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Intervalle
Sommaire
- Définitions de « intervalle »
- Étymologie de « intervalle »
- Phonétique de « intervalle »
- Fréquence d'apparition du mot « intervalle » dans le journal Le Monde
- Évolution historique de l’usage du mot « intervalle »
- Citations contenant le mot « intervalle »
- Traductions du mot « intervalle »
- Synonymes de « intervalle »
- Combien de points fait le mot intervalle au Scrabble ?
Variantes | Singulier | Pluriel |
---|---|---|
Masculin | intervalle | intervalles |
Définitions de « intervalle »
Trésor de la Langue Française informatisé
INTERVALLE, subst. masc.
Wiktionnaire
Nom commun - français
intervalle \ɛ̃.tɛʁ.val\ masculin
-
Distance d’un lieu à un autre.
- L’évaluation de la netteté se fait ordinairement par le plus petit intervalle e mesuré entre deux points ou deux traits distincts de l’épreuve ; […]. — (Agenda Lumière 1930, Paris : Société Lumière & librairie Gauthier-Villars, page 120)
- C'est comme pour appeauter un tétras, rien de plus simple. Tu tends une feuille de chiendent entre tes deux pouces et tu souffles dans l’intervalle. Tu vois arriver le coq, la crête droite, écarlate et le collet ébouriffé. — (Jean Rogissart, Passantes d’Octobre, Librairie Arthème Fayard, Paris, 1958)
- La gaine isolante que constitue la stratification myélinique est interrompue à intervalles réguliers par des étranglements (nœuds de Ranvier) au niveau desquels l’axone est dénudé. — (E. Christian Laterre, Sémiologie des maladies nerveuses, De Boeck Supérieur, 2008, page 62)
-
Période de temps qui sépare un fait d’un autre.
- Bien que, par intervalles, de brèves et pâles soleillées courussent sur les chemins défoncés, sur les prairies semées de flaques miroitantes, on pressentait que l’accalmie serait de peu de durée, et que l’averse recommencerait avant la fin du jour. — (André Theuriet, La chanoinesse, part.3, chap.II, 1893)
- Dans la monotonie douloureuse de sa pensée, elle écoutait le roulement des charrettes qui, à longs intervalles, passaient sur le quai. — (Anatole France, Le Lys rouge, 1894, réédition Le Livre de Poche, page 361)
- Une petite pluie froide faisait furtivement briller la couverture d’un appentis et tinter sur le zinc, à de rares intervalles, de pesantes gouttes d’eau qui s’échappaient d’une chanlatte percée. — (Francis Carco, L’Homme de minuit, Éditions Albin Michel, Paris, 1938)
- Il y a tant d’années d’intervalle entre le règne de tel roi et le règne de tel autre.
- Cette comète ne reparaît qu’à de longs intervalles.
- Cette maladie le prend et le quitte par intervalles.
- La lune se montrait par intervalles et disparaissait de nouveau.
- Après un intervalle de silence, il répondit.
- Cet homme n’est pas toujours dans sa folie, il a des intervalles lucides.
-
(En particulier) (Musique) Distance qu’il y a d’une note à une autre, en allant de l’aigu au grave ou du grave à l’aigu.
- Intervalle de tierce, de quarte, de quinte.
- L’intervalle d’une octave.
- Intervalle consonant.
- Intervalle dissonant.
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(Généralement) écart entre deux valeurs d'une même grandeur, fourchette.
- L’intervalle des notes de la classe.
- L’intervalle de température.
- (Cartographie) Distance séparant deux éléments graphiques voisins[1].
Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)
Distance d'un lieu à un autre. Il y a un intervalle de tant de lieues entre ces deux villes. Il n'y a qu'un mètre d'intervalle entre ces deux colonnes. Franchir un intervalle. Il signifie aussi Période de temps qui sépare un fait d'un autre. Dans cet intervalle, il arriva plusieurs événements. Il y a tant d'années d'intervalle entre le règne de tel roi et le règne de tel autre. Cette comète ne reparaît qu'à de longs intervalles. Cette maladie le prend et le quitte par intervalles. La lune se montrait par intervalles et disparaissait de nouveau. Après un intervalle de silence, il répondit. Cet homme n'est pas toujours dans sa folie, il a des intervalles lucides. Il se dit particulièrement, en termes de Musique, de la Distance qu'il y a d'un son à un autre, en allant de l'aigu au grave ou du grave à l'aigu. Intervalle de tierce, de quarte, de quinte. L'intervalle d'une octave. Intervalle consonant. Intervalle dissonant.
Littré (1872-1877)
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1Distance d'un lieu à un autre.
Il y a peut-être un plus grand intervalle de mer entre les îles Marianes et le Japon qu'entre aucune des terres qui sont au delà de Kamtschatka et celles de l'Amérique
, Buffon, Hist. nat. homme, Œuvres, t. V, p. 215.Fig.
L'on voit peu d'esprits entièrement lourds et stupides ; l'on en voit encore moins qui soient sublimes et transcendants ; le commun des hommes nage dans ces deux extrémités : l'intervalle est rempli par un grand nombre de talents ordinaires
, La Bruyère, XI.Terme d'art militaire. Espace qui isole les groupes principaux d'une ligne de bataille, par opposition à distance (voy. ce mot).
-
2Distance d'un temps à un autre Cette comète ne reparaît qu'à de longs intervalles.
J'ai toujours vu avec chagrin le peu de séjour que M. de Grignan a fait dans son château ; sa dépense ni ses occupations n'ont pas eu d'intervalle
, Sévigné, 30 oct. 1676.Le bon abbé se loue de son vin, et en use plus continuellement que nous ne faisons des eaux ; il ne met point d'intervalle à cette cordiale boisson
, Sévigné, au comte de Guit. 12 janv. 1683.S'il y a eu quelques intervalles de foi, quelques heures et quelques mouvements de grâce, quelques retours vers Dieu, ce sont des retours qui n'ont point eu de suite
, Massillon, Carême, Mot. de conv.Demain on va vous redemander votre âme ; et ce court intervalle qui vous reste, vous le disputez encore à Dieu
, Massillon, ib.L'intervalle entre la fin de la première guerre punique et le commencement de la seconde, qui est environ de vingt-cinq ans, fut pour Hiéron un temps de paix et de tranquillité
, Rollin, Hist. anc. Œuv. t. X, p. 12, dans POUGENS.Vous y gagnerez du temps ; eh ! que sait-on ce qui peut arriver dans l'intervalle ?
Marivaux, Marianne, 6e part.Il [Alexis, fils de Pierre le Grand] reprit un peu ses sens, et, dans cet intervalle de vie et de mort, il fit prier son père de venir le voir ; le czar vint ; les larmes coulèrent des yeux du père et du fils infortuné
, Voltaire, Russie, II, 10.Des premiers feux de notre aurore Au crépuscule de nos jours Il est un intervalle encore Que doivent remplir les amours
, Desmahis, Poés. p. 41, dans POUGENS.Par intervalles, de temps en temps. La lune se montrait par intervalles et disparaissait de nouveau.
Il [Philippe] aimait par intervalles qu'on lui dît la vérité
, Rollin, Hist. anc. Œuvres, t. VI, p. 140, dans POUGENS.Sans intervalle, sans relâche, sans interruption.
Il faut que la rigueur… Frappe sans intervalle un coup sûr et rapide
, Voltaire, Orphel. III, 4.Particulièrement. Bon intervalle ou intervalle lucide, temps pendant lequel un fou jouit momentanément de sa raison.
Il a, comme je vois, quelques bons intervalles
, Desmarets, Visionnaires, III, 2. -
3 Terme de musique. Différence d'un son grave à un son aigu. Intervalle de tierce, de quarte, de quinte Intervalle consonnant. Intervalle dissonant.
Intervalle simple, celui qui se renferme dans les bornes d'une octave.
Intervalle redoublé, celui dont la note aiguë est portée à l'octave au-dessus.
Intervalle direct, intervalle simple pris de bas en haut, et considéré par opposition à son complément.
Intervalle renversé, intervalle direct dont la note aiguë est porté au grave. Ut (ré, mi), fa étant l'intervalle direct, si l'on porte le fa au-dessous, ut (si, la, sol), fa, l'intervalle est renversé. La quinte est un intervalle direct dont le complément est l'intervalle indirect ou inverse appelé quarte.
-
4 Fig. Inégalité de condition sociale.
Je la voyais franchir cet immense intervalle Qu'a mis entre elle et moi la majesté royale
, Voltaire, Sémiramis, II, 1.Tant de vertus, sans aucun mélange de faiblesse, ont rapproché l'intervalle qui nous sépare
, Genlis, Mme de Maintenon, t. II, p. 196, dans POUGENS.
HISTORIQUE
XIIIe s. Garde que tu n'escrises l'un nombre après l'autre sans entreval et sans espasse
, Comput, f° 10. Selon les entrevaus et le croissement et le descroissement des nombres
, ib.
XIVe s. Se ert [s'était] logiez moult près de leur tentes, si que po avoit de intervalle entre les deux os [armées]
, Bercheure, f° 36, recto.
XVIe s. Il y en a aucuns, desquels les premiers mouvements n'ont jamais d'intervalle, jusques à ce qu'ils aient mis en effet leur passion
, Marguerite de Navarre, Nouv. XXXVI. D'où vient que les gestes du peuple romain sont tant celebrez de tout le monde, voire de si long intervalle preferez à ceulx de toutes les autres nations ensemble ?
Du Bellay, J. I, 4, verso.
SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE
INTERVALLE. Ajoutez :Encyclopédie, 1re édition (1751)
INTERVALLE, s. m. (Gram.) distance, espace qui est entre deux extrémités de tems ou de lieux. Voyez Distance.
Ce mot vient du latin intervallum, qui ne signifie autre chose, selon Isidore, que spatium inter fossam & murum, entre le fossé & le mur : d’autres remarquent que les pieux que les Romains plantoient dans leurs boulevards, étoient appellés valla, & l’espace d’entre deux, inter valla. Dict. étym. & Chambers. (G)
Intervalle, (Art milit.) se dit dans l’art militaire, de la distance ou de l’espace qu’on laisse ordinairement entre les troupes placées en ligne ou à côté les unes des autres. On le dit aussi pour exprimer l’espace qui est entre deux lignes de troupes, soit en bataille ou dans le camp. Voyez Distance.
Ainsi, lorsque des troupes sont en bataille, la distance d’un bataillon à un autre se nomme l’intervalle des bataillons. Il en est de même pour les escadrons, & pour la distance de la premiere ligne à la seconde.
L’intervalle des bataillons & celui des escadrons, est ordinairement égal au front de ces troupes ; mais il arrive de-là qu’une armée médiocre occupe une très-grande étendue de front, & que les différentes parties de l’armée sont trop éloignées les unes des autres, pour pouvoir se soutenir réciproquement. Voyez Ordre de bataille & Armée.
Pour donner une idée de ces intervalles, ou de l’arrangement des bataillons & des escadrons de la premiere & de la seconde ligne d’une armée, il faut,
1°. Concevoir que toutes ces troupes sont rangées sur une même & seule ligne sans aucune distance.
2°. Qu’on fasse marcher en-avant la moitié, mais de maniere qu’alternativement une troupe s’avance, & que celle qui la touche immédiatement, par exemple à gauche, demeure à la même place ; & que celle qui touche la gauche de celle-ci, s’avance aussi, & ainsi de suite.
Il résultera de ce mouvement deux lignes de troupes, dont les intervalles de la premiere se trouveront opposés aux troupes de la seconde, & ces intervalles seront égaux aux fronts des troupes.
Ces intervalles ont pour objet de laisser passer la premiere ligne, si elle se trouve obligée de ployer derriere la seconde sans déranger l’ordre de cette seconde ligne, qui se trouve en état d’arrêter l’ennemi, pendant que la premiere ligne se rallie ou se réforme à couvert de la seconde. Mais cette considération ou cet objet ne paroît pas exiger que les troupes ayent des intervalles égaux à leur front. Une troupe qui se retire en desordre n’occupe pas le même front, que lorsqu’elle est rangée en ordre de bataille ; ainsi elle peut s’écouler par des intervalles moindres que son front. Il suit de-là que les intervalles peuvent être plus petits que le front des troupes ; ils le doivent même, si l’on veut considérer qu’un tout étant d’autant plus solide que toutes ses parties se tiennent ensemble, & qu’elles s’aident mutuellement, l’armée aura aussi plus de force, lorsque les troupes qui la composent se trouveront moins éloignées ou moins séparées les unes des autres. Cette observation a déja été faite par de très-habiles généraux. Feu M. le maréchal de Puysegur ne prescrit dans son traité de l’Art de la guerre, que dix toises pour l’intervalle des bataillons, & six toises pour celui des escadrons. Il prétend que ces intervalles sont plus que suffisans, & même qu’il seroit à propos de faire combattre les troupes à lignes pleines, c’est à-dire sans intervalles. Voyez Armée.
A Leuze en 1691, & à Fredelingue en 1702, la cavalerie françoise ou la maison du Roi, battit les ennemis qui étoient rangés en lignes pleines : à Ramilly les lignes pleines des ennemis battirent les lignes tant pleines que vuides de la cavalerie françoise ; « mais ces exemples ne prouvent rien, dit l’illustre maréchal de Puysegur ; car outre l’ordre de bataille, il y a d’autres parties qui dans l’action doivent concourir en même tems pour donner la victoire, & qui ont manqué à ceux qui avoient l’avantage de la ligne pleine lorsqu’ils ont été battus par des troupes rangées avec des intervalles ».
L’intervalle des lignes de troupes en bataille doit être d’environ 150 toises ; mais dans le combat la seconde ligne doit s’approcher davantage de la premiere, pour être plus à portée de la soutenir.
A l’égard de l’intervalle ou de la distance qui est entre les deux lignes du camp, il faut la regler sur la profondeur des camps des bataillons & des escadrons. Cette profondeur peut être évaluée environ à 120 toises ; il faut aussi un espace libre en-avant du terrain de la seconde ligne, pour qu’elle puisse s’y porter en bataille. On peut estimer cet espace de 30 toises ou environ : ainsi l’intervalle du front de bandiere de la premiere ligne à celui de la seconde, sera donc d’environ 150 toises, ou trois cens pas ; le pas étant compté à la guerre pour une longueur de trois piés.
Intervalle, en Musique, est la distance qu’il y a d’un son à un autre, du grave à l’aigu : c’est tout l’espace que l’un des deux auroit à parcourir pour arriver à l’unisson de l’autre. A prendre ce mot en son sens le plus étendu, il est évident qu’il y a une infinité d’intervalles : mais comme en Musique, on borne le nombre des sons à ceux qui composent un certain système, on borne aussi par-là le nombre des intervalles à ceux que ces sons peuvent former entre eux. De sorte qu’en combinant deux à deux tous les sons d’un système quelconque, on aura précisément tous les intervalles possibles dans ce même système : sur quoi il restera à réduire sous la même espece tous ceux qui se trouveront égaux.
Les anciens divisoient les intervalles de leur musique en intervalles simples ou diastèmes, & en intervalles composés, qu’ils appelloient systèmes. V. ces mots.
Les intervalles, dit Aristoxene, different entre eux en cinq manieres ; 1°. en étendue : un grand intervalle differe ainsi d’un plus petit ; 2°. en résonance ou en accord ; & c’est ainsi qu’un intervalle consonnant differe d’un dissonnant ; 3°. en quantité, comme un intervalle simple d’un intervalle composé ; 4°. en genre. C’est ainsi que les intervalles diatoniques, chromatiques, & enharmoniques, different entre eux ; 5°. & enfin, en nature de rapport, comme l’intervalle dont la raison peut s’exprimer en nombres, differe d’un intervalle irrationnel. Je parlerai en peu de mots de toutes ces différences.
1°. Le plus petit de tous les intervalles de Musique, selon Gaudence & Bacchius, est le dièse enharmonique. Le plus grand, à le prendre de l’extrémité aiguë du mode hypermixolydien, jusqu’à l’extrémité grave de l’hypodorien, seroit de trois octaves & un ton ; mais comme il y a une quinte & même une sixte à retrancher, selon un passage d’Adraste, cité par Meibomius, reste la quarte par-dessus le disdiapason, c’est-à-dire la dix-huitieme, pour le plus grand intervalle du diagramme des Grecs.
2°. Les Grecs divisoient aussi-bien que nous, tous les intervalles en consonnans & dissonans : mais leur division n’étoit pas la même que la nôtre. Voyez Consonance. Ils subdivisoient encore les intervalles consonans en deux especes, sans y compter l’unisson qu’ils appelloient homophonie, ou parité de sons, & dont l’intervalle est nul. La premiere espece étoit l’antiphonie ou opposition de sons qui se faisoit à l’octave ou à la double octave, & qui n’étoit proprement qu’une replique du même son, mais pourtant avec opposition du grave à l’aigu. La seconde espece étoit la paraphonie ou surabondance de son, sous laquelle on comprenoit toute consonance autre que l’octave, tous les intervalles, dit Théon de Smyrne, qui ne sont ni unissonnans ni dissonans.
3°. Quand les Grecs parlent de leurs diastèmes ou intervalles simples, il ne faut pas prendre ce terme absolument à la rigueur ; car le diese même n’étoit pas selon eux exempt de composition ; mais il faut toujours le rapporter au genre auquel l’intervalle s’applique : par exemple, le semiton est une intervalle simple dans le genre chromatique & dans le diatonique, & composé dans l’enharmonique ; le ton est composé dans le chromatique, & simple dans le diatonique ; & le diton même, ou la tierce majeure qui est composée dans le diatonique, est incomposée dans l’enharmonique. Ainsi ce qui est système dans un genre, peut être diastème dans l’autre, & réciproquement.
4°. Sur les genres, divisez successivement le même tétracorde, selon le genre enharmonique, selon le diatonique & selon l’enharmonique, vous aurez trois accords différens, qui, au lieu de trois intervalles, vous en donneront neuf, outre les compositions & combinaisons qu’on en peut faire, & les différences de tous ces intervalles, qui vous en donneront une multitude d’autres ; si vous comparez, par exemple, le premier intervalle de chaque tétracorde dans l’enharmonique & dans le chromatique mol d’Aristoxène, vous aurez d’un côté un quart ou trois douziemes de ton, & de l’autre un tiers ou quatre douziemes ; or il est évident que les deux cordes aiguës de ces deux intervalles feront entre elles un intervalle qui sera la différence des deux précédens, ou la douzieme partie d’un ton.
5. Cet article me mene à une petite disgression. Les Aristoxeniens prétendoient avoir bien simplifié la Musique par leurs divisions égales des intervalles, & se moquoient fort de tous les calculs de Pythagore. Il me semble cependant que toute cette prétendue simplicité n’étoit guere que dans les mots, & que si les Pythagoriciens avoient un peu mieux entendu leur maître & la Musique, ils auroient bientôt fermé la bouche à leurs adversaires.
Pythagore n’avoit point imaginé les rapports des sons qu’il calcula le premier. Guidé par l’expérience, il ne fit que tenir registre de ses observations. Aristoxène, incommodé de tous ces calculs, bâtit dans sa tête un système tout différent, & comme s’il avoit pu changer la nature à son gré, pour avoir simplifié les mots, il crut avoir simplifié les choses ; mais il n’en étoit pas ainsi. Comme les rapports des consonnances étoient simples, ces deux Philosophes étoient d’accord là-dessus. Ils l’étoient même sur les premieres dissonances, car ils convenoient également que le ton étoit la différence de la quarte à la quinte ; mais comment déterminer déjà cette différence autrement que par le calcul ? Aristoxène partoit pourtant de-là, & sur ce ton, dont il se vantoit d’ignorer le rapport, il bâtissoit, par des additions & des retranchemens, toute sa doctrine musicale. Qu’y avoit-il de plus aisé que de lui montrer la fausseté de ses opérations, & de les comparer avec la justesse de celles de Pythagore ? Mais, auroit-il dit, je prends toujours des doubles, ou des moitiés, ou des tiers, cela est plutôt fait que tous vos comma, vos limma, vos apotomes. Je l’avoue, eût répondu Pythagore ; mais dites-moi, comment les prenez-vous ces moitiés & ces tiers ? L’autre eût répliqué qu’il les entonnoit naturellement, ou qu’il les prenoit sur son monocorde. Hé bien, eût dit Pythagore, entonnez-moi juste le quart d’un ton. Si l’autre eut été assez charlatan pour le faire, Pythagore eût ajoûté, maintenant entonnez-moi le tiers de ce même ton ; puis prouvez-moi que vous avez fait exactement ce que je vous ai démandé : car cela est indispensable pour la pratique de vos genres. Aristoxène l’eût mené apparamment à son monocorde. Si l’autre lui eût encore demandé : mais est-il bien divisé votre monocorde ? montrez moi, je vous prie, de quelle méthode vous vous êtes servi : comment êtes-vous venu à bout d’y prendre le quart ou le tiers d’un ton ? J’avoue qu’il m’est impossible de voir ce qu’il auroit eu à répondre : car de dire que l’instrument avoit été accordé sur la voix, outre que c’eût été faire le cercle vicieux, cela ne pouvoit jamais convenir à Aristoxène, puisque lui & ses sectateurs convenoient qu’il falloit exercer long-tems la voix avec un instrument de la derniere justesse, pour venir à bout de bien entonner les intervalles du chromatique mol, & du genre enharmonique.
Tous les intervalles de Pythagore sont rationnels, & déterminés dans toute leur justesse avec la derniere précision ; mais les moitiés, les tiers & les quarts de ton d’Aristoxene bien examinés, se trouvent être des rapports incommensurables qu’on ne peut déterminer ; des intervalles qu’on ne peut accorder qu’avec le secours de la Géométrie. C’est donc avec raison que sans être dupes des termes spécieux des Aristoxéniens, Nicomaque, Boëce, & plusieurs autres hommes savans en Musique, ont préféré des calculs faciles & justes, à des figures embrouillées & toujours infidelles dans la pratique.
Il faut remarquer que ces raisonnemens qui conviennent à la musique des Grecs, ne serviroient pas également pour la nôtre, parce que tous les sons de notre système s’accordent par des consonnances, ce qui ne pouvoit se faire également dans le leur, que pour le seul genre diatonique.
Il s’ensuit de tout ceci qu’Aristoxène distinguoit avec raison les intervalles en rationnels & irrationnels, puisque, quoiqu’ils fussent tous rationnels dans le système de Pythagore, la plûpart des dissonances étoient irrationnelles dans le sien.
Dans la musique moderne on considere les intervalles de plusieurs manieres ; savoir, ou généralement comme l’espace ou la distance quelconque des deux sons qui composent l’intervalle, ou seulement comme celles de ces distances qui peuvent se noter, ou enfin comme celles qu’on peut exprimer en notes sur des degrés différens. Selon le premier sens, toute raison numérique ou sourde peut exprimer un intervalle musical. Tel est le comma ; tels seroient les dièses d’Aristoxène. Le second s’applique aux seuls intervalles reçus dans le système de notre musique, dont le moindre est le semi ton mineur, exprime sur le même degré par un diese ou par un bémol. Voyez Semi-ton. Le troisieme sens suppose nécessairement quelque différence de position, c’est-à dire, un ou plusieurs degrés entre les deux sons qui forment l’intervalle. C’est le dernier sens que ce mot reçoit dans la pratique, de sorte que deux intervalles égaux, tels que sont la fausse quinte & le triton, portent pourtant des noms différens, si l’un a plus de degrés que l’autre.
Nous divisons, comme faisoient les anciens, les intervalles en consonnans & dissonans. Les consonnances sont parfaites ou imparfaites. Voyez Consonance. Les dissonances sont telles par leur nature, ou le deviennent par accident. Il n’y a que deux intervalles dissonans par leur nature, savoir la seconde & la septieme, en y comprenant leurs octaves ou repliques ; mais toutes les consonances peuvent devenir dissonances par accident.
De plus, tout intervalle est simple ou redoublé. L’intervalle simple est celui qui est renfermé dans les bornes de l’octave ; tout intervalle qui excede cette étendue, est redoublé, c’est à dire, composé d’une ou plusieurs octaves, & de l’intervalle simple dont il est la replique.
Les intervalles simples se peuvent encore diviser en directs & renversés. Prenez pour direct un intervalle simple quelconque ; son complément à l’octave en est toujours le renversé, & réciproquement.
Il n’y a que six especes d’intervalles simples, dont trois sont les complémens des trois autres à l’octave, & par conséquent aussi leurs renversés. Si vous prenez d’abord les moindres intervalles, vous aurez pour directs la seconde, la tierce & la quarte ; & pour leurs renversemens, la septieme, la sixte & la quinte. Que les derniers soient directs, les autres seront renversés ; tout est réciproque.
Pour trouver le nom d’un intervalle quelconque, il ne faut qu’ajoûter l’unité au nombre des degrés qui le composent ; ainsi l’intervalle d’un degré donnera la seconde, de deux la tierce, de quatre la quinte, de sept l’octave, de neuf la dixieme, &c. Mais ce n’est pas assez pour bien déterminer un intervalle, car sous le même nom il peut être majeur ou mineur, juste ou faux, diminué ou superflu.
Les consonnances imparfaites & les deux dissonances naturelles peuvent être majeures ou mineures, ce qui, sans changer le degré, fait dans l’intervalle la différence d’un semi-ton. Que si d’un intervalle mineur on ôte encore un semi-ton, il devient diminué ; si l’on augmente d’un semi-ton un intervalle majeur, il devient superflu.
Les consonnances parfaites sont invariables par leur nature ; quand leur intervalle est ce qu’il doit être, elles s’appellent justes ; que si l’on vient à altérer cet intervalle d’un semi-ton, la consonnance s’appelle fausse, & devient dissonance ; superflue, si le semi-ton est ajoûté ; diminuée, s’il est retranché. On donne mal-à-propos le nom de fausse quinte à la quinte diminnée ; c’est prendre le genre pour l’espece.
Voici une table générale de tous les intervalles simples, praticables dans la Musique.
L’intervalle exprimé en notes. | Nom de l’intervalle. | Degrès qu’il contient. | Valeur en tons & semi-tons. | Rapports justes. | ||
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Ut dièse | ré bémol, | seconde diminuée, | 1 | 0 | 375 — | 384 |
Si | ut, | seconde mineure, | 1 | 1 semi-ton, | 15 — | 16 |
Ut | ré, | seconde majeure, | 1 | 1 ton, | 8 — | 9 |
Ut | ré dièse, | seconde superflue, | 1 | 1 ton & demi, | 64 — | 75 |
Si | ré bémol, | tierce diminuée, | 2 | 1 ton, | 125 — | 144 |
Mi | sol, | tierce mineure, | 2 | 1 ton & demi, | 5 — | 6 |
Ut | mi, | tierce majeure, | 2 | 2 tons, | 4 — | 5 |
Fa | la dièse | tierce superflue, | 2 | 2 tons & demi, | 96 — | 125 |
Ut dièse | fa, | quarte diminuée, | 3 | 2 tons, | 75 — | 96 |
Ut | fa, | quarte juste, | 3 | 2 tons & demi, | 3 — | 4 |
Ut | fa dièse, | triton, | 3 | 3 tons, | 32 — | 45 |
Fa dièse | ut, | fausse quinte, | 4 | 3 tons, | 45 — | 64 |
Ut | sol, | quinte juste, | 4 | 3 tons & demi, | 2 — | 3 |
Ut | sol dièse, | quinte superflue, | 4 | 4 tons, | 16 — | 29 |
La dièse | fa, | sixte diminuée, | 5 | 3 tons & demi, | 125 — | 192 |
Mi | ut, | sixte mineure, | 5 | 4 tons, | 5 — | 8 |
Sol | si, | sixte majeure, | 5 | 4 tons &-demi, | 3 — | 5 |
Ré bémol | si, | sixte superflue, | 5 | 5 tons, | 72 — | 125 |
Ré dièse | ut, | septieme diminuée, | 6 | 4 tons & demi, | 75 — | 128 |
Mi | ré, | septieme mineure, | 6 | 5 tons, | 5 — | 9 |
Ut | si, | septieme majeure, | 6 | 6 tons & demi, | 8 — | 15 |
Sol bémol | fa dièse, | septieme superflue, | 6 | 6 tons, | 192 — | 375 |
Ut | ut, | octave, | 7 | 6 tons, | 1 — | 2 |
Il faut remarquer que ce que les harmonistes appellent septieme superflue n’est qu’une véritable septieme majeure avec un accompagnement particulier, la propre septieme superflue n’ayant pas lieu dans l’harmonie.
On observera aussi que la plûpart de ces rapports peuvent se déterminer de plusieurs manieres ; nous avons préféré la plus simple & celle qui donne les moindres nombres.
Pour composer ou redoubler un de ces intervalles simples, il suffit d’y ajoûter l’octave autant de fois qu’on veut, & pour avoir le nom de ce nouvel intervalle, il faut ajoûter au nom de l’intervalle simple autant de fois sept qu’on y a ajoûté d’octaves. Réciproquement pour connoître le simple d’un intervalle redoublé dont on a le nom, il ne faut qu’en rejetter sept autant de fois qu’on le peut ; le reste donnera le nom de l’intervalle simple qui l’a produit. Voulez-vous une quinte doublée, c’est-à-dire, l’octave de la quinte, ou la quinte de l’octave ? ajoûtez 7 à 5, vous aurez 12 : la quinte redoublée est donc une douzieme. Pour trouver le simple d’une douzieme, rejettez 7 autant que vous le pourrez de ce nombre 12, le reste 5 vous indique une quinte. A l’égard du rapport, il ne faut que doubler le conséquent, ou prendre la moitié de l’antécédent de la raison simple autant de fois qu’on ajoûte d’octaves, & l’on aura la raison de l’intervalle composé ; ainsi 2. 3. étant la raison de la quinte, 1. 3. ou 2. 6. sera celle de la douzieme, &c. sur quoi l’on doit bien prendre garde qu’en terme de Musique, composer ou redoubler un intervalle, ce n’est pas l’ajoûter à lui-même, mais c’est y ajoûter l’octave, le triple, c’est en ajoûter deux, &c.
Je dois avertir ici que tous les intervalles exprimés dans ce Dictionnaire, par les noms des notes qui les forment, doivent toujours se compter du grave à l’aigu, & non de l’aigu au grave ; c’est-à-dire, par exemple, que cet intervalle, re ut, n’est pas une seconde, mais une septieme. (S)
Étymologie de « intervalle »
Provenç. entreval ; espagn. intervalo ; ital. intervallo ; du lat. intervallum, de inter, entre, et vallus, pieu : proprement, l'espace entre deux palissades.
- Du latin intervallum.
Phonétique du mot « intervalle »
Mot | Phonétique (Alphabet Phonétique International) | Prononciation |
---|---|---|
intervalle | ɛ̃tɛrval |
Fréquence d'apparition du mot « intervalle » dans le journal Le Monde
Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.
Évolution historique de l’usage du mot « intervalle »
Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.
Citations contenant le mot « intervalle »
-
Les assassinats légaux n'empêchent pas le flot de la liberté de se soulever à de longs intervalles et d'entraîner toujours dans son impitoyable courant quelques-uns de ceux qui sont assez fous pour vouloir faire digue.
Victor Schoelcher -
Les mots jaillissent en cascade, roulades et pirouettes de clowns meublant les intervalles dans un cirque.
Anita Nair — Les Neufs Visages du coeur -
Pour savoir où on en est avec quelqu'un, il suffit d'écouter de la musique ensemble. Le moindre désaccord nerveux vient faire taches dans les intervalles, mais si le son passe sans rencontrer personne, c'est le signe que tout va bien.
Philippe Sollers — Passion fixe -
C'est la nature qui, à intervalle régulier, nous rappelle par son silence, qu'il faut nous purifier.
Zhang Xianliang — Mimosa -
Ce qu'il y a de plus pénible dans l'écriture : la sécheresse, l'intervalle entre deux livres, comme un hiatus dans sa propre durée intérieure. On se croirait en suspens.
Fernand Ouellette — La Mort vive -
L’amour est cet intervalle délicieux entre le moment où vous rencontrez une jolie fille et celui où vous vous découvrez qu’elle ressemble à un hareng.
John Barrymore -
L’art se situe dans l’intervalle, mince comme la peau, qui sépare la vérité du mensonge.
Monzaemon Chikamatsu — Entretiens avec Hozumi Ikkan -
Le passé est l’intervalle qui sépare la perception du souvenir.
Louis Lavelle — Du temps et de l’éternité -
Pourquoi les gens naissent-ils? Pourquoi meurent-ils ? Et pourquoi cherchent-ils dans l'intervalle à porter le plus souvent possible une montre à quartz numérique ?
Douglas Adams — Le guide du routard galactique -
Il y a, entre aujourd’hui et demain, un long intervalle : apprends à être diligent, tandis que tu es encore éveillé.
Johann Wolfgang von Goethe — Sprüche in reimen
Traductions du mot « intervalle »
Langue | Traduction |
---|---|
Anglais | range |
Espagnol | intervalo |
Italien | intervallo |
Allemand | intervall |
Chinois | 间隔 |
Arabe | فترة |
Portugais | intervalo |
Russe | интервал |
Japonais | 間隔 |
Basque | tarte |
Corse | intervallu |
Synonymes de « intervalle »
- pause
- distance
- interstice
- entracte
- interruption
- écart
- espace
- intermède
- période
- laps
- plage
- solution de continuité
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Nombre de points du mot intervalle au scrabble : 13 points