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Coup

Variantes Singulier Pluriel
Masculin coup coups

Définitions de « coup »

Trésor de la Langue Française informatisé

COUP, subst. masc.

A.− [Avec l'idée d'un mouvement suivi d'un choc]
1. [Avec une intention gén. hostile] Mouvement rapide au bout duquel un corps vient heurter un autre corps. Défends-toi jusqu'à ce soir avec le couteau que je t'ai donné. Le coup doit se porter de bas en haut, ne l'oublie pas (Gautier, Fracasse,1863, p. 309):
1. Giletti était lancé, Fabrice lui porta un coup de pointe; Giletti avec son épée eut le temps de relever un peu le couteau de chasse, mais il reçut le coup de pointe en plein dans la joue gauche. Stendhal, La Chartreuse de Parme,1839, p. 178.
SYNT., EXPR., a) Coup + adj. Coup bas. Coup porté plus bas que la ceinture, au fig., procédé déloyal. Coup fourré. Coup que deux hommes en train de se battre se donnent et reçoivent en même temps. Coup léger, mortel, rude, terrible, violent. b) Adj. + coup. Grand coup, mauvais coup, petit coup. c) Coup de/du + subst. Coup d'assommoir, de baguette*, de baïonnette, de bâton, de bec, de bélier, de botte, de boutoir, de canne, de coude, d'épaule. Coup d'épée; coup d'épée dans l'eau (au fig.) tentative inutile. Monserfeuil n'a aucune espèce de crédit ni de pouvoir avec le nouveau gouvernement. Ce serait un coup d'épée dans l'eau (Proust, Guermantes 2, 1921, p. 515). Coup d'épingle; au fig., p. métaph. Petit mot blessant; synon. pique. Coup de fouet; au fig. Excitation vigoureuse. Nous recevions un gros paquet de journaux d'Europe : c'était un coup de fouet qui nous ravivait et nous agitait fort durant quelques jours (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 303). Coup de genou, de griffe, de hache; coup de Jarnac (p. allus. au duel où Jarnac tua La Châtaigneraie, en lui portant un coup imprévu). Mauvais tour joué à quelqu'un (cf. C 2 b syntagme coup de force ex. de Clemenceau). Coup du lapin. Coup sec assené sur la nuque, de la manière dont on tue les lapins; au fig. coup mortel. Coup de patte; au fig. Mot blessant lancé furtivement dans la conversation. Là où un homme du monde ne se serait pas laissé griffer deux fois, le bon Birotteau avait besoin de plusieurs coups de patte dans la figure avant de croire à une intention méchante (Balzac, Curé Tours, 1832, p. 181). Coup de pied, (fam.) coup de pied au derrière, au cul. Le coup de pied au cul est la plus noble invention de l'homme. C'est ce qui le rend supérieur à la bête. (Il lui botte les fesses) (Achard, Voulez-vous jouer? 1924, I, 3, p. 76). Coup de poignard, (au fig.) coup de poignard dans le dos. Attaque déloyale. Dans ce champ clos [le Palais Bourbon], le croc-en-jambe, la chausse-trape et le coup de poignard dans le dos, sont choses fort appréciées des vainqueurs (Clemenceau, Vers réparation, 1899, p. 343). Coup de poing. Garine vient de le frapper d'un coup de poing à la mâchoire; le poing encore fermé, il fronce les sourcils (Malraux, Conquér., 1928, p. 157); au fig. [appos. ou fonction d'adj.] qui produit une forte impression. Notre titre est un titre coup de poing et nous le voulions ainsi. Il s'agissait d'attirer l'attention (Le Monde, 5 oct. 1966 ds Gilb. 1971, p. 118). Coup de sabre. Coup de talon, de trique. d) Verbe + coup. Allonger, donner un coup; échanger des coups; frapper un coup; parer un coup. Rendre un coup. Lui, comme un boxeur sonné, qui ne rend plus les coups (Montherl., J. filles, 1936, p. 967).
a) Locutions
Loc. prép.
À coups de. Ils les assommeraient à coups de pierre (Zola, Débâcle,1892, p. 462).Au fig., péj. À l'aide de, en ayant recours à des procédés expéditifs et inefficaces. À coups de théories. Le bloc des faits acquis était trop compact pour qu'on pût l'entamer à coups d'articles de presse (De Gaulle, Mém. guerre,1954, p. 13).
Sous le coup de. Au fig. Sous la menace de. C'est sous le coup d'un arrêt de mort, entre la sentence et l'exécution, que j'ai composé cet ouvrage (Chateaubr., Mém., t. 1, 1848, p. 436).Sous l'effet de. Et, sous le coup de cette frousse salutaire, il prit enfin la décision que sa raison et sa volonté étaient incapables de prendre depuis six semaines (Montherl., Démon bien,1937, p. 1304).Tomber sous le coup de qqc. S'exposer à une sanction.
Loc. verbales
Faire d'une pierre deux coups; au fig. atteindre deux objectifs par la même action. Profiter de ce voyage pour faire d'une pierre deux coups et acheter chez son fournisseur attitré un lot d'épingles et de boîtes vitrées (H. Bazin, Vipère,1948, p. 117).
Sans coup férir. Sans combattre. Le village fut enlevé sans coup férir (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 551).Au fig. Sans difficulté. Ces dispositions légales ont permis aux résistants authentiques (...) de s'emparer sans coup férir de la totalité des journaux (Coston, A.B.C. journ.,1952, p. 69).
En mettre, en jeter un coup. Faire un effort, travailler dur (cf. Esn. 1966).
En prendre un coup. (fam. et arg.). Subir un dommage physique ou moral :
2. Dans notre région, d'après ce que j'ai vu, ça défile continuellement vers en bas. L'Autriche doit déboucher comme une chiasse dans les plaines de Mantoue. À mon avis, nous en prenons un bon coup. Giono, Bonheur fou,1957, p. 385.
b) En partic. Mouvement offensif dans un jeu. Le coup le plus violent et le plus dangereux du volley-ball est le smash, qui consiste à écraser le ballon au sol, de haut en bas, la main tendue, dans le camp opposé (Alleau1964, p. 523):
3. Avant de passer aux règles du jeu, expliquons tout d'abord le système employé pour noter les coups joués sur l'échiquier. (...) Remarquons que les coups sont généralement notés sur deux colonnes... Alleau1964p. 183.
Spéc., SP. (football). Coup franc. Droit de renvoyer le ballon au pied à partir d'un point convenu accordé à une équipe en réparation d'une faute de l'adversaire. Un coup franc indirect sera accordé à l'équipe adverse, à l'endroit où la faute a été commise (J. Mercier, Football,1966, p. 29).
SYNT. Coup heureux, malheureux; beau coup. Coup de dés. Un coup de dés jamais n'abolira le hasard (titre d'une œuvre de Mallarmé, 1897).
Loc. Marquer le coup (au fig., fam.). Manifester qu'on a été sensible à quelque chose. C'était la première fois qu'il trouvait les portes fermées en arrivant. Le patron avait voulu marquer le coup (Camus, Exil et roy.,1957, p. 1599).
2. Choc provoqué par le mouvement d'un corps venant heurter un autre corps. Synon. heurt, horion; (fam.) gnon, marron, mornifle, pain, pêche.Percé de l'épieu destiné aux bêtes farouches, le limier tourne sous le coup fatal (Chateaubr., Martyrs,t. 3, 1810, p. 180):
4. ... on distingua sur l'autre rive un lourd chariot chargé de foin, qui, en touchant le radeau, produisit un coup sourd dont l'ébranlement imitait le bruit du canon. Boylesve, La Leçon d'amour dans un parc,1902, p. 158.
SYNT., EXPR., a) Coup + adj. Coup sec. b) Coup + à + subst. Coup au cœur (au fig.). Violente douleur morale. Je sentis un coup au cœur quand elle lui dit : Monsieur, vous nous avez trompés; vous n'êtes pas un honnête homme (A. France, Pt Pierre, 1918, p. 154). c) Coup + de + subst. Coup d'arrêt. Coup de barre (au fig.) Fatigue subite et brutale; synon. coup de buis, coup de pompe. Coup de chaleur, coup de froid. Choc dû à une élévation ou un abaissement brutal de la température. Cette paralysie résulte d'un coup de froid (Garcin, Guide vétér., 1944, p. 118). Coup de foudre. Décharge électrique entre les nuages et le sol; p. métaph. choc psychologique dû à une surprise brutale. Le coup de foudre qui briserait sa vie tout entière (Sandeau, Melle de La Seiglière, 1848, p. 280); en partic. amour violent et subit. Comme le coup de foudre vient d'une secrète lassitude de ce que le catéchisme appelle la vertu, et de l'ennui que donne l'uniformité de la perfection, je croirais assez qu'il doit tomber le plus souvent sur ce qu'on appelle dans le monde de mauvais sujets (Stendhal, Amour, 1822, p. 55). Coup de grâce. Coup qui achève quelqu'un en mettant fin à ses souffrances; p. métaph. À la seule vue du visage de leur vieil ami, Samuel comprit. Feuillebois avait dû recevoir le coup de grâce (Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p. 217). Coup de grisou. Coup de sang. Congestion. Un coup de sang qui l'avait laissé à peu près paralysé (Pourrat, Gaspard, 1922, p. 70). Coup de soleil. Insolation subite. Rougon mourut presque subitement (...) d'un coup de soleil qu'il reçut (Zola, Fortune Rougon, 1871, p. 42). d) Verbe + coup. Compter les coups; prendre, recevoir des coups; rouer de coups. Tenir le coup. Supporter le choc; au fig. résister longtemps. C'était une habituée de la drogue. Ces vieilles-là, voyez-vous, ça tient parfois mieux le coup que les jeunes (Bernanos, Crime, 1935, p. 830).
a) Spéc., JURISPR. Coups et blessures (volontaires, involontaires) (cf. Réau-Rond.1951, p. 383).
b) P. méton.
Son émis par un choc. Le coup de gong final retentit. Le tumulte s'apaise (Morand, New York,1930, p. 61):
5. De l'amoncellement d'argenterie, sortirent comme des souris, un, deux, trois, quatre coups, aussi argentins et légers que s'ils fussent venus non de quelque pendule enfouie dans ce bric-à-brac tragique, mais de ces trésors d'Aladin eux-mêmes, ... Malraux, L'Espoir,1937, p. 552.
Spéc., THÉÂTRE. Les trois coups. Les trois coups (de maillet) annonçant le début d'une pièce. Les trois coups frappés, le rideau du théâtre levé, l'annoncier entre par la porte droite et va se placer solennellement au milieu de la scène (Claudel, Soulier,1929, 2epart., 1, p. 1041).
SYNT., EXPR., Coup de cloche ou absol. coup. Après le coup de cloche de midi moins le quart, les élèves quittaient les salles de classe (Arland, Ordre, 1929, p. 337). À ce moment le premier coup de deux heures résonna dans le silence. Ce bruit sembla réveiller Armand (Soulié, Mém. diable, t. 1, 1837, p. 12). Fam. Sur le coup de. Vers telle heure. Tout à coup sur le coup de minuit j'entends ma fenêtre qui claque (Claudel, Visages radieux, 1947, p. 800). Coup de tonnerre.
Marque laissée par un choc. Ce coup à la tempe semblerait attester que l'assassin a voulu assommer MlleStangerson (G. Leroux, Myst. ch. jaune,1907, p. 12).
Au fig. Choc, atteinte grave à la fortune, à la santé de quelqu'un. Coup dur :
6. Certainement, on finira par se résoudre à diminuer, (...) les droits sur les blés étrangers, ce qui sera, d'ailleurs, déplorable et portera un coup très sensible à l'agriculture française, déjà si profondément atteinte. Coppée, La Bonne souffrance,1898, p. 44.
SYNT., EXPR., Coup de vieux. Vieillissement subit. Moi, c'est Saïgon qui m'a flanqué le coup de vieux, et avant l'âge (Colette, Music-hall, 1913, p. 106); anton. iron. coup de jeune (cf. Ph. Bouvard, La Cuisse de Jupiter, Le Livre de poche, 1974, p. 35).
En partic. Atteinte morale qui cause un sentiment pénible, blessure morale. Si le ciel me frappe dans mes enfants, (...) je ne pourrai survivre à ce coup (Stendhal, Rouge et Noir,1830, p. 117):
7. Les amants ne se connaissent qu'au mal qu'ils se font, qu'aux coups qu'ils se portent. Toute la misère de l'attachement aux créatures tient dans ce vers impérissable : la paix qui m'envahit quand c'est vous qui souffrez. Mauriac, Journal1, 1934, p. 36.
3. Mouvement d'un projectile; en partic. décharge d'une arme à feu; p. méton. bruit produit par cette décharge. Poussée brutale du recul, quand le coup part, geste automatique de la culasse (Dorgelès, Croix de bois,1919, p. 277).
SYNT., EXPR., a) Coup + de + subst. Coup de feu; coup de fusil. Coup de revolver, revolver à + numéral + coups. Deux revolvers à six coups (Verne, Tour monde, 1873, p. 173). b) Verbe + coup. Faire le coup de feu. Combattre, participer à un combat de rue. Moi, socialiste, je suis prêt à faire le coup de feu, pour le gouvernement (Martin du G., Thib, Été 14, 1936, p. 608). Manquer son coup. Ne pas atteindre l'objectif visé. Nos paysans, sûrs à peu près de manquer leur coup en le tirant [l'épervier] (Pesquidoux, Chez nous, 1923, p. 189). Tirer un coup de feu (de canon, de pistolet, etc.). Ils auront perdu l'honneur sans avoir tiré, de toute la guerre, un seul coup de feu sur les Allemands (De Gaulle, Mém. guerre, 1954, p. 408). Tirer un coup de fusil. Au même moment le soldat tire son coup de fusil, et casse un bras à l'acteur qui faisait Othello (Stendhal, Racine et Shakspeare, t. 1, 1823, p. 16). P. métaph., fam. Tirer un coup, tirer son coup [Le suj. désigne un homme] Faire l'amour de manière expéditive. L'immortalité de l'âme, le libre arbitre, tout cela, c'est très drôle de s'occuper de cela jusqu'à vingt-deux ans; mais après, c'est fini. On doit s'occuper à tirer son coup sans attraper trop de vérole (Goncourt, Journal, 1860, p. 786).
Loc. Faire coup double. Atteindre deux objectifs en une seule fois (au fig.). M. Ernest Seillière y trouve l'occasion de faire coup double et de condamner tour à tour la fausseté de la vie de Jean-Jacques et la fausseté de son roman (Guéhenno, Jean-Jacques,1950, p. 206).
B.− [Avec une idée de simple mouvement] Mouvement d'un organe, d'une partie du corps, d'un élément et de tout ce qui est susceptible de servir d'instrument. [Il] plia d'un coup brusque la tête de son cheval, comme on donne un coup de barre au gouvernail, le fit pivoter (Montherl., Bestiaires,1926, p. 495):
8. Je me fais quelquefois l'effet d'un homme dans une barque. La barque s'éloigne du rivage. Je vois bien la terre et ses fleurs, ses maisons, tout ce qu'elle a de beau et de bon à m'offrir, mais il y a de temps en temps un puissant coup de rame qui m'éloigne un peu de tout cela. Green, Journal,1935, p. 47.
SYNT., EXPR., Coup + de + subst. Coup d'aile. Coup de balai; au fig. licenciement massif et brutal dans une entreprise. La nouvelle s'était répandue dans les rayons. Les consciences inquiètes frissonnaient, les honnêtetés les plus sûres d'elles redoutaient le coup de balai général (Zola, Bonh. dames, 1883, p. 714). Coup de barre. Le yacht donna une bande effroyable, et Wilson, qui tenait la roue, fut renversé par un coup de barre inattendu (Verne, Enf. cap. Grant, t. 2, 1868, p. 53); p. métaph., fils de l'un et l'autre Napoléon brisés par les coups de barre de la destinée (Barrès, Cahiers, t. 5, 1906-1907, p. 224). Coup de bistouri. Coup de brosse. Coup de chapeau. L'autre, à son approche, se fendit d'un grand coup de chapeau déclamatoire et ironique (Gide, Faux-monn., 1925, p. 1128); au fig. Coup de chapeau. ,,Hommage que l'on rend à quelqu'un ou à quelque chose`` (Le Monde, 19 mars 1966 ds Gilb. 1971, p. 118). Coup de chiffon. Coup de ciseaux. Coup de collier; au fig. effort violent. J'ai un vigoureux coup de collier à donner (Flaubert, Corresp., 1873, p. 77). Coup de crayon. Coup de fer (à friser). Coup de feu. Flambée subite. Son visage incendié par le coup de feu des fourneaux (Moselly, Terres lorr., 1907, p. 62); au fig. (théâtre, hôtellerie), période d'activité intense et fiévreuse. Dans le montage fiévreux de la pièce, dans le coup de feu des répétitions (Goncourt, Journal, 1885, p. 434). Coup de filet; au fig. opération fructueuse. La récolte manqua, il y eut une hausse considérable, ce qui leur permit de réaliser de gros bénéfices en écoulant leur provision. Peu de temps après ce coup de filet, (...) (Zola, Fortune Rougon, 1871, p. 57). Coup de fourchette; au fig. appétit. Un charmant garçon qui a un solide coup de fourchette (G. Leroux, Roul. tsar, 1912, p. 86). Coup de frein. Coup de glotte (phonét.). ,,Réalisation phonique résultant d'une fermeture de la glotte suivie d'une brusque ouverture`` (Mounin 1974). Coup de gueule; au fig. manifestation verbale d'une brusque colère. Pour le chambardement, ayant le coup de gueule facile et, à la rigueur, le coup de botte, mais en fin de compte un bon soûlard, incapable d'une méchanceté (Courteline, Train 8 h 47, 1888, 1repart., p. 36). Coup de jarret; au fig. Ce qu'il faut, c'est se singulariser. C'est, dès le départ, donner le coup de jarret qui vous placera au-dessus de la mêlée. Il est recommandé de se mettre sur la tête l'aura de la réussite bien avant d'avoir réussi (Ph. Bouvard, La Cuisse de Jupiter, Le Livre de poche, 1974, p. 27). Coup de langue; au fig. propos médisant; synon. camouflet, vanne. D'Aubigné était de cette race cassante qui ne se refuse jamais un coup de langue, et qui pour un bon mot va perdre vingt amis ou compromettre une utile carrière (Sainte-Beuve, Caus. lundi, t. 10, 1851-1862, p. 339); en partic. au plur. coups de langue. Commérages. De quatre à six, même remise d'enfants réclamés à l'intérieur, avec les quelques coups de langue indispensables (Frapié, Maternelle, 1904, p. 95). Coup de main; au fig. aide accordée à quelqu'un à l'impromptu. Le journalier Taboureau, brave garçon, obligeant, commode, donnait un coup de main à qui le lui demandait (Balzac, Méd. camp., 1833, p. 64). Coup de mer. Mouvement de la mer, forte lame. Nous avions toujours navigué au milieu des plus grosses lames; un coup de mer avait même emporté notre petit canot (Voy. La Pérouse, t. 3, 1797, p. 168). Coup d'œil. Loc. jeter un coup d'œil. Lancer un regard rapide. Eugène lui jeta un coup d'œil moqueur (G. Roy, Bonheur occas., 1945, p. 298). Lire rapidement. Cet ouvrage important, sur lequel je viens de jeter un rapide coup d'œil (Hugo, Corresp., 1825, p. 401). Coup de peigne. Coup de pompe (arg.). Fatigue subite. Coup de pouce; au fig. intervention discrète. Meyer, aux heures critiques (...) donnait, au signal, le petit coup de pouce qui raffermissait le régime infâme (L. Daudet, Brév. journ., 1936, p. 42). Coup de tabac (arg. de la Marine). Tempête, forte vague. Coup de tête. Au fig. décision soudaine et irréfléchie. Sur un coup de tête je me décidai à tout vendre (Proust, Fugit., 1922, p. 640). Coup de vent. Parfois un coup de vent emportait les nuages vers la côte Sainte-Catherine (Flaub., Mme Bovary, t. 2, 1857, p. 112); loc. en coup de vent. Avec la rapidité du vent, à toute vitesse. Yvonne (...) entra dans la loge en coup de vent (Arland, Ordre, 1929, p. 344).
Loc. À petits coups. Les trois femmes boivent leur café à petits coups, en parlant tout bas (Zola, Cap. Burle,1883, p. 108).
Rem. On rencontre ds la docum. le mot composé à-coups, subst. masc. (gén. au plur.). Brusque discontinuité dans un mouvement. Synon. intermittence, saccade. L'administration n'a pu être mise en place sans délai et sans à-coups (De Gaulle, Mém. guerre, 1959, p. 452).
P. ext. [Avec ou sans idée de mouvement] Actionnement intermittent d'un instrument; p. méton. bruit de cet instrument.
SYNT., EXPR., Coup de klaxon, de sifflet; coup de téléphone (ou fam. coup de fil). Ce coup de téléphone imprévu a jeté un petit froid (Guitry, Veilleur, 1911, I, p. 4); coup de timbre; coup de trompette.
C.− [Avec une idée de promptitude, de vivacité]
1. Cas où une chose se fait. Synon. fois.Va! vide un bon coup ton cœur où l'amour a déposé (Renard, Journal,1893, p. 168).
Expr. À tous les coups l'on gagne.
Locutions
À coup sûr. Sûrement, certainement :
9. On est saisi par le grand nombre de choses heureuses que les gens manquent, simplement parce que, faute de relations, ils n'ont pas su à quelle porte frapper. Et c'est à coup sûr une tragédie, ... Montherlant, Les Jeunes filles,1936, p. 928.
Après coup. Postérieurement à quelque chose. Elle [l'église] était de style ogival et de nombreuses innovations y avaient été insérées après coup (Huysmans, Oblat,t. 1, 1903, p. 309).
Ce coup-ci, ce coup-là. Après cette pièce-là, c'en a été une autre, et puis une autre. Et chaque fois, je disais : « Ce coup-ci, c'est la dernière fois que Lily joue! » (Colette, Music-hall,1913, p. 187).
Coup sur coup. À la suite l'un(e) de l'autre. Ces petites phrases en forme de flèches, bien aiguës, bien froides, bien acérées, décochées coup sur coup (Balzac, Langeais,1834, p. 278).
Du coup. À la suite de quoi :
10. ... les hasards d'une conversation avec sa mère l'amenèrent à en faire l'aveu, et le lièrent ainsi à une fantaisie de gosse, qu'il eût si facilement abandonnée, qu'il était du coup dans l'obligation de poursuivre. Aragon, Les Beaux quartiers,1936, p. 239.
Du même coup. En conséquence de quoi. Synon. par voie de conséquence :
11. Lorsque toutes mes créatures vivront, que j'aurai donné tout mon fruit, qu'il ne restera plus que de me répéter, alors peut-être, s'il est temps encore, songerai-je sérieusement à désarmer le dieu impitoyable de M. Singlin et de la tante Sainte-Thècle, et éviterai-je du même coup d'écrire, à la fin de ma carrière, d'aussi mauvaises tragédies que celles du vieillard Corneille. Mauriac, La Vie de Jean Racine,1928, p. 64.
Du premier coup. Il faut aller là du simple au compliqué et ne pas chercher à atteindre du premier coup la perfection de chaque nouvel appareil (Brunerie, Industr. alim.,1949, p. 171).
D'un coup. En une fois. Pour une fois qu'on pouvait gagner mille francs d'un coup (Céline, Voyage,1932, p. 321).
D'un seul coup. Caligula souhaitoit que le peuple romain n'eût qu'une seule tête, pour l'abattre d'un seul coup (Chateaubr., Génie,t. 2, 1803, p. 582).
Encore un coup. Encore une fois. Adieu, mon petit Rémi; embrasse-moi encore un coup (Malot, Sans fam.,1878, p. 9).
Pour un coup, pour le coup. Il n'y a rien à faire dans les théâtres cette saison, mais le music-hall est là pour un coup! (Colette, Music-hall,1913, p. 188).
Sur le coup. Immédiatement. Les maladies comme celle dont Armand avait été atteint ont cela d'agréable qu'elles tuent sur le coup ou se laissent vaincre très vite (Dumas fils, Dame Cam.,1848, p. 59).
Tout à coup. Soudain, subitement. Gardant encore un peu de cet air glacial qui, tout à coup, avait succédé à l'expression de la plus vive tendresse (Stendhal, Rouge et Noir,1830, p. 94).
Tout d'un coup
Vx. D'un seul coup, en une fois :
12. Les vêtements dérobèrent, presque en entier, la femme aux yeux de l'homme. Or, il n'est pas facile à l'œil de percer les plis d'une draperie pour reconnaître les vraies formes qu'elle cache; on ne parvient pas tout d'un coup à juger par la vue de la résistance que le toucher doit éprouver; cet art demande quelques expériences... Laclos, De l'Éducation des femmes,1803, p. 463.
Brusquement :
13. Après avoir longtemps manqué de pensionnaires et s'être vu réduit pendant tout l'hiver à quelques externes, Auguste a été tout d'un coup et comme par enchantement entouré de monde, et sa maison pleine. M. de Guérin, Correspondance,1835, p. 224.
2. P. méton.
a) Quantité de liquide (et notamment de vin) qu'on peut boire assez rapidement en une seule fois. J'ai dû boire un coup de trop? (Pourrat, Gaspard,1922, p. 72):
14. Quelques-uns de ceux qui sortent discutent le coup sous la casquette, avec leur visage parisien de tuberculose et de revendication. Mais ce sont des révoltés paisibles, à la française : un coup de blanc arrangera tout cela. Montherlant, Les Jeunes filles,1936, p. 959.
SYNT. Le coup de l'étrier. Le verre que l'on boit avant de se séparer. Il est grand temps de demander l'addition et de partir, (...) Voyons, fit-il, pour se verser du courage, buvons le coup de l'étrier; et il remplit un verre de brandy (Huysmans, À rebours, 1884, p. 182). Avoir un coup dans l'aile, dans le nez. Être légèrement ivre (attesté ds Sandry-Carr. 1953, p. 62).
b) Manœuvre, action exécutée rapidement et impliquant un risque et un profit. Ce discours du colonel, c'est encore un coup des fascistes (Malraux, Espoir,1937, p. 463):
15. ... il serait bon de lier tous les meubles avec des cordes : on les descendrait facilement par la fenêtre peu élevée du premier étage, et il faudrait tenter le coup vers les onze heures, un jour de nuit noire. Champfleury, Les Aventures de MlleMariette,1853, p. 53.
SYNT., EXPR., a) Coup + adj. Coup monté (cf. infra monter un coup). b) Adj. + coup. Beau, bon coup. Un voleur qui cherche un bon coup à faire (Zola, Fortune Rougon, 1871, p. 66). Mauvais coup. Sale coup. On vient de me faire un sale coup. (...) Je suis nommé maire au premier tour de scrutin (Gide, Corresp. [avec Valéry], 1896, p. 264). c) Coup + de + subst. Coup d'audace. Coup de Bourse. Coup d'éclat. Entreprise sortant de l'ordinaire et qui étonne par sa hardiesse et sa rapidité d'exécution. Bonaparte méditait quelque coup d'éclat, qui l'élevât encore plus haut dans l'opinion des Français (Sainte-Beuve, Prem. lundis, t. 1, 1869, p. 133). Coup d'essai. Première tentative. Elle s'entend à enjôler les hommes et elle n'est pas à son coup d'essai (Moselly, Terres lorr., 1907, p. 263). Coup d'État (synon. putsch). Le vieux La Fayette lui-même, revenu à ses ardeurs de 1789, rêvait d'un pronunciamiento à la manière espagnole : le coup d'état du 2 décembre se préparait dès ce moment-là (Bainville, Hist. Fr., t. 2, 1924, p. 153). Coup de force. Les cris de mort jusque dans le prétoire, les juges insurgés contre la loi, le traître acclamé, le faussaire glorifié, la violence dans la rue, l'appel aux coups de force, les préparations criminelles, le coup de Jarnac d'un ministre en plein Parlement (Clemenceau, Vers réparation, 1899, pp. 420-421). Coup de génie. Coup de main. Manœuvre militaire, à objectif limité et exécutée avec rapidité. Nous avons pris la citadelle après une petite fusillade, et par un coup de main. (Napoléon 1er, Lettres Joseph., 1797, p. 63). Coup de maître. Coup de poker. Coup de théâtre (au théâtre). Péripétie inattendue; p. ext., cour. événement inattendu. Imaginez le coup de théâtre, à cette réponse de Viot : − Messieurs, tout est payé! Nos inconnus nous regardèrent comme jamais trois chiens n'ont regardé trois évêques (Musset, Mimi Pinson, 1845, p. 227). d) Verbe + coup. Discuter le coup (fam.). Commenter un événement, une action, s'expliquer (cf. supra ex. 14). Être aux cent coups (fam.). Être dans l'embarras, dans une vive inquiétude. Être dans le coup (fam.). Participer à une action. Les Anglais se battent; avant six mois les amerloques seront dans le coup (Sartre, Mort âme, 1949, p. 179); arg. être au courant de l'actualité, des idées en vogue, d'un projet, d'un secret, etc. Ici aux États-Unis tout bouge, tout change si vite que pour « être dans le coup » et y rester il ne faut jamais fermer l'œil; une seconde d'inattention et vous voilà rejeté de l'autre côté du fameux fossé, le « generation gap » (Le Monde, 19 avr. 1970 ds Gilb. 1971); synon. être à la page, être dans le vent, vivre avec son temps. Faire le coup (fam.). Commettre telle ou telle chose. Il est impossible que ce ne soit pas un coup monté entre les gens du pays (...) mais il y a deux communes (...) et il y a dans chacune cinq à six gens capables d'avoir fait le coup (Balzac, Paysans, 1844-50, p. 381). Faire les quatre cents coups (arg.). Mener une vie irrégulière et agitée. Quand j'ai pris une cuite carabinée et fait les quatre cents coups, je me sens saint (Green, Chaque homme dans sa nuit, 1960, p. 332). Mettre qqn dans le coup (fam.). Mettre quelqu'un au courant de quelque chose. Enguerrand l'avait ... « mise dans le coup » et elle [Angèle] avait, alors, pris les risques qu'il fallait (Vialar, Brisées hautes, 1952, p. 106). Monter un coup, monter le coup à qqn. Manigancer une affaire au profit de quelqu'un; p. ext. fam. tromper quelqu'un en lui promettant monts et merveilles. Vous vous laisseriez monter le coup par ces gens qui ne cherchent qu'une chose, c'est à vendre; et que feriez-vous d'une auto, vous qui ne sortez jamais? (Proust, Fugit., 1922, p. 468). Rater son coup. J'ai raté mon coup. La prochaine fois je ferai mieux (Sartre, Mouches, 1943, II, 1ertabl., 3, p. 54). Réussir son coup. Risquer un coup. Valoir le coup (fam.). Valoir la peine. Si vraiment on peut avoir un machin à grand tirage avec photos, reportages, etc., ça vaudrait tout de même le coup (Beauvoir, Mandarins, 1954, p. 544).
Rem. La constr. le coup de (du) sert à forger de nombreuses expr. fam. ou arg. signifiant ,,tour, stratagème original``. Synon. astuce, combine, truc. Je connais ce coup-là, c'est le coup du racolage (A. Daudet, Immortel, 1888, p. 77). Vous comprenez, dis-je, elle lui a fait le coup de l'équilibre conjugal du foyer, de la morale, et elle l'a eu (Sagan, Bonjour tristesse, 1954, p. 95). Le coup du marin. Dès que ma main fut dans la sienne, toutes les angoisses, tous les soucis s'étaient évanouis. Le « coup du marin » avait réussi! (Triolet, Prem. accroc, 1945, p. 246). Le coup de la panne. Le coup du père François (arg. des voleurs, vieilli). Manœuvre qui consiste à étrangler sa victime avec un foulard pendant qu'un comparse lui vide les poches (cf. Virmaitre, Dict. arg. fin-de-s., 1894, p. 75).
P. anal. Action heureuse ou malheureuse du hasard ou des éléments. Coup du sort, coup du hasard :
16. La rencontre. Quel coup de hasard pour deux hommes qui se seraient fuis, ignorants de la rondeur de la Terre, quand ils se trouveraient nez à nez aux antipodes du lieu! Valéry, Tel quel I,1941, p. 40.
P. ext. Habileté, savoir faire. Coup de main, coup de patte; avoir, attraper, prendre le coup :
17. Dans l'amour de rouler soi-même ses cigarettes, je vois tout le côté petit-petit du Français, méticuleux, maniaque, célibataire, radin (...) et en même temps le coup de main habile, le fameux coup de main français. Montherlant, Carnets,Paris, Gallimard, 1932, pp. 116-117.
Rem. On rencontre ds la docum. le verbe trans. colaphiser. a) Hist. (Moy. Âge). Colaphiser le juif [p. réf. à la cérémonie au cours de laquelle, le jour de Pâques, on amenait dans la cathédrale de Toulouse un juif à qui le comte de Toulouse ou un autre noble, donnait un soufflet en représailles de celui que Jésus reçut durant sa Passion]. b) Littér., fam. Souffleter. Cet impertinent qui avait insulté cette femme honnête, fut colaphisé d'importance (S. Mercier, Néol., t. 1, 1801, p. 113).
Prononc. et Orth. : [ku]. Ds Ac. depuis 1694. p final n'est que survivance étymol. dans la graph. et reste muet dans coup, contrecoup, beaucoup (sauf en cas de liaison), tout-à-coup, dans drap et sparadrap, dans loup et cantaloup, dans sirop, dans trop (sauf en cas de liaison). À comparer avec cap et cep dans lesquels p se prononce sous l'infl. de l'orth., et avec les interj. hop! hip! houp! dans lesquelles p se prononce par souci d'expressivité. Cf. Mart. Comment prononce 1913, p. 284, et Fouché Prononc. 1959, p. 390. Homon. cou, coût, formes du verbe coudre. Étymol. et Hist. A. 1. 881 colp « mouvement par lequel un corps vient heurter un autre corps » (Eulalie, 20 ds Henry Chrestomathie, p. 3); 1230-50 fig. cols en aigue (Comte de Poitiers, 5 ds T.-L.); 1585 coups fourrez (N. du Fail, Eutrapel ds Œuvres, éd. J. Assézat, t. 2, p. 279); 2. ca 1100 colp « marque laissée par un choc » (Roland, éd. J. Bédier, 2875); 3. ca 1250 fig. cop « effet, conséquence; choc » (Ph. Mousket, Chron., 11674 ds T.-L.); 1606 coup au cœur « blessure morale » (Merlin Coccaie, VI ds Gdf. Compl.); 4. ca 1470 tirer un coup de bombarde (Ph. de Commynes, Mémoires, éd. Calmette, I, 153). B. 1. Ca 1100 « entreprise, action (ici, combat) » (Roland, 1109); 1548 coup d'essay (N. du Fail, Baliverneries ds Œuvres, éd. J. Assézat, t. 1, p. 195); 1798 faire un bon coup (arg. des voleurs) (ds Fr. mod., t. 6, p. 153 d'apr. Quem.); 2. ca 1190 « événement subit (heureux ou malheureux) » (A. de Paris, Alexandre, éd. Elliott Monographs, III, 313 : gens cols); 1538 coup de hazart (P. Gringore, Œuvres complètes, éd. A. de Montaiglon et Ch. d'Héricault, I, 29); 1743 coup de théâtre (Trév.). C. 1. « Mouvement brutal des éléments » 1200-06 caus de tounoirre (R. de Clari, éd. Ph. Lauer, Constantinople, § LXXXVIII); 2. « mouvement rapide d'une partie du corps, d'un objet dont on fait usage » xiiies. coup [de dés] (Semrau F., Würfel und Würfelspiel im alten Frankreich d'apr. FEW t. 2, p. 866 a); 1634 coup de chapeau (Corneille, La Galerie du Palais, II, 2); 3. xiiies. au colp « à la fois » (Bans aux échevins, OO, fo21 vo, Arch. Douai ds Gdf.); 1268 a cest coup « cette fois-ci » (Le Roman de Claris et Laris, éd. J. Alton, 16643); ca 1320 d'un seul cop (Ovide moralisé, éd. C. de Boer, VI, 1210); ca 1450 tout a cop « aussitôt, sur-le-champ » (Le Mystère du Vieil Testament, éd. J. de Rothschild, t. 3, XXIX, 25761); ca 1470 après le coup « après coup » (Ph. de Commynes, Mémoires, éd. Calmette, I, 91); 4. dernier quart xives. « boire un coup » (J. Froissart, Chroniques, éd. S. Luce, t. 3, p. 14 : burent un cop). Du b. lat. colpus (Loi salique ds TLL s.v.) forme syncopée du lat. class. colaphus, transcr. du gr. κ ο ́ λ α φ ο ς « soufflet ». Fréq. abs. littér. : 42 356. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 41 222, b) 70 708; xxes. : a) 73 860, b) 62 653. Bbg. Gottsch. Redens. 1930, passim.Goug. Lang. pop. 1929, p. 196. − Goug. Mots t. 1 1962, p. 249. − Guiraud (P.). Distribution et transformation de la not. de coup. Lang. fr. 1969, no4, pp. 67-74. − Quem. Fichier. − Rat (M.). Var. sur le mot coup. Vie Lang. 1966, pp. 641-644. − Rog. 1965, p. 118, 126, 138.

Article lié : « Ça vaut le coup » ou « ça vaut le coût » ?

Wiktionnaire

Nom commun - français

coup \ku\ masculin

  1. Impression que fait un corps sur un autre en le frappant.
    • Le docteur Paul était ensuite venu, brillamment expliquer à la barre comment les coups avaient occasionné, en effet, seize blessures. — (Francis Carco, Messieurs les vrais de vrai, Les Éditions de France, Paris, 1927)
    • C’est ainsi que, le 21 adar 4996 (1236), un pêcheur chrétien étant mort des coups que lui avait portés un juif au cours d’une rixe, la foule envahit la juiverie vicomtale, avec l’intention de la mettre à sac. — (Léon Berman, Histoire des Juifs de France des origines à nos jours, 1937)
    • J’ai vu des prisonniers jetés à coups de matraque d’un étage à l’autre et qui, hébétés par la torture et les coups, ne savaient plus que murmurer en arabe les premières paroles d’une ancienne prière. — (Henri Alleg, La Question, 1957)
    • Et crescendo, la querelle s’envenime en injures, bien sûr, et non en coups, car les deux gondoliers savent pratiquer l’art de « rompre le fer ». — (Annarosa Poli, L’Italie dans la vie et dans l’œuvre de George Sand, Centre interuniversitaire de recherche sur le voyage en Italie, 1960, page 116)
    • Instinctivement Éric esquive le coup, bascule en arrière en entraînant l’homme dans sa chute et l’envoie bouler à quelques mètres. — (Michel Remoissenet, Ondes et catastrophes : Du soliton au tsunami, Books on Demand, 2008, page 111)
    • Frapper un coup ou deux coups à une porte avec le marteau.
    • Faire tomber une grêle de coups sur les épaules de quelqu’un.
  2. (Figuré) Se dit en parlant des choses qui nuisent, qui causent un sentiment pénible, etc.
    • On affirme trop souvent qu’après la première génération félibréenne et les œuvres de Roumanille, d’Aubanel et de Mistral, la littérature de langue d’oc n’a point soutenu sa valeur, et que, Mistral disparu, le Félibrige a reçu un coup mortel. — (Émile Ripert, Le Félibrige, Armand Collin, 1924, page 129)
    • Il a déjà réussi à faire renvoyer un policier. Il continuera à faire de sales coups jusqu’au bout. — (Ronan Farrow, Annick Cojean, Ronan Farrow : « Ce qui se passe autour de Roman Polanski et d’Adèle Haenel est prometteur », Le Monde. Mis en ligne le 18 novembre 2019)
    • Il supporte les coups du sort, du destin, de la fortune avec une noble résignation.
    • Cette défaite porta un coup funeste à la gloire de ce prince.
    • Son autorité chancelante allait recevoir un dernier coup.
    • Cette entreprise a porté un coup à sa fortune.
    • Ce chagrin porta un coup à sa santé.
  3. Décharge et bruit que font les armes à feu lorsqu’on les tire.
    • J’avais oublié le cran d’arrêt […] Pour un peu, je pressais la gâchette sans que le coup partît. — (Gaston Cherpillod, Les Changelins, L’Âge d’Homme, 1981, page 147)
    • On chantait presque tous les mois des Te Deum pour quelque nouvelle victoire, et le canon de l’arsenal tirait ses vingt et un coups, qui vous faisaient trembler le cœur. — (Erckmann-Chatrian, Histoire d’un conscrit de 1813, J. Hetzel, 1864)
    • Mais, saperlotte ! tâchons donc que tout ça se passe tranquillement ; ça vaudrait beaucoup mieux. Puisque nous avons le suffrage universel, il n’y a plus besoin de coups de fusil. — (Émile-Ambroise Thirion, La Politique au village, Fischbacher, 1896, page 248)
    • Tirer des coups de canon, de fusil.
  4. Évènement imprévu qui a frappé quelqu’un soudainement.
    • Ce fut un coup de massue, un coup de foudre, un coup de tonnerre pour lui.
    • Coup de fortune, de bonheur, de malheur, de hasard.
    • Coup du ciel, d’en haut, de la Providence, de la grâce.
    • Mort sur le coup.
  5. Son que rendent certains corps lorsqu’ils viennent à être frappés.
    • Un coup de cloche, de tambour, de tam-tam.
    • Au coup de minuit, de midi, de trois heures, etc. : Au moment où minuit, où midi, où trois heures, etc., sonnent.
    • Je suis arrivé au Monte-Carlo sur le coup de onze heures. — (Jo Barnais [Georges Auguste Charles Guibourg, dit Georgius], Mort aux ténors, chapitre IX, Série noire, Gallimard, 1956, page 75)
  6. Action rapide et momentanée.
    • D’un coup de rasoir, je lui coupai la tête, et le tronc, d’où un flot de sang s’échappait, gigota quelques secondes sur le parquet. — (Octave Mirbeau, Lettres de ma chaumière : La Tête coupée, A. Laurent, 1886)
    • Les portières sont refermées, après la visite du contrôleur. Un dernier coup de sifflet annonce que le train va se mettre en marche… — (Jules Verne, Claudius Bombarnac, chapitre I, J. Hetzel et Cie, Paris, 1892)
    • Lier plusieurs notes d’un coup d’archet. — Un coup de gosier. — Un coup de ciseau.
  7. (Par extension) Ce qu’on fait rapidement, légèrement, ou sans y apporter le même soin que de coutume.
    • Je suis trop pressé pour me faire coiffer, un coup de peigne suffira.
    • Donnez un coup de balai à cette chambre.
    • Dans la vie de Clémence Dufour, il y avait quand même pas mal de vaisselles, de patins à l’entrée du salon, de « petits coups à donner » sur la table, avant de mettre le couvert. — (Philippe Delerm, Il avait plu tout le dimanche, Mercure de France, 1998, page 68)
  8. (Par métonymie) Petite quantité de quelque chose.
    • Mettre un coup de peinture, de Tipex, d’engrais.
  9. Mouvement impétueux, comme du vent qui souffle sur la mer, d’une tempête.
    • Coup de vent, de mistral.
    • Un coup de mer écarta leurs vaisseaux, les jeta, les poussa sur les côtes.
  10. Manière de jouer, chance au jeu.
    • Il a fait un beau coup.
  11. Action humaine inattendue.
    • Les affaires de banque je n'y comprends peut-être pas grand-chose, mais les mauvais coups, je les sens et je dis que cette affaire n'est pas catholique. — (Jacqueline Mirande, Étranger, d'où viens-tu ?, Casterman, 1974, chapitre 2)
    • Heureux coup.
    • C’est un coup de génie, de désespoir.
  12. Fois.
    • Il a réussi du premier coup.
    • Il a encore trois coups à jouer.
    • J’ai eu du chagrin de savoir que ton neveu s’était fait refuser aux postes encore un coup. — (Marcel Aymé, La jument verte, Gallimard, 1933, réédition Le Livre de Poche, page 25)
  13. Quantité que l’on boit en une fois.
    • Pour l’Ogre il se remit à boire ravis d’avoir de quoy si bien regaler ses amis. Il but une douzaine de coups plus qu’à l’ordinaire, ce qui luy donna un peu dans la teste, et l’obligea de s’aller coucher. — (Charles Perrault, Histoires ou Contes du temps passé, Paris, Barbin 1697, page 209.)
    • On peut voir à la terrasse des petits cafés des gens qui prennent l’apéro en famille pour tuer le dimanche comme l’homme à la bêche prend un coup de blanc le matin pour « tuer le ver » avant de retrousser ses manches, se cracher dans les mains avant d'empoigner son outil […]. — (Blaise Cendrars, La banlieue de Paris , chap. Ouest, Guilde du Livre/Pierre Seghers, 1949, dans les Œuvres complètes, tome 7, Éditions Denoël, 1963, page 155)
    • « Tu bois des coups le samedi soir, et le dimanche matin tout le monde se réunit autour du même centre d’intérêt, la cafetière, pour passer la gueule de bois. » — (Stéphanie Maurice, La passion du tuning, Seuil, 2015, collection Raconter la vie, page 11)
  14. Acte sexuel expéditif.
    • J’ai tiré mon coup.
    • T’as cassé mon coup.
    • C’était pas un bon coup.
  15. (Nouvelle-Calédonie) Partie, sortie[1].
    • Un coup de chasse.
    • Un coup de pêche.
    • Un coup de fête.
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

COUP. n. m.
Impression que fait un corps sur un autre en le frappant. Coup sec. Coup violent. La force, la pesanteur du coup. Frapper un coup ou deux coups à une porte avec le marteau. Frapper à coups redoublés. Coup d'épée, de sabre, de poignard. Coup de cognée, de hache, de marteau. Coup de pied, de poing. Coup de coude. Coup de bec. Coup de dent. Coup de griffe, de patte. Coup de bâton. Coup d'éperon. Coup de barre. Coup de bistouri. Donner, frapper, porter, allonger, assener un coup. Recevoir un coup. Détourner, parer, esquiver un coup. Amortir un coup. Faire tomber une grêle de coups sur les épaules de quelqu'un. Percé de coups. En termes de Marine, Coup de talon, Choc qu'éprouve un navire en passant sur un écueil. Fam., Faire le coup de poing, Se battre à coups de poing avec quelqu'un. Par extension, Coup de poing, Instrument d'acier dont on se garnit le poing pour frapper. Fig., Coup de fouet, Impression vive qui a pour résultat d'exciter l'activité physiologique. Ces enfants sont débiles : l'air de la mer leur donnent le coup de fouet dont ils ont besoin. Par analogie, il signifie, en termes de Médecine, Rupture de fibres musculaires, ou de muscles minces, qui survient à la jambe par suite d'un effort. Coup de boutoir. Voyez BOUTOIR. Coup de grâce, Le dernier coup que l'exécuteur donne à un supplicié afin de terminer ses souffrances. Il se dit aussi du Coup donné par un chasseur, un boucher à une bête blessée pour l'achever. On le dit figurément de Ce qui achève de perdre, de ruiner quelqu'un. Cet événement fut son coup de grâce. Vous lui avez porté le coup de grâce, il ne s'en relèvera jamais. On dit même Donner, porter le dernier coup. Il donna le dernier coup à ce parti. Fig. et fam., Faire d'une pierre deux coups, Venir à bout de deux choses par un seul moyen, profiter de la même occasion pour terminer deux affaires. Fig., Frapper un grand coup, Produire un effet considérable et décisif. Sans coup férir, Sans se battre, sans en venir aux mains. On a pris cette place sans coup férir. Il signifie aussi figurément et familièrement sans éprouver de résistance. Il en est venu à bout sans coup férir. Fig. et fam., C'est un coup dans l'eau, un coup d'épée dans l'eau, se dit d'un Effort, d'une tentative qui n'a point de suite, d'effet. Fig. et fam., Avoir un coup de marteau, Être un peu fou. Fig. et fam., Coup de bec, coup de dent, coup de langue, Médisance, raillerie piquante. On dit aussi Donner un coup de patte, des coups de patte à quelqu'un, Lâcher quelque trait malin contre quelqu'un. Fig. et fam., Casser le nez à coups d'encensoir, Donner en face à quelqu'un des louanges maladroites et outrées. Fig., Traduire à coups de dictionnaire, se dit de Ceux qui, peu familiarisés avec une langue, sont obligés, pour la traduire, d'avoir fréquemment recours au dictionnaire. On le dit quelquefois par dénigrement d'un Mauvais traducteur. Il a fait sa traduction à coups de dictionnaire. Fig. et fam., Le coup de pied de l'âne, L'insulte qu'adresse un homme lâche ou faible à celui dont il n'a plus à redouter le pouvoir ou la force. En termes d'Escrime, Coup fourré, se dit quand chacun des deux hommes qui se battent donne un coup et en reçoit un autre en même temps. On le dit figurément des Mauvais offices que deux personnes se rendent mutuellement et en même temps. Porter un coup fourré. Fig., Juger des coups, Assister en spectateur à une lutte, à un débat. Fig., Donner à quelqu'un un coup de Jarnac, le coup de Jarnac signifie Frapper quelqu'un par traîtrise, par allusion au duel où Jarnac tua La Châtaigneraie en lui portant un coup imprévu. Coup de feu. Voyez FEU. Il se dit figurément, surtout en parlant des Choses qui nuisent, qui causent un sentiment pénible, etc. Il supporte les coups du sort, du destin, de la fortune avec une noble résignation. Cette défaite porta un coup funeste à la gloire de ce prince. Son autorité chancelante allait recevoir un dernier coup. On dit de même Porter un coup, en parlant de Ce qui nuit. Cette entreprise a porté un coup à sa fortune. Ce chagrin porta un coup à sa santé. Porter coup se dit aussi de Certaines choses qui font une grande impression ou qui tirent à conséquence. Telle est la considération dont il jouit, que tout ce qu'il dit porte coup. Comme il ne dit rien qui ne soit à propos, toutes ses paroles portent coup. Cette démarche a porté coup.

COUP se dit aussi de la Charge d'une arme à feu. Les soldats avaient chacun dix coups à tirer. Il se dit encore de la Décharge et du bruit que font les armes à feu lorsqu'on les tire. Tirer des coups de canon, de fusil. Le bâtiment salua le fort de plusieurs coups de canon. Une salve de cent coups de canon. Coup de canon, de fusil, de revolver, etc., Coup que frappe le projectile lancé par un canon, un fusil, etc. Tirer à coup perdu, à coups perdus, Tirer au hasard, ou tirer hors de portée. Fusil à deux coups, Fusil de chasse à double canon, avec lequel on peut tirer deux coups de suite sans être obligé de recharger. Fam., Faire le coup de fusil, Tirer des coups de fusil. Il se dit seulement des Soldats qui tirent sur l'ennemi, et surtout de ceux qui vont en tirailleurs. En termes de Chasse, on dit Coup double quand le chasseur tue deux pièces de gibier en déchargeant successivement les deux canons de son fusil. Fig., Faire coup double, Obtenir deux résultats, deux succès par un seul effort. Coup de tonnerre, Action de la foudre sur les corps qu'elle frappe. Un coup de tonnerre abattit le haut du clocher. Fig., Ce fut un coup de massue, un coup de foudre, un coup de tonnerre pour lui, se dit d'un Événement imprévu et fâcheux qui a frappé quelqu'un tout à coup. On dit dans le même sens Il a reçu un coup de massue sur la tête. On dit aussi Coup de foudre en parlant d'un Sentiment passionné qui se déclare subitement. En la vouant, il a eu le coup de foudre. Coup de tonnerre désigne par extension le Bruit qui accompagne ou suit un éclair. Quelques coups de tonnerre se faisaient entendre dans le lointain.

COUP se dit également du Son que rendent certains corps lorsqu'ils viennent à être frappés. Un coup de cloche, de tambour, de tam-tam. Au coup de minuit, de midi, de trois heures, etc., Au moment où minuit, où midi, où trois heures, etc., sonnent. Il se dit encore d'une Action rapide et momentanée. Lier plusieurs notes d'un coup d'archet. Un coup de gosier. Un coup de ciseau. Un coup de lime. Un coup de sifflet. Un coup de gouvernail. Coup de langue se dit spécialement, en termes de Musique, de la Manière de détacher une note isolée en jouant d'un instrument à vent. Il se dit par extension en parlant de Ce qu'on fait rapidement, légèrement, ou sans y apporter le même soin que de coutume. Je suis trop pressé pour me faire coiffer, un coup de peigne suffira. Donnez un coup de balai à cette chambre. Coup de pinceau, se dit figurément en parlant des Descriptions, des peintures qui se font dans les poèmes, dans les romans, etc. Cette description est exacte ; toutefois, il y manque quelques coups de pinceau. Il donna le dernier coup de pinceau à son personnage. Coup de filet, Le jet du filet dans l'eau pour prendre du poisson. Il a pris tout ce poisson d'un coup de filet. Fig. et fam., Prendre plusieurs voleurs, plusieurs ennemis, d'un seul coup de filet, Envelopper et prendre plusieurs voleurs à la fois. On dit dans un sens analogue, Voilà un beau coup de filet. On le dit aussi lorsqu'on parle de Quelque gain, de quelque profit considérable fait d'un seul coup. Fam., Coup de chapeau. Voyez CHAPEAU. Fam., Donner un coup de pied jusqu'à tel endroit, Aller jusqu'à cet endroit. Cela ne se dit guère qu'en parlant d'un Endroit peu éloigné. On dit de même Il n'y a qu'un coup de pied d'ici à tel endroit. En termes de Mécanique, Coup de piston, La course entière accomplie par un piston dans un corps de pompe ou dans le cylindre d'une machine à vapeur pour se rendre d'une extrémité à l'autre. Fig., Coup de main, en termes de Guerre, Expédition, attaque faite à l'improviste. Cette place est à l'abri d'un coup de main. Il se dit aussi de Toute entreprise hardie dont l'exécution est prompte. Faire un coup de main. Fam., Donner un coup de main à quelqu'un, L'aider. Fig., Donner un coup d'épaule, Aider à quelque close, venir au secours de quelqu'un. Je vous remercie de m'avoir donné un si fort et utile coup d'épaule. L'affaire ne marchera point si vous n'y donnez un coup d'épaule. Fig. et fam., Donner un coup de collier. Voyez COLLIER. Coup d'œil, Regard prompt et de peu de durée. Jeter un coup d'œil sur quelqu'un, sur quelque chose. Je vais donner un coup d'œil à ce qui se passe. Il nous a lancé un coup d'œil furieux, menaçant. Du haut de cet édifice on embrasse d'un coup d'œil tout un vaste horizon. Fig., Jetons un coup d'œil sur les événements remarquables de cette période. Il se dit aussi de l'Aptitude à saisir à la simple vue, avec précision et de manière à s'en former une idée exacte, la figure, les proportions et les caractères des objets. Le coup d'œil du peintre, du sculpteur, de l'architecte. Fig., Avoir un coup d'œil excellent, Voir promptement le parti qu'on doit prendre dans une circonstance inopinée ; et, en général, Discerner rapidement ce qu'il y a d'important, d'intéressant dans une affaire. On dit à peu près dans le même sens Avoir le coup d'œil juste, sûr, pénétrant, etc. ; et absolument, Avoir du coup d'œil. Manquer de coup d'œil. Coup d'œil se dit encore de la Vue d'un paysage, de l'aspect d'un édifice, d'une assemblée, etc. Le coup d'œil en est charmant. Cette réunion offrait un coup d'œil magnifique. Le premier coup d'œil, Le premier aspect d'une personne ou d'une chose. Au premier coup d'œil sa figure déplaît. Cette pauvre fille est si disgraciée de la nature qu'on a peine à sauver le premier coup d'œil. Le premier coup d'œil passé, on s'accoutume à la voir. Coup de sang, Épanchement qui se fait dans le cerveau par la rupture subite de quelques vaisseaux sanguins. Il est mort d'un coup de sang. Coup de soleil, Impression violente et quelquefois mortelle que le soleil fait en certaines circonstances sur ceux qui s'y trouvent exposés. On dit aussi INSOLATION. Coup de chaleur, se dit particulièrement à propos de Plantations, de plantes, etc. Coup d'air. Voyez AIR. En termes de Cuisine, Coup de feu. Voyez FEU.

COUP se dit quelquefois d'un Mouvement impétueux, comme du vent qui souffle sur la mer, d'une tempête. Coup de vent. Coup de mistral. Un coup de mer écarta leurs vaisseaux, les jeta, les poussa sur les côtes. Fig., Arriver en coup de vent, Entrer à l'improviste et d'une manière brusque. Il se dit encore de Certaines manières de jouer et de Certaines chances du jeu. Il a fait un beau coup. Louer, parier à coup sûr, Avec certitude de gain. Coup de dés. Voyez DÉ. Fig., Coup de fortune, coup de bonheur, coup de malheur, coup de hasard, Événement extraordinaire et imprévu. Coup de théâtre, Péripétie imprévue qui se produit soudain dans une pièce de théâtre et modifie sensiblement la situation. Les reconnaissances sont des coups de théâtre. Fig, Son arrivée fut un coup de théâtre, un véritable coup de théâtre. L'exil, le rappel de ce ministre fut un coup de théâtre.

COUP se dit aussi des Actions humaines, surtout quand elles sont inattendues. Heureux coup. C'est un coup de génie. C'est un coup de désespoir. Ce sont là de vos coups. Faire un mauvais coup, Commettre un méfait, un crime. Fam., Manquer son coup, Ne pas réussir dans une entreprise, ne pas exécuter un dessein. Fam., Faire un coup de tête, Faire étourdiment et sans réflexion une chose imprévue et hardie. Coup monté, Coup préparé à l'avance, prémédité. Il se prend toujours en mauvaise part. Coup d'essai, La première action, le premier ouvrage par lequel on donne des marques de ce qu'on est capable de faire. Coup de maître, Action, ouvrage par lequel on fait preuve d'une grande habileté. Coup d'éclat, Action, démarche qui doit causer beaucoup de bruit. Coup d'État. Voyez ÉTAT. Coup d'autorité, Usage extraordinaire qu'une personne fait de son autorité envers ceux qui lui opposent de la résistance. Coup du ciel, coup d'en haut, coup de la Providence, coup de la grâce, Événement extraordinaire auquel on ne devait pas naturellement s'attendre.

COUP signifie aussi Fois. Il a réussi du premier coup. Je vous le donne en trois coups ou simplement en trois. Il a encore trois coups à jouer. Il se dit particulièrement de la Quantité que l'on boit en une fois. Boire un coup, deux coups, etc. Un coup de vin, d'eau-de-vie. Boire à petits coups. Boire un grand coup. Le coup de l'étrier, Celui que l'on boit au moment du départ.

TOUT À COUP, loc. adv. Soudainement, en un moment. Son humeur a changé tout à coup. Ce mal l'a pris tout à coup.

TOUT D'UN COUP, loc. adv. Tout en une fois. Il fit sa fortune tout d'un coup. Il s'emploie aussi quelquefois dans le sens de Tout à coup.

À COUP SÛR, loc. adv. Immanquablement, infailliblement. Vous me trouverez à coup sûr. Nous réussirons à coup sûr.

COUP SUR COUP, loc. adv. Immédiatement l'un après l'autre. Il lui a envoyé deux courriers coup sur coup. Il m'a fait vingt questions coup sur coup. Il a eu trois maladies coup sur coup.

APRÈS COUP, loc. adv. Trop tard, après qu'une chose est arrivée, est faite. Vous voulez produire des pièces quand votre procès est jugé : c'est venir après coup. Des ornements ajoutés après coup.

À TOUS COURS, loc. adv. et fam. À tous propos, à tous moments, souvent. Il vient à tous coups me quereller.

POUR LE COUP, loc. adv. Pour cette fois-ci. Pour le coup, il ne m'échappera pas. Je lui ai souvent pardonné ; mais, pour le coup, qu'il n'espère point de grâce. On dit de même, C'est assez, pour ce coup, pour un coup. Pour ce coup-là, pour ce coup-ci, je dois vous punir. On dit aussi À ce coup.

ENCORE UN COUP, loc. adv. Encore une fois. Il s'emploie principalement lorsqu'on répète avec vivacité ce qu'on a déjà dit. Encore un coup, je vous dis que cela ne m'est pas possible.

Littré (1872-1877)

COUP (kou ; le p ne se prononce pas et ne se lie pas : un kou audacieux ; coup se comporte comme loup, où le p ne se lie jamais ; au pluriel, l's se lie : des kou-z audacieux ; Bèze, au XVIe siècle, remarque que le p se prononce au singulier et non au pluriel) s. m.

Résumé

  • 1° Impression qu'un corps fait sur un autre en le heurtant.
  • 2° les coups, le combat.
  • 3° blessure, contusion.
  • 4° la décharge d'une arme à feu.
  • 5° atteinte, attaque, blessure morale.
  • 6° son, bruit que rendent certains corps par le choc.
  • 7° action rapide d'un organe, d'un instrument, etc..
  • 8° coup de main, terme de guerre.
  • 9° coup d'œil.
  • 10° action vive, effet subit de certaines choses.
  • 11° chance favorable ou défavorable, circonstance imprévue.
  • 12° action.
  • 13° coup d'État, coup de théâtre.
  • 14° fois, occasion.
  • 15° coup de vin.
  • 16° terme de jeu, manière de jouer, chance du jeu.
  • 17° tout à coup.
  • 18° À coup.
  • 19° tout d'un coup.
  • 20° coup sur coup.
  • 21° après coup.
  • 22° À tous coups.
  • 23° pour le coup.
  • 24° encore un coup ; proverbes.
  • 1Impression qu'un corps fait sur un autre en le heurtant. Donner un coup de bâton, un coup de fouet, un coup de marteau. Se donner un coup contre un mur, se faire une contusion en se heurtant. Où chacun seul témoin des grands coups qu'il portait…, Corneille, Cid, IV, 3. Je veux ici l'attendre et le rouer de coups, Scarron, D. Japhet, IV, 2. C'est un de ces braves de profession, de ces gens qui sont tout coups d'épée, qui ne parlent que d'échiner, Molière, Fourb. de Scapin, II, 8. Et les coups de bâton d'un dieu Font honneur à qui les endure, Molière, Amph. III, 10. Il se donna cinq ou six coups de couteau, Sévigné, 143. Le cheval s'approchant lui donne un coup de pied, Le loup un coup de dent, le bœuf un coup de corne, La Fontaine, Fabl. III, 14. Il ne leur reste qu'à considérer de quel côté allait tomber ce grand arbre, ébranlé par tant de mains et frappé de tant de coups à sa racine, Bossuet, Anne de Gonz. Le Samien m'avait porté un faux coup, Fénelon, Tél. V. Au premier coup qu'on lui porte, l'idole se renverse, Fénelon, ib. XI. Ils [les mauvais rois dans le Tartare] sont sous les coups de ces esclaves, devenus leurs tyrans impitoyables, Fénelon, ib. XVIII. L'onde était écumante sous le coup de rames innombrables, Fénelon, ib. II. Il en couvrait d'autres de peaux de sangliers et d'ours, et lâchant sur eux ses chiens de chasse, il les faisait déchirer, ou les tuait à coups de flèches, Rollin, Hist. anc. Œuvres, t. V, p. 423, dans POUGENS.

    Faire le coup de poing, se battre avec le poing fermé.

    Coup de poing, instrument pour percer les tonneaux ; espèce de pistolets fort petits.

    Fig. Rabattre les coups, adoucir, apaiser des gens aigris les uns contre les autres.

    Casser le nez à coups d'encensoir, donner en face des louanges exagérées et grossières.

    Faire d'une pierre deux coups, venir à bout de deux choses par un seul moyen.

    Frapper les grands coups, employer les moyens décisifs.

    Frapper des coups en l'air, perdre sa peine.

    C'est un coup dans l'eau, c'est un coup d'épée dans l'eau, se dit d'une tentative inutile.

    Avoir un coup de hache à la tête, ou, simplement, avoir un coup de hache, un coup de marteau, être un peu fou.

    Terme de manége. Coup de hache, dépression existant au point de jonction de l'encolure avec le garrot. Coup de lance, cavité à la base de l'encolure, à l'épaule, au bras ou à la fesse. Coup de reins, mouvement par lequel le cheval roidit les reins.

    Coup de fouet, coup porté avec un fouet. Le soldat anglais reçoit des coups de fouet. Un coup de fouet vigoureusement assené fit partir le cheval au galop.

    Terme de pathologie. Coup de fouet, rupture de fibres musculaires ou de muscles minces, qui survient à la jambe pendant un effort, et qui fait éprouver au patient une sensation comme s'il recevait un coup de fouet.

    Terme de vétérinaire. Coup de fouet, mouvement brusque observé aux flancs dans la respiration d'un cheval poussif, surtout pendant l'expiration.

    Dans le langage général, coup de fouet, effort redoublé par lequel on tente d'obtenir ou d'emporter quelque chose, et, en musique, effort plus brillant que tout le reste, par lequel on finit un morceau. Coup de fouet signifie aussi excitation, action d'animer, de presser.

    Terme de marine. Coup de fouet, la dernière crise du coup de vent, ou le coup de vent lui-même, s'il est de peu de durée.

    Coup de talon, choc qu'éprouve un navire en passant sur un écueil.

    Coup de boutoir, coup porté par le sanglier avec son boutoir ; et, figurément, attaque brusque et inattendue en paroles.

    Terme de maréchalerie. Coup de boutoir dans la sole, plaie faite par le maréchal, lorsque avec le boutoir il pare trop profondément la sole du cheval.

    Terme d'escrime. Coup pour coup, action de deux tireurs qui se touchent en même temps. Coup de temps, coup pris d'opposition sur un développement ; et fig. circonstance inopinée, ou occasion qui passe vite. Il a su profiter du coup de temps.

    Coup fourré, dans un combat au fleuret, à l'épée, se dit quand chacun des deux adversaires en même temps donne et reçoit un coup. Et, figurément faire un coup fourré, se rendre mutuellement et en même temps de mauvais offices. Ils ont fait un coup fourré. Et contre cet assaut je sais un coup fourré, Par qui je veux qu'il soit de lui-même enferré, Molière, l'Étour. III, 6.

    Dans un autre sens, porter un coup fourré, rendre en secret un mauvais office.

    Terme de jeu de paume. Coup de brèche, coup qui fait entrer la balle dans le dedans, près des encoignures.

    Terme de fauconnerie. On dit qu'un oiseau prend coup, quand il heurte trop rudement sa proie.

    Terme de maçonnerie. Un mur prend coup, il menace de chute, il fait ventre, il n'est plus à plomb.

  • 2Les coups, le combat. Mais s'il fallait encor que l'on en vînt aux coups, Je combattrais pour elle en soupirant pour vous, Corneille, Hor. I, 4. Elle-même leur dresse une embûche au passage, Se mêle dans les coups, porte partout sa rage, Corneille, Rodog. I, 6. Hercule respirant sur le bruit de vos coups, Racine, Phèd. III, 5.

    Fig. Juger des coups, rester spectateur d'une lutte, d'un débat. Nous étions neutres et nous jugions des coups, Sévigné, 344.

    Sans coup férir, sans combattre, sans en venir aux mains. Il s'empara des positions de l'ennemi sans coup férir. Et fig. et familièrement, sans résistance. Il en est venu à bout sans coup férir.

  • 3Blessure, contusion. Il est tout couvert de coups. Il tomba percé de coups. L'époux expirant sous les coups d'une épouse barbare, Massillon, Car. Avenir. Percé de tant de coups, comment t'es-tu sauvé ? Racine, Andr. V, sc. dern.

    Coup de feu, plaie produite par une arme à feu.

    Le coup de la mort, la blessure, l'accident qui la détermine. Il se jeta à son cou, disant qu'il devinait bien ce qu'il avait à lui dire, que c'était le coup de sa mort, qu'il le recevait de la main de Dieu, Sévigné, 173. L'amour lui a donné le coup de la mort, Bossuet, I, Ass. 1.

    Le coup de grâce, celui par lequel le bourreau achevait le patient ; et, par extension, ce qui consomme la ruine de quelqu'un. Il souhaite la mort comme le coup de grâce, Sévigné, 32.

    Populairement et ironiquement. Il a été le plus fort, il a porté les coups, il a été battu.

  • 4La décharge d'une arme à feu. Tirer un coup de canon. Cent pièces de canon tonnèrent sur elle à son arrivée, et la maison où elle entra fut percée de leurs coups, Bossuet, Reine d'Anglet. Des filous effrontés, d'un coup de pistolet, Ébranlent ma fenêtre et percent mon volet, Boileau, Sat. VI. Il ne s'avisa pas seulement de lui tirer son coup, Hamilton, Gramm. 5.

    Tirer à coup perdu, tirer hors de portée.

    Fusil à deux coups, fusil à double canon.

    Faire le coup de fusil, prendre part à un combat d'infanterie, se battre en tirailleurs. On dit de même pour la cavalerie, faire le coup de pistolet. Les Mazarins venaient faire le coup de pistolet dans le faubourg St-Antoine, Retz, II, 213.

    Se dit aussi de la charge de l'arme. J'ai encore deux coups de poudre et un coup de plomb.

    Terme de chasse. Coup double, coup qui tue deux pièces de gibier. Et fig. Le cardinal prit si bien son temps et ses mesures qu'il fit coup double ; le confesseur fut renvoyé, et il en donna un autre auquel il était assuré de faire dire ce qu'il voudrait, Saint-Simon, 8, 55.

    Par extension. Coup de tonnerre, bruit violent qui accompagne une décharge d'électricité dans un orage. Un violent coup de tonnerre fit trembler toutes les vitres.

    Familièrement et par ironie, il est secret comme un coup de tonnerre, comme un coup de canon, il divulgue ce qu'on lui confie.

    Coup de foudre, coup que frappe l'électricité dans un orage. Un coup de foudre fendit le peuplier.

    Fig. Ce coup de foudre est grand, Corneille, Poly. II, 1. Un coup de foudre est tout ce que je veux de vous, Racine, Théb. V, 6. Les dieux, longs à se résoudre, Ont fait un coup de leur foudre, Malherbe, II, 4.

  • 5 Fig. Atteinte, attaque, blessure morale. En vos beautés parfaites Vous ne pouvez savoir tous les coups que vous faites, Régnier, Sat. XII. Il veut frapper le coup sans notre ministère, Corneille, Héracl. III, 3. À l'honneur de tous deux il porte un coup mortel, Corneille, Cid, I, 5. Les Sarrasins reçurent de grands coups durant l'empire de Léonce, Bossuet, Hist. III. Vous vous troublez beaucoup ! Mon cœur n'est point du tout ébranlé de ce coup, Molière, F. sav. V, 4. Amour est un étrange maître ; Heureux qui peut ne le connaître Que par récit, lui ni ses coups, La Fontaine, Fabl. IV, 1. Mais il me faut tout perdre et toujours par vos coups, Racine, Andr. I, 4. S'il préparait ses coups tandis que je vous vois, Racine, Brit. V, 5. Constantin, après avoir affaibli la capitale, frappa un autre coup sur les frontières, Montesquieu, Rom. 17. Le dernier coup, ce qui achève d'accabler, de ruiner, etc. … Donner le dernier coup à la dernière tête De la rébellion, Malherbe, II, 12. Donner le dernier coup au parti des tyrans, Molière, D. Garc. V, 6. Il ne restait qu'à donner le dernier coup à cette secte, Fléchier, le Tellier. Il donna le dernier coup à leur empire, Bossuet, Hist. III, 6. Voilà le dernier coup qu'il fallait donner à notre ignorance, Bossuet, ib. II, 11. Cet édit qui donna le dernier coup à l'hérésie, Bossuet, le Tellier. Les flatteurs nous donnent le dernier coup, Bossuet, Resp. 3. Mme de Jouarre donne le dernier coup à l'exemption, Bossuet, Lettr. abb. 76.

    Tenir coup, tenir tête. Prête chacune à tenir coup aux gens, La Fontaine, Mazet.

    Le coup de pied de l'âne, insulte qu'un lâche adresse à un homme jadis puissant et maintenant hors d'état de se venger. Locution tirée de la fable où l'âne vient en dernier frapper le lion mourant.

    Coup de Jarnac, manœuvre perfide, déloyale. François de Vivonne fut tué en combat public et singulier par Guy Chabot, fils du seigneur de Jarnac, d'où est venu le proverbe du coup de Jarnac, Saint-Simon, 352, 133.

  • 6Son, bruit que rendent certains corps par le choc. Le premier coup de cloche le réveilla. Au coup de minuit, de midi. Les coups de marteau retentissaient dans toute la maison. Tout est prêt ; nous partirons au coup de dix heures.

    Familièrement. N'être pas sujet au coup de cloche, au coup de marteau, n'être pas sujet à la cloche, au marteau qui demande que la porte soit ouverte et qui indique qu'on vient réclamer votre office, être libre et maître de son temps.

  • 7Action rapide d'un organe, d'un instrument, etc. Un coup de langue. Des coups de gosier sonores. En quelques coups de balai la maison fut nettoyée.

    Un coup de dent, action de faire aller la mâchoire pour manger. [L'âne] Craignit qu'en perdant un moment Il ne perdît un coup de dent, La Fontaine, Fabl. VIII, 17. Il y procédait d'une vitesse toujours égale et trouvait moyen, sans perdre un coup de dent, de me donner louanges sur louanges, Lesage, Gil Blas, I, 2.

    Coup de pinceau, application du pinceau pour peindre ; et fig. description. Tu demeures surpris et changes de couleur à ce discours ; ce n'est là qu'une ébauche ; et, pour achever le portrait, il faudrait bien d'autres coups de pinceau, Molière, D. Juan, I, 1. Si Molière a rendu Tartuffe odieux au cinquième acte, c'est par la nécessité de donner le dernier coup de pinceau à son personnage, Marmontel, Élém. litt. t. VI, p. 141, dans POUGENS.

    Coup de chapeau, salutation donnée au passage. Encor ? Que de coups de chapeau ! Molière, Éc. des mar. I, 5.

    Traduire à coups de dictionnaire, ne pouvoir traduire qu'en ayant recours fréquemment au dictionnaire. La plupart des livres de certains savants ne sont fabriqués qu'à coups de dictionnaires, et ils n'ont guère lu que les tables des livres qu'ils citent, ou quelques lieux communs ramassés de différents auteurs, Malebranche, Rech. liv. IV, ch. 8.

    Coups de ciseaux, coupures qu'on fait avec des ciseaux dans quelque écrit pour les insérer textuellement dans une composition. Faire un journal à coups de ciseaux.

    Donner à quelqu'un un coup de main, d'épaule, lui venir en aide, unir momentanément ses efforts aux siens.

    Donner un coup de collier, faire un nouvel effort, locution prise des chevaux qui, faisant un effort, appuient sur le collier.

    Familièrement. Donner un coup de pied jusqu'à tel endroit, y aller : cela ne se dit que d'un endroit peu éloigné.

    Terme de peinture. Application, sur la toile, de la brosse ou du pinceau chargé de couleur. Peindre au premier coup, peindre d'une manière large, facile, rapide. Coup de jour, trait vif de lumière ou de clair placé à propos.

    Terme de musique. Coup de langue, coup de gosier, coup d'archet, manière de lancer le son.

    Fig. Coup de bec, de dent, de langue, de patte, propos médisant. Les absents sont assassinés à coups de langue, Scarron, Rom. com. ch. 3. Pour vous, vous représentez une de ces personnes qui prêtent doucement des charités à tout le monde, de ces femmes qui donnent toujours le petit coup de langue en passant, Molière, Impromptu, 1.

    Coup de filet, action de lancer le filet, et résultat de cette action, prise de poisson ; et fig. une capture, un gain. La police, d'un coup de filet, a saisi plusieurs malfaiteurs. Ce seul coup de filet lui a rapporté une grosse somme.

    Terme de typographie. Coup de planche, action de poser la planche sur le papier pour l'imprimer.

    Coup de piston, la course entière accomplie par un piston dans un corps de pompe, pour se rendre d'une extrémité à l'autre.

  • 8 Terme de guerre. Coups de main, ceux qui se donnent avec les armes ordinaires, sans artillerie. Une place emportée à coups de main, c'est une place emportée d'emblée, l'épée à la main.

    Coup de main, expédition, attaque de vive force, et, en général, toute espèce d'entreprise hardie. S'il est permis, sous ce prétexte, de faire des coups de main, quels États sont en sûreté dans la jeunesse des rois ? Bossuet, Variat. Déf. 1er disc. § 16. La Grande-Bretagne n'oublia pas, à Utrecht, que ces voisins entreprenants, soutenus des Canadiens, accoutumés à la chasse et aux coups de main, avaient porté, durant les deux dernières guerres, la désolation dans ses divers établissements, Raynal, Hist. phil. XVII, 12.

  • 9Coup d'œil, vue, regard. Jetez un coup d'œil sur ce tableau. Et dès qu'il m'aura plu d'abattre votre orgueil, Vos têtes pour tomber n'attendront qu'un coup d'œil, Corneille, Attila, V, 3. Je crains d'en recevoir quelque coup d'œil fatal, Et chasse un ennemi dont je me défends mal, Corneille, Théod. II, 2. Enfin, avant de paraître au parloir, On doit au moins deux coups d'œil au miroir, Gresset, Vert-vert, I. Les opticiens, fondés sur l'expérience, disent que l'étendue d'un coup d'œil est bornée à l'angle droit, Bonnet, Ess. psych. ch. 38.

    Fig. Bannis toute imposture, et d'un coup d'œil plus sage Regarde ce prophète à qui tu rends hommage, Voltaire, Fanat. I, 4.

    Coup d'œil, sûreté dans l'appréciation des choses. Il avait ce qu'on appelle le coup d'œil d'une justesse et d'une promptitude singulière et peut-être unique ; c'était une sorte d'inspiration dont la clarté et la force prouvaient la vérité, du moins pour lui, Fontenelle, Chirac. Un Condé, dont le premier coup d'œil décidait toujours de la victoire, Massillon, Or. fun. Louis le Grand. Descartes a envisagé la nature comme un homme qui, plongeant sur elle un vaste coup d'œil, l'embrasse tout entière et en fait pour ainsi dire le plan à vue d'oiseau, Turgot, Ébauche du 2e discours. Progrès de l'esprit humain, p. 278. Il avait reçu de la nature ce coup d'œil prompt et juste qui saisit tout ce qui mérite d'être observé et qui ne voit les objets que tels qu'ils sont, Condorcet, Linné.

    Coup d'œil, aspect. La vertu n'a de triste que le premier coup d'œil, Massillon, Car. Dégoûts. Il n'a de beau que la surface et le premier coup d'œil, Massillon, Profess. relig. 1. Le coup d'œil de son retour à sa toute-puissance en Espagne [la princesse des Ursins] ne la dérangea pas plus qu'avait fait la chute de la foudre sur elle à Madrid, Saint-Simon, 144, 100.

  • 10Action vive, effet subit de certaines choses. Un coup de vent fit écrouler une partie de la muraille. Du premier coup de vent il me conduit au port, Corneille, Poly. IV, 3. L'hiver était si près de nous, qu'il n'avait fallu qu'un coup de vent de quelques minutes pour l'amener âpre, mordant, dominateur, Ségur, Hist. de Nap. IX, 7.

    Terme de marine. Coup de mer, choc d'une grosse lame. Bien tenir le coup, résister aux coups de vent et de mer. Faire un coup d'écoute, forcer sa voilure par une brise fraîche.

    Terme de médecine. Coup de sang, attaque d'apoplexie, et aussi congestion momentanée du sang vers la tête.

    Coup de lumière, effet subit d'une lumière qui apparaît. Malgré l'obscurité du crépuscule où les nations semblent encore errer, des coups fréquents de lumière annoncent l'aurore et la venue du grand jour, Holbach, dans DU MARSAIS, Essai préj. ch. 14.

    Coup de soleil, effet produit, sur une partie quelconque d'un être vivant, animal ou végétal, par l'action d'un soleil ardent.

    Coup de soleil, sorte d'érysipèle causé par le soleil. J'attrapai un coup de soleil sur une main, Chateaubriand, Itin. 243.

    Coup de soleil, ensemble d'accidents cérébraux causés par le soleil, et qui peuvent causer rapidement la mort.

    Populairement. Coup de soleil, action de rougir soudainement par honte ou par embarras.

    Coup d'air, fluxion ou douleur causée par un courant d'air.

    Terme de vétérinaire. Coup de chaleur, congestion sanguine, brusque, rapide, du poumon, quelquefois de l'intestin et plus rarement de l'encéphale, arrivant communément sur les chevaux de trait rapide, pendant le travail et au temps des chaleurs.

    Terme d'arts. Coup de feu, action d'activer le feu pour la cuisson ou la fusion de différentes matières. Toute porcelaine, au moment qu'elle reçoit son dernier coup de feu, se trouve dans un état de fusion commencée, Raynal, Hist. phil. V, 27.

    Terme de cuisine. Coup de feu, l'action d'activer le feu des fourneaux au moment d'achever la cuisson des mets ; et figurément, moment de presse.

    Coup de feu, action d'un feu trop ardent sur une préparation culinaire. Le rôti a un coup de feu.

  • 11Chance favorable ou défavorable, circonstance imprévue. Coup du ciel. Coup de bonheur. Comment la retrouver sans un coup du hasard ? Brifaut, Ninus II, III, 4. Fais agir ta constance en ce coup de malheur, Corneille, Cid, II, 3. La fortune se plaît à faire de ses coups, La Fontaine, Fab. VII, 13. Mille fois la religion a été à la veille d'une destruction universelle ; et, toutes les fois qu'elle a été dans cet état, Dieu l'a relevée par des coups extraordinaires de sa puissance, Pascal, Pensées, part. II, art. 4. Glaive du Seigneur, quel coup vous venez de faire ! toute la terre en est étonnée, Bossuet, Marie-Thér. Quel coup vient nous confondre ! Voltaire, Zaïre, II, 4. Parle, achève, ô mon Dieu ! ce sont là de tes coups, Voltaire, ib. II, 3.
  • 12Action. Voilà un coup d'étourdi. C'est un coup de désespoir. C'est là que votre main peut faire de beaux coups, Régnier, Sat. XII. Quoi ! de tuer un homme auriez-vous conscience ? Loin que votre dessein vous fasse aimer d'Hortense, Ce coup augmentera sa haine, il est certain, La Fontaine, Florentin, 3. Nous savons que ce prince magnanime [Charles II] eût pu hâter ses affaires en se servant de la main de ceux qui s'offraient à détruire la tyrannie par un seul coup, Bossuet, Reine d'Anglet. Vous vouliez toutes deux un coup trop inhumain, Corneille, Rodog. V, 4. Il n'a point pris le ciel ni le sort à partie, Point querellé le bras qui fait ces lâches coups, Corneille, Héracl. III, 3. Un même coup a mis ma gloire en sûreté, Mon âme au désespoir, ma flamme en liberté, Corneille, Cid, V, 6. Votre bras dans Pharsale a fait de plus grands coups, Corneille, Pomp. IV, 3. S'il a cette vertu, cette valeur insigne, Donnez-lui votre armée, et voyons ces grands coups, Corneille, Nicom. II, 3. Ô coup ! ô trahison trop indigne d'un homme ! Corneille, Cinna, III, 3. Si de mon propre sang ma main versant des flots N'eût par ce coup hardi réprimé vos complots, Racine, Athal. II, 7. Gardez qu'avant le coup votre dessein n'éclate, Racine, Andr. III, 1. Cet ouvrage, madame, est un coup d'Agrippine, Racine, Brit. V, 1. L'action de Léonidas, avec ses trois cents Spartiates, n'était pas un coup de désespoir, mais une conduite sage et généreuse, comme Diodore de Sicile a soin de le faire remarquer, Rollin, Hist. anc. Œuvres, t. III, p. 220. Ils ont fait un beau coup vraiment ; Mais, pour réparer leur sottise, La folie et l'amour ont fait adroitement Réussir l'heureuse entreprise, Regnard, Folies amour. Divertiss. Je crus faire un coup d'une profonde politique en…, Fénelon, Tél. XII. Il n'appartient de proposer des changements qu'à ceux qui sont assez heureusement nés pour pénétrer d'un coup de génie toute la constitution d'un État, Montesquieu, Esp. Préface. Le coup du génie [dans le Misanthrope de Molière] est de l'avoir fait amoureux d'une coquette, Rousseau, Lettre à d'Alembert.

    Faire le coup, faire l'action dont il s'agit, en parlant d'une action mauvaise, ou tout au moins d'une action hardie. Je crois que c'est monsieur votre cher intendant qui a fait le coup, Molière, l'Av. V, 2. On ne put pas le convaincre d'avoir fait le coup, Bossuet, Variat. X. Non, non ; Britannicus est mort empoisonné ; Narcisse a fait le coup ; vous l'avez ordonné, Racine, Brit. V, 6. On découvre que le jardinier a fait le coup, Rousseau, Ém. II.

    Faire de bons coups, faire de bons tours. Font quelques fois ensemble de bons coups, La Fontaine, Herm.

    Faire un mauvais coup, une mauvaise action. Celui qui reçoit de l'argent pour un méchant coup, Pascal, Prov. XVIII. …Comme le voilà fait ! Débraillé, mal peigné, l'œil hagard ! à sa mine, On croirait qu'il viendrait, dans la forêt voisine, De faire un mauvais coup…, Regnard, le Joueur, I, 7.

    Faire un coup de tête, faire étourdiment une chose hardie ou extravagante. Faire un coup de sa tête, ne demander conseil à personne.

    Un coup de maître, une action digne d'un maître, d'un homme habile, vaillant, etc. Mes pareils à deux fois ne se font pas connaître, Et pour leur coup d'essai veulent des coups de maître, Corneille, Cid, II, 2.

    Coup d'essai, la première fois qu'on tente une chose. Ne cherche point à faire un coup d'essai fatal, Corneille, Cid, II, 2. Sur ce beau coup d'essai de votre ingratitude, Corneille, Nicom. IV, 5. Ce sont des coups d'essai, mais si grands que peut-être Le Capitole a droit d'en craindre un coup de maître, Corneille, Nicom. III, 2. N'est que le coup d'essai de ses illusions, Corneille, Poly. I, 1. Il fit voir que les plus difficiles victoires ne sont que les coups d'essai de ceux que Dieu même instruit pour la guerre, Fléchier, Panég. II, p. 10. En voilà assez pour des faussetés si vaines ; ce ne sont là que des coups d'essai de vos novices, et non pas les coupe d'importance de vos grands profès, Pascal, Prov. XVI.

    Coup d'éclat, action qui fait grand bruit, qui attire beaucoup de renom, et aussi action qui rompt avec des habitudes, avec une situation, etc.

    Coup monté, coup préparé à l'avance, prémédité.

    Manquer son coup, ne pas réussir. Ayant manqué mon coup, je ne fis point de vains efforts contre un si grand nombre d'ennemis, Scarron, Rom. com. 2e part. ch. 14. Les anges de la réforme ne manquèrent pas leur coup à cette fois [le tuèrent], Bossuet, Déf. Une de ces flèches qui n'ont jamais manqué leur coup, Fénelon, Tél. XX.

    Dans un sens opposé, porter coup, sans régime, produire un effet considérable. Ce discours porta coup et fit songer notre homme, La Fontaine, Coupe. Les événements qui ont porté coup dans la suite, Bossuet, Hist. III, 2. Ce qui se passe en la vie porte coup au point de la mort, Bossuet, Imp. 1. Pour faire des menaces qui portent coup, La Bruyère, X. La plus petite tolérance porte coup, Patru, Plaid. 6, dans RICHELET. Il s'en faut bien que toutes nos habiletés ou toutes nos fautes portent coup, Vauvenargues, Max. 546.

    Porter coup, nuire, faire tort. Le coup est porté, le mal est fait. L'injuste porte coup sur lui-même, Massillon, Ferv. 2. Le gouvernement portera coup à l'agriculture et au commerce, toutes les fois qu'il entreprendra de fixer le prix des denrées, Condillac, Comm. gouv. part. I, ch. 4.

    Être sous le coup, être menacé par, être en butte à. Il est sous le coup d'une accusation.

  • 13Coup d'État, mesure violente à laquelle un gouvernement a recours. Il ne faut plus que vous parliez d'agir puissamment, ni de faire des coups d'État qu'avec la reine, Guez de Balzac, liv. II, lett. 5. Jamais un coup d'État ne fut mieux entrepris, Corneille, Pomp. II, 3. Non qu'en un coup d'État je n'approuve le crime, Corneille, ib. I, 1. Et je puis dire enfin que jamais potentat N'eut à délibérer d'un si grand coup d'État, Corneille, ib. I, 1. Au lieu de gouverner par les lois, ils veulent étonner par des coups d'État, Condillac, Étud. hist. part. I, ch. 4.

    Action qui décide de quelque chose d'important pour le bien de l'État. La bataille de Denain fut un coup d'État.

    Entreprise violente par laquelle un personnage s'empare du pouvoir (coup d'État du 18 brumaire par lequel le général Bonaparte devint maître de la France), ou mesure par laquelle un gouvernement change violemment et en dehors des lois la constitution (le coup d'État tenté par Charles X en 1830).

    Fig. Tout ce qui est décisif dans quelque affaire importante. Ce mariage fut un coup d'État dans cette famille. C'était un coup d'État, Molière, le Dép. III, 7.

    Coup d'autorité, usage extraordinaire qu'une personne fait de son autorité envers ceux qui lui résistent.

    Coup de théâtre, se dit en poésie dramatique, d'un événement ou d'une situation, qui frappe tout d'un coup l'esprit, parce qu'on ne s'y attendait pas. On ne forme point les esprits avec des tableaux et des coups de théâtre, Marmontel, Élém. litt. Œuvres, t. IX, p. 16, dans POUGENS. Et fig. Son arrivée fut un coup de théâtre. Cela fit un coup de théâtre.

  • 14Fois, occasion, moment. [L'honneur qui] perdu pour un coup jamais ne se recouvre, Régnier, Sat. VI. Elles n'arrivent pas à leur dernier degré de perfection du premier coup, Descartes, Diopt. 1. Il n'est pas permis de faire ces actions-là [actes de vaillance] beaucoup de fois en sa vie ; et la fortune, qui vous en a tiré pour ce coup, est un mauvais garant pour l'avenir, Voiture, Lett. 118. Les hommes valeureux le sont du premier coup, Corneille, Cid, II, 3. Certes Rome à ce coup pourrait bien se vanter, D'avoir eu juste lieu de me persécuter, Corneille, Pomp. III, 2. C'est à ce coup qu'il est bon de partir, Mes enfants…, La Fontaine, Fabl. IV, 22. Mais le pauvret, ce coup, y laissa ses houseaux, La Fontaine, ib. XII, 23. Vous ne bougerez pour ce coup, La Fontaine, Cord. M'empoisonne à tous coups [à chaque instant] leurs plus charmants appas, Molière, le Dép. I, 1. Voyons si votre diable aura bien le pouvoir De détruire à ce coup un si solide espoir, Molière, l'Étour. V, 16. Je l'ai déjà manquée, et même plusieurs coups, Molière, ib., V, 6. Sans menacer, sans avertir, la mort se fait sentir tout entière dès le premier coup, Bossuet, Duch. d'Orl. Tout cela ne se fait pas d'un coup, Bossuet, Visite, 2. À ce coup, le Saint-Esprit irrité se retire, les ténèbres s'épaississent, la foi s'éteint, Bossuet, Anne de Gonz.
  • 15Coup de vin, ce qu'on boit de vin en une fois.

    Le coup du milieu, le coup qu'on boit entre les deux services.

    Le coup de l'étrier, le coup qu'on boit en montant à cheval pour partir.

    Familièrement. Boire un coup, un verre de vin. Un jour le cuisinier ayant bu trop d'un coup…, La Fontaine, Fabl. III, 12. [Tartuffe] But, à son déjeuner, quatre grands coups de vin, Molière, Tart. I, 6. Il avait envie d'y boire un coup, Hamilton, Gramm. 11. Matta but cinq ou six grands coups pour étouffer un reste de délicatesse qui l'inquiétait, Hamilton, ib. 3. Frère Giroflée buvait un coup en attendant le dîner, Voltaire, Cand. 24. On a vu le bossu passer près de la Villeaux-Dames, où il a bu un coup, Courier, II, 276.

    Boire à petits coups, peu à la fois, mais souvent. L'aîné [Bellisle] était fort sobre ; le cadet aimait à souper et à boire le petit coup, mais sans excès, Saint-Simon, 523, 221. Du vin vieux d'un hôte aimable Il faut boire à petits coups, Béranger, P. coups.

    Boire un coup est aussi faire un excès de vin. Il avait bu un coup.

    Populairement. Boire un coup, être en danger de se noyer.

  • 16 Terme de jeu. Manière de jouer, chance du jeu. Il a fait un beau coup.

    Le donner en trois coups, quatre coups, etc. se dit pour exprimer qu'on défie quelqu'un de faire la chose dont il s'agit, qui est difficile, et qu'on n'a pas su ou qu'on ne saurait pas faire soi-même. Je le donne en six coups au fourbe le plus brave, Molière, l'Étour. II, 7.

    Coup se dit de chaque fois qu'un des joueurs a donné une carte, lancé des dés, etc. Coup forcé, coup qu'il n'est pas possible de parer. Remettre un coup, autoriser quelqu'un à recommencer un coup mal joué.

    Coup sûr, coup qui ne peut manquer de réussir. Fig. Imperceptiblement ensemble ils se rendront, Et malgré vos efforts, mon fils, ils se joindront ; C'est un coup sûr…, La Fontaine, Florentin, 3.

    À coup sûr, loc. adv. Immanquablement, avec certitude de gain, de succès. Nous réussirons à coup sûr. Ce n'est pas toujours à coup sûr qu'on spécule. Mais vantés, à coup sûr, du Mercure galant, Boileau, Sat. XI.

    Coup de dés, toute combinaison que les dés peuvent présenter. De leurs différentes combinaisons [osselets à quatre faces dont se servaient les anciens] résultent trente-cinq coups auxquels on a donné les noms des dieux, des princes, des héros, etc. Barthélemy, Anach. ch. 20. Et figurément, c'est un coup de dés ou de dé, c'est une affaire où le hasard aura beaucoup de part.

    Rompre le coup, arrêter, détourner une chance des dés, en les empêchant de rouler librement ; et fig. empêcher le succès d'une entreprise.

    Au trictrac, coup et dés, veut dire que la primauté appartiendra à celui qui amènera le dé le plus fort.

    Tout coup vaille, arrive ce qu'il pourra.

    Au billard, coup du roi, coup où, la bille étant placée en arrière de la blouse du milieu près de la bande, on va frapper de sa bille la bande du haut, de manière qu'en revenant elle pousse l'autre dans la blouse.

    Dans toute espèce de jeux, faux coup, se dit, en général, d'un coup qui n'a pas réussi ou qui n'a pas porté.

    Au billard, faux coup de la queue, faute que commet le joueur quand il touche la bille à faux.

    Coup de partie, ce qui décide du succès d'une partie de jeu ; et fig. du succès d'une affaire. Ce que je viens de faire est un coup de partie Qui les sauve tous quatre et moi-même avec eux, Lachaussée, Mélanide, III, 8.

    Coup de bourse, opération de bourse qui réussit, qui apporte un grand profit.

  • 17Tout à coup, loc. adv. Soudain et sans qu'on s'y attende. Faire accroire tout à coup à tout un peuple que…, Bossuet, Hist. II, 13. Tout à coup elle aperçut les débris d'un navire, Fénelon, Tél. I.
  • 18À coup, à la fois. Le sang des veines y entre si à coup et en si grande quantité que…, Descartes, Pass. 122. Selon que ce froid vient plus lentement ou plus à coup, Descartes, Météor. 5. Au lieu de descendre doucement dans leur matière, ils y tombent soudainement et à coup, Guez de Balzac, liv. VII, lett. 50.
  • 19Tout d'un coup, loc. adv. Tout en une fois, à la fois, du premier coup. Et pour voir tout d'un coup vos malheurs terminés, Corneille, Nicom. V, 7. Et de Servilius l'astre prédominant Dissipa tout d'un coup ce bonheur étonnant, Corneille, Sertor. II, 1. On ne va pas tout d'un coup à la corruption entière, Saint-Évremond, dans BOUHOURS, nouv. Rem. Et croyant entrer tout d'un coup, La Fontaine, Fabl. IV, 15. Ou plutôt il fallait, comblant ta perfidie, Lui ravir tout d'un coup la parole et la vie, Racine, Phèd. IV, 1.

    Dans le sens de tout à coup. Non, monsieur, elle a fermé tout doucement la fenêtre, et s'est allée mettre sur son lit ; là elle s'est prise à pleurer amèrement ; et tout d'un coup son visage a pâli, ses yeux se sont tournés, le cœur lui a manqué, et elle m'est demeurée entre les bras, Molière, l'Am. méd. I, 6. La fille unique de notre maître, attaquée d'une maladie qui lui a ôté tout d'un coup l'usage de la langue, Molière, Méd. m. lui, I, 5. Comment ! il y avait six jours entiers qu'il ne pouvait mourir, et cela le fit mourir tout d'un coup, Molière, le Fest. III, 1. Ne disons plus que la mort a tout d'un coup arrêté le cours de la plus belle vie du monde ; disons qu'elle a mis fin aux plus grands périls dont une âme chrétienne peut être assaillie, Bossuet, Duch. d'Orl. Il arrive aussi quelquefois qu'un écrivain, parlant de quelqu'un, tout d'un coup se met à sa place et joue son personnage, Boileau, Sublime, 23. Le roi fit un grand ha ! comme un homme oppressé qui tout d'un coup respire, Saint-Simon, 94, 116.

  • 20Coup sur coup, loc. adv. Successivement et sans interruption. Coup sur coup je verrai par leur intelligence De mes soins vigilants confondre la prudence, Molière, Éc. des f. IV, 7. Trois rendez-vous coup sur coup furent pris, La Fontaine, Magn. Elle a été deux fois à la Trappe coup sur coup, Bossuet, Lett. 846. La reine écrivit coup sur coup quatre lettres, Bossuet, Déf. Les prophètes qu'il envoie coup sur coup, Bossuet, Hist. II, 4. Tant de malheurs qui arrivaient coup sur coup entre ses mains, Bossuet, Char. frat. 2. Tandis que… coup sur coup, Pour ma santé je bois beaucoup, Béranger, Deo grat. Il produisit coup sur coup divers ouvrages qui certainement devaient lui faire honneur, D'Olivet, Hist. acad. t. II, p. 173, dans POUGENS.
  • 21Après coup, loc. adv. Après que la chose est faite. Ces actes n'ont été faits qu'après coup, Patru, Plaid. 5, dans RICHELET. Qu'Esdras y ait ajouté après coup les prédictions, Bossuet, Hist. II, 13. Elles n'étaient que des additions après coup, Bossuet, Rem. L'amour-propre a voulu après coup vous déguiser votre crime, Massillon, Car. Tiéd. 1. Dans tous les autres États les lois sont faites après coup, Voltaire, Lettres à Cath. 45. Quelques mots auxquels je n'ai réfléchi qu'après coup, Rousseau, Conf. III.
  • 22À tous coups, loc. adv. À tous propos, chaque fois. Non, je ne veux plus voir à tous coups hasardé, Un si grand différend par le sort décidé, Tristan, Mort de Chrispe, II, 6.
  • 23Pour le coup, loc. adv. Pour cette fois. Ah ! c'est pour le coup qu'il faut se croire heureux en bêchant son jardin, Marmontel, Bélis. II.

    Expression d'impatience et d'humeur. Pour le coup, c'en est trop ! Pour le coup, l'enfant n'y est plus ; comment concevoir qu'on le laisse sortir seul ? Rousseau, Ém. III.

  • 24Encore un coup, loc. adv. Encore une fois. Madame, encore un coup, cet homme est-il à vous ? Corneille, Nicom. I, 2. Non, mais encore un coup, ne la revoyez point, Corneille, Poly. II, 1. Va-t'en, encore un coup je ne t'écoute plus, Corneille, Cid, III, 4. Allons encore un coup le donner à Chimène, Corneille, ib. V, 4. Ô ma coignée ! ô ma pauvre coignée ! S'écriait-il, Jupiter, rends-la-moi ; Je tiendrai l'être encore un coup de toi, La Fontaine, Fabl. V, 1. Il raisonne mal, encore un coup, Bossuet, Déf. J'espère donc encore un coup, que vous voudrez, Bossuet, Lett. 251. Mettons, encore un coup, toute la Grèce en flamme, Racine, Andr. IV, 3. Madame, encore un coup c'est à vous de choisir, Racine, Baj. II, 1. Encore un coup vivez, et revenez à vous, Racine, Esth. II, 7.

PROVERBES

Le coup vaut la balle, le coup vaut l'argent, la chose vaut bien la peine qu'on a prise.

Ses plus grands coups sont rués, s'est dit jadis d'un homme qui est sur l'âge.

REMARQUE

Les grammairiens font observer que tout d'un coup se dit de ce qui se fait en même temps : Ils ont résolu de partir tout d'un coup ; et tout à coup de ce qui se fait soudainement et comme à l'improviste : Ils ont disparu tout à coup. Il faut en effet distinguer tout à coup, de tout d'un coup ; mais la distinction indiquée n'est pas exacte. Tout à coup ne peut pas s'employer pour tout d'un coup ; mais tout d'un coup peut avoir le sens de tout à coup. Voy. les exemples.

HISTORIQUE

XIe s. Tans cols a pris sur son escu boucler, Ch. de Rol. XXXIX. Donez mon fief : c'est le colp de Rolant [c'est de frapper Rolant], ib. LXVII. De cous ferir, receveir et doner, ib. X. Franc et paien merveilleus colps i rendent, ib. CVII. Colp en auras ainz que nous departons, ib. CVII.

XIIe s. Ja par cop d'arme [le haume] ne sera entamez, Ronc. p. 36. Nus cops de lance, de dart et de penon, ib. p. 51. D'ores en altres i [il] va grans cols donant, ib. p. 136.

XIIIe s. Apertement lui va Pepins tel cop donner, Berte, III. En la senestre cuisse [elle] a tel cop assené, ib. X. Et veez chi un castiel qui a nom Tenis priès de chi à quatre lieues [Tunis, à quatre lieues de Damiette] que nous prendrons au premier cop, Chr. de Rains, 101. Li menestrel du mestier desus dit doivent lesier oevre au samedi au darrenier coup de vespres en la paroisse où il demourent, Liv. des mét. 53. Amours, ainc ne fu chevaucie [chevauchée], Tornoiemens, ne os [armée] banie, Où on ne sentist de tes caus, Hist. litt. t. XXIII, p. 613. Vous savés bien qu'au premier cop Ne cope l'en mie le chesne, la Rose, 3424. Et ainsi s'en revint et ramena sa gent à pié ; et ses trois biaus cops fist-il devant le seigneur d'Arsur et les riches hommes qui estoient en Acre, Joinville, 277. Li rois ot, par la pez fesant, grant coup [beaucoup] de la terre le conte, ib. 206. Qui ot le vis [visage] et teint et pale Por les cous qu'il ot receüs, Ren. 24858.

XIVe s. Se vostre faulcon a mal es yeulx, de cop ou de toyes [taies], Modus, f° XCIV. Tournemine qui fu prudoms au cops donner, Guesclin. 18312. L'en estoit en conseill souvant, Grant coup avoit de sage gent ; Là oïssiez de beaux langages, Liv. du bon Jeh. 1549.

XVe s. À ces coups [cette fois] passoient et devoient passer le roi de France et ses oncles, Froissart, II. II, 212. Le bateau n'estoit pas trop grand où nous passasmes, car il n'y pouvoit entrer que deux chevaux au coup [à la fois], Froissart, II, III, 7. Et puis de petit à petit je menerai tel Jean Lyon que il sera tout rué jus ; ainsi serons-nous vengés subtilement et sans coup ferir [Mahieu à ses frères], Froissart, II, II, 52. Si se retraït en sa bataille et ordonna que toutes gens mangeassent à leur aise et bussent un coup, Froissart, I, I, 284. Mais il n'a nul recovrement, Quant la mort a son cop feru, Orléans, Requête à Cupidon. Mais les dames si nous prierent très De boire un coup ; et illec assez près Nous menerent en lieu bel, cler et frès Pour desjuner, Christine de Pisan, Dit de Poissy. Lors le roy mist sa lance en arrest et se afficha du tout sur les estriers, puis s'appuya sur le coup pour le chevalier tuer, Perceforest, t. I, f° 28. Le duc de Normandie s'estoit deliberé ung coup de fuyr en Flandres, mais…, Commines, I, 16. Sage après le coup, Commines, ib. Son artillerie tyroit à coup perdu par dessus et dedans la ville, Commines, III, 3. Disant que on faisoit ces dissimulations pour n'avoir point la guerre aux deux royaulmes à ung coup, Commines, III, 6. Ung coup me trouvay present que le seigneur Durfé dist ces parolles au dit duc, Commines, III, 8. Qu'est ce cy, à qui sommes nous ? Ma maistresse est bien arrivée ; à coup à coup, despechez vous, Villon, 1re repue fr. Le mari qui mouroit et enrageoit de faire un coup de sa main, trouva façon de…, Louis XI, Nouv. LVI.

XVIe s. Lors me dist à voix espamye : Encore un coup, le cueur me deult, Marot, J. V, 333. Chargez, compaignons, chargez vos ennemys, et commencez le hust ; car le premier coup vault deux, Jean D'Auton, Ann. de Louis XII, ms. f° 74, dans LACURNE. Il en a faict son coup d'essay, Marot, II, 144. Pour belle femme l'on visite à tous les coups un laid mari, Marot, II, 189. Pour si à coup [soudain] de nous ne l'estranger, Marot, II, 294. Ô le bon gain de mort qui nous delivre Tout à un coup de tribulation, Marot, II, 322. À la compaigne, à coup, à coup, Hau capitaine pinsemaille, Marot, II, 132. Tirer à coups de fleches, Montaigne, I, 23. À touts coups, Montaigne, I, 36. Le tromper peult servir pour le coup, Montaigne, I, 24. À coups d'aviron, Montaigne, I, 63. À tous les coups qu'il se mettoit à table, Montaigne, I, 35. Tout à [d'] un coup, Montaigne, I, 82. Mort du seul coup de son imagination, Montaigne, I, 91. Ce conte lui vint à coup [tout à coup] frapper l'imagination, Montaigne, I, 94. [Préservatif] contre le coup du soleil et la douleur de teste, Montaigne, I, 95. Arracher quelqu'un du sommeil tout à coup et par violence, Montaigne, I, 195. Je bois le dernier coup quasi tousjours le plus grand, Montaigne, II, 18. Vulcanus en est encor boiteux du coup qu'il print [de la chute qu'il fit], et sera toute sa vie, Despériers, Cymbal. 121. Ils esmeurent une partie de la France contre l'autre, et eux cependant jugeoyent des coups, Lanoue, 99. Lors ses souhaits seront à un coup [entièrement] assouvis, Amyot, Préf. XIII, 41. Un vaisseau athenien arrive tout coy du commencement, puis tout à coup ceulx qui sont dedans font un grand bruit, Amyot, Solon, 14. À tous coups, Lanoue, Thém. 28. Il combattoit à coups de traict et de gect, Lanoue, ib. 28. Il m'a fallu ès jours sacrez de mon triumphe ensepvelir coup sur coup, de mes propres mains, mes deux jeunes enfans, Lanoue, P. Aem. 58. Celuy qui avoit fait le coup s'en fouit incontinent, tenant tousjours son espée nue au poing, Lanoue, Timol. 24. Quand il perdit coup à coup ses deux enfans, Lanoue, Timol. et P. Aem. comp. 3. Elle avoit desja pris coup, et il estoit trop mal aisé de la retenir qu'elle n'allast en precipice, Lanoue, Lucull. 77. Il alloit aussi au senat quand il estoit question de rompre le coup à quelque menée, Lanoue, ib. 85. À grand peine peut sa cuirasse resister aux coups de traict et de main qu'il receut, Lanoue, Dion, 41. Et si est son cours fort aspre et fort roide, tellement que les troncs d'arbres que l'on jettoit à val la riviere, avoient grand coup, et faisoient grant effort contre les poultres qui soustenoient le pont, Lanoue, César, 30. Le duc estoit homme de guerre, remarqué pour, en plusieurs batailles et combats, avoir par ses charges gagné le coup de la partie, D'Aubigné, Hist. I, 360. Et afin que cette maniere d'assurance portast plus de coup, on depesche deux edits l'un dessus l'autre plains de faveur et asseurance à tous ceux qui se voudroient retirer, D'Aubigné, ib. II, 34. Qu'il falloit l'obliger à son avenement pour en tirer une pareille à coup de besoin, D'Aubigné, ib. 158. Toutes les autres volées firent coup [porterent] dans la cavalerie, D'Aubigné, ib. III, 52. Ils baptiserent ce prodigieux et horrible forfait, du nom de coup du ciel, Sat. Mén. p. 5. Aussi, de coup à coup, regarderés l'estat de sa cuite, pour prendre avis du poinct de la sortie du feu, De Serres, 866. Les autres coups hors mains et venans de loin, comme pierres, traicts et dards, Roman d'Alector, p. 11, dans LACURNE. Je y ai receu plus de trois cents coups de main et beaucoup plus de traict, ib. p. 9. À son reveil elle fut trouvée avoir perdu le sens ; car elle tenoit des propos impudiques contre sa nature et costume, changeans et muables coup à quille [comme les coups au jeu de quilles] et s'entretenant comme arene sans chaulx, ib. p. 27, dans LACURNE. S'estant transpercez les visages par coups fourrés, comme en ce temps là on usoit de ces mots, Brantôme, Cap. estrang. t. I, p. 303, dans LACURNE. Procedans sur lieu [pour établir des limites de possessions territoriales], si l'une des parties frapoit aucuns coups à un ou plusieurs cailloux, maintenant estre bornes, Nouv. coust. génér. t. II, p. 79. Chacun est recevable pour rehausser et rencherir ces biens, jusqu'à ce que le coup de la main ou de la palmée en sera donné, ib. t. I, p. 492. Un coup de langue est plus dangereux qu'un coup de lance, Cotgrave Chascun est sage après le coup, Cotgrave En adventure gisent grands coups, Cotgrave Qui vise loin, jamais ne rend son coup heureux, Cotgrave

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

COUP.
10Ajoutez :

Terme d'exploitation houillère. Coup d'eau, accident que cause la rencontre fortuite, dans les travaux de mines, d'une source ou bain d'eau auquel on donne issue. La section a entendu le rapport de M. Habets, ingénieur, sur les moyens de prévenir les explosions et les coups d'eau dans les mines, Journ. offic. 22 nov. 1876, p. 8528, 2e col. Une meilleure organisation des travaux de sondage dans les mines où il existe des travaux antérieurs prémunira les mineurs contre les coups d'eau, ib. 3e col.

Coup de feu, nom d'un des actes d'un feu d'artifice. Ce coup de feu (c'est le terme technique) était accompagné de douze pyramides, de chacune desquelles jaillissait un bouquet de chandelles romaines, Monit. univ. 16 et 17 août 1867, p. 1116, 3e col.

18Aux exemples de à coup, ajoutez celui-ci : Tel fut le coup de foudre qui tomba sur Mme la duchesse, si à coup au premier voyage de ses filles à Marly, Saint-Simon, t. VIII, p. 285, éd. Chéruel.
25Donner un coup de télégraphe, expédier une dépêche télégraphique. Maintenant, si la chambre insiste pour qu'on recule la révision des chevaux, un coup de télégraphe sera donné ce soir, et demain la revue sera ajournée, Journ. offic. 30 mars 1876, p. 2283, 2e col.
26Les trois coups, les trois coups que l'on frappe dans une salle de spectacle pour annoncer que la pièce ou qu'un acte va commencer. Dans Racine Eurybate, Ergaste dans Molière, De la location il porte le fardeau, Et frappe les trois coups au lever du rideau, Delavigne, Coméd. I, 5.
27 Familièrement. Être aux cent coups, être fort embarrassé.
28À coup près, ancienne locution qui signifie à peu de chose près, peu s'en faut. Parmentier… m'assura qu'il disposerait à coup près de Brigalier, conseiller de la cour des aides, capitaine de son quartier et très puissant dans le peuple, Retz, Mém. t. I, p. 165, éd. Feillet. Je vous demande excuse, monsieur, dit Sancho ; mais comment voulez-vous que je trouve à coup près la maison de notre maîtresse ? Don Quichotte, trad. par Filleau Saint-Martin. t. III, ch. IX, de l'édit. de 1678, p. 134 et 135. Harcourt manque à coup près d'entrer au conseil, Saint-Simon, t. VII, p. 98, éd. Chéruel.
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Encyclopédie, 1re édition (1751)

COUP, s. m. (Chir.) choc plus ou moins violent d’un corps qui nous frappe, ou contre lequel nous allons heurter.

Il en résulte toûjours que les coups un peu considérables affoiblissent & quelquefois détruisent le ressort des vaisseaux ou les divisent. Lorsque le ressort des vaisseaux est diminué ou perdu, le mouvement progressif des fluides qui y sont contenus s’y fait lentement, ou ne s’y fait point ; parce que les solides n’ont plus la force de les pousser. Lorsque les vaisseaux sont divisés, les fluides s’épanchent dans leurs interstices, ou dans quelque cavité.

Les coups legers qui affoiblissent peu le ressort des vaisseaux ou qui les divisent foiblement, n’ont point de suites fâcheuses, la nature pourvoit toute seule à leur guérison : mais les autres coups peuvent produire toutes sortes de maux, des tumeurs, des solutions de continuité dans les parties molles, dans les parties dures, leur déplacement, un dérangement dans le cerveau, si la tête a souffert ; en un mot tous les effets qui peuvent naître des apostèmes, des blessures, des contusions, des fractures, des luxations. Alors on doit considérer seulement la nature du mal, son état, & son degré, pour y appliquer le remede. Tirons d’abord les hommes du danger, & puis nous en discuterons les causes. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

Coup-de-Soleil, s. m. (Med.) impression subite & momentanée des rayons du Soleil, réunis par des causes naturelles sur quelques corps, dont ils peuvent détruire la texture, séparer ou disperser les principes.

Tout le monde sait qu’on détourne à l’aide d’un miroir ardent les rayons du Soleil de leur parallélisme, & qu’on les réunit dans un foyer où ils vitrifient les corps qu’on y présente. Or toutes les causes naturelles qui rassemblent le mouvement de la lumiere vers un même endroit, sont capables de faire naître beaucoup de chaleur dans le lieu où elles dirigent la lumiere. Ainsi les nuées qui la réunissent quelquefois à-peu-près comme les verres & les miroirs, peuvent produire des traits de chaleur très vifs, & c’est ce que nous appellons coups-de-Soleil. Les plantes sur lesquelles tombent ces traits de chaleur, en sont séchées, brûlées, grillées. Les hommes n’en souffrent guere impunément l’atteinte sur quelque partie du corps, particulierement sur la tête ; & l’expérience nous apprend que les caravanes, les moissonneurs, les faucheurs, les laboureurs, en sont souvent la victime : ils éprouvent encore les effets de ces traits de chaleur, lorsque le Soleil après avoir été quelque tems obscurci par des nuages, vient, en se découvrant tout-à-coup, à darder sur eux ses rayons sans aucun obstacle qui les brise.

Cette chaleur vive & subite produit sur le corps humain la raréfaction des humeurs, la distension des vaisseaux, leur atonie, la compression du cerveau, l’extravasation des fluides, l’apoplexie, la mort. Le Soleil donnant à-plomb sur le crane, échauffe cette partie, met en contraction les fibres tendineuses de la dure-mere, & cause de violentes douleurs de tête, & des étourdissemens qui sont d’ordinaire les avant coureurs de la mort.

La méthode préservative demande d’éviter ces sortes d’accidens, de s’en garantir par art, & de rompre la force des rayons du Soleil par un corps intermédiaire ; mais ce corps propre à produire cet effet, ne doit pas toucher la tête, afin de ne lui pas communiquer par le contact la chaleur qu’il recevroit des rayons du Soleil : on en peut concevoir la raison par ce qui arrive à ceux qui ayant eu le crane ouvert, se servent pour la sûreté de leur cerveau d’une calotte d’argent ; bientôt ils se trouvent obligés, à cause de la grande chaleur que contracte cette calotte, de lui en substituer d’autres faites de carton ou de quelque matiere moins dense & moins solide qu’un métal. La méthode curative consiste à desemplir & détendre les vaisseaux par la saignée, les lavemens, les bains tiedes, le repos des muscles & de l’esprit, l’air frais & renouvellé, les fomentations, les vapeurs d’eau, les humectans, les boissons acides, & les sucs gélatineux. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

Coup foudroyant, expérience de Leyde ou de la commotion (Physique), est le nom d’une expérience de l’électricité, dans laquelle la personne ou les personnes qui la font se sentent comme frappées vivement & tout à la fois dans plusieurs parties du corps. La maniere ordinaire de la faire est fort simple, & consiste en ceci. Ayant empli d’eau à moitié ou un peu plus une bouteille ou un vase de verre médiocrement épais, bien net & bien sec au-dessus de l’eau tant en-dedans qu’en-dehors ; prenez-le d’une main, en l’empoignant de façon que vous le touchiez dans la partie qui répond à celle où se trouve l’eau intérieurement, & faites qu’un fil de métal partant du conducteur, voyez Conducteur, y trempe sans toucher les bords du vase. Si après que l’on aura électrisé le globe pendant quelque tems, vous tirez avec la jointure du milieu d’un des doigts de l’autre main une étincelle du conducteur, vous ferez l’expérience du coup foudroyant, ou plutôt vous recevrez le coup foudroyant, c’est-à-dire que dans l’instant que vous tirerez l’étincelle, si l’électricité est d’une certaine force, vous vous sentirez frappé violemment & en même tems dans les poignets, dans les coudes, les épaules, & même dans la poitrine. La maniere dont cette expérience se fait sentir & affecte telles ou telles parties, varie beaucoup selon la force de l’électricité, la constitution, & le tempérament des personnes qui la font. Dans les unes, & c’est ordinairement celles qui sont d’une constitution foible, elle affecte un plus grand nombre de parties, & produit un sentiment de douleur plus vif ; dans les autres elle occasionne une si grande surprise, qu’elles sont tentées de croire que quelqu’un des assistans les a frappées, ne pouvant s’imaginer que ce qu’elles viennent d’éprouver n’est dû qu’à l’expérience qu’elles ont faites. Mais en général elles conviennent toutes de la rapidité & de la violence du coup qu’elles ont ressenti ; coup qui est toûjours suivi, ou plutôt accompagné, d’une secousse ou convulsion si vive dans les parties qui en ont été affectées, qu’elle a souvent été cause que les personnes ont jetté le vase par terre ; c’est cette convulsion qui a fait donner à cette expérience, comme nous l’avons déjà dit, le nom d’expérience de la commotion ou du choc.

Nous pourrions pousser plus loin ce détail, sur ce que l’on ressent en la faisant ; mais comme c’est une affaire de sensation, nous ne pourrions espérer par tout ce que nous ajoûterions d’en donner une idée précise au lecteur ; ce n’est qu’en la faisant lui-même qu’il pourra l’acquérir.

Cependant comme la nouveauté des sensations les rend plus frappantes, & nous rend par-là plus éloquens & plus vrais dans les descriptions que nous en faisons, notre imagination n’ayant pû être séduite par les discours des autres ; je crois devoir ajoûter ici ce que dit M. Musschenbroeck de cette expérience, dans une lettre qu’il écrivit à M. de Reaumur après l’avoir faite pour la premiere fois, & par laquelle nous en eumes la premiere nouvelle. Ayant donné une idée de son appareil, qui ressembloit à-peu-près à celui que je viens de décrire, il continue ainsi : « tenant de ma main droite le vase de verre, tandis que j’essayois de l’autre à tirer des étincelles, tout d’un coup ma main droite fut frappée avec tant de violence, que j’eus le corps ébranlé comme d’un coup de foudre ; le vaisseau, ajoûte-t-il, quoique fait d’un verre mince, ne se casse point ordinairement, & la main n’est pas déplacée par cette commotion ; mais les bras & tout le corps sont affectés d’une maniere terrible que je ne puis exprimer ; en un mot, je crûs que c’étoit fait de moi ».

On voit par tout ce que nous venons de rapporter, que le nom de coup foudroyant qu’on a donné à cette expérience, n’est que l’expression de ce que la plûpart des personnes qui la sont croyent ressentir, la maniere subite & violente dont elles sont frappées leur faisant imaginer qu’elles ont été comme foudroyées.

On n’aura pas de peine à croire que la nouvelle d’une expérience aussi extraordinaire s’étant répandue dans le monde savant, tous les physiciens ayent été curieux de la repéter : mais qu’il en ait été de même du peuple & des plus indifférens ; que cette expérience ait excité leur curiosité au point où elle l’excita, c’est ce qu’on auroit de la peine à s’imaginer, si la chose n’étoit encore trop récente pour qu’on en pût douter. En effet, il n’y eut peut-être jamais d’empressement pareil à celui qu’on témoigna pour la voir ou pour la faire, tant on avoit de peine à croire le merveilleux qu’on en racontoit. Nos physiciens étoient accablés de gens, qui demandoient à s’assurer par eux-mêmes de ce qui en étoit ; elle faisoit le sujet de la conversation ordinaire à la ville & à la cour. Enfin les choses allerent au point que l’électricité, qui jusques-là avoit été renfermée dans les cabinets des physiciens, se donna en spectacle pour de l’argent ; des gens avec des machines à électricité s’étant établis dans les foires, & ayant couru les villes & les provinces pour satisfaire à l’envie que l’on témoignoit, comme nous l’avons dit, de toutes parts de faire cette célebre expérience.

C’est ainsi que la Physique venge, si cela se peut dire, de tems en tems les Physiciens du peu de cas que le peuple (& il y en a de plus d’une espece) fait de leurs occupations : elle leur offre des faits si singuliers & si extraordinaires, que les moins curieux ne peuvent s’empêcher de sortir de leur indifférence, pour venir les admirer.

Quelque singulier & extraordinaire que l’empressement dont nous venons de parler puisse paroître, on voit cependant qu’il a une espece de fondement dans la nature de la chose elle-même. En effet, tous les différens phénomenes que nous offre la Physique ne piquent pas également la curiosité ; il y en a beaucoup où il n’y a point à admirer pour qui ne sait pas penser ; mais dans celui-ci le merveilleux s’y voit, s’y ressent pour ainsi dire. Quoi de plus surprenant, en effet, qu’une bouteille qui ne produit aucune sensation, qui paroît n’avoir apporté aucun changement à votre état, & dont l’effet est tel cependant, que lorsque vous l’empoignez, l’étincelle que vous tiriez auparavant du conducteur sans aucune conséquence en n’éprouvant qu’une légere douleur, vous fait ressentir alors une violente commotion dans les bras & dans la poitrine si brusquement & avec tant de rapidité, qu’il est impossible de l’exprimer.

C’est à Leyde que cette fameuse expérience se fit pour la premiere fois, au commencement de Janvier de l’année 1746. Comme l’on fut quelque tems avant de savoir précisément qui en étoit l’auteur, M. l’abbé Nolet lui donna le nom d’expérience de Leyde’ & le merveilleux de ses effets paroissant venir uniquement de la bouteille dont on se sert pour la faire, on l’appella aussi en conséquence la bouteille de Leyde.

Depuis on a appris que nous devions cette découverte à M. Cuneus, d’une des premieres familles de cette ville, qui aime & cultive la Physique. Il la fit par hasard un jour qu’il s’occupoit à repéter quelques expériences d’électricité. [Ceci est tiré d’une note qui se trouve à la page 3 du mémoire de M. l’abbé Nolet sur l’expérience de Leyde, inseré dans les mémoires de l’académie des Sciences de l’année 1746.]

Je me suis un peu étendu sur l’historique de cette expérience, sur l’éclat & la réputation qu’elle a donné à l’électricité ; mais j’ai cru que dans un ouvrage consacré à transmettre à la postérité les découvertes des différens siecles, & les circonstances qui les ont accompagnées, on ne seroit pas fâché de trouver une histoire abregée de celle-ci.

On conçoit que cette nouvelle expérience, ou plutôt ce nouveau phénomene de l’électricité, reveilla l’ardeur des Physiciens, & qu’ils s’empresserent à l’envi de reconnoître toutes les différentes circonstances qui l’accompagnent, afin d’en découvrir les causes ; c’est aussi ce qui arriva. De-là il est facile d’imaginer qu’il a dû résulter un nombre infini d’expériences qu’il seroit inutile & même impossible de rassembler ici.

Afin de satisfaire cependant à ce que le lecteur a droit d’attendre de nous à ce sujet, nous exposerons ce qui regarde ce phénomene d’une maniere assez étendue, pour qu’il lui soit facile ensuite de se former une idée de la plûpart des expériences qui n’en sont que des suites.

Pour exécuter ceci d’une maniere plus abrégée, nous commencerons par donner le plus succintement que nous pourrons, une idée de plusieurs propriétés des corps électrisables par communication, & de ceux qui ne le sont pas, dont il sera traité plus amplement à l’article Electricité, auxquels il nous paroît que l’on doit attribuer ce qui arrive dans l’expérience du coup foudroyant ; ensuite nous montrerons par l’analyse des faits qu’elle nous présente, qu’ainsi que nous venons de l’avancer, elle n’est qu’une suite de ces propriétés. Au reste, si nous avons suivi cette voie, c’est que nous avons cru pouvoir par son moyen donner un ordre plus systématique à cet article, & exposer plus méthodiquement ce qui en dépend ; car nous ne prétendons nullement donner comme une véritable explication des causes de cette expérience ce que nous disons à ce sujet (quoiqu’en le faisant nous ayons tâché de ne suivre d’autre guide que l’analogie des faits), mais plutôt comme une hypothese, des conjectures, ou tout ce que l’on voudra sur ces causes. Pour faire voir que nous regardons cette explication exactement sur ce pié, nous ajoûterons celles qu’ont donné de la même expérience les plus habiles Physiciens, afin que le lecteur puisse choisir, & ne se déclarer que pour celle qui lui paroîtra le mieux quadrer avec les faits.

Au reste, nous n’oublierons rien dans cet article pour rendre justice à tous les Physiciens qui ont travaillé sur cette matiere ; & si par hasard nous y manquions, nous les prions de croire que c’est faute d’avoir été bien instruits, & non pour leur ôter rien d’une gloire aussi légitime que celle qui leur revient de leurs travaux.

Une des plus grandes différences qu’il y ait entre les corps électrisables par communication, & ceux qui ne le sont pas, & dont il soit plus important d’être instruit, c’est que les premiers, comme les métaux, les corps animés, l’eau, &c. paroissent être les véritables reservoirs de la matiere électrique, comme M. Watson l’a avancé le premier, & comme nous l’avons prouvé dans un mémoire lû à l’académie des Sciences l’année derniere ; & que les seconds, comme le verre, la porcelaine, la cire d’Espagne, &c. paroissent au contraire n’en point contenir du tout, ou du moins être de telle nature que par les moyens connus jusqu’ici nous ne pouvons pas l’en tirer. Ainsi, par exemple, avec quelque force que vous frottiez le verre, vous ne l’électriserez jamais sensiblement, si le corps qui le frotte ne contient de la matiere électrique ; car s’il n’en contient pas, s’il en est dépouillé, quelqu’effort que vous fassiez, & quelque tems que vous employiez à le frotter, il ne deviendra jamais électrique.

Il est à propos d’observer à ce sujet, que les métaux, les corps animés, &c. paroissent ne pouvoir contenir qu’une certaine quantité de feu ou fluide électrique dans leurs pores, & qu’aussi-tôt qu’on leur en ajoûte au-delà, le surplus tend à s’échapper de toute part. Il suit de ces propriétés un phénomene assez singulier, que je crois avoir observé le premier ; c’est que toutes les fois qu’une personne, ou un corps quelconque électrisable par communication, tire une étincelle d’un corps électrique, le premier, à moins qu’il ne soit isolé, se décharge du feu électrique qu’il a reçû, ou insensiblement (ce qui arrive lorsque le corps est dans un contact immédiat avec quelque grande masse de corps électrisables par communication, comme le plancher) ; ou d’une maniere sensible & avec une étincelle plus ou moins forte, lorsque ce corps étant comme isolé se trouve près de quelque corps non-électrique par lui-même. Si une personne, par exemple, tire une étincelle du conducteur, elle se déchargera du feu électrique qu’elle aura reçû d’une maniere insensible à-travers ses souliers : mais si elle presse légerement avec ses doigts le bras ou le poignet d’une autre personne, de façon cependant qu’elle ne le touche que dans très-peu de points ; dans l’instant qu’elle tirera l’étincelle, elles ressentiront l’une & l’autre, si l’électricité est un peu forte, une légere douleur comme d’une piquûre dans l’endroit où elles se touchoient ; douleur produite par une petite partie de l’électricité de la personne qui tire l’étincelle qui passe par cet endroit, tandis que le reste se dissipe par ses souliers. Cet effet ira même plus loin ; & si l’électricité est d’une certaine force, il se communiquera à quatre, cinq, ou six personnes se tenant de la même maniere.

Les corps électrisables par communication ont encore cette propriété, qui selon toute apparence tient à la premiere dont nous avons parlé ; c’est qu’en les touchant, quoique ce ne soit que dans un point, pourvû que le contact soit bien intime, on leur communique ou leur enleve l’électricité dans un instant.

Pour se former une idée de cette propriété, qu’on suppose un conducteur ou tout autre corps bien électrique : si une personne posant sur le plancher le touche, elle lui enlevera toute son électricité, à moins que le plancher ou ses souliers ne soient fort secs : si au contraire cette personne montée sur un gâteau de resine, touche ce même conducteur supposé électrise de nouveau, elle acquerrera au même instant une électricité égale à la sienne.

A cet égard, le verre, la porcelaine, & les autres substances électriques par elles-mêmes, different extrèmement de celles qui ne le sont pas ; car vous pouvez les toucher, & même dans plusieurs points tout-à-la-fois, sans leur enlever pour cela toute leur électricité : de même, ce qui ne paroît que l’inverse de cette qualité, vous ne pouvez les électriser par communication, qu’autant que le corps qui les électrise les touche tout-à-la-fois dans un grand nombre de points ; encore ne peut-on les électriser sensiblement de cette façon que d’une surface à l’autre, c’est-à-dire, par exemple, qu’en électrisant par communication une des surfaces d’un carreau de verre, on électrisera la surface opposée. Il semble que ces substances soient comme composées de parties ayant chacune en particulier leur petite atmosphere d’électricité. On voit par-là que pour desélectriser les corps électriques par eux-mêmes, comme pour les électriser par communication, il faut les toucher tout-à-la-fois dans un grand nombre de points.

Pour donner une idée de leur composition, & de celle des corps électrisables par communication, ou plûtôt de la maniere dont leurs différentes propriétés, dont nous venons de parler, peuvent avoir lieu, on pourroit supposer les premiers comme composés d’un grand nombre de petits globules non électriques par eux-mêmes, mais assez distans les uns des autres pour que l’on puisse enlever l’électricité de l’un d’entr’eux, sans pour cela enlever celle du globule voisin ; & les seconds comme composés des mêmes petits globules, se touchant tous de façon que l’on ne pourroit enlever l’électricité de l’un, que l’on n’enlevât en même tems celle de tous les autres. Ainsi, par exemple, en supposant une douzaine de balles de fer toutes isolées, électrisées, & placées à une certaine distance les unes des autres, on conçoit qu’on pourra à différentes reprises tirer des étincelles d’une de ces balles, sans enlever pour cela toute l’électricité des autres ; & on aura une idée de ce qui se passe dans le verre. Mais si on les suppose rapprochées de façon qu’elles se touchent immédiatement, on ne pourra tirer une étincelle de l’une d’entr’elles, qu’on n’enleve en même tems toute ou la plus grande partie de l’électricité des autres ; ce qui est le cas des métaux & des autres corps électrisables par communication. Mais passons à une autre propriété des corps électriques par eux-mêmes, ou plus particulierement du verre & de la porcelaine, dans laquelle nous paroît consister tout le mystere du coup foudroyant.

Cette singuliere propriété du verre est que lorsqu’il est électrisé par communication, ou même par frottement, comme nous l’avons découvert, pendant que la surface opposée à celle que l’on électrise de l’une ou l’autre de ces manieres, est en contact avec du métal ou toute autre substance électrisable par communication, il acquiert la faculté de donner du fluide électrique par la surface qui est électrisée, & en donne effectivement si rien ne l’en empêche, & d’en pomper ou d’en tirer par son opposée en contact avec le corps métallique ; & ce qu’il fait effectivement s’il en peut donner par la premiere surface. Eclaircissons ceci par un exemple. Supposons un carreau de verre bien net & bien sec, suspendu horisontalement sur des cordons de soie, & recouvert d’une feuille de plomb d’une figure semblable, mais plus petite dans toutes ses dimensions d’un pouce ou un peu plus, de façon qu’il la déborde en tout sens ; supposons encore ce carreau électrisé par communication au moyen de l’électricité que reçoit la feuille du conducteur ; imaginons de plus qu’une personne touche sa surface inférieure du plat de la main, sans cependant en toucher les bords : si après l’avoir électrisé de cette maniere pendant un certain tems, on ôte à la feuille de plomb sa communication avec le conducteur ; on verra que cette feuille qui auparavant recevoit l’électricité, en fournira, & que la surface inférieure du verre qui en fournissoit, comme nous le dirons dans un moment, en recevra. Pour bien s’assûrer de l’existence de ce fait, présentez à la feuille de plomb une pointe de fer, vous verrez à son extrémité une espece de petit point de lumiere ; faites-en de même à la surface inférieure du carreau, au lieu de ce point vous verrez à la pointe une aigrette, ou si vous ne la voyez pas, vous serez toûjours en état de l’exciter en tirant des étincelles de la feuille de plomb. Or, comme on le verra à l’art. Électricité, & comme nous l’avons montré dans le mémoire déjà cité, le point de lumiere indique toûjours l’entrée du fluide électrique dans le corps, & l’aigrette sa sortie ; ce qui montre que dans le premier cas il y a un fluide électrique qui sort de la feuille de plomb & entre dans la pointe de fer, & que dans le second il y en a un qui sort de cette pointe pour entrer dans la surface inférieure du verre.

Dans les circonstances que nous avons dites être nécessaires à observer pour que le verre acquît la propriété dont il est ici question, nous avons spécifié particulierement qu’il falloit tenir le plat de la main contre la surface opposée à celle qui recevoit l’électricité. Or quoique tout verre électrisé par une de ses surfaces, soit par frottement, soit par communication, donne toûjours un peu d’électricité par l’autre, comme on peut s’en convaincre en présentant à cette derniere surface la pointe de fer (car on y verra le petit point de lumiere, qui est, comme nous venons de le dire, la preuve qu’il sort un fluide électrique du corps auquel vous la présentez) il paroît cependant par un grand nombre d’expériences, que par le moyen dont nous avons parlé on oblige une plus grande quantité de fluide électrique à sortir de cette surface non électrisée. Ainsi, par exemple, si vous électrisez par communication un tube de verre plein de limaille de fer ou de sable, il paroîtra peu d’électricité au-dehors, pendant qu’elle passera toute au-dedans. De même si vous vuidez ce tube d’air, ce qui, comme on le verra à l’article Electricité, revient à la même chose que de l’emplir de limaille, vous verrez encore dans l’obscurité l’électricité passer au-dedans, & y faire plusieurs jets d’un feu pâle & rare, &c. enfin on observera toûjours qu’il sort beaucoup plus de fluide électrique de la surface opposée à celle qu’on électrise, lorsque la premiere est en contact avec quelque corps électrisable par communication, que dans tout autre cas.

On a vû par ce qui a été dit plus haut, comment, lorsque le carreau de verre a été fortement électrisé, sa surface qui a reçû l’électricité en fournit, & comment son opposée en pompe des corps environnans qui en peuvent donner. Mais nous avons dit que dès que le verre est électrisé par une de ses surfaces, pendant que l’autre est en contact avec un corps électrisable par communication, il acquiert une tendance à produire cet effet, s’il n’en est pas empêché ; c’est ce qui demande à être expliqué un peu plus au long. Quant au fait, voici ce qui arrive, & que l’on observera constamment dès qu’on commencera à électriser le carreau de verre. Par exemple, tout étant de même que nous l’avons supposé plus haut, on verra, si l’on retire pour un moment la main de dessous la surface inférieure ; on verra, dis-je, en y présentant la pointe de fer, le point de lumiere à cette pointe ; preuve, comme nous l’avons dit, que le fluide sort de cette surface. Mais à mesure que le carreau de verre deviendra plus électrique, ce point ira toûjours en s’affoiblissant, comme on pourra s’en appercevoir en retirant la main de tems en tems, & présentant la pointe. Enfin lorsque ce verre aura acquis le plus grand degré d’électricité que la vertu électrique du globe pourra lui communiquer, si l’on présente de nouveau cette pointe à la surface inférieure, le point de lumiere paroîtra comme insensible, ou s’évanoüira tellement, que pour peu que l’électricité du conducteur vienne à diminuer en en tirant des étincelles, ou par quelqu’autre cause, ce point se changera aussi-tôt en aigrette, qui est la marque d’un fluide électrique sortant de cette pointe, & tendant à entrer dans le corps auquel vous la présentez. Cependant la tendance de ce carreau à fournir de l’électricité, n’a pas moins lieu pendant tout le tems de son électrisation : mais comme c’est avec peu de force, elle ne se manifeste que dans les cas où elle peut véritablement entrer en action, comme lorsqu’on diminue tout-d’un-coup par une forte étincelle l’électricité du conducteur. Car si dans le même moment ayant retiré la main de sa surface inférieure, on présente à cette surface la pointe de fer, on en verra sortir une aigrette, au lieu du point de lumiere que nous avons dit précédemment qu’on y observoit. Voici à-peu-près comment nous concevons que ces différens effets ont lieu. Lorsque vous commencez à électriser le carreau de verre, la force qu’il acquiert pour fournir du fluide électrique par sa surface électrisée, est inférieure de beaucoup à celle avec laquelle le globe tend à en fournir par le conducteur : celle-ci l’emportant donc, l’électricité qu’il fournit doit passer au-travers du verre, & en sortir, comme on a vû que cela arrivoit, à-peu-près comme deux courans d’air opposés qui se rencontreroient dans un tuyau ; celui qui auroit le plus de vîtesse repousseroit l’autre, & l’obligeroit à lui livrer passage. Mais comme à mesure que le carreau de verre est électrisé, il acquiert plus de force pour pousser du fluide par la surface électrisée, &c. la force avec laquelle l’électricité vient du globe l’emporte de moins en moins sur celle avec laquelle il tend à en donner ; de façon que le fluide électrique qui passe à-travers le carreau va toûjours en diminuant, jusqu’à ce qu’enfin la force que le carreau a pour en fournir, étant égale à celle que le globe a pour lui en communiquer, il n’en peut plus passer. Ces deux forces une fois parvenues à l’égalité, dès que celle avec laquelle le conducteur agit s’affoiblit, soit que l’on diminue l’électricité en en tirant des étincelles, ou que le globe en fournisse moins, la force avec laquelle le carreau tend à fournir du fluide électrique l’emporte ; & il en donne par la surface électrisée, pendant qu’il en pompe par l’autre, ainsi que nous l’avons dit. Au reste il paroît que toutes les substances électriques par elles-mêmes, n’ont pas la propriété du verre dont nous venons de parler : on ne connoît encore que la porcelaine & le talc qu’on lui puisse substituer dans l’expérience du coup foudroyant. M. Dutour de Riom, correspondant de l’académie des Sciences, est le premier que je sache qui ait parlé de cette propriété du talc.

Ayant mis sous les yeux du lecteur ces différentes propriétés des substances électriques & non électriques par elles-mêmes, nous passerons à l’analyse des moyens que l’on employe pour faire l’expérience du coup foudroyant, & de ce qui se passe dans cette expérience.

Dans la description que nous avons donnée de la maniere dont elle se fait, nous avons dit que l’on emplissoit la bouteille à moitié, ou un peu plus, & que l’on faisoit tremper dans l’eau de cette bouteille, un fil de métal partant du conducteur. Nous avons dit en même tems qu’il falloit la tenir d’une main, en l’empoignant de façon que l’on touche les parties de sa surface qui répondent à celle que l’eau touche intérieurement, & ensuite tirer une étincelle du conducteur. Nous allons, d’après les différentes propriétés du verre, & des corps électrisables par communication, que nous avons rapportées, essayer de faire voir comment de cette disposition & de ces propriétés il en doit résulter un choc dans la personne qui fait l’expérience. Par les propriétés du verre, que nous venons de rapporter, on voit, 1°. que l’eau étant électrisée par le moyen du fil de métal venant du conducteur, elle doit électriser le verre dans tous les points où elle le touche, puisque, comme nous l’avons dit, le verre s’électrise ainsi par communication. On sent facilement aussi pourquoi on ne doit pas emplir la bouteille d’eau au-dessus d’une certaine hauteur, & pourquoi elle doit être fort seche dans toute la partie extérieure & intérieure au-dessus de la surface de l’eau ; car si cette liqueur montoit trop haut dans la bouteille, ou que ses deux surfaces fussent humides, l’électricité pourroit glisser le long de ces surfaces, se transmettre à la main, &c. & de-là se perdre dans le plancher ; ainsi le verre ne pourroit plus s’électriser, puisqu’il ne resteroit plus d’électricité : on voit donc la nécessité d’un intervalle, rebord ou marge de verre, qui sépare les deux substances électrisables par communication, qui le touchent. On voit, 2°. que la main, qui est un électrisable par communication, touchant la bouteille par sa surface extérieure, doit obliger une partie de l’électricité que reçoit l’intérieure, à passer au-travers du verre, comme nous avons dit que cela arrivoit dans ce cas. 3°. Que par-là, au bout d’un certain tems d’électrisation, cette bouteille acquiert la propriété de pouvoir fournir de l’électricité par sa surface intérieure, & d’en pomper extérieurement par les pores répondans à ceux qui ont été électrisés en-dedans. Ceci étant bien entendu, si l’on se rappelle que tous les corps électrisables par communication, contiennent beaucoup de fluide électrique, on concevra comment on doit éprouver un choc, lorsqu’en tenant la bouteille d’une main, on tire de l’autre une étincelle du conducteur ; car dès que vous tirez cette étincelle, vous acquérez du fluide électrique qui tend à se décharger de toutes parts, & qui se déchargeroit effectivement au plancher à-travers vos souliers, si dans le même instant le cul de la bouteille ne l’attiroit : or comme dans le même tems que d’une main vous tirez l’étincelle du conducteur, la bouteille tire ou pompe l’électricité de l’autre main qui la touche, comme nous l’avons dit, vous devez en conséquence sentir instantanément deux secousses dans les parties du corps opposées, c’est-à-dire dans le poignet, &c. de la main qui tient la bouteille, & dans celui de celle qui tire l’étincelle. En effet, dans le bras qui tire l’étincelle, vous devez sentir une secousse produite par le fluide électrique qui y entre ; & dans celui qui tient la bouteille, une autre secousse produite au contraire par le fluide qui en sort : & c’est aussi ce que l’on ressent, non-seulement dans les poignets, mais encore dans les coudes, &c. comme nous l’avons dit au commencement de cet article. Cette double sensation distingue d’une maniere bien précise l’effet de cette expérience, de celui d’une simple étincelle que l’on tire du conducteur. Dans ce dernier cas on ne ressent qu’une seule secousse, & cela dans la partie qui tire l’étincelle. Il est vrai que lorsque l’électricité est très-forte, on en ressent une aussi quelquefois en même tems dans la cheville du pié ; ce qui a fait dire à quelques physiciens, que le choc de l’expérience de Leyde ne différoit de celui que produit une simple étincelle, que par la force ; mais ils ne faisoient pas attention à cette double sensation simultanée, que l’on éprouve toûjours dans cette expérience, quelque foible même que soit l’électricité, & qui par-là en fait, pour ainsi dire, le caractere.

L’expérience suivante forme une nouvelle preuve en faveur de l’explication que nous venons de donner des causes du coup foudroyant.

Que, tout restant de même, on suppose la bouteille placée sur un guéridon de bois, & deux personnes ayant chacune une main posée dessus, toûjours dans la partie qui répond à celle où l’eau se trouve intérieurement ; si l’une d’elles tire une étincelle du conducteur, elles seront frappées toutes les deux en même tems ; mais l’une, celle qui tout à la fois touche la bouteille & tire l’étincelle, recevra le coup foudroyant ; & l’autre, dont la main repose dessus, ne sera frappée, quoiqu’assez vivement, que dans le bras & le poignet de la main qui touche à la bouteille. La raison en est sensible. Lorsqu’une des personnes tire l’étincelle du conducteur, le verre de la bouteille pompe le fluide électrique de tous les corps qui touchent les points de sa surface extérieure répondant à ceux que touche l’eau intérieurement : il doit donc non-seulement en pomper de la personne qui tire l’étincelle, & par-là lui faire recevoir le coup foudroyant, mais encore de celle qui ne fait que reposer sa main dessus, quoique cette personne ne participe aucunement au reste de l’expérience.

Avant d’aller plus loin, il est à propos de répondre à une difficulté que l’on pourroit nous faire. Selon vous, nous dira-t-on, les secousses que l’on ressent dans le coup foudroyant, sont produites par l’entrée du fluide électrique d’un côté, & par sa sortie de l’autre. Or ce fluide entrant par la main qui tire l’étincelle, & sortant par celle qui tient la bouteille, il sembleroit que ces secousses devroient se faire sentir aux deux mains, & cependant vous dites que c’est aux poignets, aux coudes, &c. Comment cela se fait-il ? Le voici. Ce n’est pas tant l’entrée ni la sortie du fluide électrique dans un corps, qui produit un effet ou une sensation, que la maniere dont ce fluide entre ou sort. La raison en est que la transmission de l’électricité d’un corps à un autre qui le touche immédiatement, se fait sans choc, sans étincelle, enfin sans aucun effet apparent ; au lieu que si elle se fait d’un corps à un autre qui ne le touche pas, il y a toûjours étincelle & choc. Ainsi, que l’on électrise une chaîne de fer non tendue, & dont les chaînons soient à quelque distance les uns des autres, le passage de l’électricité de l’un à l’autre deviendra sensible par une étincelle qui partira successivement de chacun d’eux ; mais si la chaîne est bien tendue, ensorte que tous les chaînons se touchent bien intimement, la transmission se fera d’un bout à l’autre dans un instant, & sans que l’on s’en apperçoive. Appliquons ceci à ce qui se passe dans un homme qui fait l’expérience du coup foudroyant. Dans cet homme se trouvent des articulations aux poignets, aux coudes, aux épaules, &c. Dans ces parties la continuité n’est pas bien entiere ; elles ressemblent donc en quelque façon aux chaînons qui ne se touchent pas immédiatement : il s’ensuit donc qu’il doit y avoir une espece de choc, lorsque l’électricité passe de l’une à l’autre, comme nous avons dit qu’on l’observe. Cependant le doigt ne laisse pas de ressentir une douleur, mais plûtôt d’une forte piquure brûlante ; & si la main qui touche la bouteille ne ressent rien ordinairement, c’est que le fluide électrique se déchargeant par tous ses pores, l’impression qu’elle fait est trop foible pour être apperçue. Vous vous assûrerez que c’en est-là l’unique cause, si au lieu d’appuyer la main toute entiere sur une bouteille bien électrisée, vous ne la touchez que du bout des doigts ; car vous y ressentirez une douleur très-vive en faisant l’expérience, le fluide électrique faisant alors une impression fort sensible, parce qu’il ne sort que par le petit nombre de pores qui sont au bout des doigts.

Non-seulement l’expérience que nous avons rapportée plus haut, paroît confirmer notre explication des effets de la bouteille de Leyde, mais encore la plûpart de celles que l’on peut faire avec cette bouteille ; ainsi lorsqu’elle fait partie d’un système de corps électrisés, quoique d’abord l’électricité paroisse plus foible que lorsqu’il n’y en a pas, cependant elle augmente successivement jusqu’à devenir très-forte : ce qui arrive lorsque cette bouteille a acquis la plus grande vertu possible, relativement à l’intensité de la force électrique qui vient du globe. On dit alors qu’elle est chargée, & l’électricité devient en quelque façon constante, & n’augmente ni ne diminue point à chaque instant, comme cela arrive lorsque cette bouteille ne fait point partie du système des corps électrisés ; ensorte qu’elle forme comme une espece de réservoir à l’électricité : or cet effet est une suite naturelle de ce que nous avons dit plus haut de la propriété qu’a le verre, de fournir du fluide électrique par la surface qui en a reçû, & d’en pomper par celle qui en a donné : car par cette propriété on voit que lorsque le verre de la bouteille de Leyde a été fortement électrisé, si le globe vient à fournir moins d’électricité, ce verre en redonne à l’eau, &c. en en pompant de la personne ou du support non-électrique sur lequel il est appuyé : la force qu’ont le globe & la bouteille pour fournir chacun de l’électricité, étant, comme nous l’avons dit plus haut, pour ainsi dire en équilibre lorsque celle-ci est bien chargée. On voit encore, par la même raison, que la vertu qu’a cette bouteille de conserver long-tems son électricité, est une suite de la même propriété. En effet, tant qu’elle conserve la faculté de pomper du fluide électrique des corps qui la touchent, elle conserve celle d’en fournir, & par conséquent de paroître électrique. Le tems que cette bouteille conserve son électricité, va quelquefois jusqu’à trente-six, quarante heures, & plus.

Dans la description que nous avons donnée du procédé que l’on observe dans cette expérience, nous avons suivi celui qui a été le premier employé, comme le plus simple. Aujourd’hui on met ordinairement un bouchon dans la bouteille, au-travers duquel passe un fil-de-fer qui va tremper dans l’eau, & dont l’extrémité qui deborde le bouchon, est courbée comme un anneau : on l’appelle le crochet. Par ce moyen on se sert plus commodément de cette bouteille ; & l’ayant chargée, on peut la transporter où l’on veut.

Après avoir donné notre explication des causes de l’expérience du coup foudroyant, il est à propos de dire, comme nous l’avons promis, deux mots de celles qu’en ont donné les plus habiles physiciens, comme MM. l’abbé Nolet, Jallabert, Watson & Franklin.

Selon le premier, tout dans cette expérience consiste à électriser un corps fortement, lequel cependant on puisse toucher & manier sans lui rien faire perdre de sa vertu ; & la commotion que l’on ressent, vient de ce que la matiere électrique du corps non-électrisé qui fait l’expérience, est vivement & en même tems choquée d’un côté par celle qui sort du conducteur ; & de l’autre, par celle qui s’élance de la bouteille. Selon M. Jallabert, au moment de l’expérience, deux courans d’un fluide très-élastique mûs avec violence, entrent & se précipitent dans le corps par deux routes opposées, se rencontrent, se heurtent, & leur mutuelle répulsion cause une condensation forcée de ce fluide en diverses parties du corps. Selon M. Watson, lorsque la personne qui fait l’expérience de Leyde ou du coup foudroyant, tire l’étincelle du conducteur, elle perd au moment de l’explosion qui se fait alors, autant de feu de son corps, qu’il y en avoit d’accumulé dans l’eau & dans le canon de fusil ; & elle sent dans ses deux bras l’effet du courant de son feu qui passe à-travers l’un, au canon de fusil ; & à-travers l’autre, à la phiole ou à la bouteille. Enfin, selon M. Franklin, la commotion n’a lieu qu’en conséquence de la prodigieuse condensation du fluide électrique dans la surface du verre touchée par le corps électrisable par communication électrisé, comme l’eau, le métal, &c. & raréfié au même degré dans la surface opposée ; & ce fluide, pour se rétablir en équilibre, ne pouvant passer à-travers le verre, qui, selon cet auteur, y est imperméable ; ce fluide, dis-je, dans l’instant que l’on tire l’étincelle, se précipite avec une rapidité inexprimable à-travers le corps électrisable par communication, qui fait la jonction du conducteur à la bouteille, pour entrer dans la surface du verre de cette bouteille, dans laquelle il avoit été tant raréfié.

On voit par cet exposé de la doctrine de M. Franklin sur la cause du coup foudroyant, que la nôtre y a assez de rapport. Nous prétendons en effet, comme lui, qu’il se fait un mouvement du fluide électrique, du crochet de la bouteille vers son ventre ; & il faut en convenir. Il est le premier qui à cet égard ait bien observé ce qui se passe dans cette expérience, & nous sommes d’accord avec lui, quant aux effets en général, mais d’une opinion très-différente de la sienne. On vient de voir que, selon lui, le verre est imperméable à la matiere électrique ; que lorsqu’on charge la bouteille, il sort autant de fluide électrique de sa surface extérieure, qu’il en entre par l’intérieure. Or il ne prouve nullement l’imperméabilité du verre à la matiere électrique, d’une maniere décisive, non plus que la seconde proposition : tous les faits qu’il allegue à ce sujet étant équivoques, & pouvant tout aussi-bien provenir d’autres causes. Enfin on ne voit pas comment dans son système il pourroit expliquer ce qui arrive dans l’expérience que j’ai rapportée, où deux personnes ayant tout à la fois les mains sur la bouteille, celle qui ne tire pas l’étincelle du conducteur, ne laisse pas de sentir une secousse, & même assez vive, dans la partie qui communique avec la bouteille : car dans la supposition de M. Franklin, n’y ayant aucun fluide qui la traversât, elle ne devroit ressentir aucun choc ; mais c’est ce qui est directement contraire à l’expérience. Quoi qu’il en soit, il faut rendre à cet habile physicien la justice de dire qu’il est le premier qui par un grand nombre d’expériences ingénieuses nous ait mis sur la voie de bien analyser ce qui se passe dans l’expérience du coup foudroyant ; & en cela on peut dire qu’il n’a pas rendu un petit service à l’électricité. En effet, parmi tous ses différens phénomenes, il n’en est point dont il soit plus essentiel d’avoir une connoissance exacte, que de celui-ci, au moins quant à la route qu’y tient le fluide électrique. J’exhorte tous les Physiciens à la chercher, & à tâcher de la reconnoître ; car comme on a crû qu’une expérience de cette nature devoit sûrement agir sur le corps humain, & qu’en conséquence on a crû en devoir faire l’application à différentes maladies, il est de la plus grande conséquence de savoir quelle route prend le fluide électrique ; s’il va de la bouteille à-travers la personne au conducteur, ou de celui-ci à travers la personne à la bouteille. Pour peu effectivement qu’on y fasse attention, on voit que si l’on n’a pas une connoissance exacte de cette route, on peut, en appliquant cette expérience au corps humain, donner lieu à des effets directement contraires à ceux que l’on se proposoit de produire.

Après avoir donné une idée de ce qui se passe dans l’expérience du coup foudroyant, & fait voir qu’elle n’est qu’une suite des différentes propriétés du verre, & des corps non électriques par eux-mêmes qu’on y employe, il ne sera pas difficile de satisfaire à plusieurs questions que l’on peut faire par rapport à cette expérience, & au procédé que l’on observe pour la faire. Ces questions nous paroissent pouvoir se réduire aux suivantes : 1°. si on peut substituer indifféremment toutes sortes de matieres à l’eau que l’on met dans la bouteille : 2°. si la grandeur ou la forme du vase n’y change rien : 3°. si l’on peut en augmenter la force, & comment : enfin si plusieurs personnes peuvent faire cette expérience tout à la fois comme une seule ; ou, ce qui revient au même, si le circuit, le cercle ou la chaîne des corps non électriques par eux-mêmes, qui font la communication du ventre de la bouteille avec le conducteur dont on tire l’étincelle, peut avoir telle étendue qu’on veut ; & si alors dans cette grande étendue l’effet est instantané.

On a vû qu’il n’étoit question dans cette expérience, que d’électriser le verre par communication. Toutes les substances capables de s’électriser de cette façon, & disposées sous une forme à toucher le verre en un grand nombre de points tout à la fois, y seront donc propres ; ainsi tous les métaux réduits en limaille ou en feuilles, le plomb en grains, le mercure, un corps animé, &c. y conviendront fort bien, & enfin toutes les matieres bien électrisables par communication. Il y a cependant une remarque assez intéressante à ce sujet, par rapport aux métaux : c’est que lorsqu’ils sont calcinés on ne peut plus les y employer ; quoique réduits en limaille, ils y servent très-bien : ainsi la céruse, le minium, & en général toutes les chaux de métaux, n’y conviennent pas, comme l’a observé M. Watson. Cela est d’autant plus singulier, que pour revivifier un métal de sa chaux, il ne faut, comme on sait, qu’ajoûter à celle-ci un peu de phlogistique. Or comme il y a toute apparence que c’est le phlogistique qui fait les corps originairement électriques, puisque nous voyons que la plûpart de ceux qui en contiennent beaucoup, sont dans ce cas, il sembleroit que cette addition devroit rendre le métal moins électrisable par communication, que sa chaux : ce qui cependant, comme on vient de le voir, est contraire à l’expérience. Nous avons dit en parlant des propriétés du verre, que lorsqu’on ôtoit le contact de l’air d’une de ses surfaces, c’étoit comme si on la touchoit par des corps électriques par communication. Donc, si au lieu d’eau dans la bouteille, on y substituoit le vuide, si cela se peut dire ; ou plûtôt si épuisant la bouteille d’air, on la scelloit hermétiquement, & qu’on électrisât bien son cou pendant qu’on la tiendroit par son ventre, on feroit avec cette bouteille ainsi préparée, l’expérience de Leyde, de même que si l’on y avoit mis de l’eau. Nous devons cette curieuse expérience à M. l’abbé Nolet. Enfin on la feroit encore, si au lieu de vuider la bouteille d’air, on l’emplissoit ou d’eau ou de limaille, &c. & qu’on la scellât hermétiquement, ainsi que je l’ai éprouvé. J’ai dit que les matieres substituées à l’eau dans cette expérience, devoient être des plus électrisables, & cela est ainsi ; car le bois & d’autres substances, qui d’ailleurs ne laissent pas de s’électriser beaucoup par communication, n’y sont pas propres.

Ayant montré que la bouteille ne produisoit le coup foudroyant que par la propriété qu’a le verre, lorsqu’il a été fortement électrisé, de donner de l’électricité par le côté qui en a reçu, & d’en pomper par celui qui en a donné, on voit par rapport à la seconde question, que la forme du vase ou celle sous laquelle vous employez le verre, n’y fait rien ; puisque cela ne peut apporter aucun changement à la propriété dont nous venons de parler : ainsi qu’il soit formé en bouteille, en cylindre, qu’il soit rond ou plat, &c. pourvû que les corps électrisables par communication qui touchent ses deux surfaces, laissent de chaque côté, comme nous l’avons dit, deux especes de rebords ou marges tout-autour pour empêcher l’électricité de passer d’une surface à l’autre le long de ces corps, on fera toûjours l’expérience de Leyde. En effet, on voit que le verre disposé en forme de carreau n’est, à le bien prendre, que la bouteille ou le vase développé & étendu. Cependant, quoique cette idée paroisse aujourd’hui fort simple, nous sommes en général si fort attachés à l’imitation, qu’il s’écoula près de deux ans depuis la premiere découverte de cette expérience jusqu’au tems où l’on pensa à la faire de cette maniere. Le docteur Bevis & M. Jallabert furent les premiers qui s’en aviserent ; mais il seroit difficile de décider lequel de ces deux savans a la date sur l’autre : car dans un mémoire que lut M. Watson à la société royale de Londres, le 21 Janv. (vieux style) 1748 ; il dit avoir tenté l’expérience de Leyde de cette maniere, sur ce que le docteur Bevis lui en avoit dit quelque tems auparavant ; & M. Jallabert nous en parle dans son livre imprimé en Mars 1748, en nous disant qu’il ne sache pas que personne l’ait tentée avant lui de cette façon. Il est plus que vraissemblable que ces deux habiles physiciens se sont rencontrés ; ce qui est arrivé déjà plusieurs fois, & qui arrivera apparemment encore souvent, si la même émulation à cultiver la Physique continue. Quoi qu’il en soit, il faut remarquer que le procédé du docteur Bevis differe en une circonstance essentielle de celui de M. Jallabert : celui-ci n’a fait son expérience qu’avec des glaces de miroir, dont l’étain alloit jusqu’au bord ; celui-là au contraire laisse de chaque côté du verre deux rebords ou marges, semblables à ceux dont j’ai déjà parlé, & qui rendent par-là son procédé plus sûr que celui de M. Jallabert.

Pour répondre à la troisieme question, nous dirons que si l’on suppose le globe ou les globes que l’on employe capables de fournir une assez grande quantité d’électricité, plus le vase ou plûtôt le morceau de verre dont vous vous servirez pour faire l’expérience sera grand, plus l’expérience sera forte, ou plus les effets en seront considérables. En voici la raison. On ne peut enlever au verre son électricité, comme nous l’avons fait voir, qu’en le touchant tout-à-la-fois dans un grand nombre de parties, parce qu’alors vous enlevez, & dans un instant, l’électricité de chacune de ses parties : il s’ensuit donc que plus il y aura de parties du verre qui seront électrisées en même tems, plus vous enleverez d’électricité tout-à-la-fois, & par conséquent plus vous aurez d’effet. Il résulte deux choses de cette considération, non-seulement qu’il faut que le verre soit grand, mais encore que le métal, &c. qui le couvre le touche dans le plus grand nombre de points possibles, en supposant toûjours qu’on reserve les marges dont nous avons parlé. C’est M. Watson qui a découvert le premier que quand on augmentoit ainsi la quantité des points de la surface du verre touchée par le corps électrisable par communication, on augmentoit la force de l’expérience. Par ce que nous venons de dire, on conçoit que si l’on enleve dans un instant l’électricité d’une surface de 12 pouces en quarré, on aura un effet beaucoup plus grand que si l’on enlevoit celle d’une surface de 6 pouces, quoiqu’il fût fort difficile de déterminer dans quel rapport. Cependant, selon l’expérience ordinaire, il paroît que l’effet ne suit pas ici la loi des surfaces ; car s’il la suivoit, il devroit être quadruple, & c’est ce qui ne paroît pas être : mais, comme nous venons de le dire, il est fort difficile de s’assûrer de ce qui en est. En effet, il faudroit pour cela être certain que la force du globe augmente comme la résistance du verre à s’électriser par communication, ce verre paroissant, comme nous l’avons dit, opposer dans cette opération une véritable résistance à l’action de l’électricité qui vient du globe. M. Watson a, je crois, poussé ces expériences plus loin que personne ; ayant fait faire des jarres ou vases cylindriques de verre de 16 pouces de haut & de 18 pouces de circonférence, & de 22 pouces de haut sur 41 de circonférence, qu’il faisoit argenter avec des feuilles depuis le haut jusque en-bas, à la reserve d’une marge au-haut d’un pouce. Selon ce physicien, lorsqu’on les déchargeoit d’un seul coup, les effets en étoient très-considérables ; mais il ne nous dit rien là-dessus qui nous montre dans quel rapport cette grande surface augmentoit la force. On augmentera encore la force du coup foudroyant, si l’on combine ensemble plusieurs bouteilles ou plusieurs carreaux, que l’on déchargera tout-à-la-fois, pourvû cependant que ces bouteilles ou ces carreaux ne soient pas tellement arrangés que l’un reçoive le fluide électrique qui sort de la surface non électrisée de l’autre ; car alors on auroit tout au plus l’effet ordinaire d’une seule bouteille. Enfin voici une circonstance qui est en quelque sorte étrangere, mais cependant qui peut beaucoup augmenter ou diminuer la force du coup foudroyant ; c’est que le corps électrisable par communication avec lequel vous tirez l’étincelle du conducteur pour décharger la bouteille, ne soit pas pointu, qu’au contraire il soit rond, & d’une certaine grosseur. On verra à l’article Électricité, que les étincelles augmentent de force jusqu’à un certain degré, à mesure que les corps dont on les tire, & qui les tire, ont plus de volume & plus de rondeur. Or il en est de même dans cette expérience ; car on peut décharger la bouteille la plus électrisée ou la plus chargée sans crainte, lorsqu’en la tenant d’une main au lieu de tirer de l’autre avec la jointure du doigt ou un corps obtus, l’étincelle du conducteur, on en approche une pointe de métal, cette pointe tirant successivement l’électricité de la bouteille, & par-là la déchargeant insensiblement.

Après avoir fait voir que d’après les propriétés connues des corps électriques & non électriques par eux-mêmes, on pouvoit satisfaire aux trois premieres questions que nous nous étions proposées, nous tâcherons de montrer de même par rapport à la quatrieme, &c. la plus intéressante sur l’étendue du circuit ou cercle faisant la communication de la surface extérieure de la bouteille avec le conducteur, que si cette étendue va beaucoup au-delà de ce que l’on pourroit croire d’abord, ce n’est encore qu’une suite de ces mêmes propriétés.

Nous avons dit qu’en même tems que l’on tire l’étincelle du conducteur, ou ce qui revient au même, du crochet de la bouteille, elle pompe le fluide électrique des corps qui la touchent, ces deux effets étant instantanés, ils doivent donc se faire sentir dans le même tems aux deux extrémités de la chaîne quelle que soit son étendue ; c’est-à-dire qu’en la supposant formée par plusieurs personnes se tenant toutes par la main, & dont la premiere tienne la bouteille, & la derniere tire l’étincelle, elles ressentiront l’une & l’autre une secousse en même tems, l’une dans la partie qui tient la bouteille, & l’autre dans celle qui tire l’étincelle, soit que le nombre des personnes entre deux soit grand ou petit. Or comme on a vû que lorsqu’une personne tire une étincelle en pressant legerement la main d’une autre, elles ressentent l’une & l’autre une douleur dans l’endroit où elles se touchent, produite par l’électricité qui passe de la premiere à la seconde, &c. lors donc que la derniere personne de la chaîne tire l’étincelle, dans l’instant même le fluide électrique qu’elle a acquis, passe dans la personne dont elle tient la main : il en est de même de celle-ci à la troisieme, jusqu’à celle qui tient la bouteille ; de même celle-ci tire du fluide électrique de celle qui la touche, celle-ci de la troisieme, &c. jusqu’à celle qui tire l’étincelle. Ce double effet doit donc se faire sentir dans un instant d’un bout à l’autre de la chaîne ; les personnes qui la composent doivent donc être toutes frappées, & en même tems quel que soit leur nombre. Ainsi l’on voit que par la nature des choses cet effet semble devoir se transmettre à des distances infinies, & instantanément tant que la continuité n’est pas interrompue.

M. l’abbé Nolet est le premier qui ait pensé à faire faire cette expérience à plusieurs personnes tout-à-la-fois ; dans sa nouveauté, il la fit, le Roi étant présent, dans la grande galerie de Versailles, avec 240 personnes auxquels se joignirent tous les seigneurs qui vinrent avec sa Majesté. Comme cette expérience est du genre des choses, ainsi que nous l’avons dit au commencement de cet article, dont on ne peut avoir d’idée qu’autant qu’on les éprouve soi-même, peu de tems après le Roi curieux de savoir ce qui en étoit par lui-même, vint dans le cabinet des médailles où étoient les instrumens de cet académicien, & là fit l’expérience plusieurs fois avec des personnes de sa cour. Quelque tems après M. le Monnier le medecin la fit dans le clos des Chartreux, en faisant partie d’un cercle formé par deux fils-de-fer chacun de 95 toises de long ; & il remarqua qu’elle étoit instantanée. M. Watson & quelques membres de la société royale de Londres, ont fait aussi des expériences très-curieuses à ce sujet, qui seroient trop longues à rapporter, mais par lesquelles il paroît que l’étendue du cercle électrique ayant quatre milles, l’expérience a encore parfaitement réussi, & s’est fait sentir instantanément dans tous les points de cette vaste étendue. Ce qu’il y a de plus singulier dans cette expérience, c’est que quoiqu’à dessein ils eussent interrompu la chaîne pendant l’espace de deux milles, ensorte que la commotion ne pouvoit se transmettre de l’observateur qui étoit à l’extrémité d’un fil-de-fer à un autre observateur qui en étoit éloigné de deux milles, que par le terrein, cela n’empêcha pas, comme nous venons de le dire, l’expérience de réussir. Enfin les expériences du même genre que fit en 1749 M. Jallabert, sont trop singulieres pour que je ne les rapporte pas ici. M. l’abbé Nolet en fait mention dans ses lettres, page 202. « J’avois établi (c’est M. Jallabert qui parle) une machine électrique dans une galerie située sur le Rhone, deux cents cinquante piés environ au-dessous de notre machine hydraulique : un matras destiné aux expériences de la commotion, fut suspendu à une barre de fer électrisée immédiatement par un globe de verre, & du culot de ce matras pendoit un fil-de-fer, qui plongeoit dans le Rhone de la profondeur de quelques lignes : des fils de fer attachés à la barre, & soûtenus par des cordons de soie, venoient aboutir auprès de quelques fontaines publiques. Le globe étant frotté, on tiroit de ces fils-de-fer, en approchant la main, des étincelles qui causoient la sensation d’une legere piquûre ; mais si quelqu’un communiquant d’une main à l’eau de quelqu’une des fontaines, présentoit l’autre au fil-de-fer qui y aboutissoit, il éprouvoit une forte commotion, &c. » Il est à remarquer que les eaux qu’éleve cette machine hydraulique, sont portées dans un réservoir à plus de mille quatre cents piés de cette machine, élevé de 131 piés sur le niveau du Rhone, & que de ce réservoir elles se distribuent dans les différens quartiers de la ville.

Nous avons considéré dans tout cet article l’expérience du coup foudroyant d’après la plûpart de ceux qui en ont écrit, sous un seul point de vûe, c’est-à-dire comme une expérience singuliere de l’électricité par laquelle on peut imprimer des secousses violentes à nos corps, secousses avec lesquelles on a déjà tué quelques petits oiseaux, & jusqu’à des poulets, si nous en croyons M. Franklin. Mais si nous l’avons fait, ce n’a été que pour nous conformer à l’usage reçu ; car cette maniere de l’envisager est trop particuliere, la commotion violente qu’elle nous fait éprouver n’étant qu’un cas particulier des effets qu’elle produit. En effet, on voit que dans cette expérience le fluide ou feu électrique étant emporté rapidement du crochet de la bouteille vers son ventre, ce feu peut par-là produire beaucoup d’autres effets. C’est aussi ce que nous a fait voir M. Franklin : cet habile physicien nous a montré qu’on pouvoit par son moyen percer des cartes, du papier, &c. enflammer de la poudre, & faire une espece de fusion froide des métaux. Voici comment on s’y prend à-peu-près pour faire ces expériences : ayez un grand carreau de verre doré des deux côtés, avec des marges d’un pouce ou plus, comme nous l’avons dit, jusqu’où la dorure ne s’étende pas : l’ayant posé horisontalement, on le fait communiquer par-dessous avec le conducteur, ensorte que ce soit sa surface inférieure qui reçoive l’électricité : ensuite on le charge bien, en mettant de tems en tems les mains sur la surface supérieure, pour faire communiquer cette surface avec le plancher : comme nous avons dit que cela étoit nécessaire lorsque le carreau est bien chargé, si l’on veut percer des cartes, par exemple, on les pose dessus, & prenant une espece de C de fer dont les deux bouts sont retournés en-dehors & forment des especes d’anneaux, on le met d’un bout sur ces cartes, & de l’autre on l’approche ; on tire une étincelle du conducteur, dans l’instant le fluide par l’extrème vîtesse avec laquelle il est emporté, les perce. Si l’on veut faire la fusion froide des métaux, ayant deux lames de verre d’une certaine épaisseur, de trois pouces de long ou environ, & d’un de large ; placez entre ces lames au milieu d’un bout à l’autre, une feuille de métal quelconque, comme d’or, de cuivre, &c. fort étroite, n’ayant guere qu’une ligne de largeur : ceci fait, serrez-les fortement l’une contre l’autre avec du cordonnet de soie ; plus elles seront serrées, mieux l’expérience réussira : posez-les ensuite au milieu du carreau de verre, & faites communiquer l’un des bouts de la feuille d’or (qui pour cet effet doit déborder par ses deux extrémités) avec la dorure du carreau, & l’autre avec quelque plaque ou morceau de métal, que vous mettrez sur un morceau de verre posé dessus l’ayant bien chargé, comme on vient de le dire : prenez ensuite le C de fer dont nous avons parlé ; & après l’avoir appliqué sur le morceau de métal, tirez une étincelle du conducteur : si vous desserrez le cordon, & que vous regardiez vos lames, vous y verrez dans différens endroits des taches rougeâtres, produites par l’or qui y a été comme comprimé dans l’explosion, ou dans l’instant que le carreau s’est déchargé. Ces taches sont parfaitement égales sur chacune de ces lames, ensorte que l’une est toûjours la contre-épreuve de l’autre, & si adhérentes que l’eau régale ni aucun mordant ne peut les enlever ; quelquefois le choc est si grand, lorsque l’électricité est très-forte, qu’elles se brisent en mille parties.

Après avoir parlé de l’expérience du coup foudroyant en général, en avoir fait voir les causes & montré les différens moyens de le varier, il ne me reste plus qu’à parler de son application à la Medecine.

Je souhaiterois bien pouvoir donner ici une longue liste des bons effets qu’elle a produits ; mais malheureusement je suis contraint d’avoüer qu’ils sont en très-petit nombre, au moins ceux qu’on peut légitimement attribuer à cette expérience. Je sai qu’on a fait beaucoup de tentatives ; je sai qu’on a vanté le succès de plusieurs, mais ces succès ne sont pas confirmés. Je n’ai pas été moi-même plus heureux ; tout ce que j’ai remarqué de plus constant, c’est que la commotion donnée avec une certaine violence occasionne des sueurs très-fortes aux personnes qui la reçoivent, soit par la crainte qu’elle leur cause, soit aussi par l’impression qu’elle fait sur tout leur corps. Cependant on ne doit pas se décourager ; souvent le peu de succès de nos tentatives ne vient que de la maniere dont nous les faisons : peut-être à la vérité que le tems & les expériences nous apprendront, que l’application de celle-ci au corps humain est inutile ; peut-être aussi qu’ils nous en feront découvrir d’heureuses applications auxquelles nous touchons, & dont cependant nous ne nous doutons pas. Voyez Electricité. (T)

Coup de crochet, en Bâtiment, est une petite cavité que les Maçons font avec le crochet, pour dégager les moulures du plâtre, & que l’on appelle grain d’orge dans les profils des corniches de pierre, ou moulures de menuiserie. Voyez Grain d’orge. (P)

Coup-d’œil (le), dans l’Art militaire, est selon M. le chevalier de Folard, l’art de connoître la nature & les différentes situations du pays, où l’on fait & où l’on veut porter la guerre ; les avantages & les desavantages des camps & des postes que l’on veut occuper, comme ceux qui peuvent être favorables ou desavantageux à l’ennemi.

Par la position de nos camps & par les conséquences que nous en tirons, nous jugeons sûrement des desseins présens, & de ceux que nous pouvons avoir par la suite. C’est uniquement par cette connoissance de tout le pays où l’on porte la guerre, qu’un grand capitaine peut prévoir les évenemens de toute une campagne, & s’en rendre pour ainsi dire le maître. Sans le coup-d’œil militaire, il est impossible qu’un général puisse éviter de tomber dans une infinité de fautes d’une certaine conséquence.

Philopœmen, un des plus illustres capitaines de la Grece, avoit un coup-d’œil admirable. Plutarque nous apprend la méthode dont il se servit pour voir de tout autres yeux que de ceux des autres, la conduite des armées.

« Il écoutoit volontiers, dit cet auteur dans la vie de ce grand capitaine, les discours & lisoit les traités des Philosophes, non tous, mais seulement ceux qui pouvoient l’aider à faire des progrès dans la vertu. Il aimoit sur-tout à lire les traités d’Evangelus, qu’on appelle les tactiques, c’est-à-dire l’art de ranger les troupes en bataille ; & les histoires de la vie d’Alexandre : car il pensoit qu’il falloit toûjours rapporter les paroles aux actions, & ne lire que pour apprendre à agir, à moins qu’on ne veuille lire seulement pour passer le tems, & pour se former à un babil infructueux & inutile. Quand il avoit lû les préceptes & les regles de Tactique, il ne faisoit nul cas d’en voir les démonstrations par des plans sur des planches ; mais il en faisoit l’application sur les lieux mêmes, & en pleine campagne : car dans les marches il observoit exactement la position des lieux hauts & des lieux bas, toutes les coupures & les irrégularités du terrein, & toutes les différentes formes de figure que les bataillons & escadrons sont obligés de subir à cause des ruisseaux, des ravins, & des défilés, qui les forcent de se resserrer ou de s’étendre ; & après avoir médité sur cela en lui-même, il en communiquoit avec ceux qui l’accompagnoient, &c. »

C’est un abregé des préceptes qui peuvent former un général au coup-d’œil. On peut voir dans le commentaire sur Polybe de M. le chevalier Folard, tom. I. pag. 262. le coup-d’œil réduit en principes & en méthode. C’est un chapitre des plus instructifs de ce commentaire, & un de ceux dont il paroît qu’un officier destiné à commander les armées peut tirer le plus d’utilité. (Q)

Coup perdu, (Art milit.) est un coup de canon tiré de maniere que la bouche du canon est élevée au-dessus de la ligne horisontale, & qu’il n’est pas pointé directement à un but. (Q)

Coup de partance, (Marine.) c’est un coup de canon que le commandant fait tirer sans être chargé à balle, pour avertir les passagers ou autres gens de l’équipage qui sont encore à terre, de se rendre à bord & que le navire va partir. (Z)

Coup de canon à l’eau, (Marine.) se dit des coups de canon qu’un vaisseau reçoit dans la partie qui en est enfoncée dans l’eau, c’est-à-dire au-dessous de sa ligne de flotaison.

Dans un combat, les calfats sont tous prêts avec des plaques de plomb, qu’on applique sur le trou pour boucher le plus promptement qu’il est possible les coups de canon à l’eau.

Coup de canon en bois, (Marine.) ce sont ceux que reçoit le vaisseau dans sa partie qui est hors de l’eau. (Z)

Coup de vent, (Marine.) se dit lorsque le vent se renforce assez pour obliger de serrer les voiles, & qu’il forme un gros tems ou un orage qui tourmente le vaisseau. (Z)

Coup de Mer, (Marine.) c’est lorsque la mer est grosse, & que la vague vient frapper avec violence contre le corps du vaisseau. On a vû des coups de mer assez forts pour enlever le gouvernail, briser les galeries, & mettre le navire en danger. (Z)

Coup de Gouvernail, (Marine.) donner un coup de gouvernail ; c’est pousser le gouvernail avec beaucoup de vîtesse à bas-bord ou à stribord. (Z)

* Coup, petits coups, (bas au métier.) parties de cette machine, à l’aide desquelles s’exécute une des principales manœuvres dans le travail. Cette manœuvre s’appelle former aux petits coups. Voyez l’article Bas au métier.

* Coup, (Brasserie.) c’est le nom que l’on donne à une des façons que reçoit le grain pour en tirer la bierre. Il y a le premier coup & le second. Voyez l’article Brasserie.

Coup, prendre coup, (Fauconnerie.) se dit de l’oiseau quand il heurte trop fortement contre la proie.

Coup fourré, (Escrime.) on appelle ainsi les estocades dont deux escrimeurs se frappent en même tems.

Coup de niveau, (Hydraulique.) se dit d’un alignement entier pris entre deux stations d’un nivellement. Voyez Niveller. (K)

Coup de hanche, (Manége.) mauvaise conformation du cou d’un cheval ; c’est un creux à la jonction du cou & du garrot. Voyez Garrot.

Coup de Corne. Voyez Corne.

Coup de Lance est un enfoncement comme une espece de gouttiere, qui va le long d’une partie du cou sur le côté. Quelques chevaux d’Espagne & quelques barbes naissent avec cette marque qui passe pour bonne. Voyez Barbe. (V)

Coup sec, (Jeu de billard.) Joüer coup sec, c’est frapper la bille avec la masse du billard, & la faire partir sans la suivre ni la conduire. Les billes faites du coup sec sont les seules qui se comptent.

Coup d’ajustement, est, au Mail, le dernier des coups que l’on doit joüer avec le mail, pour s’ajuster & envoyer la boule à portée d’être jettée à la passe avec la leve.

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Étymologie de « coup »

Picard, keu ; bourguig. cô ; saintong. cot ; provenç. colp, cop, colbe ; espagn. et portug. golpe ; ital. colpo ; bas-latin, colpus, dans la loi salique, de colapus, colaphus qui se trouve avec le sens général de coup ; du latin colaphus, coup de poing, soufflet.

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Du latin colaphus (« coup de poing, soufflet ») issu du grec κόλαφος, kólaphos (« coup sur la joue, soufflet ») et devenu *colpus en bas-latin. (Vers 1100) colp (La Chanson de Roland).
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Phonétique du mot « coup »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
coup ku

Fréquence d'apparition du mot « coup » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « coup »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « coup »

  • Etre totalement dans le coup et hors du coup, c'est ça un homme !
    Jean-Paul Sartre — La dernière Chance
  • A coup de langue écu d’oreille.
    Proverbe français
  • Le destin est une invention après coup.
    Jacques Folch-Ribas — Le Silence ou le parfait bonheur
  • Un coup de langue est pire qu'un coup de lance.
    Proverbe français
  • Le coup d'oeil est souvent trompeur, pas le coup de nez.
    Philippe Sollers — Passion fixe
  • En quelque manière qu'on se puisse mettre à l'abri des coups, fût-ce sous la peau d'un veau, je ne suis pas homme qui y reculasse.
    Michel Eyquem de Montaigne — Essais, I, 20
  • Au premier coup son, on ne prend la caille.
    Proverbe français
  • Un homme a reçu un coup de couteau ce mercredi 1er juillet à Verberie. La victime a été retrouvée en fin de matinée au niveau des étangs, au nord de la ville.
    Oise Hebdo — Verberie. Un homme gravement blessé après un coup de couteau - Oise Hebdo
  • La vieillesse porte coup à la mémoire.
    Etienne de Condillac — Logique
  • Un quinquagénaire a été appréhendé ce mardi 30 juin, vers midi, devant l'hôtel de ville de Castelnau-le-lez. Il venait d'asséner plusieurs coups d'un outil télescopique à un automobiliste avec lequel il avait eu un différend.
    midilibre.fr — Hérault : le différend entre automobilistes finit à coups de clé démonte roue - midilibre.fr
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Images d'illustration du mot « coup »

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Traductions du mot « coup »

Langue Traduction
Anglais hit
Espagnol carrera
Italien ictus
Allemand schlaganfall
Chinois 中风
Arabe سكتة دماغية
Portugais derrame
Russe инсульт
Japonais 脳卒中
Basque trazua
Corse colpu
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Synonymes de « coup »

Source : synonymes de coup sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « coup »

Combien de points fait le mot coup au Scrabble ?

Nombre de points du mot coup au scrabble : 8 points

Coup

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