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Goutte

Variantes Singulier Pluriel
Féminin goutte gouttes

Définitions de « goutte »

Trésor de la Langue Française informatisé

GOUTTE1, subst. fém.

A. − Très petite quantité de liquide de forme arrondie. Grosse, large, petite goutte; les gouttes jaillissent, perlent, tombent. La forme simple par excellence, en vertu même de cette loi d'attraction, est la forme sphérique; c'est celle que prend une goutte d'eau, une goutte de mercure livrée à elle-même (Flammarion, Astron. pop.,1880, p. 94).
1. [Le subst. suivi d'un adj. ou d'un compl. déterminatif désigne de l'eau] Gouttes claires, transparentes; gouttes denses, rapides, torrentielles; goutte de rosée; pleuvoir à grosses gouttes. Des gouttes de pluie faisaient sur la robe du fleuve des cercles, que le courant entraînait en dansant (Rolland, J.-Chr., Aube, 1904, p. 69).Modulation d'une goutte d'eau qui, de seconde en seconde, tombait du robinet avec un son cristallin (Martin du G., Thib., Été 14, 1936, p. 115).V. aventure ex. 33 :
1. Sur la main de Cénabre, une goutte de pluie tomba, chaude, pesante, parfumée comme une goutte de nard, et qui était l'essence même du jour évanoui. Bernanos, Joie,1929, p. 714.
a) Goutte (d'eau, de pluie). Ne pas avoir une seule goutte de pluie pendant un séjour; il n'a pas plu une seule goutte. Écrivez-moi un petit mot. La vue seule de votre chère écriture sera comme la goutte d'eau dans le désert (Flaub., Corresp.,1874, p. 167).La terre souffrait d'une terrible sécheresse, pas une goutte d'eau n'était tombée depuis six semaines (Zola, Terre,1887, p. 204).
Fam. et p. plaisant. Passer entre les gouttes. Se faufiler sous une averse. Au fig. Se sortir d'une situation difficile, se sortir de difficultés (cf. Littré, Guérin 1892). L'heure [minuit] où l'on cherche désespérément à ne pas se faire prendre, à passer entre les gouttes. Minuit, c'est une heure déroutante (J.-F. Six, Le Courage de l'espérance, Paris, Seuil, 1978, p. 33).
b) Loc. proverbiales
C'est une goutte d'eau dans la mer (cf. eau A 2 a). En partic. [En matière d'argent] . Je sais aussi (...) que pour lui qui est si riche, c'est une goutte d'eau dans la mer... et (...) je ne peux pas te dissimuler qu'(...) il ne m'en reste pas lourd de cet argent (Anouilh, Sauv.,1938, II, p. 179).
C'est la goutte (d'eau) qui fait déborder le vase. Un petit fait ajouté à d'autres déclenche une réaction violente (cf. déborder I A 2) :
2. Chaque journée tombait comme une goutte d'eau. Chaque goutte semblait prête à faire déborder le vase. Mais le vase grandissait en même temps que son contenu. C'était maintenant une jarre immense, une de ces jarres que les nègres du Tchad emploient pour enterrer leurs morts. H. Bazin, Tête contre murs,1949, p. 350.
[En parlant de pers.] ,,Se ressembler comme deux gouttes d'eau`` (Ac. 1798-1932). ,,Se ressembler parfaitement`` (Ac. 1798-1932). Ressembler à qqn comme deux gouttes d'eau. Je ne sais pas comment il peut la [sa fille] renier, elle lui ressemble comme deux gouttes d'eau (Balzac, Goriot,1835, p. 61).
Rem. Littré et certains grammairiens ont critiqué cette seconde tournure qui est de fait justifiée par une ellipse et illustrée par de nombreux ex. d'aut. (cf. Dupré 1972).
c) P. métaph. [Portant sur la transparence, le son cristallin de la goutte d'eau] et au fig. Goutte de lumière; gouttes nacrées des perles. La goutte de clarté d'une veilleuse (Zola, Assommoir,1877, p. 431).De la musique, tout m'émeut, des larges notes aux petites gouttes sonores du piano (Renard, Journal,1905, p. 1023) :
3. ... dans les marsaules du talus, la fauvette babillarde jette deux ou trois notes soudaines, irrésistibles, gouttes de joie limpide qui tintent au cœur de la journée. Genevoix, Rroû,1931, p. 144.
d) Ne voir/entendre goutte. Ne voir, n'entendre rien. Il fait bien obscur ici, je ne vois goutte, je n'y vois goutte (Ac. 1835, 1878); v. aussi goutte2, A, Proverbes).
N'y voir goutte. Ne rien voir du tout. Vieux, boiteux, n'y voyant goutte, probablement un peu sourd (Hugo, Misér., t. 1, 1862, p. 635).Mais qu'il fait sombre! On n'y voit goutte... Lève donc un peut l'abat-jour (Géraldy, Toi et moi,1913, p. 28).
Au fig. N'entendre goutte aux affaires. Ils ne comprennent goutte à ma conduite (Flaub., Corresp.,1873, p. 111).Charmes, dont il s'agit, divise ses lecteurs. On sait que les uns n'y voient goutte; qu'il n'est que trop clair pour les autres (Valéry, Variété III,1936, p. 71) :
4. Christophe n'y voyait goutte [au théâtre]; il confondait tout, prenait un personnage pour un autre, tirait son grand-père par la manche, pour lui poser des questions saugrenues, qui prouvaient qu'il n'avait rien compris. Rolland, J.-Chr., Aube, 1904, p. 73.
Rem. Dans l'anc. langue, goutte était suivi d'un partitif. Je n'ai goutte d'argent. Je n'ai pas du tout d'argent (cf. Dupré 1972). On retrouve trace de cette constr. arch. chez Fabre (Chevrier, 1867, p. 291) : Mon oncle chantait, ne se faisant goutte de mauvais sang en nulle circonstance de sa vie.
2. [Le subst. compl. de nom désigne un liquide organique] Goutte de sperme, d'urine. Elle s'était égratignée à des épines, et sur la fine peau une goutte de sang perlait (Ramuz, A. Pache,1911, p. 215).En vain, d'une langue inquiète, je cherchais, au fond de ma bouche, une introuvable goutte de salive (Duhamel, Jard. bêtes sauv.,1934, p. 47) :
5. Il marchait avec beaucoup de dignité, sans un geste inutile. Quelques gouttes de sueur perlaient sur son front, mais il ne les essuyait pas. Camus, Étranger,1942, p. 1134.
Expressions
Suer à grosses gouttes. Suer abondamment. M. Ouine (...) suait à grosses gouttes, car la chaleur lui a toujours été contraire (Bernanos, M. Ouine,1943, p. 1535).
Avoir la goutte au nez (fam.). Expr. synon. avoir le nez qui coule.Le vieux qui, au dessert, la goutte au nez, vient tendre la main (Renard, Journal,1906, p. 1065).
Goutte militaire (vieilli et pop.). Blennorragie chronique se caractérisant par une goutte au méat urinaire (cf. Littré). Son danger social, car la « goutte militaire » est l'agent ordinaire de la contamination des jeunes mariées (Hudelo dsNouv. Traité Méd. fasc. 1, 1926, p. 507).
Avoir une goutte de sang royal, de sang bleu, de sang juif. Avoir une origine noble, juive :
6. ... il n'est pas une petite fille assise aux bancs du pensionnat qui ne porte en elle une goutte de ce sang éternel et royal qui fit les grandes princesses d'autrefois. Mallarmé, Dern. mode,1874, p. 803.
Verser pour qqn sa dernière goutte de sang. Aller jusqu'au sacrifice total. Je répandrai jusqu'à la dernière goutte de mon sang pour... (Ac. 1835-1932). Tant qu'il me restera une goutte de sang dans les veines je vous défendrai (Ac. 1835-1932. Je me suis pris à l'aimer... ardemment, passionnément (...) prêt à verser pour elle ma dernière goutte de sang (Ponson du Terr., Rocambole, t. 3, 1859, p. 72).
P. hyperb. N'avoir plus une goutte de sang dans les veines, sur le visage. Être saisi de frayeur, d'émotion et en devenir très pâle. P. ext. Être sans courage. Je n'avais plus une goutte de sang sur le visage, et mes jambes tremblaient sous moi (Bosco, Mas Théot.,1945, p. 24).
3. [Le subst. désigne un liquide quelconque] Goutte d'acide, d'alcool, d'huile, de mercure, de miel, de plomb fondu, de suif. Comme dans une pinte d'eau, si vous mettez une goutte d'indigo, l'eau deviendra bleuâtre; une goutte d'encre, elle deviendra grise; si une goutte de sirop, sucrée; si de vinaigre, âcre (Karr, Sous tilleuls,1832, p. 106) :
7. Des hommes (...) soufflaient dans de longues cannes au bout desquelles ils venaient de cueillir une large goutte d'or qui s'enflait tandis qu'ils faisaient tourner la tige de métal entre les deux paumes (...), prenait la forme d'un cylindre, devenait d'un vert transparent, glauque, en refroidissant, gonflé de bulles comme une eau morte. Vialar, Pt jour,1947, p. 182.
PHYS. Point de goutte. ,,Température à laquelle une substance, passant de l'état solide à l'état liquide (...), laisse tomber une goutte de l'extrémité de l'appareil utilisé`` (Grand. 1962).
Fréq. [Désignant une boisson] Goutte de lait; exprimer quelques gouttes d'un citron; ranimer qqn avec quelques gouttes de liqueur. Elle reprenait ma mère sur un grain de sel, une goutte de vinaigre, un atome de saindoux, un soupçon de farine (Duhamel, Notaire Havre,1933, p. 181).V. aussi appréciateur ex. 2 :
8. Chacun perdait l'esprit, quand la plus âgée des bonnes sœurs, soutenant la tête de la malade, glissa entre ses lèvres la timbale de Boule de suif et lui fit avaler quelques gouttes de vin. Maupass., Contes et nouv., t. 2, Boule de suif, 1880, p. 127.
P. métaph. V. aguet ex. 20.
La dernière goutte. Boire, extraire jusqu'à la dernière goutte. Boire, extraire jusqu'au bout, totalement. Boire son café, un verre de vin jusqu'à la dernière goutte. Alors l'indienne tira de son sein le flacon (...) le porta à ses lèvres et but jusqu'à la dernière goutte (Ponson du Terr., Rocambole, t. 2, 1859, p. 436).Au fig. Il pressure avec méthode le fait « mariage » pour en extraire jusqu'à la dernière goutte ce qu'il contient de poésie vraie et fausse (Montherl., Lépreuses,1939, p. 1405).
[La dernière goutte (de la coupe, du calice) figurant le point extrême de l'amertume, de la douleur qu'on doit supporter] Il en est, en tout cas, une [douleur], qui a dû être pour lui la dernière goutte du calice à boire; l'on n'en connaît vraiment pas de plus amère (Huysmans, Oblat, t. 2, 1903, p. 59).
Faire goutte. [Le suj. désigne un sirop] Couler en formant des gouttes. (Ds Rob.).
En partic. Globule de médicament, qui se détache du bord du flacon légèrement incliné ou du compte-gouttes, et servant de dose. Compter les gouttes. On évalue la goutte à peu près au poids d'un grain (Ac.1798-1932).Lui donner vingt gouttes de laudanum dans un demi-verre d'eau (Zola, Joie de vivre,1884, p. 1087).
Au plur. Médicament actif qui s'administre par gouttes souvent diluées dans de l'eau. Mettre des gouttes dans l'œil, dans l'oreille. Gouttes d'Angleterre, gouttes d'Hoffman (Ac. 1835, 1878). Le médecin arriva et administra un calmant à la mode qu'on appelait des gouttes (Sand, Consuelo, t. 1, 1842-43, p. 173).Mon petit chéri sera bien mignon, bien raisonnable, il va se laisser mettre des gouttes dans le nez bien gentiment (Sartre, Mots,1964, p. 14).
Gouttes amères de Baumé (cf. Codex, 1908, p. 733), gouttes d'atropine (cf. Deschamps d'Avallon, Compendium pharm. prat., 1868, p. 855). Alcool de Lavande ammoniacal, ou Gouttes Anglaises Céphaliques (Code pharm.1821, p. 265).
4. Loc. adv. Goutte à goutte. Une goutte après l'autre. S'amasser, suinter, verser goutte à goutte; verser l'huile goutte à goutte dans une sauce. Au milieu s'élevoit un rocher d'où tomboit goutte à goutte une eau noirâtre, et le bruit foible et sourd des gouttes qui tomboient, étoit le seul bruit qu'on entendît (Lamennais, Paroles croyant,1834, p. 142) :
9. L'eau coulait goutte à goutte d'un chéneau invisible avec une plainte étrange, une sorte de tintement cristallin, pareil à l'appel du crapaud. C'était le seul bruit qui troublât le silence... Bernanos, Crime,1935, p. 804.
P. métaph. et au fig. Petit à petit :
10. En l'homme le savoir est nécessairement gradué, le pouvoir nécessairement rationné : l'homme rampe mètre par mètre, apprend goutte à goutte, acquiert par petites doses. Jankél., Je-ne-sais-quoi,1957, p. 247.
Emploi subst. Au collège d'Harcourt, il n'avait certes pas perdu son temps, mais il n'avait pas pu se faire à l'émiettement des matières, au goutte-à-goutte des leçons, à la pesante lenteur des maîtres (Bremond, Hist. sent. relig., t. 3, 1921, p. 306).
B. − P. ext.
1. Petite quantité de liquide, notamment de boisson. Ne jamais boire une goutte de vin. Il retourna chez lui, grognant : quand j'aurai bu une goutte de café noir et grignoté une croûte de pain, peut-être arriverai-je à me ressaisir (Huysmans, Oblat, t. 2, 1903, p. 38).Eh bien oui, dit Anne-Marie, nous boirions bien une goutte de lait chaud (Pourrat, Gaspard,1931, p. 178).
Goutte de lait. Organisme créé au xixesiècle dans le but de surveiller régulièrement les nourrissons et de leur assurer une distribution de lait; lieu où se déroulent les consultations. Mes enfants, votre père est à sa Goutte de lait, pour la consultation (Duhamel, Nuit St-Jean,1935, p. 66).
Pop. Donner la goutte. Donner une tétée, un biberon (cf. Rigaud, Dict. jargon paris., 1878, p. 179).
2. En partic. Petite quantité de boisson alcoolisée. Et ses yeux allumés encor d'un brin de fièvre Par la goutte de rhum bue en trinquant gaîment Avec moi, présage gentil d'un choc bien plus charmant (Verlaine, Œuvres compl., t. 2, Odes en son honn., 1893, p. 31).Absol. Petit verre d'eau-de-vie, de liqueur. Offrir, payer la goutte :
11. Plantée devant l'Assommoir, Gervaise songeait. Si elle avait eu deux sous, elle serait entrée boire la goutte. Peut-être qu'une goutte lui aurait coupé la faim. Ah! elle en avait bu des gouttes! Ça lui semblait bien bon tout de même. Zola, Assommoir,1877, p. 769.
Arg., vieilli. Boire la goutte. Se noyer. Au fig. ,,Subir une perte d'argent`` (Riv.-Car. 1969). Il avait bu la goutte avec le Panama (Bruant1901, p. 355).Arg. des comédiens. Boire la goutte. Être sifflé. Payer la goutte. ,,Siffler`` (Esn. 1966). V. aussi Richepin, Miseloque, 1893, p. 86.
3. VINIFICATION et FABRICATION DU CIDRE. ,,Première goutte, mère goutte, vin de goutte`` (Littré). ,,Le vin, le cidre qui coule de la cuve ou du pressoir sans qu'on ait pressuré le raisin, les pommes`` (Littré). C'était sa mère-goutte, le plus capiteux de sa récolte, boisson détestable, mais que le Berrichon préfère à tous les vins du monde (Sand, Meunier d'Angib.,1845, p. 350).
Rem. Une var. goutte-mère chez Huysmans dans un emploi métaph. : La luxure est la goutte-mère du démonisme (Là-bas, 1891, p. 149).
C. − P. anal.
1. Ce qui ressemble à une goutte, tache, petit objet. [Le bourreau] − Tu auras soin, Bechlie, d'enlever les gouttes de rouille qui ont délustré ma hache (Hugo, Han d'Isl.,1823, p. 454).
2. Spécialement
a) ARCHIT. ,,Motifs d'ornementation en forme de tronc de cône qui se trouvent dans l'ordre dorique à la base des triglyphes et à la partie inférieure des mutules`` (Lavedan 1964). Les gouttes de la corniche (Ac. 1835-1932); v. aussi Ch. Blanc, Gramm. arts dessin, 1876, p. 156).
b) FOND. ,,Petite partie tirée d'une fonte d'or ou d'argent qu'on remet à l'essayeur pour avoir le rapport du titre`` (Ac. 1835-1932); cf. Chesn. 1857).
c) JOAILL. Goutte d'eau. ,,Variété de topaze`` (Littré). Pierre précieuse ou semi-précieuse transparente taillée en forme de goutte et sertie sur une fine monture. Un diamant que les dames riches ne peuvent garder à l'oreille, c'est la goutte d'eau (Renard, Journal,1905, p. 956).Les pendants : style goutte d'eau. Montés sur métal coloris doré. Pour oreilles percées (Catal. La Redoute, automne-hiver 1979-80, p. 205).
d) MÉTALL. Gouttes froides. ,,Défaut de fonderie caractérisé par la présence, généralement près de la surface des moulages, de petites sphères métalliques de même composition que le métal de base, encastrées dans le métal`` (Bader-Th. 1962).
e) MÉCAN. Rivet en goutte de suif. ,,Suivant la forme de sa tête, le rivet est dit à tête en goutte de suif, à tête sphérique, à tête fraisée`` (Gorgeu, Machines-outils, 1928, p. 51).
f) MÉTÉOR. Goutte froide. ,,Masse d'air froid éloignée de son origine entourée de masses plus chaudes`` (George 1970, s.v. pression).
g) PAPET. Défaut du papier provenant de gouttes d'eau tombées sur la feuille encore en pâte; ce qui en a diminué l'épaisseur (Maire, Manuel biblioth.,1896, p. 341).
REM. 1.
Gougoutte, subst. fém.,synon. pop. (supra B 1).Quand Margot dégrafait son corsage Pour donner la gougoutte à son chat (G. Brassens, Poèmes et chansons, Brave Margot, Paris, Éd. Mus. 57, 1952).
2.
Goutiou, subst. masc.,région. Petite fontaine. Claude, au « goutiou » se lava les mains et le visage (Mauriac, Chair et sang,1920, p. 200).
3.
Goutté, -ée, adj.,hérald. Chargé de gouttes figurées (cf. Littré, Guérin 1892, Lar. 19eSuppl., Lar. 20e). Goutte d'argent, d'azur, d'or (J. Woodward, G. Burnett, A treatise on heraldry, Rutland, Tuttle, 1969, p. 114).
Prononc. et Orth. : [gut]. Ds Ac. 1694-1932. Homon. formes du verbe goûter. Étymol. et Hist. 1. Fin xes. gute « petite quantité de liquide qui prend une forme sphérique » (Passion, éd. d'A. S. Avalle, 128); 2. a) ca 1160 ne [veoir] gote « ne rien [voir] » (Enéas, 195 ds T.-L.), tour gén. employé avec les verbes veoir et oïr; b) fin xiies. d'abord utilisé dans des phrases négatives goute de + subst. « petite quantité de » (Prise Orange, éd. C. Régnier, 463); ca 1200 emploi adv. (Escoufle, 1183 ds T.-L.); 3. ca 1393 mère goute « vin qui coule de la cuve avant toute pression » (Ménagier II, 260, ibid.); 4. p. anal. 1568 archit. goutte (P. Delorme, Architecture, p. 149); 5. 1700 méd. goutte d'Angleterre (J. P. de Tournefort, in Mémoires de l'Académie royale des Sciences, Paris, 73 ds R. Ling. rom. t. 36, p. 228); 6. 1795 goutte « eau de vie » (Fauche-Borel ds ses Mémoires, Paris, 1825, t. 1, p. 303 ds R. Philol. fr. t. 24, p. 110). Du lat. gutta « goutte d'un liquide », « petite partie de » et terme d'architecture. Bbg. Le Pelley (R.). Le Vocab. de l'eau-de-vie. In : Colloque sur le Fr. parlé ds les Villages de Vignerons. Paris, 1977, pp. 89-96. - Yvon (H.). Les Expr. négatives ds la Queste del St Graal. Romania. 1959, t. 80, pp. 74-75; p. 77.

GOUTTE2, subst. fém.

A. − Gén. au sing. Maladie souvent héréditaire due à un excès d'acide urique dans l'organisme et caractérisée par des accès inflammatoires aigus très douloureux touchant principalement les articulations, notamment celles du gros orteil. Accès, crise de goutte; être pris d'une violente attaque de goutte. Goutte chaude, froide (Ac. 1798-1878); goutte vague (Ac. 1835, 1878). Des nœuds de goutte déformaient ses doigts disséqués par la maigreur (Hugo, Homme qui rit, t. 1, 1869, p. 76).V. aussi ankyloser ex. 2 :
Aujourd'hui, je suis vieux, mon Hélène (...). Je ne suis plus qu'un pauvre vieillard, mangé de goutte et de rhumatismes, criblé de douleurs et d'infirmités. Sandeau, Mllede La Seiglière,1848, p. 266.
Goutte remontée, rétrocédée ou métastatique. ,,Accidents viscéraux ou nerveux qui peuvent remplacer brusquement un accès de goutte articulaire à la suite d'un traitement énergique`` (Méd. Biol. t. 2 1971). Il est mort d'une goutte remontée (Ac.1798-1878).V. aussi Geoffroy, Méd. prat., 1800, p. 419.
Goutte abarticulaire, viscérale (Méd. Biol. t. 2 1971). Troubles viscéraux, nerveux, etc., observés chez les goutteux.
Goutte saturnine. ,,Manifestations articulaires du saturnisme rappelant celles de la goutte`` (Garnier-Del. 1978). Cette uricémie (...) peut aboutir à une variété de goutte (goutte saturnine) remarquable par sa tendance à envahir plusieurs jointures (Roger dsNouv. Traité Méd. fasc. 6, 1925, p. 54).
SYNT. Goutte articulaire aiguë (anton. goutte articulaire chronique); goutte nouée, rhumatismale, tophacée; être perclus de goutte; avoir la goutte aux pieds, aux genoux, aux mains.
Proverbes
La goutte vient de la goutte. ,,La goutte est causée par l'intempérance dans le boire`` (Littré).
N'avoir pas la goutte aux pieds. Être prêt à s'enfuir (d'apr. Littré).
Aux fièvres et à la goutte, les médecins ne voient goutte. (Ds Ac. Compl. 1842, Littré, Rob.).
Goutte tracassée est à demi pansée. L'exercice physique est recommandé aux goutteux (d'apr. Rob.).
B. − P. anal., vieilli. Goutte + adj. ou subst. en appos.Maladie que l'on attribuait à l'infiltration de gouttes d'humeur. Goutte migraine (Méd. Biol.t. 21971).
Goutte rose. Couperose (Littré-Robin 1865).
Goutte sciatique. Douleur siégeant le long du nerf sciatique (Ac. 1798-1878; v. aussi Balzac, Peau chagr., 1831, p. 232).
Goutte sereine. Paralysie du nerf optique entraînant la perte partielle ou totale de la vue. Synon. amaurose.Il a perdu tout d'un coup la vue par une goutte sereine (Ac.1798-1878).Êtes-vous né aveugle, ou êtes-vous aveugle par ... − Par accident, répondit-il vivement, une mauvaise goutte sereine (Balzac, Facino Cane,1836, p. 377).
REM.
Goutte-crampe, subst. fém.Synon. vieilli de crampe (cf. Ac. 1798-1878).
Prononc. et Orth. : [gut]. Ds Ac. dep. 1694. Homon. formes du verbe goûter. Étymol. et Hist. Ca 1170 male gote dans une formule d'imprécation (Béroul, Tristan, éd. E. Muret, 1916); ca 1200 goute (Auberee, éd. A. Ebeling, 167). De goutte1*, parce que cette maladie était attribuée à des gouttes d'humeur viciée.
STAT. Goutte1 et 2. Fréq. abs. littér. : 4 118. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 5 287, b) 8 121; xxes. : a) 6 841, b) 4 535.

Wiktionnaire

Adverbe - français

goutte \ɡut\ invariable

  1. (Vieilli) Pas, rien. Utilisé avec ne pour négation.
    • Il hochait la tête comme pour approuver bien qu’il n’entendît que des bouts de phrases auxquels il ne comprenait goutte. — (Ernest Pérochon, Nêne, 1920)
    • Mais à sa grande surprise, la liste de présence dont elle se sert tous les jours est couverte de signes mystérieux auxquels elle ne comprend goutte. — (Pierre Barthelemy, Passeur de sciences, 2014)
    • N’y comprenant goutte et sentant mon cœur battre douloureusement, je rentre chez moi. — (Anton Tchekhov, Fragments du journal d’un irascible, traduction Anne Coldefy-Faucard, Librio 698, 2004, E.J.L.)
    • On retrouve là cette combinaison bien connue d’arnaque et de faux-semblant (puisque personne n’avait le droit de parler des sociétés véreuses des îles Caïmans) au sein d’un dispositif sciemment conçu pour être inintelligible à tous. Les managers à qui l’on refilait le bébé n’y comprenaient goutte, pour la bonne raison qu’il n’y avait rien à y comprendre : ce n’était qu’un absurde rituel. — (David Graeber, traduit par Élise Roy, Bullshit jobs, Les liens qui libèrent, 2018, ISBN 979-10-209-0633-5)

Nom commun - français

goutte \ɡut\ féminin

  1. Très petite quantité d’un liquide qui se détache avec une forme sphérique.
    • Une petite pluie froide faisait furtivement briller la couverture d’un appentis et tinter sur le zinc, à de rares intervalles, de pesantes gouttes d’eau qui s’échappaient d’une chanlatte percée. — (Francis Carco, L’Homme de minuit, Éditions Albin Michel, Paris, 1938)
    • « Putain de bordel de merde ! » vociféra Chak, le visage perlé de gouttes de sueur. — (Pierre Bordage, Les Derniers Hommes, épisode 2: Le cinquième ange, Éditions Au Diable Vauvert, 2010, chap. 15)
    • Une bâche de 1000 m² qui la recouvre et un dispositif d’aspersion de gouttes d’eau contribuent à éviter les projections alentour et à limiter la diffusion des poussières. — (Vincent Charbonnier, La déconstruction inédite d’une tour lyonnaise, dans l’Usine nouvelle du 22 mars 2012, page 24)
  2. (Figuré) Très petite quantité d’un liquide.
    • Enfin, elle articula timidement, d’une voix aiguë et mal assurée comme un violon qui crincrine : — Vous n’auriez pas une goutte de lait ? — (Jacques Yonnet, Enchantements sur Paris‎, 1966, page 77)
  3. (Familier) Eau-de-vie.
    • Nous avons été ensemble boire une petite goutte au débit d’à côté ; le pauvre vieux ne déteste pas ça, quoi qu’il n’en ait jamais abusé. — (Émile Thirion, La Politique au village, Fischbacher, 1896, page 133)
    • Il entra pour boire une goutte et fit la paix avec son cousin. — (Pierre Gamarra, Rosalie Brousse, chapitre IV ; Éditeurs Français Réunis, Paris, 1953)
    • Le grand-père, pendant toute sa vie, n'avait jamais touché une goutte d'alcool. Un litre de vin par jour, parce que pour un tailleur de pierre, qui travaille toujours en plein air, le vin est une nourriture : mais jamais d'apéritif, et il refusait toujours la goutte. — (Marcel Pagnol, Le temps des secrets, 1960, collection Le Livre de Poche, page 51)
    • Elle bougonnait, puis elle apportait la casserole de café bouillante avec ses filets de mousse blanche, elle versait la goutte sur le fond de sucre collé dans la tasse. Tout le monde rinçait la tasse avec la goutte, en la remuant doucement. — (Annie Ernaux, La femme gelée, 1981, réédition Quarto Gallimard, page 327)
  4. (Figuré) Quantité insignifiante.
    • C’est une goutte d’eau.
    • Je n’y vois goutte. — ("« Je ne bois goutte », « je ne mange mie »… Des négations aux délicieuses origines", Le Monde, 2021 → lire en ligne)
  5. (Pharmacie) Mesure de certaines liqueurs qui s’emploient à très petite dose.
    • On évalue la goutte à peu près au poids d’un grain.
  6. (Au pluriel) Certains remèdes liquides qui ne s’administrent ordinairement qu’à très petites doses, à cause de leur énergie.
  7. (Fonderie) Petite partie tirée d’une fonte d’or ou d’argent qu’on remet à l’essayeur pour avoir le rapport du titre.
  8. (Verrerie) Quantité de verre en fusion qui sert de matière à élaborer un objet.
  9. (Architecture, Ornement) Petits ornements de forme conique placés dans le plafond de l’ordre dorique ou sous les triglyphes.
    • Les gouttes de la corniche.
  10. (Nosologie) Affection caractérisée par des troubles articulaires, due à l’accumulation de l’acide urique dans l’organisme (hyperuricémie).
    • La vieille dame mourut de joie et d’une goutte remontée au cœur, en revoyant à Tours le duc d’Angoulême. — (Honoré de Balzac, La Femme de trente ans, Paris, 1832)
    • Les podagres doivent-ils s’abstenir entièrement de vin ? Il y a un axiome populaire qui dit : buvez ou ne buvez pas de vin, et vous n’en aurez pas moins la goutte. — (Édouard Monneret et Louis Fleury, Compendium de médecine pratique, tome 4, Béchet jeune & Labbé, 1841, page 357)
    • Ses doigts malhabiles, enflés par la goutte, lui obéissaient très mal. — (Ivan Tourgueniev, L’Exécution de Troppmann, avril 1870, traduction française de Isaac Pavlovsky, publiée dans ses Souvenirs sur Tourguéneff, Savine, 1887)
    • La goutte abarticulaire est celle qui s'installe ailleurs que sur les articulations. La goutte abarticulaire peut être aiguë, paroxystique, ou bien larvée. La goutte abarticulaire paroxystique est celle qui fait le mieux ses preuves. — (Charles Achard, Maladies de la nutrition: rhumatisme chronique, Éditions Maloine, 1922, page 366)
    • Jamais Clément Talon ne faisait un pas qui ne fût absolument nécessaire ; il marchait lentement, lourdement, avec quelque chose de contraint qui me porte à croire qu’il souffrait de la goutte. — (Julien Green, Le voyageur sur la terre, 1927, Le Livre de Poche, page 128)
  11. (Vosges) Ruisselet, tout petit ruisseau.
    • Les différentes gouttes alimentent la rivière principale en amont.
    • (Toponymie) Goutte de Parfongoutte, Goutte du Raindé, Goutte du Couchetat — (Ruisseaux de la Bresse)
  12.  (Héraldique) Meuble dans la forme d'une goutte, hémisphérique vers le bas et pointue vers le haut.
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

GOUTTE. n. f.
Petite partie d'une chose liquide. Goutte d'eau de vin, de bouillon, d'huile, d'encre, de suif, de plomb fondu, etc. Ce vin se conservera bon jusqu'à la dernière goutte. Il n'en reste pas une goutte. Des gouttes de pluie commençaient à tomber. Il pleut à grosses gouttes. Des gouttes de rosée. Suer à grosses gouttes.

Littré (1872-1877)

GOUTTE (gou-t') s. f.
  • 1Globule qui se détache de la masse d'un liquide. Une goutte de plomb fondu. Si tous les hommes de la terre ne sont devant ses yeux [de Dieu] qu'une goutte d'eau et un peu de poussière, comme parle l'Écriture, Nicole, Ess. mor. 3e traité, ch. 5. Non-seulement il se trouve quelquefois des gouttes d'eau renfermées dans le cristal de roche ; mais on en voit encore plus souvent dans les agates et autres pierres vitreuses qui n'ont qu'une demi-transparence, Buffon, Min. t. VI, p. 140. La figure sphérique des gouttes de la rosée produirait-elle dans les rayons de la lumière des réfractions nuisibles aux feuilles ? Bonnet, Us. feuilles plant. 2e mém.

    Se ressembler comme deux gouttes d'eau, se ressembler beaucoup. Ces deux sœurs se ressemblent comme deux gouttes d'eau.

    On ne peut dire comme deux gouttes d'eau qu'en nommant deux personnes ; et la locution devient fausse quand on n'en nomme qu'une seule, comme dans ces phrases de Mme de Maintenon et de Voltaire : Mme de St-Pars trouve que M. d'Auxerre vous ressemble comme deux gouttes d'eau, Maintenon, Lett. à Mme de Caylus, 11, oct. 1715. Nous avions parmi les spectateurs [d'une représentation de l'Orphelin de la Chine à Ferney] une espèce de Kalmouk qui disait que je ressemblais à Gengis-khan comme deux gouttes d'eau, et que j'avais le geste tout à fait tartare, Voltaire, Lett. d'Argental, 6 juill. 1763. On en a fait plaisamment ressortir le vice en disant de la rivière artificielle de Trianon qu'elle ressemble à une vraie rivière… comme deux gouttes d'eau.

    On dit dans le même sens : comme deux gouttes de lait. Et vos airs dans les siens sont si reconnaissables, Que deux gouttes de lait ne sont pas plus semblables, Regnard, Ménechmes, I, 2.

    Suer à grosses gouttes, être tout couvert de sueur. Il suait à grosses gouttes, quoique ce fût au mois de janvier, Guez de Balzac, le Barbon.

    Se dit des larmes. De grosses gouttes coulaient le long de ses joues.

    Il se dit aussi des mucosités nasales. Il a toujours la goutte au nez.

    Fig. Il passerait entre les gouttes de pluie, se dit d'un homme adroit, qui sait se ménager entre les difficultés, entre les partis.

    Fig. C'est une goutte d'eau dans la mer, se dit d'une petite quantité qui se perd dans une plus grande. Après des siècles d'efforts réunis et continus, les secrets que vous aurez arrachés à la nature, comparés à son immense richesse, ne seront que la goutte d'eau enlevée au vaste océan, Raynal, Hist. phil. XIX, 4.

  • 2 Par extension, petite quantité de liquide. Prenez une goutte de ce bouillon. Je vous promets qu'il n'en laissera goutte [d'un breuvage], La Fontaine, Mandr. Les fontaines sans une goutte d'eau, Sévigné, 291. Une goutte d'eau éternellement demandée et éternellement refusée, le ciel de fer sur ta tête, la terre d'airain sous tes pieds, voilà ce que mérite ton indifférence [du mauvais riche], Bossuet, Pens. chrét. 12.

    Fig. …Que Dieu lui-même puise au lac de sa bonté, Et qu'il donne ici-bas sa goutte à tout le monde, Lamartine, Joc. IX, 284.

    Fig. Une goutte d'eau, une très petite quantité de quoi que ce soit, et qui est tout à fait insuffisante pour les besoins. Le roi fit donner six cents livres de gratification à chaque capitaine de cavalerie, et trois cents livres à chaque capitaine d'infanterie : tout cela ensemble coûta beaucoup ; mais pour chacun ce fut une goutte d'eau, Saint-Simon, 60, 15.

    La dernière goutte, la petite quantité qui emplit le vase et le fait déborder. Ce courrier de Bavière, qui était arrivé le jeudi au soir, et dont il ne vint rendre compte que le samedi à cinq heures du soir, a été la dernière goutte qui a fait répandre le verre, Sévigné, 390.

    La dernière goutte est aussi celle du fond. Ils ont bu jusqu'à la dernière goutte. Ce vin se conservera bon jusqu'à la dernière goutte.

  • 3Goutte se dit du sang qui coule dans les veines ou hors des veines. Tant qu'il lui restera une goutte de sang dans les veines, il combattra pour sa patrie. Il est de tout son sang comptable à la patrie ; Chaque goutte épargnée a sa gloire flétrie, Corneille, Hor. III, 6. Sans qu'il en coûte à Rome une goutte de sang, Corneille, Tite et Bérén. II, 1. Résolu de défendre et l'Église et le pasteur jusqu'à la dernière goutte de son sang, Fléchier, Hist. de Théodose, III, 56.

    Fig. S'ils ont quelque goutte de sang français dans les veines et quelque amour pour la gloire de leur pays, Voiture, Lett. 74. Si du sang de nos rois quelque goutte échappée…, Racine, Athal. I, 1.

    Fig. N'avoir pas une goutte de sang dans les veines, être saisi d'effroi, d'horreur.

    Fig. La dernière goutte du sang, tout ce qu'on a de ressources, d'argent. J'avais mis jusqu'à la dernière goutte de mon sang à cet établissement très utile, sans y avoir d'autre intérêt que celui de bien faire, Voltaire, Lett. d'Argental, 3 nov. 1776.

  • 4 Populairement. Petit verre plein d'eau-de-vie ou autre liqueur spiritueuse. Offrir, accepter une goutte. Aimer la goutte, aimer l'eau-de-vie. À quatorze ans dans les déserts Je vous portais la goutte, Béranger, Vivand.
  • 5 Terme de pharmacie. Mesure de certains liquides médicamenteux qui s'emploient à très petite dose. Huit gouttes de laudanum de Sydenham. La goutte est la petite quantité de liquide qui se détache sous forme sphérique du bord d'un flacon ou d'une fiole doucement inclinée.

    Gouttes d'Angleterre, médicament liquide dont un sel d'ammoniaque fait le principe excitant. Ces paroles firent sur l'âme de l'Ingénu l'effet des gouttes d'Angleterre qui rappellent un mourant à la vie et lui font entr'ouvrir des yeux étonnés, Voltaire, Ingénu, 10. Suzanne, des gouttes à ta maîtresse ! tu sais comment je les prépare, Beaumarchais, Mère coupable, IV, 18.

  • 6 Fig. Il se dit de taches colorées. Il [le martin pêcheur huppé] est parsemé de gouttes blanches, jetées par lignes transversales sur un fond gris noirâtre du dos à la queue, Buffon, Ois. t. XIII, p. 277.
  • 7 Populairement. Goutte militaire, nom donné aux blennorrhagies devenues chroniques, qui ne se caractérisent plus que par une goutte se montrant de temps en temps au méat urinaire, ainsi dite parce qu'il arrive souvent aux soldats de contracter la blennorrhagie.
  • 8 Terme de fondeur. Petite partie tirée d'une fonte d'or et d'argent qu'on remet à l'essayeur pour en reconnaître le titre. Prendre la goutte, faire essai.
  • 9 Terme d'architecture. Petits ornements de forme conique qui se placent dans les plafonds.
  • 10Chez les horlogers, petite plaque ronde convexe d'un côté et concave de l'autre.
  • 11Chez les potiers d'étain, petits trous qui se forment aux pièces d'étain dans les moules.
  • 12Goutte d'eau, variété de topaze.
  • 13Goutte de lin, la cuscute.
  • 14Goutte bleue, volute hispidule (coquille).
  • 15Goutte se joint à la négation pour lui donner plus d'énergie, comme pas, point, et anciennement mie (ces mots exprimant une petite quantité en général et voulant dire qu'il n'y a goutte, pas, point, miette de la chose dont il s'agit). Sous Henri, c'est ne voir goutte Que de révoquer en doute Le salut des fleurs de lis, Malherbe, II, 2. Pour moi je ne vois goutte en ce raisonnement, Corneille, Nicom. III, 4. Quand on est mort, qu'on ne voit goutte, Malheur que surtout je redoute : Car quand on ne voit goutte, on est Croquignolé par qui vous plaît, Scarron, Virg. III. …J'avoue en bonne foi Que mon esprit d'abord n'y voyait goutte, La Fontaine, Confid. Une valeur brutale qui ne voit goutte et qui ne sait que mépriser la vie, n'est pas celle d'un honnête homme ni d'un roi, Pellisson, Conversat. de L. XIV devant Lille, p. 24. C'était un temps à n'y voir goutte du brouillard, Sévigné, 610. Hélas ! combien de grands docteurs qui ne voient goutte, croyant tout voir ! Fénelon, t. XVIII, p. 111. Je vous dirai, monseigneur, que je n'entends goutte à l'être simple de Wolf, Voltaire, Lett. Prusse, 29.
  • 16Goutte à goutte, loc. adv. Goutte après goutte. Je ne puis tuer mon esclave ; mais je puis faire couler son sang goutte à goutte sous le fouet d'un bourreau, Raynal, Hist. phil. XI, 24.

    Fig. Ce peuple réprouvé [les Juifs] ne sert plus qu'à montrer la malédiction et la vengeance divine qui distille sur lui goutte à goutte, Fénelon, t. XVII, p. 190. De mépris, de dégoûts, d'outrages ténébreux Abreuve goutte à goutte un vieillard malheureux, Ducis, Lear, I, 4.

  • 17Mère goutte, ou première goutte, le vin, le cidre qui coule de la cuve ou du pressoir, sans qu'on ait pressuré le raisin, les pommes. Tous les ans son maître d'hôtel allait recueillir la mère goutte des meilleurs celliers de Bourgogne, Marmontel, Mém. v.

    On dit aussi vin de goutte.

    Fig. Pressurer quelqu'un jusqu'à la dernière goutte, en tirer tout ce qu'on peut en arracher.

    PROVERBE

    La goutte creuse la pierre.

HISTORIQUE

XIIe s. Ne dirai mès que veez gote, Benoit de Sainte-Maure, II, 15043.

XIIIe s. Son repaire [de l'étoile polaire] sevent [ils suivent] à route, Quant li tans n'a de clarté goute, Tout cil qui font ceste maistrise, Lais inédils, p. III. Se toutes les goutes de mer Estoient langues por parler, Salut d'amors, dans JUBINAL, t. II, p. 261. Et c'est bien à savoir certain Qu'on le puet bien veoir à plain ; Goute de rousée resamble, Quant l'une goute à l'autre assamble, Rutebeuf, II, 223. Quant je entrai leans, es barons firent touz si grant joie que en ne pooit goute oïr, et en louoient nostre Seigneur, Joinville, 242.

XIVe s. 3. La mere goute, c'est-à-dire la fleur du vin, Ménagier, II, 5. Un chasuble, tunique et dalmatique de camocaz noir, goutté de goutes blanches, pour l'office des morts, Du Cange, gutta.

XVe s. Oncques goutte d'eau du ciel durant six semaines n'y cheÿ, tant fit chaud et sec, Froissart, II, III, 8. Et si sa dame à la fenestre vient Soy monstrer goutte [un peu], Ou se le vent une fenestre boute, Dont il cuide que sa dame l'escoute, S'en va coucher joyeulx, n'en faites doubte, Chartier, Poésies, p. 559.

XVIe s. Enfans, ne pleurez goutte, il est encores tout chauld, je vous le guariray aussi sain que il feut jamais, Rabelais, Pant. II, 30. Tant qu'il nous demeure quelque goutte de justice, Calvin, Inst. 583. Ils ne sont point une seule goutte plus purs en doctrine, voire s'ils n'y sont plus impurs, Calvin, ib. 842. Et estant presque hors d'aleine, souffloit et suoit à grosses gouttes, Amyot, Phocion, 13. [Vous qui êtes] la pure cresme de nos provinces, la mere goute de nos gouvernements, Sat. Mén. Harangue de M. de Lyon.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1. GOUTTE. Ajoutez :
18 Terme d'astronomie. Goutte noire, dite aussi pont et ligament noir, tache noire qui se montre lors des passages de Vénus au contact du soleil et de la planète, Ch. André, Acad. des sc. Comptes rendus, t. LXXXIII, p. 946.
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Étymologie de « goutte »

Bourguig. gôte ; provenç. et espagn gota ; ital. goccia ; du latin gutta, qui se rattache au goth. giuian, verser, allem. giessen, grec, χεύω, rapportés par Bopp au radical sanscrit cud, couler goutte à goutte.

Version électronique créée par François Gannaz - http://www.littre.org - licence Creative Commons Attribution

(Nom) Du latin gŭtta. (Vers 980) gutas (pluriel).
(Adverbe) Du nom commun signifiant la moindre quantité.
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Phonétique du mot « goutte »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
goutte gut

Fréquence d'apparition du mot « goutte » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « goutte »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « goutte »

  • Une goutte d'eau assidue, à force de tomber, creuse dans le roc même une crevasse.
    Bion, de Phlossa — Bucoliques, Fragments I (traduction Legrand)
  • Le colonialisme, c'est maintenir quelqu'un en vie, pour boire son sang goutte à goutte.
    Massa Makan Diabaté — Le Coiffeur de Kouta
  • On ne change pas les dimanches de novembre, on les pleure goutte à goutte, lentement, avec chaque minute qui coule.
    Jeanne Voidy — Lectures brèves pour le métro
  • La dernière goutte est celle qui fait déborder le vase.
    Proverbe français
  • L'eau, goutte à goutte, creuse le roc.
    Théocrite
  • Chaque goutte de sève contient la plénitude de l'arbre entier.
    Maharishi Mahesh Yogi
  • Unie à l'océan, la goutte d'eau demeure.
    Proverbe indien
  • Dieu tombe goutte à goutte du ciel, et larme à larme de nos yeux.
    Victor Hugo — Post-scriptum de ma vie
  • Une goutte de poix peut gâter tout un tonnelet de miel.
    Proverbe bulgare
  • La jalousie, c'est une preuve de coeur comme la goutte de jambes.
    Paul-Jean Toulet
Voir toutes les citations du mot « goutte » →

Traductions du mot « goutte »

Langue Traduction
Anglais drop
Espagnol gota
Italien far cadere
Allemand fallen
Chinois 下降
Arabe قطرة
Portugais solta
Russe падение
Japonais 落とす
Basque askatu
Corse goccia
Source : Google Translate API

Synonymes de « goutte »

Source : synonymes de goutte sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « goutte »

Combien de points fait le mot goutte au Scrabble ?

Nombre de points du mot goutte au scrabble : 7 points

Goutte

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