, je ne sais auquel entendre. Il signifie encore Saisir par l'intelligence. Cet étranger a beaucoup de peine à se faire entendre. Entendre un auteur. Un passage difficile à entendre. Il entend un peu l'anglais. Je n'ai pu parvenir à lui faire entendre cela, à lui faire entendre qu'on n'avait eu aucune intention de l'offenser. L'affaire est tellement embrouillée que je n'y entends plus rien. Vous parliez d'une personne, et j'ai entendu une autre. Entendez-moi bien! J'entends fort bien ce que vous voulez dire, ou, simplement, J'entends. Si vous recommencez, je vous chasse : entendez-vous? Il signifie également Avoir la connaissance et la pratique d'une chose. Il entend bien son métier. Entendre les affaires, la chicane, etc. En ce sens il vieillit. Entendre son intérêt, ses intérêts, Savoir très bien comment on doit agir dans son intérêt. Ne rien entendre à quelque chose, Y être fort inhabile. Cet homme n'entend rien aux affaires, il n'y entend absolument rien. Il n'entend rien au gouvernement. Il signifie quelquefois Présumer. J'ai toujours entendu que notre arrangement s'exécuterait ainsi. Entendre à demi-mot, comprendre ce qu'un autre veut dire, sans qu'il se soit entièrement expliqué. Entendre finesse, entendre malice à quelque chose, Attribuer un sens fin et malin à quelque chose. Je ne sais pas quelle finesse vous entendez à cela. Il entend finesse à tout. Il n'entend malice à rien. Ne pas entendre malice à quelque chose signifie aussi Faire ou dire quelque chose sans mauvaise intention. L'offre qu'il vous faisait était désavantageuse pour vous, le discours qu'il vous tenait pouvait vous choquer, a pu vous déplaire, mais il n'y entendait point malice. Entendre la plaisanterie, entendre bien la plaisanterie, entendre plaisanterie, Prendre bien les choses dites en plaisantant, ne point s'en offenser. On dit de même Entendre raillerie, Ne pas s'offenser des railleries dont on est l'objet. Il n'entend pas plaisanterie, raillerie là-dessus, Il est susceptible sur un certain point. Il n'entend pas raillerie signifie encore Il est sévère et il veut qu'on soit exact. Entendre raison, Acquiescer à ce qui est juste et raisonnable. Quelque proposition qu'on lui ait faite, il n'a jamais voulu entendre raison. On n'a jamais pu lui faire entendre raison. Il n'entend pas raison là-dessus, se dit d'une Personne qui se montre inflexible, opiniâtre, sur quelque point. Donner à entendre, laisser entendre, faire entendre, Insinuer, dire quelque chose pour faire connaître ou seulement pour faire croire. On lui donna à entendre qu'il ferait bien de se retirer. Il m'avait laissé entendre que vous vous refusiez à tout accommodement. Il veut faire entendre par là que... Il signifie encore Vouloir dire. Quand je dis qu'il écrit bien, j'entends qu'il écrit purement. Le chrétien (et, par ce mot, j'entends celui qui conforme sa vie à la doctrine évangélique), etc. Qu'entendez-vous, qu'entend-il par là? Que voulez-vous dire, que veut-il dire par là? Quelles sont vos prétentions, ses prétentions? On dit de même Comment l'entendez-vous? comment l'entend-il? etc. Il signifie en outre Exiger. Je vous le promets, mais aussi j'entends que vous fassiez telle chose. J'entends que vous restiez avec moi. Je n'entends pas que vous sortiez. J'entends et je prétends que... Il signifie également Avoir l'intention de. En faisant cela j'entendais agir dans votre intérêt autant que dans le mien. Faites comme vous l'entendez, Faites comme il vous plaira, comme vous le jugerez à propos. On dit de même Chacun fait comme il l'entend.

S'ENTENDRE signifie Savoir ce qu'on veut dire. Il ne s'entend pas lui-même. Je m'entends, cela suffit. Il signifie aussi Se comprendre l'un l'autre. Ils s'entendent très bien sans se parler. Ils s'entendirent à demi-mot. Nous commençons à nous entendre, Nos avis, nos opinions commencent à ne plus différer autant. Entendons-nous, Comprenons-nous bien l'un l'autre, les uns les autres. Dans le sens passif, Cela s'entend de loin, cela s'entend aisément, cela ne s'entend pas, Cela est facile à comprendre, on ne saurait comprendre cela. On dit aussi Cela s'entend, cela s'entend de reste, Cela doit être ainsi, il faut bien que cela soit ainsi. L'homme est libre, jusqu'à un certain point, s'entend. S'entendre avec quelqu'un signifie Se concerter avec lui. J'ai besoin de m'entendre avec vous là-dessus. Il signifie aussi Agir de concert et, plus particulièrement, Avoir avec quelqu'un une intelligence secrète. S'entendre avec les ennemis. Ils s'entendaient pour le perdre. On dit en ce sens : Entendons-nous, Soyons bien d'intelligence et de concert entre nous pour réussir dans ce que nous voulons faire. Entendons-nous, et nous réussirons. S'entendre avec quelqu'un signifie encore Sympathiser, vivre en bonne intelligence avec lui. Il est d'un commerce agréable, et je m'entends fort bien avec lui. Ils ne s'entendent guère ensemble. Fig. et fam., Ils s'entendent comme larrons en foire, se dit de Gens qui sont d'intelligence pour faire quelque chose que l'on juge blâmable. S'entendre à une chose, La savoir bien faire, s'y prendre bien. Il s'entend à faire valoir une terre. Il s'entend à mener une intrigue. Fig. et fam., Il s'y entend comme à ramer des choux. Voyez RAMER. S'entendre en musique, en tableaux, etc., S'y bien connaître. C'est une chose entendue, c'est entendu, C'est une chose sur laquelle on s'est entendu, qui est convenue. Il est bien entendu que, Il a été clairement convenu que... On dit elliptiquement Bien entendu que, ou simplement Bien entendu. Il est bien entendu que vous arriverez à telle heure. Vous arriverez à telle heure, bien entendu. Dans le langage familier, Entendu! signifie Chose convenue. Entendu, je viendrai à trois heures!

Littré (1872-1877)

ENTENDRE (an-tan-dr'), j'entends, tu entends, il entend, nous entendons, vous entendez, ils entendent ; j'entendais ; j'entendis ; j'entendrai ; j'en tendrais ; entends ; que j'entende ; que j'entendisse ; entendant ; entendu.
  • 1 V. n. Étymologiquement, tendre vers, d'où, avoir intention, dessein, avec un verbe à l'infinitif, ou que et le verbe au subjonctif ou quelquefois au conditionnel. J'ai toujours entendu que l'acte serait enregistré. J'entends qu'on m'obéisse et qu'on n'obéisse qu'à moi. J'entends être obéi. En disant cela j'entends parler de lui, non de vous. J'entends qu'avec ma cour toute la ville en deuil Demain rende au dernier [Étéocle] les honneurs du cercueil, Rotrou, Antig. IV, 1. Non, s'il vous plaît, je n'entends pas que vous fassiez de dépense, et que vous envoyiez rien acheter pour moi, Molière, Pourc. I, 10. Il nous faut ton moulin ; que veux-tu qu'on t'en donne ? - Rien du tout ; car j'entends ne le vendre à personne, Andrieux, Meunier.

    Avec le mot indéterminé le, il se prend activement. Je l'entends ainsi, c'est-à-dire je veux que la chose soit ainsi. Faites comme vous l'entendrez. Chacun fait comme il l'entend. Mercure fait comme il l'entend, il ne vous est pas si nécessaire que moi, Dancourt, l'Amour charlatan, III, 17.

    Comment l'entendez-vous ? c'est-à-dire quelle est votre intention ? Comment l'entend monsieur mon hôte ? Dit-elle, et de quel droit me donner comme il fait ? La Fontaine, Fiancée.

  • 2Être occupé à. On n'entendit plus à autre chose qu'à faire toute la diligence possible. De cette façon ayant à faire en deux lieux, et ne pouvant pas entendre partout, il en demeura une partie sur la place, l'autre jeta ses armes et s'enfuit, Malherbe, Le XXXIIIe livre de T. Live, ch. 9. Cette femme n'entend qu'à donner des vapeurs, La Chaussée, Gouvern. I, 1.

    Vieilli en ce sens.

  • 3Entendre à, consentir, acquiescer. Elle ne veut entendre à nulle proposition, Sévigné, 267. Les raisons qu'il a de ne pas entendre à la demande…, La Bruyère, X. Tandis qu'il vous restait quelque espérance de vie, aviez-vous voulu entendre à appeler le ministre de Jésus-Christ ? Massillon, Car. Impénit. fin. La maréchale de Lorge aimait trop sa fille pour entendre à un mariage qui ne la pouvait rendre heureuse, Saint-Simon, 28, 70. Je savais bien que mon Hollandais n'entendrait à aucune proposition, Voltaire, Lett. Prusse, 8. Les conditions parurent si dures aux réformés qu'ils ne voulurent point y entendre, Anquetil, Ligue, I, 321. Les uns disent que j'ai bien fait d'entendre à un arrangement, Courier, II, 316.
  • 4 V. a. Diriger son oreille vers, d'où recevoir l'impression des sons. Entendre du bruit. J'entends parler dans la chambre à côté. J'entends que vous me dites des nouvelles. On n'entend pas toujours ce qu'on croit bien entendre, Corneille, Perthar. III, 2. Il entend arriver un carrosse, Sévigné, 244. J'entends déjà partout les charrettes courir, Les maçons travailler, les boutiques s'ouvrir, Boileau, Sat. IV. Le ciel dans tous leurs pleurs ne m'entend pas nommer, Racine, Brit. IV, 3. J'entends que vous m'offrez un nouveau diadème, Racine, Bérén. II, 4.

    Il se fait tant de bruit qu'on n'entendrait pas Dieu tonner, se dit d'un très grand bruit.

    Entendre dire, apprendre par la parole, par ce qui se dit. J'ai entendu dire cette nouvelle. On entend dire dans la ville qu'il y a eu un incendie. La nouvelle que j'ai entendu dire.

    Entendre parler d'une chose, en être informé par la parole.

    Entendre parler, signifie aussi avoir dans l'idée. Quand je dis nature, j'entends parler de…

    Ne pas vouloir entendre parler d'une chose, la rejeter absolument sans vouloir même y prêter l'oreille. Il n'en voulut jamais entendre parler, Bossuet, Var. 1.

    Faire entendre, faire parvenir à l'ouïe. Dans cet oubli profond et de Dieu et d'elle-même où l'âme s'était plongée, ce grand Dieu sait bien la trouver ; il fait entendre sa voix, quand il lui plaît, au milieu du bruit du monde, Bossuet, La Vallière. Si sans trop vous déplaire, … J'osais vous faire entendre une timide voix, Racine, Bajaz. IV, 5. Une voix me fit entendre ces paroles, Fénelon, Tél. II.

    Se faire entendre, être ouï. Une voix se fait entendre. Au milieu de ce tapage je ne pouvais me faire entendre. Mais le nom de Tarquin vient de se faire entendre, Voltaire, Brut. IV, 7.

    Être dit de manière à être compris. Vos ordres sans détour pouvaient se faire entendre, Racine, Iphig. IV, 4.

    Se faire entendre à, parler à. Mais la gloire, madame, Ne s'était point encor fait entendre à mon cœur, Racine, Bérén. IV, 5.

    Absolument, entendre, avoir l'ouïe. Parlez plus haut, il n'entend pas.

    Entendre dur, entendre clair, avoir l'oreille dure, fine.

    Fig. N'entendre que par, être uniquement dirigé par. Crésus ne voit, n'entend, n'agit que par vous-même, Boursault, Fabl. d'Ésope, v, 5.

    Fig. Il n'entend pas de cette oreille-là, il ne veut pas écouter la proposition qu'on lui fait.

  • 5Prêter l'oreille. Que ceux qui m'entendent me jugent. Il est bon d'entendre les deux parties. Loin de nous entendre, Ils demandent la paix et parlent de se rendre, Racine, Mithr. IV, 6. Faut-il le condamner avant que de l'entendre ? Racine, Iphig. III, 6. On voit dans Grégoire de Tours qu'ils faisaient des meurtres de sang-froid, et faisaient mourir des accusés qui n'avaient seulement pas été entendus, Montesquieu, Espr. XXXI, 2.

    Entendre en confession, ou, simplement, entendre, se dit du prêtre qui entend la confession d'un pénitent. Je veux bien vous entendre dans l'octave du St-Sacrement, Bossuet, Lett. Corn. 35.

    Entendre la messe, les vêpres, le sermon, assister à la messe, aux vêpres, au sermon.

    Aller entendre une pièce, un acteur, un prédicateur, assister à une pièce, au rôle d'un acteur, au sermon d'un prédicateur.

    Terme de pratique. S'entendre condamner, ouïr le prononcé du jugement qui condamne ; expression qui se trouve dans les assignations ; s'entendre condamner, c'est entendre condamner soi.

    À l'entendre, c'est-à-dire si on l'en croit, si on lui prête l'oreille. À l'entendre, il n'est pas coupable. À vous entendre, il s'agirait de quelque chose de fort grave.

    Absolument. Ne pas savoir auquel ou à qui entendre, c'est-à-dire ne pas savoir à qui ou à quoi il importe de faire attention. Parmi tant de cris différents on ne sait auquel entendre, Vaugelas, Q. C. 536. L'homme ne sait donc à qui entendre ; sa volonté est le jouet continuel de divers motifs opposés qui se disputent le droit de le déterminer, Holbach, Essai sur les préj. ch. 13, dans DUMARSAIS, Œuvres, t. VI, p. 316.

    On dit dans le même sens ne savoir à quoi entendre. Le tyran ne savait à quoi entendre, ni quels ordres donner, ni où il fallait envoyer du secours, Rollin, Hist. anc. Œuvres, t. VIII, p. 316, dans POUGENS.

    Populairement. N'entendre ni à hu, ni à dia, ou ni à dia, ni à huraut, c'est-à-dire ne rien entendre du tout, être sourd, être bouché.

  • 6Exaucer. Dieu entendit ses vœux. Entendez ma prière.
  • 7Apprendre par la renommée. Il l'écoute sans y avoir aucun intérêt notable, et par simple curiosité d'apprendre ce qu'il pouvait avoir su déjà en la cour d'Égypte, où il était en assez bonne position pour entendre des nouvelles assurées de tout ce qui se passait dans la Syrie, Corneille, Ex. de Rodog. Avez-vous jamais entendu une victoire plus glorieuse ? Bossuet, II, Pent. 1.
  • 8Diriger son esprit, d'où par extension, comprendre, saisir le sens. Des mystères sacrés que nous n'entendons pas, Corneille, Poly. IV, 6. Et par un mouvement que je ne puis entendre, De ma fureur je passe au zèle de mon gendre, Corneille, ib. v, 6. Je commence, madame, enfin à vous entendre, Corneille, Nicom. III, 7. Dites qu'ils entendent mal Jansénius, Pascal, Prov. 18. Il entend fort finement tout ce qui est bon, Sévigné, 453. Ils n'entendent pas un mot de français, Sévigné, 569. Si nous entendons du Messie ce grand passage où Isaïe nous représente si vivement l'homme de douleurs frappé pour nos péchés et défiguré comme un lépreux, Bossuet, Hist. II, 10. Vous n'aurez point pour moi de langages secrets ; J'entendrai des regards que vous croirez muets, Racine, Brit. II, 3. J'ignore de son cœur les sentiments secrets ; Mais je m'y soumettrais sans vouloir rien prétendre, Si comme vous, Seigneur, je croyais les entendre, Racine, Mithr. I, 3. Vous résistez en vain et j'entends votre faite, Racine, ib. III, 5. Vous m'entendez assez si vous voulez m'entendre, Racine, Iphig. II, 5. Les sots lisent un livre et ne l'entendent point ; les esprits médiocres croient l'entendre parfaitement ; les grands esprits ne l'entendent quelquefois pas tout entier, La Bruyère, I. J'estime bien plus ceux qui ne comprennent pas ces mystères-là que ceux qui les comprennent ; mais malheureusement la nature n'a pas fait tout le monde capable de n'y rien entendre, Fontenelle, Dial. 2, Morts mod. Suivons l'avis de Quintilien, et faisons en sorte non-seulement qu'on nous entende, mais qu'on ne puisse pas même, le voulût-on, ne pas nous entendre, D'Olivet, Rem. sur Racine, § 65. Tu pouvais de ses yeux entendre le langage, Voltaire, Zaïre, III, 7. Tacite est le livre des vieillards, les jeunes gens ne sont pas faits pour l'entendre, Rousseau, Ém. IV.

    Entendre à demi-mot, comprendre ce qui est dit d'une façon mystérieuse, voilée.

    Elliptiquement. Vous avez parlé d'une personne et j'ai entendu une autre, c'est-à-dire j'ai compris qu'il s'agissait d'une autre. C'est, mon père, que je connais que vous avez parlé d'une personne et que j'ai entendu une autre, Molière, Mal. im. I, 5.

    Vous m'entendez bien, c'est-à-dire vous savez ce que je veux dire. Bonhomme, c'est ce coup qu'il faut, vous m'entendez, Qu'il faut fouiller à l'escarcelle, La Fontaine, Fabl. IV, 4. Et s'il dit qu'il n'en fera rien, Qu'il aille… vous m'entendez bien, Scarron, Virg. IV.

    Familièrement. Entendre l'apologue, comprendre ce dont il s'agit.

    Terme de manége. Entendre bien les jambes, les talons, se dit du cheval qui semble entendre ce que le cavalier lui demande. Donner à entendre, laisser entendre, faire entendre, insinuer, faire comprendre une chose. Il m'a donné à entendre que vous me blâmiez. Je ne sais pas, seigneur, ce qu'on vous fait entendre, Corneille, Théodore, IV, 4. Combien était-il important de faire entendre qui vous êtes ! Pascal, Prov. 15. Je veux seulement vous en faire horreur [de votre malice] à vous-mêmes, et faire entendre à tout le monde qu'après cela il n'y a rien dont vous ne soyez capables, Pascal, ib. 16. Et ne devais-je pas, quoi qu'il me fit entendre, Pénétrer les raisons qui vous faisaient attendre ? Th. Corneille, Ariane, III, 3. Et ce fils si fidèle a dû vous faire entendre Que, des mêmes ardeurs dès longtemps enflammé, Il aime aussi la reine et même en est aimé, Racine, Mithr. III, 2. Je vais de ce signal faire entendre la cause, Racine, Bajaz. III, 2. Vous, que l'on cherche Aman et qu'on lui fasse entendre Qu'invité chez la reine il ait soin de s'y rendre, Racine, Esth. II, 7. Elle voulut faire entendre que…, Fénelon, Tél. I. Je veux faire entendre à ces rois que…, Fénelon, ib. XI.

    Se faire entendre, être compris. C'est un homme qui ne sait pas se faire entendre. Je ne sais si je me fais entendre.

    Absolument. Comprendre. En vain vous feignez de ne pas entendre. J'entends et Dieu entend : Dieu entend qu'il est ; j'entends que Dieu est, et j'entends que je suis, Bossuet, Connaiss. IV, 8. On n'entend jamais mieux que lorsqu'on entend sans secours étrangers, Condillac, Log. t. XXII, p. 188, dans POUGENS.

    J'entends, je comprends bien. Nous entendons, nous comprenons ce que vous voulez dire. Vous entendez, vous voilà bien avertis.

    On dit dans un sens analogue entendez-vous ? Je suis de vous très mécontente. Très mécontente, entendez-vous ? Marmontel, Amis de la maison, I, 1.

    Se dit simplement aussi pour appuyer un ordre, une menace. Sortez, entendez-vous ?

  • 9Entendre, vouloir dire. Qu'entendez-vous par ces paroles ? Entendant du temple de son corps ce que les juifs entendaient de celui de Salomon, Bossuet, Var. XI, § 144. Quand les anciens disent le philosophe, ils entendent Aristote, Du Marsais, Tropes, II, 4.

    Absolument. Bientôt elle [la duchesse de Longueville] honora M. Dodart de sa confiance, j'entends de celle que l'on a pour un ami : la grande inégalité des conditions ne lui en retrancha que le titre, Fontenelle, Dodart.

  • 10Entendre, connaître, être habile dans. Une personne de qui on peut dire en vérité qu'il n'y a jamais eu une dame qui ait si bien entendu la galanterie ni si mal entendu les galants, Voiture, Lett. 42. Si j'ai bien entendu tantôt la politique, Corneille, Cinna, v, 1. Ici c'est un métier que je n'entends pas bien, Corneille, Nicom. III, 1. M. de la Reynie qui entend si bien la police, Sévigné, 454. Il ne suffit pas d'entendre la guerre, Bossuet, Hist. III, 6. Il [Darius] en donna le commandement [de la flotte] à Scylax, Grec, qui entendait parfaitement la marine, Rollin, Hist. anc. Œuvres, t. III, p. 106, dans POUGENS. Elle entend la cuisine et l'office, Rousseau, Ém. v.

    L'entendre bien, l'entendre mal, le comprendre bien, mal, y être habile, malhabile. Ce prompt retour me perd et rompt notre entreprise. - Tu l'entends mal, Attale, il la met dans ma main, Corneille, Nicom. 1, 4. Je pensais faire bien. - Oui, c'était fort l'entendre, Molière, l'Étourdi, I, 5. Vous l'entendez bien peu, me dit-il ; les Pères étaient bons pour la morale de leur temps ; mais ils sont trop éloignés pour celle du nôtre, Pascal, Prov. 5. Bon ! qui l'entendra mieux ne l'entendra pas mal, Th. Corneille, le Charme de la voix, II, 2. Ce n'est pas mal l'entendre, que d'être à la fois héros et chrétien, Maintenon, Lettres à Mme de Fontanes, 24 mai 1692.

    Entendre finesse à quelque chose, y vouloir comprendre plus que la chose ne signifie. Monsieur n'y entend pas plus de finesse que moi, Dancourt, les Fonds perdus, III, 10. Je ne sais pas la finesse qu'elle y a entendue, et tout cela retombe sur moi pourtant, Marivaux, Pays. parv. part. 5.

    Ne pas y entendre finesse, n'être pas malin, ne pas vouloir faire une malice.

    Ne pas entendre malice à quelque chose, faire ou dire quelque chose sans mauvaise intention.

    Entendre raillerie, prendre bien les choses dites en plaisantant, ne pas s'en offenser.

    Il n'entend pas raillerie, c'est-à-dire il est susceptible ou bien il est sévère.

    Entendre la raillerie, entendre la plaisanterie, avoir la facilité, l'art, le talent de bien railler.

    Entendre raison, acquiescer à ce qui est juste et raisonnable.

    Il n'entend pas raison là-dessus, sur ce point il est opiniâtre, inflexible.

    N'entendre ni rime, ni raison, ne pas écouter les objections, refuser par entêtement, par humeur.

  • 11S'entendre, v. réfl. Être entendu, perçu par l'oreille. Sa voix ne s'entend pas. Mille cris aussitôt de tous côtés s'entendent, Corneille, Héracl. v, 7. Au pied du trône même une voix s'entendit, Voltaire, Henr. VII. Un bruit affreux s'entend, Voltaire, ib. VIII.

    S'entendre, s'entendre l'un l'autre. Le bruit est si grand qu'on ne peut s'entendre.

  • 12Être compris. Ce mot peut s'entendre de diverses manières. Il est vrai que, dans un autre de ses dialogues [de Perrault], s'il vient à la preuve, et prétend montrer que le commencement de la première ode de ce grand poëte [Pindare] ne s'entend point, c'est ce qu'il prouve admirablement par la traduction qu'il en a faite, Boileau, Longin, Subl réfl. 8.

    Cela s'entend, cela s'entend bien, cela se suppose ainsi, cela doit être ainsi.

    S'entend, c'est-à-dire bien entendu, cela va sans dire, locution familière qui se dit par parenthèse. Ne connaîtrais-tu pas quelque honnête faussaire, Qui servît ses amis, en le payant, s'entend ? Racine, Plaid. I, 5. Je me crois libre (jusqu'à un certain point s'entend), Voltaire, Lett. Prusse, 37. Je ne regrette rien de cette Babylone impure que vous habitez ; s'entend, je n'en regrette que vous, Courier, Lett. I, 323.

    Se comprendre l'un l'autre. Nous nous entendons à demi-mot. Nous ne nous entendons point. Vous vous entendiez à merveilles, Sévigné, 353. Ils s'entendaient sans rien dire, Fénelon, Tél. XXII.

    Entendons-nous, comprenons bien ce que chacun de nous dit.

    S'entendre, se comprendre soi-même. Tu feras ce que je veux, ou… suffit, je m'entends bien, Dancourt, les Trois cousines, II, 8.

  • 13Se concerter, être d'accord, d'intelligence. Vous vous êtes entendu avec elle à me nuire, Voiture, Lett. 1. D'où vient que mon cœur même à demi révolté Semble vouloir s'entendre avec ta lâcheté ? Corneille, Tois. d'or, II, 2. Je ne veux point m'entendre avec vos ennemis, Sévigné, 529. Dans la première ruine de Jérusalem les Juifs s'entendaient du moins entre eux : dans la dernière, Jérusalem, assiégée par les Romains, était déchirée par trois factions ennemies, Bossuet, Hist. II, 8. Mais si dans son devoir votre cœur affermi Voulait ne point s'entendre avec son ennemi, Racine, Brit. III, 1.

    Nous nous entendons bien, nous vivons bien ensemble.

    Entendons-nous bien, soyons bien d'intelligence. Entendons-nous bien, et nous réussirons.

    S'entendre comme larrons en foire, se dit de gens qui se concertent pour quelque chose de blâmable ou de suspect. Et toutes [les femmes], se liguant pour nous en faire accroire, S'entendent contre nous comme larrons en foire, Voltaire, la Femme qui a raison, II, 6.

  • 14Être habile dans une chose, se connaître à une chose. Il s'entend en musique, en tableaux. Il s'entend à la culture. Ah ! que les hommes s'entendent mal en gloire ! Fénelon, Tél. XXII.

    Familièrement. Il s'y entend comme à ramer des choux, comme à faire un coffre, il ne comprend rien à ce qu'il fait.

PROVERBES

Qui n'entend qu'une cloche n'entend qu'un son, il faut entendre les deux parties.

Il n'est pire sourd, ou il n'est point de pire sourd que celui qui ne veut pas entendre, se dit d'un homme qui feint de ne pas ouïr ou de ne pas comprendre.

REMARQUE

1. Je l'ai entendu dire à différentes personnes, est une locution à laquelle il faut prendre garde ; car elle est amphibologique. Elle peut signifier : j'ai entendu qu'on le disait à différentes personnes, ou que différentes personnes le disaient. Il faut donc, quand on en use, bien considérer si le sens est suffisamment déterminé par le contexte.

2. Même observation pour la phrase : Je lui ai entendu dire cela ; car elle peut signifier : j'ai entendu qu'il disait cela, ou qu'on lui disait cela.

3. S'il y avait deux régimes, l'amphibologie disparaîtrait. Je lui ai entendu dire à un homme d'État fort célèbre, Voltaire, Louis XIV, Écrivains, Villars. Cette phrase, peu élégante d'ailleurs, signifie sans ambiguïté : j'ai entendu qu'il disait à un homme…

4. Régnier a mis de avec entendre dans le sens de avoir l'intention. Je n'entends, quant à moi, de la prendre à partie, Sat. II.

5. Pour peu qu'on y réfléchisse, on trouvera que, grammaticalement, s'entendre à quelque chose pour y être habile est de difficile explication. Si on prend la locution telle qu'elle se présente, on a : entendre soi ; ce qui, manifestement, ne signifie rien. C'est un archaïsme qui en rend compte ; entendre est proprement un verbe neutre ; il l'est encore aujourd'hui, il l'était dans l'ancienne langue. Or dans cette ancienne langue les verbes neutres avaient la propriété de se construire avec le pronom personnel. S'entendre, en cet emploi, est donc entendre au neutre construit avec se (voy. SE pour cette construction ; voy. aussi APERCEVOIR).

SYNONYME

1. ENTENDRE, CONCEVOIR, COMPRENDRE. Entendre et comprendre signifient saisir le sens ; ce qui les distingue de concevoir qui signifie embrasser par l'idée : j'entends ou je comprends cette phrase ; et non je la conçois. Au contraire dans le vers de Boileau : Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement, entendre ou comprendre ne conviendrait pas. La nuance est autre entre comprendre et entendre. Au fond, l'idée d'entendre est de faire attention à, être habile dans, tandis que celle de comprendre est prendre en soi : j'entends l'allemand, je le sais, j'y suis habile ; je comprends l'allemand dirait moins. D'un autre côté, pour une démonstration, comprendre est le mot propre.

2. ENTENDRE, OUÏR., Ces deux mots, très différents dans l'origine, sont complétement synonymes aujourd'hui. Ouïr était le mot propre, peu à peu écarté par entendre qui est le mot figuré. Ouïr c'est percevoir par l'oreille ; entendre c'est proprement faire attention ; l'usage seul lui a donné le sens détourné d'ouïr. La seule différence qu'il y ait, c'est que ouïr est devenu verbe défectif et d'un usage restreint. Quand le sens peut être louche, il faut, sans hésiter, employer ouïr. Ainsi ce mot de Pacuvius sur les astrologues : Magis audiendum quam auscultandum censeo, se traduira par : Il vaut mieux les ouïr que les écouter. Entendre ferait un contre-sens.

3. ENTENDRE, ÉCOUTER., Entendre c'est être frappé des sons ; écouter c'est prêter l'oreille pour les entendre. Quelquefois on n'entend pas quoiqu'on écoute, et souvent on entend sans écouter.

HISTORIQUE

XIe s. Et dist al rei : bien l'avez enten. dud, Ch. de Rol. XVI. Un en i ad à qui li autre entendent, ib. CCLXXV.

XIIe s. Beau sire Guene, devers moi entendez, Ronc. p. 31. Or me refait Amors à lui entendre, Couci, v. Ele voit bien et conoist et entent Qu'il n'en est plus qui aimt [aime] si leaument, ib. v. Quant plus est li bernages à grant joie antandanz, Atant es un paien qui ot nom Margulanz, Sax. v. Sire, dit li messages, antandez ma raison, ib. XI. Pour lor bonté [je] le di, ne nul mal n'i antant, ib. XX. Laienz entra Thomas od mult poi conpaignuns : Poi i mena des suens, si cum nus l'entenduns [nous l'apprenons], Th. le mart. 38.

XIIIe s. Fille, se vous vouliez entendre à mariage, Fil de roi [je] vous donroie, riche et de haut parage, Audefroi le Bastard, Romancero, p. 17. Bele Doette, es fenestres seant, Lit en un livre, mais au cuer ne l'entent [maisson cœur n'y est pas], ib. p. 48. Par huit jors se sont entendu Li baron à grant feste faire ; Puis vait cascuns à son repaire Molt lié [très content], quant le congié a pris, Roman de Mahomet, p. 64. Chacun qui s'entent jugera C'on doit miex mauvese pugnir Que li loial lessier languir, Bibl. des Chartes, 4e série, t. v, p. 476. Et Loeys estoit sages et entendans, Chr. de Rains, p. 2. Cui conscience ne reprent, plus tost au mal qu'au bien entent, ib. 235. Einsi te voloie essaier ; Quar certes je n'i entent mie Ne traïson ne felonie, Ren. 1803. Lors estuet [il convient] jones gens entendre à estre gais et amoureus, la Rose, 78. Plait de murtre est moult soutil, et moult le peut on soutilment plaider qui faire le set, mais que l'on seit bien entendu, Ass. de Jér. I, 132. Lou conseil li loa, si comme l'en [l'on] me donna à entendre, que il s'en venist à Damiete en galies, Joinville, 192. Et sachiez que, se il se feussent pris garde de nous, il nous eussent touz mors [tués], mes il entendoient [faisaient attention] au roy et aux autres grosses batailles, Joinville, 227. Et me dist ainsi, que il n'entendoit mie [comprenait pas] comment li roys eut pooir de demourer, Joinville, 255.

XIVe s. [Œuvre de chirurgie qui doit être désirée] et de ceux qui s'entendent moiennement, et des ydiots qui se mesconnoissent, H. de Mondeville, f° 32, verso. Aristote entent tousjours pour fors ceulx qui ont la vertu de fortitude, Oresme, Eth. 79. Bienfais n'est point perdus à chelui [celui] qui s'entent, Baud. de Seb. XII, 770.

XVe s. Quand ces chevaliers de Bretagne virent venir les Anglois, et qu'ils s'ordonnoient pour eux assieger, si n'en furent mie trop effrayés ; mais entendirent premierement au chastel et puis aux guerites et aux portes, Froissart, I, I, 197. Quand vint le matin, de rechef ils commencerent à assaillir fort et appertement en plusieurs lieux, et ensonnierent [inquiétèrent] si ceux de la ville, qu'ils ne savoient auquel entendre, Froissart, I, I, 224. On leur donnoit tant à faire que on ne savoit, par dedans, auquel lez [côté] entendre, Froissart, II, II, 215. [Les Écossais parlant des Français] Ils ne nous entendent point, ni nous eux, Froissart, II, II, 228. Sur ce, s'advise qui a sens, Soit en jeunesse ou en vieillesse ; Et qui ne m'entend, je m'entens, Monstrant que suis dame et maistresse, Orléans, Ball. 90. Qui entend mal, raporte mal, Leroux de Lincy, Prov. t. II, p. 390. Comme vous entendrez cy après, Commines, I, 1. Or il fault entendre que monseigneur du Magne estoit avec sept ou huyt cens hommes d'armes au devant des ducs, Commines, I, 3. Que on tyreroit vers Paris pour essayer si on pourroit reduyre la ville à vouloir entendre au bien public du royaulme, Commines, I, 5. Et y en a assez qui ne parlent que après les autres, sans gueres entendre aux matieres, Commines, II, 2. Il [Louis XI] estoit assez lettré ; il aymoit à demander et à entendre de toutes choses, Commines, II, 6. À riens ne voulut ledit duc entendre, Commines, v, 1. Ung des plus sages chevaliers et plus entendus que je cogneus jamais, Commines, II, 2. Elle se delibera de soy appareiller pour honnestement faire son messaige ; car bien convenoit le faire de bonne sorte, entendu que les pucelles à qui il falloit qu'elle feist les messaiges estoient de grand estat, Perceforest, t. VI, f° 79.

XVIe s. J'entendz et veulx que tu apprennes les langues parfaictement, Rabelais, Pant. II, 8. Mon amy, je n'entendz point ce barragouin ; pourtant, si voulez qu'on vous entende, parlez aultre languaige, Rabelais, ib. II, 9. Vous y amenerez vostre femme, s'il vous plaist, avecques ses voisines, cela s'entend, Rabelais, ib. III, 31. Vous l'avez ouy, l'avez-vous entendu ? Rabelais, ib. v. Prol. Ny n'entendent les stoïciens que l'ame de leur sage puisse…, Montaigne, I, 50. Le seigneur de Langey, très entendu en telles choses, Montaigne, I, 58. Croesus lui feit entendre qu'il verifioit lors à ses despens l'avertissement de Solon, Montaigne, I, 65. Il leur semble bien faire les moderez et les entendus quand…, Montaigne, I, 204. Et encores se moquent-ils des autres qui n'entendent pas le tour du baston, et les appellent lourdauts, Lanoue, 106. L'art militaire est aussi mieux entendu qu'il n'estoit, Lanoue, 402. La plupart de la noblesse, ayant entendu l'execution de Vassy, se delibera de venir près Paris, Lanoue, 547. Chacun s'incitoit à paix, et à persuader les grands d'y entendre, Lanoue, 558. En quelque style qu'il soit mis, pourveu qu'il s'entende, il ne peut faillir à estre bien receu, Amyot, Épit. Je ferois moins de doute de la volonté du pape à nous assister en ceste occasion que de celle du roy catholique ; car sa Sainteté s'est déjà laissé entendre [a donné à entendre] qu'il falloit choisir un prince du sang catholique pour beriter du royaume, après le decès de M. le cardinal de Bourbon, Villeroy, Mém. t. II, p. 170, dans LACURNE. À bon entens-tu il ne faut qu'un mot, Cotgrave Equivoques par amphibologie, vulgairement appellées des entends-trois, Des Accords, Bigarrures, ch. 6. On peut faire l'habile, l'empesché et l'entendu, c'est-à-dire le sot et miserable, Charron, Sagesse, I, 41.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

ENTENDRE. Ajoutez :
15Entendre haut, locution provinciale signifiant avoir l'oreille dure.
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Encyclopédie, 1re édition (1751)

ENTENDRE LE NUMERO, (Comm.) c’est en terme de Commerce, connoître le véritable prix d’une marchandise, caché sous la marque que le marchand a coûtume d’y mettre, & dont il n’y a que lui & ses garçons qui ayent la clé. Voyez Numero, Chiffre, & Marque. Dictionn. de Commerce, de Trévoux, & Chambers. (G)

Entendre les Talons, (Manége.) Voy. Fuir les Talons.

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Étymologie de « entendre »

Du moyen français entendre, de l’ancien français entendre (« entendre, avoir l’intention, comprendre »), du latin classique intendere (« entendre, tendre vers », au figuré « tendre, diriger (son regard, son esprit, son attention, etc.) vers ») en latin médiéval, il prend le sens de « faire attention à, comprendre, vouloir, décider ; écouter, entendre ». Voyez in- et tendere.
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Bourguig. entarre ; provenç. entendre ; catal. entendrer ; espagn. entender ; ital. intendere ; du latin intendere, diriger vers, appliquer, de in, en, et tendere, tendre (voy. ce mot), et, par extension, dans les langues romanes, ouïr et comprendre.

ÉTYMOLOGIE

Ajoutez :

6. On a dit : à double entendre, pour : à double entente. On a ordonné aux comédiens italiens de retrancher de leurs pièces tous les mots à double entendre qui sont trop libres, Dangeau, t. II, p. 101, janv. 1688.

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Phonétique du mot « entendre »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
entendre ɑ̃tɑ̃dr

Fréquence d'apparition du mot « entendre » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « entendre »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « entendre »

  • Mieux vaut entendre parler du roi que de le voir.
    Proverbe finnois
  • Tout oiseau aime à s’entendre chanter.
    Proverbe anglais
  • Celui qui veut gouverner doit entendre et ne pas entendre, voir et ne rien voir.
    Agricola
  • Écoutez donc ceci, peuple stupide et irréfléchi : avec leurs yeux, ils ne voient rien, avec leurs oreilles, ils n'entendent rien !
    Ancien Testament, Jérémie V, 21
  • J'entendrai des regards que vous croirez muets.
    Jean Racine — Britannicus, II, 3, Néron
  • Vous devez tout voir, tout entendre et tout oublier.
    Napoléon Bonaparte
  • Pour entendre il faut être silencieux.
    Ursula Le Guin — Terremer
  • Quand on se fait entendre, on parle toujours bien.
    Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière — Les Femmes savantes, II, 6, Martine
  • Je parle à la porte, mais le mur doit entendre.
    Proverbe afghan
  • Que celui qui a des oreilles pour entendre, entende !
    Saint Matthieu
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Traductions du mot « entendre »

Langue Traduction
Anglais hear
Espagnol oír
Italien sentire
Allemand hören
Chinois
Arabe سمع
Portugais ouvir
Russe заслушивать
Japonais 聞く
Basque entzun
Corse senti
Source : Google Translate API

Synonymes de « entendre »

Source : synonymes de entendre sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « entendre »

Combien de points fait le mot entendre au Scrabble ?

Nombre de points du mot entendre au scrabble : 9 points

Entendre

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