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Enfler

Définitions de « enfler »

Trésor de la Langue Française informatisé

ENFLER, verbe.

A.− Emploi trans.
1. Vx. Remplir de gaz qu'on insuffle. Enfler un ballon, une cornemuse (Ac.). Synon. gonfler.Comme une outre enflant sa musette, Ce soir, le vieux ménétrier Fera, pour terminer la fête, Danser sous le grand marronnier (Murger, Nuits hiver,1861, p. 60).
P. anal. Le vent enfle les voiles. Soit que plus molle et sans secousse, N'enflant ma voile qu'à demi (Sain-te-Beuve, Poés.,1929, p. 53).
2. Faire augmenter le volume (de quelque chose).
a) Emploi trans. Comme il enflait la poitrine d'un soupir, elle lui jeta d'une voix aigre (Aymé, Jument,1933, p. 302).
Au fig. Augmenter. Anton. diminuer.Mais les discours ont par eux-mêmes une puissance démesurée; ils enflent la tristesse (Alain, Propos,1912, p. 125).Les firmes (...) anticipent les demandes de leur clientèle et même qu'elles les suscitent et les enflent dans une large mesure (Perroux, Écon. XXes.,1964, p. 402):
1. ... encore les chiffres manquent-ils pour la période du 15 novembre au 28 février, qui enfleraient ce résultat. Ambrière, Les Grandes vacances,1946, p. 230.
Spéc. [Le compl. désigne une production phonique] Augmenter l'intensité (de quelque chose). Enfler un son, la voix. Synon. amplifier; anton. diminuer.Il se mettait debout, enflait le souffle, tournait la jambe (Duhamel, Désert Bièvres,1937, p. 69).
b) Emploi pronom. à sens passif. Augmenter de volume. La houle s'enfle. Synon. grossir; anton. diminuer, se rétrécir, se rétracter.La vague s'enfle, roule et déferle (Green, Journal,1939, p. 166).Fernande, à mesure que son ventre s'enflait, en profitait pour accabler d'exigences sa compagne (Druon, Gdes fam.,t. 2, 1948, p. 141):
2. Que votre thyroïde s'enfle ou se rétrécisse et vous tomberez dans le gâtisme précoce... Van der Meersch, Invasion 14,1935, p. 72.
Au fig. C'était là le perpétuel problème dans une période où les dépenses publiques s'enflaient inévitablement (De Gaulle, Mém. guerre,1959, p. 246).
Spéc. [Le suj. désigne une production phonique] Augmenter d'intensité. Rumeur qui s'enfle. Synon. s'amplifier; anton. diminuer.La sonorité s'enfle graduellement (...) envahit l'orchestre comme un torrent (A. Lavignac, Voy. artist. Bayreuth,1897, p. 370).La voix s'enflait encore, mais commençait de s'enfoncer dans les entrailles de la maison (Duhamel, Notaire Havre,1933, p. 227).Un bruit grinçant, en vrille, qui s'enfle, s'enfle (Martin du G., Thib.,Été 14, 1936, p. 753).
Loc. fig. (S')enfler d'orgueil. (S')enorgueillir. La charité n'est point envieuse, la charité n'est point inconsidérée, elle ne s'enfle point d'orgueil (Billy, Introïbo,1939, p. 214).
3. P. ext. Accroître anormalement le volume (de quelque chose). Les engelures enflent les doigts. Synon. boursoufler, distendre.
Enfler la dépense, les comptes. Synon. gonfler, exagérer; anton. diminuer, restreindre.Une meute de politiciens assaillit les administrateurs du Panama pour qu'ils enflassent le budget de la corruption (Barrès, Leurs fig.,1901, p. 115):
3. Il y avait dix-sept ans qu'il servait M. Octave, et trois seulement qu'il le volait, enflant la dépense du manger de quatre cents francs par mois régulièrement. Montherlant, Les Célibataires,1934, p. 909.
Au fig. Faire paraître qqc. plus important, qu'il ne l'est en réalité. L'imagination enfle tout. Synon. exagérer, grossir; anton. rapetisser.Ces chiffres allemands manquent de certitude. Selon que cela semble momentanément utile, les chancelleries auliques enflent ou désenflent le désastre (Hugo, Hist. crime,1877, p. 232).
Emploi pronom. réfl. [En parlant de pers.] Se donner de l'importance. Certains écrivains politiques s'exagèrent leur importance et s'enflent dans l'idée qu'ils ont d'eux-mêmes (Sainte-Beuve, Nouv. lundis,t. 7, 1863-69, p. 349).
4. Arg. Se faire enfler.Se faire voler, rouler. Je me suis laissé enfler il y a pas une semaine; j'ai eu le malheur de garder la marchandise quarante-huit heures : J'ai paumé tout ce que j'ai voulu (Simonin, Touchez pas au grisbi,1953, p. 203).
B.− Emploi intrans. Augmenter anormalement de volume. Son pied a enflé; ma main enfle. Vint l'année où le torrent enfle (Giono, Solit. pitié,1932, p. 66).Où fuir, Oreste? Elles [les mouches] enflent, elles enflent, les voilà grosses comme des abeilles (Sartre, Mouches,1943, II, tabl. II, 8, p. 85).Les ganglions avaient cessé d'enfler (Camus, Peste,1947, p. 1455).Charlotte se gavait si gloutonnement qu'elle enflait comme une baudruche (Beauvoir, Mém. jeune fille,1958, p. 12).
Au fig. Prendre de l'ampleur. Les commérages enflaient. C'est au moment où le nom d'Henri avait commencé à enfler (...) que Paule avait réintégré sa peau d'amoureuse (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 176.
Spéc. [Le suj. désigne une production phonique] Augmenter d'intensité. Sa voix enfla tout à coup. Synon. s'enfler, s'accroître; anton. diminuer.Et puis, du fond du silence, du fond du ventre, un cri qui monte, enfle, dépassant toutes les limites, désespéré, désespérant (Triolet, Prem. accroc,1945, p. 414).
Prononc. et Orth. : [ɑ ̃fle], (j')enfle [ɑ ̃:fl̥]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. Fin xes. trans. « faire augmenter de volume » (Passion, éd. d'Arco Silvio Avalle, 100 : cui una sopa enflet lo cor); en partic. a) 1121-34 « grossir sous l'effet d'une cause morbide » (Ph. de Thaon, Bestiaire, 1665 ds T.-L.); 1160-74 « id. sous l'effet d'un état d'âme » de courout et d'angoisse ... enfler (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, II, 4030); b) 1749 pop. enflé part. passé subst. « imbécile » (d'apr. Esn.); 2. a) 1532 « faire paraître plus important que la réalité » enfler son stile (Cl. Marot, Epitre, éd. Mayer, XXV, 122); b) 1723 « gonfler (un compte) » (Savary des Bruslons, Dict. universel de comm.); 3. 1538 « gonfler d'air » (Est.). Du lat. class. inflare « souffler dans; gonfler ». Fréq. abs. littér. : 637. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 771, b) 873; xxes. : a) 1 207, b) 854. Bbg. Chautard (É.). La Vie étrange de l'arg. Paris, 1931, p. 432. − Gir. 1834, pp. 37-38. − Gottsch. Redens. 1930, p. 111, 230.

Wiktionnaire

Verbe - français

enfler \ɑ̃.fle\ transitif ou intransitif 1er groupe (voir la conjugaison)

  1. Augmenter un corps de volume ; gonfler.
    • Et fermant la marche, quelques ecclésiastiques en retard se hâtaient, saisissant d’une main leurs robes qui s’enflaient comme des ballons, […]. — (Joris-Karl Huysmans, La Cathédrale, Plon-Nourrit, 1915)
    • Enfler un ballon.
    • Enfler une cornemuse.
    • Enfler ses joues.
    • Les pluies ont enflé la rivière.
    • La rivière s’enfle.
    • L’hydropisie enfle le corps.
  2. Augmenter d'intensité.
    • Après avoir laissé derrière nous les Orcades, nous entrâmes en plein Atlantique, et la mer s’enfla prodigieusement. — (Jules Leclercq, La Terre de glace, Féroë, Islande, les geysers, le mont Hékla, Paris : E. Plon & Cie, 1883, page 29)
  3. Frapper et déployer en parlant du vent dans les voiles.
    • Le vent enflait nos voiles.
    • La voile s’enfle.
  4. (Figuré) Augmenter, exalter.
    • Cela lui a enflé le courage.
    • Enfler les espérances de quelqu’un.
    • La bande descendait avec un élan superbe, irrésistible. Rien de plus terriblement grandiose que l’irruption de ces quelques milliers d’hommes dans la paix morte et glacée de l’horizon. La route, devenue torrent, roulait des flots vivants qui semblaient ne pas devoir s’épuiser ; toujours, au coude du chemin, se montraient de nouvelles masses noires, dont les chants enflaient de plus en plus la grande voix de cette tempête humaine. — (Émile Zola, La Fortune des Rougon, G. Charpentier, Paris, 1871, ch. I  ; réédition 1879, p. 30)
  5. (Figuré) Rendre ampoulé, en parlant du style d’un écrivain, d’un orateur.
    • Et sa voix alors prenait une intonation dolente et uniforme, enflant les mots, appuyant indéfiniment sur les syllabes. Cela m’agaçait beaucoup. — (Octave Mirbeau, Contes cruels : La Chanson de Carmen (1882))
  6. (Figuré) (Familier) (Droit) Mettre des choses inutiles dans les rôles, dans les minutes, afin de les grossir.
    • Enfler le cahier, enfler les rôles, pour être rémunéré sur un plus grand nombre de pages.
  7. (Figuré) (Péjoratif) Augmenter artificiellement un compte, des dépenses, un prix, pour contrefaire un bilan ou gruger un client.
    • Enfler la dépense.
    • Enfler un mémoire, un compte*
  8. (Figuré) Emplir de vanité, d’orgueil.
    • Il est enflé de son succès.
    • Il s’enfle d’orgueil.
  9. (Figuré) Arnaquer, duper.
    • J’ai bien peur que tu te sois fait complètement enfler.
  10. (Absolument) S’augmenter de volume.
    • Ses doigts malhabiles, enflés par la goutte, lui obéissaient très mal. — (Ivan Tourgueniev, L'Exécution de Troppmann, avril 1870, traduction française de Isaac Pavlovsky, publiée dans ses Souvenirs sur Tourguéneff, Savine, 1887)
    • La rivière enfle.
  11. (Vulgaire) Mettre une femme enceinte.
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

ENFLER. v. tr.
Augmenter un corps de volume. Enfler un ballon. Enfler une cornemuse. Enfler ses joues. Les pluies ont enflé la rivière. La rivière s'enfle. Il se dit particulièrement en termes de Médecine. L'hydropisie enfle le corps. Ses jambes commencent à s'enfler. Intransitivement, Sa jambe enfle. Sa joue enfle. La rivière enfle. Enfler les voiles, Frapper dans les voiles et les déployer en parlant du Vent. Le vent enflait nos voiles. La voile s'enfle. Il signifie figurément Augmenter, exalter. Cela lui a enflé le courage. Enfler les espérances de quelqu'un. Fig., Enfler son style, Écrire d'un style ampoulé. Fig. et fam., en termes de Palais, Enfler le cahier, enfler les rôles, Y mettre des choses inutiles, afin de les grossir. Fig., Enfler la dépense, Porter les objets qu'on a achetés à un prix plus élevé que le prix d'achat, afin de gagner sur la dépense. On dit, dans un sens analogue, Enfler un mémoire, un compte, Y mettre des articles qui ne devraient pas y être ou augmenter le prix de chaque article. Il signifie encore au figuré Emplir de vanité, d'orgueil. Il est enflé de son succès. Il s'enfle d'orgueil.

Littré (1872-1877)

ENFLER (an-flé) v. a.
  • 1Remplir de souffle, d'air. Viendrai-je, en une églogue entouré de troupeaux, Au milieu de Paris enfler mes chalumeaux ? Boileau, Sat. IX.

    Grossir, en remplissant d'air, de gaz. Enfler un ballon. Enfler ses joues. De tels bienfaits enflent la bouche de la renommée, Voltaire, Lett. à Cather. 143.

    Le vent enfle les voiles, il les rend tendues par le souffle. Le génie qui m'inspirait m'abandonna ; mon esprit et mon âme tombèrent languissants comme les voiles d'un navire auquel tout à coup manque le vent qui les enflait, Marmontel, Mém. III. Il voit les passions, sur une onde incertaine, De leur souffle orageux enfler la voile humaine, Lamartine, Méd. II, 13.

    Fig. Enfler les voiles, se dit de ce qui favorise, fait avancer. Le vent de la faveur enflait leurs voiles.

    Grossir en remplissant d'un liquide. L'eau enfle le ventre d'un hydropique. Les efforts que le petit homme avait faits pour tirer son pied hors du pot l'avaient enflé, Scarron, Roman com. part. II, ch. 8. Tes prés [de la France] enflent de lait la féconde génisse, Chénier, Hymne à la France.

  • 2 Fig. Faire paraître plus grand par une sorte d'enflure. Bien différent de ceux qui rassemblent le plus de titres qu'ils peuvent et qui croient augmenter leur mérite à force d'enfler leur nom, Fontenelle, Hartsoeker. Aussitôt… tu verras poëtes, orateurs… De tes titres pompeux enfler leurs dédicaces, Boileau, Sat. VIII.
  • 3Enfler la voix, un son, les renforcer. Chasseur, tu rapportes ta bête, Et de ton cor enfles le son, Béranger, D. chasse.
  • 4Augmenter par l'afflux d'un liquide. Les pluies ont enflé la rivière.

    Fig. De mille exploits fameux enfler ma renommée, Corneille, le Ment. I, 3. Qu'importe de mon cœur, si je suis mon devoir, Et si mon hyménée enfle votre pouvoir ? Corneille, Sertor. I, 3. Dès l'abord il sut vaincre, et j'ai vu la victoire Enfler de jour en jour sa puissance et sa gloire, Corneille, ib. v, 1. Ma voix, depuis dix ans qu'il commande une armée. A-t-elle refusé d'enfler sa renommée ? Corneille, Nicom. IV, 2. Nous avons beau enfler nos conceptions, nous n'enfantons que des atomes, Pascal, dans COUSIN. La pluralité des titres que vous possédez et qui enflent si fort votre revenu, Massillon, Confér. Reven. ecclésiast.

  • 5Exagérer, surfaire. Enfler la dépense. On leur exagère toujours les inconvénients d'un état où l'intérêt d'une maison ne les demande pas ; on leur enfle les avantages et les agréments de celui auquel on les destine, Massillon, Car. Vocat. Pas davantage, suivant notre calcul, que j'ai un peu enflé, Voltaire, L'homme au 40 écus, Entretien avec un géomètre. Il y a apparence que ce prince [l'empereur Macrin] enflait les choses, Montesquieu, Rom. 16. M. Adam ignorait et cachait son mérite avec le même soin que tant d'autres se donnent pour étaler et pour enfler le leur, D'Alembert, Éloges, Jacq. Adam. On ne m'accusera pas d'enfler mes mémoires, Picard, Duhautcours, I, 5.

    Terme de pratique. Enfler le cahier, les rôles, y mettre des choses inutiles, afin de les allonger et de se faire payer plus cher.

  • 6Donner plus de force à certains sentiments. Ses satrapes enflaient ses espérances, Vaugelas, Q. C. liv. III, dans RICHELET. Cela enfle le courage des Tyriens, Vaugelas, ib. IV, dans RICHELET. Ne porter qu'un faux jour dans son obscurité, C'était de ce prodige enfler la cruauté, Corneille, Œdipe, I, 4. Non, j'ai peint votre cœur dans une indifférence Qui n'enfle d'aucun d'eux, ni n'abat l'espérance, Corneille, Cid, I, 1. L'orgueil de ma naissance enfle encor mon courage, Corneille, Rodog. IV, 1. [Il] Enfle l'avidité de mes ressentiments, Corneille, Attila, v, 4.

    Inspirer de l'orgueil, de la confiance, de la présomption. Ce nouvel éclat de votre dignité Lui doit enfler le cœur d'une autre vanité, Corneille, Cid, I, 7. La gloire de ce choix m'enfle d'un juste orgueil, Corneille, Hor. II, 1. Quand la gloire nous enfle, il sait bien comme il faut Confondre notre orgueil qui s'élève trop haut, Corneille, ib. v, 1. Cette haute vertu dont le ciel et le sang Enflent toujours les cœurs de ceux de notre rang, Corneille, Pomp. I, 3. Les bons succès nous enflent, Fléchier, Dauph. Les richesses qu'ils ont acquises par le commerce et la force de l'imprenable ville de Tyr, située dans la mer, avaient enflé le cœur de ces peuples, Fénelon, Tél. II. Les sciences nous enflent, l'ignorance nous égare, Massillon, Carême, Prière 2.

    Absolument. Vous allez donc voir… la force confondue par la faiblesse, la science qui enfle céder à la simplicité qui édifie, Massillon, Panég. St Franç. de P.

  • 7Enfler son style, écrire d'une manière ampoulée.
  • 8 Terme d'orfévrerie. Agrandir au marteau, sur la bigorne, les parties inférieures des pièces d'argenterie qui doivent former le ventre, comme aux pots à l'eau, aux cafetières.
  • 9 V. n. Devenir plus gros. Avec de l'eau bouillante on fait enfler l'orge d'un tiers. Le bras piqué enflait à vue d'œil. Sa gorge enfle, et du sang dont le cours s'épaissit Le passage se ferme ou du moins s'étrécit, Corneille, Attila, v, 6. Mais qui fait enfler la Sambre Sous les jumeaux effrayés ? Boileau, Ode I.

    Le lait enfle, il se soulève par l'action de la chaleur.

  • 10S'enfler, v. réfl. Devenir enflé. Le ballon s'enfla lentement. Une grenouille vit un bœuf Qui lui sembla de belle taille ; Elle qui n'était pas grosse en tout comme un œuf, Envieuse, s'étend, et s'enfle et se travaille, La Fontaine, Fabl. I, 3. Il y a dans l'esprit comme un levain d'orgueil qui s'enfle et se dilate par la science, Fléchier, Panég. II, 233. Les voiles s'enflent d'un vent favorable, Fénelon, Tél. XI.

    Devenir tuméfié. Il se donna une entorse, et son pied s'enfla beaucoup. Cette gorge qui s'enfle, Corneille, Rodog. v, 4.

    Être soulevé. L'onde s'enfle dessous [les vaisseaux], et d'un commun effort Les Maures et la mer montent jusques au port, Corneille, Cid, IV, 3.

    Devenir plus gros, plus ample. Par qui le monde entier… L'a vu [le peuple de Rome] cent fois marcher sur la tête des rois, Son épargne s'enfler du sac de leurs provinces, Corneille, Cinna, II, 1. Leur trésor n'a pas besoin de s'enfler des faibles débris d'une famille malheureuse, Voltaire, Louis XV, 42. Tout à coup la flamme engourdie S'enfle, déborde ; et l'incendie Embrase un immense horizon, Lamartine, Médit. II, 6.

  • 11S'enorgueillir. Voyez comme elle s'enfle et d'orgueil et d'audace, Corneille, Médée, II, 2. Certes, si je m'enflais de ces vaines fumées Dont on voit à la cour tant d'âmes si charmées, Corneille, Théod. I, 1. Que veraient-ils en eux qu'ils pussent estimer, S'ils voyaient devant toi ce qu'est leur chair fragile ? Comment souffriraient-ils qu'une masse d'argile S'enflât contre la main qui vient de la former ? Corneille, Imit. III, 14. Ne vous enflez donc pas d'une si grande gloire, Molière, Mis. III, 6. Le zèle qui prend sa source dans la charité, c'est un zèle doux et patient : il ne s'irrite point, il ne s'enfle point, Massillon, Confér. Zèle p. le sal. des âmes. Nous autres juges, [nous] ne nous enflons pas d'une vaine science, Montesquieu, Lett. pers. 68. Il était impossible que la plupart des jésuites ne s'enflassent du vent de ces deux hommes [le P. de la Chaise et le P. le Tellier], et qu'ils ne fussent aussi insolents que les laquais du marquis de Louvois, Voltaire, Dict. phil. Jésuites.

    Être exagéré. Il y a tant d'hommes naturellement outrés et dans la bouche desquels tout s'enfle, tout grossit, tout sort de la vérité simple et naturelle, Massillon, Car Pard. des off.

    Prendre un ton, un style ampoulé. Un poëte s'enfle, se guinde, Et se croit au sommet du Pinde Pour de grands mots vides de sens, Lamotte, Odes, t. I, p. 421, dans POUGENS.

HISTORIQUE

XIIe s. Mezine [médecine] ki seichet les enflées choses, Job, p. 507. [De peur] ke la science, cant ele conoist et n'aimet mie, n'enflet, ib. 443. Il ot enflé le vis et le menton, Ronc. p. 100. Un des convers as monies [chez les moines] (ne le m'unt pas nummé) Out mult esté grevé de grant enfermeté, E out d'idropisie le ventre mult enflé, Th. le mart. 94.

XIIIe s. Se la mers est enflée ou coie [paisible], Ja ne sera qu'on ne la voie [l'étoile polaire], Lais inédits, p. III. Li rois Ricars ot moult le cueur enflé [jaloux] dou roi Philippe, qui avoit l'honneur d'Acre, Chron. de Rains, p. 42. Dans Pieres, li hermites seoit devant son tré [tente], Li rois Tafurs i vint, et moult de son barné [de ses barons], Plus en i ot de mil qui sont de faim enflé, Ch. d'Ant. v, 6. Science, quand elle enfle, est chose si parverse, Qu'elle envenime tout, se la boe n'est terse [essuyée], J. de Meung, Test. 1044. Quant je vien à mon osté [logis], Et ma feme a regardé Derier moi le sac enflé, Colin Muset, dans Hist. littér. de la Fr. t. XXIII, p. 558.

XIVe s. Le cuer enflé à mal faire et dire, Ménagier, I, 3. Et celle lui ala son amour presenter, Tant qu'elle fu enchainte [enceinte], qu'elle prist à enfler, Baud. de Seb. VI, 293.

XVe s. Si ils [les Parisiens] fussent venus servir le roi au point où ils sont quand il alla en Flandre, ils eussent mieux fait ; mais ils n'en avoient pas la teste enflée, Froissart, II, II, 205. Et tous jours depuis commença la chose à enfler entre les dicts deux ducs, Fenin, 1410.

XVIe s. [Depuis Ronsard, etc.] je ne vois si petit apprenti qui n'enfle des mots, qui ne renge des cadences à peu prez comme eulx, Montaigne, I, 190. Il trouva la riviere si enflée et courant si roide qu'il ne s'osa approcher du fil de l'eau, Amyot, Rom. 4. Les prosperitez enflent et elevent le cueur à ceux mesmes qui l'ont petit de leur nature, Amyot, Eumènes, 17. Ce Vatinius avoit des escrouelles au long du col, à raison de quoy Ciceron, l'ayant un jour ouy plaider, l'appella orateur enflé, Amyot, Cicéron, 32. Gabinius eut peur de se mettre sur la mer qui estoit desja enflée, à cause que c'estoit la saison d'hyver, Amyot, Anton. 10. Il dit à ceux-là, que, s'il ne pouvoit leur enfler le cœur avec des dementis, il leur enfleroit le visage par des soufflets, D'Aubigné, Vie, LXIX. Dès lors Maurice enfloit ses troupes au lieu de les congedier, D'Aubigné, Hist. I, 15.

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Étymologie de « enfler »

Provenç. enflar, eflar, uflar ; espagn. inflar ; ital. infiare ; du latin inflare, de in, en, et flare, souffler.

Version électronique créée par François Gannaz - http://www.littre.org - licence Creative Commons Attribution

Du latin inflo (« souffler dans, gonfler »).
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Phonétique du mot « enfler »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
enfler ɑ̃fle

Fréquence d'apparition du mot « enfler » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « enfler »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « enfler »

  • Nous avons beau enfler nos conceptions au-delà des espaces imaginables, nous n'enfantons que des atomes, au prix de la réalité des choses.
    Blaise Pascal — Pensées
  • Les sauveteurs de montagne et un médecin ont été appelés sur les lieux après que la langue de l’homme a commencé à enfler, et il a été conduit à environ 60 kilomètres vers un hôpital provincial éloigné de Wiener Neustadt.
    News 24 — Morsure de serpent de nuit: un reptile mord l'homme sur la langue lors d'une fête autrichienne - News 24
  • Suis-je le seul à avoir l’impression de me faire enfler avec ma Delta ?? Dolby Vision, Forfait free a 9,99
    Business Insider France — Freebox Pop : Free casse le prix de son abonnement mobile, et ça agace certains abonnés
  • Ce village des Pyrénées audoises est le théâtre d’oppositions, de querelles, de rancœurs sans fin, qui ne cessent d’enfler au fil du temps, entre deux ou trois familles de ce petit bourg d’apparence si tranquille.
    ladepeche.fr — Aude : coups de poing entre le nouveau et l’ancien maire de Mérial - ladepeche.fr
  • La polémique autour de la fresque de Stains continue d'enfler. Ce vendredi, le maire de Stains (Seine-Saint-Denis) Azzédine Taïbi (PCF) a été mis en demeure par le préfet de Seine-Saint-Denis de modifier la fresque «contre le racisme et les violences policières», a indiqué l'élu. «Monsieur le préfet me met en demeure de supprimer le mot "policières" de la fresque. Cette injonction était celle du syndicat de policiers Alliance. Je ne saisis pas le sens de cette mise en demeure infondée», a indiqué Azzédine Taïbi qui a mandaté son avocat Arié Alimi «afin d'étudier les suites à donner au préfet».
    Libération.fr — Fresque anti «violences policières» : le maire de Stains mis en demeure de la modifier - Libération

Traductions du mot « enfler »

Langue Traduction
Anglais swell
Espagnol hinchar
Italien gonfiarsi
Allemand anschwellen
Chinois
Arabe تضخم
Portugais inchar
Russe опухать
Japonais うねり
Basque olatuak
Corse incha
Source : Google Translate API

Synonymes de « enfler »

Source : synonymes de enfler sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « enfler »

Combien de points fait le mot enfler au Scrabble ?

Nombre de points du mot enfler au scrabble : 9 points

Enfler

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