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Renier

Définitions de « renier »

Trésor de la Langue Française informatisé

RENIER, verbe trans.

A. − Déclarer ne plus croire en Dieu, en la divinité. Renier Dieu. Mais le jeune cœur de Lenore se révolte contre la douleur, et, dans son égarement, elle renie la providence. Au moment où le blasphème est prononcé, l'on sent dans l'histoire quelque chose de funeste (Staël, Allemagne, t. 2, 1810, p. 195).Pour un peuple qui a renié ses dieux, les témoignages du génie et de la piété des ancêtres sont des remords visibles dont la présence importune (Ménard, Rêve païen, 1876, p. 60).
P. anal. Soit, mon père, renions Satan, condamnons-le au néant; je ne tiens pas à son alliance, quoique l'air satanique soit assez de mode et qu'il ait inspiré à Sténio de fort beaux vers en mon honneur. Si le diable n'existe pas, me voici fort en paix sur mon avenir (Sand, Lélia, 1833, p. 66).
B. − Renier qqn.
1. Déclarer, contre toute vérité, que l'on ne connaît ou que l'on ne reconnaît pas quelqu'un. Vous m'aurez renié, vous Pierre, à trois reprises, Que le coq n'aura pas encor chanté trois fois (Hugo, Fin Satan, 1885, p. 854).Celui-ci, froussard autant que vaniteux, et reniant M. de Charlus aussi volontiers qu'il se parait de lui (Proust, Prisonn., 1922, p. 213).
Empl. pronom. réfl. Désavouer ses propres convictions, ses propres déclarations, son passé. Notre Lorraine, sous l'action des Allemands, ne se reniera pas. Mais quoi! elle subit (Barrès, Serv. All., 1905, p. 112).
2. Ne plus reconnaître comme sien. Renier son père, sa famille, ses amis. Silence devant Jean-Jacques! Cet homme, je l'admire. Il a renié ses enfants, soit; mais il a adopté le peuple (Hugo, Misér., t. 1, 1862, p. 791).Presque partout, les ecclésiastiques qui avaient prêté serment à la constitution civile, non reconnue par le pape, furent reniés par les fidèles (Bainville, Hist. Fr., t. 2, 1924, p. 48).
Empl. pronom. réciproque. Ne plus se reconnaître. Toutes les plaisanteries qui courent sur les États-Unis et la Grande-Bretagne (...) ont fini par nous faire oublier qu'elles sont mère et fille. La plus jeune renie l'aînée comme se renient deux générations, c'est-à-dire en vain (Morand, New-York, 1930, p. 109).
C. − Renier qqc.
1. Renoncer entièrement à une conviction, à une certitude, à une valeur. Synon. abandonner, abjurer.Renier sa foi, sa religion; renier un parti. On ne peut concevoir la raison universelle qu'avec la raison propre, ni croire à cette raison universelle en reniant sa raison (Maine de Biran, Journal, 1818, p. 184).La première idée de l'homme fut celle de l'amour qu'il trouvait en soi-même, en l'être, en la chose (...). Son malheur ne fut point de mordre au fruit de la vie, mais d'en renier, à la face de l'amour même, la connaissance sainte et le délice sacré (Milosz, Amour. init., 1910, p. 155).V. abjurer ex. 14 et apostasier ex. 4.
P. plaisant. Figure-toi, ma chère, que j'ai renié l'alexandrin une minute quand je t'ai lu. C'est extraordinaire, tes vers libres (Valéry, Corresp.[avec Gide], 1892, p. 151).
2. Ne plus reconnaître comme sien. Synon. désavouer.Renier ses engagements, ses promesses, sa signature; renier ses idées, ses opinions. L'huissier a bien le droit d'écrire son protêt Dans un hideux patois que l'univers renie (Banville, Cariat., 1842, p. 118).Ce n'est point que je renie une ligne de La Nation française a une âme: je demande seulement au lecteur de situer ces pages à l'époque (1943) où elles me furent dictées par la colère et par l'espérance (Mauriac, Cah. noir, 1944, p. 369).V. abjurer ex. 16.
Prononc. et Orth.: [ʀ ənje], (il) renie [ʀ əni]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. Fin ixes. « apostasier, abjurer sa religion » (Eulalie ds Henry Chrestomathie, p. 3, 6: Qu'elle Deo raneiet); spéc. renier Dieu « blasphémer », v. jarnidieu; 1534 renier « blasphémer » (Rabelais, Gargantua, éd. R. Calder, chap. 16, p. 108, 27). Du lat. pop. renegare « récuser » xes. ds CGL t. 5, p. 479A, 25, qui a dû prendre dans les milieux chrétiens le sens de « apostasier », également att. par l'ital. rinnegare, v. renégat, dér. de negare, nier*. Cf. en m. fr. la forme renaguer 1552 (Rabelais, Tiers livre, éd. M. A. Screech, chap. 36, p. 252, 128). Fréq. abs. littér.: 998. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 950, b) 943; xxes.: a) 1 942, b) 1 755.
DÉR. 1.
Reniable, adj.,vieilli. Qui peut être renié. Synon. niable.Il n'est guère usité que dans cette locution proverbiale: Tous vilains cas sont reniables, locution qui se dit lorsqu'un homme ayant commis quelque méfait considérable, la honte ou la crainte fait qu'il le nie (Littré).Tout mauvais cas est reniable (Mérimée, Lettres Panizzi, t. 2, 1864, p. 4).[ʀ ənjabl̥]. Att. ds Ac. 1694-1878. 1resattest. fin xvies. (P. de l'Estoile, Reg. journ. de Henri III, 157 ds Fonds Barbier: cas sont reniables), 1607 (Loysel, Institutes coutumieres, p. 803); de renier, suff. -able*.
2.
Renieur, -euse, subst.,rare. Personne qui renie, qui blasphème. [Thiers] a fondé l'école admirative de la terreur: appartenant à cette école, je serais bien embarrassé, car, si d'un côté ces renieurs et reniés de Dieu, étaient de si grands hommes, l'autorité de leur jugement doit peser; mais d'un autre côté ces hommes en se déchirant, déclarent que le parti qu'ils égorgent est un parti de coquins (Chateaubr., Mém., t. 4, 1848, p. 523). [ʀ ənjœ:ʀ], fém. [-ø:z]. Att. ds Ac. 1694-1878 (au masc.). 1reattest. déb. xives. reneor (Ovide moralisé, éd. C. de Boer, XIV, 5425); de renier, suff. -eur2*; cf. l'a. m. fr. renoüer « renégat » ca 1200 (Chevalier Cygne, 193 ds T.-L.: reneiers) − xves. [date ms.] Laurent, Somme, ms. Troyes, f o7 v o.
BBG.Quem. DDL t. 10.

Wiktionnaire

Verbe - français

renier \ʁə.nje\ transitif 1er groupe (voir la conjugaison)

  1. Déclarer, contre la vérité, que l’on ne connaît pas une personne, une chose.
    • Il renia son maître au moment du danger. Il le renierait cent fois encore pour étancher son ivrognerie. — (Paul Lafargue, Pie IX au Paradis - 1890)
  2. Désavouer une chose, s’en détacher, la nier.
    • Renier sa patrie, sa famille, son nom.
  3. Renoncer entièrement à une chose, n’y vouloir plus avoir de part.
    • Il a renié sa religion. Renier sa loi.
  4. (En particulier) Refuser de reconnaître quelqu’un pour ce qu’il est.
    • Renier quelqu’un pour son parent, pour son ami,
    • Renier ses parents.
    • Et comme Félicité prenait l’attitude d’une femme piquée, il ajouta à son oreille, en l’embrassant de nouveau :
      — Je tiens de toi, bien que tu m’aies renié. Trop d’intelligence nuirait en ce moment. Lorsque la crise arrivera, c’est toi qui devras conduire l’affaire.
      — (Émile Zola, La Fortune des Rougon, G. Charpentier, Paris, 1871, ch. III ; réédition 1879, p. 101)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

RENIER. v. tr.
Déclarer contre la vérité qu'on ne connaît point une personne, une chose. Saint Pierre renia JÉSUS-CHRIST, renia son maître par trois fois. Renier quelqu'un pour son parent, pour son ami, Refuser de le reconnaître pour tel. On dit dans le même sens : Renier ses parents.

RENIER signifie encore Désavouer une chose, s'en détacher, la nier. Renier sa patrie, sa famille, son nom. Il signifie aussi Renoncer entièrement à une chose, n'y vouloir plus avoir de part. Il a renié sa religion. Renier sa loi. Renier Dieu, Blasphémer. Être renié de Dieu et des hommes se dit d'un Homme universellement méprisé.

Littré (1872-1877)

RENIER (re-ni-é), je reniais, nous reniions, vous reniiez ; que je renie, que nous reniions, que vous reniiez v. a.
  • 1Déclarer qu'on ne connaît point une personne, une chose que l'on connaît effectivement. Le premier et le plus zélé de tous [Pierre] le renie trois fois [Jésus], Bossuet, Hist. II, 6. Ses larmes effacèrent le crime que sa bouche avait commis, en reniant son maître, Bourdaloue, Exhort. sur le ren. de St Pierre, t. I, p. 473.

    Absolument. Viens t'instruire par l'exemple d'un si grand apôtre [Pierre] : il présume, il s'engage, il renie, Bossuet, Méd. sur l'Évang. la Cène, 76e jour.

  • 2Renier quelqu'un pour son parent, pour son ami, refuser de le reconnaître pour tel.

    On dit dans le même sens : renier ses parents, ses amis. Il [Lamotte] exhortait Rousseau, qui reniait son père, à ne point rougir de sa naissance, Voltaire, Louis XIV, Écriv. Lamotte. Tu ne saurais marcher dans cet auguste lieu, Tu n'y peux faire un pas, sans y trouver ton Dieu ; Et tu n'y peux rester sans renier ton père, Ton honneur qui te parle, et ton Dieu qui t'éclaire, Voltaire, Zaïre, II, 3. M. l'abbé Rothelin, qui m'a un peu renié devant les hommes, Voltaire, Lett. Formont, 20 déc. 1738.

  • 3Désavouer, méconnaître une chose de fait. Renier sa patrie, sa famille.
  • 4Abandonner entièrement. Le peuple dit que les sorciers renient chrême et baptême. Il ne pouvait être tranquille, depuis qu'il avait eu le malheur de renier sa foi, Lesage, Diable boit. 15. Deux cents et un témoins les accusèrent [les templiers] de renier Jésus-Christ en entrant dans l'ordre, Voltaire, Mœurs, 66. Non, renier sa croyance, Non, renier son Dieu n'est pas en sa puissance, Delavigne, Une famille, 15.

    Absolument. Apostasier. Parmi les chrétiens établis en Orient, il y en a toujours quelqu'un qui renie.

  • 5Renier Dieu, et, absolument, renier, jurer le nom de Dieu. La Rancune, avec une froideur capable de faire renier un théatin, lui disait : Voilà un grand malheur, Scarron, Rom. com. I, 6.

HISTORIQUE

Xe s. Qu'elle Deo raneiet, chi maent [demeure] sus en ciel, Eulalie.

XIIe s. Sainz Pieres li apostles, que Deus tant honura, Que en ciel e en terre poesté li duna, Jesu Crist sun seigneur par treis feiz renia, Th. le mart. 107.

XIIIe s. Atant es vous un crestien renoiet venus au conte, qui bien savoit les passages et le pays, Chr. de Rains, 204. Car se tu le bien congneüsses, Onques ses homs esté n'eüsses… Ains croi que, sans point de demore, Son hommage li renoiasses, Ne jamès par amor n'amasses, la Rose, 4265. Voudriiez vous Dieu renoier, Celui que tant solez proier ? Rutebeuf, II, 82. De ce clos où il les avoient mis, les fesoient traire l'un après l'autre, et leur demandoient : te veulz-tu renoier ? Joinville, 242. Il me fist amener mes mariniers devant moy, et me dit que il estoient touz renoiés, Joinville, 241. Renoier soi n'est pas autre chose que refuser ses volentez, en tel maniere que cil qui estoit superbes deviegne humbles, Latini, Trésor, p. 460. Envers Hervé, le cuivert renoié, Du Cange, renegatus.

XVe s. Et aux plusieurs forts et grands pillards françois reniés, ils firent trancher les testes, ou pendre à un gibet, Froissart, III, IV, 1.

XVIe s. Le devin ne renia [nia] point le faict, Amyot, Alex. 117. Le roi, en reniant à sa mode, dist à son frere devant la roine qu'il falloit qu'un d'eux sortist le roiaume [sic], D'Aubigné, Hist. II, 106. Il regnioit Dieu, que s'ils y revenoient plus, qu'il les tailleroit en pieces, Carloix, V, 8.

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Encyclopédie, 1re édition (1751)

RENIER, v. act. (Gram.) c’est méconnoître, abjurer, renoncer. On renie Dieu. On renie la religion. On renie son pere. On renie sa dette.

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Étymologie de « renier »

Berry, regnier ; wallon, riney ; provenç. renegar, renejar, reneyar ; espagn. renegar ; ital. rinnegare ; de re, et lat. negare, nier.

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Du latin populaire *renegare (« renier »).
Synchroniquement, dérivé de nier, avec le préfixe re-.
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Phonétique du mot « renier »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
renier rǝnje

Fréquence d'apparition du mot « renier » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « renier »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « renier »

  • Télétravail et flexibilité, sans renier sur la sécurité !
    Global Security Mag Online — Télétravail et flexibilité, sans renier sur la sécurité ! - Global Security Mag Online
  • Il n’y a qu’un secret pour conserver le bonheur, c’est de le renier, c’est de le méconnaître ; il se plaît quelquefois à rester chez les ingrats.
    Jules Sandeau — La Croix de Berny
  • Pour rester digne il ne faut pas renier notre humanité.
    Philippe Di Folco — Evene.fr - Janvier 2006
  • Puisque vous renierez plus tard pourquoi ne pas renier tout de suite ?
    Boris Vian
  • Comment arrêter son regard sur la première à laquelle on a juré fidélité éternelle quand il y en a des milliers qui nous obligent à renier sans cesse nos premières paroles ?
    Serge Losique — De Z à A
  • Le droit d'un critique est de renier ses articles l'un après l'autre, et son devoir est de n'avoir aucune espèce de conviction.
    Jules Renard — Journal 1887-1892
  • « Le président de la République ne peut, aux termes de la Constitution, sa propre Constitution, briguer un troisième mandat présidentiel, le principe de la limitation le rendant inéligible », a conclu l’ancien ministre de la sécurité ( 2003-2005). Dès lors, au regard du silence que gardent les ministres Cissé Bacongo, Sansan Kambilé et Bruno Koné, une seule question est sur les lèvres des Ivoiriens. Ces trois hauts commis de l’État vont-ils renier leur parole pour appeler à leur tour, Ouattara à briguer un troisième mandat ?
    Afriksoir — Affaire 3eme mandat de Ouattara : Bacongo, Sansan Kambilé, Bruno Koné, allez-vous renier votre parole? - Afriksoir
  • Un artiste ne peut pas renier l’art, il ne le souhaite d’ailleurs pas. Un amoureux pourrait-il renier l’amour ?
    Raymond Chandler
  • Pour rester fidèle à un rêve, il faut toujours renier quelque chose ou quelqu'un, à commencer par soi.
    Jean-Marie Poirier — Le Prix du souvenir
  • À l'heure où des militants antiracistes sont prompts à faire tomber des statues liées à l'histoire coloniale française, Brigitte Macron préfère ne pas renier l'Histoire. Dans un entretien accordé à France Info, publié vendredi 10 juillet, la première dame de France s'exprime dans le sillage de son époux sur cette polémique mémorielle. « Le passé est là. Il ne faut surtout pas le réécrire ou le tuer comme on est en train de le faire avec les statues. Le passé, c'est constitutif de ce que nous sommes », argue-t-elle.
    Le Point — Statues déboulonnées : « Il ne faut pas tuer le passé », pour Brigitte Macron - Le Point
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Images d'illustration du mot « renier »

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Traductions du mot « renier »

Langue Traduction
Anglais deny
Espagnol negar
Italien negare
Allemand verweigern
Chinois 拒绝
Arabe أنكر
Portugais negar
Russe отрицать
Japonais 否定する
Basque ukatzeko
Corse nigà
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Synonymes de « renier »

Source : synonymes de renier sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « renier »

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Nombre de points du mot renier au scrabble : 6 points

Renier

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