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Abstraction

Variantes Singulier Pluriel
Féminin abstraction abstractions

Définitions de « abstraction »

Trésor de la Langue Française informatisé

ABSTRACTION, subst. fém.

I.− Opération intellectuelle, spontanée ou systématique, qui consiste à abstraire :
1. Ce caractère mystérieux, que je nomme l'âme de tout groupe d'humanité et qui varie avec chacun d'eux, on l'obtient en éliminant mille traits mesquins, où s'embarrasse le vulgaire. Et cette élimination, cette abstraction se font sans réflexion, mécaniquement, par la répétition des mêmes impressions dans un esprit soucieux de communier directement avec tous les aspects et toutes les époques d'une civilisation. M. Barrès, Un Homme libre,1889, p. 182.
2. Quelque horreur que tu aies de la généralité, quelque indignation que je t'aie causée tout à l'heure en disant que le voyage en chemin de fer aidait à discerner les caractères généraux d'un pays, il faut que tu reconnaisses que toute description concrète, sensuelle, précise, repose sur une abstraction et une généralisation préalables. Car, par exemple, si tu as pu si merveilleusement évoquer la Touraine avec : tuiles d'un rose passé, détours, allées, pressoir, goût de raisin, c'est parce que ces détails représentent chacun un caractère général auparavant extrait, symbolisent une qualité partout constatée la même. J. Rivière, Alain-Fournier, Correspondance,Lettre de J. R. à A.-F., sept. 1908, p. 32.
3. ... Renan est (...) un des philosophes qui ont le plus contribué à faire perdre à leur temps le sens de l'absolu et de l'universel. Métaphysicien, il méconnaît la valeur de l'abstraction, de l'idée, et abandonne la recherche des principes et des causes pour les conjectures d'une pseudo-science historique hasardeuse. Malgré tout son rationalisme, la raison lui est suspecte et la vérité qu'il poursuit n'est pas adéquate à l'objet que l'intelligence peut atteindre. H. Massis, Jugements,t. 1, 1923, p. 9.
4. L'abstraction en géométrie n'est autre chose qu'une convention. C'est par convention qu'une ligne est sans épaisseur ni largeur, qu'un cercle est parfait; de même c'est par convention que l'espace est homogène, ou que l'on peut déplacer une figure sans la déformer. R. Ruyer, Esquisse d'une philosophie de la structure,1930, p. 262.
5. C'est indépendamment de notre volonté que les idées en nous se forment et se développent. Pour elles s'établit une sorte de struggle for life de persistance de la plus apte, et certaines meurent d'épuisement. Les plus drues sont celles qui s'alimentent non point d'abstraction, mais de vie; ce sont celles aussi bien qui se laissent le plus malaisément formuler. A. Gide, Journal,1942, p. 114.
6. Abstraction. C'est une simplification, en présence de l'objet concret infiniment complexe et perpétuellement changeant, simplification qui nous est imposée, soit par les nécessités de l'action, soit par les exigences de l'entendement, et qui consiste à considérer un élément de l'objet comme isolé, alors que rien n'est isolable, et comme constant alors que rien n'est au repos. Alain, Définitions,[Les Arts et les dieux], Paris, Gallimard, 1961 [1951], p. 1028.
P. ext. Pouvoir, faculté d'abstraction; usage méthodique de ce pouvoir :
7. ... la perception, la rétention ou la contemplation et la mémoire, le discernement et la comparaison, la composition, l'abstraction, telles sont les facultés de l'entendement humain, car la volonté avec le plaisir et la douleur et les passions, que Locke donne pour des opérations de l'âme, forment un autre ordre de phénomènes. V. Cousin, Hist. de la philosophie du XVIIIesiècle,1829, p. 135.
8. Votre aimez-vous les uns les autres est une bêtise. − Eh bien, répondit Monseigneur Bienvenu sans disputer, si c'est une bêtise, l'âme doit s'y enfermer comme la perle dans l'huître. Il s'y enfermait donc, il y vivait, il s'en satisfaisait absolument, laissant de côté les questions prodigieuses qui attirent et qui épouvantent, les perspectives insondables de l'abstraction, les précipices de la métaphysique, toutes ces profondeurs convergentes, pour l'apôtre à Dieu, pour l'athée au néant : la destinée, le bien et le mal, la guerre de l'être contre l'être, la conscience de l'homme, le somnanbulisme pensif de l'animal, la transformation par la mort, ... V. Hugo, Les Misérables,t. 1, 1862, p. 76.
9. La conscience de l'homme, a-t-on dit, se distingue de celle de toutes les autres espèces animales par un pouvoir beaucoup plus grand de refléter des images de sentiments, de pensées, d'actes étrangers. Cela tient à un premier pouvoir, pouvoir d'abstraction qui a permis à l'homme de faire tenir en des signes extérieurs, formes sonores ou graphiques, dans les mots, des approximations des images qui se forment dans son cerveau. J. de Gaultier, Le Bovarysme,1902, p. 58.
Par restriction de sens, en insistant sur l'aspect négatif de l'abstraction (cf. ex. 1) :
Faire abstraction de qqc. Ne pas tenir compte de tel(s) élément(s) d'un ensemble, d'une situation, d'un obj., d'une pers., etc. :
10. Toutes les pêches n'ont pas exactement les mêmes couleurs, la même figure, la même grosseur, le même degré de maturité; elles diffèrent au moins par le lieu, par le temps où vous les voyez. Vous négligez ces différences, vous les écartez, ou, comme on dit, vous en faites abstraction; vous ne considérez ces dernières pêches que par ce qu'elles ont de commun avec la première que vous avez observée; vous prononcez que ce sont encore des pêches : et voilà que l'idée de pêche est devenue générale, et n'est plus composée que des caractères qui conviennent absolument à toutes les pêches. Cette opération s'appelle abstraire. A.-L.-C. Destutt de Tracy, Éléments d'idéologie,Idéologie proprement dite, 1801, p. 89.
11. La première fois que je vous vis, mes sens furent émus, et mon imagination s'alluma jusqu'au point de vous croire une perfection, je ne sais laquelle, mais enfin, imbu de cette idée, je fis abstraction de tout le reste, et ne vis en vous que cette seule chose. H. de Balzac, Correspondance,t. 1, 1822.
12. Faire abstraction de... : abstraction négative consistant à ne considérer ou à ne pas faire entrer en ligne de compte certains éléments de l'objet dont il est question. Foulq.-St-Jean, 1962, p. 4.
Faire abstraction de qqn, (et plus partic.) de soi. Ne pas tenir compte de soi dans la vie, dans l'activité intellectuelle, etc. :
13. Il m'en coûte horriblement d'oser, d'espérer, de vouloir, de m'engager. J'aime à faire abstraction de moi et à m'annuler, pour annuler ma responsabilité et ma faculté de souffrance. H.-F. Amiel, Journal intime,1866, p. 355.
14. « Mon ami, tout est là-dedans. Moi, je ne compte pas et je me moque de mon sort. Je m'efforce de m'oublier, de faire abstraction de moi. Je marche sur mon orgueil, sur ma dignité même. Et je lutte pour anéantir en moi cette grande soif d'aimer et d'être aimée, qui est l'instinct même de vie et de conservation de toutes les vraies femmes... » C. Farrère, L'Homme qui assassine,1907, p. 271.
15. Il n'y a pas d'enquête possible sur la nature de ce qui est métaphysiquement premier. Impossibilité liée à la fois à l'essence même d'une enquête, et à l'esprit dans lequel elle est forcément menée. L'enquêteur fait abstraction de soi; il s'efface devant le résultat obtenu. Qu'est-ce que le résultat? C'est une réponse valable pour n'importe qui. G. Marcel, Journal métaphysique,1922, p. 279.
II.− Résultat de l'action d'abstraire.
A.− [Au sing. ou au plur.] Idée ou représentation abstraite :
16. ... les métaphores ne sont pas moins nécessaires à la métaphysique que les abstractions. Ayez donc recours à l'abstraction, quand la métaphore vous manque, et à la métaphore, quand l'abstraction est en défaut. Saisissez l'évidence, et montrez-la comme vous pourrez : voilà tout l'art et toutes les règles. J. Joubert, Pensées,t. 1, 1824, p. 320.
17. ... [l']âme [mystique de Baudelaire], quand elle croyait, ne se contentait pas d'une foi dans une idée. Elle voyait Dieu. Il était pour elle, non pas un mot, non pas un symbole, non pas une abstraction, mais un être, en la compagnie duquel l'âme vivait comme nous vivons avec un père qui nous aime, qui nous connaît, qui nous comprend. P. Bourget, Essais de psychologie contemporaine,1883, p. 12.
18. En substituant progressivement aux expériences sensibles particulières des abstractions généralisées, on a permis le développement de l'intelligence humaine et son dépassement du stade animal. R. Huyghe, Dialogue avec le visible,1955, p. 58.
Rem. D'ext. d'emploi de ce dernier type dérivent les emplois du mot pour qualifier les arts dits abstraits. Cf. inf. II B.
PHILOS. [Surtout au plur.] Les universaux :
19. À la vérité, nous avons besoin du général et du particulier, de l'être humain et de l'individu. La réalité du général, des universaux, est indispensable à la construction de la science, car notre esprit ne se meut aisément que parmi les abstractions. Pour le savant moderne, comme pour Platon, les idées sont la seule réalité. Cette réalité abstraite nous donne la connaissance du concret. Le général nous fait saisir le particulier. Grâce aux abstractions créées par les sciences de l'être humain, l'individu peut être habillé de schémas commodes qui, sans être faits à sa mesure, s'appliquent cependant à lui et nous aident à le comprendre. A. Carrel, L'Homme, cet inconnu,1935, p. 283.
20. Les malades ne sont pas des entités. Nous observons des gens atteints de pneumonie, de syphilis, de diabète, de fièvre typhoïde, etc. Nous construisons ensuite dans notre esprit des universaux, des abstractions que nous appelons maladies. A. Carrel, L'Homme, cet inconnu,1935p. 297.
21. ... Cette conviction fit alors le succès de la philosophie nominaliste, qui dénonçait dans les idées générales, dans les abstractions, un artifice de la pensée; elle n'y voyait rien de plus consistant que les mots les désignant, un bruit de paroles, « flatus vocis ». R. Huygue, Dialogue avec le visible,1955, p. 134.
[Souvent avec un adj. épithète comme vide, vain, pur] Péj. Idée ou représentation de la réalité, à la limite sans correspondance avec l'obj. :
22. − Eh! donc, cher mandarin, la stupidité d'un peuple vous réjouit? − Fort, dit-il. − Nous ne sommes point de cet avis, lui dis-je, et nous aimons à sacrifier nos libertés individuelles à la liberté générale. − La liberté générale! répartit-il (il faillit rire) voilà un mot, une abstraction, un être insaisissable, un filament de la bonne vierge qui traverse les airs! Pououh! A. de Musset, Le Temps,1831, p. 90.
23. Toutes les beautés contiennent, comme tous les phénomènes possibles, quelque chose d'éternel et quelque chose de transitoire, − d'absolu et de particulier. La beauté absolue et éternelle n'existe pas, ou plutôt elle n'est qu'une abstraction écrémée à la surface générale des beautés diverses. L'élément particulier de chaque beauté vient des passions, et comme nous avons nos passions particulières, nous avons notre beauté. Ch. Baudelaire, Salon de 1846,1846, p. 195.
24. ... Pourquoi donc le monde entier est-il ainsi soulevé contre vous? Tous les autres docteurs ensemble ne me donnent pas autant de souci que vous. prospero C'est qu'ils travaillent sur des abstractions vides, et moi, je travaille sur des réalités. Je n'étudie que des faits, et j'en tire des manipulations, des pratiques, et c'est ainsi que j'ai pu ajouter un ordre d'opérations à celles de l'antiquité. La nature ne distille pas; moi, je distille. D'autres feront bien plus après moi. E. Renan, Drames philosophiques,L'Eau de jouvence, 1888, V, 3, p. 506.
25. Que serions-nous donc sans le secours de ce qui n'existe pas? Peu de chose, et nos esprits bien inoccupés languiraient si les fables, les méprises, les abstractions, les croyances et les monstres, les hypothèses et les prétendus problèmes de la métaphysique ne peuplaient d'êtres et d'images sans objets nos profondeurs et nos ténèbres naturelles. P. Valéry, Variété 2,1929, p. 235.
26. Car cet amour ou cette tendresse que les mois de peste avaient réduits à l'abstraction, Rambert attendait dans un tremblement, de les confronter avec l'être de chair qui en avait été le support. A. Camus, La Peste,1947, p. 1460.
B.− [Au sing.] Ensemble de ce qui est abstrait; caractère de ce qui est abstrait, notamment dans les arts (cf. abstrait) :
27. On aurait tort de vouloir ainsi distinguer entre Stravinsky et Schonberg deux tendances exclusives, l'une qui irait vers la concrétisation, l'autre vers l'abstraction de la musique. Il faut aussitôt compléter ce que nous venons d'avancer par l'aspect opposé. Le monde de Stravinsky se préoccupe en effet d'abstraction, tandis que celui de Schonberg, de gré ou de force, pose, ou tout au moins suppose un contexte concret. P. Schaeffer, À la recherche d'une musique concrète,1952, p. 129.
28. Et quand tu crois que je sacrifie (...) la vie à une abstraction, c'est au contraire l'abstraction que je subordonne à la réalité, ... A. France, Monsieur Bergeret à Paris,1901, p. 255.
29. Quelle prodigieuse précipitation de notre littérature vers l'artificiel! Je voudrais voir les lecteurs du Progrès civique et M. Clément Vautel devant le monologue d'Émilie qui ouvre la pièce : Impatients désirs d'une illustre vengeance Dont la mort de mon père a formé la naissance, Enfants impétueux de mon ressentiment, Que ma douleur séduite embrasse aveuglément... L'abstraction, la préciosité, la soufflure, l'antiréalisme (pour ne point dire : le factice) ne sauraient être poussés plus loin. A. Gide, Voyage au Congo,1927, p. 820.
30. Abstraction : le premier esthéticien qui ait systématiquement appliqué ce concept à l'étude de l'art est sans doute, en 1908, Worringer, bien que dans Abstraktion und Einfühlung le mot ne désigne encore qu'une tendance de l'art ou plutôt une attitude de l'artiste, celle qui consiste à tenir la nature à distance, en la maîtrisant par des signes, au lieu de se laisser investir et maîtriser par elle. M. Dufrenne, Art abstrait,Paris, Encyclopaedia Universalis, t. 1, 1968, p. 45.
31. Dès 1911, Vassili Kandinski fonde le groupe du Cavalier bleu (Der Blaue Reiter) et publie Du Spirituel dans l'art, où il énonce les principes de l'expressionnisme allemand, applicables à la peinture, à la musique et au drame qu'il suivit dans ses aquarelles abstraites, les premières du genre... En Russie également, à partir de 1907, divers groupes de jeunes artistes se détournèrent du naturalisme. Ils étudièrent l'art français et les icônes russes, qui les intéressaient par leur tendance à l'abstraction... Leur principale tendance allait vers la pure abstraction mathématique, l'« expression de la non-objectivité ». Hist. du développement culturel et scientifique de l'humanité, Paris, R. Laffont, t. 6, 1968, p. 1166-1167.
Rem. Dans l'ex. 28, abstraction relève successivement de A et de B.
III.− [En parlant d'une pers.] État d'un homme ou d'un mode de vie isolé de l'environnement.
A.− [Au sing.] Vieilli, péj. ,,État d'un homme qui s'éloigne de la société de nos semblables et se plonge dans une solitude absolue.`` (Besch. 1845); état de rêverie prolongée et plus ou moins pathologique :
32. L'espèce d'abstraction où vivait Gilliatt s'augmentait de la matérialité même de ses occupations. La réalité à haute dose effare. Le labeur corporel avec ses détails sans nombre n'ôtait rien à la stupeur de se trouver là et de faire ce qu'il faisait. Ordinairement la lassitude matérielle est un fil qui tire à terre; mais la singularité même de la besogne entreprise par Gilliatt le maintenait dans une sorte de région idéale et crépusculaire. V. Hugo, Les Travailleurs de la mer,1866, p. 274.
33. Le voilà de nouveau dans ses abstractions. Littré.
34. Il traînait ses vieilles pantoufles avec un petit bruit régulier et agaçant, s'enfonçait dans l'ombre, revenait vers la lumière, les mains derrière le dos, la tête basse, les yeux à terre, murmurant, s'exclamant, agitant la tête, inconscient de ceux qui l'entouraient. Il calculait, supputait. Douze séances à cent francs et la guérison était au bout peut-être. Ce bromure, ces médicaments, ça ne valait pas les séances de massage électrique. À moins que les deux traitements ensemble... Un mieux en trois séances. Un mieux! Voir un peu, sortir du néant! Il en éprouvait un choc dans la poitrine, de penser à ces choses. Il s'arrêta, affirma tout haut, dans son abstraction : − Il me faut ces douze séances... Une espèce d'écho nasillard lui avait répondu. Il retomba dans la réalité, se rendit compte que le petit Georges était en train de se moquer de lui. M. Van der Meersch, L'Invasion 14,1935, p. 213.
[Au plur.] Vieilli. ,,Absences d'esprit : avoir des abstractions.`` (Besch. 1845).
B.− Néol. État d'un homme ou d'un mode de vie isolé, réellement ou par la pensée, de son entourage :
35. ... regarder la coupole semble un moment devoir devenir l'expression pour peindre l'abstraction d'un académicien d'une séance de l'Académie, la dissimulation de ses sensations, de ses impressions, quand un ennemi parle. E. et J. de Goncourt, Journal,1887, p. 661.
36. 8 heures du matin. Je suis seul sous ma tente. Le camp, dans un repli de la grande plaine de Toulouse. Après la pluie de cette nuit, vent violent dans les peupliers et sur les toiles tendues. L'isolement, l'abstraction soudaine de cette vie me satisfait. J. Rivière, Alain-Fournier, Correspondance,Lettre de A.-F. à J. R., juill. 1909, p. 145.
37. Tout être humain est un obstacle pour qui tend à Dieu. Les mouvements que Dieu me fait la grâce de mettre en moi, je ne puis les percevoir que dans une abstraction complète. Comme ceux qui écoutent la musique les yeux fermés. Ce qu'il me faudrait, ce sont des journées vides, si vides.... Tout ce qui y entrerait, et l'amitié même, et l'affection surtout, n'y entrerait que pour les troubler. H. de Montherlant, Le Maître de Santiago,1947, II, 1, p. 623.
Rem. Quelques syntagmes de la lang. philos. : abstraction simple, - constructive, - empirique (ou simple), - simplifiante, - réfléchissante (ou constructive), - réfléchissante de l'expérience logicomathématique, - et conscience, - à partir des coordinations internes (héréditaires), - opération inverse de la multiplication logique, - et symbolisme, - des qualités, - propre aux formes successives (historiques et psychogénétiques) de la causalité (relevées par A.-M. Battro 1966, p. 1-3).
Prononc. ET ORTH. − 1. Forme phon. : [ab̭stʀaksjɔ ̃]. Enq. : /apstʀaksiõ/. 2. Hist. − Dès son entrée dans la lang. au xiiies., forme graph. mod. (cf. étymol. 1). Au xives. (1370, cf. étymol. 2), la graph. sav. du suff. lat. -tio est concurrencée par la forme reflétant la prononc. -cion (pour ce phénomène, du xiiies. à la fin du xives., cf. aussi -tion). A partir du xvies., abstraction l'emporte (cf. étymol. et hist.). − Rem. Labstraction (Hug.), phénomène d'agglutination* fréquent en m. fr. (cf. Bourg.-Bourc. 1967, § 184).
Étymol. − Corresp. rom. : prov. abstraccio; ital. astrazione; esp. abstracción; cat. abstracció; port. abstracção. 1. xiiies. « action d'extraire (un corps étranger d'une blessure) » terme de chir. (Brun de Long Borc, Cyrurgie, ms. de Salis, fol. 25 a ds Gdf. : et puis recommenceras l'abstraction de la saiete); 2. 1370 « opération de l'esprit qui consiste à isoler un élément d'un tout pour y concentrer son observation » terme philos. (Oresme, Éthiques d'Aristote éd. Menut, VI, 10, p. 347 : la cause est pour ce que les choses de mathématiques sont cogneües par abstraccion, ymaginacion et phantaisie; mais des autres sciences ... aucuns principes sont sceus par experience); 3. 1510-12 « action d'enlever (une femme) » (Lemaire de Belges, Illustr. II, 15 ds Hug. : Achilles tenant a grand injure l'abstraction de sa concubine Briseis). Empr. au b. lat. abstractio dep. ives. au sens 3 (Dictyos cretensis, Ephem. belli. Troiani 1, 4 ds TLL s.v. : abstractio conjugis [i. raptus]); dep. 447 comme terme méd. (Cassius Felix, De medicina, 36 ibid. : ne abstractione violenti emeatus emorroidis sequatur); terme philos. dep. Boèce au sens de « opération de l'esprit qui consiste à isoler un élément d'un tout pour y concentrer son observation » (Analytic. poster. Aristotelis versio lat., 1, 4 ibid. : quae ex abstractione dicuntur, est per inductionem nota facere; cf. Albert le Grand, Comment. in Dionys. Areopagitae « De caelesti hierarchia », 12, 1 ds Mittellat. W. s.v., 60, 65 : secundum philosphi probationem... in rebus non sunt nisi tres gradus abstractionis et concretionis, scilicet coniuncta materiae secundum esse et secundum rationem, ut naturalia, separata secundum rationem tantum, ut mathematicalia, et separata per esse et rationem, ut metaphysicalia). HIST. − Ainsi que pour abstraire (cf. hist. s.v.), disparition rapide du sens I phys. et développement de 3 sens fig., intellectuels. I.− Le sens premier et sa disparition. − « Action d'extraire », n'apparaît dès les orig. que dans les emplois partic. : A.− « action d'extraire » (un corps étranger d'une blessure), xiiies. cf. étymol. 1. B.− « action d'enlever » (une femme), xvies., cf. étymol. 3 et aussi : Taking away by violence − rapt, abstraction. (Palsgrave, Esclairc., 1531, p. 279 ds Gdf.). Il s'agit sans doute d'un latinisme. C.− « action de s'isoler du monde, solitude », xvies. : En abstraction demeure tristesse. (Lef. d'Étaples, Bible, Ecclés. 38 ds DG). D.− abstraction « opération chymique » (cf. Encyclop. t. 1 1751, III, table 1). II.− Hist. des sens fig. attestés apr. 1789. − A.− Sém. sens I « opération mentale » (cf. déf. d'Alain ds sém. ex. 6). Grande stab. de ce sens dep. ses orig. (1370, cf. étymol. 2) : Séparation qui se fait par le moien de l'esprit. (Rich. 1680). Détachement qui se fait par la pensée de tous les accidents ou circonstances qui peuvent accompagner un être, pour le considérer mieux en lui-même. (Fur. 1690). − Rem. 1. Trév. 1771 distingue, d'apr. l'Abbé Girard, abstraction/précision : La précision a plus de rapport [tout en les considérant à part] aux choses (...) qu'on peut (...) concevoir être l'une sans l'autre (...), l'abstraction regarde plus particulièrement les choses qu'on ne sauroit concevoir être l'une sans l'autre. 2. Faire abstraction de (cf. sém. I par restriction), ext. à de nombreux domaines du sens I. Permanence de cette tournure apparue au xviies. : a) xviies. : En faisant abstraction de tout sens. (Pascal, Provinciales, 1656, I. ds Littré). b) xviiies. : De quelque manière que l'on considère cette République, abstraction faite de sa grandeur. (J.-J. Rousseau, Contrat social, IV, 1762, 3 ds Littré). La synon. de cette loc. et du verbe abstraire, sans doute due à des raisons d'euphonie (cf. abstraire, hist. II, rem.), est dénoncée tardivement par Littré, qui s'efforce de distinguer les 2 termes : Faire abstraction, c'est ne pas tenir compte de. Abstraire, c'est exécuter l'opération intellectuelle par laquelle on isole, dans un objet, un caractère. B.− Sém. sens II « résultat de l'action d'abstraire ». Apparaît au xviies. et subsiste : xviies. : [Il] est dans des abstractions continuelles. (Ac. 1694). xviiies. : L'étendue est l'abstraction de l'étendu. (Leibniz, Nouv. essais, II, 13 ds DG). xixes. : Humanité, raison, vertu, savoir, blancheur (...) sont des abstractions. (Ac. 1835). xxes. : grande vitalité (cf. sém.). − Rem. 1. Au xixes., synon. très vague universaux/ abstractions (cf. sém. II A philos.). 2. Sém. sens II A péj., nuance péj., vivante dès le xviies. : Pour les abstractions, j'aime le platonisme. (Molière, Les Femmes sav., III, 2 ds DG). Grande vitalité aux xixeet xxes. (cf. sém.). C.− Sém. sens III « état mental » (cf. sém. III A). Ac. 1694 est le 1eret le seul à le mentionner jusqu'en 1752, où il est aussi relevé par Trév. : on dit aussi qu'Un homme est dans des abstractions continuelles, pour dire qu'Il resve continuellement, qu'il est appliqué à toute autre chose, qu'à celles dont on parle. (Ac. 1694). Ce sens est alors voisin de « distraction ». − Rem. Cet ex. de l'Ac. 1694 montre bien par son ambivalence la filiation du sens II au sens III (au sens II les abstractions sont dissociées de l'esprit qui les produit; au sens III cette dissociation n'est plus faite). Ce sens se nuance diversement à l'époque mod., au point qu'il faut se demander s'il n'y a pas plutôt recréation que continuité (cf. sém.).
STAT. − Fréq. abs. litt. : 1 384. Fréq. rel. litt. : xixes. : a) 1 813, b) 1 579; xxes. : a) 1 519, b) 2 578.
BBG. − Battro 1966. − Bouillet 1859. − Dagn. 1965. − Foulq.-St-Jean 1962. − Franck 1875. − Goblot 1920. − Gramm. t. 1 1789. − Lafon 1963. − Lal. 1968. − Littré-Robin 1865. − Miq. 1967. − Moor 1966. − Ros.-Ioud. 1955. − Théol. cath. Table 1929.

Wiktionnaire

Nom commun - ancien français

abstraction \Prononciation ?\ féminin

  1. Extraction.
  2. Action de détourner, d’enlever, de ravir.

Nom commun - français

abstraction \ap.stʁak.sjɔ̃\ féminin

  1. Opération par laquelle l’esprit abstrait, sépare, isole certains caractères des choses, ou de leur type.
    • Pour bien juger les hommes il faut ne considérer que leur mérite et faire abstraction de leur fortune.
    • Abstraction faite du style, qui est faible, cet ouvrage a un réel mérite.
    • L’embastillement sanitaire et épidémiologique peut pour autant nuire davantage que l’emmurement volontaire de l’abstraction créative ? Peut-il conduire à un esseulement frisant la déréliction ? — (Cornéliu Tocan, Aux confins de l'invisible. Haïkus d'intérieur illustrés, Créatique, Québec, 2020, pages 7-8)
    • Il y a des dossiers qui sont prioritaires et qui doivent avancer et on doit faire abstraction, selon moi, de l’aspect personnel», a affirmé Marc Parent. — (Gilles Turmel, Député accusé d’agression sexuelle: le malaise Harold LeBel, Le Journal de Québec, 17 décembre 2020)
  2. Idée générale, type ou propriété, qualité séparée par l’esprit du sujet à laquelle elle est unie.
    • Humanité, raison, vertu, savoir, blancheur, pesanteur, etc., sont des abstractions.
    • Dans toute abstraction il reste un peu de réalité, comme dans le vide artificiel il reste toujours un peu d’ air. — (Frédéric Ozanam, Essai sur la philosophie de Dante)
  3. (Péjoratif) Idée trop métaphysique ; théorie générale qui ne s’appuie pas suffisamment sur les faits.
    • Si c'est de la sorte que Kaulbach entend le réalisme, nous aimons encore mieux les abstractions les plus nuageuses ou les imitations les plus archaïquement byzantines. — (Théophile Gautier, L'Art moderne, Paris, Michel Lévy frères, 1856, page 272)
    • L'erreur provient de ce que Kautsky est bien plus un idéologue qu'un disciple de Marx ; il aime à raisonner sur des abstractions et croit avoir fait avancer une question lorsqu'il est parvenu à grouper des mots ayant une allure scientifique ; la réalité sous-jacente l'intéresse moins que le décor scolastique. — (Georges Sorel, Réflexions sur la violence, Chap.VII, La morale des producteurs, 1908, page 346)
    • L’abstraction devient la puissance de réflexion, l’inaction une capacité à formuler les problèmes, l’inadaptation une polyvalence, l’indécision la certitude de l'incertain, la rhétorique un agir communicationnel, la complication la conscience de la complexité et l’achiffrisme s'évanouit dans l'usage commune d'une règle de trois appliquée à une langue des affaires qu'on apprend comme n'importe quelle langue. — (Alain Etchegoyen, Le capital-lettres : des littéraires pour l'entreprise, éd. François Bourrin, 1990)
  4. (Au pluriel) Préoccupation, rêverie qui empêche un homme de penser aux choses dont on lui parle ou qu’il a sous les yeux.
    • Cet homme est dans des abstractions continuelles.
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

ABSTRACTION. n. f.
Action d'abstraire, de séparer, opération par laquelle l'esprit isole des choses qui sont unies. Pour bien juger les hommes il faut ne considérer que leur mérite et faire abstraction de leur fortune. Abstraction faite du style, qui est faible, cet ouvrage a un réel mérite. Il se dit aussi des Idées générales, des propriétés, des qualités séparées par l'esprit des sujets auxquels elles sont unies. Humanité, raison, vertu, savoir, blancheur, pesanteur, etc., sont des abstractions. Il se dit dans un sens défavorable des Idées trop métaphysiques, des théories générales qui ne s'appuient pas suffisamment sur les faits. C'est un esprit chimérique qui se perd dans les abstractions. Il signifie encore, au pluriel, Préoccupation, rêverie qui empêche un homme de penser aux choses dont on lui parle ou qu'il a sous les yeux. Cet homme est dans des abstractions continuelles.

Littré (1872-1877)

ABSTRACTION (ab-stra-ksion ; en poésie, de quatre syllabes) s. f.
  • 1Action d'abstraire, opération intellectuelle par laquelle, dans un objet, on isole un caractère pour ne considérer que ce caractère ; résultat de cette action. Sans l'abstraction, l'esprit humain ne pourrait conduire aucun raisonnement un peu compliqué. L'abstraction ne crée pas des êtres et n'est qu'un artifice logique. Le pouvoir d'abstraction. Par une abstraction puissante, il a saisi ce qu'il y avait de plus général dans son sujet. La blancheur considérée en soi est une abstraction, puisqu'il y a dans la nature, non la blancheur, mais des choses blanches. Il faut bien se garder de prendre des abstractions pour des réalités. Un point géométrique est une supposition, une abstraction de l'esprit, Voltaire, Memm. XI. On est souvent forcé de s'écarter, pour l'intérêt public, de la rigoureuse pureté d'une abstraction philosophique, Mirabeau, Collection, t. III, p. 323. Dans ces diverses cosmogonies, on est placé entre des contes d'enfants et des abstractions de philosophe, Chateaubriand, Gén. I, III, 1.
  • 2Faire abstraction de, écarter, ne pas faire entrer en compte. Faire abstraction des inconvénients. Abstraction faite des hommes et du temps. Il faut estimer le mérite pour lui-même et faire abstraction de la fortune. En faisant abstraction de tout sens, Pascal, Prov. I. De quelque manière que l'on considère cette république, abstraction faite de sa grandeur, Rousseau, Contr. IV, 3.
  • 3 Au plur. Dans un sens défavorable, idées trop métaphysiques, mal soutenues par les faits. C'est un esprit chimérique qui se perd dans les abstractions.
  • 4 Au plur. Rêverie, préoccupation. Le voilà de nouveau dans ses abstractions.

SYNONYME

FAIRE ABSTRACTION, ABSTRAIRE. Faire abstraction, c'est ne pas tenir compte de. Abstraire, c'est exécuter l'opération intellectuelle par laquelle on isole, dans un objet, un caractère. On abstrait pour généraliser ; on fait abstraction de, quand on n'a pas égard à ceci ou à cela.

HISTORIQUE

XIVe s. À ce peut l'en respondre : la cause est pour ce que les choses de mathematiques sont cogneues par abstration, imagination et phantasie, Oresme, Eth. 181.

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Encyclopédie, 1re édition (1751)

ABSTRACTION, s. f. ce mot vient du latin abstrahere, arracher, tirer de, détacher.

L’abstraction est une opération de l’esprit, par laquelle, à l’occasion des impressions sensibles des objets extérieurs, ou à l’occasion de quelque affection intérieure, nous nous formons par réflexion un concept singulier, que nous détachons de tout ce qui peut nous avoir donné lieu de le former ; nous le regardons à part comme s’il y avoit quelque objet réel qui répondit à ce concept indépendemment de notre maniere de penser ; & parce que nous ne pouvons faire connoître aux autres hommes nos pensées autrement que par la parole, cette nécessité & l’usage où nous sommes de donner des noms aux objets réels, nous ont portés à en donner aussi aux concepts métaphysiques dont nous parlons ; & ces noms n’ont pas peu contribué à nous faire distinguer ces concepts : par exemple.

Le sentiment uniforme que tous les objets blancs excitent en nous, nous a fait donner le même nom qualificatif à chacun de ces objets. Nous disons de chacun d’eux en particulier qu’il est blanc ; ensuite pour marquer le point selon lequel tous ces objets se ressemblent, nous avons inventé le mot blancheur. Or il y a en effet des objets tels que nous appellons blancs ; mais il n’y a point hors de nous un être qui soit la blancheur.

Ainsi blancheur n’est qu’un terme abstrait : c’est le produit de notre réflexion à l’occasion des uniformités des impressions particulieres que divers objets blancs ont faites en nous ; c’est le point auquel nous rapportons toutes ces impressions différentes par leur cause particuliere, & uniformes par leur espece.

Il y a des objets dont l’aspect nous affecte de maniere que nous les appellons beaux ; ensuite considérant à part cette maniere d’affecter, séparée de tout objet, de toute autre maniere, nous l’appellons la beauté.

Il y a des corps particuliers ; ils sont étendus, ils sont figurés, ils sont divisibles, & ont encore bien d’autres propriétés : il est arrivé que notre esprit les a considérés, tantôt seulement en tant qu’étendus, tantôt comme figurés, ou bien comme divisibles, ne s’arrêtant à chaque fois qu’à une seule de ces considérations ; ce qui est faire abstraction de toutes les autres propriétés. Ensuite nous avons observé que tous les corps conviennent entre-eux en tant qu’ils sont étendus, ou en tant qu’ils sont figurés, ou bien en tant que divisibles. Or pour marquer ces divers points de convenance ou de réunion, nous nous sommes formés le concept d’étendue, ou celui de figure, ou celui de divisibilité : mais il n’y a point d’être physique qui soit l’étendue, ou la figure, ou la divisibilité, & qui ne soit que cela.

Vous pouvez disposer à votre gré de chaque corps particulier qui est en votre puissance : mais êtes-vous ainsi le maître de l’étendue, de la figure, ou de la divisibilité ? L’animal en général est-il de quelque pays, & peut-il se transporter d’un lieu en un autre ?

Chaque abstraction particuliere exclud la considération de toute autre propriété. Si vous considérez le corps en tant que figuré, il est évident que vous ne le regardez pas comme lumineux, ni comme vivant, vous ne lui ôtez rien : ainsi il seroit ridicule de conclurre de votre abstraction, que ce corps que votre esprit ne regarde que comme figuré, ne puisse pas être en même tems en lui-même étendu, lumineux, vivant, &c.

Les concepts abstraits sont donc comme le point auquel nous rapportons les différentes impressions ou réflexions particulieres qui sont de même espece, & duquel nous écartons tout ce qui n’est pas cela précisément.

Tel est l’homme : il est un être vivant, capable de sentir, de penser, de juger, de raisonner, de vouloir, de distinguer chaque acte singulier de chacune de ces facultés, & de faire ainsi des abstractions.

Nous dirons, en parlant de l’Article, que n’y ayant en ce monde que des êtres réels, il n’a pas été possible que chacun de ces êtres eût un nom propre. On a donné un nom commun à tous les individus qui se ressemblent. Ce nom commun est appellé nom d’espece, parce qu’il convient à chaque individu d’une espece. Pierre est homme, Paul est homme ; Alexandre & César étoient hommes. En ce sens le nom d’espece n’est qu’un nom adjectif, comme beau, bon, vrai ; & c’est pour cela qu’il n’a point d’article. Mais si l’on regarde l’homme sans en faire aucune application particuliere, alors l’homme est pris dans un sens abstrait, & devient un individu spécifique ; c’est par cette raison qu’il reçoit l’article ; c’est ainsi qu’on dit le beau, le bon, le vrai.

On ne s’en est pas tenu à ces noms simples abstraits spécifiques : d’homme on a fait humanité ; de beau, beauté ; ainsi des autres.

Les Philosophes scholastiques qui ont trouvé établis les uns & les autres de ces noms, ont appellé concrets ceux que nous nommons individus spécifiques, tels que l’homme, le beau, le bon, le vrai. Ce mot concret vient du latin concretus, & signifie qui croît avec, composé, formé de ; parce que ces concrets sont formés, disent-ils, de ceux qu’ils nomment abstraits : tels sont humanité, beauté, bonté, vérité. Ces Philosophes ont cru que comme la lumiere vient du soleil, que comme l’eau ne devient chaude que par le feu, de même l’homme n’étoit tel que par l’humanité ; que le beau n’étoit beau que par la beauté ; le bon par la bonté, & qu’il n’y avoit de vrai que par la vérité. Ils ont dit humanité, de là homme & de même beauté, ensuite beau. Mais ce n’est pas ainsi que la nature nous instruit ; elle ne nous montre d’abord que le physique. Nous avons commencé par voir des hommes avant que de comprendre & de nous former le terme abstrait humanité. Nous avons été touchés du beau & du bon avant que d’entendre & de faire les mots de beauté & de bonté ; & les hommes ont été pénétrés de la réalité des choses, & ont senti une persuasion intérieure avant que d’introduire le mot de vérité. Ils ont compris, ils ont conçu avant que de faire le mot d’entendement ; ils ont voulu avant que de dire qu’ils avoient une volonté, & ils se sont ressouvenu avant que de former le mot de mémoire.

On a commencé par faire des observations sur l’usage, le service, ou l’emploi des mots : ensuite on a inventé le mot de Grammaire.

Ainsi Grammaire est comme le centre ou point de réunion, auquel on rapporte les différentes observations que l’on a faites sur l’emploi des mots. Mais Grammaire n’est qu’un terme abstrait ; c’est un nom métaphysique & d’imitation. Il n’y a pas hors de nous un être réel qui soit la Grammaire ; il n’y a que des Grammairiens qui observent. Il en est de même de tous les noms de Sciences & d’Arts, aussi-bien que des noms des différentes parties de ces Sciences & de ces Arts. Voyez Art.

De même le point auquel nous rapportons les observations que l’on a faites touchant le bon & le mauvais usage que nous pouvons faire des facultés de notre entendement, s’appelle Logique.

Nous avons vû divers animaux cesser de vivre ; nous nous sommes arrêtés à cette considération intéressante ; nous avons remarqué l’état uniforme d’inaction où ils se trouvent tous en tant qu’ils ne vivent plus ; nous avons considéré cet état indépendemment de toute application particuliere ; & comme s’il étoit en lui-même quelque chose de réel, nous l’avons appellé mort. Mais la mort n’est point un être. C’est ainsi que les différentes privations, & l’absence des objets dont la présence faisoit sur nous des impressions agréables ou désagréables, ont excité en nous un sentiment réfléchi de ces privations & de cette absence, & nous ont donné lieu de nous faire par degrés un concept abstrait du néant même : car nous nous entendons fort bien, quand nous soûtenons que le néant n’a point de propriétés, qu’il ne peut être la cause de rien ; que nous ne connoissons le néant & les privations que par l’absence des réalités qui leur sont opposées.

La réflexion sur cette absence nous fait reconnoître que nous ne sentons point : c’est pour ainsi dire sentir que l’on ne sent point.

Nous avons donc concept du néant, & ce concept est une abstraction que nous exprimons par un nom métaphysique, & à la maniere des autres concepts. Ainsi comme nous disons tirer un homme de prison, tirer un écu de sa poche, nous disons par imitation que Dieu a tiré le monde du néant.

L’usage où nous sommes tous les jours de donner des noms aux objets des idées qui nous représentent des êtres réels, nous a porté à en donner aussi par imitation aux objets métaphysiques des idées abstraites dont nous avons connoissance : ainsi nous en parlons comme nous faisons des objets réels.

L’illusion, la figure, le mensonge, ont un langage commun avec la vérité. Les expressions dont nous nous servons pour faire connoître aux autres hommes, ou les idées qui ont hors de nous des objets réels, ou celles qui ne sont que de simples abstractions de notre esprit, ont entre elles une parfaite analogie.

Nous disons, la mort, la maladie, l’imagination, l’idée, &c. comme nous disons le soleil, la lune, &c. quoique la mort, la maladie, l’imagination, l’idée, &c. ne soient point des êtres existans ; & nous parlons du phénix, de la chimere, du sphinx, & de la pierre philosophale, comme nous parlerions du lion, de la panthere, du rhinoceros, du pactole, ou du Pérou.

La Prose même, quoiqu’avec moins d’appareil que la Poësie, réalise, personifie ces êtres abstraits, & séduit également l’imagination. Si Malherbe a dit que la mort a des rigueurs, qu’elle se bouche les oreilles, qu’elle nous laisse crier, &c. nos Prosateurs ne disent-ils pas tous les jours que la mort ne respecte personne ; attendre la mort ; les Martyrs ont bravé la mort, ont couru au-devant de la mort ; envisager la mort sans émotion ; l’image de la mort ; affronter la mort ; la mort ne surprend point un homme sage : on dit populairement que la mort n’a pas faim ; que la mort n’a jamais tort.

Les Payens réalisoient l’amour, la discorde, la peur, le silence, la santé, dea salus, &c. & en faisoient autant de divinités. Rien de plus ordinaire parmi nous que de réaliser un emploi, une charge, une dignité ; nous personifions la raison, le goût, le génie, le naturel, les passions, l’humeur, le caractere, les vertus, les vices, l’esprit, le cœur, la fortune, le malheur, la réputation, la nature.

Les êtres réels qui nous environnent sont mûs & gouvernés d’une maniere qui n’est connue que de Dieu seul, & selon les Lois qu’il lui a plû d’établir lorsqu’il a créé l’Univers. Ainsi Dieu est un terme réel ; mais nature n’est qu’un terme métaphysique.

Quoiqu’un instrument de musique dont les cordes sont touchées, ne reçoive en lui-même qu’une simple modification, lorsqu’il rend le son du ou celui du sol, nous parlons de ces sons comme si c’étoit autant d’êtres réels : & c’est ainsi que nous parlons de nos songes, de nos imaginations, de nos idées, de nos plaisirs, &c. ensorte que nous habitons, à la vérité, un pays réel & physique : mais nous y parlons, si j’ose le dire, le langage du pays des abstractions, & nous disons, j’ai faim, j’ai envie, j’ai pitié, j’ai peur, j’ai dessein, &c. comme nous disons j’ai une montre.

Nous sommes émus, nous sommes affectés, nous sommes agités ; ainsi nous sentons, & de plus nous nous appercevons que nous sentons ; & c’est ce qui nous fait donner des noms aux différentes especes de sensations particulieres, & ensuite aux sensations générales de plaisir & de douleur. Mais il n’y a point un être réel qui soit le plaisir, ni un autre qui soit la douleur.

Pendant que d’un côté les hommes en punition du péché sont abandonnés à l’ignorance, d’un autre côté ils veulent savoir & connoître, & se flattent d’être parvenus au but quand ils n’ont fait qu’imaginer des noms, qui à la vérité arrêtent leur curiosité, mais qui au fond ne les éclairent point. Ne vaudroit-il pas mieux demeurer en chemin que de s’égarer ? l’erreur est pire que l’ignorance : celle-ci nous laisse tels que nous sommes ; si elle ne nous donne rien, du moins elle ne nous fait rien perdre ; au lieu que l’erreur séduit l’esprit, éteint les lumieres naturelles, & influe sur la conduite.

Les Poëtes ont amusé l’imagination en réalisant des termes abstraits ; le Peuple payen a été trompé : mais Platon lui-même qui bannissoit les Poëtes de sa République, n’a-t-il pas été séduit par des idées qui n’étoient que des abstractions de son esprit ? Les Philosophes, les Métaphysiciens, & si je l’ose dire, les Géometres même ont été séduits par des abstractions ; les uns par des formes substantielles, par des vertus occultes ; les autres par des privations, ou par des attractions. Le point métaphysique, par exemple, n’est qu’une pure abstraction, aussi-bien que la longueur. Je puis considérer la distance qu’il y a d’une ville à une autre, & n’être occupé que de cette distance ; je puis considérer aussi le terme d’où je suis parti, & celui où je suis arrivé ; je puis de même par imitation & par comparaison, ne regarder une ligne droite que comme le plus court chemin entre deux points : mais ces deux points ne sont que les extrémités de la ligne même ; & par une abstraction de mon esprit, je ne regarde ces extrémités que comme termes, j’en sépare tout ce qui n’est pas cela : l’un est le terme où la ligne commence ; l’autre, celui où elle finit : ces termes je les appelle points, & je n’attache à ce concept que l’idée précise de terme ; j’en écarte toute autre idée : il n’y a ici ni solidité, ni longueur, ni profondeur ; il n’y a que l’idée abstraite de terme.

Les noms des objets réels sont les premiers noms ; ce sont, pour ainsi dire, les aînés d’entre les noms : les autres qui n’énoncent que des concepts de notre esprit, ne sont noms que par imitation, par adoption ; ce sont les noms de nos concepts métaphysiques : ainsi les noms des objets réels, comme soleil, lune, terre, pourroient être appellés noms physiques, & les autres, noms métaphysiques.

Les noms physiques servent donc à faire entendre que nous parlons d’objets réels ; au lieu qu’un nom métaphysique marque que nous ne parlons que de quelque concept particulier de notre esprit. Or comme lorsque nous disons le soleil, la terre, la mer, cet homme, ce cheval, cette pierre, &c. notre propre expérience & le concours des motifs les plus légitimes nous persuadent qu’il y a hors de nous un objet réel qui est soleil, un autre qui est terre, &c. & que si ces objets n’étoient point réels, nos peres n’auroient jamais inventé ces noms, & nous ne les aurions pas adopté : de même lorsqu’on dit la nature, la fortune, le bonheur, la vie, la santé, la maladie, la mort, &c. les hommes vulgaires croient par imitation qu’il y a aussi indépendemment de leur maniere de penser, je ne sais quel être qui est la nature ; un autre, qui est la fortune, ou le bonheur, ou la vie, ou la mort, &c. car ils n’imaginent pas que tous les hommes puissent dire la nature, la fortune, la vie, la mort, & qu’il n’y ait pas hors de leur esprit une sorte d’être réel qui soit la nature, la fortune, &c. comme si nous ne pouvions avoir des concepts, ni des imaginations, sans qu’il y eût des objets réels qui en fussent l’exemplaire.

A la vérité nous ne pouvons avoir de ces concepts à moins que quelque chose de réel ne nous donne lieu de nous les former : mais le mot qui exprime le concept, n’a pas hors de nous un exemplaire propre. Nous avons vû de l’or, & nous avons observé des montagnes ; si ces deux représentations nous donnent lieu de nous former l’idée d’une montagne d’or, il ne s’ensuit nullement de cette image qu’il y ait une pareille montagne. Un vaisseau se trouve arrêté en pleine mer par quelque banc de sable inconnu aux Matelots, ils imaginent que c’est un petit poisson qui les arrête. Cette imagination ne donne aucune réalité au prétendu petit poisson, & n’empêche pas que tout ce que les Anciens ont cru du remora ne soit une fable, comme ce qu’ils se sont imaginés du phénix, & ce qu’ils ont pensé du sphinx, de la chimere, & du cheval Pégase. Les personnes sensées ont de la peine à croire qu’il y ait eu des hommes assez déraisonnables pour réaliser leurs propres abstractions : mais entre autres exemples, on peut les renvoyer à l’histoire de Valentin hérésiarque du second siecle de l’Eglise : c’étoit un Philosophe Platonicien qui s’écarta de la simplicité de la foi, & qui imagina des æons, c’est-à-dire des êtres abstraits, qu’il réalisoit ; le silence, la vérité, l’intelligence, le propator, ou principe. Il commença à enseigner ses erreurs en Egypte, & passa ensuite à Rome où il se fit des disciples appellés Valentiniens. Tertullien écrivit contre ces hérétiques. Voyez l’Histoire de l’Eglise. Ainsi dès les premiers tems les abstractions ont donné lieu à des disputes, qui pour être frivoles n’en ont point été moins vives.

Au reste si l’on vouloit éviter les termes abstraits, on seroit obligé d’avoir recours à des circonlocutions & à des périphrases qui énerveroient le discours. D’ailleurs ces termes fixent l’esprit ; ils nous servent à mettre de l’ordre & de la précision dans nos pensées ; ils donnent plus de grace & de force au discours ; ils le rendent plus vif, plus serré, & plus énergique : mais on doit en connoître la juste valeur. Les abstractions sont dans le discours ce que certains signes sont en Arithmétique, en Algebre & en Astronomie : mais quand on n’a pas l’attention de les apprécier, de ne les donner & de ne les prendre que pour ce qu’elles valent, elles écartent l’esprit de la réalité des choses, & deviennent ainsi la source de bien des erreurs.

Je voudrois donc que dans le style didactique, c’est-à-dire lorsqu’il s’agit d’enseigner, on usât avec beaucoup de circonspection des termes abstraits & des expressions figurées : par exemple, je ne voudrois pas que l’on dît en Logique l’idée renferme, ni lorsque l’on juge ou compare des idées, qu’on les unit, ou qu’on les sépare ; car idée n’est qu’un terme abstrait. On dit aussi que le sujet attire à soi l’attribut ; ce ne sont-là que des métaphores qui n’amusent que l’imagination. Je n’aime pas non plus que l’on dise en Grammaire que le verbe gouverne, veut, demande, régit, &c. Voyez Régime. (F)

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Étymologie de « abstraction »

Provenç. abstraccio ; catal. abstracció ; espagn. abstraccion ; ital. astrazione ; de abstractio, de abstrahere, abstraire.

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Du latin abstractus, du verbe abstraho (« tirer, traîner loin de, séparer de, détacher de, éloigner de »). Au XVIe siècle, ce nom désigne le fait de s’isoler de la société.
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Phonétique du mot « abstraction »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
abstraction apstraksjɔ̃

Évolution historique de l’usage du mot « abstraction »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « abstraction »

  • Un point géométrique est une abstraction de l’esprit. De Voltaire , 
  • La nation est une famille, le nationalisme une abstraction. De André Frossard / Le Monde de Jean-Paul II , 
  • Encore une fois, penser à soi avec abstraction des choses naturelles, c'est ne penser à rien. De Jean Guéhenno / Ce que je crois , 
  • Le grand malentendu, c'est le bonheur ! L'homme s'est toujours appliqué à en faire abstraction. De Eugène Cloutier / Les Inutiles , 
  • L'abstraction, c'est la capacité à accepter de ne pas comprendre tout de suite pour comprendre après. De David Constant , 
  • Le poète fait abstraction de la réalité, alors, ce rêveur compte les étoiles et va même jusqu'à les imaginer. De Giacomo Bardi , 
  • L'art est une abstraction, c'est le moyen de monter vers Dieu en faisant comme notre divin Maître, créer. De Paul Gauguin / Lettre à Emile Schuffenecker - 14 Août 1888 , 
  • L’Europe de l’Ouest ne s’intéresse qu’à la grande bouffe. Elle est sous le joug du poulet, du vin et de l’abstraction. De Hassan II / Le Figaro-Magazine - 25 Février 1984 , 
  • Le temps n'est qu'une abstraction élastique pouvant être contenue dans une seconde ou dans l'éternité. De Francine Ouellette / Les Ailes du destin , 
  • L'idée sans le mot serait une abstraction ; le mot sans l'idée serait un bruit ; leur jonction est leur vie. De Victor Hugo / Post-Scriptum de ma vie , 
  • Les enfants témoignent par leurs jeux de leur grande faculté d'abstraction et de leur haute puissance imaginative. Ils jouent sans joujoux. De Charles Baudelaire / Curiosités Esthétiques , 
  • Toute abstraction est si dure à accepter que notre premier réflexe est de la refuser, d’autant plus si elle s’inscrit à contre-courant de ce que nous avons toujours pensé. De Bram Stoker / Dracula , 
  • La danse est le plus sublime, le plus émouvant, le plus beau de tous les arts, parce qu'elle n'est pas une simple traduction ou abstraction de la vie ; c'est la vie elle-même. De Henry Havelock Ellis / La Danse de la vie , 
  • L'habitude des faits les plus violents use moins le coeur que les abstractions : les militaires valent mieux que les avocats. De Napoléon Bonaparte , 
  • Les hommes, déformés par les abstractions, disposent de plus de moyens pour se haïr que pour s'aimer. De Claude Mettra / Rabelais secret , 
  • Exposition « La photographie à l’épreuve de l’abstraction » du vendredi 18 septembre au dimanche 20 septembre à Frac Normandie Rouen Pour la quatrième édition du Festival Normandie Impressionniste, le Fonds régional d’art contemporain (Frac) Normandie Rouen s’intéresse à la problématique de l’abstraction dans le champ de la photographie contemporaine. C’est la première fois que cet enjeu majeur et actuel dans le domaine de la photographie fait l’objet d’une grande exposition en France. Liée à l’évolution du statut de l’image comme à l’essor des nouvelles technologies mais aussi à de véritables tendances qui parcourent aujourd’hui la photographie, la pluralité des démarches sera révélée au sein de l’exposition. Cette exposition s’intéresse à la problématique de l’abstraction dans la photographie contemporaine Frac Normandie Rouen 3 place des Martys-de-la-Résistance, 76300 Sotteville-lès-Rouen Sotteville-lès-Rouen Seine-Maritime Dates et horaires de début et de fin (année – mois – jour – heure) : 2020-09-18T13:30:00 2020-09-18T18:30:00;2020-09-19T13:30:00 2020-09-19T18:30:00;2020-09-20T13:30:00 2020-09-20T18:30:00 Unidivers, Exposition « La photographie à l’épreuve de l’abstraction » Frac Normandie Rouen Sotteville-lès-Rouen vendredi 18 septembre 2020
  • « Figer un championnat à dix journées de son terme, c’est faire abstraction du principe élémentaire d’équité. Même pour Toulouse, la lanterne rouge, l’espoir n’était pas totalement éteint. Je continue à lui souhaiter le meilleur. Sa situation me peine et me touche. J’espère sincèrement qu’on les réintégrera dans un championnat à 22. En Ligue 2, Le Mans est rétrogradé en National à la différence de buts. J’aurais préféré une saison blanche. Dès lors, je milite pour une Ligue 1 à 22. La suppression de la Coupe de la Ligue a libéré des dates. Témoignons d’un peu plus d’altruisme et de moins d’individualisme. » Le 11 Amiénois, Ligue 1 à 22 : Alain Casanova regrette "l'abstraction du principe d'équité"
  • Qt 5.15 LTS doit servir de templin vers Qt 6, mais vient aussi avec ses nouveautés propres. Notamment l'équipe de développement à commencé à travailler sur une couche d'abstraction pour les API 3D existantes et non plus OpenGL seulement. Cela recouvre les API Metal d'Apple, Vulkan du Khronos Group et Ditect 3D 12 de Microsoft. Avec la promesse d'avoir une solution qui fonctionne partout. Cette abstraction s'appelle l'interface matérielle de rendu Qt (RHI) et peut être utilisée pour exécuter des applications Qt Quick en plus de Direct 3D, Metal et Vulkan ainsi qu'OpenGL. Elle arrive en préversion dans Qt 5.15. Il faut positionner une variable d'environnement pour l'activer. Programmez!, Sortie de Qt 5.15 LTS avec une nouvelle couche d'abstraction 3D
  • L’abstraction est une des plus grandes aventures artistiques du XXe siècle, rompant radicalement avec la tradition occidentale. S’engageant dans une divergence difficile à assumer, totalement associée aux aspirations des avant-gardes, elle a contraint de nombreux peintres à prendre la plume. Affirmer l’autonomie de l’art qui s’affranchit de la réalité, échappe aux conventions, aux académismes, telle était l’ambition. Mais il fallait bien légitimer l’audace, en revendiquant le « spirituel dans l’art », l’introspection de la psyché ou encore les avancées de la science. Un langage plastique novateur et autant de fabulations diverses, de mythologies nouvelles qui trouvent leur essor dans l’abandon du réalisme. Bien entendu, il y eut des fulgurances et des extrêmes mais aussi des étapes. L’émergence de grammaires plastiques comme d’inspirations abstraites soufflées par la nature. Jean Legros né en 1917 n’a pas choisi d’emblée de s’exprimer par le signe. L’artiste, qui dans sa jeunesse avait côtoyé des classiques comme André Derain, Charles Despiau ou Francis Gruber, ne se laissa convaincre par sa vocation de peintre qu’après avoir fait l’expérience de l’absurdité de la guerre et s’être engagé dans la résistance. Celui qui a suivi une double formation en philosophie et psychologie choisit d’abord la figuration. Pourtant bientôt, ses paysages changent. Peu à peu, la peinture se transforme, annonce une suite. Plus encore que la forme, c’est la couleur qui se saisit de l’œuvre. Elle opère par bandes d’aplats parallèles ou de biais et sature l’espace, révélant ainsi un regard attentif au découpage marqué des paysages de la Touraine et de la Beauce où vécut l’artiste. Parfois contenue dans des figures au tracé précis, elle s’exprime par un agencement dans le blanc des toiles, pouvant aller jusqu’à réinterpréter le réel, comme pour Les Grues de Beaubourg. A ce travail révélateur et emblématique d’une époque et d’une géographie, Christophe Gratadou a choisi d’adjoindre celui d’une artiste née en 1980, en Uruguay. Autre temps, autre inspiration, autre mythologie. Rompue à la pratique des mathématiques, Silvia Velázquez n’a jamais imaginé créer autrement qu’en géométrisant les formes. Ses dessins à l’encre de Chine font naître des architectures énigmatiques. Carrés, cubes, triangles et autres parallélépipèdes s’assemblent si étonnamment qu’ils agissent sur l’esprit comme un message codé. Chacun d’entre eux, comme un art narratif, rend compte du quotidien de l’artiste. Son dessin se déploie en autant d’épisodes qu’il y a de feuilles au mur. Développé depuis plus de dix ans, ce journal intime, paradoxalement abstrait, se précise cependant à la lecture des titres indiquant un récit autobiographique. Dans la galerie, le regard passe alors d’une singulière histoire de l’abstraction avec Jean Legros à l’abstraction singulière d’une histoire avec Silvia Velàzquez. S’enthousiasmant pour ces deux mythologies géométriques. ArtsHebdoMédias, Mythologies géométriques - ArtsHebdoMédias
  • Entre post-graffiti et abstraction. J’ai grandi avec une culture de graffeurs puis avec le temps, je me suis ouvert à d’autres horizons et notamment à une culture davantage d’art moderne et contemporain. J’ai d’ailleurs découvert le mouvement du Color Field des années 40-50 lorsqu’on m’a dit que mes peintures pouvaient évoquer celles de Mark Rothko, l’un des maîtres américains de l’abstraction. Je ne connaissais pas son travail avant de créer instinctivement mon propre style. Artistikrezo, KEAN : "Je tente de permettre aux gens de s’évader via mes peintures" - Artistikrezo

Images d'illustration du mot « abstraction »

⚠️ Ces images proviennent de Unsplash et n'illustrent pas toujours parfaitement le mot en question.

Traductions du mot « abstraction »

Langue Traduction
Anglais abstraction
Espagnol abstracción
Italien astrazione
Allemand abstraktion
Portugais abstração
Source : Google Translate API

Synonymes de « abstraction »

Source : synonymes de abstraction sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « abstraction »

Combien de points fait le mot abstraction au Scrabble ?

Nombre de points du mot abstraction au scrabble : 15 points

Abstraction

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