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Cuire

Définitions de « cuire »

Trésor de la Langue Française informatisé

CUIRE, verbe.

I.− Emploi trans.
A.− Soumettre une matière à l'action du feu ou d'une source de chaleur correspondante qui modifie cette matière dans sa substance, généralement pour la rendre propre à un certain usage.
1. [Le compl. d'obj. désigne des aliments] Soumettre à l'action d'une source de chaleur qui modifie l'aliment dans sa substance, pour le rendre propre à la consommation.
a) [Le suj. désigne une pers.] Cuire du pain, cuire qqc. à la broche, à petit feu. Le dîner était acheté : la concierge le cuirait (A. France, Bonnard,1881, p. 450).Elle sait (...) cuire les confitures de cassis (Duhamel, Suzanne,1941, p. 51):
1. ... il n'est pas un prisonnier qui n'ait profondément méprisé la barbarie teutonne en matière de cuisine. Un pays où la grillade est inconnue, où l'on ne conçoit pas de cuire une viande autrement qu'à l'eau, ... Ambrière, Les Grandes vacances,1946, p. 191.
SYNT. Cuire une brioche, un potage; cuire qqc. en cocotte, au four, à four doux, sur le fourneau; cuire qqc. sur un feu vif.
À cuire [En parlant d'un aliment] Qui n'est à consommer que cuit. Loche [en normand : « secoue l'arbre pour faire tomber... »] des pommes à cuire (Maupass., Contes et nouv.,t. 1, Vieux, 1884, p. 133).
Au fig. Dur à cuire [En parlant d'une pers.] Qui résiste. Notre colonel, qui était ce qu'on nomme un dur à cuire (Vigny, Serv. et grand. milit.,1835, p. 196).Des gaillards durs à cuire (Romains, Knock,1923, I, p. 3).Cf. dur*-à-cuire.
Emploi pronom. à sens passif. Tout cela se cuisait en cachette sur des feux de fortune (Ambrière, Les Grandes vacances,1946p. 40).
En partic., emploi abs. Cuire du pain. Ce boulanger cuit deux fois par jour (Ac.1835-1932).Ceux qui avaient cuit la veille lui offrirent du pain frais (Tharaud, Ville et champs,1907, p. 140).
Proverbe, vieilli. Vous viendrez cuire à mon four, ,,Vous aurez quelque jour besoin de moi, et je trouverai l'occasion de me venger`` (Ac. 1835, 1878).
b) [Le suj. désigne l'agent physique de la cuisson] Un trop grand feu brûle les viandes, au lieu de les cuire (Ac.1798-1932).
P. anal., vieilli. [Le compl. d'obj. désigne des fruits] Faire mûrir. Le soleil n'est pas assez chaud dans ce pays-là pour bien cuire les melons (Ac.1798-1932).Le jour est brûlant comme un fruit Que le soleil fendille et cuit (Noailles, Ombre jours,1902, p. 12).
2. [Le compl. d'obj. désigne certains matériaux] Soumettre à l'action d'une source de chaleur qui modifie le matériau dans sa substance pour le rendre propre à un usage spécifique.
a) [Le suj. désigne une pers.] Cuire des briques, la chaux, des couleurs; fourneau à cuire les émaux. Ils (...) pétrissaient et cuisaient des vases d'argile (A. France, Pierre bl.,1905, p. 19):
2. [Les habitants des Pays-Bas] ont eu l'idée de cuire [la terre] et de cette façon la brique, la tuile, qui sont les meilleures défenses contre l'humidité, se trouvent sous leur main. Taine, Philos. de l'art,t. 1, 1865, p. 258.
Emploi pronom. à sens passif. Le plâtre se cuit entre murs (Ser, Phys. industr.,1890, p. 2).
b) [Le suj. désigne l'agent physique de la cuisson] La vapeur destinée à cuire les couleurs est introduite entre l'enveloppe intérieure et l'enveloppe intermédiaire (Manuel fabric. coul.,t. 2, 1884, p. 303).
Emploi abs. Les fours très vieux cuisent moins vite et moins bien que les fours neufs (Al. Brongniart, Arts céram.,1844, p. 229).
3. P. plaisant. [Le compl. d'obj. désigne une pers.] Brûler, soumettre au supplice du feu. Démons, damnés, maudits, sont dans la cuve atroce (...) et le bain Qui les cuit, rafraîchit là-haut le chérubin (Hugo, Religions et religion,1880, p. 194).
B.− P. anal.
1. Soumettre à l'action de la chaleur qui peut en modifier l'apparence.
a) Rare. [Le suj. désigne une pers.] Vinca (...) cuisait paisiblement au soleil ses hautes jambes (Colette, Blé en herbe,1923, p. 125).
b) [Le suj. désigne l'agent physique (source de chaleur)] Peau cuite par le soleil. Nous ne sentons même pas les rayons qui nous cuisent (T'Serstevens, Itinér. esp.,1933, p. 82):
3. En semaine, Philippe ne va pas à l'auberge, et le soleil seul cuit ses joues; mais chaque dimanche, après vêpres, le vin achève de les cuire. Renard, Nos frères farouches,1910, p. 153.
2. [La cause du processus peut ne pas être une source de chaleur] Donner l'aspect de quelque chose qui a été soumis à l'action de la chaleur qui en modifie l'état. Je devine (...) Quelles larmes cuisaient comme l'eau de la mer, Au long des nuits, tes yeux (A. France, Poés., Noces corinth.,1876, p. 246).Fougères cuites par la gelée (Morand, Lewis et Irène,1924, p. 24).Le soleil cuisait les pivoines (Pourrat, Gaspard,1931, p. 137).
C.− Au fig. [Le suj. désigne un sentiment] Provoquer une sensation d'irritation ou de douleur psychologique. Alors j'avais envie de l'interroger, une envie qui me cuisait le cœur (Maupass., Contes et nouv.,t. 2, Masque, 1889, p. 1165).
II.− Emploi intrans.
A.− Être soumis à l'action du feu ou d'une source de chaleur correspondante qui modifie la matière traitée dans sa substance, généralement pour qu'elle devienne propre à un certain usage.
1. [Le suj. désigne des aliments] Être soumis à l'action d'une source de chaleur pour devenir propre à la consommation. Faire cuire à petit feu, dans du vin, au four; mettre à cuire cinq minutes. Le bouc en morceaux cuisait dans le beurre rance (Flaub., Tentation St Antoine,1856, p. 642).Des légumes cuisaient à la vapeur dans des percolateurs (Morand, New York,1930, p. 94):
4. Tante Agathe, (...) a fait cuire le souper. Mais vous pensez bien qu'il faut néanmoins surveiller à la cuisine. Même les plats qui paraissent cuire tout seuls, comme le jambonneau, le salé aux pommes de terre, (...) on dirait qu'ils ont besoin de sentir qu'on a l'œil sur eux. Malègue, Augustin,t. 1, 1933, p. 45.
,,Ces légumes, ces fèves, ces pois, etc., cuisent bien, ne cuisent pas bien.`` (Ac. 1798-1932). ,,Ils sont faciles ou difficiles à cuire`` (Ac. 1798-1932).
Au fig., fam. [Le suj. désigne une pers.] Rester sans aide, sans secours. Je cuisais dans cette affreuse situation, quand Monseigneur vous envoya chez nous (Fabre, Courbezon,1862, p. 127).Il faut le laisser s'énerver dans l'attente! Le laisser cuire! (Colette, Képi,1943, p. 46).Il me met surtout en garde contre le mauvais esprit de la population qui, gavée depuis la guerre, dit-il, a besoin de cuire dans son jus (Bernanos, Journal curé camp.,1936, p. 1063).
Rem. Dans la conversation fam., on emploie l'expr. Va te faire cuire un œuf au sens de « va-t-en, tu m'importunes ».
2. [Le suj. désigne des matériaux] Être soumis à l'action d'une source de chaleur qui modifie le matériau dans sa substance, pour devenir propre à un usage spécifique. [Il y a] cuisson simple (...) [quand] la pâte et l'enduit vitreux [peuvent] cuire à la même température (Al. Brongniart, Arts céram.,1844p. 181):
5. Il trouva de l'argile sur des terres qu'il possédait à Leers, fit cuire de la brique « à l'air », sans four, à la mode d'autrefois comme l'a fait Vauban pour ses fortifications. Van der Meersch, Invasion 14,1935, p. 477.
3. P. plaisant. [Le suj. désigne une pers.] Être soumis au supplice du feu. [Théodore d'Héraclée] que l'on fit cuire jadis, dans la ville d'Amasée, à petit feu (Huysmans, Cathédr.,1898, p. 462).
B.− P. anal. [La cause du processus peut ne pas être une source de chaleur] Prendre l'aspect de quelque chose qui a été soumis à l'action de la chaleur qui en modifie l'état. Ses yeux bleus avaient cuit dans les larmes (A. France, Vie fleur,1922, p. 305).Il a fait cet été une chaleur extraordinaire, il semblait vraiment que le soleil était une arme du mal. Qui pouvait regarder sans colère les beaux feuillages en train de cuire? (Giono, Chron.,Noé, 1947, p. 321).
C.− P. ext.
1. [Le suj. désigne un animé ou un inanimé] Être soumis à une grande chaleur. Pendant que tu avais froid à Terre-Neuve, on cuisait ici, et, pendant que tu grillais en Afrique, nous grelottions dans nos habits d'été (Sand, Corresp.,t. 4, 1812-76, p. 278).D'amples parkings sans ombrage où cuisent les tôles des voitures (T'Serstevens, Itinér. esp.,1933, p. 36).
[Avec un suj. impers.] :
6. Dans la ville, (...) une torpeur morne régnait. (...) Seul le vieux malade de Rieux triomphait de son asthme pour se réjouir de ce temps. − Ça cuit, disait-il, c'est bon pour les bronches. Ça cuisait en effet, mais ni plus ni moins qu'une fièvre. Toute la ville avait la fièvre, c'était du moins l'impression qui poursuivait le docteur Rieux,... Camus, La Peste,1947, p. 1240.
[La cause n'est pas une source de chaleur] Le beau froid! un cent d'aiguilles me picotent les joues. (...) Je cuis. Loué soit Dieu! mon teint reprend son lustre (Rolland, C. Breugnon,1919, p. 26).
2. [Le suj. désigne une partie du corps humain; le verbe est suivi d'un compl. second. désignant une pers.] Être le siège ou la cause d'une sensation de brûlure. La peau lui cuit. Il cacha dans ses mains ses joues chaudes, ses yeux dont les paupières lui cuisaient (Green, Moïra,1950, p. 101):
7. La rouette de madame Lepic se lève, prête à cingler. Poil de Carotte, pâle, croise ses bras, (...) les reins chauds déjà, les mollets lui cuisant d'avance, ... Renard, Poil de carotte,1894, p. 210.
Rare. [Sans compl. second] Tu ne connais pas le désert, quand il y monte une tempête de sable... Les yeux cuisent, le sang vous aveugle, on n'y voit plus clair (Gracq, Syrtes,1951, p. 296).
Loc. proverbiale, vieilli. Trop gratter cuit, trop parler nuit (Ac. 1798-1932). Si l'on dépasse la mesure, il en résulte un mal au lieu d'un bien.
3. Au fig. Causer une douleur morale, un sentiment pénible. Mon remords, qui me cuisait cruellement parfois, a disparu sans raison (L. Daudet, Cœur et abs.,1917, p. 159).Me précipitant tout-à-fait dans la franchise, au risque de recevoir quelque demi-mot ou quelque regard humiliant qui me cuise pendant six mois (Stendhal, Corresp.,t. 2, 1800-42, p. 310).
Emploi impers. En cuire à qqn. S'il vous en cuit, je m'en lave les mains, vous l'aurez cherché! (Sand, Beaux MM. Bois-Doré,t. 1, 1858, p. 164).Tâche à présent de voir l'avenir plus en rose, ou cette fois il t'en cuira (Gracq, Syrtes,1951, p. 171):
8. ... je ne te conseille pas de dresser contre Egisthe ta petite tête venimeuse : il sait, d'un coup de bâton, briser les reins des vipères. Crois-moi, fais ce qu'il t'ordonne, sinon il t'en cuira. Sartre, Les Mouches,1943, I, 5, p. 38.
[Le verbe est suivi d'un compl. à valeur causale (subst. ou inf.) introduit par de] Il vous en cuira de votre trop de confiance (Barante, Hist. ducs Bourg., t. 2, 1821-24, p. 124).On n'est sage qu'après qu'il en a cuit de ne pas l'être (Rolland, Âme ench.,1925, p. 25).
Prononc. et Orth. : [kɥi:ʀ], (je) cuis [kɥi]. Ds Ac. 1694-1932. Homon. cuir. Étymol. et Hist. A. 1. Ca 881 « brûler (d'un corps humain) » coist parfait 3epers. pronom. (Eulalie, 20 ds Henry); Littré note ,,dans le style familier, faire périr par le supplice du feu``; 2. 1269-78 « griller, flétrir [les plantes] (en parlant des intempéries) » (J. de Meun, Rose, éd. F. Lecoy, 17884); 3. 1606 fig. cuit « ivre » (Merlin Coccaie ds Esn.); 4. 1675 il est cuit « il est perdu » (Widerhold). B. 1. 1155 char quite (Wace, Brut, éd. I. Arnold, 11486); 2. ca 1165 « soumettre à l'action du feu » or cuit (B. de Ste-Maure, Troie, 25138 ds T.-L.); 3. a) 1611 fig. il sera bien dur à cuyre (en parlant d'un homme comparé à un oiseau) (P. de Larivey, Tromperies, V, 5 ds Anc. théâtre fr., t. 7, p. 94); 1829 subst. un dur à cuire (d'apr. Esn.); b) 1866 arg. cuire dans son jus (Delvau, p. 103). C. 1. ca 1170 au fig. (B. de Ste-Maure, Ducs de Normandie, éd. C. Fahlin, 18724 : de cuizans moz); début xives. impers. je me doubte qu'il ne me cuise (Pamphile et Galatée, éd. J. de Morawski, 936); 1660 il lui en cuira (Oudin); 2. 1180-90 « brûler, faire mal (d'une plaie) » (Renart, éd. E. Martin, X, 1112). Du b. lat. *cocere, lat. class. coquere « cuire », « brûler, fondre (chaux, métal) »; « faire mûrir, dessécher »; « digérer », « méditer »; « tourmenter ». Fréq. abs. littér. : 602. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 468, b) 1 111; xxes. : a) 1 081, b) 914. Bbg. Gottsch. Redens. 1930, passim.Lyer (S.). Part. prés. actif avec le sens passif. Archivum Romanicum. 1932, t. 16, p. 302.

Wiktionnaire

Verbe - français

cuire \kɥiʁ\ transitif ou intransitif 3e groupe (voir la conjugaison)

  1. Préparer les aliments par le moyen du feu, de la chaleur, pour les rendre propres à être mangés. Devenir propre à être mangé ou propre à tel ou tel usage par le moyen du feu, de la chaleur.
    • Si l'on blanchit trop ce chou , il se réduira en bouillie en le cuisant pour la table : et s'il ne l'est pas suffisamment, on ne pourra le cuire assez pour le rendre mangeable; l'expérience seule apprend le point juste ; […]. — (François Rozier, Cours complet d'agriculture ou Nouveau dictionnaire d'agriculture, Paris: ‎Pourrat Frères, 1834, vol. 6, page 361)
    • J'essaie bien de cuire du porridge sur le réchaud à cadran, mais une vague plus forte envoie le porridge se coller au plafond et aux parois du poste. — (Alain Gerbault, À la poursuite du soleil; tome 1 : De New-York à Tahiti, 1929)
    • Arsène André avait commencé de laver quelques pommes de terres qu'il cuirait sans les peler - à la baïenne - à l'étouffée. — (Jean Rogissart, Passantes d’Octobre, Librairie Arthème Fayard, Paris, 1958)
    • Dans Mythologiques , Claude Lévi-Strauss écrit que cuire un aliment, c’est couper court au processus naturel qui fait qu’à terme un aliment cru (un légume, un fruit, un morceau de viande) devient une chose pourrie. — (Françoise Vergès, À vos mangues !, traduction de Dominique Malaquais, dans Politique africaine, 2005/4, n° 100, page 320)
    • […] en cuisine, un de leurs camarades cuit des pommes de terre et réchauffe des kippers, ces harengs ouverts par le dos salés et fumés. — (Jacky Durand, La nuit où le hareng sort, dans Libération (journal) du 29 novembre 2010, pages 30-31)
  2. (Vieilli) (Absolument) Cuire du pain.
    • Ce boulanger cuit deux fois par jour.
    • Tous les habitants d’un village étaient obligés d’aller cuire au four banal.
  3. (Suisse) Bouillir ou faire bouillir.
    • Cuire de l’eau pour le café. L’eau cuit.
    • Cuire du linge.
  4. (Par extension) Chauffer certaines choses pour les rendre propres à l’usage qu’on en veut faire.
    • Cuire du plâtre, de la chaux.
    • Un fourneau à cuire de la brique, etc.
    • Cuire du fil, de la soie.
    • Statue, vase de terre cuite.
  5. Transformer par la chaleur selon les effets souhaités ; antonyme : bruler.
    • Un trop grand feu brûle les viandes, au lieu de les cuire.
    • La chaleur naturelle de ces eaux est telle, qu’elles cuisent un œuf en moins de cinq minutes.
  6. Mûrir.
    • C’est le soleil qui cuit tous les fruits.
    • Le soleil n’est pas assez chaud dans ce pays-là pour bien cuire les melons.
  7. (Par analogie) Causer une douleur âpre et aiguë, comme celle que fait éprouver une brûlure ou une écorchure.
    • Je me suis brûlé, je me suis écorché la main, cela me cuit.
    • La main me cuit.
    • Les yeux me cuisent, ils me cuisent comme du feu.
    • La tête me cuit.
  8. (Figuré) (Familier) Nuire, causer un dommage, une vive douleur.
    • Il vous en cuira quelque jour ; il m’en cuit ; il pourrait bien vous en cuire.
    • — Michel est un mauvais gars qui veut rire... S’il lui en cuit, tant mieux ! — (Ernest Pérochon, Nêne, 1920)
    • Son adresse ! Et exacte, hein ! Sinon, il vous en cuira — (Georges Simenon, Pietr-le-Letton, Fayard, 1931, réédition Le Livre de Poche, page 109)
    • Vous oubliez que je suis la fille du plus grand maquignon de tout le Limousin. À Paris aussi, j’ai des relations très haut placées, il pourrait vous en cuire. — (Antoine Blondin, Monsieur Jadis ou l'École du soir, 1970, réédition Folio, 1972, page 144)
  9. (Cuisine) Coaguler en parlant de jaunes d’œufs que l’on fait blanchir sans avoir pris soin de les fouetter énergiquement.
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Littré (1872-1877)

CUIRE (kui-r'), je cuis, nous cuisons ; je cuisais ; je cuisis ; je cuirai ; je cuirais ; cuis, cuisons ; que je cuise, que nous cuisions ; que je cuisisse ; cuisant, cuit v. a.
  • 1Préparer les aliments par l'action de la chaleur. Cuire du bœuf dans une marmite. Cuire du pain, des pommes au four.

    Par extension, il se dit de la préparation qu'on donne à de certaines choses par l'action du feu. Cuire du plâtre, de la chaux, de la brique. Cuire du fil, de la soie.

    Dans le style familier, faire périr par le supplice du feu. C'était [ma nation] un composé d'ignorance, de superstition, de bêtise, de cruauté et de plaisanterie ; on commença par pendre et par faire cuire tous ceux qui parlaient sérieusement contre les papegauds, Voltaire, Dial. 10.

    Un boute-tout-cuire (voy. BOUTE-TOUT-CUIRE). C'est une vraie boute-tout-cuire, Qui ne fait que sauter et rire, Et ne va jamais qu'au galop, Scarron, Virg. trav. II.

  • 2Opérer la cuisson, en parlant du feu, de la chaleur. Un feu doux et modéré cuit un rôti à point.
  • 3 Absolument. Ce boulanger cuit deux fois par jour, il met deux fois une fournée de pain à cuire.
  • 4Amener à maturité, en parlant du soleil et de la chaleur. Le soleil n'est pas assez chaud pour cuire les melons.
  • 5 Terme de médecine. Digérer, élaborer. Il y a des aliments que l'estomac a peine à cuire. Cuire un rhume.
  • 6 V. n. Devenir cuit. Il faut que cette viande cuise dans son jus. Être plus ou moins facile à cuire. Ces légumes, ces pois ne cuisent pas bien.

    Fig. J'ai été ravie de ce discours, mettons-le cuire, nous y penserons quelque jour, Sévigné, 379. Je vous ai vu mettre cuire des pensées et rêver profondément pour des sujets qui le méritaient moins, Sévigné, 460.

  • 7Causer une douleur brûlante. Je me suis brûlé, la main me cuit. Les yeux me cuisent comme du feu. C'est un mal [l'amour] qui jamais n'en tendit raillerie, Qui cuit et qui chatouille, et qui sut de tout temps Donner à corps perdu sur les honnêtes gens, Hauteroche, Crisp. music. V, 3. Un aiguillon qui, prompt à la venger, Cuit plus d'un jour à qui l'ose outrager, Rousseau J.-B. Ép. I, 1.

    En cuire, V. impers. Être l'occasion d'un désagrément, d'un regret, d'un repentir. Il vous en cuira quelque jour. Il pourra bien vous en cuire. Chacun d'eux s'éveilla chapon, Don. cuit à la pauvre volaille, Piron, Fabl.

  • 8Se cuire, v. réfl. Devenir cuit. Le gigot à la casserole se cuit à petit feu.

    Fig. Tout se cuisait de loin en Bretagne, on y flattait les Bretons d'une conquête d'indépendance qui ne serait due qu'à leur union et à leur fermeté, Saint-Simon, 479, 195.

PROVERBES

Trop gratter cuit, trop parler nuit, c'est-à-dire il faut se garder de trop parler.

Vous viendrez cuire à mon four, vous aurez quelque jour besoin de moi, et j'aurai l'occasion de me venger.

HISTORIQUE

Xe s. Elle colpes non avret, por o no s'coist [ne fut pas brûlée], Eulalie.

XIIIe s. Aucunes fois les fait on sainnier [les artères de la tête], et cuire [brûler] après chou [ce] qu'ele sont trancies, Alebrand, f° 12. Riens qu'on peüst manger, [il] n'i ot ne cru ne cuit, Berte, XXXVI. Haister [rôti] [il] quisseit sur le bracer D'un sangler parcreü et grant, Lai del desiré. Que nuls ne cuise ou rotisse oues [oies] ou veel, agniaux, chevraus ou cochons, se il ne sont bons, loyaux et souffisans pour manger et pour vendre, Liv. des mét. 176. Nul talemelier ne doit cuire au dimenche ne au jour de Noel, ne…, ib. 10. Li rois Nobles est en mal point, N'en puet partir en nule guise Que de cest siege ne se cuise, Ren. 27646. Forment li delt et cuit sa plaie, ib. 2094. Ceus [ces vents] versent bléz et vignes cuisent, Et flors et fruiz d'arbres abatent, la Rose, 28114. Il ot angoisse en la pointure, Mès moult m'assoage [soulage] l'ointure ; D'une part m'oint, d'autre me cuit, Ainsinc m'aïde, ainsinc me nuit, ib. 1889. Atten e sueffre la detrece, Qui orendroit te cuit et blece, ib. 2042. Les bras li ont loiés et les piés environ, Les garés [jarrets] li ont quis à fu et à charbon, à soufre tout ardant, et puis après à plon, Ch. d'Ant. V, 340. Autant vaut fours qui ne cuist, comme chartre qui n'est uzée, Beaumanoir, L, 1.

XIVe s. Pain bien à point cuit ou bien fait, Oresme, Eth. 65.

XVe s. Cher sire, un jour viendra que telles choses vous seront si renouvelées qu'elles vous cuiront, Froissart, III, IV, 56. Veuillent au roy monstrer que je suis cuis ; Il m'aidera par leur bonne raison De trois cens frans ; d'autre chose ne ruis [je ne demande], Deschamps, Poésies mss. f° 223, dans LACURNE. Les chasteaulx prins par malefice, Dont maint païs ont esté cuis, ib. f° 299. Et pour ce dit vray le proverbe, que à grant peine peut fuyr celluy qui a les pieds cuictz, Perceforest, t. IV, f° 22. Et tant plus me doit cuire quand vous avez faict contre mon gré, Chastelain, Chr. des D. de Bourg. II, ch. 5. Vente, gresle, gelle, j'ay mon pain cuict, Je suis paillard, la paillarde me duit, Villon, Ball.

XVIe s. Je pourrai bien avoir telle haine qu'elle vous cuira, Marguerite de Navarre, Nouv. XLIII. Ils les cuisent et apprestent à diverses saulces, Montaigne, I, 106. Ils font cuire le corps du trespassé, Montaigne, I, 112. Ils en font des grils à cuire viande, Montaigne, I, 237. Si n'y en eut-il pas un à qui les paroles de Marcellus ne cuisissent plus que ses propres bleceures, Amyot, Marcel. 43. On leur bailloit leur orge toute mondée et escorchée, à fin qu'ils la cuisissent mieulx et la digerassent plus tost, Amyot, Eum. 22. Le jour il dormoit ou se promenoit tout yvre pour cuire et digerer le vin qu'il avoit trop pris la nuict, Amyot, Anton. 12. Si vous y faillez, vostre desobeissance sera chastiée par vos envieux, qui eleveront en risées les merveilles de Dieu dans mes delivrances et vous feront cuire de vostre curieuse vanité, D'Aubigné, Vie, III. Si je voulois cuire, le four cherroit [tomberait], Oudin, Curios. fr. add. Elle a payé au boulanger, il ne luy cuit plus, Oudin, ib.

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Étymologie de « cuire »

Du gallo-roman *cŏgĕre, réfection du bas latin cŏcĕre, lui-même altération du latin classique cŏquĕre (sens identique), dont la racine a aussi donné queux, cocote ou cocotte (« petite marmite »).
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Wallon, cûre, cuire, cût, cuit ; saintong. cheure ; bourguig. cœu, cuit ; provenç. cozer, coire ; espagn. cocer ; ital. cuocere ; du latin coquere, de même radical que le grec πέσσειν, le sanscrit pacha (le p sanscrit devenant souvent c en latin, comme dans pancha, πέντε, quinque, cinq, et la syllabe cha étant ici représentée en grec par σσ et en latin par qu). Dans l'ancien français, cuire, outre son sens ordinaire, avait celui de faire périr par le supplice du feu.

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Fréquence d'apparition du mot « cuire » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « cuire »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « cuire »

  • Nous ne sommes pas sur cette terre pour filtrer des boissons et faire cuire des aliments, mais pour contribuer au perfectionnement de notre âme.
    Sénèque
  • Pauvre, celui qui fait cuire la cognée et du fer en attendant le bouillon.
    Proverbe arabe
  • Gouverner un grand pays revient à cuire un petit poisson.
    Lao-Tseu — Tao Te King
  • Parler ne fait cuire le riz.
    Proverbe chinois
  • Si celui dont l'autorité est incontestée, dit "igname" personne n'osera répondre "manioc", à moins qu'il n'aille faire cuire son manioc ailleurs.
    Massa Makan Diabaté — Une hyène à jeûn
  • Pourquoi s'embêter à faire cuire les plateaux-télé ? Je les suce congelés.
    Woody Allen
  • Jamais l’affamé ne fait trop cuire son pain.
    Proverbe serbo-croate
  • L'homme patient parvient à faire cuire une pierre jusqu'à ce qu'il la boive en bouillon.
    Proverbe nigritien
  • On devrait gouverner un grand empire avec autant de simplicité que l’on fait cuire un petit poisson.
    Proverbe chinois
  • Entre 1999 et 2017, la commune de Caluire-et-Cuire a connu une augmentation de sa population de : + 4,7%
    Rue89Lyon — Présidentielle 2022 : candidats, résultats, statistiques... Caluire-et-Cuire au rayon X
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Synonymes de « cuire »

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Antonymes de « cuire »

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Cuire

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