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Sacrifice

Variantes Singulier Pluriel
Masculin sacrifice sacrifices

Définitions de « sacrifice »

Trésor de la Langue Française informatisé

SACRIFICE, subst. masc.

A. − RELIGION
1. Action sacrée par laquelle une personne, une communauté offre à la divinité, selon un certain rite, et pour se la concilier, une victime mise à mort (réellement ou symboliquement) ou des objets qu'elle abandonne ou brûle sur un autel. Synon. holocauste, immolation, oblation, offrande.Agréer un sacrifice; faire, offrir un sacrifice; offrir qqc. en sacrifice (à un dieu). Il l'instruisoit de tous les usages des sacrifices: il lui montroit à choisir la génisse sans tache (...), à répandre l'orge sacrée (Chateaubr., Martyrs, t. 1, 1810, p. 128).V. autel ex. 3, bûcher1B 1 a ex. de Renan, hécatombe ex. 1, holocauste ex. 1 et oblation ex. 1:
Le sacrifice est l'action sacrée par excellence. Il déploie la variété de ses formes entre l'offrande, qui en est le plus bas degré, et le martyre, où le sacrifiant s'offre lui-même comme victime. Si l'on supprime le sacrifice, le culte perd sa fonction essentielle, la mythologie ou la théologie s'appauvrissent d'un de leurs dynamismes créateurs, et l'ascétique, la morale d'une dimension maîtresse. Philos., Relig., 1957, p. 34-13.
SYNT. Sacrifice agréable (à Dieu, aux dieux); sacrifice privé, public, rituel, solennel; sacrifices païens; sacrifice d'animaux; sacrifice d'action de grâces, d'adoration, de communion, de louange; sacrifice expiatoire, propitiatoire; appareil, apprêts, rites du sacrifice; autel, couteau, parfum, sang, viande, victime du sacrifice.
En partic.
Sacrifice humain. Sacrifice dans lequel on immole une personne offerte comme victime. Sacrifice d'enfants, d'une jeune fille, de captifs. Ce fut assez vite le sentiment commun, le sacrifice humain loin d'alléger fit horreur (G. Bataille, Exp. int., 1943, p. 207).
RELIG. JUIVE. Sacrifice perpétuel, quotidien. Sacrifice ,,offert deux fois par jour, vers 9 h et vers 15 h. Il comportait l'immolation d'un agneau d'un an, l'oblation de farine mélangée d'huile et une libation de vin`` (Dheilly 1964).
Sacrifice sanglant. Sacrifice comportant la mise à mort d'une victime. Le sacrifice [à Rome] qui était une offrande ou une expiation pouvait être sanglant ou non sanglant. Dans le second cas, on offrait des gâteaux, des produits de la terre ou encore on pratiquait des libations (Pell.1972).
Sacrifice de (+ nom propre).[Le compl. désigne celui qui offre le sacrifice] Sacrifice d'Abel, de Caïn. Le sacrifice d'Abraham est la figure de la Passion (Flaub., Bouvard, t. 2, 1880, p. 130).[Le compl. désigne la victime] Sacrifice d'Iphigénie. Dieu est dans le sacrifice de Régulus et de Socrate, comme il est dans celui de Jésus (P. Leroux, Humanité, 1840, p. 933).
2. RELIG. CHRÉT. Sacrifice du Christ, sacrifice du calvaire, de la croix. Sacrifice parfait du Christ s'offrant à Dieu son père, sur la croix, en oblation unique pour le salut de l'homme et renouvelé dans l'Eucharistie. La théologie nous enseigne que la messe, telle qu'elle se célèbre, est le renouvellement du sacrifice du calvaire (Huysmans, Là-bas, t. 2, 1891, p. 183).La notion de l'eucharistie répétition du sacrifice de la croix (Philos., Relig., 1957, p. 5-12).V. oblation ex. 1.
THÉOL. CATH. Sacrifice (de la messe, de l'autel); sacrifice eucharistique; saint sacrifice (de la messe). Renouvellement sur l'autel du sacrifice de Jésus-Christ sur la croix, par le ministère du prêtre. Synon. messe.Ne négligez pas d'assister au divin sacrifice; il est la source de toutes les grâces et le complément de tous les dons (Lamennais, Lettres Cottu, 1818, p. 4).Jamais il n'avait senti si profondément le désir d'être prêtre et de célébrer à son tour le saint sacrifice (A. France, Orme, 1897, p. 20).Savez-vous que la messe, le sacrifice de la messe est l'acte unique d'obéissance, l'acte essentiel (Bloy, Journal, 1899, p. 344).V. messe ex. de Billy.
B. −
1. Renoncement, privation que l'on s'impose volontairement ou que l'on est forcé de subir soit en vue d'un bien ou d'un intérêt supérieur, soit par amour pour quelqu'un. Grand, petit, gros sacrifice; accomplir, offrir un, des sacrifice(s); accepter le sacrifice (de qqn, de qqc.); consentir à un sacrifice. Alors son oncle essaya de la consoler de l'énorme sacrifice de quatre robes qu'elle venait de faire (Stendhal, Lamiel, 1842, p. 130).Albert (...) ne comptait pas comme un mince sacrifice celui d'être privé des cigares du café de Paris (Dumas père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 500).V. holocauste ex. 2.
Vieilli. Faire un sacrifice à qqn. Puisque ta mère t'a commandé de faire le plus grand des sacrifices à ton frère l'aveugle, tous les autres sacrifices que tu pourras faire aux autres seront bien faciles et bien légers (Lamart., Tailleur pierre, 1851, p. 495).
SYNT. Sacrifice généreux, héroïque, douloureux; sacrifice de son bonheur, de son cœur, de son orgueil; sacrifice de sa fortune, de sa situation, de son temps, de sa vie; douleur, force, grandeur, magnanimité, prix du sacrifice; s'imposer un, des sacrifice(s); être prêt au sacrifice; recueillir le fruit de son sacrifice; aller jusqu'au bout de son sacrifice.
2. En partic.
a) RELIG. CHRÉT. Sacrifice (moral, spirituel). Offrande à Dieu d'un acte de renoncement, d'une privation en union avec le sacrifice du Christ. Elle repoussait tout dessert. Elle refusait la barre de chocolat du goûter. M. Georges était trop au courant des habitudes pieuses. Il y vit des « sacrifices » (La Varende, Indulg. plén., 1951, p. 211).
Vieilli. Faire des sacrifices à. Tout passe en ce monde, nos douces jouissances d'abord, ces fleurs de la vie. Il faut en faire des sacrifices à Dieu (E. de Guérin, Lettres, 1846, p. 478).
b) Sacrifice (de soi). [Corresp. à se sacrifier] Fait de renoncer à ses intérêts propres voire à sa propre vie, pour un idéal ou par amour de son prochain. Synon. dévouement.Faire le sacrifice de soi. La vertu roide et domestique (...) d'une lignée de femmes irréprochables, obscures, tenaces dans le bien, à la fois sages et ingénues, toujours prêtes à l'oubli de soi, au renoncement, au sacrifice, enragées à se sacrifier (Bernanos, Dialog. ombres, 1928, p. 52).Alvaro: Car tu te sacrifies, n'est-ce pas? La générosité, c'est toujours le sacrifice de soi; il en est l'essence. Tu te sacrifies, Mariana? (Montherl., Maître Sant., 1947, iii, 5, p. 654).
Esprit de sacrifice. V. esprit 2esection II A loc.
c) Sacrifice (financier, d'argent). Fait de renoncer à un gain, de se priver pour consacrer une somme d'argent à un autre usage d'intérêt supérieur. Consentir à des sacrifices; économiser à force de sacrifices. Le titre d'avocat équivaut à une profession. Les familles font à l'envi de grands sacrifices pour pousser les enfants jusque-là (Reybaud, J. Paturot, 1842, p. 107).Vous n'avez fait aucun sacrifice, s'écria Simon. J'ai passé tous mes examens comme boursier, j'ai crevé de faim (Druon, Gdes fam., t. 1, 1948, p. 29).
COMM. Rabais que fait un vendeur. Le prix naturel [d'une marchandise] est donc composé des sacrifices antérieurs, faits par le vendeur (Destutt de Tr., Comment. sur Espr. des lois, 1807, p. 263).P. exagér. Et le prix, mesdames et messieurs, il est minime et dérisoire. Ce n'est pas une vente que je fais, c'est un sacrifice (Arnoux, Paris, 1939, p. 173).
d) Sacrifices (d'hommes). Perte en soldats au cours d'une bataille, d'une guerre. Finalement, après des sacrifices immenses d'hommes et d'argent, ils [les Autrichiens] furent heureux d'accorder les honneurs de la guerre aux défenseurs (Erckm.-Chatr., Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 409).
e) ÉCON. Sacrifice d'un animal. Mise à mort d'un animal pour la consommation ou en cas d'accident ou de maladie. Synon. abattage.L'intérêt conduit au sacrifice d'un animal [bœuf] de 11 à 16 mois, pesant de 400 à 500 kg (Wolkowitsch, Élev., 1966, p. 155).
C. − Sacrifice à (+ subst.).Action de se plier, de plus ou moins bon gré, à quelqu'un ou à quelque chose. Synon. concession.Des sacrifices à l'opinion, moi! Et à quel titre? (Toepffer, Nouv. genev., 1839, p. 430).Ce fut [bitumer une entrée], d'ailleurs, le seul sacrifice aux architectes modernes qu'il accepta jamais (Zola, Curée, 1872, p. 399).
D. − ARTS, LITT., au plur. Suppression de détails dans une composition, une peinture pour donner plus de vigueur à l'ensemble. Quelles tortures ce polisson de passage m'aura fait subir! Je fais des sacrifices de détail qui me font pleurer (Flaub., Corresp., 1853, p. 381).On remarque dans les ouvrages des Hollandais et des Flamands (...) un art même de dérober les sacrifices qui charme l'imagination (Delacroix, Journal, 1857, p. 142).
REM.
Sacrification, subst. fém.,rare. a) Littér. Action de sacrifier. [L'affaire Dreyfus] allait éclater pour la sacrification de nos jeunesses (Péguy, V.-M., comte Hugo, 1910, p. 765).b) Écon. ,,Opération consistant à se priver d'un animal qu'il est nécessaire d'abattre prématurément d'un point de vue économique (accident, maladie)`` (Termes nouv. Sc. Techn. 1983).
Prononc. et Orth.: [sakʀifis]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) 1119 « offrande à la divinité » (Philippe de Thaon, Comput, éd. E. Mall, 705); b) 1remoit. xiies. en partic. « mort du Christ pour la rédemption du genre humain » (Psautier de Cambridge, éd. Fr. Michel, XIX, 3); 1694 sacrifice de Jesus-Christ (Ac.); c) 1670 saint sacrifice « la messe » (Bossuet, Duch. d'Orl. ds Littré); 2. 1651 « abandon volontaire, renoncement » (Pascal, Lettre sur la mort de son père ds Œuvres, éd. J. Mesnard, t. 2, p. 853). Empr. au lat.sacrificium « offrande à la divinité » (de sacrificare, v. sacrifier), et chez les aut. chrét. « le sacrifice eucharistique, la messe », « pain consacré, divines espèces » (v. Blaise Lat. chrét.). Fréq. abs. littér.: 4 792. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 9 124, b) 6 017; xxes.: a) 5 661, b) 5 964.
DÉR.
Sacrificiel, -ielle, adj.a) [En parlant d'un inanimé] Qui concerne le sacrifice, qui est propre aux sacrifices. Synon. vx sacrificatoire.Offrande sacrificielle; rite sacrificiel. P. métaph. La possibilité propre de l'être (...) c'est d'être fondement de soi comme conscience par l'acte sacrificiel qui le néantit (Sartre, Être et Néant, 1943, p. 124).b) [En parlant d'une pers. ou d'un ensemble de pers.] Littér. Qui est enclin au sacrifice de soi. Je suis Celte, Celte de la tête aux pieds, notre race est sacrificielle. La rage des causes perdues, quoi! (Bernanos, Journal curé camp., 1936, p. 1094).V. immoler ex. 2. [sakʀifisjεl]. 1reattest. 1931 (Bernanos, Gde peur, p. 181); de sacrifice, suff. -iel*.
BBG.Dub. Dér. 1962, p. 48 (s.v. sacrificiel). − Gall. 1955, p. 33. − Méditation sur le sacrifice. Foi Lang. 1981, n o1, pp. 73-74.

Wiktionnaire

Nom commun - français

sacrifice \sa.kʁi.fis\ masculin

  1. (Religion) Action par laquelle on offre certaines choses ou certaines victimes aux dieux, ou à Dieu, avec certaines cérémonies, pour rendre hommage à sa souveraine puissance.
    • Il offre des sacrifices, aux autres dieux selon le rite albain, à Hercule selon le rite grec, suivant en cela la règle établie par Évandre. — (Tite-Live, Histoire romaine, éd. 'Les belles Lettres, 1940, texte établi par J. Bayet et traduit par G. Baillet, tome 1, livre 1, § VII, p.13)
    • On ouvrit la séance par un sacrifice à Cérès. Des prêtres immolèrent un jeune cochon, et de son sang purifièrent l'enceinte. — (E.-F. Lantier, Voyages d'Anténor en Grèce et en Asie, Paris : chez Belin & chez Bernard, 2e édition revue, an VI, tome 1er, p.5)
    • Ils prétendent que Tyndare oublia Vénus dans un sacrifice qu'il offrit à tous les dieux , et qu'en punition de ce mépris, Vénus fit en sorte que les filles de ce prince fussent bigames , trigames, et désertrices de leurs maris. — (Dictionnaire historique et critique de Pierre Bayle, t.7 (G-Hem), Paris, Desoer, 1820, p.546)
    • Il n'y a pas de fête complète, au Bénin, sans des sacrifices humains, et nous apprîmes le lendemain que deux esclaves avaient été égorgés, et leur sang répandu à terre devant les portes de nos cases pour nous rendre propices les esprits qui président aux voyages heureux". — (Louis Jacolliot, Voyage aux pays mystérieux (1876).)
  2. (Figuré) Abandon volontaire de quelque chose ; privation que l’on s’impose, ou qu’on accepte, pour l’amour de Dieu ou d’une personne, ou en considération de quelque chose.
    • Après chaque procès suivi d'exécutions, après chaque calamité publique réduite à coups d'impitoyables sacrifices et de mensonges de propagande, il lui faut des apothéoses. Nous avons décrit ces ovations des congrès, prolongées un quart d'heure entier. — (Victor Serge, Portrait de Staline, 1940)
    • Admettre cette préséance, c'est léser l'esprit républicain, porter atteinte aux principes de 89, faire fi des sacrifices consentis par les révolutionnaires de 1830 à 1871, c'est accepter de voir rétablir les iniquités qu'ils ont combattues au prix de leur sang ! — (Jean Rogissart, Passantes d’Octobre, Librairie Arthème Fayard, Paris, 1958)
    • La loi fondamentale est celle-ci : vous n'avez le privilège de prendre qu'en donnant. C'est le véritable sens du sacrifice. — (Arnaud Desjardins, Les chemins de la sagesse, La Table Ronde, Pocket spiritualité, 1999, p. 446)
    • Je semble défier la mort et pourtant je ne peux protéger les corps meurtris. Les soldats vont encore être obligés de faire des sacrifices pour un résultat plus qu'incertain, probablement un échec. — (Jean-Louis Riguet, Aristide, la butte meurtrie (Vauquois 1914-1918), Éditions Dédicaces, 2014)
  3. (Par hyperbole) Concession que l'on accepte de faire.
    • Si j’oublie l’injure qu’il m’a faite, c’est un sacrifice que le vous fais. Je fais volontiers ce sacrifice à notre ancienne amitié.
  4. (Figuré) Cérémonie ; sacrement.
    • Vous avez entendu parler des prodiges qui se sont passés en l'église de cette paroisse, pendant le saint Sacrifice de la messe, […]. — (Les hosties sanglantes de Vrigne-aux-Bois (Ardennes): trois lettres de M. l'Abbé Jules Morel, Paris & Tournai : chez H. Casterman, s.d. (peu après 1859), p. 5)
    • C’est nous que ses joyeux tintements appellent au dining-car, et nous marchons en procession vers le lieu du sacrifice[…]. Sur les plates-formes se sont groupés les curieux empressés à ne rien perdre de la cérémonie nuptiale.— (Jules Verne, Claudius Bombarnac, chapitre XXII, J. Hetzel et Cie, Paris, 1892)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

SACRIFICE. n. m.
Action par laquelle on offre certaines choses à Dieu avec certaines cérémonies, pour rendre hommage à sa souveraine puissance. Sacrifice solennel. Sacrifice propitiatoire, expiatoire. Les sacrifices de l'ancienne loi. Le sacrifice d'Abraham. Offrir un sacrifice, quelque chose en sacrifice. Le ministre du sacrifice. L'appareil du sacrifice. La victime destinée au sacrifice. L'autel des sacrifices. JÉSUS-CHRIST s'est offert en sacrifice à son Père sur la croix. Le sacrifice de la croix. JÉSUS-CHRIST est offert tous les jours en sacrifice sur nos autels. Le saint sacrifice de la messe ou simplement Le saint sacrifice. En termes de l'Écriture sainte, Offrir un sacrifice de louanges, Célébrer les louanges de Dieu.

SACRIFICE se dit aussi en parlant du Culte qu'on rendait aux idoles, aux fausses divinités, en leur offrant des victimes ou des dons. Les païens faisaient des sacrifices aux dieux, aux idoles. Le sacrifice d'Iphigénie. La victime destinée au sacrifice. Sacrifice sanglant, Celui où l'on immole une créature vivante. Sacrifice humain, Celui où l'on immole un être humain.

SACRIFICE signifie, au figuré, Abandon volontaire de quelque chose, privation que l'on s'impose, ou qu'on accepte, pour l'amour de Dieu ou d'une personne, ou en considération de quelque chose. Faire à Dieu le sacrifice de soi-même, de ce que l'on a de plus cher. Si j'oublie l'injure qu'il m'a faite, c'est un sacrifice que le vous fais. Je fais volontiers ce sacrifice à notre ancienne amitié. Avoir l'esprit de sacrifice. Il a recueilli le fruit de son sacrifice. C'est un sacrifice que l'honneur vous commande. Un sacrifice d'argent. Il a fait le sacrifice de sa vie. Elle a fait de grands sacrifices pour l'éducation de ses enfants.

Littré (1872-1877)

SACRIFICE (sa-kri-fi-s') s. m.
  • 1Chez les Hébreux, offrande faite à Dieu avec certaines cérémonies et consistant en des victimes ou des dons. Que les sacrifices des païens seront reçus de Dieu, et que Dieu retirera sa volonté des sacrifices des Juifs, Pascal, Pens. XXI, édit. HAVET. Qu'on lise le Vieil Testament en cette vue [qu'il est figure du Nouveau Testament], et qu'on voie si les sacrifices étaient vrais, si la parenté d'Abraham était la vraie cause de l'amitié de Dieu…, Pascal, ib. XVI, 16 bis. Selon la loi des sacrifices, quiconque mange la victime est assuré par cette action qu'il a part à l'oblation qu'on en a faite, Bossuet, Euchar. II, 7. Voici comme ce Dieu vous répond par ma bouche… Quel fruit me revient-il de tous vos sacrifices ? Ai-je besoin du sang des boucs et des génisses ? Racine, Athal. I, 1. Le peuple fuit, le sacrifice cesse, Racine, ib. II, 5. Un Dieu n'a pas besoin de nos soins assidus ; Si l'on peut l'offenser, c'est par des injustices ; Il nous juge sur nos vertus, Et non pas sur nos sacrifices, Voltaire, Pour et contre.

    Sacrifice perpétuel, sacrifice par lequel on offrait tous les jours quatre agneaux en holocauste, deux le matin et deux le soir. Depuis le temps que le sacrifice perpétuel aura été aboli, et que l'abomination de la désolation aura été établie, Sacy, Bible, Daniel, XII, 11.

    Sacrifice de jalousie, cérémonie à laquelle le sacrificateur soumettait une femme dont le mari suspectait la fidélité. Que si elle n'a point été souillée, elle n'en ressentira aucun mal, et elle aura des enfants ; c'est là la loi du sacrifice de jalousie, Sacy, Bible, Nomb. V, XXVIII, 29.

    Terme de l'Écriture. Offrir un sacrifice de louanges, célébrer les louanges de Dieu.

    En un sens analogue. Un sacrifice de larmes, de prières. Ceux dont elle a présenté les vœux ou les plaintes, offrent pour elle de tous côtés les sacrifices de leurs larmes ou de leurs prières, Fléchier, Mme de Montaus.

    Faire d'une vertu son sacrifice du matin et du soir, la pratiquer avec une constance inviolable. Il en faisait [de l'administration de la justice] son culte perpétuel, son sacrifice du matin et du soir, selon cette parole du Sage : La justice vaut mieux devant Dieu que de lui offrir des victimes, Bossuet, le Tellier.

  • 2Chez les chrétiens, le sacrifice de Jésus-Christ, la mort de Jésus-Christ sur la croix pour la rédemption du genre humain.

    Son sacrifice continuel, sa présence perpétuelle dans l'hostie consacrée. Pour considérer ce que c'est que la mort, et la mort en Jésus-Christ, il faut voir quel rang elle tient dans son sacrifice continuel et sans interruption, et pour cela remarquer que dans les sacrifices la principale partie est la mort de l'hostie, Pascal, Lettre sur la mort de son père. Les prêtres offrent pour elle le sacrifice de Jésus-Christ sur les autels, Fléchier, Duch. de Montaus.

    Le saint sacrifice de la messe, ou, simplement, le saint sacrifice, le sacrifice de la messe. Ah ! nous pouvons achever ce saint sacrifice pour le repos de Madame avec une pieuse confiance, Bossuet, Duch. d'Orl. Il [Montausier] assistait tous les jours au saint sacrifice ; et son attention et sa modestie imprimaient le respect aux âmes les moins touchées de la révérence du lieu et de la sainteté du culte, Fléchier, Duc de Montaus. Quels châtiments réservez-vous donc, grand Dieu, aux sacrifices indignes, aux oblations profanes, aux mystères souillés ? Massillon, Confér. Excell. du sacerd.

    Absolument. Le sacrifice, le saint sacrement. Les chrétiens ne connaissent plus la sainte frayeur dont on était saisi autrefois à la vue du sacrifice ; on dirait qu'il eût cessé d'être terrible, comme l'appelaient les saints Pères, Bossuet, Louis de Bourbon.

  • 3Il se dit de ce qui était offert aux dieux, dans le polythéisme. Mais nous devons aux dieux demain un sacrifice, Corneille, Hor. V, 3. Vous armez contre Troie une puissance vaine, Si, dans un sacrifice auguste et solennel, Une fille du sang d'Hélène De Diane en ces lieux n'ensanglante l'autel, Racine, Iphig. I, 1. On fit des sacrifices à Jupiter et aux autres grands dieux, Fénelon, Tél. VI. Il offrait tous les jours le sacrifice d'une brebis blanche et sans tache, Fénelon, ib. XVII. Homère décrit assez au long les cérémonies des sacrifices, dans le Ier livre de l'Iliade et dans le IIIe de l'Odyssée, Rollin, Traité des Et. II, 2. Comme le sacrifice de bœuf est le plus estimé, on fait pour les pauvres de petits gâteaux auxquels on donne la figure de cet animal, et les prêtres veulent bien se contenter de cette offrande, Barthélemy, Anach. ch. 21.

    Fig. Faire sacrifice, sacrifier. Et je n'ai pas moins qu'elle à rougir d'un supplice Qui profane l'autel où j'ai fait sacrifice, Corneille, Théod. III, 5.

    Fig. Un sacrifice, une victime. Ptolémée à César par un lâche artifice, Rome, de ton Pompée a fait un sacrifice, Corneille, Pomp. V, 1.

  • 4Sacrifices humains, sacrifices dans lesquels la victime est un être humain. Nous serions amplement dédommagés des fatigues extrêmes de cette campagne, si nous pouvions parvenir à détruire l'usage des sacrifices humains, qu'on dit être généralement répandus chez les insulaires de la mer du Sud, La Pérouse, Voy. t. II, p. 12, dans POUGENS.

    Sacrifices sanglants, sacrifices dans lesquels on immole des victimes.

  • 5Il se dit de la consécration à la vie religieuse. Allez à l'autel, victime de la pénitence, allez achever votre sacrifice, Bossuet, la Vallière.
  • 6 Fig. Abandon, privation, perte à laquelle on se résigne. Un sacrifice d'argent. Il a fait de grands sacrifices pour l'éducation de son fils. Que ces sacrifices particuliers [de nos affections] honorent et préviennent le sacrifice universel où la nature entière doit être consommée par la puissance de Jésus-Christ, Pascal, Lettre sur la mort de son père. Je veux, dit-il, m'arracher jusqu'aux moindres vestiges de l'humanité ; reconnaissez-vous un chrétien qui achève son sacrifice, qui fait le dernier effort, afin de rompre tous les liens de la chair et du sang, et ne tient plus à la terre ? Bossuet, le Tellier. Vous offrîtes à Dieu le sacrifice de vos cheveux, Bossuet, Lett. abb. 20. J'irai pour mon pays m'offrir en sacrifice, Racine, Esth. I, 3. Mais le roi, qui le hait [Achille], veut que je le haïsse ; Il ordonne à mon cœur ce cruel sacrifice, Racine, Iph. V, 1. Il [Cromwell, dans son alliance avec le gouvernement français contre l'Espagne] traita véritablement en supérieur, en obligeant le roi de France de faire sortir de ses États Charles II et le duc d'York… on ne pouvait faire un plus grand sacrifice de l'honneur à la fortune, Voltaire, Louis XIV, 6. Il est doux pour un véritable amant de faire des sacrifices qui lui sont tous comptés, Rousseau, Hél. I, 11. Tel est, mon ami, l'effet assuré des sacrifices que l'on fait à la vertu ; s'ils coûtent souvent à faire, il est toujours doux de les avoir faits, Rousseau, ib. I, 44. Non, madame, dit-il, restez ; il n'est plus temps ; je ne veux point de sacrifices, Marmontel, Mém. VIII. L'homme n'agit qu'en vue de son bonheur, il ne cesse point de s'aimer, et il ne s'aime jamais plus que quand il fait les plus grands sacrifices, Bonnet, Causes prem. IV, 17. Le sacrifice des forces navales fut jugé, mal à propos peut-être, indispensable, Raynal, Hist. phil. XIII, 58. Il y a une certaine gloire attachée aux grands sacrifices, qui du moins satisfait un peu l'amour-propre, Genlis, Vœux témér. t. II, p. 245, dans POUGENS. Un sacrifice absolu est plus facile à obtenir qu'un demi-sacrifice, Genlis, Ad. et Th. t. II, p. 292. Depuis la veille, quatre mille traîneurs et trois mille soldats étaient morts ou égarés ; les canons et tous les bagages perdus ; à peine restait-il à Ney trois mille combattants et autant d'hommes débandés ; enfin, quand tous ces sacrifices ont été consommés, et tout ce qui avait pu passer réuni, ils ont marché…, Ségur, Hist. de Nap. X, 9.
  • 7 Terme de peinture. Artifice qui consiste à négliger certains accessoires d'un tableau, pour mieux faire ressortir les parties principales.

    PROVERBE

    Obéissance vaut mieux que sacrifice, la prompte obéissance est particulièrement agréable.

REMARQUE

Le sacrifice est tantôt passif : le sacrifice d'Abraham, le sacrifice fait par Abraham ; tantôt actif : le sacrifice d'Isaac par Abraham, d'Iphigénie par Agamemnon

HISTORIQUE

XIVe s. Les sacrifices anciennement ordenés et teles assemblées estoient faites après ce que les fruis sont cuillis, Oresme, Eth. 246.

XVIe s. Les sacrifices qu'immoloyent pour lors les Israelites, Calvin, Instit. 512. Henri Cardinal, maintenant roi, craignant que Dom Antonio present le fist deposer, comme heritier par les masles, ou craignant du roi d'Espagne ce qui parut après, lui fit un sacrifice de calicuth, c'est à dire de peur, jetta dans le feu cet arrest et touttes les pieces justificatives de Dom Antonio, D'Aubigné, Hist. II, 397.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

SACRIFICE. - HIST. Ajoutez : XIIe s. Liclers fu nés d'Egypte ; hon ne sot plus de sort [homme ne sut plus de divination], Et es respons as dex [dieux] se fioit il mult fort, Le sacrefixe a fait lès le temple en un ort [jardin], li Romans d'Alix. p. 414.

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Étymologie de « sacrifice »

Du latin sacrificium dérivé de sacrificare (« faire sacré, sacrifier »).
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Wallon, sacrifieg ; provenç. sacrifici ; espagn. sacrificio ; ital. sagrifizio ; du lat. sacrificium, de sacer, sacré, et facere, faire : action de faire une œuvre sacrée. L'ancienne langue disait sacrifiement.

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Phonétique du mot « sacrifice »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
sacrifice sakrifis

Fréquence d'apparition du mot « sacrifice » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « sacrifice »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « sacrifice »

  • [La poésie, ] le sacrifice où les mots sont victimes.
    Georges Bataille — L'Expérience intérieure, Gallimard
  • Le goût du sacrifice que chaque femme porte en soi-même, comme une fleur prête à fleurir […].
    Pierre Dumarchais, dit Pierre Mac Orlan — Marguerite de la nuit, Émile-Paul
  • Quoi de plus inhumain qu’un sacrifice humain ?
    Alphonse Allais — Le Chat noir - 11 Janvier 1890
  • Le sacrifice de soi est la condition de la vertu.
    Aristote
  • Il faut faire le sacrifice de ses préférences mais pas celui de ses convictions.
    René Bazin
  • Le sacrifice de nous-mêmes nous permet de sacrifier les autres sans honte.
    George Bernard Shaw — Bréviaire d'un révolutionnaire
  • Dieu ne parvient que par sa pitié à distinguer le sacrifice du suicide.
    Jean Giraudoux — Sodome et Gomorrhe, I, Prélude, l'archange , Grasset
  • Le sacrifice de Marie est une participation spécifique à la révélation de la Miséricorde.
    Jean-Paul II
  • La charité n’est une vertu que dans la mesure où elle est sacrifice.
    Firmin van den Bosch — Aphorismes du temps présent
  • Tous les devoirs procurent du bonheur, même le sacrifice généreusement accepté !
    Joseph Lallier — Allie
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Traductions du mot « sacrifice »

Langue Traduction
Anglais sacrifice
Espagnol sacrificio
Italien sacrificio
Allemand opfern
Chinois 牺牲
Arabe تضحية
Portugais sacrifício
Russe приносить в жертву
Japonais 犠牲
Basque sakrifikatu
Corse sacrifiziu
Source : Google Translate API

Synonymes de « sacrifice »

Source : synonymes de sacrifice sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « sacrifice »

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Sacrifice

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