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Adresse

Variantes Singulier Pluriel
Féminin adresse adresses

Définitions de « adresse »

Trésor de la Langue Française informatisé

ADRESSE1, subst. fém.

I.− Point d'acheminement ou indications sur le point d'acheminement d'un objet ou d'une personne.
A.− Phraséologie.(Dans certaines loc. figées ou arch.). Point d'acheminement d'un objet, d'un acte; destination, destinataire.
1. [Adresse est suivi du syntagme de + subst. ou accompagné d'un adj. poss.]
a) Arch. [En parlant d'un projectile, d'une parole, d'un écrit] Aller, arriver à son adresse. Atteindre sa destination :
1. − Mon cher Spilett, et vous, Pencroff, reprit Cyrus Smith, raisonnons froidement. Si les convicts étaient gîtés dans un endroit de l'île, si cet endroit nous était connu, et s'il ne s'agissait que de les en débusquer, je comprendrais une attaque directe. Mais n'y a-t-il pas lieu de craindre, au contraire, qu'ils ne soient assurés de tirer le premier coup de feu? − Eh, Monsieur Cyrus, s'écria Pencroff, une balle ne va pas toujours à son adresse! − Celle qui a frappé Harbert ne s'est pas égarée, Pencroff, répondit l'ingénieur. J. Verne, L'Île mystérieure,1874, p. 494.
b) (Être) à l'adresse de + n. du destinataire
[En parlant d'une lettre] Porter l'indication (écrite) du destinataire :
2. ... Léon Rolland brisa la volumineuse enveloppe que lui avait remise le comte. Elle renfermait deux lettres. L'une, dont la suscription était de la main de Jeanne, était à l'adresse de Cerise. L'autre, écrite par le comte, était pour Léon Rolland. P.-A. Ponson du Terrail, Rocambole,t. 2, Le Club des valets de cœur, 1859, p. 157.
Au fig. [En parlant d'un propos, ou de qq. autre moy. d'expr. : geste, mimique, etc.] Être destiné à (une pers.) :
3. Encore un mot. Vous êtes-vous douté que six lignes de parenthèse à l'adresse des puissants négateurs étaient pour vous? V. Hugo, Correspondance,1862, p. 398.
Rem. De + n. du destinataire peut être remplacé par un adj. poss. non réfl. : une lettre, des paroles, etc. à votre adresse, etc.
2. [Adresse est compl. verbal] Se tromper d'adresse. Se tromper de destination ou de destinataire.
[En parlant d'une pers. considérée dans un de ses actes] :
4. claudio. − Cela vous est (...) arrivé, puisque ma femme a enjoint à ses gens de vous fermer la porte au nez à la première occasion. octave. − Tes lunettes sont myopes, juge plein de grâce : tu te trompes d'adresse dans ton compliment. A. de Musset, Comédies et proverbes,Les Caprices de Marianne, 1834, II, 1, p. 153.
5. ... tu ne t'es pas regardée, ma pauvre fille. Tu seras ridicule. Au bout d'une heure, on te renverra avec un coup de pied dans le derrière. Mannequin? Tu t'es trompée d'adresse. Tu aurais dû t'engager comme épouvantail. J. Cocteau, Les Enfants terribles,1929, p. 101.
[En parlant d'un geste, des paroles, etc., d'une pers.] :
6. Un soir de voyage, au carrefour où les chemins de Delphes et de Daulie se croisent, il rencontre une escorte. Un cheval le bouscule; une dispute éclate; un domestique le menace; il riposte par un coup de bâton. Le coup se trompe d'adresse et assomme le maître. Ce vieillard mort est Laïus, roi de Thèbes. Et voici le parricide. J. Cocteau, La Machine infernale,1934, p. 25.
B.− Lang. cour. Indications permettant d'atteindre le point d'acheminement.
1. [Le point d'acheminement est le lieu où doivent être envoyés ou portés des obj. (colis, lettres, etc.) destinés à une pers.; plus rarement, où doit se rendre une pers. pour en rencontrer une autre]
a) [Le nom du destinataire connu est indiqué ou bien par un compl. de nom ou un adj. poss., ou bien par le suj. de la prop.] Indication du lieu où peut être atteinte cette personne :
7. Si vous croyez que mon adresse à Paris ne soit pas sûre, écrivez-moi sous celle de M. Gautier de Tournes à Genève. Il faut mettre sur l'adresse par la France ou par Ostende. Suivant les temps la route de France est plus courte; l'autre, je n'en sais rien. Vous savez qu'il faut affranchir. G. de Staël, Correspondance générale,lettres inédites à Louis de Narbonne, 1792, p. 20.
8. Mon adresse est changée. Je demeure maintenant rue de Mézières, no10 (faubourg Saint-Germain). V. Hugo, Correspondance,1821, p. 320.
9. Sir Williams donnait un faux nom et une fausse adresse dans l'unique but de dépister la police... P.-A. Ponson du Terrail, Rocambole,t. 1, L'Héritage mystérieux, 1859, p. 468.
10. ... que savaient-ils l'un de l'autre? Tout au plus une adresse, parce qu'elle figurait à l'annuaire. Encore Michon n'avait-il jamais vu la maison de M. Baslèvre et M. Baslèvre pouvait-il se demander si Michon logeait en garni ou en appartement. É. Estaunié, L'Ascension de Monsieur Baslèvre,1919, p. 22.
11. Cette image chérie se faisait toujours plus lointaine et insaisissable, se fondait là-bas à l'horizon, en une brume de sang, parmi la foule des victimes. Une seule carte de la Croix-rouge, et puis plus de nouvelles. Aucune adresse, aucun renseignement. Par voie officielle, par voie occulte, M. Feuillebois avait tenté d'entrer en relations avec son fils, il avait échoué. M. Van der Meersch, Invasion 14,1935, p. 216.
12. Tout abonnement téléphonique principal ordinaire donne droit à une inscription gratuite dans la liste alphabétique. Cette inscription comporte exclusivement : le nom suivi de l'initiale du prénom (...); la profession (...); l'adresse et le numéro d'appel. Annuaire officiel des abonnés au téléphone,1968, p. III.
Rem. Syntagmes fréq. : connaître l'adresse de qqn; donner son adresse; il a une nouvelle adresse; donner, laisser, savoir, trouver l'adresse de qqn; l'ancienne, la nouvelle adresse de qqn; c'est la bonne adresse; fausse adresse; partir sans laisser d'adresse.
P. méton. Le lieu lui-même. Se rendre, aller à l'adresse indiquée. Spéc. (comm., gastr., etc.).Avoir, connaître de bonnes adresses : des endroits où l'on achète, mange, s'amuse bien.
b) [Le nom du lieu est mentionné dans un compl. de nom accompagnant adresse] Indications précisant ce lieu. Donner l'adresse d'un lieu :
13. Un soir de l'été dernier, une lettre, écrite d'une grosse écriture, qui portait l'adresse d'un village lointain, avait appris à Louisa que son frère était mort, ... R. Rolland, Jean-Christophe,La Révolte, 1907, p. 537.
14. ... je me précipitai dans l'escalier, hors de la maison, dans le taxi. Je criai au chauffeur l'adresse de la rue Saint-Guillaume. Je tremblais que MmeOrtègue, revenue à elle, ne me suivît (...). Une fois arrivé à la clinique et tandis que je payais le chauffeur, je constatai que la rue Saint-Guillaume restait déserte. MmeOrtègue ne m'avait pas suivi, ... P. Bourget, Le Sens de la mort,1915, pp. 252-253.
15. ... quand il arriva, son père était déjà en bière. On remit seulement à Pascal une liasse de papiers et l'adresse de la chambre où avait habité Simon. C'était rue de Flandre, au sixième d'un petit hôtel. M. Van der Meersch, Invasion 14,1935, p. 441.
c) [Ni le lieu, ni la pers. ne sont encore mentionnés] Mention du nom d'une personne, suivie de l'indication du lieu où elle peut être atteinte. Écrire l'adresse sur une enveloppe :
16. Armand dormit sous le Pont-Neuf, (...). Ses rêves agités par la réalité toujours présente le firent retrouver le forgeron Avril qui faisait des adresses qui faisait des adresses sans fin, et toujours la même adresse. MmeSarah Bernhardt, villa Pain-Béni, aux îles-d'Or... L. Aragon, Les Beaux quartiers,1936, p. 388.
Rem. 1. Syntagmes fréq. : écrire, envoyer à l'adresse suivante, à l'adresse indiquée; carnet, livre d'adresses; adresse télégraphique (adresse réduite pour l'envoi des télégrammes). 2. Les indications d'une adresse portent au minimum un nom de lieu auprès d'un nom de pers.; l'adresse est d'ordin. complétée par des indications précisant le lieu (nom d'une résidence, rue et node la rue, localité voisine, département, pays, parfois l'itinéraire, cf. ex. 7) ou le nom (prénom(s), nom complémentaire, titres divers, etc.), le but étant d'éviter des erreurs d'acheminement, et de remise au destinataire par la multiplication des indications d'identité; certaines indications de politesse (titres honorifiques, etc.) ne font pas partie de l'adresse proprement dite, quoique pouvant figurer sur la suscription d'une lettre.
d) Par restriction
DIPLOM. [L'indication du lieu étant donnée avant ou après] Formule comportant les nom, titre et qualité du destinataire, employée en tête d'un acte rédigé en forme de lettre (d'apr. Lar. encyclop.).
Rem. Sous les emplois mentionnés sous 1 se devine une spécification du sens class. « renseignement (sur une affaire, une pers.) », qui survit dans l'expr. très vieillie bureau d'adresse « lieu, établissement où l'on s'adressait pour obtenir certains renseignements. Fig. et fam. C'est un vrai bureau d'adresse, se dit d'une maison (ou d'une pers., Ac. 1798-1878) où l'on débite ordinairement beaucoup de nouvelles. » (Ac. t. 1 1932) (cf. infra étymol.) :
17. Après son expédition du 17 mai à Port-Royal des Champs, l'archevêque fit dire à M. Arnauld qu'il voulût bien quitter pendant quelque temps son faubourg Saint-Jacques; que les assemblées qui s'y tenaient déplaisaient au roi; qu'on l'accusait d'être le bureau d'adresse de tous les ecclésiastiques mécontents. Ch.-A. Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 5, 1859, p. 136.
2. P. anal., INFORMAT. Partie d'une instruction, indiquant, sous forme numérique ou littérale, le fragment de mémoire d'ordinateur dans lequel ou à partir duquel un nombre doit être écrit ou lu au cours de l'exécution de cette instruction. (Le fragment de mémoire peut être une page, un mot, un demi-mot, un octet, un bit...) :
18. L'entier associé à un élément est appelé son adresse. Ainsi une adresse définit-elle un élément et un seul de la mémoire. La donnée de cette adresse permet l'accès direct à l'élément qu'elle désigne, grâce au système technologique d'adressage. J. Arsac, Les Systèmes de conduite des ordinateurs,Paris, Dunod, 1968, p. 27.
19. Chaque mot dans une mémoire à tores, à tambour ou à disques a une adresse et vous pouvez donner à l'ordinateur des instructions lui commandant de copier le contenu d'une certaine cellule dans le totalisateur, ou bien d'additionner le contenu d'une certaine cellule à celui du totalisateur, etc. T.-G. Scott, Ordinateurs électroniques, techniques de programmation,trad. par J. Charbonneau-Kohiyama, Paris, Gamma, 1968, p. 283 A.
Rem. Dans cet emploi technol., l'obj. à adresser est remplacé par un nombre; le destinataire est la machine assimilée à une pers. pensante.
II.− Vieilli. Déclaration formulée à l'intention d'un destinataire. En partic., dans le domaine de la pol.Déclaration le plus souvent écrite dans laquelle des particuliers, le plus souvent appartenant à un même groupe (corps constitués, villes, provinces, colonies, etc.), communiquent à une personne investie de tout ou partie du pouvoir (le plus souvent un chef d'État) ou à plusieurs personnes appartenant à un même corps politique (gén. représentatif, p. ex. l'Assemblée nationale), leur opinion ou leurs vœux concernant une affaire importante :
20. ... c'est en vain que la Garde nationale avignonoise a présenté à l'Assemblée nationale une adresse, où elle manifeste la résolution de combattre jusqu'à la mort pour la défense des frontières de l'Empire françois; ... M. de Robespierre, Discours,Sur la pétition du peuple avignonois, t. 6, 1790, p. 592.
21. L'adresse en réponse fut rédigée par MmeÉtienne et Guizot. Elle disait : « Sire, la charte consacre comme un droit l'intervention du pays dans la délibération des intérêts publics. Cette intervention fait du concours permanent des vues de votre gouvernement avec les vœux du peuple la condition indispensable de la marche régulière des affaires publiques. Sire, notre loyauté, notre dévouement, nous condamnent à vous dire que ce concours n'existe pas. » L'adresse fut votée à la majorité de deux cent vingt et une voix contre cent quatre-vingt-une. F.-R. de Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe,t. 3, 1848, p. 580.
22. Je vous serais obligé de bien vouloir inviter M. le commissaire de la République de la région de Lyon à faire connaître aux comités expéditeurs de l'« adresse » que j'ai noté avec intérêt leur vœu de voir définir clairement le rôle des comités départementaux de libération... Ch. de Gaulle, Mémoires de guerre,Le Salut, 1959, p. 319.
P. ext. (hors du domaine pol.), rare. Adresse au lecteur, à une personne illustre.
P. iron., néol. d'aut. Message sous forme de soufflet :
23. ... ce qui lui attira un jour sur chacune de ses joues un soufflet bien appliqué. Il s'en vengea en faisant bâtonner de nuit celui qui avait osé imprimer son adresse sur ses joues. Raban, M. Saint-Hilaire, Mémoires d'un forçat ou Vidocq dévoilé,t. 2, 1828-1829, p. 258.
Rem. 1. Syntagmes fréq. : rédiger, voter une adresse; envoyer, expédier, lire, présenter, prononcer, recevoir une adresse. 2. Le subst. désignant la pers. (ou le groupe) qui reçoit l'adresse peut être introd. par la prép. à et celui qui désigne la pers. (ou le groupe) qui l'envoie par la prép. de; le terme exprimant les sentiments, opinions ou vœux obj. de l'adresse peut déterminer directement le mot adresse et est alors introd. par la prép. de : adresse de félicitations, de protestation. 3. Sous la monarchie constitutionnelle, l'adresse (ou le projet d'adresse) était une réponse faite au discours du roi, d'où l'expr. adresse en réponse (au discours de la couronne ou du trône, ex. 20). Le décret du 31 janv. 1867 a remplacé l'adresse par le droit d'interpellation.

ADRESSE2, ADRESSÉE, subst. fém.

Région. Sentier, raccourci :
1. ... peu de paysans descendent l'avenue. Ils viennent par petits groupes, des bois, des terres, par les échaliers et les adresses, évitant les espaces découverts, qu'il faudrait parcourir sous le feu de tant de regards. La cour est pleine comme une place un jour de marché. R. Bazin, Le Blé qui lève,1907, p. 350.
2. Adresse (...), s. f. − Sentier, raccourci. Verr.-On.t. 11908, p. 16.
3. Adressée (...), s. f. − Même sens que Adresse. Elle permet de couper au plus court : « Passe-donc, par l'adressée. » − « Vous prendrez le routin, pour couper à l'adressée. » Verr.-On.t. 11908, p. 16.

ADRESSE3, subst. fém.

(Se rattache pour le sens à adroit).
I.− Qualité d'une personne (ou, p. méton., d'une partie du corps ou d'une entité abstraite) ou d'un animal parvenant aisément à atteindre un but ou à obtenir un résultat.
A.− [Le but visé est la réussite dans des actions nécessitant l'utilisation du corps et en partic. des mains] Synon. habileté, dextérité :
1. ... ce qu'ils [les prêtres orientaux] durent à la possession exclusive des facultés intellectuelles, les tyrans grossiers de nos faibles ancêtres l'obtinrent par leurs institutions et par leurs habitudes guerrières. Couverts d'armes impénétrables, ne combattant que sur des chevaux invulnérables, comme eux, ne pouvant acquérir la force et l'adresse nécessaires pour dresser et conduire leurs chevaux, pour supporter et manier leurs armes, que par un long et pénible apprentissage, ils pouvaient opprimer avec impunité, ... A. de Condorcet, Esquisse d'un tableau historique des progrès de l'esprit humain,1794, p. 97.
2. ... l'industrie se compose de la théorie, de l'application, de l'exécution. Ce n'est qu'autant qu'une nation excelle dans ces trois genres d'opérations, qu'elle est parfaitement industrieuse. Si elle est inhabile dans l'une ou dans l'autre, elle ne peut se procurer des produits qui sont tous les résultats de toutes les trois. (...). Les nègres de la côte d'Afrique ont beaucoup d'adresse : ils réussissent dans tous les exercices du corps et dans le travail des mains; mais ils paraissent peu capables des deux premières opérations de l'industrie. J.-B. Say, Traité d'économie politique,1832, p. 80.
3. Il osait jadis offrir sa poitrine à qui voulait y poser les doigts, le jeunet, et maintenant il la dérobait constamment à l'étreinte. Adroit, sans doute, il l'était devenu; mais l'adresse ne vaut pas la force, et l'on ne le verrait peut-être plus se planter au milieu de l'arène et, là, résister inflexible comme une barre de fer aux ceintureurs les plus hardis. L. Cladel, Ompdrailles,1879, pp. 199-200.
4. L'on chasse pour chasser. C'est le jeu des forts, la lutte de l'homme contre la bête, de l'adresse contre la brutalité. En dangers fertile, la chasse prépare à la guerre. Prouve qui peut son habileté, son courage, sa vigueur, son endurance. Œil sûr, pied agile, allure souple, soutenue, inlassable, sans s'essouffler, sans s'arrêter, sans haleter, il faut pouvoir courir longtemps après la bête que l'on a blessée. R. Maran, Batouala,1921, pp. 156-157.
5. Je connais un certain biologiste de salon qui réussit dans les congrès, dans les banquets et les palabres, mais qui n'est peut-être pas capable de faire un repiquage sans gâter ses cultures. − Je me permets de te dire, au vol, que rien n'est plus injuste qu'une insinuation telle : l'adresse de M. Chalgrin fait notre admiration, et, dans l'ordre technique, c'est l'homme le plus habile que j'aie rencontré jusqu'ici. Que cette question d'habileté ne te déroute point trop : un biologiste doit être ingénieux opérateur, à peine de tout gâter. On fait de la biologie avec son cerveau et avec ses mains. G. Duhamel, Chronique des Pasquier,Les Maîtres, 1937, pp. 187-188.
6. Pour l'augure, la droite et la gauche sont les sources d'où viennent le faste et le néfaste, comme pour moi ma main droite et ma main gauche sont l'incarnation de mon adresse et de ma maladresse. M. Merleau-Ponty, Phénoménologie de la perception,1945, p. 330.
Rem. 1. Adresse peut être suivi des prép. à ou dans, qui introduisent un n. de chose ou d'action (traduisant l'activité dans laquelle s'exerce l'adresse); la prép. à peut également introd. un inf. d'action. 2. Syntagmes fréq. : adresse manuelle; acquérir de l'adresse; essayer, exercer son adresse; exercice, jeu d'adresse. Le tour avec adresse est très fréq., notamment avec le verbe manier, avec éventuellement des déterminations intensives (merveilleux, remarquable, etc.). 3. Adresse s'emploie fréquemment en oppos. avec force, ou autres termes anton. (ex. 3 et infra ex. 7, 8); les 2 qualités peuvent aussi être présentées comme compl. (cf. les expr. force et adresse ou force ni adresse).
B.− [Le but visé est la réussite dans des actions nécessitant l'utilisation des fac. d'intelligence ou d'intuition, notamment dans l'action, la conduite des affaires hum., les relations soc., etc.]
1. [L'adresse est envisagée du point de vue de la pers. agissante dont elle manifeste les qualités] :
7. L'oppression et le mépris furent donc, et durent être généralement, le partage des femmes dans les sociétés naissantes. Cet état dura dans toute sa force jusqu'à ce que l'expérience d'une longue suite de siècles leur eût appris à substituer l'adresse à la force. Elles sentirent enfin que, puisqu'elles étaient plus faibles, leur unique ressource était de séduire; ... P.-A.-F. de Laclos, De l'Éducation des femmes,1803, p. 459.
8. Jusqu'à lui [Louis XI] le gouvernement n'avoit guère procédé que par la force, par les moyens matériels. La persuasion, l'adresse, le soin de manier les esprits, de les amener à ses vues, en un mot, la politique proprement dite, politique de mensonge et de fourberie sans doute, mais aussi de ménagement et de prudence, avaient tenu jusque là peu de place. Louis XI a substitué dans le gouvernement les moyens intellectuels aux moyens matériels, la ruse à la force, la politique italienne à la politique féodale. F. Guizot, Hist. générale de la civilisation en Europe,1828, p. 13.
9. ... mettez un individu gauche, maladroit, un individu dont le caractère est de n'en avoir point, absolument dénué de cette adresse si commune qui sait se frayer le chemin et se créer une existence; (...) il fera mieux de se retirer à l'écart que d'aller s'embarquer dans un monde où la fortune ne favorise que les audacieux, ... M. de Guérin, Correspondance,1829, pp. 29-30.
10. Les jeux d'adresse et de combinaison sont tolérés. Si l'on entend ici par jeux d'adresse et de combinaison ceux pour lesquels il faut employer l'adresse-ruse et certaines combinaisons-calculs qui aident à prévenir ou à corriger les chances. C. Moreau, Les Français peints par eux-mêmes,Les Détenus, t. 4, 1841, p. 85.
11. Dans la sphère des calculs spéculatifs, le banquier déploie (...) autant d'esprit, d'adresse, de finesse, de qualités qu'un habile diplomate dans celle des intérêts nationaux. H. de Balzac, Splendeurs et misères des courtisanes,1847, p. 236.
P. méton. [L'adresse est envisagée du point de vue d'une chose abstr. manifestant les qualités de celui qui l'a conçue] :
12. Les Grecs, disputeurs subtils, comme tous les esprits foibles, commencèrent ces controverses épineuses, qui durent encore, où l'on met l'adresse de la dialectique à la place de la force des raisons; ... L.-G.-A. de Bonald, Législation primitive,t. 1, 1802, p. 18.
Rem. Syntagmes fréq. : déployer beaucoup d'adresse, une grande adresse; avoir l'- de faire qqc., employer son - (mettre de l'-) à faire qqc.; un coup d'-, un tour d'-. Vieilli : avoir de l'esprit d'-.
2. [L'adresse est envisagée comme condition du but visé exprimé par le suj.] :
13. La poursuite de la richesse, des jouissances et des honneurs publics qui s'y attachent, développe le caractère, l'audace, l'adresse, la fourberie de l'homme qui la veut. É. Faure, L'Esprit des formes,1927, p. 24.
Rem. Syntagmes fréq. : demander, exiger de l'adresse.
En partic., dans le domaine des arts plast., musicaux ou littér. (en tant qu'ils mettent en œuvre des qualités d'intelligence et l'expérience artisanale du « métier ») :
14. Il faut beaucoup d'adresse et beaucoup d'attention pour parvenir à vaincre toutes les difficultés qui résultent d'un ensemble aussi nombreux [six chœurs], mais on vient à bout de tout par le travail et avec une organisation flexible. Cherubini, Cours de contrepoint et de fugue,1835, p. 61.
15. Quelque niais dira : M. Coppée nous montre, par un exemple charmant et déplorable, que l'habileté sans l'inspiration ne saurait s'élever à ces hauteurs où... (laissons-le finir sa phrase). On dirait plus justement : l'admirable chose que le « métier », le « sens artiste », la science des procédés du style, l'adresse à arranger les mots, l'art de la composition! (...). Il n'est guère de poète plus détaché de son œuvre, plus purement orfèvre que M. François Coppée : ... J. Lemaitre, Les Contemporains,1885, p. 91.
16. J'ai de la peine à m'habituer à ne voir dans l'art dramatique qu'un métier comme un autre. Ce n'est pourtant qu'un métier. Il ne s'agit pas de savoir si M. Berr est un homme de talent, mais si sa pièce est bien fabriquée. Elle ne l'est pas trop mal. Il y a de l'adresse, des mots d'esprit, des scènes qui n'ennuient pas. J. Renard, Journal,1904, p. 926.
Rem. 1. Syntagmes fréq. : (croquis) exécuté avec une grande adresse; (un peintre) sans adresse; adresse du pinceau. 2. Ces expr. ne sont dépréc. que si l'habileté manuelle l'emporte sur le talent ou l'inspiration proprement artistiques :
17. ... que dire du portrait de M. Grévy posé comme un manche à balai, sur le fond sombre et encore éclairé, d'en haut, sans doute, par un châssis qui laisse s'égoutter des lueurs bleuâtres sur le front, sur les mains brossées avec mille simagrées de retouches, avec mille préciosités de détails. C'est le portrait le plus illettré et la rubrique la plus absolue, c'est de l'adresse manuelle, du travail soigné de contre-maître, et voilà tout. J.-K. Huysmans, L'Art moderne,1883, p. 159.
II.− Gén., au plur. [Le but visé est le plus souvent la réussite dans des actions nécessitant l'utilisation des fac. intellectuelles] Moyen ou ensemble de moyens mis en œuvre par une personne pour atteindre un but. Synon. diplomatie, doigté, finesse, manœuvre, procédé, ruse :
18. ... la diplomatie byzantine n'avait pas voulu porter le coup de grâce aux Turcs, de peur d'accroître la puissance des Francs. Elle entendait fonder son hégémonie sur le maintien de l'équilibre entre les premiers et les seconds. Politique trop adroite, adresses qui allaient bientôt se retourner contre leurs auteurs. R. Grousset, L'Épopée des croisades,1939, p. 189.
En partic., dans le domaine des arts :
19. Lui, le spirituel croqueur, l'habile aquafortiste, le maître au cochon, affecte doctoralement de n'admirer, de n'estimer que les maîtres primitifs, de répudier toutes les habiletés, toutes les adresses, tous les procédés, tout ce dont est fait son petit, mais réel talent. E. et J. de Goncourt, Journal,juill. 1853, p. 112.
Rem. Adresse dans ces emplois est souvent dépréc. (ex. 18).
Prononc. : [adʀ εs]. Enq. : /adʀe2s/.
Étymol. ET HIST. I.− 1177-1179 « chemin de traverse [chemin droit] » (Chrét. de Troyes, Chevalier à la charrette, éd. M. Roques, 1501 : Une forest aprés le plaing truevent et vont par une adresce) [cf. fin xiies. : nule sente ne quierent ne nule adrece (nulla viae compendia captet), St Bernard, éd. Förster, 157, 33 ds T.-L.]. − Cotgr. 1611, d'où : 1. ca 1280 « bon chemin » emploi fig. (Escanor, éd. Michelant 3244 ds T.-L. : Il en fust si bien en l'adrece C'aillours aler n'en covenist) et p. ext. : 1370-71 « conseil, renseignement, information » (Froissart, Chron., I, 227, ms. Amiens, fol. 3 ds Gdf. : En yaux vous trouveres toutte adrece de bon conseil); 1630, fondation par Théophraste Renaudot du Bureau d'adresse et de rencontre qui publie en 1633 la Feuille... du Bureau d'adresse (d'apr. Hatin, Bibl. hist. de la presse périodique fr., 1866, pp. 17-18); 2. 2emoitié xves. « action de s'adresser à, d'avoir recours à qqn » (Olivier de La Marche, Mém., I, 460 ds Lacurne : le Seigneur de Crouy et les siens faisoient plus grande adrèce à Monsieur le Dauphin qu'il ne sembloit bon) empr. par l'angl. adress, voir infra II, et spécialisé comme terme de chancellerie 1690 « action d'adresser un acte diplomatique à un destinataire » (Fur. s.v. : l'adresse des Édits et des Déclarations est toujours aux Cours Souveraines), sens qualifié de vieilli par DG; 3. 1559 « habileté » [= art d'aller droit au but] (Amyot, Fab., 15 ds Littré : Quand ce vint à combattre à coups d'espée, où il n'est moins besoing d'adresse et d'art que de force); 4. 1690 « indications sur le lieu où se trouve un destinataire » (Fur. : Adresse, se dit aussi de la suscription des lettres ordinaires, qui marque le lieu, ou la personne, où on les veut faire tenir. Il a fait tenir ce paquet à son adresse). II.− 1. 1656 pol. « requête, vœu présenté au roi d'Angleterre (en réf. au cont. pol. angl.) » (Du Gard, Nouv. ord. de Londres, 1196 ds Mack. t. 1 1939, p. 75); 1687 « id. » (Miège ds Barbier ds Modern Language Notes, XVI, 139 : On appelle aussi addresse [en terme anglois] les requêtes par écrit que le parlement lorsqu'il est assemblé présente de tems en tems au roi et en general toutes ces soumissions formelles qu'une société fait au roi par des deputez en des occasions extraordinaires. Du tems des derniers parlemens, on appeloit addresses les instructions que les électeurs donnoient par ecrit aux membres qu'ils avoient eleus); 2. 1789 pol. « déclaration, généralement exprimée par écrit, présentée au roi (cont. révolutionnaire) » (Mirabeau, Discours et opinions, 1, p. 170, 10 mai ds Mack. t. 1 1939, p. 113 et M. Frey, Les Transformations du vocab. fr. à l'époque de la Révolution, 1925, p. 65 : Je demande qu'il soit fait à S. M. une très humble adresse pour lui exprimer l'attachement inviolable de ses fidèles); 1789 « pétition présentée au roi ou à un corps constitué (même cont.) » (Duvergier, Lois..., t. 1er, 2eéd., p. 67 : Les citoyens actifs ont le droit de se réunir... pour rédiger des adresses et pétitions, soit au corps municipal, soit aux administrations de département et de district, soit au corps législatif, soit au Roi...). I déverbal de adresser*; 3 a été, par étymol. seconde, rapproché de adroit* « habile ». II empr. à l'angl. address, attesté comme terme pol. au sens de « a discourse specially directed to anyone, a formal speech of congratulation, respect, thanks, petition... » (dans le cont. de la vie parlementaire angl.) seulement dep. 1751 (Chambers, Cyclopaedia ds NED : a discourse presented to the King in the name of a considerable body of his people); constitue une spécial. du sens « the act of addressing or betaking oneself to anyone » dep. 1611 (Cotgr. : acheminement, an addresse, introduction, entrie, ingression) empr. au fr. adresse « action d'avoir recours à qqn » dep. xves. (voir supra). 1 en référence au cont. pol. angl., 2 transposition au cont. pol. fr. − Brunot t. 9, p. 783; Nyrop, p. 340; Boulan 1934, p. 98; Bonn. 1920, p. 1.
STAT. − Fréq. abs. litt. : 3 647. Fréq. rel. litt. : xixes. : a) 6 169, b) 6 096; xxes. : a) 4 191, b) 4 458.
BBG. − Ac. Can.-Fr. 1968. − Bailly (R.) 1969 [1946]. − Bar 1960. − Barb. Infl. 1919, p. 7. − Baudhuin 1968. − Bél. 1957. − Bénac 1956. − Blanche 1857. − Boiss.8. . − Bonnaire 1835. − Bouillet 1859. − Bruant 1901. − Brun 1968. − Canada 1930. − Cap. 1936. − Comm. t. 1 1837. − Comte-Pern. 1963. − Daire 1759. − Dheilly 1964. − Dup. 1961. − Éd. 1913. − Électron. 1959. − Fér. 1768. − Gir. 1834. − Gramm. t. 1 1789. − Guilh. 1969. − Guizot 1864. − Jal 1848. − Kold. 1902. − Laborde 1872. − Lacr. 1963. − Laf. 1878. − Lar. comm. 1930. − Lav. Diffic. 1846. − Le Clère 1960. − Lep. 1948. − Le Roux 1752. − Pil. 1969. − Pissot 1803. − Pol. 1868. − Prév. 1755. − Sardou 1877. − Sommer 1882. − Spr. 1967. − Synon. 1818.

Wiktionnaire

Nom commun 2 - français

adresse \ad.ʁɛs\ féminin

  1. Caractéristique de ce qui est adroit.
    • Les syndicats peuvent être fort utilement employés à faire de la propagande électorale ; il faut, pour les utiliser avec fruit, une certaine adresse, mais les politi­ciens ne manquent pas de légèreté de main. — (Georges Sorel, Réflexions sur la violence, Chap.V, La grève générale politique, 1908, p.207)
  2. Façon ou manière adroite.
    • Bientôt le moment qu’il guettait arriva. La maison Puech et Lacamp râlait. Le jeune homme négocia alors son mariage avec une adresse prudente. Il fut accueilli, sinon comme un sauveur, du moins comme un expédient nécessaire et acceptable. — (Émile Zola, La Fortune des Rougon, G. Charpentier, Paris, 1871, ch. II ; réédition 1879, p. 63)
    • On ne peut avoir la prétention de défendre au vendeur d’engraisser son cheval, avant la vente, de la manière qui lui convient ; c’est une adresse ou une supercherie qui rend la marchandise attrayante ; […]. — (Gabriel Maury, Des ruses employées dans le commerce des solipèdes, Jules Pailhès, 1877)

Nom commun 1 - français

adresse \a.dʁɛs\ féminin

  1. Indication, désignation, soit du destinataire, soit de la destination où il faut aller ou envoyer.
    • […] elle se contenta de regarder les adresses, comme si à l’inspection de ces seules adresses sa mémoire lui rappelait ce que contenaient ces lettres ; […]. — (Alexandre Dumas, La Reine Margot, 1845, volume I, chapitre II)
    • Il plia la feuille, l’introduisit dans une enveloppe sur laquelle il gribouilla le nom et l’adresse de son ami. Il examina quelques secondes la suscription difficilement lisible […]. — (Valère Staraselski, Dans la folie d’une colère très juste, L’Harmattan, 1996, page 81)
    • Au moment où il s'assied au volant de sa vieille Peugeot garée près de l'Opéra, à Paris, une jeune femme s’engouffre sur la banquette arrière, donne une adresse à Neuilly, qui n'est pas la porte à côté ; il essaie de discuter. — (Carolyn Fitz, Bernard Le Grelle, Les hommes préfèrent les myopes, Paris : LPM (Les Presses du Management), 1999, chapitre 3)
  2. (Par métonymie) Lieu indiqué par une adresse.
    • Dans ces moments, on n’est plus chef mais chef d’entreprise. Je n’ai pas laissé de place à l’improvisation : le lendemain des annonces, je proposais une offre de street food. Ça a tellement bien marché que j’ouvrirai, début 2022, une nouvelle adresse à Paris consacrée à la cuisine de rue. — (Margherita Nasi, « Improviser en cuisine, c’est entrer en lévitation » : Pierre Gagnaire, Mory Sacko et Manon Fleury au Festival du Monde, Le Monde. Mis en ligne le 27 septembre 2021)
  3. Lettre ayant pour objet une demande, une adhésion, des félicitations, etc., présentées par un corps constitué, par une réunion de citoyens, à une autorité.
    • Son adresse aux électeurs, et le discours qu’il a prononcé après sa nomination, nous montrent en lui le défenseur du radicalisme le plus pur, le plus effrayant. — (Anonyme, Réélection d’O’Connell en Irlande, Revue des deux Mondes, 1829, tome 1)
    • […] il reçut un accueil enthousiaste. […]. De toutes parts les adresses les plus chaleureuses lui parvenaient. — (Alfred Barbou, Les Trois Républiques françaises, A. Duquesne, 1879)
  4. (Informatique) Code indiquant le lieu de stockage d'un fichier sur disque dur ou autre support, ou d'une donnée en mémoire vive.
  5. (Internet) Code indiquant le lieu de stockage d'une page web ou d'un ordinateur relié à internet (Adresse IP)).
    • Il faut absolument maîtriser le calcul d’un masque de sous-réseau, le nombre d’hôtes, les adresses des sous-réseaux ainsi que les adresses de broadcast. — (Djillali Seba, Cisco: interconnexion des réseaux à l’aide des routeurs et de commutateurs, Éditions ENI, 2003, page 198)
  6. (Figuré) Allusion, conseil, ou critique détournée qui vise quelqu’un qu’on ne nomme pas expressément, mais que l’auditeur désigne aussitôt.
    • Le trait alla juste à son adresse ; les deux jeunes dames n’y répondirent que par un sourire contraint, et tant soit peu dédaigneux. — (Julie de Quérangal, Philippe de Morvelle, Revue des Deux Mondes, tome 2, 4, 1833)
    • Quant à vous, bougonna-t-il à mon adresse, ne vous gênez pas pour moi, n’est-ce pas ? — (Francis Carco, Images cachées, Éditions Albin Michel, Paris, 1928)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

ADRESSE. n. f.
Indication, désignation, soit de la personne à qui il faut s'adresser, soit du lieu où il faut aller ou envoyer. Donner, indiquer une adresse pour faire tenir des lettres, pour faire remettre un paquet. Une bonne adresse. Une adresse sûre. Une fausse adresse. Je vous donnerai, je vous laisserai mon adresse. Mettre l'adresse sur une lettre. Cette adresse est indéchiffrable. Envoyer une lettre à son adresse. Livre d'adresses. Faire tenir des lettres à leur adresse, à leurs adresses, Envoyer des lettres à ceux à qui elles sont adressées. Fig. et fam., C'est à l'adresse d'un tel. Allusion, conseil ou critique détournée qui vise quelqu'un qu'on ne nomme pas expressément, mais que l'auditeur désigne aussitôt. Le trait arrivera à son adresse. Bureau d'adresse, ou d'adresses, Lieu, établissement où l'on s'adressait pour obtenir certains renseignements. Fig. et fam., C'est un vrai bureau d'adresse, se dit d'une Maison où l'on débite ordinairement beaucoup de nouvelles.

ADRESSE se dit aussi d'un Écrit ayant pour objet une demande, une adhésion, des félicitations, etc., présentées par un corps constitué, par une réunion de citoyens, soit au chef de l'État, soit à quelque autre autorité. Projet d'adresse. Adresse de félicitations. Adresse du Conseil municipal de telle ville. Rédiger, lire une adresse.

Littré (1872-1877)

ADRESSE (a-drè-s') s. f.
  • 1Indication de la personne à qui il faut s'adresser, de la maison, du lieu où il faut aller, envoyer. L'adresse d'une lettre. Une lettre à l'adresse de son père. J'en connais l'écriture, elle est de Bélisaire, Et le défaut d'adresse en marque le secret, Rotrou, Bélis. IV, 8. Elles avaient un billet d'adresse ; mais il n'en fut pas besoin ; le cocher…, Hamilton, Gramm. 10. Grégoire thaumaturge écrit une lettre au diable ; la lettre parvient à son adresse, Voltaire, Phil. II, 371. Je ne doute pas que ce grand pays [la Grande-Grèce], où tout est grec, ne me fournît aisément de quoi vous intéresser et rendre mes lettres dignes de leur adresse, Courier, Lettr. I, 149. On n'en trouverait aucun vestige [de Persépolis], si l'Araxe n'en donnait l'adresse, Vaugelas, Q. C. 309.

    Fig. et familier. Cela va à l'adresse, est à l'adresse d'un tel, c'est-à-dire ce trait malin est dirigé contre lui.

    Bureau d'adresse, établissement où l'on s'adresse pour obtenir des renseignements.

    Figurément, bureau d'adresse se dit d'une maison où l'on débite beaucoup de nouvelles, ou d'une personne qui aime à savoir et à répandre les nouvelles. Allant trouver celle-là, qui est un vrai bureau d'adresses, qui sait toutes les nouvelles, Bossuet, Sil. 3.

  • 2Écrit ayant pour objet une demande, une adhésion, une félicitation, etc., présenté par un corps constitué, par une réunion de citoyens. L'adresse de la chambre des pairs en réponse au discours de la couronne. La difficulté est qu'il n'y a point d'adresse aux évêques, Bossuet, Lettr. Quiét. 446. Richard Cromwell n'emporta [de Whitehall] que deux grandes malles remplies des adresses qu'on lui avait présentées pendant son petit règne, Chateaubriand, Stuarts, 289.
  • 3Habileté à s'y prendre soit dans les exercices du corps, soit dans les choses de l'intelligence. Son adresse à manier un fusil, un cheval. Un tour d'adresse. Persuadé qu'il fallait user d'adresse. Certes, ma sœur, le conte est fait avec adresse, Corneille, Pomp. I, 3. L'avis de Léonice est sans doute une adresse, Corneille, Rod. III, 2. … mais j'aurais tort d'instruire ton adresse, Corneille, Sert. II, 1. Toi, va par quelque adresse amuser sa visite, Corneille, Théod. III, 6. Et j'ai trouvé l'adresse, en lui faisant la cour, De relever mon sort sur les ailes d'amour, Corneille, Méd. I, 1. Enfin, j'ai vu le monde et j'en sais les finesses ; Il faudra que mon homme ait de grandes adresses, Si message ou poulet de sa part peut entrer, Molière, Éc. des F. IV, 5. Il s'est soustrait d'adresse, et pour un bel ouvrage, Rotrou, Antig. I, 2. Et puisse ton supplice à jamais effrayer Tous ceux qui, comme toi, par de lâches adresses, Des princes malheureux nourrissent les faiblesses, Racine, Phèd. IV, 6. Le ciel punit ma faute et confond votre adresse, Racine, Baj. II, 5. Vous savez sa coutume, et sous quelles tendresses Sa haine sait cacher ses trompeuses adresses, Racine, Mithr. I, 5. île éternellement mémorable par les conférences de deux grands ministres, où l'on vit développer toutes les adresses et tous les secrets d'une politique si différente…, Bossuet, Marie-Thérèse. Il avait eu l'adresse de sortir de prison, Fénelon, Tél. II. Les hommes sont fort pénétrants sur les petites adresses qu'on emploie pour se louer, Vauvenargues, Contre la vanité. Si les revenus dont on jouit ne sont pas assez amples, à quelles injustices a-t-on recours ? quelles voies prend-on, tantôt de violence ouverte, tantôt d'adresse et d'industrie pour enlever aux autres le pain qu'ils ont reçu de Dieu ? Bourdaloue, Pensées, t. II, p. 58. On ne peut plus toucher à ces matières sans avoir M. Newton devant les yeux, sans le répéter ou sans le suivre, et, si on veut le déguiser, quelle adresse pourra empêcher qu'il ne soit reconnu ? Fontenelle, Newton. Voilà jouer d'adresse et médire avec art, Boileau, Sat. IX.
  • 4Adresses de style, certaines tournures fines et délicates dans la manière d'écrire.

    En peinture, adresse de pinceau se dit d'une manière de peindre précise et spirituelle. Au plur. Adresses de pinceau, certaines touches qui expriment la forme avec précision et facilité.

HISTORIQUE

XVe s. Et crois bien que en eux vous trouverez toute adresse de bon conseil, Froissart, I, I, 12. Se partit de nuit, monté sur fleur de coursier, et esloigna les Escots ; car il savoit les adresses et les refuites du pays, pour ce qu'il en estoit, Froissart, I, I, 161. Et se faisoit fort d'eux mener sans peril, car il savoit toutes les adresses et torses voies, Froissart, I, I, 108. Et quand le jour fut venu, en quoi ils esperoient avoir aucun confort et aucune adresse pour eux et leurs chevaux aiser, pour manger et pour loger, Froissart, I, I, 38. Et de grant haste, pour plustot estre et venir à l'escarmouche, le dit Philippe prit une adresse parmi les champs et brocha coursier des esperons, Froissart, I, I, 298. Mais leur convenoit retourner à Rhodes, et de là prendre l'adresse du vent, Bouciq. II, 18.

XVIe s. Mais si peult on y arriver, qui en sçait l'addresse, par des routes ombrageuses…, Montaigne, I, 176. Nos conseils fourvoyent, parce qu'ils n'ont pas d'adresse et de but, Montaigne, II, 9. Estant donques Hannibal descendu en ce fond de sac, Fabius, qui cognoissoit le païs et sçavoit les adresses des chemins…, Amyot, Fab. 15. Quand ce vint à combattre à coups d'espée, où il n'est pas moins besoing d'adresse et d'art que de force, Amyot, Tim. 38. Il sembloit avoir une naturelle addresse à la lucte, Amyot, Phil. 4. Lesquels [philosophes] ont si bien discouru de tout ce qui apartient à toutes les parties de la vie civile, que, les preceptes divins exceptez, on ne pourroit trouver de meilleure adresse, Lanoue, 110. Le present lieu est une adresse generale pour guider ceux qui desirent estre aidez, Calvin, Inst. Epit. Sachant bien les adresses de la maison, Despériers, Contes, 56. Ceux qui connoissoient les adresses des chemins furent ceux qui eschapperent, Marguerite de Navarre, Préf. Estant convié à embrasser leur bon droit par l'adresse [requête] que lui avoit faicte M. Bouchart, Carloix, III, 17. Tu t'en vas droict en Avignon ; Vers Paris je prends mon adresse, Marot, II, 189. De tes sentes et adresses Veuilles moi estre enseigneur, Marot, IV, 266.

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Encyclopédie, 1re édition (1751)

* ADRESSE, souplesse, finesse, ruse, artifice, considérés comme synonymes.

Adresse, art de conduire ses entreprises de maniere à réussir. Souplesse, disposition à s’accommoder aux conjonctures. Finesse, façon d’agir secrete & cachée. Ruse, voie oblique d’aller à ses fins. Artifice, moyen injuste, recherché, & plein de combinaison, d’exécuter un dessein : les trois premiers se prennent souvent en bonne part ; les deux autres toûjours en mauvaise. L’adresse emploie les moyens ; la souplesse évite les obstacles ; la finesse s’insinue imperceptiblement ; la ruse trompe ; l’artifice surprend. Le Négociateur est adroit ; le Courtisan souple ; l’Espion rusé ; le flateur & le fourbe artificieux. Maniez les affaires difficiles avec adresse : usez de souplesse avec les Grands : soyez fin à la Cour : ne soyez rusé qu’en guerre : laissez l’artifice aux méchans.

Adresse, s. f. (Hist. mod.) expression singulierement usitée en Angleterre, où elle signifie Placet, Requête ou Remontrance présentée au Roi au nom d’un Corps, pour exprimer ou notifier ses sentimens de joie, de satisfaction, &c. dans quelqu’occasion extraordinaire. Ce mot est François : il est formé du verbe adresser, envoyer quelque chose à une personne.

On dit en Angleterre, l’adresse des Lords, l’adresse des Communes. Ces adresses commencerent à avoir lieu sous l’administration d’Olivier Comwell. A Paris, le lieu où s’impriment & se débitent les gazettes est appellé Bureau d’Adresse. (H)

Adresse, s. f. (Comm.) suscription qu’on met sur le dos d’une Lettre missive pour la faire tenir, ou par la poste ou autrement, à la personne à qui elle est adressée.

Cette adresse ou suscription doit contenir les noms, demeure & qualité de celui à qui elle doit être rendue, avec les noms de la Province, de la Ville & du lieu où l’on veut envoyer la Lettre.

Adresse se dit plus ordinairement dans le Commerce de ce qu’on écrit & met sur les balles, ballots, bannes, mannes & futailles remplies de marchandises qu’on envoie au loin par des voituriers. Ces adresses doivent contenir à peu près les mêmes choses que les suscriptions des Lettres. Il y a néanmoins des occasions où il faut ajoûter d’autres circonstances qui leur sont propres. V. Emballage & Emballeur.

Adresse est encore un terme qui a plusieurs autres significations dans le Commerce. On dit : mon adresse est à Lyon chez un tel, pour marquer que c’est là qu’on doit envoyer ce qu’on veut qui me soit rendu. J’ai accepté une Lettre de change payable à l’adresse de M. Nicolas ; ce qui sert comme d’élection de domicile pour le payement de cette Lettre, ou pour les poursuites que le porteur pourroit être obligé de faire, faute d’être acceptée ou payée. Cette Lettre de change est à l’adresse du sieur Simon, pour dire qu’elle est tirée sur lui.

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Étymologie de « adresse »

Voy. ADRESSER. Le sens propre de adresse est de mettre à droit, de là les sens divers : indication pour aller trouver quelqu'un ; dans l'ancien français, chemin qui mène où l'on veut aller ; puis manière d'aller à droit, c'est-à-dire dextérité. Bourguig. aidroisse ; picard, adrèche ; wallon, adièse. Dans le Berry, adresse signifie direction, et les adresses, comme au XVIe s. les êtres d'une maison.

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(Nom 1) : (Date à préciser) Déverbal de adresser (l’idée sous-jacente est « droit au but »).
(Nom 2) : (Date à préciser) De l’ancien français adrece, « bonne direction », avec influence de adroit.
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Phonétique du mot « adresse »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
adresse adrɛs

Fréquence d'apparition du mot « adresse » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « adresse »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « adresse »

  • Sans adresse on ne peut même pas attraper une puce.
    Proverbe russe
  • En amour, on gagne toujours de bonne guerre ce qu'on peut obtenir par adresse.
    Antoine Hamilton — Mémoires du chevalier de Grammont
  • L'artiste s'adresse à la sensibilité, non à l'intelligence.
    Henri Lichtenberger — Richard Wagner
  • L'honnêteté ici vaut bien mieux que l'adresse.
    Sophocle — Philoctète, 1246 (traduction Mazon)
  • Pour rentrer chez vous, une seule adresse, la vôtre !
    Francis Blanche
  • Papillon, ce billet doux plié cherche une adresse de fleur.
    Jules Renard
  • La liberté part toujours sans laisser d'adresse.
    Anonyme — L'archibras
  • Cette humeur protectrice, cette adresse à soigner, cette maternité délicate dans le geste - apanage des femmes.
    Colette — La Vagabonde
  • L’adresse n’est autre chose qu’une juste dispensation des forces que l’on a.
    Montesquieu — Grandeur et décadence des romains
  • Il est de l’adresse de gagner les esprits suivant le faible de leur opinion.
    Chevalier de Méré — Maximes, sentences et réflexions morales et politiques
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Images d'illustration du mot « adresse »

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Traductions du mot « adresse »

Langue Traduction
Anglais address
Espagnol dirección
Italien indirizzo
Allemand adresse
Portugais endereço
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Synonymes de « adresse »

Source : synonymes de adresse sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « adresse »

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Adresse

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