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Prêt

Variantes Singulier Pluriel
Masculin prêt prêts
Féminin prête prêtes

Définitions de « prêt »

Trésor de la Langue Française informatisé

PRÊT1, subst. masc.

A. − Action de prêter quelque chose; ce qui est prêté. Anton. emprunt.On m'a montré un exemplaire de Fort comme la mort, qui avait servi de buvard (...). Une ligne d'écriture y restait empreinte à l'envers (...). Le prêt des livres ne laisse pas d'être périlleux (A. France, Vie littér.,1891, p.260).Des métayers aux petits propriétaires paysans, il y a le même échange de services. Et il n'y a pas seulement prêt mutuel du travail des bras, il y a prêt du bétail (Jaurès, Ét. soc.,1901, p.15).Modigliani se leva pour aller négocier avec le patron du bateau-lavoir le prêt d'un peloton de ficelle (Cendrars, Bourlinguer,1948, p.200).
Absolument
Prêt d'argent. Le sergent lui tendit alors quatorze sous, reliquat de je ne sais quel prêt, et que ce pauvre Miomandre empocha (Léautaud, Journal littér.,3, 1917, p.241).
Prêt de livres, de disques. Bibliothèque, discothèque de prêt; prêt interbibliothèques. D'une façon générale le prêt à domicile a plus de succès que la lecture sur place (Civilis. écr.,1939, p.48-14).
DR. ÉCON. Contrat par lequel l'une des parties, le prêteur, met à la disposition de l'autre, l'emprunteur, une chose pour son usage, à charge de la restituer au terme convenu, le plus souvent assorti d'une garantie et donnant lieu au versement d'un intérêt en cas de prêt d'argent; somme prêtée. Des prêts d'équipement peuvent être consentis aux établissements thermaux sur les crédits mis à la disposition des industries touristiques (Jocard, Tour. et action État,1966, p.159).L'Église, d'ailleurs, à de nombreuses reprises jusqu'à la fin du XVIIIesiècle, a condamné, sinon exactement la notion de crédit, du moins le principe de l'intérêt et le prêt à usure (Lesourd, Gérard, Hist. écon.,1968, p.66):
. Il y a deux sortes de prêt: celui des choses dont on peut user sans les détruire, et celui des choses qui se consomment par l'usage qu'on en fait. La première espèce s'appelle prêt à usage, ou commodat; la deuxième s'appelle prêt de consommation, ou simplement prêt. Code civil,1804, art. 1874, p.340.
SYNT. Prêt gratuit, à intérêt, usuraire; taux (d'intérêt) d'un prêt; prêt à court, à moyen, à long terme, au jour le jour, à la petite semaine; prêt sur gage(s), sur hypothèque, sur marchandises, sur nantissement, sur titres, hypothécaire; prêt d'une banque, d'un établissement de crédit, d'État, bancaire, public, privé; prêt sur fonds publics, sur plan d'épargne; prêt à un particulier, aux jeunes mariés, à l'artisanat, aux collectivités locales, à l'hôtellerie, à l'industrie, à un État; prêt personnel; prêt à l'amélioration de l'habitat, à la construction, pour l'accession à la propriété (sigle P.A.P.), pour le développement économique; prêt immobilier conventionné (sigle P.I.C.); accorder, consentir, refuser un prêt; demander, obtenir, rembourser un prêt; bénéficier d'un prêt; garantir un prêt (par une hypothèque, un nantissement...); caisse, comptoir, établissement, maison de prêts.
Prêt à la grosse (aventure). V. aventure B 1 b.
Prêt d'honneur. Prêt gratuit, accordé aux étudiants pour leur permettre de poursuivre leurs études, qui doit être remboursé dans un délai de dix ans après l'obtention du diplôme pour lequel il est alloué (d'apr. Éduc. 1979). V. rembourser A 1 a α ex. de Phillon.
En compos., HIST. Prêt-bail. Pendant la Seconde Guerre Mondiale, fournitures de matériel militaire et autres approvisionnements aux Alliés par les États-Unis. La politique américaine dite de «prêt-bail», grâce à laquelle les pays alliés des États-Unis ont pu recevoir au cours de la deuxième guerre mondiale des prestations à titre gratuit à condition de fournir en contrepartie −également à titre gratuit mais pour un montant nécessairement beaucoup plus faible −des prestations aux forces américaines séjournant sur leur territoire (Univers écon. et soc.,1960, p.40-6).
Au fig. Nous oublions que tout ce que nous pensons, toutes les idées et tous les sentiments que nous nous flattons d'avoir, nous viennent d'elle [notre mère la terre], ne sont que de petits prêts qu'elle nous fait (Maeterl., Gde féerie,1929, p.214).Le génie n'est qu'un prêt: il faut le mériter par de grandes souffrances, par des épreuves modestement, fermement traversées; on finit par entendre des voix et l'on écrit sous la dictée (Sartre, Mots,1964, p.49).
Attribution d'une certaine qualité, d'un certain caractère. Quand l'appartenance au milieu prédomine sur la maîtrise du milieu, l'impersonnalité s'installe dans les attitudes psychiques. Ce n'est plus le monde des choses qui reçoit de l'homme un prêt d'humanité, c'est l'homme qui subit une diminution d'humanité du fait d'un milieu (Mounier, Traité caract.,1946, p.79).
B. − ARM. ,,Somme allouée par l'État pour l'entretien du soldat, dont une partie est employée d'office dans ce but, par l'administration du corps dont il fait partie`` (Cap. 1936). C'est dans l'une de ces campagnes de Flandre où le pain manquait et où le prêt ne venait guère (...) que, pour dissiper une mutinerie commencée, il eut l'idée de faire battre la générale (Sainte-Beuve, Nouv. lundis,t.6, 1863, p.217).L'soldat dépense plus qu'n'gagne, y a pas d'erreur. Je m'demande c'que d'viendrait celui qui n'aurait que son prêt (Barbusse, Feu,1916, p.194).
Demi-prêt. V. enfant C 1 ex. de Vigny.
Prêt franc. Paie du soldat versée à celui-ci sans retenue quand il pourvoit lui-même à sa subsistance. L'autorisation de déroger à cette obligation [l'ordinaire] peut être accordée par le chef de Corps: −aux chefs de famille vivant avec leur famille −aux militaires dont la santé ne leur permet pas de suivre le régime de l'ordinaire. Les militaires perçoivent alors leurs prestations pour se nourrir individuellement. On dit qu'ils sont au «prêt franc» (Lubrano-Lavadera, Législ. et admin. milit.,1954, p.209).
P. anal., vieilli. ,,Avance faite par le patron à l'ouvrier sur le salaire de la journée`` (Chabat t.2 1876). Gervaise aperçut quatre ou cinq femmes qui montaient la garde comme elle, à la porte du maître zingueur; encore des malheureuses, bien sûr, des épouses guettant la paie (...). Enfin, un ouvrier parut, puis deux, puis trois; mais ceux-là, sans doute, étaient de bons zigs, qui rapportaient fidèlement leur prêt (Zola, Assommoir,1877, p.761).
Prononc. et Orth.: [pʀ ε]. Homon. près. Ac. 1694, 1718: prest; dep. 1740: prêt. Étymol. et Hist.1. Ca 1165 prest «action de prêter» (Benoît de Ste-Maure, Troie, 15119 ds T.-L.); 2. 1176-81 a prest on a don «chose ou somme d'argent prêtée» (Chrétien de Troyes, Chevalier Charrette, éd. M. Roques, 286); 3. 1671 «contrat par lequel une chose est livrée à charge de restitution» et prêt à intérêt (Pomey); 1832 prêt à usage, prêt de consommation (Raymond); 1835 maison de prêt (Ac.); 1875 prêt d'honneur (Lar. 19e); 4. a) 1360-70 «solde des troupes» (Baudouin de Sebourg, VI, 544 ds T.-L.); 1904 prêt franc (Nouv. Lar. ill.); b) 1872 «avance sur un salaire» (Poulot, Sublime, p.69). Déverbal de prêter*. Fréq. abs. littér.: 240. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 333, b) 333; xxes.: a) 318, b) 365.

PRÊT2, PRÊTE, adj.

A. − Qui est en état.
1. [Qualifie une pers.]
a) Qui est préparé matériellement ou moralement, intellectuellement (à faire quelque chose). Synon. décidé, disposé, mûr, paré, préparé.
Prêt à.Être, se tenir, se trouver prêt à
Prêt à + inf.Je ne suis pas prêt à partir. Il me semble que si j'avais à faire mes paquets aujourd'hui, je serais triste à l'idée de tout ce que je laisserais en plan (Green, Journal,1941, p.99).Il sort un tube de son gousset et avale plusieurs tablettes [d'un stimulant] (...). Dans une heure, dit Marat, je serai prêt à participer à la bataille (Vailland, Drôle de jeu,1945, p.165):
1. Son but était d'abréger mes années de collège en me préparant le plus vite possible aux hautes classes. Quatre années se passèrent de la sorte, au bout desquelles il me jugea prêt à me présenter en seconde. Fromentin, Dominique,1863, p.55.
Prêt à + subst.[évoquant une action] Prêt à l'attaque, à la lutte, à la guerre, au départ. Les cordages, les mâts, les bois sont réparés; Et les Troyens choisis, prêts à ce grand voyage, S'ils n'ont pour eux le nombre, ont pour eux le courage (Delille, Énéide,1804, p.179).Quinze jours de prison pour outrages à la Sainte Magistrature... Mais je me trompe... à la morale, et me voilà Tout prêt à la rature (Verlaine, OEuvres compl.,t.3, Invect., 1896, p.381).V. baïonnette ex. 2.
[évoquant une situation] Prêt à toutes les éventualités. Cyrus Smith, Gédéon Spilett, Harbert, l'épieu dressé, se tinrent prêts à tout événement (Verne, Île myst.,1874, p.165).Oui, les plus simples besognes la rebutent, mais elle est prête au pire, c'est ce qu'il faut, elle fera face au pire (Bernanos, M. Ouine,1943, p.1426).
Prêt pour
Prêt pour + inf.Je ne me trouve jamais assez prêt pour agir, parler, ou écrire (Maine de Biran, Journal,1816, p.195).
Prêt pour + subst.Être prêt pour une entrevue, une visite. Votre ministre Narbonne, qui disait à l'Assemblée, en revenant d'inspecter nos forteresses, que nous étions prêts pour la guerre, est le dernier des scélérats (Erckm.-Chatr., Hist. paysan,t.2, 1870, p.4).Cette image imprévue d'elle-même: une femme précise, dégagée, comme prête pour un départ matinal (Chardonne, Dest. sent.,III, 1936, p.85).
Prêt de + inf. (vieilli).Mais je saurai veiller jusqu'au bout sur ton sort, Toujours prêt d'écarter de toi la triste mort (Moréas, Iphigénie à Aulis,1903, p.254).
Absol. (Fin) prêt. Ils tiennent pour un mérite le fait que nous n'étions pas prêts. Cela prouve bien que nous ne cherchions pas la guerre (Barrès, Cahiers,t.11, 1915, p.131).[Le général:] Nous travaillons à force et, d'ici un mois, nous serons fin prêts (...) n'est-ce pas commandant? (L. Daudet, Ciel de feu,1934, p.44).[Devise scoute] Toujours prêt.
SPORTS. [Dans le commandement d'un départ de courses] V. partir2.Le départ a une importance capitale dans les courses de vitesse. Il se prend à genoux aux commandements suivants: «À vos marques!», «prêts!», puis coup de pistolet (R. Vuillemin, Éduc. phys.,1941, p.129).
En partic. Qui est habillé, paré pour sortir. Où est ta soeur et sa mademoiselle? −Pas prêtes encore; la robe d'Aimée s'attache sous le bras, tu penses! C'est mademoiselle qui la lui agrafe (Colette, Cl. école,1900, p.286).Jaume est fin prêt. Tout rasé, un foulard de coton blanc noué lâche découvre sa pomme d'Adam rousse et pointue (Giono, Colline,1929, p.194).
b) Qui est disposé, enclin (à faire, à subir quelque chose).
Prêt à.S'affirmer, se déclarer, se montrer, se sentir prêt à
Prêt à + inf.Être (tout) prêt à accorder qqc., à s'accuser, à donner un coup de main, à pardonner, à répondre, à rendre service. Dis-lui bien que, si elle s'ennuie trop et désire que je revienne, je suis tout prêt à faire mon paquet et à m'en retourner à Croisset (Flaub., Corresp.,1863, p.332).Tous les hommes sont prêts à mourir pour ce qu'ils aiment (S. Weil, Pesanteur,1943, p.66).
Prêt à + subst.Être prêt au crime, au dévouement, à la trahison, à toutes les abnégations, à tous les sacrifices. Pour éviter un acte de rigueur, je suis prêt à toutes les concessions (Sardou, Rabagas,1872, iv, 6, p.180).Le commandement [se] (...) déclarait navré d'avoir à rappeler certains officiers au respect de leur grade et de leur qualité de Français. Il s'affirmait prêt aux sanctions nécessaires (Vercel, Cap. Conan,1934, p.91).
Prêt à tout. Disposé à tout faire pour arriver à ses fins; sans scrupules. Homme de grand mérite, énergique, prompt et prêt à tout, plein d'idées, (...) résolu dans l'action, ne comptant ni peines, ni fatigues, ni dangers (Verne, Île myst.,1874, p.11).Cette réputation de conspirateur redoutable (...) de patriote prêt à tout (...) avait séduit l'imagination (...) de Pierre Roland (Maupass., Pierre et Jean,1888, p.314).
Empl. subst. Il y avait les titis, les gouailleurs, les geignards, les râleurs, les trouillards (...), les prêts-à-tout, les timorés, les furieux (Vialar, Dansons,1950, p.23).
Prêt de + inf. (vieilli).Oh, le curé... aussitôt que les gens se couchent d'un rhume, il est toujours prêt d'y courir (Aymé, Jument,1933, p.87).
2. [Qualifie une chose ou parfois un animal] Qui est en état de servir, d'être utilisé sans modification, sans délai, dont la préparation est achevée. Synon. apprêté, paré, préparé, à point pour.Tenir qqc. prêt.
a) Prêt à
α) Prêt à + inf.
[Le subst. qualifié désigne le suj. de l'inf.] J'espérais si bien te rencontrer, que tu as un appartement tout prêt à te recevoir (Balzac, Cous. Bette,1846, p.413).Toutes [les barques] étaient là, sur la dune, prêtes à reprendre la mer dès le premier calme (Queffélec, Recteur,1944, p.130).V. inattendu ex. 2.
Avec inf. passif. Les beignets furent, après quelques essais, prêts à être livrés ponctuellement juteux, dorés et sucrés à ravir (Céline, Voyage,1932, p.64).
Loc. subst. [P. ell. du déterminé] Abandonnez-vous aux plaisirs jardiniers du prêt-à-pousser. Tout commence en petits pots en plastique ensemencés, que l'on perce à la base, que l'on immerge, que l'on découvre peu à peu (Le Point,8 mai 1978, p.51, col. 4).La sécurité d'un vrai «prêt-à-éteindre» [un extincteur] (Gilb.1980).
[Le subst. qualifié désigne l'obj. de l'inf.] Synon. à point pour.Vin prêt à boire, fruit prêt à cueillir. L'herbe haute, prête à faucher (Courier, Pamphlets pol.,Gazette vill., 1823, p.187).Il eut plus de huit jours un cheval toujours sellé et prêt à monter pour aller se battre contre celui dont il croyait avoir été offensé (Chateaubr., Rancé,1844, p.156).
Loc. adj. Vêtement prêt-à-porter; maison prête à habiter; logement prêt-à-décorer. Depuis longtemps déjà, le papier peint est vendu «prêt à poser», sans marge à couper, ni colle à préparer (Habitat magazine,mars 1985, p.89, col. 1).Au fig. C'est quand même dommage qu'on n'ait pas fait du sur mesures pour une telle voix, se dit-on, qu'on se soit contenté de chansons prêtes-à-porter (Télérama,9 mars 1983, p.21).
Loc. subst. [P. ell. du déterminé]
Prêt-à-jeter. Une mentalité du «prêt-à-jeter» est maintenant largement répandue: les rasoirs et les briquets à jeter, les lampes de poche non rechargeables en sont des expressions concrètes (Le Monde,28 oct. 1977, ibid.).
Prêt-à-manger. ,,Produit de restauration rapide (petits pains en tranches et garnis d'ingrédients divers, brioches, croissants, crêpes, etc.); p.ext., lieu où sont distribués ces produits`` (J.O., 3 avril. 1982, p.3275). J'ai erré, l'estomac noué, dans une exposition inodore de boîtes de conserve et de cartons congelés [le Salon international de l'Alimentation]. Au royaume du tout emballé, vite réchauffé, sitôt consommé (...). J'étais au salon du «prêt-à-manger» (Le Nouvel Observateur,4 févr. 1978, p.102, col. 1).
Prêt à monter. ,,Ensemble de pièces détachées constitutives d'un objet, accompagnées d'un plan de montage`` (J.O., loc. cit.). Synon. kit.
Prêt à planter. Les Français se sont mis à consommer massivement la plante verte (...). Du sur mesure chez les grands de l'arbre en pot, et du prêt à planter dans les magasins à libre service (Le Nouvel Observateur,31 mai 1976, p.56, col. 3).
Prêt(-)à(-)porter. V. ce mot.
Prêt-à-poser. Les tout récents vêtements muraux de L., le «prêt-à-poser» des papiers peints (Elle,15 févr. 1971ds Gilb. 1980).
[Le subst. qualifié désigne le compl. circ. (de lieu, de moyen) de l'inf.]
Loc. adj. Votre appartement toujours «prêt à vivre» à votre arrivée: chauffage électrique Intégré d'ambiance et d'appoint, moquette douce, tissus muraux sur molleton (L'Express,16 févr. 1976, p.6, col. 1).Des patrons prêts-à-créer, d'une grande facilité d'exécution, pour une toilette de rêve (La Vie du Rail,1eravr. 1973ds Gilb. 1980).
Loc. subst. Un ensemble de prêt-à-dormir comprenant un jeu de draps et une couverture matelassée réunis par des fermetures à glissière (L'Action automobile et touristique,mai 1970,ds Gilb. 1980).Un «prêt-à-vivre» inouï Salles de bains raffinées, luxueuses moquettes et marbres au sol, textile mural, cheminée de style et un tout nouveau système d'aspiration intégré (Le Point,31 oct. 1977, p.187, col. 3).Voici revenu le temps des grandes décisions concernant les prochaines vacances. Que choisir? Les formules se sont multipliées, avec plus ou moins de bonheur, mais le prêt-à-partir au meilleur prix néglige trop souvent la justement fameuse qualité de vie (Le Nouvel Observateur,9 mars 1981, p.83).
Rem. Ces loc. adj. et subst. sont constr. sur le modèle de prêt(-) à(-)porter.
β) Prêt à + subst.Un boxeur au combat, le regard rivé à l'adversaire, le cerveau tendu, tous les muscles prêts à la parade (Martin du G., Thib.,Mort père, 1929, p.1289).L'une de ces carrières-tailleries expédie fréquemment ses pierres taillées prêtes à la pose par trains entiers (Lambertie, Industr. pierre et marbre,1962, p.73).
b) Prêt pour
Prêt pour + inf.Tout était prêt pour recevoir Lucy (Toepffer, Nouv. genev.,1839, p.213).Tout est prêt pour faire sauter la citadelle ce soir (Claudel, Soulier,1944, 2epart., 9, p.1079).
Prêt pour + subst.
[désignant une action] Tout est prêt pour l'expédition: les cordes, les bidons, le briquet à essence, les cannes ferrées, le fusil (Giono, Colline,1929, p.88).Une contraction musculaire généralisée tient le corps prêt pour une ascension ou un élan (Bourgat, Techn. danse,1959, p.118).
[désignant une chose ou pers., agent ou moyen d'une action] Un beau morceau de terre qui a été plein de bois et de chicots et de racines et qu'on revoit une quinzaine après nu comme la main, prêt pour la charrue (Hémon, M. Chapdelaine,1916, p.62).Pour être tout au travail, j'abandonne toute espèce de Journal jusqu'à ce que j'aie derrière moi les deux Domaines prêts pour l'éditeur (Larbaud, Journal,1934, p.321).
c) Absol. C'est toi, Louis! Ton dîner est tout prêt dans la cuisine, mon enfant. J'ai laissé la soupe à petit feu (Duhamel, Confess. min.,1920, p.115).Notre premier numéro est presque prêt; mais, dis... pourquoi ne m'as-tu rien envoyé? −Parce que je n'avais rien de prêt, répond Bernard un peu sèchement (Gide, Faux-monn.,1925, p.1149).Tout était prêt: les grains en sacs, le vin en fûts (Pesquidoux, Livre raison,1928, p.156).V. fin2I C ex. de Beauvoir.
[Qualifie un sentiment] Elle s'était demandé: «Pauvre voisin, dois-je le plaisanter sur sa chute? (...)» Sa gaieté était prête encore mieux que sa pitié (R. Bazin, Blé,1907, p.215).Il voulait me dire qu'il était prêt, que toutes ses tendresses étaient prêtes, et qu'il n'avait plus, pour les distribuer, qu'à rentrer chez lui (Saint-Exup., Terre hommes,1939, p.204).
Péj. [En parlant d'idées] Tout, toujours prêt. Cette grande question de la peine de mort [était] venue jeter une passion intéressante au milieu de tout ce désoeuvrement. Le choc devint électrique, chacun avait en réserve son argument tout prêt, chacun parlait sans attendre que son tour fût venu (Janin, Âne mort,1829, p.113).Pauvre fusée éteinte aussitôt sous une avalanche de phrases toujours prêtes, et qu'il n'a pas eu seulement le pauvre mérite d'inventer! (Gobineau, Pléiades,1874, p.192).J'ai toujours une petite théorie toute prête pour expliquer ce qui me frappe (Curel, Nouv. idole,1899, ii, 3, p.205).
B. − Qui est sur le point de (faire quelque chose). [Avec encore souvent l'idée que la pers., la chose en question est justement dans l'état, la disposition qui permet de faire immédiatement qqc.] Synon. près* de.
1. Prêt à + inf.Le temps était assez beau: quelques nuages épars semblaient prêts à se dissiper (Maine de Biran, Journal,1816, p.168).Un souvenir semblait prêt à surgir, tremblait un moment comme au bord de la mémoire, puis s'enfonçait de nouveau (Bernanos, Crime,1935, p.799):
2. Au moment où elle était prête à passer, on soutenait au bord de son lit qu'on ne succombait que parce qu'on se laissait aller... Chateaubr., Mém.,t.2, 1848, p.190.
SYNT. Être prêt à défaillir, à s'évanouir, à périr, à mourir, à pleurer, à fondre en larmes, à tomber; flamme prête à s'éteindre; fleur prête à éclore, à se faner; larmes prêtes à couler; mine prête à sauter; maux, malheurs prêts à fondre sur qqn; orage prêt à éclater; soleil prêt à se coucher.
2. Prêt de + inf. (vieilli).S'il est vrai, comme on en répand le bruit, qu'un grand complot est prêt d'éclater, (...) ce complot est lié au projet de guerre que la Cour a imaginé (Robesp., Discours,Guerre, t.8, 1792, p.150).Madame Jérôme Bonaparte, prête d'accoucher, ne put débarquer en France et fut obligée d'aborder en Angleterre (Chateaubr., Mém.,t.2, 1848p.392).
N'être pas prêt de. Avoir peu de chance de, ne pas risquer de (ou seulement dans un avenir éloigné). Tant que les radicaux suisses (...) continueront à tenir l'autorité dans la confédération et je crois que grâce à l'inertie nationale ce fait-là n'est pas encore prêt de finir, les puissances devront s'attendre à ne recevoir de la Suisse (...) que des mauvais procédés (Gobineau, Corresp.[avec Tocqueville], 1850, p.120).Si le baron se met à faire de l'oeil au contrôleur, nous ne sommes pas prêts d'arriver, le train va aller à reculons (Proust, Sodome,1922, p.1041).Le début de la sédimentation est plongé dans un mystère qui n'est pas prêt d'être dissipé (Combaluzier, Introd. géol.,1961, p.66).
Rem. ,,Cet emploi est aujourd'hui condamné. «Il ne faut pas confondre: je suis prêt à partir (= «je suis disposé à partir») avec: je suis près de partir (= «je suis sur le point de partir»)`` (Communiqué de l'Académie du 19 nov. 1964 cité par Dupré 1972).
Prononc. et Orth.: [pʀ ε], [pʀ εt]. Homon. près. Ac. 1694, 1718: prest, -este; dep. 1740: prêt, -ête. Étymol. et Hist. 1. Ca 1050 (en parlant de choses) «entièrement préparées» (Alexis, éd. Chr. Storey, 77); 1585 le dîsner est prest (N. Du Fail, Contes d'Eutrapel, éd. J. Assézat, II, 94); 2. ca 1100 prez (en parlant d'une personne) «qui est capable, en état de faire quelque chose» (Roland, éd. J. Bédier, 295); ca 1165 prest de «disposé à» (Benoît de Ste-Maure, Troie, 20334 ds T.-L.); 1260 prest à (E. Boileau, Métiers, 145, ibid.); 1673 être prêt à tout (Molière, Malade imaginaire, III, 14); 1934 être fin prêt (L. Daudet, loc. cit.); 3. ca 1180 preste de «sur le point de» (Marie de France, Fables, 8, 2 ds T.-L.). Du b. lat. praestus, de l'adv. lat. praesto «sous la main», «ici présent», «à la disposition». Fréq. abs. littér.: 7726. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 10669, b) 10328; xxes.: a) 10538, b) 11882.

Wiktionnaire

Nom commun - français

prêt \pʁɛ\ masculin

  1. Action de prêter :
    1. de l’argent, moyennant des intérêts.
      • En Assyrie, en Égypte, l’intermédiarat existait, et, aussi, le prêt avec intérêt. Les paysans, manquant de blé, empruntaient des lingots d’or ou d’argent pour s’en procurer ; puis, quand il leur fallait rendre ces lingots, ils vendaient la récolte à perte, naturellement, à des trusteurs qui devinrent peu à peu maîtres du marché. — (Victor Méric, Les Compagnons de l’Escopette, Éditions de l’Épi, Paris, 1930, page 172)
      • En 1545, l’évêque de Strasbourg interdit à ses ouailles de contracter des prêts hypothécaires chez des juifs. — (Léon Berman, Histoire des Juifs de France des origines à nos jours, 1937)
    2. autre chose que de l’argent, sans contrepartie.
      • Je ne vous donne pas ce livre, ce n’est qu’un prêt.
  2. Somme prêtée.
    • Un prêt considérable.
  3. (Militaire) Somme allouée aux sous-officiers et aux soldats pour leurs menus besoins.
    • On paie le prêt tous les dix jours.
    • Prêt franc : Somme allouée aux sous-officiers et aux hommes dispensés de vivre à l’ordinaire, et qui leur sert non seulement comme argent de poche, mais aussi pour leur nourriture.

Adjectif - français

prêt \pʁɛ\

  1. Qui est en état de faire, de dire, de recevoir, d’entendre quelque chose ; qui est disposé, préparé à quelque chose.
    • Le dîner est prêt.
    • Tenez-vous prêt pour partir dans deux heures.
    • Je suis prêt à vous entendre.
    • En sommes, tu restes alors tout près de lui, mais également tout prêt pour lui. — (Jean Proulx, Grandir en humanité, Fides, 2018, p. 141)
    • C’est un homme qui n’est jamais prêt : C’est un homme qui est toujours en retard, qui n’a jamais fait à temps ses préparatifs.
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Littré (1872-1877)

PRÊT (prê, prê-t') adj.
  • 1Qui est disposé à, préparé à. Tenez-vous prêt pour partir. La mort ne surprend point le sage, Il est toujours prêt à partir, La Fontaine, Fabl. VIII, 1. Je définis la cour un pays où les gens, Tristes, gais, prêts à tout, à tout indifférents, Sont ce qu'il plaît au prince, La Fontaine, ib. VIII, 14. Ceux qui seraient prêts à consentir au mensonge, Pascal, Pens. XXIV, 39 ter, éd. HAVET. Les ennemis le trouvent toujours sur ses gardes, toujours prêt à fondre sur eux, Bossuet, Louis de Bourbon. Jamais prince ne fut plus docile et plus prêt à se corriger de ses défauts, Fléchier, Hist. de Théodose, IV, 34. Soyez-vous à vous-même un sévère critique ; L'ignorance toujours est prête à s'admirer, Boileau, Art p. I.

    Il se dit aussi des choses. Et que tous vos vaisseaux soient prêts pour notre fuite, Racine, Andr. IV, 3. Son traité d'optique étant prêt à imprimer, Fontenelle, Newton. Du bois taillis prêt à couper dans quelques années, Buffon, Hist. nat. Intr. part. exp. Œuv. t. VIII, p. 405.

  • 2 Absolument, en parlant des personnes, tout disposé, tout préparé. On est toujours trop prêt quand on a du courage, Corneille, Cid, IV, 5. Quoique, sans menacer et sans avertir, la mort se fasse sentir tout entière dès les premiers coups, elle trouve la princesse prête, Bossuet, Duch. d'Orl. Il faut partir, les matelots sont prêts, Boileau, Sat. VIII. Calchas est prêt, madame, et l'autel est paré, Racine, Iphig. IV, 3. Annette, veux-tu aller avec elle ? - Moi, de tout mon cœur ; me voilà prête, Genlis, Théât. d'éduc. la March. de modes, sc. 6.

    Il n'est jamais prêt, il n'a jamais fait ses préparatifs à temps.

    Il se dit aussi des choses. Le dîner est prêt. Il faut partir, la voiture est prête. Quelquefois il [Louis XIII] a opposé la force toute prête à la violence qui se préparait, Guez de Balzac, le Prince, 17. L'un [Régulus], jaloux de sa foi, va chez les ennemis Chercher avec la mort la peine toute prête, Racine, Bérén. IV, 5.

    Fig. Ce n'est pas viande prête, se dit d'une chose qui ne se fait pas toute seule, qui tirera en longueur.

  • 3Prêt sur, qui a par devant soi une préparation, une étude. Mon second était prêt sur tout, Pascal, Prov. IV.
  • 4Destiné. Il est injuste qu'on s'attache à moi… je ne suis la fin de personne… ne suis je pas prêt à mourir ? Pascal, Pens. XXIV, 39 ter, édit. HAVET.
  • 5Prêt à, sur le point de. L'oiseau, prêt à mourir, se plaint en son ramage, La Fontaine, Fabl. III, 12. Je vous vois prêt, monsieur, à tomber en faiblesse, Molière, Sgan. 11. J'avais laissé Mme de Vaubrun prête à devenir folle, Mme de Langeron prête à mourir, Sévigné, 14 sept. 1675. Rome prête à succomber, Bossuet, Hist. III, 7. Je vois de votre cœur. Octavie effacée, Prête à sortir du lit où je l'avais placée, Racine, Brit. IV, 2. Aujourd'hui qu'au tombeau je suis prêt à descendre, Chénier, Élégies, VII. Une brebis prête à agneler, une poulette prête à pondre, Dict. de l'Acad. aux mots agneler et poulette.

    Il se dit aussi des choses. Un grand destin commence. Un grand destin s'achève : L'empire est prêt à choir, et la France s'élève, Corneille, Att. I, 2. La vertu la plus prête à se voir couronner, Quand ta main se retire, est aussitôt fragile, Corneille, Imit III, 14. Si c'est vous offenser, Mon offense envers vous n'est pas prête à cesser, Molière, Femmes sav. v, 1. Tous ces nuages qui paraissent si noirs et si prêts à fondre sur nous, Sévigné, 30 mars 1689.

  • 6Prêt de, disposé à, préparé à. Psyché était honteuse de son peu d'amour, toute prête de réparer cette faute, si son mari le souhaitait, et quand même il ne le souhaiterait pas, La Fontaine, Psyché, I, p. 85. Que si cette feinte, madame, a quelque chose qui vous offense, je suis tout prêt de mourir pour vous en venger, Molière, Princ. d'Él. V, 2. Le voilà prêt de faire en tout vos volontés, Molière, le Dép. III, 8. Et je dois moins encore vous dire Que je suis prêt pour vous d'abandonner l'empire, Racine, Bérén. v, 6. Qu'on rappelle mon fils, qu'il vienne se défendre ; Qu'il vienne me parler, je suis prêt de l'entendre, Racine, Phèd. v, 5.

    Il se dit aussi des choses. Ajoute que ma mort Est prête d'expier l'erreur de ce transport, Molière, le Dép. I, 2.

    Aujourd'hui les grammairiens ont décidé qu'il fallait dire en ce sens prêt à ; cette décision est arbitraire, car l'usage admettait, comme on voit, la préposition de ; et il n'y a rien dans prêt qui exclue cette préposition.

  • 7Prêt de, sur le point de. Il tenait un moineau, dit-on, Prêt d'étouffer la pauvre bête, Ou de la lâcher aussitôt Pour mettre Apollon en défaut, La Fontaine, Fabl. IV, 19. En rêvant à la visite qu'elle était prête de recevoir, La Fontaine, Psyché, I, p. 68. Mme de Vaudemont n'est pas prête de revenir ici, Sévigné, 9 mars 1672. On était prêt d'aller se divertir à Fontainebleau : tout a été rompu [à l'occasion de la mort de Turenne], Sévigné, 31 juill. 1675. Mme d'Heudicourt est entièrement dans la gloire de Niquée ; elle oublie qu'elle est prête d'accoucher, Sévigné, 30 juill. 1677. Si toujours dans leur âme une pudeur rebelle. Prêts d'embrasser l'Église, au prêche les rappelle, Boileau, Épître III. Faut-il être surprise Que, tout prêt d'achever cette grande entreprise, Bajazet s'inquiète ? Racine, Bajaz. III, 6. Les voisins [des princes allemands] étaient prêts d'envahir la frontière, Voltaire, Mœurs, 37.

    Il se dit aussi des choses. Sur la légèreté d'une croyance si peu raisonnable, il renonce à une affection dont il était assuré, et qui était prête d'avoir son effet, Corneille, Mél. Examen. On a fait contre vous dix entreprises vaines ; Peut-être que l'onzième est prête d'éclater, Corneille, Cinna, II, 1. Cette utile frayeur… Vient souvent de la grâce en nous prête d'entrer, Boileau, Épître XI.

    Aujourd'hui, en ce sens, on dit près de.

HISTORIQUE

XIe s. Se li reis velt, prez sui pour vous le face, Ch. de Rol. X.

XIIe s. D'hui cest jour en un an soiez prest d'ostoier [d'entrer en campagne], Sax. XVI.

XIIIe s. Ele [Liesse] ot la bouche petitete, Et por baisier son ami preste, la Rose, 854. À ceste amor sunt près et prestes Ausinc li home cum les bestes, ib. 5799. Je sui pretz à feire le [cela] volantiers, Merlin, f° 53, recto.

XIVe s. En la cité n'en avoit nul plus prest de langue ne de main, Bercheure, f° 54, verso.

XVIe s. Ponocrates courut dire les novelles à Gargantua, affin qu'il fust prest de la response, Rabelais, Garg. I, 18. Et voy me là prest à boyre, Rabelais, ib. I, 41. Quand doncques je les voirray tumber en la riviere et prestz d'estre noyez, Rabelais, ib. I, 42. En ung moment elles estoyent prestes et habillées de pied en cap, Rabelais, ib. I, 56. L'abbaye d'Issouldun, en Berry, est de present vacante ou preste à vacquer par la mort de l'abbé dudict lieu, Marguerite de Navarre, Lett. 86. Nous sommes icy prests à aller où vous voudrés, Marguerite de Navarre, ib. 113. Ce que je me haste, est afin d'estre plus toust preste du retour, Marguerite de Navarre, ib. 126. [Des épis] Prests à cueillir, Marot, IV, 17. Ils en sont bien prests [il y sont bien préparés ! ironiquement] ! Montaigne, I, 140. Ma comedie est composée et preste, respondit Menander, Montaigne, I, 190. J'avois le latin si prest et si à main qu'ils [les professeurs] craignoient à m'accoster, Montaigne, I, 194. Comme le feu… plus il trueve de bois, et plus il est prest d'en brusler, La Boétie, Servit. volont. Tel est housé [botté] qui n'est pas prest, Cotgrave Viande d'ami est bientost preste, Cotgrave

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1. PRÊT. Ajoutez :
8Harengs demi-prêts, harengs qui n'ont pas été sauris très fortement. À Boulogne et à Calais on fume les harengs dits francs-saures, qui ne se mangent à Paris que lorsque les demi-prêts viennent à manquer, A. Husson, les Consommations de Paris, p. 266.

REMARQUE

On peut voir au n° 5 prêt à avec un nom de chose signifiant sur le point de. Molière s'est servi de cette tournure avec un verbe actif sans régime exprimé : Nous avons en main divers stratagèmes tout prêts à produire dans l'occasion, Pourc. I, 3. Prêt à est ici construit avec produire comme : bon à voir, difficile à prendre, etc.

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Encyclopédie, 1re édition (1751)

PRÊT de, PRÊT a, (Synonymes.) on dit l’un & l’autre ; je suis prêt de faire ou à faire ce que vous voudrez. Lorsque prêt signifie sur le point, prêt de est ordinairement le meilleur ; les dieux étoient prêts de le vanger ; vous êtes prêts de jouir du bonheur, &c. Mais il convient de remarquer que prêt de mourir, signifie la défaillance extrème du corps, qui fait connoître qu’on est sur le point de mourir, au lieu que prêt à mourir, marque la disposition de l’ame. Il faut toujours mettre prêt à, quand le verbe actif qui suit a une signification passive, comme prêt à marier, prêts à manger, &c. c’est-à-dire prêt à être marié, prêt à être mangé. (D. J.)

Prêt a intérêt, (Droit naturel, civil, & canon.) le prêt à intérêt, ou si vous l’aimez mieux, le prêt à usure, est tout contrat, par lequel un prêteur reçoit d’un emprunteur un intérêt pour l’usage d’un capital d’argent qu’il lui fournit, en permettant à l’emprunteur d’employer ce capital, comme il voudra, à condition de le lui rendre au bout d’un tems limité, ou de le garder, en continuant le paiement de l’intérêt stipulé. Prouvons que cet intérêt est légitime, & qu’il n’est contraire ni à la religion, ni au droit naturel.

Le prêt d’argent à intérêt se fait, ou entre deux personnes riches, ou entre un riche & un pauvre, ou entre deux pauvres. Voilà toutes les combinaisons possibles sur ce sujet.

Un riche, quoique tel, se trouve avoir besoin d’argent en certaines circonstances, dans lesquelles il lui importe beaucoup d’en trouver : il en emprunte d’un autre riche ; or en vertu de quoi le dernier ne pourroit-il pas exiger quelqu’intérêt du premier, qui va profiter de l’usage de son argent ? Est-ce parce qu’il est riche ? Mais l’emprunteur, comme nous le supposons, l’est aussi ; donc en cette qualité, il ne peut refuser un surplus qu’on lui demande au-delà de la somme qu’on lui prête, & dont il a besoin.

A plus forte raison, la question du paiement de l’intérêt seroit-elle souverainement absurde & injuste, si le riche empruntoit d’un pauvre quelque petite somme ; car, ici même, un motif de la charité devroit porter le riche à donner au pauvre un plus gros intérêt qu’il ne donneroit à un autre riche.

Quand un pauvre emprunte d’un riche, si ce pauvre n’emprunte que par grande nécessité, & qu’avec toute son industrie il ne soit pas en état de payer aucun intérêt, la charité veut sans doute alors que le riche se contente de la restitution du capital, & quelquefois même qu’il le remette en tout ou en partie : mais si le pauvre emprunte pour faire des profits avantageux, je ne sache aucune raison pourquoi le riche ne pourroit pas exiger légitimement une petite partie du profit que fera celui à qui il fournit le moyen de gagner beaucoup ? Il n’est pas rare de voir dans le commerce, des marchands peu aisés, devenir par le tems, & par leurs travaux, aussi riches, ou plus riches que ceux qui leur avoient prêté à intérêt le premier fond de leur trafic.

Enfin, si nous supposons qu’un pauvre prête de ses petits épargnes à un autre pauvre, leur indigence étant égale, le dernier peut-il exiger avec la moindre apparence de raison, que le premier, pour lui faire plaisir, s’incommode, ou perde le profit qu’il pourroit tirer de l’usage de son argent ?

C’en est assez pour justifier que le prêt à intérêt lorsqu’il n’est accompagné ni d’extorsion, ni de violation des lois de la charité, ni d’aucun autre abus, n’est pas moins innocent que tout autre contrat, & principalement celui de louage, dont on peut dire qu’il est une espece, à considerer ce qu’il y a de principal dans l’un & dans l’autre. Cette idée n’empêche pourtant pas, qu’à cause des abus qu’en peuvent faire les gens avides de gain, ou par d’autres raisons politiques, un souverain n’ait droit de défendre de prêter absolument à intérêt, ou de ne le permettre que d’une certaine maniere ; c’est ainsi que les lois en usent à l’égard de plusieurs autres choses légitimes en elles-mêmes.

Le législateur des Hébreux leur défendit de se prêter entre citoyen à intérêt, mais il ne défendit point ce contrat vis-à-vis des étrangers, & c’est une preuve qu’il ne le regardoit pas comme mauvais de sa nature. Ainsi, tant que les lois politiques de Moïse ont subsisté, aucun homme de bien chez les Juifs ne pouvoit prendre aucun intérêt de quelqu’un de sa nation, parce que dans chaque état, il est d’un homme de bien d’observer les lois civiles, qui défendent même des choses indifférentes, sur-tout quand ces lois sont établies par une autorité publique. Voilà tout ce qu’on peut inférer des passages d’Ezéchiel, c. xviij. 13. & c. xxij. 12. & des Ps. xv. 15. 5. qu’on cite quelquefois contre le prêt à intérêt.

Pour les paroles de J. C. qu’on objecte encore ; prêtez sans en rien espérer, Luc vj. v. 34. 35. elles ne regardent point du tout le prêt à intérêt, comme on le prouve par la raison que notre sauveur rend de son précepte ; savoir, que les pêcheurs même prêtent aux pécheurs, dans la vue de recevoir la pareille. Or le prêt à intérêt ne consiste pas certainement à recevoir seulement la pareille, mais quelque chose de plus ; il est donc clair comme le jour, qu’il s’agit là d’un prêt simple, fait à ceux qui en ont besoin, sans aucun rapport à la maniere & aux conditions du prêt. Notre Seigneur parle de ceux qui ne prêtent qu’à des gens qui savent être en état de leur prêter à leur tour, quand ils en auront besoin, ou de leur rendre quelqu’autre service ; car le mot de l’original, sans en rien espérer, ne se borne point au prêt, il comprend tout service auquel on peut s’attendre, en revanche de celui qu’on vient de rendre.

Jesus-Christ, qui recommande ici une bénéficence générale envers tous les hommes, amis ou ennemis, blâme dans cet exemple particulier toute vue d’intérêt qui porte à rendre service au prochain ; il veut qu’on fasse du bien à autrui, uniquement pour s’acquitter des devoirs de l’humanité, & sans aucun espoir de retour, parce qu’autrement, c’est une espece de commerce, & non de bienfait ; si vous prêtez à ceux de qui vous esperez de recevoir, c’est-à-dire, la pareille, comme il paroît par les paroles suivantes, qui répondent à celles-ci ; quel gré vous en saura-t-on, puisque les gens de mauvaise vie prêtent aux gens de mauvaise vie, pour en recevoir du retour ? En tout cela, Notre Seigneur applique la maxime qu’il vient de donner : ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le pour eux : le fameux casuiste Bannès, ij. 2. quæst. 78. art. 1. dubit. 1. avoue que l’explication différente qu’on a donnée aux paroles de J. C. ne tire sa force que de l’autorité des papes & des conciles, qui se sont abusés dans leur interprétation.

Il n’y a donc rien dans ce passage qui tende à condamner le prêt à intérêt, dont la nature ni n’empêche qu’il puisse être un service, & un service considérable, ni ne demande pas toujours, lorsqu’il est tel, qu’on exige rien au-delà de ce qu’on prête. Ce sont les circonstances & la situation respective des deux parties qui déterminent sur quel pié on peut prêter, sans manquer aux devoirs de la justice, ni à ceux de la charité : on peut donner gratuitement bien des choses à certaines personnes, ou les leur vendre sans injustice.

Les lois civiles & les lois ecclésiastiques ne font rien pour décider la question de la légitimité du prêt à usure. La soumission que doivent à ces lois ceux qui sont dans des lieux où ils en dépendent ne rend pas le prêt à usure criminel partout ailleurs. Les papes eux-mêmes approuvent tous les jours des contrats visiblement usuraires, & auxquels il ne manque que le nom ; ils auroient grand tort de les permettre, si le prêt à intérêt étoit contraire aux loix divines, aux ecclésiastiques & à la loi naturelle.

Je ne vois pas même que dès les premiers siecles de l’église les lois civiles, aussi-bien que les lois ecclésiastiques aient défendu l’usure à toutes sortes de personnes, clercs ou laïques. Tous les empereurs chrétiens, avant & après Justinien, l’ont hautement permise, & n’ont fait qu’en regler la maniere selon les tems. Basile le macédonien fut le seul depuis Justinien, qui défendit absolument de prêter à intérêt, mais sa défense eut si peu de succès, que son fils & successeur Léon, surnommé le philosophe, fut obligé de remettre les choses sur l’ancien pié.

On objecte encore contre le prêt à intérêt, que la loi naturelle ordonne de ne pas faire aux autres ce qu’on ne voudroit pas qu’on nous fît ; donc elle défend l’usure. La maxime en elle-même est très-véritable, mais son application n’est pas juste. Les abus du prêt à usure, quels qu’ils soient, ne prouvent point que la chose qu’on ne voudroit pas que les autres fissent à notre égard soit mauvaise, à moins qu’on ne montre évidemment que l’abus est inséparable de la nature de cette chose. Si l’on infere que le prêt à intérêt est mauvais en lui-même, de ce que chacun seroit bien aise d’emprunter de l’argent sans intérêt, il faudra poser pour regle générale, que chacun est obligé de procurer aux autres tout ce qui les accommodera, au préjudice de son propre avantage, & du droit qu’il a sur son propre bien, par cette seule raison, qu’il souhaiteroit qu’on en usât ainsi envers lui. Or ce principe se détruiroit lui-même ; car comme il devroit être pour les uns, aussi-bien que pour les autres, celui dont on souhaiteroit d’emprunter de l’argent sans intérêt, diroit, avec raison, que si l’emprunteur étoit à sa place, il ne voudroit pas qu’on le privât de l’usage de son argent, & des risques qu’il court en le prêtant, sans être dédommagé par quelque petit profit, & qu’ainsi, selon sa propre maxime, il ne doit point exiger qu’on lui prête gratuitement. On ne veut pas que le contrat de louage soit contraire à la loi naturelle, mais par le raisonnement qu’on fait contre les autres contrats, il seroit impossible que le contrat à louage fût légitime.

Un homme, par exemple, qui n’a point de maison, souhaiteroit sans doute, de trouver quelqu’un qui lui en fournît une pour rien, autant que celui qui a besoin d’argent voudroit trouver à en emprunter sans intérêt. Et au fond, quelle différence y a-t-il entre le prêt à intérêt & le contrat de louage, si ce n’est que dans le dernier, on stipule une certaine somme pour l’usage d’une chose en espece, qui doit être rendue de même, au lieu que dans l’autre, on stipule quelque chose pour l’usage d’une somme d’argent, que l’on permet au débiteur d’employer comme il voudra, à la charge de nous en rendre une pareille : s’il y avoit quelqu’injustice dans la derniere convention, je trouve qu’il y en auroit encore plus dans la premiere, parce que celui qui exige un salaire pour l’usage de sa maison, par exemple, court beaucoup moins de risque de perdre son bien, pour faire plaisir au locataire, que celui qui prête de l’argent à intérêt ne court risque de perdre le sien, pour faire plaisir au débiteur.

Mais voici le vrai sens de la maxime de l’évangile : J. C. veut que nous tâchions de faire envers les autres ce que la raison nous dit que nous pourrions nous-mêmes exiger des autres sans injustice. Cet excellent précepte est fondé sur ce que la plûpart du tems nous voyons mieux ce qui est juste, lorsqu’il n’y a rien à perdre pour nous ; l’amour propre nous faisant juger différemment de ce qui nous regarde, que de ce qui regarde les autres, car personne ne trouve légeres les injures qu’il a reçues… Ainsi, pour bien juger, il faut se mettre à la place des autres, & tenir pour équitable par rapport à eux ce que nous croirions l’être par rapport à nous-mêmes.

Tel est le véritable usage de cette regle, que les Juifs, avant Notre Seigneur, & surtout les payens, ont donné. Ce précepte suppose toujours les lumieres de la raison, qui, en faisant abstraction de notre intérêt particulier, nous découvrent ce que les hommes naturellement égaux peuvent exiger les uns des autres, selon l’équité naturelle, lorsqu’ils se trouvent dans les mêmes circonstances. Ainsi, il s’en faut bien que l’application dépende ici de tout ce que chacun peut souhaiter, comme y trouvant son avantage ; mais il resteroit encore à prouver, que le bien de la société humaine demande qu’on prête toujours de l’argent sans intérêt.

Rien de plus aisé que de répondre à toutes les autres objections de ceux qui condamnent absolument le prêt à usure. Le prêt à usage, disent-ils, est gratuit, donc le prêt à usure doit l’être aussi. Mais je dis au contraire, que comme on peut accorder à autrui l’usage d’une chose ou gratuitement, ou moyennant une certaine rente, d’où il résulte ou un contrat de prêt à usage, ou un contrat de louage, rien n’empêche aussi qu’on ne prête de l’argent ou sans intérêt, ou à intérêt. Que si l’on s’opiniâtre à vouloir que tout prêt, proprement ainsi nommé, soit gratuit, il ne s’agira plus que de donner un autre nom au contrat dans lequel un créancier stipule quelqu’intérêt pour l’argent qu’il prête, mais il ne s’ensuivra point de-là que cette sorte de contrat ait par lui-même rien d’illicite.

C’est encore vainement qu’on objecte que la monnoie étant de sa nature une chose stérile, & qui ne sert de rien aux besoins de la vie, comme font, par exemple, les habits, les bâtimens, les bêtes de somme ; on ne doit rien exiger pour l’usage d’un argent prêté : je réponds à cette objection, que quoiqu’une piece de monnoie n’en produise pas par elle-même physiquement une autre semblable, néanmoins depuis que l’on a attaché à la monnoie un prix éminent, l’industrie humaine rend l’argent très-fécond, puisqu’il sert à acquérir bien des choses qui produisent ou des fruits naturels, ou des fruits civils ; & c’est au rang de ce dernier qu’il faut mettre les intérêts qu’un débiteur paye à son créancier.

On replique, qu’à la vérité le débiteur trouve moyen de faire valoir l’argent qu’il a reçu, mais que c’est son industrie qui le rend fertile entre ses mains, d’où l’on conclut qu’il doit seul en profiter ; mais l’industrie n’est pas la seule cause du profit qui revient de l’argent. Comme l’argent sans industrie n’apporteroit point de profit, l’industrie sans argent n’en produiroit pas davantage. Il est donc juste d’imputer une partie de ce profit à l’argent, & une autre à l’industrie de celui qui le fait valoir : c’est ce que l’on voit dans quelques contrats de louage. Un champ ne rapporte rien s’il n’est cultivé. Des outils qu’on loue à un artisan ne feront rien, non-seulement s’il ne s’en sert, mais encore s’il ne sait l’art de s’en servir. Tout cela pourtant n’empêche pas qu’on ne puisse se faire payer & les fruits de ce champ, & l’usage de ces outils. Pourquoi donc ne seroit-il pas permis d’en user de même à l’égard de l’argent, & d’autres choses semblables ?

Après avoir résolu toutes les objections, il s’agit de conclure ; mais pour ne rien obmettre, je dois encore observer qu’en fait d’usure, c’est-à-dire, d’intérêt légitime d’argent prêté, il ne faut jamais perdre de vue ce que demande la justice proprement dite, & ce que demande l’humanité ou la charité. Selon les régles de la justice, d’où dépend le droit que chacun a sur son propre bien, il est libre à chacun d’en accorder, ou d’en refuser l’usage à autrui, & de ne l’accorder qu’à telles conditions que bon lui semble. Enfin, lors même qu’il est obligé de l’accorder d’une certaine maniere par quelque motif d’humanité, il n’en demeure pas moins libre d’en gratifier l’un, & de refuser le même service à un autre. Les régles de la charité éclairée le dirigent dans ses préférences.

En un mot, de quelque côté qu’on considere le prêt à intérêt, l’on trouvera qu’il ne renferme rien qui répugne au christianisme, & au droit naturel. Je n’en veux pour preuve que ce raisonnement bien simple, par lequel je finis : celui qui prête de l’argent à un autre, ou y perd en ce que s’il ne l’avoit pas prêté, il auroit pu en tirer du profit, ou il n’y perd rien. Dans le premier cas, pourquoi seroit-il toujours obligé indispensablement à préferer l’avantage du débiteur au sien propre ? Dans l’autre cas, il n’est pas plus obligé par cette seule considération, de prêter gratuitement son bien, qu’un homme qui a deux maisons, dont l’une lui est inutile, n’est tenu d’y loger un ami, sans exiger de lui aucun loyer. (Le Chevalier de Jaucourt.)

Prêt a consomption, (Droit naturel.) en latin mutut datio ; contrat par lequel nous donnons à quelqu’un une chose susceptible de remplacement, à la charge de nous rendre dans un certain tems autant qu’il a reçu de la même espece, & de pareille qualité. Mutui datio, dit le droit romain, in iis rebus consistit, quæ pondere, numero, mensurâ constant : veluti vino, oleo, frumento, pecuniâ numeratâ, oere, argento, auro, quas res, aut numerando, aut metiendo, aut adpendendo, in hoc damus, ut accipientium fiant. Et quoniam nobis non eadem res, sed aliæ ejusdem naturæ, & qualitatis redduntur : inde etiam mutuum appellatum est, quia ita à me tibi datur, ut ex meo tuum fiat. Instit. lib. III. tit. 15.

Les choses que l’on prête à consomption, sont dites susceptibles de remplacement, parce que chacune tient lieu de toute autre semblable, ensorte que quiconque reçoit autant qu’il avoit donné, de la même espece, & de pareille qualité est censé recouvrer la même chose précisément ; tel est l’argent monnoyé prêté, l’or massif, & les autres métaux non-travaillés, le blé, le vin, le sel, l’huile, la laine, le pain.

Les choses qui entrent dans le prêt à consomption, se donnent au poids, au nombre & à la mesure qui servent à déterminer & spécifier ce qu’il faut rendre ; & c’est pour cela qu’on les désigne par le nom de quelque quantité, au lieu que les autres sont appellées des choses en espece : on dit, par exemple, je vous prête mille écus, trois mille livres de fer, vingt boisseaux de blé, dix muids de vin, cent mesures d’huile.

Le caractere propre des choses susceptibles de remplacement, est qu’elles se consument par l’usage. Or, il y a deux sortes de consomption, l’une naturelle, & l’autre civile. La consomption naturelle a lieu ou en matiere de choses qui périssent d’abord par l’usage, comme celles qui se mangent ou qui se boivent, ou en matiere de choses, qui sont d’ailleurs sujettes à se gâter aisément, quand même on n’y toucheroit pas, tels que sont les fruits des arbres, &c. car pour celles qui s’usent insensiblement à mesure qu’on s’en sert, mais qui ne périssent pas tout-à-fait comme les habits, la vaisselle de terre, &c. elles n’appartiennent point ici.

La consomption civile a lieu dans les choses dont l’usage consiste en ce qu’on les aliene, quoiqu’en elles-mêmes, elles subsistent toujours. Tel est non seulement l’argent monnoyé, mais encore tout ce que l’on troque, comme aussi ce que l’on donne pour être employé à bâtir, ou pour entrer dans toute autre composition, ou dans tout autre ouvrage. Sur ce pié-là, il y a deux sortes de choses susceptibles de remplacement, les unes qui sont telles de leur nature, & invariablement ; les autres qui dépendent de la volonté arbitraire des hommes, & d’une destination variable. Les premieres sont celles dont l’usage ordinaire consiste dans leur consomption ou naturelle, ou civile. Je dis l’usage ordinaire, car quoique l’on puisse quelquefois prêter, par exemple, une somme d’argent, simplement pour la forme, ou pour la parade, & une poutre pour appuyer un échaffaudage, cependant, comme cela est rare, on n’y a aucun égard en matiere de lois, qui roulent sur ce qui arrive ordinairement.

L’autre classe de choses susceptibles de remplacement, renferme celles qui, quoiqu’on puisse s’en servir & les prêter sans qu’elles se consument, sont souvent destinées à être vendues, ou à entrer dans le commerce, ensorte que, selon la destination de celui de qui on les emprunte, c’est tantôt un prêt à consomption, & tantôt un prêt à usage. Lors, par exemple, qu’un homme qui a une bibliothèque pour son usage me prête un livre qui lui est précieux, par des notes manuscrites, ou autres raisons particulieres, il entend, que je lui rende le même exemplaire ; de sorte que, quand je voudrois lui en donner un autre aussi bien conditionné, il n’est pas obligé ordinairement de s’en contenter. Mais, si celui de qui j’ai emprunté un livre est marchand libraire, ou fait trafic de livres, il suffit que je lui rende un autre exemplaire aussi bien conditionné, parce que, comme il ne gardoit ce livre que pour le vendre, il lui doit être indifférent, que je lui rende l’exemplaire même qu’il m’a donné, ou un autre semblable.

Il en est de même des marchandises, hormis de celles qui sont extrèmement rares, ou travaillées avec beaucoup d’art, comme certaines drogues peu communes, une montre, des instrumens de musique, de mathématiques, une pompe pneumatique, ou autres machines à faire des expériences, &c. car il est bien difficile d’en trouver qui soient précisément de même qualité & de même bonté, ensorte qu’elles puissent tenir lieu de telle ou telle que l’on a empruntée.

On prête toutes ces choses gratuitement, ou en stipulant du débiteur un certain profit, qui n’a lieu communément que pour l’argent monnoyé, à l’égard duquel le prêt non gratuit se nomme prêt à usage ou prêt à intérêt. Voyez Prêt à intérêt. Droit naturel, civil & religion. (D. J.)

Prêt a usage, (Droit naturel.) en latin commodatum, contrat bienfaisant, par lequel on accorde à autrui gratuitement l’usage d’une chose qui nous appartient. Le droit romain définit ce contrat en ces mots : Commodatum propriè intelligitur, si nullâ macede acceptâ, vel inconstitutâ, res tibi utenda data est.

Voici en général les regles de ce contrat.

1°. On doit garder & entretenir soigneusement la chose empruntée. De quelque maniere qu’on ait entre les mains le bien d’autrui, on est obligé par le droit naturel & indépendamment des lois civiles à en prendre tout le soin dont on est capable, c’est-à-dire comme des choses qui nous appartiennent & que nous affectionnons. Lorsqu’on a porté jusques-là l’attention & la diligence, c’est tout ce que peuvent demander les intérêts, à-moins qu’on ne se soit clairement engagé à quelque chose de plus. Que si la conservation de notre propre bien se trouve en concurrence avec celle du bien d’autrui, ensorte qu’on ne puisse point vaquer en même-tems à l’un & à l’autre, il est naturel que le premier emporte la balance, chacun pouvant, toutes choses égales, penser à soi plutôt qu’aux autres, de sorte que cet ordre ne doit être renversé que pour satisfaire à un engagement exprès ou tacite.

Le but & la nature du prêt à usage considéré en lui-même ne demande rien de plus que de maintenir la chose prêtée avec tout le soin possible, quand même d’autres personnes plus propres ou plus avisées auroient pû la manier plus délicatement, & la mieux conserver ; mais, dans ce prêt, il se trouve ordinairement une convention tacite, par laquelle on s’engage non-seulement à dédommager le propriétaire au cas que la chose empruntée se trouve gâtée, mais encore à la payer, si elle vient à périr entre nos mains, même sans qu’il y ait de notre faute, pourvu qu’elle eût pû se conserver entre les mains de celui qui l’a prêtée. En effet, peu de gens voudroient prêter sans cette condition, sur-tout lorsqu’ils seroient incommodés d’une telle perte.

2°. Il ne faut pas se servir de la chose empruntée à d’autres usages, ni plus long-tems que le propriétaire ne l’a permis.

3°. Il faut la rendre en son entier, & telle qu’on l’a reçue, ou du-moins sans autre détérioration que celle qui est un effet inévitable de l’usage ordinaire.

4°. Si, après avoir emprunté une chose pour un certain tems, le propriétaire vient à en avoir besoin lui-même avant le terme convenu, par un accident auquel on n’avoit point pensé dans le tems de l’accord, on doit la rendre sans différer à la premiere réquisition.

5°. Lorsque la chose prêtée vient à périr par quelque cas fortuit & imprévu sans qu’il y ait de la faute de l’emprunteur, celui-ci n’est pas obligé de la payer, dès qu’il y a lieu de croire qu’elle seroit également périe entre le mains du propriétaire ; mais si elle eût pû se conserver, il est juste d’en restituer la valeur, autrement il en couteroit trop cher à celui qui s’est privé soi-même de son bien pour faire plaisir à une personne.

Tout ce à quoi est tenu celui qui a prêté une chose, c’est de rembourser les dépenses utiles ou nécessaires que l’emprunteur peut avoir faites pour l’entretenir, au-delà de celles que demande absolument l’usage ordinaire.

Il faut lire ici les notes de M. Barbeyrac sur le droit de la nature & des gens de Puffendorf. (D. J.)

Prêt gratuit, (Morale.) c’est celui dont on ne retire ni intérêt, ni autre chose qui en puisse tenir lieu, & qui ne se fait que par pure générosité & pour faire plaisir à celui à qui on prête ; en un mot, c’est le prêt évangélique qui doit se faire gratuitement & sans en rien espérer.

Prêt, (Histoire de la maison du roi.) on appelle prêt chez le roi, l’essai que le gentilhomme servant qui est de jour pour le prêt, fait faire au chef de gobelet du pain, du sel, des serviettes, de la cuillere, de la fourchette, du couteau & des cure-dents qui doivent servir à Sa Majesté, ce qu’il fait avec un petit morceau de pain dont il touche toutes ces choses, & le donne ensuite à manger au chef du gobelet ; cela s’appelle le prêt. La table sur laquelle on fait cet essai se nomme la table du prêt, & est gardée par le gentilhomme servant. (D. J.)

Prêt ou Paie, (Art milit.) est le payement de solde que le roi fait faire d’avance de cinq jours en cinq jours à ses troupes. On dit toucher le prêt, recevoir le prêt, &c.

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Étymologie de « prêt »

Bourg. proo, au féminin prote ; prov. prest, pret ; cat. prest ; espagn. port. et ital. presto ; du lat. præstus, qui se trouve dans des inscriptions et dans la loi salique, et qui est dans la langue classique sous la forme invariable et adverbiale, præsto esse ; il est formé de præ et stare.

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(Adjectif) Du bas latin praestus, dérivé de l'adverbe latin classique praesto (« sous la main », « ici présent », « à la disposition »).
(Nom) Déverbal sans suffixe de prêter.
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Phonétique du mot « prêt »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
prêt prɛ

Fréquence d'apparition du mot « prêt » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « prêt »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « prêt »

  • Femme qui prête l'oreille prêtera bientôt autre chose.
    Paul-Louis Courier — Correspondance
  • Un dessin réussi prête à rire. Quand il est vraiment réussi, il prête à penser. S’il prête à rire et à penser, alors c’est un excellent dessin.
    Tignous — interview au site de l'Ambassade de France en Colombie, mars 2010
  • Pour contrer les effets de la crise, le gouvernement a mis en place plusieurs dispositifs afin d'aider les entreprises, plombées par une chute brutale de leurs revenus. L'un d'eux consiste à garantir les prêts accordés par les banques pour faire face aux besoins de trésorerie. Les entreprises peuvent emprunter jusqu'à 25 % de leur chiffre d'affaires hors taxes 2019. Un montant pour lequel l'Etat se porte garant à hauteur de 90 % dans la plupart des cas - les 10 % restant étant supportés par la banque prêteuse.
    Les Echos — Coronavirus : le prêt garanti par l'Etat en quatre questions | Les Echos
  • Il faut savoir se prêter au rêve lorsque le rêve se prête à nous.
    Albert Camus — Noces
  • Si les prêts servaient à quelque chose, on prêterait aussi les femmes.
    Proverbe slovène
  • Fort de son expertise dans le domaine du véhicule électrique, Tesla serait prêt à proposer ses logiciels, batteries et groupes motopropulseurs à d’autres constructeurs. Cette déclaration faite par Elon Musk concerne notamment l’Autopilot.
    Tesla serait prêt à proposer ses logiciels, batteries et groupes motopropulseurs à d’autres constructeurs - Les Numériques
  • Les hommes doivent souffrir leur départ comme leur venue ici-bas ; le tout est d'être prêt.
    William Shakespeare — Le Roi Lear, V, 2, Edgar King Lear, V, 2, Edgar
  • Les conditions de votre prêt immobilier (le taux d'emprunt, le montant des remboursements, la durée de remboursement) dépendent en partie de votre apport personnel. Avec un apport personnel élevé, vous obtiendrez un taux d'emprunt plus bas et des frais de dossier réduits. Généralement, l'apport personnel exigé est au minimum de 10 % du montant emprunté.
    Boursorama — Obtenir un prêt immobilier sans apport: c'est possible - Boursorama
  • Qui donne aux pauvres prête à Dieu. Qui donne à l'Etat prête à rire.
    Tristan Bernard
  • Je suis tout prêt à croire en Dieu. Mais je pense que Dieu n’est pas tout-à-fait prêt à croire en moi.
    Philippe Geluck — Le chat
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Images d'illustration du mot « prêt »

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Traductions du mot « prêt »

Langue Traduction
Anglais loan
Espagnol listo
Italien pronto
Allemand bereit
Chinois 准备
Arabe جاهز
Portugais pronto
Russe готов
Japonais 準備ができて
Basque prest
Corse pronta
Source : Google Translate API

Antonymes de « prêt »

Combien de points fait le mot prêt au Scrabble ?

Nombre de points du mot prêt au scrabble : 5 points

Prêt

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