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Mérite

Variantes Singulier Pluriel
Masculin mérite mérites

Définitions de « mérite »

Trésor de la Langue Française informatisé

MÉRITE, subst. masc.

A. −
1. Valeur morale procédant de l'effort de quelqu'un qui surmonte des difficultés par sens du devoir et par aspiration au bien. Anton. démérite.Un juste mérite; honorer, récompenser, vanter le mérite; mérite et récompense, mérite et vertu. La notion de mérite et celle de responsabilité sont des erreurs certaines, liées à la croyance erronée à une liberté absolue que nie le déterminisme universel (Le Dantec,Savoir!1920, p.81).Pour être méchant, il faut d'abord être bon; et pour être bon, il faut être méchant, sinon le «mérite» s'évapore (Valéry,Mauv. pens.,1942, p.112):
1. ... pour qu'une peine soit utile, il faut 1 que celui auquel on l'inflige, pourvu qu'il est du principe du mérite et du démérite, se trouve justement puni et accepte sa punition avec une disposition convenable; 2 que les spectateurs, pourvus également du principe du mérite et du démérite, trouvent le coupable justement puni en tant que coupable, s'appliquent par anticipation la même justice, et soient rappelés à l'ordre par la vue de ses légitimes représailles. Cousin,Hist. philos. XVIIIes., t.2, 1829, p.273.
[À propos d'un attribut mor. de la pers.] J'aime la vertu pour son mérite et non pour sa récompense (Lamart.,Voy. Orient, t.1, 1835, p.82).
2. THÉOL. Propriété intrinsèque de l'acte humain bon, en tant qu'il a rapport à autrui, à la communauté humaine et à Dieu, et qui est susceptible d'appeler sur l'homme la miséricorde divine (d'apr. Foi t.1, 1968). Couronner le mérite; le mérite et la grâce. Dieu nous jugera selon le mérite de nos oeuvres (Ac.1798-1935).Dans un sens, on peut dire que j'ai du mérite. On en a canonisé qui me valaient peut-être pas (Aymé,Brûlebois,1926, p.66).Le mérite dépend de la libre disposition de Dieu qui daigne récompenser par la béatitude éternelle les bonnes oeuvres réalisées avec sa grâce (Fries t.2 1965, p.424).
Mérite de condigno (v. condigne), mérite de congruo. ,,Le mérite de condigno constitue un droit strict à une récompense (...). Le mérite de congruo constitue seulement un titre convenable (...) à la concession libérale d'une chose qui n'est pas due`` (Foulq.-St-Jean1962).
P. méton. Action justiciable d'une sanction divine positive; créance morale qui en découle. Et cette vierge (...) Auroit-elle voulu vivre sans épreuves, pour mourir sans mérites aux yeux de son créateur? (Cottin,Mathilde, t. 2, 1805, p.352).Il ne s'agissait après tout que de souffrir quelques jours, après quoi viendrait l'éternité, où toutes ces souffrances seraient comptées pour des mérites, à la bonne heure (Renan,Avenir sc.,1890, p.330).J'amassai des mérites. L'abbé Martin nous distribua au début de l'Avent des images représentant un enfant Jésus: À chaque bonne action, nous perforions d'un coup d'épingle les contours du dessin tracé à l'encre violette (Beauvoir,Mém. j. fille,1958, p.32).
[En tant que cette créance peut être transmise d'une pers. à une autre] Les mérites des saints, (du sang) de Jésus-Christ. Les souffrances et les sacrifices des saints et de Jésus-Christ qui permettent le rachat des pécheurs. Cette victime qui doit vaincre l'enfer par la vertu des souffrances et des mérites du sang de Jésus-Christ (Chateaubr.,Martyrs, t. 1, 1810, p.195).Une tendre et silencieuse offrande qui les associait à toutes les douleurs et à tous les mérites de Jésus-Christ et de ses saints, à tous les hommages de l'Église (Montalembert,Ste Élisabeth,1836, p.71):
2. Dieu, si Dieu veut, fera peut-être ce que je ne peux pas faire, moi indigne. Les mérites et les prières de Jésus, les promesses de Jésus, les mérites et les prières de tous les saints travaillent pour nous. Et qui sait, toute infime, toute indigne, toute infirme Dieu accordera peut-être quelque chose à mes prières. Péguy,Myst. charité,1910, p.145.
Par dérision. − Vous êtes sûr que c'est le capitaine Dispolsen? − Sûr, par les mérites de saint Belzébuth! dit le soldat (Hugo,Han d'Isl.,1823, p.30).
P. anal., dans le domaine mor.Il n'y a cependant pas de père de famille protestant (...) qui n'ait pardonné à un enfant punissable par l'intercession et par les mérites d'un autre enfant dont il a lieu d'être content (Maistre,Soirées St-Pétersb., t. 2, 1821, p.281).
B. − P. ext.
1. Surtout au sing. Caractère de celui ou de ce qui est digne d'une appréciation avantageuse par ses qualités morales ou intellectuelles. Le mérite des Allemands, c'est de bien remplir le temps; le talent des Français, c'est de le faire oublier (Staël,Allemagne, t. 1, 1810, p.186).Des gens le lançaient avec des éloges sans proportion avec le mince mérite de son ouvrage de début. «Un nouveau Ch.-L. Philippe, etc.» (Larbaud,Journal,1934, p.280):
3. Voulez-vous vous convaincre de l'énorme différence de mérite et de gloire entre un grand écrivain et un grand politique? Mes travaux de diplomate ont été sanctionnés par ce qui est reconnu l'habileté suprême, c'est-à-dire par le succès. Quiconque pourtant (verra) jamais ce mémoire le sautera sans doute à pieds joints... Chateaubr.,Mém., t. 3, 1848, p.463.
SYNT. Grand, énorme, immense, mince, rare, vrai mérite; mérite accompli, éclatant, éminent, exceptionnel, incontestable, supérieur; mérite personnel; le premier des mérites; avoir du mérite; n'avoir aucun mérite; n'en avoir que plus de mérite; être plein de mérite; être sans mérite; c'est tout à son mérite; l'emporter en mérite sur qqn, qqc.; faire valoir son mérite; apprécier, célébrer, contester, diminuer, honorer, méconnaître, reconnaître, vanter le mérite de qqn, qqc.; récompenser le mérite de qqn; se prononcer sur le mérite de qqn, de qqc.; trouver du mérite à qqn, à qqc.; s'attribuer, se donner, revendiquer le mérite de qqn, de qqc.; mérite et honneur; mérite et talent.
a) Locutions
Loc. adj. De mérite
Synon. de méritant.Artiste, femme, gens, homme, personne de mérite, de grand mérite, d'un grand mérite, de haut mérite, de/du premier mérite. J'ai été élevé à la campagne (...) par un gouverneur, homme de mérite, dont le zèle fut récompensé par les progrès rapides de son élève (Jouy,Hermite, t. 4, 1813, p.176).Synon. de talentueux.Un journaliste de grand mérite, mort aujourd'hui, Charles Brainne (Maupass.,Contes et nouv., t. 2, Rosier MmeHusson, 1887, p.685).Des savants de grand mérite, qui savent tirer parti pour leurs travaux du privilège d'une intimité quotidienne avec des chefs-d'oeuvre (Réau,Archives, bibl., musées,1909, p.15).
Synon. de méritoire (rare).Action, geste de mérite, de grand mérite, d'un grand mérite, de/du premier mérite. Il s'était vite rendu compte du peu de biens rattachant au succès l'oeuvre de haut mérite (Montesquiou,Mém., t. 2, 1921, p.180).
Rem. V. aussi infra B 2.
Loc. verbales
Avoir le mérite de + subst. ou inf.; avoir du/beaucoup de mérite à + inf.; n'avoir aucun, guère de mérite à + inf.; avoir peu de mérite à + inf.Toutes ces ondes secondaires produisent (...) des apparences compliquées que M. Righi a eu beaucoup de mérite à débrouiller (H. Poincaré,Théorie Maxwell,1899, p.71).Je n'ai aucun mérite à résoudre un problème aussi simple. Cette bagatelle est à la portée d'un enfant (Bernanos,Imposture,1927, p.394).Vous n'aviez pas grand mérite à prophétiser (Arnoux,Rêv. policier amat.,1945, p.186).Vous avez au moins le mérite de la franchise (Anouilh,Répét.,1950, v, p.123).
Il y a du mérite à (faire) qqc. Combattre ces idées, monsieur! Il n'y aurait pas plus de mérite à cela qu'à faire en Prusse des épigrammes contre les capucins (Béranger,Chans., t. 1, 1829, p.xxxv).
Faire (un) mérite de qqc. à qqn. Faire gloire de quelque chose à quelqu'un. Vous avez vu de quelle ardeur insensée, il s'employait à (...) lui faire un mérite de son ignominie? (Aymé,Cléramb.,1950, ii, 4, p.99).
Se faire (un) mérite de qqc. (auprès de qqn). Tirer gloire ou avantage de quelque chose (auprès de quelqu'un). S'ils [les hommes supérieurs] réussissent et qu'ils finissent par avoir le dessus sur les routines, ils ont pour eux, à leur tour, les incapables, qui se font un mérite d'outrer leurs pratiques, et qui gâtent encore tout ce qu'ils touchent (Delacroix,Journal,1853, p.78).Les hommes qui avaient dépassé les rigueurs et les soupçons de Robespierre avaient assassiné Robespierre, et ils essayaient en vain de s'en faire un mérite auprès de la nation (Sand,Hist. vie, t. 1, 1855, p.202).[Françoise] se faisait mérite auprès de moi des services qu'elle lui rendait [à Albertine] dans ses relations avec moi (Proust,Prisonn.,1922, p.154).
b) P. méton., rare. Le mérite. L'ensemble des gens de mérite. Respecter le mérite. Nous accordons une gratification de 300 livres à un homme de génie qui illustre la nation. (...) donnons liberté entière aux talents; honorons le mérite (Marat,Pamphlets, Charlatans mod., 1791, p.275).
c) [Dans la dénomination de distinctions honorifiques décernées à certaines pers. en raison de leurs qualités, de leurs actions]
Ordre du Mérite agricole*, p. ell. Mérite agricole*.
Ordre du Mérite maritime, p. ell. Mérite maritime. ,,Ordre institué pour récompenser la valeur professionnelle des marins et le mérite des citoyens qui se sont distingués pour le développement de la marine marchande, des ports, des pêches et des sports nautiques`` (Cap. 1936).
Ordre national du Mérite. Ordre créé en 1963 et destiné à récompenser les services rendus, soit dans une fonction publique civique ou militaire, soit dans une activité privée. Grand'croix, grand officier, commandeur, officier, chevalier de l'ordre national du Mérite; brevets des grades et dignités de l'ordre national du Mérite; nomination, promotion dans l'ordre national du Mérite. P. ell. Mérite. La décoration du Mérite, à ruban bleu, est une étoile à six branches doubles émaillée bleu, surmontée d'une bélière formée de feuilles de chêne entrecroisées. L'avers présente l'effigie de la République et le revers deux drapeaux tricolores avec le nom de l'Ordre (L'Aurore,5 déc. 1963, p.8b).
Rem. La création de cet ordre a entraîné la suppression de plusieurs ordres particuliers, parmi lesquels l'ordre du Mérite militaire, l'ordre du Mérite social, l'ordre du Mérite commercial, l'ordre du Mérite touristique et l'ordre du Mérite artisanal.
d) P. ext. Caractère qui rend une personne plus ou moins digne d'éloges ou de reproches. Cette richesse, qui se gagnait ou se perdait, d'ordinaire, suivant le mérite de chacun, faisait de l'instruction le premier besoin (Fustel de Coul.,Cité antique,1864, p.423).Les devoirs ordinaires étaient classés, après correction, par ordre de mérite (Larbaud,F. Marquez,1911, p.48).Cet ordre de préférence tient compte uniquement des titres et mérites des candidats (Encyclop. éduc.,1960, p.327).
À chacun selon ses mérites, être traité selon ses mérites:
4. ... il ne devait rien être, pour commencer, qu'un simple soldat. Aussi prit-il rang dans le bataillon qu'on lui assigna et sut-il s'y conduire en soldat modèle. À ceux qui firent d'abord mine de le plaindre: «À chacun selon ses mérites, répondit-il. Je n'aurais peut-être pas su commander!... C'est moins que j'apprenne à obéir!» Verne,500 millions, 1879, p.196.
Par antiphrase. Maudit sois-tu, Selon tes mérites! (Verlaine, Œuvres compl., t. 3, Invect., 1896, p.324).
2. Au sing. ou au plur. Qualité remarquable d'une chose ou d'une personne. On jugeait du mérite d'un prisonnier, c'est-à-dire de son audace et de son intelligence pour les évasions, d'après les précautions prises pour s'assurer de lui (Vidocq,Mém., t. 1, 1828-29, p.204).Eustache Deschamps (...) vanta les mérites de la ballade équivoque et rétrograde, où chaque vers devait commencer par la syllabe qui terminait le précédent (Jeux et sports,1967, p.751):
5. ... les Bordelais ne se trompent guère plus sur les autres ni sur eux-mêmes que sur ce vin dont ils devinent après un seul reniflement et deux ou trois clappements, l'âge, la provenance et le mérite exact. Mauriac,Écrits intimes, Commenc. d'une vie, 1932, p.67.
P. plaisant. Ces mets qui n'avaient d'autre mérite que d'avoir coûté cher (Brillat-Sav.,Physiol. goût,1825, p.267).
SYNT. Grand(s), rare(s), singulier(s) mérite(s); mérite(s) exceptionnel(s), incomparable(s), incontestable(s), particulier(s), supérieur(s); les mérites d'un texte, d'une toile; avoir un/des mérite(s); (ne pas) être sans mérite(s); apprécier, connaître, diminuer, estimer, juger les mérites de qqc. ou qqn; attribuer, trouver des mérites à qqc. ou qqn; l'emporter en mérite sur qqc. ou qqn; mérites comparés de plusieurs choses, plusieurs personnes; comparer, opposer les mérites de plusieurs choses, plusieurs personnes; énumérer les titres et les mérites de qqn; mérites et défauts; mérites et inconvénients.
Loc. adj., rare. De mérite; de grand mérite; d'un rare mérite. De qualité; d'une grande qualité. Ce qu'on ne sait pas assez, c'est que Venise regorge de sculptures, de bas-reliefs, de figures de marbre et de bronze du plus rare mérite (Gautier,Italia,1852, p.298).
[Suivi d'un déterm. adj. ou subst. spécifiant la nature du mérite] Mérite littéraire de qqc. ou qqn; mérite scientifique de qqc. ou qqn. Il y a deux caractères (...) qui ont un véritable mérite de nouveauté et d'éloquence (Constant,Journaux,1804, p.128).Une fort bonne comédie, et qui avait un grand mérite de composition (Stendhal,Racine et Shakspeare, t. 1, 1823, p.35):
6. Ils [les amis de Gontran] avaient eu toutes les femmes cotées sur le marché galant (...) et parlaient entre eux de leurs mérites amoureux comme des qualités d'un cheval de courses. Maupass.,Mt-Oriol,1887, p.215.
En partic. Agrément, avantage propre à quelque chose. Le mérite de Noirmoutiers, c'est que nous n'avons pas de voisins (Mérimée,Abbé Aubain,1847, p.153).A fait rire aussi l'histoire de Renan ayant mal au coeur chez Brébant, pendant le siège, au cours d'une conversation sur les mérites de la viande de rat (Green,Journal,1944, p.127).Turandet et Marceline (...) discutent des mérites ou démérites des machines à laver (Queneau,Zazie,1959, p.54).
Avoir le mérite de + subst. ou inf.Avoir le mérite de la nouveauté. Ces tableaux de remplissage que personne ne voit et qui n'ont même pas le mérite d'être décoratifs (Réau,Archives bibl., musées,1909, p.38).De telles tentatives ont eu cependant le mérite d'aboutir à d'utiles confrontations et à la collecte (...) de matériaux abondants (Traité sociol.,1968, p.442).
Prononc. et Orth.: [meʀit]. Ac. 1694, 1718: merite, dep. 1740: mé-. Étymol. et Hist. 1. Début xiies. «salaire, récompense» (Benedeit, St Brendan, éd. E. G. R. Waters, 64) seulement en a. fr., v. Gdf.; 2. a) début xiies. etre de tel merite «avoir le pouvoir (de)» (Id., ibid., 1441); b) 1181-98 par sa merite «par sa valeur» (Eructavit, 1194 ds T.-L.); c) ca 1200 plur. merites (d'un saint) (Dialogue Grégoire, éd. W.Foerster, p.212, 9); 1680 les mérites de Jesus-Christ (Rich.); 3. ca 1200 «ce qui donne droit à (une récompense, un châtiment)» (Elie de St Gille, éd. G. Raynaud, 1034: Par selonc le merite le loier en avrès); 1258 hom de haute merite (Mahomet, 1037 ds T.-L.); 4. 1636 «qualité morale remarquable» (Corneille, Cid, I, 2 ds Œuvres, éd. Ch. Marty-Laveaux, t. 3, p.111); 5. 1668 «habileté, talent» (La Fontaine, Fables, VIII, 8 ds Œuvres, éd. H. Régnier, t. 2, p.248); 6. 1671 se faire un mérite de (Molière, Psyché, III, 3 ds Théâtre, éd. R. Bray, p.60); 7. 1759 ordre du Mérite militaire (Ordonnance ds Isambert, Recueil gén. des anc. lois fr., t. 22, p.280). Empr. au lat. meritum (de merere «gagner, mériter», v. mériter) «gain, salaire», «service (bon ou mauvais); conduite (vis-à-vis de quelqu'un)», «acte, conduite (qui justifie une récompense, un châtiment)», «valeur» en b. lat., et spéc. en lat. chrét., surtout au plur. «valeur spirituelle, fait d'être digne de la miséricorde divine»; en a. fr. merite est surtout fém. en tant que représentant du lat. médiév. plur. merita (v. FEW t. 6, 2, pp.33-35). Fréq. abs. littér.: 3519. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 7410, b) 4429, xxes.: a) 3498, b) 4164. Bbg. Nadal (O.). Le Sentiment de l'amour dans l'oeuvre de P. Corneille. Paris, 1948, pp.287-290. _ Stefenelli (A.). Der Synonymenreichtum der altfranzösischen Dichtersprache. Wien, 1967.

Wiktionnaire

Nom commun - français

mérite \me.ʁit\ masculinNote : Ne s’emploie qu’au singulier, quand il est pris dans un sens collectif ; mais, pris dans un sens distributif, il peut avoir un pluriel.

  1. Ce qui rend une personne digne d’estime.
    • L’auteur de l’explication, Florentin de Thierrat, était né à Mirecourt vers la fin du XVIe siècle ; ce fut un jurisconsulte de grand mérite, tout à la fois habile, conciliant ; on l’appelait l’arbitre de la province. — (Gustave Fraipont, Les Vosges, 1895)
    • Mais les hommes n’échappent pas à leur destinée, et la mienne consiste à gagner deux mille francs. Je ne suis point né pour acquérir de la fortune, et je m’en consolais, jadis, en me disant que chacun, sur la terre, est payé selon ses mérites. — (Octave Mirbeau, Lettres de ma chaumière : La Tête coupée, A. Laurent, 1886)
    • (Ironique)Le sulpicien Godet, qu’elle prit pour son directeur et pour directeur de Saint-Cyr, était un cuistre de mérite ; c’est à peu près la définition qu’en donne Saint-Simon qui en fait cas. — (Jules Michelet, Du prêtre, de la femme, de la famille, Hachette & Paulin, 1845 (3e édition), p. 94)
    • Reconnaître, apprécier, considérer, honorer le mérite.
    • Il faut donner les emplois au mérite et non à la faveur.
    • Il y a beaucoup de mérite à confesser ses torts.
    • Ces deux hommes sont également remarquables, mais par des mérites différents.
    • Le mérite est un mode de justification des inégalités très commode, que l’on mobilise pour décrire et légitimer l’ordre social.— (Annabelle Allouch interviewée par Alice Raybaud « Le mérite est un mode de justification des inégalités très commode », selon la sociologue Annabelle Allouch, Le Monde, 2 septembre 2021)
  2. Ce que les choses ont de bon et d’estimable.
    • Si les pièces qu’on y insère n’ont pas toutes le même mérite, au moins est-on sûr de n’y jamais rencontrer de ces fades et plattes rimailles qui, tant de fois on servi de prétexte à calomnier la Poésie. — (Journal de Paris, n°1, 1er janvier 1777, p. 1)
    • Actuellement le jeu chiraquien, malgré son ineptie, a le mérite d'empêcher le glissement d'une fraction de l’électorat « autoritaire » vers le PCF. — (Emmanuel Todd, Le Fou et le Prolétaire, 1979, réédition revue et augmentée, Paris : Le Livre de Poche, 1980, page 208)
    • S'ensuivirent quelques mondanités sur les mérites comparés de liqueurs d'hommes. Accord autour du Rebel Yell, un rince-cochon de première, distillé parcimonieusement par des bootleggers fous. — (Michel Embareck, Sur la ligne blanche: polar avec rock'n roll, show-biz et langue électrique, Éditions Publie.net (collection Mauvais Genres), 2012, p. 94)
    • Armé d'un coupe-papier, tu sabres la liasse sous blister, survoles fébrilement l'introduction où Jean-Paul expose les mérites comparés des bétons bitumineux, des bétons autoplaçants, des bétons fibrés, des bétons précontraints, des bétons cyclopéens, […]. — (Julia Deck, Viviane Élisabeth Fauville, Éditions de Minuit, 2012, chap. 11)
  3. (Religion) Ce qui rend Dieu miséricordieux pour ses fidèles. — Note : Dans cette acception, le pluriel est aussi usité que le singulier.
    • Dieu nous jugera selon le mérite de nos œuvres.
    • Dieu nous traitera suivant nos mérites.
  4. (Au pluriel) (Spécialement) (Religion) Les souffrances et la mort de Jésus-Christ, les bonnes œuvres des saints, en tant qu’elles ont satisfait, pour les adeptes, à la justice divine.
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

MÉRITE. n. m.
Ce qui rend une personne digne d'estime. Mérite supérieur, éminent. Mérite personnel. Un homme de mérite, d'un mérite rare. Ce sont des gens de mérite. Avoir du mérite, bien du mérite. Avoir un mérite réel. Être plein de mérite. Il n'est pas sans mérite. Cela est dû à son mérite. Son peu de mérite est cause que.... Reconnaître, apprécier, considérer, honorer le mérite. Il faut donner les emplois au mérite et non à la faveur. Il réunit tous les genres de mérite. Il a le mérite de savoir se taire et parler à propos. Il n'y a pas grand mérite à cela. Il y a beaucoup de mérite à confesser ses torts. En parlant des Choses, il se dit de Ce qu'elles ont de bon et d'estimable. Le temps seul décide du mérite des ouvrages. Cette pièce n'est pas sans mérite. Sa modestie rehausse le mérite de sa belle action.

MÉRITE ne s'emploie qu'au singulier, quand il est pris dans un sens collectif, comme dans tous les exemples précédents; mais, pris dans un sens distributif, il peut avoir un pluriel. Ces deux hommes sont également remarquables, mais par des mérites différents.

MÉRITE signifie aussi Ce qui rend Dieu miséricordieux pour nous; dans cette acception, le pluriel est aussi usité que le singulier. Dieu nous jugera selon le mérite de nos œuvres. Dieu récompense ou châtie suivant le mérite. Dieu nous traitera suivant nos mérites. Cette dernière locution a passé dans la conversation, où elle se prend d'ordinaire en mauvaise part. Il sera traité selon ses mérites. Les mérites de la Passion de JÉSUS-CHRIST, ou simplement Les mérites de JÉSUS-CHRIST, Ses souffrances et sa mort, en tant qu'elles ont satisfait pour nous à la justice divine. Les mérites des saints, Les bonnes œuvres des saints. Se faire un mérite de quelque chose, Tirer gloire, tirer avantage d'avoir fait quelque chose. On dit dans un sens analogue : Se faire un mérite de quelque chose, auprès de quelqu'un. Se donner le mérite d'une chose auprès de quelqu'un.

Littré (1872-1877)

MÉRITE (mé-ri-t') s. m.
  • 1Ce qui rend une chose digne de récompense ou de punition. Toute action de miséricorde fera placer chacun en son rang selon le mérite de ses œuvres, Sacy, Bible, Ecclésiast. XVI, 15. Comment la vie active et la vie contemplative ont chacune leur mérite devant Dieu, Bossuet, États d'orais. IX, 13. Humble dans les grandes choses, grande dans les petites, et joignant surtout à la pureté de ses intentions le mérite de l'obéissance, Fléchier, Panégyr. Ste Thér. De ta constance ailleurs va montrer les mérites, Th. Corneille, Ariane, III, 4. Que ce soit un courtisan fidèle ou un gentilhomme de Bonaparte [qui ait imaginé de donner Chambord au duc de Bordeaux], c'est la même chose pour nous qui n'y saurions avoir jamais d'autre mérite que celui de payer, Courier, Simple discours.

    Se faire un mérite de quelque chose, tirer gloire, tirer avantage d'avoir, de faire quelque chose. Sans que de mon pouvoir je me fasse un mérite, Molière, Psyché, III, 3. Elle est toujours l'objet de la jalousie de la Plessis, qui se fait un mérite auprès de ma mère de la haïr comme le diable, Sévigné, 246. Se faisant un mérite de sa complaisance, Bossuet, Hist. I, 11. Et loin de repousser le coup qu'on vous prépare, Vous voulez vous en faire un mérite barbare, Racine, Iphig. IV, 4. Ils se font un mérite de leur ignominie, Massillon, Pet. car. Drapeaux.

  • 2Ce qui rend une personne digne de récompense ou de punition. Les méchants sont soufferts pour l'instruction ou pour le mérite des justes, Massillon, Carême, Mélange.

    En ce sens il se dit très souvent au pluriel. Proportionnez vos vœux à vos mérites, Rotrou, Vencesl. I, 4. Ce peuple tantôt châtié, et tantôt consolé dans ses disgrâces, par les différents traitements qu'il reçoit selon ses mérites, rend un témoignage public à la Providence qui régit le monde, Bossuet, Hist. II, 5. Qu'il soit récompensé par delà ses mérites, Delavigne, Paria, IV, 3.

    En ce sens et au pluriel il prend quelquefois le caractère du langage familier. …Est-ce un sujet pourquoi Vous fassiez sonner vos mérites ? La Fontaine, Fabl. IV, 3. Vous m'honorez vraiment par delà mes mérites, Regnard, Ménechmes, III, 5.

    Familièrement et ordinairement en mauvaise part. Il sera traité selon ses mérites.

    Par dérision, faire valoir tous ses mérites, exagérer ses services.

  • 3Les mérites de la passion de Jésus-Christ, ses souffrances et sa mort, en tant qu'elles ont satisfait pour les hommes à la justice divine et qu'elles leur confèrent les effets de la grâce. Sans la prière, quelle part avez-vous aux mérites de Jésus-Christ ? Bourdaloue, 5e dim. après Pâques, Dominic. t. II, p. 199.

    Les mérites des saints, les bonnes œuvres des saints.

    Les mérites, les bonnes œuvres, par rapport à la récompense que Dieu y attache. Nous agissons de nous-mêmes ; ce qui fait que nous avons des mérites qui sont véritablement nôtres, contre l'erreur de Calvin, Pascal, Prov. XVIII. Ils ne s'assurent point en leurs propres mérites, Racine, Athal. III, 7. La certitude que nos peines ne sont pas perdues, que nos dégoûts sont pour nous de nouveaux mérites, Massillon, Carême, Dégoûts. Il [Jésus-Christ] couronnera ses dons, en récompensant mes faibles mérites, Massillon, Carême, Pécheresse.

    Droit à la miséricorde divine. Que les vrais Juifs ne considéraient leur mérite que de Dieu, et non d'Abraham, Pascal, Pens. XX.

    Mérite de condignité, droit sur l'héritage céleste qui appartient au véritable fidèle ayant persévéré jusqu'à la fin dans la foi qui agit par la charité, et ayant par ce moyen accompli la loi selon la mesure de cette vie, Bossuet, Réfut. catéch. Ferry, I, II, 13.

  • 4Ce que les personnes ont de digne et d'estimable. Dans les belles âmes, Le seul mérite a droit de produire des flammes, Corneille, Cid, I, 3. Je sais que le mérite est sujet à l'envie, Corneille, Suréna, IV, 1. La nature fait le mérite, et la fortune le met en œuvre, La Rochefoucauld, Max. 153. Le monde récompense plus souvent les apparences du mérite, que le mérite même, La Rochefoucauld, ib. 166. Quelque disposition qu'ait le monde à mal juger, il fait encore plus souvent grâce au faux mérite qu'il ne fait injustice au véritable, La Rochefoucauld, ib. 455. Les hommes n'ayant pas accoutumé de former le mérite, mais seulement le récompenser où ils le trouvent formé, Pascal, Pens. XXV, 107, édit. HAVET. Que si son rang la distinguait, j'ai eu raison de vous dire qu'elle était encore plus distinguée par son mérite, Bossuet, Duch. d'Orl. Qu'un père si éclairé vous ait témoigné cette confiance jusqu'au dernier soupir… c'est le plus beau témoignage que votre vertu pouvait remporter ; et, malgré tout votre mérite, Votre Altesse n'aura de moi aujourd'hui que cette louange, Bossuet, Louis de Bourbon. Ce sera dans nos jours s'être fait un nom parmi les hommes et s'être acquis un mérite dans les troupes, d'avoir servi sous le prince de Condé, et comme un titre pour commander de l'avoir vu faire, Bossuet, ib. Les deux augustes cardinaux [Richelieu et Mazarin] qui ont soutenu la majesté de cet empire, ont voulu donner la récompense qui était due à son mérite ; mais il a tout refusé, Bossuet, Cornet. Une princesse dont le mérite passe la naissance, encore que sortie d'un père et de tant d'aïeux souverains…, Bossuet, Anne de Gonz. Le mérite ne brille guère ici sans protection, et la protection n'aime pas à se charger du mérite, Maintenon, Lett. à l'abbé Gobelin, 16 mars 1675. Parmi tant de mortels… Il ne s'en trouve pas qui, touchés d'un vrai zèle, Du mérite oublié nous fassent souvenir, Racine, Esth. II, 3. La jalousie et l'émulation s'exercent sur le même objet… avec cette différence que celle-ci est un sentiment volontaire, courageux, sincère… et que celle-là, au contraire, est un mouvement violent, et comme un aveu contraint du mérite qui est hors d'elle, La Bruyère, XI. Personne presque ne s'avise de lui-même du mérite d'un autre, La Bruyère, II. Les hommes et les femmes conviennent rarement sur le mérite d'une femme ; leurs intérêts sont trop différents, La Bruyère, III. Il ne faut rien exagérer, ni dire des cours le mal qui n'y est point : l'on n'y attente rien de pis contre le vrai mérite que de le laisser quelquefois sans récompense ; on ne l'y méprise pas toujours, quand on a pu une fois le discerner, on l'oublie, La Bruyère, VIII. Qui peut, avec les plus rares talents et le plus excellent mérite, n'être point convaincu de son inutilité, quand il considère qu'il laisse, en mourant, un monde qui ne se sent pas de sa perte, et où tant de gens se trouvent pour le remplacer ? La Bruyère, II. Un mérite paisible, mais solide, accompagné de mille vertus, La Bruyère, III. Il ne voulut point que ce qui appartenait au mérite lui pût être disputé par l'argent, rival trop dangereux et trop accoutumé à vaincre, Fontenelle, Fagon. Le mérite est un sot, si l'argent ne l'escorte, Montfleury, Fem. juge et part. II, 4. Ces hommes ne se rendent d'ordinaire sur le mérite d'autrui qu'à la dernière extrémité, Vauvenargues, Conseils à un jeune homme. Il est plus nécessaire, pour vivre en paix, de cacher son mérite que ses défauts, Comte de Caylus, Œuv. t. XII, p. 197, dans POUGENS. Le mérite a sa pudeur comme la chasteté, Duclos, Consid. mœurs, 3. Il se trouvait en ce moment dans cette heureuse position où le mérite peut espérer une indulgence qu'il n'éprouve qu'une fois et même qu'il n'éprouve pas toujours, Condorcet, Haller. Vanter sa race, c'est louer le mérite d'autrui, Mme de Lambert, Avis d'une mère à son fils.

    Avoir du mérite, avoir des qualités, du talent. Ma sœur a du mérite, elle est aimable et belle, Th. Corneille, Ariane, II, 4. Théramène était riche et avait du mérite ; il a hérité, il est donc très riche et d'un très grand mérite, La Bruyère, VII.

    De mérite, se dit des personnes qui ont du mérite. Nommez cet ecclésiastique de mérite, que vous dites avoir assisté à cette assemblée…, Pascal, Prov. XVI. Chrysanthe, homme opulent et impertinent, ne veut pas être vu avec Eugène, qui est homme de mérite, mais pauvre, il croirait en être déshonoré, La Bruyère, VI. Les personnes de mérite et de service sont utiles aux rois, La Bruyère, XI. Parmi les officiers de l'armée, on voyait des gens de mérite, Hamilton, Gramm. 2. Madame la maréchale d'Albret était une personne de mérite sans esprit, Madame de Caylus, Souvenirs, p. 17, dans POUGENS.

    Du premier mérite, qui est au premier rang par son mérite. Il [Scipion] avait toujours auprès de lui des savants du premier mérite, comme Panétius et Polybe, qui l'accompagnaient même dans ses campagnes, Rollin, Hist. anc. Œuvres, XI, 2e part. p. 668, dans POUGENS.

    Au plur. Ces deux hommes ont des mérites différents. Que si ton heur était pareil à tes admirables mérites, Malherbe, III, 2. Qu'il ne vante donc plus ses mérites frivoles, Corneille, Pomp. I, 1. Demeurez avec moi d'accord de vos mérites, Corneille, la Veuve, II, 4. Dans le monde on voit tous les jours des mérites médiocres l'emporter sur des mérites éclatants, Bourdaloue, Myst. Ascens. de J. C. t. I, p. 403. Si la réputation et la vertu pouvaient dispenser d'une loi commune, l'illustre et la vertueuse Julie vivrait encore avec son époux ; ce peu de terre que nous voyons dans cette chapelle couvre ces grands noms et ces grands mérites, Fléchier, duc de Montausier. On lui dut [à Patru] l'ordre, la clarté, la bienséance, l'élégance du discours, mérites absolument inconnus avant lui, Voltaire, Louis XIV, 32. Molière fut, si on ose le dire, un législateur des bienséances du monde ; je ne parle ici que de ce service rendu à son siècle, on sait assez ses autres mérites, Voltaire, ib. 32.

  • 5Ce qu'une chose a de digne d'éloge. Le mérite du style. Cette pièce n'est pas sans mérite. On ôte du mérite aux bienfaits qu'on retarde, Rotrou, Bélis. II, 10. Et sans considérer quel sera le loyer D'une action de ce mérite, La Fontaine, Fabl. VI, 13. Si, pour faire un système, on peut poser toutes sortes de principes, prendre les plus absurdes comme les plus évidents, et faire une complication de causes sans raison, quel mérite peut-il y avoir dans des ouvrages de cette espèce ? Condillac, Traité des syst. ch. 3. Je préférai toujours à ce mérite faux des politesses vaines La grossière vertu des mœurs républicaines, Voltaire, Tancr. I, 2. Le mérite de la difficulté surmontée est quelque chose, Voltaire, Lett. Mme Denis, 22 août 1750.
  • 6Habileté, talent. On cherche les rieurs ; et moi je les évite ; Cet art veut sur tout autre un suprême mérite, La Fontaine, Fabl. VIII, 8. Il [le chevalier de Grignan] est bon juge du mérite de la guerre [mérite militaire], Sévigné, 18 juill. 1690.
  • 7Mérite, les gens de mérite. Honorer le mérite. Affable à tous avec dignité, elle savait estimer les uns, sans fâcher les autres ; et, quoique le mérite fût distingué, la faiblesse ne se sentait pas dédaignée, Bossuet, Duch. d'Orl.

    On l'a dit au singulier pour signifier un homme de mérite. Et l'on peut pour époux refuser un mérite Que pour adorateur on veut bien à sa suite, Molière, F. sav. I, 1.

  • 8 Fig. Importance, en parlant d'une chose. Il a vu cet homme que je vous ai dit qui est habile [un médecin], et qui le traite actuellement selon le mérite de ce mal, Sévigné, 6 oct. 1680.
  • 9 Terme de marine. Apostille favorable portée sur le congé d'un marin, ou à côté de son nom sur les matricules.
  • 10Mérite militaire, nom d'un ordre fondé par Louis XV.

REMARQUE

On dit un homme de mérite, on dit aussi le mérite d'un ouvrage ; mais on ne dit pas un ouvrage de mérite.

HISTORIQUE

XIIIe s. Helas ! se nus [nuls] se doit sauver [faire son salut] dolans, Dont doit par droit ma merite estre grans, Car plus dolans ne s'en part nus de France, Quesnes, Romanc. p. 96. Ainçois le donne [ton cœur] en don tout quite : Si en auras greignor [plus grand] merite, la Rose, 2264. Si vous rens graces et merites De la bonté que vous me dites, ib. 2821. Pechié porte sa peine et bien fait sa merite, J. de Meung, Test. 209. Diex l' [lui] en rendra encore, sachez, tout son merite [tout ce qu'elle mérite], Berte, LIV.

XIVe s. À cely doit on rendre graces et merites, qui est souverain de tous les rois, Chr. de St Denis, t. I, f° 17. Si ceste oppinion estoit vraye que toutes choses adviendroient de necessité selon la constellation des corps celestes, nul n'auroit merite, Songe du vergier, I, 171.

XVe s. Bienfait ne se doit sans merite [recompense] passer, Perceforest, t. V, f° 82.

XVIe s. Croire est de don, non point de merite, Calvin, Inst. 451. Dieu applique le loyer au merite, et la peine au demerite, Amyot, Moral. Épît. 11.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

MÉRITE. Ajoutez :
11 Terme juridique. Valeur d'un acte judiciaire. La cour reçoit un tel opposant en la forme au jugement de tel jour et statuant au fond sur le mérite de son opposition…

HISTORIQUE

Ajoutez : XIIe s. Li queiz [leque] voirement de choses estoit poures, mais de merites fut il riches, li Dialoge Gregoire lo pape, 1876, p. 212.

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Encyclopédie, 1re édition (1751)

MÉRITE, s. m. (Droit nat.) Le mérite est une qualité qui donne droit de prétendre à l’approbation, à l’estime & à la bienveillance de nos supérieurs ou de nos égaux, & aux avantages qui en sont une suite.

Le démérite est une qualité opposée qui, nous rendant digne de la désapprobation & du blâme de ceux avec lesquels nous vivons, nous force pour ainsi dire de reconnoître que c’est avec raison qu’ils ont pour nous ces sentimens, & que nous sommes dans la triste obligation de souffrir les mauvais effets qui en sont les conséquences.

Ces notions de mérite & de démérite ont donc, comme on le voit, leur fondement dans la nature même des choses, & elles sont parfaitement conformes au sentiment commun & aux idées généralement reçues. La louange & le blâme, à en juger généralement, suivent toujours la qualité des actions, suivant qu’elles sont moralement bonnes ou mauvaises. Cela est clair à l’égard du législateur ; il se démentiroit lui même grossierement, s’il n’approuvoit pas ce qui est conforme à ses lois, & s’il ne condamnoit pas ce qui y est contraire ; & par rapport à ceux qui dépendent de lui, ils sont par cela même obligés de regler là-dessus leurs jugemens.

Comme il y a de meilleures actions les unes que les autres, & que les mauvaises peuvent aussi l’être plus ou moins, suivant les diverses circonstances qui les accompagnent & les dispositions de celui qui les fait, il en résulte que le mérite & le démérite ont leurs degrés. C’est pourquoi, quand il s’agit de déterminer précisément jusqu’à quel point on doit imputer une action à quelqu’un, il faut avoir égard à ces différences ; & la louange ou le blâme, la récompense ou la peine, doivent avoir aussi leurs degrés proportionnellement au mérite ou au démérite. Ainsi, selon que le bien ou le mal qui provient d’une action est plus ou moins considérable ; selon qu’il y avoit plus ou moins de facilité ou de difficulté à faire cette action ou à s’en abstenir ; selon qu’elle a été faite avec plus ou moins de réflexion & de liberté ; selon que les raisons qui devoient nous y déterminer ou nous en détourner étoient plus ou moins fortes, & que l’intention & les motifs en sont plus ou moins nobles, l’imputation s’en fait aussi d’une maniere plus ou moins efficace, & les effets en sont plus avantageux ou fâcheux.

Mais pour remonter jusqu’aux premiers principes de la théorie que nous venons d’établir, il faut remarquer que dès que l’on suppose que l’homme se trouve par sa nature & par son état assujetti à suivre certaines regles de conduite, l’observation de ces regles fait la perfection de la nature humaine, & leur violation produit au contraire la dégradation de l’un & de l’autre. Or nous sommes faits de telle maniere que la perfection & l’ordre nous plaisent par eux-mêmes, & que l’imperfection, le desordre & tout ce qui y a rapport nous déplait naturellement. En conséquence nous reconnoissons que ceux qui répondant à leur destination font ce qu’ils doivent & contribuent au bien du système de l’humanité, sont dignes de notre approbation, de notre estime, & de notre bienveillance ; qu’ils peuvent raisonnablement exiger de nous ces sentimens, & qu’ils ont quelque droit aux effets qui en sont les suites naturelles. Nous ne saurions au contraire nous empêcher de condamner ceux qui par un mauvais usage de leurs facultés dégradent leur propre nature ; nous reconnoissons qu’ils sont dignes de desapprobation & de blâme, & qu’il est conforme à la raison que les mauvais effets de leur conduite retombent sur eux. Tels sont les vrais fondemens du mérite & du démérite, qu’il suffit d’envisager ici d’une vûe générale.

Si deux hommes sembloient à nos yeux également vertueux, à qui donner la préférence de nos suffrages ? ne vaudroit-il pas mieux l’accorder à un homme d’une condition médiocre, qu’à l’homme déja distingué, soit par la naissance, soit par les richesses ? Cela paroît d’abord ainsi ; cependant, dit Bacon, la mérite est plus rare chez les grands que parmi les hommes d’une condition ordinaire, soit que la vertu ait plus de peine à s’allier avec la fortune, ou qu’elle ne soit guere l’héritage de la naissance : en sorte que celui qui la possede se trouvant placé dans un haut rang, est propre à dédommager la terre des indignités communes de ceux de sa condition. (D. J.)

Mérite, en Théologie, signifie la bonté morale des actions des hommes, & la récompense qui leur est dûe.

Les Scholastiques distinguent deux sortes de mérite par rapport à Dieu ; l’un de congruité, l’autre de condignité, ou, comme ils s’expriment, meritum de congruo, & meritum de condigno.

Meritum de congruo, le mérite de congruité est lorsqu’il n’y a pas une juste proportion entre l’action & la récompense : ensorte que celui qui récompense supplée par sa bonté ou par sa libéralité à ce qui manque à l’action ; tel est le mérite d’un fils par rapport à son pere, mais ce mérite n’est appellé mérite qu’improprement.

Meritum de condigno, le mérite de condignité est, quand il y a une juste estimation & une égalité absolue entre l’action & la récompense, comme entre le travail d’un ouvrier & son salaire.

Les prétendus Réformés n’admettent point de mérite de condignité ; c’est un des points entr’autres en quoi ils different d’avec les Catholiques.

Le mérite, soit de congruité, soit de condignité, exige diverses conditions, tant du côté de la personne qui mérite que du côté de l’acte méritoire & de la part de Dieu qui récompense.

Pour le mérite de condignité, ces conditions sont, de la part de la personne qui mérite, 1°. qu’elle soit juste, 2°. qu’elle soit encore sur la terre : de la part de l’acte méritoire, qu’il soit, 1°. libre & exempt de toute nécessité, même simple & relatif ; 2°. moralement bon & honnête ; 3°. surnaturel & rapporté à Dieu. Enfin, de la part de Dieu qui récompense, il faut qu’il y ait promesse ou obligation de couronner telle ou telle bonne œuvre.

Le mérite de congruité n’exige pas cette derniere condition, mais il suppose dans la personne qui mérite qu’elle est encore en cette vie, mais non pas qu’elle soit juste, puisque les actes de piété par lesquels un pécheur se dispose à obtenir la grace, peuvent la lui mériter de congruo ; 2°. de la part de l’acte, qu’il soit libre, bon & surnaturel dans son principe, c’est-à-dire fait avec le secours de la grace.

On ne peut pas mériter de congruo la premiere grace actuelle, mais bien la premiere grace sanctifiante & la persévérance ; mais on ne peut mériter celle-ci de condigno, non plus que la premiere grace sanctifiante, quoiqu’on puisse mériter la vie éternelle d’un mérite de condignité. Montagne, traité de la grace, quest. viij. article 2. paragr. 2.

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Étymologie de « mérite »

(1120) Du latin meritum (« récompense »).
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Provenç. merit, merite ; cat. merit ; esp. port. et ital. merito ; du lat. meritum, chose méritée. L'espagnol et l'italien, qui ont l'accent sur me, viennent du latin meritum, qui a l'accent sur la même syllabe ; mais le provençal et le français font difficulté d'abord pour la forme : l'accent est déplacé ; puis pour le sens : mérite y signifie récompense ; tout porte à croire qu'il faut y voir un substantif tiré du participe meri, de l'ancien verbe merir, qui, tout en venant du latin mereri, avait pris le sens de récompenser. Le sens primitif de mereri est avoir en partage ; comparez μέρος, μόρος, μείρομαι.

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Phonétique du mot « mérite »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
mérite merit

Citations contenant le mot « mérite »

  • Le plagiaire a un mérite : il conserve. De Benjamin Disraeli , 
  • L'importance sans mérite obtient des égards sans estime. Sébastien Roch Nicolas, dit Nicolas de Chamfort, Maximes et pensées
  • Le mérite a sa pudeur comme la chasteté. Charles Pinot Duclos, Considérations sur les mœurs de ce siècle
  • Les hommes et les femmes conviennent rarement sur le mérite d'une femme : leurs intérêts sont trop différents. Jean de La Bruyère, Les Caractères, Des femmes
  • La faveur des princes n'exclut pas le mérite, et ne le suppose pas aussi. Jean de La Bruyère, Les Caractères, Des jugements
  • Il y a du mérite sans élévation, mais il n'y a point d'élévation sans quelque mérite. François, duc de La Rochefoucauld, Maximes
  • Nous pouvons paraître grands dans un emploi au-dessous de notre mérite, mais nous paraissons souvent petits dans un emploi plus grand que nous. François, duc de La Rochefoucauld, Maximes
  • Quand il s'agit d'obtenir les honneurs, on rame avec le mérite personnel, et on vogue à pleines voiles avec la naissance. Charles de Secondat, baron de La Brède et de Montesquieu, Mes pensées
  • Le mérite produit une inégalité juste. Nicolas Edme Rétif, dit Restif de La Bretonne, Le Thesmographe
  • Si notre époque, si notre civilisation courent à une catastrophe, c'est encore moins par aveuglement que par paresse et par manque de mérite. Jules Romains pseudonyme littéraire devenu ensuite le nom légal de Louis Farigoule, Les Hommes de bonne volonté, Montée des périls , Flammarion
  • Le mérite envie le succès, et le succès se prend pour le mérite. De Jean Rostand , 
  • Le monde récompense plus souvent les apparences du mérite que le mérite même. De François de La Rochefoucauld / Maximes , 
  • Si un peuple a les seuls gouvernements qu'il mérite, quand mériterons-nous de n'en avoir pas? De Paul-Jean Toulet / Monsieur du Paur , 
  • La récompense du mérite est le mérite même. De Christine de Suède / L'Ouvrage du loisir , 
  • Il faut peu de mérite pour gagner de l'argent par chance, mais beaucoup de chance pour gagner de l'agent par mérite ! De Claude Frisoni , 
  • Un livre qui ne mérite pas d’être relu ne méritait pas davantage d’être lu. De Jaume Cabré / Confiteor , 
  • On est toujours assis à la place qu'on mérite, le paradoxe c'est que les meilleures places ne sont pas toujours occupées par les plus méritants. De Popeck / On n’est pas des sauvages , 
  • Les jeunes auteurs d'aujourd'hui ont oublié les problèmes du cœur humain en conflit avec lui-même, qui eux seuls peuvent donner de beaux textes. Car il n'y a que cela qui mérite d'être écrit, qui mérite toute cette douleur et toute cette sueur. De William Faulkner / Discours pour le Prix Nobel de Littérature, 1950 , 
  • Toute peine mérite salaire. De Proverbe français , 
  • Jamais un envieux ne pardonne au mérite. De Pierre Corneille , 
  • Toute question ne mérite pas réponse. De Publius Syrus , 
  • Nous avons fourni un travail considérable et fait de nombreux sacrifices durant nos années d’études en CPGE. Certains sont même allés jusqu’à faire une troisième année supplémentaire très éprouvante dans le seul but de pouvoir intégrer cet Institut d’études politiques (IEP). Nous nous sommes confrontés à l’un des concours les plus durs de France avec l’espoir de pouvoir faire nos preuves et d’ainsi mériter dignement nos places au sein de Science Po Lyon. Mediacités, « Est-ce ainsi que Science Po Lyon traite le mérite ? » | Mediacités
  • Enfin, la School of Wine & Spirits Business (SWSB) offre 4 bourses au mérite à des étudiants talentueux qui vont rejoindre à la rentrée le MBA Wine & Spirit Business. Elles sont délivrées de manière particulièrement sélective par le comité d’experts de la SWSB, sur la base de l’excellence académique du candidat, de son expérience professionnelle et de son entretien avec le directeur du programme. Une bourse "BSB Grand Cru" octroiera 50% de réduction sur les frais de scolarité, deux bourses "BSB Premier Cru" 25% de réduction, et une bourse exceptionnelle 10% de réduction. Studyrama Grandes Ecoles, Excellence, mérite, "coup de pouce": BSB offre plus de 100 bourses cet été
  • La vice-présidente de la Fédération régionale des conciliateurs de justice a été faite Chevalier de l’ordre national du mérite. Une reconnaissance à laquelle elle ne s’attendait pas.  SudOuest.fr, Mont-de-Marsan : Nicole Bouneau décorée de l’ordre national du mérite
  • Je place la qualité et l’ingéniosité de la diplomatie française au niveau qu’elle mérite. Elle est infiniment moins calculatrice qu’elle est habitée par sa foi européenne. Ici, c’est l’Europe : et accomplir son intégration, c’est, en toute circonstance, améliorer le niveau de vie des Européens, leur apporter un supplément d’espoir et lutter contre les dérives autocratiques. Pendant la négociation, si difficile, les leaders européens n’ont pas voulu compliquer les choses en demandant aux pays « illibéraux » de donner des gages aux libertés civiles avant de toucher les subventions. Mais le seul fait que l’Europe progresse suffit à mettre en danger leurs desseins anti-démocratiques. La Pologne et la Hongrie ne pourront pas, à terme, être des ilôts de non-droit dans un océan de liberté. Suis-je trop optimiste ? Pas tant que ça. La présidentielle polonaise n’a été gagnée que de justesse par le PiS, le parti autoritaire actuellement au gouvernement. En Hongrie, Viktor Orban fait  face à une contestation de plus en plus large. Laissons-les se débrouiller avec leurs peuples. Et d’ailleurs, il n’aurait pas été très éthique de conditionner leur accès à l’argent européen à une évolution vers le libéralisme. , L’Europe mérite mieux | Le blog de Richard Liscia
  • Le plagiaire a un mérite : il conserve. De Benjamin Disraeli , 
  • L'importance sans mérite obtient des égards sans estime. Sébastien Roch Nicolas, dit Nicolas de Chamfort, Maximes et pensées
  • Le mérite a sa pudeur comme la chasteté. Charles Pinot Duclos, Considérations sur les mœurs de ce siècle
  • Les hommes et les femmes conviennent rarement sur le mérite d'une femme : leurs intérêts sont trop différents. Jean de La Bruyère, Les Caractères, Des femmes
  • La faveur des princes n'exclut pas le mérite, et ne le suppose pas aussi. Jean de La Bruyère, Les Caractères, Des jugements

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Traductions du mot « mérite »

Langue Traduction
Anglais merit
Espagnol merecido
Italien meritato
Allemand verdient
Chinois 当之无愧
Arabe الاستحقاق
Portugais merecida
Russe заслуженное
Japonais 値する
Basque merezitako
Corse meritu
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Synonymes de « mérite »

Source : synonymes de mérite sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « mérite »

Combien de points fait le mot mérite au Scrabble ?

Nombre de points du mot mérite au scrabble : 7 points

Mérite

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