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Imposer

Définitions de « imposer »

Trésor de la Langue Française informatisé

IMPOSER, verbe

I. − Emploi trans.
A. − [Le suj. désigne un animé] . Vx ou littér. Poser (sur quelqu'un ou quelque chose). Je me penchai pour imposer sur son front le baiser solennel qui consacrait notre mariage (Nodier, Fée Miettes,1831, p. 145).Monté sur un rocher de cette sombre sierra où fut imposé l'énorme monastère [l'Escurial], quel voyageur n'a subi le despotisme de ce paysage (...)! (Barrès, Sang,1893, p. 49) :
1. ... quelle joie donc d'être un escargot. Mais cette bave d'orgueil ils en imposent la marque à tout ce qu'ils touchent. Un sillage argenté les suit. Et peut-être les signale au bec des volatiles qui en sont friands. Ponge, Parti pris,1942, p. 31.
En partic.
Imposer les mains. Poser, étendre les mains sur quelqu'un ou sur quelque chose pour le bénir, le guérir, lui conférer un pouvoir. Les apôtres donnaient le Saint-Esprit en imposant les mains (Ac.). L'étranger (...) imposa les deux mains en signe de deuil sur la tête de l'indienne, car elle avoit perdu son père et sa mère (Chateaubr., Natchez,1826, p. 131).L'évêque (...) m'imposa les deux mains sans mot dire, et il prolongea ce geste, il l'appuya dans l'intention évidente d'y faire passer toute son autorité d'évêque (Billy, Introïbo,1939, p. 144) :
2. ... comme les débauches de la nuit lui avaient donné faim, il pilla le couvent et se mit à table. Les hanaps emplis, il se souvint des moines et les appela. « C'est le moment de consacrer », dit-il. Et il leur ordonna d'imposer les mains sur cette orgie. Pesquidoux, Livre raison,1928, p. 272.
LITURG. CATH. Imposer les Cendres. Déposer sur la tête ou le front d'un pénitent un peu de cendre, à l'entrée du Carême (d'apr. Foi t. 1 1968, s.v. imposition).
TYPOGR. Imposer une feuille. Disposer dans les formes les paquets de composition de manière à obtenir, après l'impression d'une feuille et son pliage, la suite des pages dans leur ordre numérique et avec des marges correctes (d'apr. L. Radiguer, Maîtres imprimeurs et ouvriers typographes, 1903, p. 101).
Au fig., vx. Imposer un nom. Donner un nom. J'ai eu l'attention la plus scrupuleuse à ne pas changer les noms que le capitaine Cook avait imposés aux différens caps qu'il avait reconnus (Voy. La Pérouse,t. 4, 1797, p. 169).Après les trente ou quarante jours de purification, l'accouchée se dispose à revenir à sa cabane : les parents s'y rassemblent pour imposer un nom à l'enfant (Chateaubr., Voy. Amér.,1827, p. 156).V. cercle ex. 9.
B. −
1. [Le compl. d'obj. désigne une chose généralement désagréable, pénible ou difficile] Obliger à subir ou à faire.
a) [Le compl. d'obj. est un subst.] Les conventions théâtrales imposées aux acteurs par la configuration d'un théâtre (Vogüé, Morts,1899, p. 112).Les restrictions cruelles imposées à la distribution du gaz (De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 451).Un réacteur atomique (...) doit être mené avec la même discipline que celle imposée à l'équipage d'un navire (Goldschmidt, Avent. atom.,1962, p. 226).V. avent ex. 4 :
3. ... il était musulman, et sa religion, ainsi que les usages, lui imposaient la plus grande réserve avec les femmes quand elles n'ont pas été achetées par un bon contrat, ou prises à la guerre. Mille, Barnavaux,1908, p. 204.
SYNT. Imposer son autorité, ses conditions, une contrainte, des devoirs, une épreuve, son joug, sa loi, une obligation, une pénitence, sa présence, une tâche, sa volonté (à qqn); privations, sacrifices imposés par la nécessité.
Imposer (le) silence. Faire taire, ne pas laisser parler. Ne m'interrompez pas, dit Camusot en imposant silence à Lucien qui voulait parler, je ne vous interroge pas encore (Balzac, Splend. et mis.,1846, p. 448).Au beau milieu du silence qu'imposa la majesté d'une pièce de pâtisserie (Boylesve, Leçon d'amour,1902, p. 51).
Au fig. [Le compl. second. désigne le siège ou une manifestation de l'affectivité humaine] Réprimer l'agitation, les élans. Imposer silence à ses passions. Il cherchait à imposer silence à son cœur, pour concentrer toute la force de son attention dans la discussion du parti à prendre (Stendhal, Chartreuse,1839, p. 133).Le véritable devoir consiste à imposer silence aux sentiments d'une stérile humilité (Martin du G., Thib., Mort père, 1929, p. 1327).
[Le compl. second. désigne des détracteurs ou leurs propos] Enlever tout crédit, la possibilité de poursuivre des attaques. Imposer silence aux médisants, à la calomnie, au mensonge (Ac.). Il est aisé de voir où cette inculpation [de magie] l'aurait conduit (...) s'il n'eût eu l'esprit d'imposer silence à ses ennemis en faisant bâtir l'église Saint-Jacques-la-Boucherie (Jouy, Hermite, t. 4, 1813, p. 32).
Emploi pronom. réfl. indir. Malgré la contrainte qu'il s'imposait pour être aimable, sa figure vieillotte ne parvenait pas à plaire (Alain-Fournier, Meaulnes,1913, p. 256).Pour se punir, il s'était imposé son châtiment coutumier : dix fois de suite une longue épingle dans la cuisse (Daniel-Rops, Mort,1934, p. 14) :
4. ... pour chaque dîner, où son devoir de fidèle sujet l'avait obligé à manger comme tout le monde, il s'imposait une pénitence de deux journées de nourriture au pain et à l'eau. Stendhal, Chartreuse,1839, p. 130.
Emploi pronom. passif. Être nécessaire. Prendre les mesures qui s'imposent. Plus une tâche est difficile, plus aussi elle s'impose à des consciences comme les nôtres (Gobineau, Pléiades,1874, p. 99).Duputel était un des grands aigles du régime. Les obsèques nationales s'imposaient (Vogüé, Morts,1899, p. 428).
En partic. (cf. infra I C) [Le compl. d'obj. désigne une somme d'argent] Faire payer d'autorité. Imposer une contribution, un tribut. Les charges qu'on impose au contribuable (Renan, Avenir sc.,1890, p. 511).La taxe extraordinaire imposée sur les charges de secrétaire du roi (Mauriac, Vie Racine,1928, p. 209) :
5. L'argent manquait : une nouvelle taille fut imposée; et l'on était si pressé, qu'au lieu de laisser les gens des bonnes villes lever eux-mêmes leur impôt (...) des commissaires du roi furent envoyés partout... Barante, Hist. ducs Bourg., t. 1, 1821-24, p. 350.
Emploi pronom. réfl. indir. Une loi autorise ce département à s'imposer extraordinairement deux centimes additionnels (Ac.).
b) [Le compl. d'obj. est un inf. introd. par de] Comme devoirs de vacances on m'avait simplement imposé de lire Télémaque (Loti, Rom. enf.,1890, p. 183).La situation imposait de s'en tenir à la défense des Hauts-de-Meuse (Joffre, Mém., t. 1, 1931, p. 312) :
6. M. Homan me punit d'arrêt fixe, ensuite me relégua seul dans une cour voisine, enfin m'imposa de marcher à vingt mètres derrière le dernier rang pendant la promenade. Billy, Introïbo,1939, p. 26.
Emploi pronom. réfl. indir. Parfois, il s'imposait bien de rester à la maison jusqu'au soir; mais c'était, en fin de compte, se priver sans profit pour la malade (Châteaubriant, Lourdines,1911, p. 50) :
7. ... un athée, c'était (...) un fanatique (...) qui s'imposait de prouver la vérité de sa doctrine par la pureté de ses mœurs, qui s'acharnait contre lui-même et contre son bonheur au point de s'ôter le moyen de mourir consolé... Sartre, Mots,1964, p. 79.
2. Faire accepter, faire admettre par une pression morale.
a) [Le compl. d'obj. désigne une chose abstr., une manifestation de l'esprit humain] Imposer ses idées, son jugement, son opinion, sa pensée, ses vues; imposer le respect. Il avait beau se défendre d'imposer aux autres sa façon de sentir, il n'était pas tolérant (Rolland, J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p. 1536).Comment, par quels moyens, le peintre a-t-il contribué à imposer cette notion : l'art? (Huyghe, Dialog. avec visible,1955, p. 65) :
8. ... il dominait la cliente, il se hâtait de l'expédier pour passer à une autre, en lui imposant son choix, en lui persuadant qu'il savait mieux qu'elle l'étoffe dont elle avait besoin. Zola, Bonh. dames,1883, p. 490.
9. Nulle emphase, chez lui, nulle infatuation; mais une sorte de conviction profonde qui impose la confiance. Gide, Journal,1943, p. 249.
Imposer l'antienne*.
Emploi pronom. réfl. dir. Faire accepter, faire admettre sa valeur, ses mérites. Des hommes (...) qui, par leur maîtrise d'eux-mêmes, savent s'imposer à leurs subordonnés et dominer les événements (Joffre, Mém., t. 1, 1931, p. 370) :
10. Quel honneur, monsieur [Pétain], que de recevoir dans des conjonctures si formidables, la plénitude du commandement, que de s'imposer à tous comme celui dont les circonstances proclament qu'il faut ou le prendre ou périr! Valéry, Variété IV,1938, p. 83.
Emploi pronom. passif. L'idée était revenue, peu à peu enveloppante, pressante; et, maintenant, elle s'imposait, de toute la force victorieuse de sa simplicité et de son absolu (Zola, Débâcle,1892, p. 531).L'impressionnisme, bon ou mauvais, s'était imposé à l'attention du public (Mauclair, Maîtres impressionn.,1923, p. 157) :
11. ... là où le monothéisme a été franchement reconnu, c'est-à-dire dans le monde chrétien, il a immédiatement occupé une place centrale et s'est imposé comme le principe des principes. Gilson, Espr. philos. médiév.,1931, p. 46.
b) [Le compl. d'obj. désigne un auteur, un artiste considéré du point de vue de son œuvre] Maugis est un de ceux qui ont « découvert » Wagner en France. Il l'a imposé, d'années en années, par des chroniques têtues (Colette, Cl. s'en va,1903, p. 185).Quand Taine veut imposer un romancier, c'est Hector Malot; Anatole France un poète, c'est Frédéric Plessis (Paulhan, Fleurs Tarbes,1941, p. 19).
Emploi pronom. réfl. dir. Nul pédantisme, aucune affectation de grandeur vaniteuse ou de morgue choquante : tout naturellement il [Rubens] s'impose (Fromentin, Maîtres autrefois,1876, p. 38).Renoir s'impose à la déférence par l'obstination de son labeur, par l'originalité de sa vision, par sa réunion des dons fondamentaux de son art (Mauclair, Maîtres impressionn.,1923, p. 139).
3. [Le compl. d'obj. désigne une pers. gén. indésirable] Obliger à accepter, à admettre. Un père est un domestique imposé par la nature; on le dépose au vestiaire avec les parapluies, quand il est grognon et laid (Taine, Notes Paris,1867, p. 74).La Chambre, de son autorité, impose à une circonscription un représentant qu'un arrêt ayant la force de chose jugée déclare criminel (Barrès, Cahiers, t. 11, 1918, p. 390).V. cafard2ex. 3.
Emploi pronom. réfl. dir. Il s'imposa comme directeur de l'entreprise (Ac.1878-1935).On donne des dîners partout; as-tu seulement tenté une démarche pour faire inviter ta femme et ta fille? − J'ai pour principe de ne jamais m'imposer (Theuriet, Mar. Gérard,1875, p. 43) :
12. Dans l'état précaire où était son autorité dans le pays, il ne croyait pouvoir gouverner qu'en faisant peur et en s'imposant comme un souverain arbitre des différends industriels. Sorel, Réflex. violence,1908, p. 308.
C. − Le plus souvent au passif. Soumettre à un impôt (v. supra I B 1 en partic.).
1. [Le compl. d'obj. désigne une pers. ou une collectivité] Imposer qqn à tant (Ac.). Le contribuable qui est trop peu imposé ne réclame pas pour qu'on augmente sa quote, et celui qui est surtaxé paie mal (Say, Écon. pol.,1832, p. 513) :
13. ... Mazarin (...) imagina d'établir une taxe sur les principales maisons de Paris, mais (...) ayant rencontré dans les intéressés quelque résistance, il se borna à ajouter les cinq millions dont il avait besoin au brevet général de la taille. Il voulait imposer les citoyens les plus opulents; il se trouva avoir imposé les plus misérables... Tocqueville, Anc. Rég. et Révol.,1856, p. 182.
Emploi pronom. réfl. dir. Autoriser un département à s'imposer extraordinairement (Ac.).
2. [Le compl. d'obj. désigne une chose] Imposer le vin, le sel, les cartes. Imposer les allumettes (Ac. 1935). Si l'on impose chez nous les cotonnades, la demande de ces produits devenant moins forte, les services productifs de nos fabricans seront moins payés (Say, Écon. pol.,1832p. 527).Le bruit s'était mystérieusement répandu (...) que tout chapelet serait prochainement imposé d'une taxe de cinq francs cinquante (Tharaud, Fête arabe,1912, p. 241) :
14. ... le percepteur des contributions n'osait pas trop vous vexer si vous étiez en retard sur la somme annuelle de cent francs à laquelle étaient imposées vos petites propriétés. Stendhal, Chartreuse,1839, p. 465.
II. − Emploi intrans.
A. − Vx ou littér. (En) imposer. Tromper par de fausses apparences. S'en laisser imposer. Les côtes de la tortue (...) s'engrènent entre elles et avec les vertèbres du dos pour former le test. Ces sutures en ont même imposé à plusieurs naturalistes, qui ont pris des tests fossiles de tortue pour des fragmens de crânes humains (Cuvier, Anat. comp., t. 1, 1805, p. 124) :
15. Quel attrait (...) me ramène toujours vers tes mânes, ô Clytie? Tu m'as trompé pourtant, c'est-à-dire tu m'en as imposé par orgueil et par fausse gloire, tu m'as entouré de faux prestiges et de fables (...) sans me dire (...) la vérité... Sainte-Beuve, Poisons,1869, p. 14.
16. Camarade, ne crois à rien; n'accepte rien sans preuve (...). L'appétit de savoir naît du doute. Cesse de croire et instruis-toi. L'on ne cherche jamais d'imposer qu'à défaut de preuves. Ne t'en laisse pas accroire. Ne te laisse pas imposer. Gide, Nourr. terr.,1897, p. 295.
B. − En imposer (usuel) ou imposer (vx ou littér.). Inspirer l'admiration, le respect, parfois la crainte. Un verbe énorme qui en imposait aux badauds (Rolland, J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p. 1530).La vérité est la seule force qui impose, parce qu'elle est la seule puissance qui protège (Massis, Jugements,1923, p. 218).V. aimable ex. 23 :
17. Non, il [ton mari] ne t'impose pas, tu n'as pas pour lui ce profond respect, cette tendresse pleine de crainte qu'une véritable amante a pour celui en qui elle voit un Dieu. Balzac, Mém. jeunes mar.,1842, p. 307.
18. Ce peuple expansif et aimable s'en laisse imposer par la morgue pédante et la nullité prétentieuse des pontifes de la cravate blanche : (...) ils ont seuls son admiration secrète et sa confiance absolue! Pailleron, Monde où l'on s'ennuie,1869, I, 2, p. 8.
Rem. ,,En imposer a été pris souvent dans le sens précédent [sens II B]; mais il signifie plus exactement tromper, abuser, surprendre, en faire accroire`` (Ac.).
REM.
Imposeur, subst. masc.Typographe qui procède à l'imposition (v. imposition A et imposer I A). Nous ne parlerons que pour mémoire des clichés montés sur bois, qui n'offrent aucune difficulté, sauf les vices d'équerre, auxquels l'imposeur est obligé de remédier (E. Leclerc, Nouv. manuel typogr.,1932, p. 345).
Prononc. et Orth. : [ε ̃poze], impose [ε ̃po:z]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. 1302 trans. « imputer à tort » (Cart. de S.-Bertin, IV, 5, Guérard ds Gdf.); 1536 [éd.] id. « faire croire une chose fausse » (Calvin, Instit. chrétienne, éd. J.-D. Benoit, III, XVI, § 1); 1596 intrans. « faire accroire, tromper » (Hulsius). II. 1. a) 1370-72 « frapper d'une peine » (Oresme, Ethiques, éd. A. D. Menut, fol. 27c : Les painnes que l'en impose a ceulz qui pechent); b) xives. [ms.] « faire subir, faire accepter par contrainte » ces charges furent ... imposees (Bersuire, Trad. de T. Live, ms. B.N. fr. 20312 ter, fo21 verso ds Littré); c) 1342 imposer par jugement ... silance ... ausdiz acuseurs et denonceurs (A.N. JJ 74, fo7 vods Gdf. Compl., s.v. silence); 1358 imposer silance à son procureur (Lett. de remission, Bibl. des ch., 5esérie, t. 1, p. 82 ds Littré); 2. a) 1332, 29 janv. impouser a qqn « soumettre quelqu'un à un impôt » (Ord., XII, 15 ds Gdf. Compl., s.v. emposer); 1422 imposer qqn « frapper d'un impôt » (Doc. dans Livre Roisin, éd. Brun-Lavainne, p. 192 ds T.-L.); b) 1690 « lever un tribut sur les marchandises » (Fur.); 3. 1552 « se faire une obligation de » (Du Bellay, Enéide, livre III, 717, éd. H. Chamard, t. 6, p. 257); 4. a) 1564 trans. « faire accepter par une pression morale » (Calvin, op. cit., IV, X, § 1 : on ne doit imposer nécessité aux consciences ès choses desquelles elles sont affranchies par Iesus-Christ); b) 1715 id. « faire une forte impression, commander le respect, l'admiration » imposant part. prés. adj. un air imposant (Lesage, Gil Blas, II, III ds Rob.); c) 1735 en imposer (Marivaux, Marianne, 4epart. ds Littré); d) 1828 pronom. « faire reconnaître son ascendant moral ou intellectuel » (Guizot, Hist. civilisation, 4eleçon, p. 25); e) 1732 « impressionner par son importance » en partic. part. prés. adj. un faste imposant (Volt., Zaïre, IV, 5 ds Littré); 1825 « qui est important » une majorité imposante (Brillat-Sav., Physiol. goût, p. 25); en partic. 1855 qui est de forte corpulence l'imposante matrone (Nerval, Bohême gal., p. 145); 5. 1664 « contraindre quelqu'un à admettre une personne indésirable » (Racine, Thébaïde, III, 4); 1829 pronom. « se faire accepter par contrainte » (Boiste). III. 1. 1499 imposer un nom « désigner par un nom spécial » (ds FEW t. 8, p. 64a et b); cf. 1567 (Amyot, Démosth., 6 ds IGLF : ce surnom luy fut imposé); 2. 1530 « poser, mettre sur » (Palsgr., p. 602 : Il ma imposé une grant charge); en partic. 1541 imposer les mains (Calvin, op. cit., IV, XVI, § 7); 3. 1690 impr. (Fur.). Empr. au lat.imponere « placer sur; donner une charge à quelqu'un; imposer un tribut; abuser, tromper » francisé d'apr. poser*; d'abord en a. fr. emposer « poser, mettre sur » 1remoitié xiies. (Psautier Cambridge, 50, 20 ds T.-L.), en partic. emposer [un] num 1119 (Ph. de Thaon, Comput, 554, ibid.) puis imposer par latinisation du préf. (FEW t. 8, 64 a et 74 a). Fréq. abs. littér. : 4 793. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 5 267, b) 3 985; xxes. : a) 6 552, b) 9 814.
DÉR.
Imposable, adj.Qui peut être imposé, qui peut être soumis à l'impôt. Matière imposable (v. assiette de l'impôt). Tous les impôts possibles sur les matières les moins vraisemblablement imposables, un service militaire de plus en plus écrasant (...) tout cela passe sur nos Français comme un chien dans un troupeau (Verlaine, Œuvres posth., t. 2, Voy. Fr., 1896, p. 63).Les privilégiés redoutaient les impôts : une assemblée du clergé, réunie par Brienne qui en espérait un subside, le refusa net, déclara (...) que le peuple français n'était pas imposable à volonté (Bainville, Hist. Fr., t. 2, 1924, p. 23).[ε ̃pozabl̥]. Att. ds Ac. dep. 1798. 1reattest. 1454, 26 juin « qui peut être soumis à l'impôt » imposables et contribuables (Sent. de l'abbé de Vezelai, Hist. d'Auxerre ds Gdf. Compl.); de imposer, suff. -able*. Fréq. abs. littér. : 12.
BBG.Jourjon (A.). Rem. lexicogr. R. Philol. fr. 1917/18, t. 30, pp. 68-69.

Wiktionnaire

Verbe - français

imposer \ɛ̃.po.ze\ transitif 1er groupe (voir la conjugaison) (pronominal : s’imposer)

  1. Mettre dessus. — Note : En ce sens, il ne se dit guère au propre que dans : imposer les mains, l'encens, les cendres.
    • Le sorcier imposait les mains sur les malades ; les malades donnaient une gifle au sorcier, et ils s’en retournaient guéris. Cela coûtait deux sous. — (Octave Mirbeau, Rabalan, 1886)
    • Si l’encens est employé, avant le départ [de la procession], le prêtre impose l’encens dans l’encensoir et le bénit d’un signe de croix, sans rien dire. — (Présentation générale du Missel romain, 2002, no 120 sur ceremoniaire.net → lire en ligne)
  2. (Figuré) Prescrire ou infliger à quelqu’un une chose incommode, pénible ou difficile.
    • Il lui était doux de les avoir auprès de lui, mais il désirait que leur attitude n’offusquât en rien le nouvel esprit qui se manifestait en France, et entendait leur imposer la simplicité qu'il s’imposait à lui-même par goût autant que par calcul. — (Adolphe Thiers, Histoire du Consulat et de l'Empire faisant suite a l'Histoire de la Révolution française, livre 58, tome 19, Paris : chez Lheureux & Cie, 1861, p. 403)
    • Pourquoi deux poids, deux mesures ? Pourquoi certains contrôles techniques sont-ils imposés tyranniquement à certains constructeurs et non à d’autres ? — (Jean Mermoz, Mes Vols, p.108, Flammarion, 1937)
    • Au moindre geste d’improbation, il nous apostrophait et nous imposait silence avec une fureur qui nous touchait sans nous convaincre ; […]. — (Anatole Claveau, Les snobs, dans Sermons laïques, Paris : Paul Ollendorff, 1898, 3e éd., p.36)
    • Au lieu de se trimbaler un gnard qui la ferait tartir et lui imposerait ses quatre volontés, elle suit seule sa petite bonne-femme de chemin. — (Frédéric Dard, San-Antonio, no 59 : Vas-y, Béru !, 1965)
  3. (Par extension) Rendre obligatoire.
    • (Pronominal)[…]; mais comme la mère Désiré agonisait et que quelques autres ne valaient guère mieux, il jugea que l’enquête rigoureuse et sévère qui s’imposait devait lui faire découvrir la source occulte de cette extraordinaire épidémie. — (Louis Pergaud, Un petit logement, dans Les Rustiques, nouvelles villageoises, 1921)
    • Le changement des conditions objectives de la lutte, qui imposait la nécessité de passer de la grève à l’insurrection, fut ressenti par le prolétariat bien avant que par ses dirigeants. — (Lénine, Rapport sur la Révolution de 1905, traduit du russe (Pravda du 22 janvier 1925), Moscou : Éditions du Progrès, 1966, p. 6)
    • Si la topographie l’exige, le préfet peut imposer sur certaines voies l’obligation de munir tout véhicule d’un frein ou d’un dispositif d’enrayage. — (Article 17, Code de la route, France, 30 octobre 1935)
  4. Forcer quelqu’un pour qu’il accueille une personne ou pour qu’il accepte une chose.
    • S'il est un domaine où les pays occidentaux doivent aussi se serrer les coudes, c'est celui de la lutte contre le terrorisme. Forme de guerre moderne, ce dernier joue de la peur pour imposer ses vues. — (Alain Redslob, La traversée de la Seine : De Matignon à l’Élysée ?, Éditions France-Empire, 1987, chap. 4 , §. 3)
    • Deux jours plus tard, la défaite est consommée avec la formation du gouvernement Pétain, décidé à demander l’armistice au plus tôt. Le 25 juin, après trois jours de négociations et de menaces, les Allemands imposent leurs conditions. — (Vincent Joly, Le Soudan français de 1939 à 1945: une colonie dans la guerre, p.45, Karthala éditions, 2006)
    • Andriantsouli ne s'établit pas facilement à Mayotte. Il fut aidé par les troupes anjouanaises qui l’imposèrent comme gouverneur de l'île ; ensuite, il prit sa liberté et se proclama sultan. — (Feyçal, Mayotte, un silence assourdissant, Editions Publibook, 2011, p. 60)
  5. Inspirer du respect, de l’admiration, de la crainte, faire impression.
    • Toutefois, si un magnanime sentiment de fraternité s’imposait sincèrement et définitivement, sans arrière pensée, à tous les esprits européens, alors nous n’aurions pas à nous inquiéter du cosmopolitisme marseillais, intéressant embryon de la civilisation future. — (Ludovic Naudeau, La France se regarde : le Problème de la natalité, Librairie Hachette, Paris, 1931)
    • Sa belle prestance impose le respect.
    • C’est un choix qui s’impose.
  6. (Absolument) Inspirer du respect.
    • C’était le seul moyen d’imposer à ces farouches natures. — (Jules Verne, Les Enfants du capitaine Grant, 1846)
  7. Taxer, en parlant des tributs, des droits, des contributions, des taxes, des impôts que le gouvernement exige des particuliers dans l’intérêt commun.
    • La commune de Nouan sur Loire, département de Loir et Cher , est autorisée à s'imposer extraordinairement, en centimes additionnels à ses contributions directes , la somme de huit cent soixante-six francs, pour être employée à réparer l'église et le presbytère. — (Projet de loi concernant les aliénations, […], demandées par diverses communes, séance du 13 janvier 1810, Corps législatif, extrait du registre des minutes de la Secrétairie d’État, 7 février 1810, p.19)
    • Imposer des droits sur les blés étrangers.
    1. (Par extension) Se dit aussi des matière sur lesquelles on met des impôts.
      • Imposer le vin, le sel, les cartes.
      • Imposer les allumettes.
  8. (Imprimerie) Ranger, disposer les pages qui doivent composer une forme, de telle sorte qu’elles se trouvent dans l’ordre convenable sur la feuille imprimée et pliée.
    • Ces pages sont composées, il faut les imposer.
    • Imposer une feuille.
  9. (Pronominal) Imposer ses convictions, sa domination.
    • Heureusement, l’idée de Copernic a fini par s’imposer puisque ce système fonctionnait mieux et utilisait moins d’hypothèses invérifiées que celui de Ptolémée. — (Barry Williams (traduit par Claude Lafleur), L’astrologie confrontée aux progrès de l’astronomie, dans Le Québec sceptique, no 24, p.41, décembre 1992)
    • Lynette se distingue physiquement du reste du groupe : son physique et sa tenue vestimentaire contrastent avec l’apparence des autres femmes dont les coiffures impeccables et les twin-sets de couleur pastel s’imposent comme les codes de la norme des mères au foyer. — (Aurélie Blot, Héros en séries… Et si c’était nous ?, Plon, 2013)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

IMPOSER. v. tr.
Mettre dessus. En ce sens, il ne se dit guère au propre que dans Imposer les mains. L'évêque impose les mains en donnant la prêtrise. Les apôtres donnaient le Saint-Esprit en imposant les mains. Fig., Imposer un nom, Désigner par un nom spécial, dénommer.

IMPOSER signifie aussi figurément Prescrire, infliger à quelqu'un une chose incommode, pénible ou difficile. En lui donnant cette commission, on lui a imposé une tâche difficile à remplir. Imposer des conditions très dures. Le vainqueur impose la loi aux vaincus. Imposer une servitude au propriétaire d'un domaine. Le devoir si doux que vous impose la nature. Le sacrifice que lui impose la raison. Votre charge vous impose de grandes obligations. S'imposer une tâche. S'imposer une pénitence. Imposer silence, Ordonner qu'on se taise, faire qu'on se taise. Fig., Imposer silence aux médisants, à la calomnie, au mensonge. Imposer silence aux passions, Les réprimer, empêcher qu'elles ne troublent l'âme, qu'elles ne l'agitent.

IMPOSER se dit particulièrement en parlant des Tributs dont on charge les peuples, des droits, des contributions que le gouvernement exige des particuliers dans l'intérêt commun. Imposer une contribution de guerre. Imposer un tribut sur un pays conquis. Imposer des droits sur les blés étrangers. Imposer de nouvelles contributions, de nouvelles charges. Imposer une commune. Une loi autorise ce département à s'imposer extraordinairement deux centimes additionnels, ou de deux centimes additionnels. On dit dans le même sens Imposer quelqu'un à tant. Il se dit, par extension, des Matières sur lesquelles on met des impôts. Imposer le vin, le sel, les cartes. Imposer les allumettes. Il signifie encore Faire une espèce de violence à quelqu'un pour qu'il accueille une personne, pour qu'il accepte une chose. Il voulait nous imposer ses créatures. Je ne prétends pas vous imposer mon opinion. Cet homme cherche à s'imposer dans cette maison. Il s'imposa comme directeur de l'entreprise. Imposer du respect, Inspirer du respect. Sa belle prestance impose le respect. Absolument, Imposer, Inspirer du respect, de l'admiration, de la crainte. Sa présence m'impose. C'est un homme dont la présence impose. Il impose par la fierté de son regard, par son aspect majestueux. Notre fière contenance imposa aux ennemis. Ces bravades ne peuvent imposer qu'aux âmes faibles. On dit dans un sens analogue C'est un homme qui s'est imposé par son mérite, dont la présence s'impose. C'est un choix qui s'impose. En imposer a été pris souvent dans le sens précédent; mais il signifie plus exactement Tromper, abuser, surprendre, en faire accroire. Vous voulez en imposer à vos juges, à vos auditeurs. Vous prétendez nous en imposer. Il m'en avait imposé par son air de douceur.

IMPOSER, en termes d'Imprimerie, signifie Ranger, disposer les pages qui doivent composer une forme, de telle sorte qu'elles se trouvent dans l'ordre convenable sur la feuille imprimée et pliée. Ces pages sont composées, il faut les imposer. Imposer une feuille.

Littré (1872-1877)

IMPOSER (in-pô-zé) v. a.
  • 1Mettre dessus. Il ne se dit guère qu'avec mains. Après lui avoir imposé les mains sur la tête, il lui déclara ce que le Seigneur avait commandé, Sacy, Bible, Nomb. XXVII, 28.
  • 2 Terme d'imprimerie. Mettre dans des garnitures les pages composées et rangées dans l'ordre convenable, qu'on serre avec des coins dans un châssis de fer, pour empêcher qu'il ne tombe aucune lettre. Imposer les pages qui sont composées. Imposer une feuille.
  • 3 Fig. Imposer un nom, désigner une chose par un nom spécial. Leur utilité et leur usage [des impositions de noms] est d'éclaircir et d'abréger le discours, en exprimant, par le seul nom qu'on impose, ce qui ne pourrait se dire qu'en plusieurs termes, Pascal, Pens. part. I, art. 2. Cette bataille porte aussi le nom de Cassiau, à cause d'un petit village qui est tout contre cette abbaye, qui a imposé le nom à cette journée, Regnard, Voy. de Flandre. Dans toutes les sciences on a eu la petite vanité d'imposer des noms fastueux aux choses les plus communes, Voltaire, Phil. Newt. Singul. nat. ch. 6. Le nom général qu'on voudrait leur imposer [aux espèces] est une formule incomplète, Buffon, Quadrup. t. VII, p. 23.
  • 4Imposer un tribut, des droits, des réquisitions, obliger à payer un tribut, des droits, à fournir des réquisitions.

    Il se dit aussi de celui qu'on soumet au tribut, aux droits, etc. Imposer une ville à la somme de… Une loi autorise ce département à s'imposer deux centimes additionnels.

    Il se dit enfin des matières frappées de droits. Imposer les vins, le sel.

  • 5Donner, d'autorité, pour chef. Sparte imposa à Athènes le gouvernement des trente tyrans. Mais enfin c'est vouloir que je m'impose un maître, Racine, Théb. III, 4. Pensez-vous que ma voix Ait fait un empereur pour m'en imposer trois ? Racine, Brit. I, 2.

    Faire une sorte de violence à quelqu'un pour lui faire accepter ou une personne, ou une opinion, ou une affaire, etc. Il nous imposa un homme qui lui était tout dévoué. Les gens qui prétendent imposer aux autres leurs opinions.

  • 6Charger quelqu'un de quelque chose de pénible, de difficile, de fâcheux. Puisque Sertorius m'impose ce devoir, Corneille, Sertor. II, 5. Je sentis le fardeau qui m'était imposé, Racine, Bérén. II, 2. Ils ont brisé le joug pour l'imposer eux-mêmes, Voltaire, Brutus, I, 4. Mme d'Arbigny m'imposant tous les devoirs en m'accordant tous les droits, Staël, Corinne, XII, 2.

    Prescrire. Le vainqueur impose la loi aux vaincus. Et sur toute chose Observe exactement la loi que je t'impose, Corneille, Cinna, V, 1. Non, seigneur, je vous hais d'autant plus qu'on vous aime, D'autant plus qu'il me faut vous admirer moi-même, Que l'univers entier m'en impose la loi, Racine, Alex. IV, 2. Leur exemple [des hommes ordinaires] peut bien séduire et détourner quelquefois de la vertu, mais il ne saurait imposer et autoriser le vice, Massillon, Petit carême, Exemples des gr.

    Imposer silence, faire taire. Arrêtons ici, chrétiens ; et vous, Seigneur, imposez silence à cet indigne ministre qui ne fait qu'affaiblir votre parole ; parlez dans les cœurs, prédicateur invisible…, Bossuet, Anne de Gonz.

    Fig. Donnant aux nations ou des lois ou des fers, Une femme imposa silence à l'univers, Voltaire, Sémiram. II, 3. Imposer silence au zèle de…, Briffaut, Ninus II, IV, 7.

    Fig. Imposer silence aux passions, les réprimer.

    Fig. Imposer silence aux médisants, à la calomnie, etc. faire que les médisants, la calomnie ne soient plus écoutés. Il faut opposer des faits à la calomnie, il faut imposer silence au mensonge, Voltaire, Lett. Thiriot, 26 fév. 1736.

    S'imposer à soi-même quelque chose, s'en faire une loi, se rendre cette chose obligatoire. Imposez-vous la loi de ne plus jouer, Bourdaloue, Pénitence, 2e avent, p. 473. Que diront ceux qui s'épuisent en folles dépenses et se croient dans l'impuissance d'être charitables, parce qu'ils se sont imposé la nécessité d'être ambitieux et d'être superbes ? Fléchier, Aiguillon. Il a su se commander à lui-même, se dompter, se soumettre et s'imposer des lois, Buffon, Disc. nat. anim. Œuv. t. V, p. 375.

    Infliger. Imposer une pénitence, une peine. Pourquoi vous imposer la peine de son crime ? Racine, Iphig. IV, 4. Et le seul châtiment qu'ici nous t'imposons, Voltaire, Brutus, V, 2.

  • 7Imposer le respect, inspirer le sentiment du respect. Ce magistrat dont la vieillesse vénérable impose le respect à tout un peuple, Pascal, Puiss. tromp. Imagin. I, édit. FAUCÈRE. Les titres ne servent de rien pour la postérité ; le nom d'un homme qui a fait de grandes choses impose plus de respect que toutes les épithètes, Voltaire, L. XIV, 13.

    Absolument. Imposer, inspirer le respect, la soumission, la crainte. Et que la renommée, instruite en ma faveur, Séduisant l'univers, impose à ce grand cœur, Corneille, Pulch. III, 3. Il [Bucer] imposait par la taille et par le son de la voix ; il avait été jacobin et s'était marié comme les autres, Bossuet, Var. III, § 3. De fort près, c'est moins que rien ; de loin, ils imposent, La Bruyère, II. Il y a dans quelques femmes… un esprit éblouissant qui impose, La Bruyère, III. Ils demandent un chef digne de leur courage, Dont le nom seul impose à ce peuple volage, Voltaire, Brutus, I, 4. Sa fermeté m'impose, et je l'excuse même, De condamner en moi l'autorité suprême, Voltaire, M. de Cés. I, 1. Le nom de bataille perdue impose aux vaincus, et les décourage, Voltaire, Louis XIV, 21. Je m'étais laissé imposer par le discours et la philosophie de Caton, Vauvenargues, Dialogue 9, César, Brutus. Ce ton pouvait révolter, mais il imposait, Raynal, Hist. phil. x, 16. On plaçait auprès des alliés des surveillants capables de leur imposer et de les tenir dans le devoir, Courier, Lett. II, 337. L'amour qui l'environne impose à ma puissance, Delavigne, Paria, II, 2.

    On dit, dans le même sens, en imposer. À ceux qui n'ont ni rang ni richesses qui en imposent, il leur reste une âme, et c'est beaucoup, Marivaux, Marianne, 4e part. Ils n'auraient point cédé aux évêques ; mais le cardinal légat leur en imposait, Voltaire, Hist. parl. ch. XXXVIII. Le dieu Fo ne m'en impose pas davantage, quoiqu'il ait eu pour père un éléphant blanc et qu'il promette une vie immortelle, Voltaire, Dial. 15. Le cardinal crut en imposer au peuple en les faisant arrêter en plein midi, Voltaire, Louis XIV, 4. Au milieu de ces sons discordants d'oiseaux s'élève une grande voix qui leur en impose à tous [le kamichi], Buffon, Morceaux choisis, p. 310. Il est sûr que de hautes montagnes, que d'antiques forêts, que des ruines immenses en imposent, Diderot, Ess. sur la peint. 3. Par la pompe des mots, l'éloquence en impose, Gilbert, Le 18e siècle. L'ascendant de son génie [de Buffon] lui soumit tous les esprits… son nom seul en imposait aux factieux de la littérature, Courier, Lett. II, 310 (Buffon).

  • 8Imputer (sens qui vieillit). Je n'ai pas jugé qu'on lui pût sur l'État Imposer d'apparent ni croyable attentat, Rotrou, Bélis. IV, 1. Il est hors de soupçon qu'elle ait pu m'imposer Rien d'assez vraisemblable à pouvoir l'abuser, Rotrou, ib. V, 1. On ne peut imposer de tache à cette fille, Molière, l'Ét. III, 3. Il s'ensuit de là… que l'on a voulu très méchamment m'imposer une extravagance pour me tourner en ridicule, Ch. Sévigné, dans SÉV. 31 août 1697.

    Absolument. Quand Diana rapporte avec éloge les sentiments de Vasquez… il n'est ni calomniateur ni faussaire, et vous ne vous plaignez point qu'il lui impose, Pascal, Prov. X. …Leur imposant faussement qu'ils soutenaient ces propositions, Pascal, ib. X. Nous ferons voir que de toutes les citations qu'ils [les jésuites] ont faites des saints docteurs de l'Église pour autoriser leurs prétentions, il n'y en a pas une qui ne soit fausse, et que ces saints ont enseigné si formellement le contraire, qu'on s'étonnera de la hardiesse avec laquelle ils osent ainsi leur imposer, 3e factum pour les curés de Paris, dans les œuvres de PASCAL. Si quelqu'un pense que j'impose à l'auteur, qu'il se souvienne que je ne lui attribue cette doctrine qu'après avoir montré qu'il ne peut vouloir dire autre chose, Fénelon, t. III, p. 12.

    On a dit aussi en imposer, pour imputer quelque chose à tort, charger à tort. Mais n'en imposons-nous point à Félix ? la voix de saint Paul n'a-t-elle point fait sur son esprit plus d'impression que nous ne semblons l'insinuer ? , SAURIN, Disc. de saint Paul à Félix et à Drusille.

  • 9Imposer quelque chose, faire croire quelque chose qui n'est pas véritable. Je prendrai garde soigneusement de ne recevoir en ma croyance aucune fausseté, et préparerai si bien mon esprit à toutes les ruses de ce grand trompeur [un mauvais génie], que, pour puissant et rusé qu'il soit, il ne me pourra jamais rien imposer, Descartes, Médit. I, 11. Mais, quoi qu'à ces mutins elle puisse imposer, Demain ils la verront mourir ou t'épouser, Corneille, Héracl. I, 3. (Cette tournure a vieilli ; mais c'est elle qui explique comment imposer, pris absolument, a signifié tromper, mentir.)

    Imposer, faire illusion, tromper. Pour me faire croire ignorant, vous avez tâché d'imposer aux simples, Corneille, Lett. apolog. Le fourbe qui longtemps a pu vous imposer, Molière, Tart. V, 6. Qui ne s'y fût trompé ? jamais l'air d'un visage, Si ce qu'il dit est vrai, n'imposa davantage, Molière, l'Ét. III, 2. Faites-moi pis encor, tuez-moi, si j'impose, Molière, Dép. am. I, 4. On veut croire qu'on a entendu, et on s'impose à soi-même, Bossuet, Connais. I, 16. Ils imposèrent par ces artifices au pape, Bossuet, Hist. I, 11. Leurs paroles, aussi peu solides qu'elles semblaient magnifiques, imposaient au monde, Bossuet, ib. II, 12. Langage ordinaire de la calomnie, qui ne s'énonce jamais plus hardiment que quand elle impose plus faussement, Bourdaloue, Myst. Pass. de J. C. t. I, p. 269. Pendant que la vérité est contredite, l'hérésie lève la tête, impose et triomphe, Fénelon, Lett. au P. le Tellier, 22 juillet 1712. C'est vouloir imposer aux yeux, et vouloir paraître contre la vérité ; c'est une espèce de menterie, La Bruyère, III. C'est avoir mauvaise opinion des hommes que de prétendre leur imposer par des caresses, La Bruyère, IX. Ce malheureux talent de tromper et de plaire, D'imposer aux esprits, et d'éblouir les yeux, Voltaire, Tancr. II, 4. Imposons quelque temps à sa crédulité, Voltaire, Orph. de la Chine, II, 2. Ce grand art d'imposer même à la renommée, Fut l'art qui sous son joug enchaîna les esprits, Voltaire, Sémir. II, 4. Nous avons des remarques importantes à faire sur ses expériences ; la manière dont il les a données peut imposer, Buffon, Hist. anim. ch. 5, Œuv. t. III, p. 163.

    On dit, dans le même sens, en imposer. Est-ce peut-être que tous ceux qui errent sont de bonne foi ? l'homme ne peut-il pas, selon sa coutume, s'en imposer à lui-même ? Bossuet, Anne de Gonz. Qu'elle ne pense pas que par de vaines plaintes, Des soupirs affectés et quelques larmes feintes, Aux yeux d'un conquérant on puisse en imposer, Voltaire, Orph. de la Chine, III, 1. Le discours affectueux de Néron n'en imposa point à Sénèque, Diderot, Claude et Nér. I, 90.

  • 10 Terme de liturgie. Entonner, commencer. Imposer les psaumes. Imposer l'antienne, l'annoncer.
  • 11S'imposer, v. réfl. Être donné, en parlant d'une dénomination. Les noms s'imposent vite quand une troupe d'hommes vient s'établir en un lieu.
  • 12Être mis sur les contribuables. Les droits s'imposent pour faire face aux dépenses publiques.

    S'imposer, se mettre une imposition. Autoriser un département à s'imposer extraordinairement.

    Être soumis à l'impôt, en parlant des choses. Les valeurs mobilières s'imposent comme les autres.

  • 13S'imposer, se dit de celui qui oblige d'autres à le recevoir comme chef, comme associé, etc. Il s'imposa comme gérant dans cette affaire.
  • 14 Fig. S'imposer, être imposé, être mis dessus comme un fardeau. Un joug, un fardeau qui s'impose. C'est une obligation qui s'impose d'elle-même aux cœurs bien nés.

REMARQUE

Des grammairiens ont essayé de distinguer imposer et en imposer. Mais l'usage des auteurs et aussi l'usage du public ne permettent aucune distinction. Imposer et en imposer veulent dire commander le respect ; imposer et en imposer veulent dire faire illusion, tromper. Cela est si vrai, que Massillon a employé, dans une seule et même phrase, imposer et en imposer pour tromper, ne consultant pour le choix que son oreille : Il ne veut ni imposer aux autres ni s'en imposer à soi-même, Massillon, Or. fun. Prince de Conty.

HISTORIQUE

XIIe s. Del due Robert Robert [il] out non, Qu'en fonz li enposa sun non, Benoit de Sainte-Maure, II, 6851. Lores receveras tu sacrifise de justise ; dunc [ils] emposerunt sur le tuen altel vedels [des veaux], Liber psal. p. 68. Tu nus menas en baz, posas tribulatiuns en nostre dos, emposas humes sur les nos chiés [têtes], ib. p. 83. Je vos prie, por Deu le grant, Que vos meïsmes l'eslevés [l'enfant], E vostre non li enposés, Grégoire le Grand, p. 40.

XIVe s. Imposant, sur ce, silence perpetuel à nostre procureur, Lett. de remission, Bibl. des ch. 5e série, t. I, p. 82. Toutes ces charges furent translatées des poures gens et imposées en plus riches, Bercheure, f° 21, verso. Les poines que l'en impose à ceulx qui pechent et font mal, Oresme, Eth. 38.

XVe s. Jacques Legris s'excusoit trop fort, et disoit que rien n'en estoit, et que la dame lui imposoit induement, Froissart, III, 49. Et tout ce qu'on lui imposoit n'estoit que par envie et haines particulieres qui estoient entre le seigneur, Juvénal Des Ursins, ch. VI, 1404.

XVIe s. Finablement, silence il s'imposa, Et faisant fin, icy se reposa, Du Bellay, J. IV, 6, recto. D'aucuns meschans nous imposent que nous abolissons les bonnes œuvres, Calvin, Inst. 628. Qu'ils n'imposent point necessité en une chose, laquelle de soy-mesme est libre, Calvin, ib. 1006. Voilà assez pour les controverses, afin qu'on n'impose point à la posterité, et qu'ils sachent quelles ont esté les creances diverses sans fard et veritablement, D'Aubigné, Hist. I, 66.

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Étymologie de « imposer »

In…, dans, et poser.

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Du latin imponere (« appliquer »).
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Phonétique du mot « imposer »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
imposer ɛ̃poze

Fréquence d'apparition du mot « imposer » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « imposer »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « imposer »

  • Manquer de confiance en soi est l'un des supplices les plus raffinés que peut imposer le Créateur.
    Patrick Poivre d'Arvor — L'irrésolu
  • Affronter un bavard est une épreuve, certes. Mais que faire de celui qui vous envahit pour vous imposer son mutisme ?
    Amélie Nothomb — Les Catilinaires
  • La majorité n’a pas le droit d’imposer sa connerie à la minorité.
    Georges Wolinski
  • Une des fonctions essentielles du conte est d’imposer une trêve au combat des hommes.
    Daniel Pennac — Comme un roman
  • Si vous voulez être respecté, commencez par être respectable et, en outre, assez costaud pour imposer le respect.
    Somerset Maugham
  • Le vent des hauts-plateaux souffle où il veut : qui peut lui imposer une direction ?
    Zhang Xianliang — Mimosa
  • Les grands écrivains n'ont jamais été faits pour subir la loi des grammairiens, mais pour imposer la leur.
    Paul Claudel — Positions et propositions
  • Vous ne pouvez pas imposer le bien, il aura toujours moins de saveur que le mal.
    Christiane Villon — Opération Orchidée
  • L'État peut imposer par la force la légalité, mais non les lois de la morale.
    Alexis Carrel — Les Activités mentales
  • Il n'est pas de limite, de frontière, de garde-fou que l'on puisse imposer au temps.
    Morgan Sportès — Solitudes
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Traductions du mot « imposer »

Langue Traduction
Anglais impose
Espagnol imponer
Italien imporre
Allemand verhängen
Chinois 强加
Arabe فرض
Portugais impor
Russe облагать
Japonais 課す
Basque inposatu
Corse impone
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Synonymes de « imposer »

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Antonymes de « imposer »

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Imposer

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