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Que

Définitions de « que »

Trésor de la Langue Française informatisé

QUE, conj., adv. et pron.

Conjonction, adverbe ou pronom, que a pour fonction syntaxiquement, de nominaliser ou d'adjectiver une phrase: dans je sais que p, que p tient la fonction substantive d'un complément d'objet; dans qu'il est beau!, il y a également une sorte de nominalisation: l'ensemble est comparable à Le beau garçon! (v. G. Moignet, « Systématique du mot que » ds Ét. de psycho-systématique fr., Paris, Klincksieck, 1974, pp. 184-211); − sémantiquement, la fonction de que est de suspendre la valeur de vérité de la proposition qu'il introduit, cette valeur pouvant être rétablie contextuellement: Il sait que p, Il ignore que p, Il regrette que p présupposent que p est vrai; Il s'imagine que p présuppose que p est faux; Il dit que p, Il pense que p supposent la vérité de p, mais seulement pour le sujet de l'énoncé (il); Je ne dis pas que p rejette explicitement la valeur « vrai » de p, etc.; le mot que s'oppose ainsi à si (Il ne dit pas si p), qui suspend aussi la valeur de vérité, mais sans que le contexte permette de la rétablir. Dans l'interrogative partielle (Que fait-il?), la valeur de vérité est limitée aux seules présuppositions (Il fait quelque chose), la variable que étant appelée à être saturée dans la réponse. Dans Qu'il est beau!, la suspension de la valeur de vérité conduit à un parcours de possibles et à la restitution de la valeur « vrai », y compris dans les cas d'intensité maximale.
I. − Empl. conjonctionnels
A. − Conj. de sub.
1. [Introd. une complét. en fonction de suj., antéposée ou postposée à la princ.] Qu'il fût plus utile que Katow n'était pas douteux (Malraux, Cond. hum., 1933, p. 207).Le résultat est que nous continuions à mettre au premier plan nos sentiments personnels (Camus, Peste, 1947, p. 1282).
N'était que... [Introd. une réserve, présente ce qui fait obstacle] N'était qu'il souffrait par moments de rhumatismes, il jouissait d'une santé robuste (E. Henriot, Aricie Brun, i, 2 ds Grev.1964, § 1050).
2. [Introd. une complét. en fonction d'obj.]
a) [Après différents types de verbes]
α) [Après un verbe déclaratif (déclarer, dire, raconter) ou un verbe d'opinion (croire, supposer, imaginer, etc.)] Elle affirme qu'on l'a enfermée parce qu'elle refusait d'attaquer Phili et de demander le divorce et l'annulation (Mauriac, Nœud vip., 1932, p. 290).
[Avec invers. de la princ.] Que je sache. V. savoir1.
Pop. C'est tout la même race, qu'il dit (Alain-Fournier, Meaulnes, 1913, p. 164).Restons pas dehors! qu'il me dit. Rentrons! (Céline, Voyage, 1932, p. 11).
[En tête d'un paragraphe ou d'un chap., que présente sans verbe introducteur le thème dont il va être question] Que la vertu est le plus grand de tous les biens (Ac.).
β) [Après un verbe de perception (entendre, s'apercevoir, voir, etc.)] J'ai entendu que l'on se préoccupait des épidémies inévitables favorisées par le changement de saison (Frapié, Maternelle, 1904, p. 210).S'apercevoir que l'on a un foie, ou un cœur, quelle découverte! (Claudel, Père humil., 1920, i, 2, p. 499).
[Dans les tournures présentatives voici que, voilà que] Mais voici que l'affaire se corsait, encore une fois (Martin du G., Thib., Cah. gr., 1922, p. 591).Oh! oh! voilà que déjà son cœur bat et sonne, tandis que la sueur ruisselle entre ses épaules (Bernanos, Soleil Satan, 1926, p. 210).
γ) [Après un verbe de sentiment (admirer, craindre, s'étonner, se réjouir, se repentir, etc.)] Car j'aime que l'homme donne sa lumière (Saint-Exup., Citad., 1944, p. 571).
δ) [Après un verbe de désir ou de volonté (souhaiter, tolérer, vouloir, etc.)] J'exige que tu me répètes les trois derniers mots (Giraudoux, Intermezzo, 1933, i, 5, p. 37).
Rem. L'ind. est empl. quand ce qui est dit est affecté au domaine du probable ou du certain, notamment après les verbes ou les loc. d'affirm. à la forme positive (croire, dire, il me semble, il est clair que): − On arme le peuple! − Nous aussi? demanda le Négus. − Je te dis qu'on arme le peuple! (Malraux, Espoir, 1937, p. 447). Dès lors que la sub. est vérifiée seulement dans un monde possible, c'est le subj. qui l'emporte: Il semble qu'elle soit là comme ces jeunes bêtes que le chasseur attache et abandonne dans les ténèbres pour attirer les fauves (Mauriac, Nœud vip., 1932, p. 161). Il en est ainsi notamment après les verbes exprimant le doute, la crainte, le souhait ou la volonté: Je doute qu'il soit possible de récupérer plus de la moitié des armes (Malraux, Cond. hum., 1933, p. 273). Ils craignaient que ne comptassent guère les conditions de la reddition pour ceux qui les reconnaîtraient personnellement (Id., Espoir, 1937, p. 558). Le subj. s'impose aussi, même si le fait est certain, chaque fois que la princ. met au premier plan les réactions du suj. (domaine de l'appréciation): Je regrette qu'il soit venu laisse entendre qu'il est effectivement venu, mais suggère aussi, en raison même du sentiment qui s'exprime, qu'il aurait pu se faire qu'il ne vienne pas.
b) [Introd. une complét. coordonnée] Je m'étonne que sa grande érudition littéraire lui permette une production si soutenue et si parfaite − ou que son travail d'écrivain lui laisse du temps pour tant lire (Gide, Journal, 1895, p. 62).Le docteur répondit que c'était une chance sans doute et qu'il fallait espérer seulement que sa femme guérît (Camus, Peste, 1947, p. 1283).
[Avec reprise de la conj. devant chaque terme d'une série juxtaposée] Il savait que ce rare esprit, que cette haute intelligence, que ce vaste savoir, s'alliaient à une perversité (Sue, Myst. Paris, t. 2, 1842, p. 141).
c) [Introd. une complét. imbriquée]
[dans une rel.] La seule précaution que je crois qu'on doive prendre alors, c'est... (Brunetière, Essais sur la litt. contemp., 1892, p. 23 ds J. Härmä, Rech. sur les constr. imbriquées rel. et interr. en fr., Helsinki, Suomalainen Tiedeakatemia, 1979, 31).Lorsque dans la cabane des palombes, où tu voulais toujours que nous emportions notre goûter, je demeure auprès de lui, je sens... (Mauriac, Th. Desqueyroux, 1927, p. 119):
1. Dès les premières causeries que nous eûmes, je me vis comme contraint par eux de jouer un faux personnage, de ressembler à celui qu'ils croyaient que j'étais resté, sans peine de paraître feindre. Gide, Immor., 1902, p. 422.
[dans une interr.] Quand pensez-vous que..., où croyez-vous que... Où çà dites-vous qu'il fait mauvais temps? demanda mon grand-père (Proust, Guermantes 2, 1921, p. 342).
3. [Introd. une complét. en fonction de suj. dit ,,réel``, après un verbe ou une tournure impers.] Il est bon, étrange, possible, rare, sûr que; il est temps que; il arrive, il faut, il suffit que. Peu s'en fallut que je n'y fisse monter les enfants (Gide,Journal,1903, p. 137).Il est nécessaire que je m'ouvre de tout ceci à nos supérieurs (Bernanos,, Soleil Satan, 1926p. 230).
Il y a que... Alors, en somme, qu'est-ce qu'il y a? Il y a que tout l'actif va être mangé (Montherl.,Célibataires,1934, p. 795).
4. [Introd. une complét. appelée par un adv. de phrase et correspondant à une tournure impers.] Sans doute que..., probablement que..., certainement que..., heureusement que... Demain, peut-être qu'il sera si piètre matador que quelqu'un devra sauter dans le rond pour achever sa victime (Montherl.,, Bestiaires, 1926, p. 524).
5. [Introd. une complét. en fonction d'appos.]
a) [Apposée à un subst.] Le sentiment que..., l'espoir que..., la crainte que... Le bruit court qu'il a eu un accident.
À l'idée que... V. idée I A 1 d.D'une heure à l'autre, à l'idée que j'écris, que je dois poursuivre, je m'écœure. Jamais je n'ai de sécurité, de certitude (G. Bataille, Exp. int., 1943, p. 181).
b) [Apposée au pron. ce]
α) C'est que (littéral. « ceci est, à savoir que... »). Introduit une explication de ce qui précède ou bien une objection, une rectification à ce qui vient d'être dit. Sans doute on comptera les moutons d'un troupeau et l'on dira qu'il y en a cinquante (...) mais c'est que l'on convient alors de négliger leurs différences individuelles pour ne tenir compte que de leur fonction commune (Bergson, Essai donn. imm., 1889, p. 68).
Si ... c'est que. Si je vous élève, c'est que je vous tire hors de votre peau (Saint-Exup., Citad., 1944, p. 587).
Est-ce que...? (littéral. « ceci est-il, à savoir que... »). En toute conscience, est-ce que vous croyez que Dieu me pardonnera? (Martin du G., Thib., Pénitenc., 1922, p. 736).
Ce que c'est que... (littéral. « ce que c'est, à savoir (que) »). Ce que c'est que d'avoir étudié! Ce que c'est que la vie! Mais voyez ce que c'est que la vanité! (A. Daudet, Tartarin de T., 1872, p. 33).
β) [Après un verbe en constr. indir.] Aboutir, parvenir à ce que; abuser, s'irriter, remercier, venir de ce que. C'était déjà trop que d'avoir consenti à ce qu'elle portât des robes blanches dans la semaine (Mauriac, Nœud vip., 1932, p. 124).
c) [Apposée à un groupe nom. qui fait office de thème, la compl., réduite à un groupe nom., joue le rôle de prédicat] Quelle belle fleur que la rose! (v. H. Bonnard,infra bbg.).
6. [Introd. une sub. circ.]
a) [Circ. de temps]
α) [Que est le 2eélém. d'une loc. conj. exprimant l'antériorité, la simultanéité ou la postériorité] On songera à ce musicien invisible qui joue derrière la scène pendant que l'acteur touche un clavier dont les notes ne résonnent point (Bergson, Essai donn. imm., 1889, p. 119.
SYNT. Avant que, après que, jusqu'à ce que, d'ici à ce que, tant que, aussi longtemps que, à mesure que, toutes les fois que, chaque fois que, pendant que, tandis que, cependant que.
[En sub. inverse]
À peine ... que. À peine le médecin avait-il disparu, que MmeJosserand sortit de la pièce avec MmeDambreville (Zola, Pot-Bouille, 1882, p. 156).
[Après une princ. négative] Il n'avait pas fait dix pas qu'il apercevait l'autocar, qui venait de s'arrêter. Il y monta. Ils n'étaient que trois voyageurs dans le car (Montherl., Célibataires, 1934, p. 900).
β) [Empl. seul, introduisant une temporelle dans des systèmes exprimant la simultanéité ou la postériorité]
[Précédé d'une phrase nég.] Que ne + verbe au subj.Avant que, tant que. Roland, dans son cercle étroit de chevalerie, courait après Angélique; les conquérants de première race poursuivent une plus haute souveraine: point de repos pour eux qu'ils n'aient pressé dans leurs bras cette divinité couronnée de tours, épouse du Temps, fille du Ciel et mère des dieux (Chateaubr., Mém., t. 3, 1848, p. 425).Je n'aurais point de repos que je n'aie contemplé une chose si merveilleuse (A. France, Thaïs, 1890, p. 270).
N'avoir de cesse que. Tu n'eus de cesse que je ne me fusse résigné à garder le lit et à faire venir Arnozan (Mauriac, Nœud vip., 1932, p. 145).
γ) [Introd. une temporelle coordonnée] Quand on aime et qu'on voudrait croire à la réalité unique de l'individu (Proust, J. filles en fleurs, 1918, p. 535).
b) [Circ. causale]
α) [Que est le 2eélém. d'une loc. conj. exprimant la cause] Par cela que, attendu que, d'autant que, étant donné que, parce que, vu que. L'enfant viendrait avant terme, vu que j'aurai pas à manger (Malraux, Espoir, 1937, p. 584):
3. Parce que ton Polynice, cette ombre éplorée et ce corps qui se décompose entre ses gardes et tout ce pathétique qui t'enflamme, ce n'est qu'une histoire de politique. Anouilh, Antig., 1946, p. 181.
β) [Empl. seul]
[après un verbe ou un adj. de sentiment] Le duc s'enorgueillissait que, sur une centaine de ses bêtes ainsi essayées, une quarantaine seulement fussent d'ordinaire gardées pour l'arène (Montherl., Bestiaires, 1926, p. 408).Il avait été heureux que la propriété de son père servît à quelque chose (Martin du G., Thib., Épil., 1940, p. 792).
[dans des phrases interr. ou exclam., justifiant l'acte interr. ou exclam.] Êtes-vous encore endormi, que vous ne voyez pas l'éclat des bougies? (Sand, Lélia, 1833, p. 248).Est-ce que vous avez des amis de ce côté-là, que vous connaissez si bien Balbec? (Proust, Swann, 1913, p. 131).
[après non, gén. corrél. de mais] Non qu'il se méfiât de son père; mais il exigeait d'être seul responsable de sa vie (Malraux, Cond. hum., 1933, p. 208).
γ) [Introd. une causale coordonnée] Votre pièce n'est pas une tragédie classique parce qu'elle a moins de cinq actes et que la règle des trois unités n'y est pas observée (Mauriac, Journal 2, 1937, p. 155).
Rare
[Reprend car; considéré comme incorrect] Que je serais très heureuse de revoir car elle m'a beaucoup plu et que c'est pour moi une vraie fête de pouvoir parler de choses sérieuses avec quelqu'un qui a l'air de les comprendre (G. Beaumont, Harpe irlandaise, ii, p. 5 ds Grev. 1986, § 259 b 2 o).
[Reprend pourquoi; également considéré comme incorrect] Voilà pourquoi (...) avant de partager avec lui ce souper amer et suprême, elles pensèrent à lui offrir le leur et qu'elles en firent un chef-d'œuvre (Barbey d'Aur.,Diabol.,[1874],62, ds Grev. 1986, § 1028).
c) [Circ. finale]
α) [Que est le 2eélém. d'une loc. conj. exprimant le but] Afin que, de peur que, de crainte que, pour que. Elle détachait les morceaux à même son sac, pour qu'on ne vît pas qu'elle mangeait, car c'était là tout son dîner (Montherl., Célibataires, 1934, p. 840).
β) [Empl. seul après un impér.] Asseyez-vous là, que nous causions, me dit-elle (Fromentin, Dominique, 1863, p. 114).Zoé, tu es (...) une sœur très aimable. Viens que je t'embrasse (A. France, Bergeret, 1901, p. 82).
γ) [Introd. une finale coordonnée] Les enfants s'amusaient parfois à y mettre [dans la salade] des fils de soie rouge, afin qu'on les prît pour des chenilles et qu'on eût un moment de joie (Giraudoux, Églantine, 1927, p. 163).
Littér. [Coordonne une finale au subj. à une première à l'inf. introd. par pour] Alban prit la muleta, la mouilla et la frotta un peu dans le sable pour l'alourdir et qu'elle résistât au vent (Montherl., Bestiaires, 1926, p. 539).
d) [Circ. conséc.]
α) [Que est le 2eélém. d'une loc. conj. exprimant la conséquence] De/en sorte que, tant que, si bien que, à tel point que. Elle perdait la notion du lieu au point qu'il lui arrivait de tomber tout à coup de sa chaise (Gide, Si le grain, 1924, p. 410).
Si + adj./adv. + que.C'était une amitié neuve que nous allions bâtir, si solide que rien ne la détruirait, si merveilleuse que j'espérais que Gilberte mettrait quelque coquetterie à lui garder toute sa beauté et à m'avertir à temps (Proust, J. filles en fleurs, 1918, p. 486).
Verbe + tant + que.Ernestine (...) faisait tant, qu'il me parut d'abord que tout le chagrin de ma tante pesait sur elle (Gide, Si le grain,1924, p. 386).
Tant de + subst. + que.Cette pose dessinait son jeune corps avec tant de précision, que l'irritation de Gilbert s'accrut (Arland, Ordre, 1929, p. 42).
Tel + subst. + que.Je suis pris de telles convulsions que je rends à genoux les doigts enfoncés dans le sable (Saint-Exup., Terre hommes, 1939, p. 232).
Tellement + adj. + que.Bientôt les rapports d'idées deviennent tellement vagues, le fil conducteur qui relie vos conceptions si ténu, que vos complices seuls peuvent vous comprendre (Baudel., Paradis artif., 1860, p. 357).
Tellement de + subst. + que.Il court en criant de toute sa voix, avec tellement de force et de rage qu'elle s'éraille, qu'elle ne peut plus sortir de sa gorge (Montherl., Bestiaires, 1926, p. 559).
Assez/trop ... pour que. Il m'a jeté à la figure assez de choses atroces, pour que je sois sûre qu'il disait vrai (Mauriac, Nœud vip., 1932, p. 283).
Faire que, en sorte que.La pyramide était composée de minuscules choux à la crème, enduits d'un caramel résistant qui les soudait l'un à l'autre et faisait que la cuillère les crevait plutôt que de les séparer (Gide, Si le grain,1924, p. 380).Fais que nul ne me voie jusqu'à ce que ce soit fini (Anouilh, Antig., 1946, p. 200).
β) [Empl. seul] Les commandes pleuvaient à l'abbaye que c'était une bénédiction (A. Daudet, Lettres moulin, 1869, p. 257).Elle avait des façons vraiment De désoler un pauvre amant, Que c'en était vraiment charmant! (Verlaine, Romances sans par., 1874, p. 53).
[Après une princ. nég.] Que ... ne + subj.Sans que. Il ne pouvoit aborder à un rivage qu'il n'y soulevât des tempêtes (Chateaubr., Natchez, 1826, p. 367):
4. Je ne puis descendre aujourd'hui dans une auberge, en France ou à l'étranger, que je n'y sois immédiatement assiégé. Chateaubr., Mém., t. 4, 1848, p. 428.
γ) [Introd. une conséc. coordonnée] De façon qu'il s'instruise et qu'il devienne un homme (Grev.1969, § 1028).
e) [Circ. adversative ou concessive]
α) [Que est le 2eélém. d'une loc. conj. exprimant l'oppos. ou la concession] Pendant que, tandis que, lors même que, au lieu que, bien que. Si l'on vous invite à soulever un panier que l'on vous aura dit rempli de ferraille, alors qu'il est vide en réalité (Bergson, Essai donn. imm., 1889, p. 48).
Sans que
[Avec valeur de simple oppos.] Chaque jour il ralentit devant la maison Péloueyre, sans que jamais Noémi poussât les volets (Mauriac, Baiser Lépreux, 1922, p. 190):
5. ... des domestiques sont restés des semaines sans obtenir d'elle une réponse à leur salut matinal, sont même partis en vacances sans qu'elle leur dît adieu et qu'ils devinassent pourquoi... Proust, Guermantes 2, 1921, p. 321.
[Avec valeur concess.] Il l'a fait sans qu'on le lui ait demandé. Bien qu'on ne le lui ait pas demandé.
β) [L'oppos. ou la concess. est fondée sur une propriété qui reste inopérante même à un haut degré]
Pour ... que. Le peuple, pour ravi qu'il fût de sa libération, aurait à subir longtemps de dures épreuves (De Gaulle, Mém. guerre, 1959, p. 21).
Si ... que. Défauts auxquels, si jeune que je fusse, je ne laissais pas d'être sensible (Gide, Si le grain, 1924, p. 444).
Tout ... que. Tout marquis que je suis, j'ai droit à la justice, je pense? (Bernanos, Soleil Satan, 1926, p. 63).
Quelque ... que. Mais quelque attentive que fût la curiosité des visiteurs, elle ne fut point satisfaite (Balzac, E. Grandet, 1834, p. 248).
γ) [L'oppos. ou la concess. vient du parcours d'une classe d'élém.]
Qui que. Qui qu'elle fréquentât, elle resterait pour tout le monde duchesse de Guermantes (Proust, Fugit., 1922, p. 669).
Qui que ce soit. En vérité je ne crois pas que ni Rubinstein, dont je me souviens à merveille, ni qui que ce fût au monde, pût jouer la Fantaisie en ut mineur de Mozart, par exemple, ou tel largo d'un concerto de Beethoven, avec une plus tragique noblesse, avec plus de chaleur (Gide, Si le grain, 1924, p. 398).
Quoi que. Mais, quoi que tu puisses en penser d'abord, il faut accepter cette sanction d'un cœur contrit, comme une mesure prise pour ton bien (Martin du G., Thib., Cah. gr., 1922, p. 673).
Quoi que ce soit. Il répugnerait à la perfection de son sentiment d'exiger quoi que ce fût en retour (M. Jouhandeau, Réflexions sur la vie et le bonheur, Paris, Gallimard, 1958, p. 136).
Quel que. Qu'une chose, quelle qu'elle soit, ne soit point faite pour une autre chose, quelle qu'elle soit (Gide, Journal, Feuillets, 1893, p. 46).Cela ne nous empêche pas de faire chaque jour, quel que soit le temps (...) une grande marche de deux heures (Martin du G., Thib., Pénitenc., 1922, p. 693).
Rem. Quel, adj., s'accorde en genre et en nombre avec le suj. Toutefois la confusion avec quelque est fréq.: quelle que soit la cause est souvent écrit, à tort, quelque soit la cause; quels que soient les événements écrit quelques soient les événements.
Où que. Ah, merveilleuse, ah, vraiment adorable apparition de la valeur après la non-valeur! Où qu'elle soit, comment la méconnaître? (Montherl., Bestiaires, 1926, p. 552).
δ) [Que introd. une oppositionnelle coordonnée] Il prenait cette profession de foi pour une bravade, bien que le marquis parlât sans fard, et qu'en vrai paysan il se sentît porté vers un gouvernement qui préside aux concours agricoles et prime les animaux gras (Bernanos, Soleil Satan, 1926, p. 63).
f) [Que introd. une hypothétique]
α) [Que est le 2eélém. d'une loc. conj. exprimant l'hypothèse] À (la) condition que, à moins que, en admettant que, en supposant que, en cas que, pourvu que. Les problèmes qui valent d'être envisagés n'ont de sens qu'à la condition que, les posant, l'on parvienne au sommet: fol orgueil nécessaire pour être déchiré (G. Bataille, Exp. int., 1943, p. 73).
Selon/suivant que ... ou que. Selon qu'ils étaient plus près ou plus loin du jet d'eau central (Saint-Exup., Citad., 1944, p. 519).
[Marque une condition minimalement suffisante] Pour peu que. Pour peu que l'on suât, le plastron devenait atroce (Gide, Si le grain, 1924, p. 405):
6. « Ces honnêtes gens-là », se dit-il, « pour peu qu'ils soient ardents et courageux, sont souvent plus dangereux que les canailles! (...) » Martin du G., Thib., Mort père, 1929, p. 1336.
β) [Empl. en corrél. avec lui-même, pour présenter une alternative]
Que ... ou que + subj.Qu'il l'eût voulu ou qu'il eût été abandonné, c'était également beau (Montherl., Bestiaires, 1926, p. 552).Qu'il chante mal, et qu'on rie, c'est celui-là qui est touchant (Montherl., Bestiaires, 1926, p. 479).
[Sans ou] Que ce soit dans la nuit et dans la solitude, Que ce soit dans la rue et dans la multitude, Son fantôme dans l'air danse comme un flambeau (Baudel., Fl. du Mal, 1857, p. 70):
7. Son cœur se brisait qu'elle fût tout en noir, se brisait qu'elle n'eût qu'une poignée de pâquerettes dans les cheveux. Montherl., Bestiaires, 1926, p. 466.
Soit que ... soit que + subj.Mais soit que nous pensions à une intensité plus grande, soit qu'il s'agisse d'une plus grande étendue, nous éprouvons une impression analogue dans les deux cas (Bergson, Essai donn. imm., 1889, p. 17).
γ) [Introd. une hypothétique coordonnée] S'il est seul dans le jardin, et qu'il tombe, il pleure (Martin du G., Thib., Épil., 1940, p. 841).
Rem. Bien entendu, c'est seulement en phrase hypothétique que et si est remplaçable par et que devant la coordonnée. Mais lorsque si n'amène pas une supposition, lorsqu'il sert seulement à interroger (interr. indir.) sa reprise s'impose devant la coordonnée: Il se demande s'il tentera de les voir, et s'ils le recevront (Le Bidois 1967, § 1625).
B. − Conj. de compar.
1. [Avec un antécédent, adj. ou adv., impliquant l'idée d'une confrontation]
a) [Adj. de sens qualitatif] Tel que. Il trouvait que le rôle d'un homme sage et éclairé, tel que lui, était de se tenir dans l'actualité (Aymé, Jument, 1933, p. 30).
Fam. ou pop. Je te laisse tel que. Tel quel. Si c'est un fait divers, (...) pourquoi ne serait-il pas possible de l'utiliser tel que dans un roman? (A. Billyds Le Figaro littér., 23 mars 1955ds Grev. 1986, § 620).
b) [Adj. signifiant « identité »] Même que. Il habite le même immeuble que moi; il a la même voiture que moi. Son visage était le même que quand je le vis pour la dernière fois, et pourtant, combien il était différent! (Baudel., Paradis artif., 1860, p. 433).
c) [Adj. ou adv. d'altérité] Autre, autrement, autre part, ailleurs que. Elle ne pouvait pas s'appeler autrement que Manon (Montherl., Célibataires, 1934, p. 841):
8. Pas d'autres livres que des dictionnaires. Rien ne doit distraire ou charmer. Rien ne doit y sauver de l'ennui, que le travail. Gide, Journal, Feuillets, 1893, p. 49.
[Suivi d'adj.] Et pourtant, cette minute avant d'entrer dans l'arène ne pouvait pas être autrement que grave (Montherl., Bestiaires, 1926, p. 532).
d) [Adv. compar. de sens quantitatif] Plus, moins, aussi, autant, plutôt, davantage que... À la table des Richard s'asseyaient deux pensionnaires; l'un un peu plus âgé que moi, l'autre d'un ou deux ans plus jeune (Gide, Si le grain, 1924, p. 481).
e) [Compar. synthétiques] Meilleur, mieux, pire, pis, moindre que... Ils sont meilleurs qu'ils ne paraissent (Camus, Peste, 1947, p. 1319).
Rem. [Que haplologique] Je ne demande pas mieux qu'il réussisse (Le Bidois 1967). Dans une telle phrase que représente à la fois la conj. de sub. et le que compar.
2. Ne ... que (valeur exceptive ou restrictive). Ne ... rien d'autre que, seulement. Puisqu'il ne voulait pas répondre par des préjugés, il ne pouvait qu'approuver (Malraux, Cond. hum., 1933, p. 220).
Ne ... que + subst. ou pron.La vie de cet homme étrange, qui ne fut qu'une lutte forcenée, terminée par une mort amère, qu'eût-elle été si, de ce coup la ruse déjouée, il se fût abandonné sans effort à la miséricorde − s'il eût appelé au secours? (Bernanos, Soleil Satan, 1926, p. 147).Pendant plusieurs minutes, je ne pensai qu'à cela; puis un autre sentiment se fit jour en moi (Mauriac, Nœud vip., 1932, p. 237).
P. ell. MmeRatinois, bas: Combien (de dot)? Ratinois, bas: Cent mille. MmeRatinois, à part: Que ça! (Labiche, Poudre aux yeux, 1861, ii, 6, p. 366).
Ne fût-ce que... Même si ce n'était que. Voilà donc que mes hommes avaient besoin de temps, ne fût-ce que pour comprendre un arbre (Saint-Exup., Citad., 1944, p. 544).
Pop., région.
J'arrive que. J'arrive seulement. Voir M. Aaz, 1ersept. 1935 ds Dam.-Pich. t. 6 1940, § 2281.
Attendez que. Attendez seulement:
9. Il y a aussi l'autre M. l'Abbé, celui de Paris, qui est pour quelques jours ici. Il ne vous refusera pas. Attendez que, pauvre. Malègue, Augustin, t. 2, 1933, p. 315.
− V. aussi ne II.
C. − Conj. ou adv. exclam.
1. [Suivi d'un verbe au subj., exprimant le souhait, l'indignation, la surprise] Que la paix, la nourriture et la bénédiction soient au peuple qui travaille! (Claudel, Repos 7ejour, 1901, iii, p. 859).Qu'il boive beaucoup (Camus, Peste, 1947, p. 1231):
10. Votre visage, je vous demande votre visage. Que je voie votre visage aux yeux fermés, sous le mien, comme un autre monde. Montherl., Bestiaires, 1926, p. 467.
2. [Placé en tête de phrase, que indique un haut degré]
a) Que + phrase attributive.Oh! que la suite des temps est lente. Quels longs efforts pour déplacer! Comme l'on se repose entre luttes! (Gide, Journal, Feuillets, 1896, p. 104).Qu'il est beau! (Giraudoux, Intermezzo, 1933, ii, 7, p. 143).Qu'il est fidèle! (Saint-Exup., Terre hommes, 1939, p. 202).
Que + autre phrase.Que je voudrais l'avoir connu! (Gide, Si le grain, 1924, p. 415).Ah! qu'il avait peur d'arriver trop tard! (Mauriac, Nœud vip., 1932, p. 156).
Familier
Ce qu'il est beau!Ce qu'avec trois mots je le ferais taire! (Colette, Blé en herbe, 1923, p. 315).
Qu'est-ce qu'il est beau!Alors, qu'est-ce qu'ils se payent notre gueule, les Fritz, depuis deux ans! (Malraux, Espoir, 1937, p. 523).
b) Que + interr. ou exclam. nég.Pourquoi. Pour resserrer les nœuds de cette chaste famille, que ne donne-t-on en mariage le frère à la sœur et la sœur au frère? (Chateaubr., Fragm. Génie, 1800, p. 165).Que ne suis-je déjà au lieu de mon repos! (Chateaubr., Natchez, 1826, p. 389).« Ah, pensait le plus jeune, que n'ai-je auprès de moi mon chien aux dents fraîches, pour lui faire un licol de mes bras!... » (Montherl., Bestiaires, 1926, p. 576).Qu'allons-nous visiter sa cellule! Elle est vide (Saint-Exup., Terre hommes, 1939, p. 187).
Que + de + subst.Que de problèmes soulève ce destin étrange! (Mauriac, Journal 2, 1937, p. 109).
c) Pop. Comment que...!Il y a vingt ans, un type qui se serait conduit comme ça, et comment qu'elle l'aurait laissé tomber! (M. Bernard, La nouvelle Nouvelle Revue française, 1956, p. 219 ds A. Henry, Ét. de synt. expressive, Univ. de Bruxelles, 2eéd., 1977, p. 148).
3. [Renforçant oui, non, si] Qui s'entr'écoute? Les contradicteurs? Que non pas (Gide, Journal, Feuillets, 1896, p. 104).Et tout cela était-il particulier à Paris? Que non (Montherl., Célibataires, 1934, p. 831).
II. − Empl. pronom. Pronom non prédicatif, marque le genre de l'inanimé et assume toutes les fonctions régimes du substantif.
A. − Que, pron. interr.
1. [En interr. dir.]
a) [Ordre verbe-suj.]
[Que, obj. dir.] Que veux-tu? Que fais-tu? (Giraudoux, Siegfried et Lim., 1922, i, 6, p. 39).
[Que alterne avec quoi lorsque le verbe est à l'inf.] Que dire? Que penser? Que dire? Bunuelo avait disparu (Montherl., Bestiaires, 1926, p. 506).
[Que, compl. indiquant le prix, le poids, la durée] Que coûte ce terrain? Que pèse ce colis? Que dure la traversée?
[Que, attribut] Qu'est cela? Elle ne savait pas. C'était peut-être le vent, plutôt la chaleur (Montherl., Bestiaires, 1926, p. 419).
[Que, « sujet réel » d'un verbe impers.] Qu'est-il arrivé? « Je suis le pasteur Gregory. Qu'arrive-t-il?... » (Martin du G., Thib., Cah. gr., 1922, p. 610).
[Dans le tour figé qu'importe? (sans il impers.)] Qu'importe, maintenant! (Martin du G., Thib.Épil., 1940, p. 903).
b) Qu'est-ce que. Qu'est-ce que cela coûte?
[Compl. d'obj. dir.] Qu'est-ce que vous faites? − Qu'est-ce qu'ils fichent, les Russes? − Qu'est-ce qu'ils fichent, les Français? (Malraux, Espoir, 1937, p. 561):
11. Il se met devant moi. Je balbutie: − Qu'est-ce... qu'est-ce que vous me voulez? Il ne répond rien, mais emboîte le pas à ma gauche. Je gardais, tout en marchant, les yeux fichés en terre... Gide, Si le grain, 1924, p. 408.
[Attribut] Qu'est-ce que c'est? Lâchez cette jeune fille. Qu'est-ce que c'est? (Anouilh, Antig., 1946, p. 169).
[« Sujet réel » d'un verbe impers.] Qu'est-ce qu'il y a? Qu'est-ce qu'il en reste? (Martin du G., Thib., Épil., 1940, p. 903).
Rem. Que est toujours conjoint au verbe, excepté dans l'expr. que diable! ou une expr. voisine: Le Papillon: Attends un peu, que diantre! Il n'est jamais trop tard pour retourner chez soi (A. Daudet, Pt Chose, 1868, p. 234). Que diable manigançais-tu là-haut? (Arène, Paris ingénu, 1882, p. 258).
2. [En interr. indir.]
a) [Régime dir., précédé de ce] Ce que. Il dit ce qu'il pense. En toute conscience, mon cher abbé, je vous dirai ce que j'ai répondu hier à Antoine (Martin du G., Thib., Pénitenc., 1922, p. 730).
b) [Constr. avec l'inf., en concurrence avec quoi] Il ne sait que dire. Il ne savait que dire (Martin du G., Thib., Cah. gr., 1922, p. 640).
c) Fam. ou pop. [Empl. avec est-ce que] Antoine: Ah! Cristina: Je veux vous demander qu'est-ce que vous en pensez. Antoine: Oui, Madame. Jules paraît à droite et lui fait signe. Une seconde, Madame. (à Jules.) Qu'est-ce que c'est? (Bourdet,Sexe faible,1931, III, p. 408).Maman (...) vous savez qu'est-ce qu'elle fait? (...) − Ne dis pas; qu'est-ce qu'elle fait (...) ce qu'elle fait (Maurois,Cercle de famille, 1932, iii, xvi ds Rob.).
3. Pop. [Reprend un mot interr.; assume seulement la fonction suspensive de la valeur de vérité, le mot interr. spécifiant de son côté la fonction gramm. de la variable que la réponse est appelée à saturer] Pourquoi que je te fixe comme ça? Et toi? Pourquoi que tu ne peux pas soutenir mon regard? (Mauriac, Nœud vip., 1932, p. 227).
C'est que. Quoi c'est qu'on bouffe? (Benjamin, Gaspard, 1915, p. 15).Non, je veux dire un restaurant où c'est qu'il y avait l'air d'avoir une bien bonne petite cuisine bourgeoise (Proust, J. filles en fleurs, 1918, p. 485).Où c'est que vous êtes malades? (Céline,Voyage,1932, p. 107).
C'que, sque. Chaq' manifacture est eun' ruche Où-c'-que l'emp'reur, d'l'avis du ciel, Veut que l'commerce aill' fair' son miel (Compliment des dames et des forts de la Halle, 1810ds Hist. Fr. par chans., p. 41).Croquebol reprit: − Ça se peut bien, mais enfin ça n'est pas tout ça, faut voir à raisonner un peu; quéq'tu veux qu'nous allions au claque, nous savons même pas ousque c'est! (Courteline, Train 8 h 47, 1888, 2epart., 3, p. 115).N'allons pas gêner leur stratégie. Retournons d'ousque nous sommes venus. Compagnie, demi-tour, pas de course, arche! (Ghelderode, Pantagleize, 1934, iii, 8, p. 115).
Que c'est que. Pourquoi qu'c'est qu'ils m'attendent? (Benjamin, Gaspard, 1915, p. 11).
B. − Que, pron. rel. avec antécédent
1. [Que a pour antécédent]
a) [Un animé] L'enfant que tu as vu. Cet ami que tu rencontres et qui porte en lui son enfant malade (Saint-Exup., Citad., 1944, p. 548).
b) [Un inanimé] Le livre que tu as vu. Grand, à la surprise du docteur, commanda un alcool qu'il but d'un trait (Camus, Peste, 1947, p. 1300).
c) [Un neutre] Ce que tu dis. Voilà ce que doit vouloir de nous tout bon critique (Mauriac, Journal 2, 1937, p. 156).
Rem. ,,À la différence de que en emploi interrogatif, il peut être disjoint du verbe de sa proposition, mais − et c'est en cela que se manifeste sa non-prédicativité − il se disjoint malaisément de son antécédent`` (G. Moignet, Le Système du paradigme qui/que/quoi ds Trav. Ling. Litt. Strasbourg t. 19 n o1 1967, p. 90): C'est une des choses les plus émouvantes qu'il y ait sur la terre (Malraux, Espoir, 1937, p. 530).
d) [Un adj. attribut] Les oies et les canards, charmés qu'ils sont, s'approchent pour le mieux considérer (Chateaubr., Voy. Amér. et Ital., t. 1, 1827, p. 134).
2. [Que a pour fonction]
a) [attribut] L'homme qu'il est. Le vieillard que je suis devenu a peine à se représenter le furieux malade que j'étais naguère (Mauriac, Nœud vip., 1932, p. 14).
b) [compl. d'obj. dir.] L'homme qu'il voit. Tout cheval qu'il voit, il a envie de le monter (Montherl., Bestiaires, 1926, p. 413).
c) [compl. circ.] Un jour qu'elle était souffrante (Proust, Guermantes 2, 1921, p. 322).La dernière fois qu'elle s'était assise là, sur ce même canapé, − auprès d'Antoine (Martin du G., Thib., Mort père, 1929, p. 1351).
[Dans des tournures présentatives d'une indication de durée]
Il y a ... que. Il y a cinq ans qu'il ne plaide plus, qu'il ne peut plus plaider (Mauriac, Nœud vip., 1932, p. 185).
Cela fait ... que. Cela fait bientôt neuf mois qu'il est là-bas (Martin du G., Thib., Pénitenc., 1922, p. 676).
Voici/voilà ... que. Voilà trente-six heures que le filtre rénal ne donne plus! tu comprends? (Martin du G., Thib., Mort père, 1929, p. 1274).
d) [Que est empl. comme suj. (en fait un anc. « sujet réel ») dans un certain nombre de loc.] Coûte que coûte (v. coûter), vaille que vaille, arrive que pourra.
Advienne que pourra. Parce qu'une petite fille qui fait aujourd'hui l'entêtée a pris peur, et nous a livrés pieds et poings liés, advienne que pourra! (Bernanos, Soleil Satan, 1926, p. 79).
3. C'est ... que. [Tournure présentative: c'est l'antécédent qui assure la fonction gramm. régime, que étant un simple subordonnant]
a) [Régime dir.] C'est la personne que j'ai rencontrée. La taille directe sur le tas, c'est-à-dire sur le chantier de construction sera toujours meilleure que celle faite à l'atelier. C'est celle que les anciens ont pratiquée sur les chantiers d'Autun, de Chartres ou de Vézelay (Arts et litt., 1935, p. 22-1).
b) [Régime indir.] C'est à cette personne que j'ai parlé. C'est à cette classe que se rapportent, si on les déclare nécessaires, l'idée innée cartésienne, l'illumination, la purgation, les dispositions morales, l'exemple des autres, l'enseignement social, etc. (Théol. cath.t. 4, 11920,p. 860).
c) [Régime circ.] C'est pour cela que je suis parti. C'est pour éviter cette monotonie née de rapprochements trop fréquents d'ombres identiques que les peintres les plus attachés aux contrastes de tons, comme Rembrandt ou Daumier, ont eu recours au contraste chaud-froid, qui est l'équivalent sur un autre plan du contraste clair-sombre, chaque fois que deux ombres d'égale intensité se trouvaient trop voisines (Arts et litt., 1935, p. 30-9).C'est hier que je parlais. C'est en 1893 que Victor Maurel, tragédien lyrique, a établi les trois qualités de la voix: la hauteur, l'intensité, le timbre (Arts et litt., 1935, p. 36-8).
4. Pop. [Empl. de relatif « universel » et de relatif « décumulé »]
a) [Relatif « universel »: que se substitue à qui, dont, auquel, etc.] C'est toi que j'ai besoin. C'est moi que je lui piquais ses épingles (Labiche, Station Champb., 1862, ii, 1, p. 264).Moi, j' m'en aperçois bien!... sans parler qu'il est raide comme la justice, c'est moi que je lui mets son papier Fayard, qu'on dirait un vieux mur couvert d'affiches... et c' qu'il est maigre! (Gyp, Souv. pte fille, 1927, p. 223).
b) [Relatif « décumulé »: que assure seulement la fonction de subordination (la fonction gramm., dans la relative, est marquée par ailleurs)] Té, Maurin, toi que tu as le temps, reste ici à l'espère jusqu'à ce que tu me l'aies tué (J. Aicard, Maurin des Maures, xxi, p. 18 ds Dam.-Pich. t. 4 1969, § 1322).
Prononc. et Orth.: [k(ə)]. Élision devant voy. et h muet. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. . Que conj. I. Introd. une prop. sub. A. Une prop. circ. 1. cond. restrictive a) 842 loc. in o quid « à condition que » suivi du subj. [quid a pour antécédent le pron. dém. neutre o précédé de la prép. in] (Serments de Strasbourg ds Henry Chrestomathie, 1, 6: si salvarai eo cist meon fradre Karlo et in aiudha et in cadhuna cosa [...] in o quid il mi altresi fazet); ca 1100 mais que « à condition que, pourvu que » id., v. mais II C; b) 1245 que « id. » suivi du subj. (Huon le Roi, Regrès N.-D., 223 ds T.-L. t. 8, 33, 47), v. aussi condition (à), pourvu que...; 2. compar. a) que empl. avec le subj. 881 melz ... que, que fonctionne à la fois comme corrélatif de l'adv. compar. et comme conj. introduisant la complétive (Ste Eulalie ds Henry Chrestomathie, 2, 17: Melz sostendreiet les empedementz Qu'elle perdesse sa virginitet; v. G. Moignet, Gramm. a. fr., p. 242); b) que empl. avec l'ind. ca 1100 la régissante est positive, l'ind. est précédé de ne : plus ... que ne (Roland, éd. J. Bédier, 890: Plus curt a piet que ne fait un cheval); id. greignor ... que ... ne; mielz ... que ne (ibid., 978, 1725); empl. de que suivant la particule négative ne pour constituer la loc. restrictive ne ... que, v. ne III; v. aussi ainsi, autant, autre, même, mieux, moins, mieux que...; 3. finale, le verbe de la sub. est au mode subj. 881 (Ste Eulalie, 27: Tuit oram que por nos deignet preier Qued auuisset de nos Christus mercit); 937-952 (Jonas, éd. G. de Poerck, 146: preparavit Dominus un edre sore sen cheve qet umbre li fesist), cf. por ce que, por que, pour; 4. consécutive a) α) le verbe est au mode ind., la conséquence est posée comme un fait affirmé 937-952 que est annoncé par tant dans la régissante (Jonas, 187: tant laveint offendut qe tost le volebat delir e inde la civitate volebat comburir); fin xes. si ... que (Passion, 127; 192); ca 1100 tel ... que (Roland, 722); id. sans terme d'appel dans la régissante (ibid., 549: Soürs est Carles, que nuls home ne crent); β) le verbe est au mode subj. id. si ... que la régissante est négative (ibid., 1993); 1130-40 tel ... que la régissante est interr. (Wace, Conception N.-D., éd. W. R. Ashford, 490); fin xiiies. [ms.] sans terme d'appel (Henri de Valenciennes, Henri de Constantinople, éd. J. Longnon, 501, p. 27, var.); b) exprime la conséquence d'un fait formulé sous la forme d'une interr., d'une exclam. − ou d'une affirmation − 1130-40 (Wace, Conception N.-D., 252: Ai mesfait en nulle maniere Que m'ofrende seit mise ariere?); 5. causale; le verbe de la sub. est au mode ind. 2emoit. xes. (St Léger, éd. J. Linskill, 166: Super lis piez ne pod ester, Que toz los at il condemnets); fin xes. (Passion, 404: No's neient ci per que crement, Que Jesum Crist ben requeret), la prop. explicative ainsi construite est à peine une sub. : que pourrait être considéré comme une ligature coordonnante et se traduire par car (G. Moignet, op. cit., p. 237); v. aussi parce que, puisque...; 6. exclusive, exceptive a) apr. une régissante positive ca 1050 le mode de la sub. est l'ind. (St Alexis, éd. Chr. Storey, 93: Larges almones, que gens de l'en remest Dunet as povres); b) apr. une régissante négative ca 1100 mode subj. (Roland, 759: Ne n'i perdrat [Carles] ne runcin ne sumer Que as espees ne seit einz eslegiet; 982; 2401); v. aussi moins (à), sans que...; 7. que introd. le second élém. d'un système temporel à deux membres solidaires; ce second membre exprime l'incidence d'un fait instantané par rapport à un procès en voie d'achèvement. Le caractère inachevé du 1erprocès s'exprime par un verbe négatif ca 1100 (Roland, 84: Ja einz ne verrat passer cest premer meis Que jel sivrai od mil de mes fedeilz; 694); 8. hypothétique; le mode de la sub. est le subj. ca 1150 que équivaut à se [+ subj. imp.] (Thèbes, éd. G. Raynaud de Lage, 3879: Que fust seur aux la force moie, Mout volentiers m'en vengeroie!); si + ind., suivi d'une seconde prop. introd. par que + subj., v. infra I B; v. aussi supposer (à) que; 9. que entre dans la compos. de conj. et de loc. conj. introduisant des concess., v. alors, bien, malgré, où que... B. Dans le cas de deux sub. circ. (notamment temp. ou hyp.) juxtaposées ou coordonnées, que s'emploie pour reprendre une autre conj. de subordination a) ca 1050 deux temp. quant ... que (St Alexis, 167: Quant tut sun sun quor en ad si afermet, Que ja, sum voil, n'istrat de la citied); fin xiies. quant ... et que (Homélies sur Ezéchiel, 10, 7 ds T.-L. t. 8, 35, 28); b) 1160-74 deux hyp. se [+ ind.] ... e que [+ subj.], car il s'agit en réalité de la conséquence de l'hyp. (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, III, 8918: E se Deu le velt consentir, E que a lui vienge a plaisir...). C. Introd. une prop. complétive 1. Le verbe de la régissante implique une virtualité qui se traduit par le mode subj. empl. dans la sub. a) α) le verbe de la régissante exprime le commandement, la prière ca 881 (Ste Eulalie, 14: Il li enortet ... Qued elle fuiet lo nom christiien; 26: Tuit oram que por nos degnet preier); 937-952 (Jonas, 212: poscite li qe remissionem ... peccatorum ... nos praebeat); β) la défense ca 1100 (Roland, 2438); γ) apr. un verbe exprimant le commandement, que peut introduire le style direct 1176-81 un impér. (Chrétien de Troyes, Lion, éd. M. Roques, 365: Or te pri ... que tu me consoille); un inf. avec négation, ayant valeur d'impér. ca 1180 (Fierabras, éd. G. Servois, 1587: ... te pri que ci ne me laissier); b) le conseil ca 881 (Ste Eulalie, 6: Elle no'nt eskoltet les mals conselliers Qu'elle Deo raneiet [le verbe conseiller est inclus dans le subst.]); c) la volonté [937-952 Jonas, 197: liberi de cel peril qet il habebat discretum (var. decretum) qe super els mettrait (cond.)] ca 1050 (St Alexis, 249: Co ne volt il que sa mere le sacet); d) la convenance 2emoit. xes. (St Léger, 6: ... si est biens Quae nos cantumps de sant Lethgier [id.]); e) la crainte ca 1050 (St Alexis, 60; 199); f) apr. les verbes factitifs (notions de « faire, permettre, empêcher ») ca 1050 (ibid., 370; 488); 2. le verbe de la régissante implique une actualisation (verbes de perception, d'énonciation, de connaissance) a) le mode de la sub. est l'ind. α) 937-952 (Jonas, 172: co videbat ... qe ... si astreient li Judei perdut; 194); fin xes. (Passion, 34), v. voici, voilà que; β) id. (ibid., 364: A toz diran que revisquet); apr. un verbe d'énonciation, que introduisant le style direct, précède les particules oïl, non 1160-74 (Wace, Rou, II, 379: Et Regnier dist que non); ca 1170 (Rois, III, II, 13, p. 114: Cil respundi Que oïl); γ) ca 1050 (St Alexis, 279: Or set il bien qued il s'en deit aler); avec ell. du verbe d'énonciation, introd. le titre d'un traité, d'un chapitre d'une œuvre litt. 1580 (Montaigne, Essais, II, XV, éd. P. Villey et V. L. Saulnier, p. 612 : Que nostre desir s'accroit par la malaisance [titre]); b) le mode de la sub. peut, avec ces mêmes verbes, être le subj. quand le verbe régissant α) exprime une hyp. ca 1050 (St Alexis, 495: Il nem faldrat s'il veit que jo lui serve); β) est négatif ca 1100 (Roland, 448); 3. le verbe régissant exprime une opinion, une appréciation a) opinion α) fin xes. le mode de la complétive est le subj. (Passion, 438: Il li non credent que aia carn; 440); β) id. l'ind., amené par l'empl. de la 1repers. de l'ind. du verbe régissant (ibid., 343: E ço m'est vis que ço est l'ume Deu); b) appréciation α) id. l'appréciation portant sur un fait établi (ibid., 440: Co'st grant merveile que pietet ne t'en prist); ca 1100 le verbe unissant l'attribut à la complétive qui fait fonction de suj., est s.-ent. (Roland, 716: Deus! quel dulur que li Franceis nel sevent); β) ca 1165 subj., l'appréciation portant sur une éventualité (Benoît de Ste-Maure, Troie, éd. L. Constans, 16237). II. Introd. une prop. indép. ou princ. au subj. Il semble qu'il y a ell. d'un verbe régissant « je demande, je souhaite, j'ordonne » a) optative α) subj. prés.; expression d'un souhait fin xes. (Passion, 200: Que de nos aiet pïeted!); β) imp. du subj., expression d'un regret fin xiies. (Prise d'Orange, éd. Cl. Regnier, 467 [réd. AB]: Que pleüst Deu, ... Que ci fust ore le palazin Bertran; v. note, p. 131); b) jussive 1174-76 (Guernes de Pont Ste-Maxence, op. cit., 4802). III. Explétif. Dans une interr., que peut être intercalé entre le mot interr. et le verbe 1. xiiies. [ms.] (2econtin. de Perceval, éd. W. Roach, 31168, leçon ms. P: Que je ne soi que il devindrent Ne quelle voie que il tinrent); 2. xiiies. que si équivalent à si exprimant une hyp.; empl. dans le style jur., le style soutenu (Livre de Jean d'Ibelin ds Assises de Jérusalem, éd. J. Beugnot, t. 1, p. 76). . Que rel. I. Empl. avec antécédent A. 1. En fonction d'obj. dir. a) α) 842 masc. sing. (Serments de Strasbourg ds Henry Chrestomathie, 2, 19: Si Lodhuuigs sagrament que son fradre Karlo jurat, conservat...); 937-952 (Jonas, éd. G. de Poerck, 196: Liberi de cel peril qet il habebat discretum qe super els mettreit; 203); β) id. masc. plur. que (ibid., 10; 209; 236); b) α) id. fém. sing. quae (ibid., 158); fin xes. (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 96); β) 2emoit. xes. fém. plur. (St Léger, 152); c) α) ca 1050 neutre, l'antécédent est le pron. dém. ço (St Alexis, éd. Chr. Storey, 353; 386); β) ca 1100 forme le second élém. d'une loc. à valeur concessive dont le premier élém. est un pron. ou un adv. indéf.; la rel. introd. est au mode subj. ca 1100 que ... que (Roland, éd. J. Bédier, 3827), v. quoique; v. aussi comment, combien ... que; 2. en fonction de suj., dans certains dial., notamment en agn., lorr., fr.-comtois et champ. de l'est (v. Ph. Ménard, Synt. de l'a. fr., 1976, § 64 et R. Martin ds Trav. Ling. Litt. Strasbourg t. 5, 1, 1967, pp. 112-116); a) α) 2emoit. xes. masc. sing. (St Léger, 232: Lai s'aprosmat [Vadart] que lui [Lethgier] firid); fin xes. (Passion, 221); β) ca 1100 masc. plur. (Roland, 3037); b) α) fin xes. fém. sing. (Passion, 400); β) 1remoit. xiies. fém. plur. qued (Psautier d'Oxford, éd. Fr. Michel, LXXXVIII, 34); c) α) ca 1100 neutre ço que (Roland, 3519); β) ca 1100 d'un rel. comp. à valeur généralement concessive (v. G. Moignet, Gramm. de l'a. fr., 1973, pp. 166-167; Ph. Ménard, op. cit., § 78) qui ... que (Roland, 1546); v. qui I A 2 c β; ca 1150 que ... que (Wace, St Nicolas, éd. E. Ronsjö, 1421); 3. en fonction d'attribut. L'antécédent de que est un subst. suj. de la régissante; le suj. de la rel. est un pron. fin xives. (Froissart, Chron., I, § 298, éd. S. Luce, t. 4, p. 25, 10: et recorderent ... que une puignie de gens qu'il estoient, il avoient desconfi le roi d'Escoce). B. Rattaché à un antécédent de sens local ou temporel, que a la valeur d'adv. rel., équivalent à « où », cf. P. Imbs, Prop. temp. a. fr., 1956, pp. 195; 217; 1. fin xes. local (Passion, 436: Vedez mas mans, vedez mos peds, Vedez mo laz, qu'i fui plages); 2. fin xes. temp. (Passion, 58: Venrant li an, venrant li di Que tt'asaldran toi inimic), cf. les loc. conj. du type a l'ore que, P. Imbs, op. cit., p. 220; v. lorsque. II. Que empl. sans antécédent; rel. neutre. A. La rel. introd. est obj. dir. du verbe régissant 1. fin xes. (Passion, 446: Alques vos ai deit de raizon Que Jesus fez pos passïon), v. que interr. I 2 a, cf. G. Moignet, op. cit., p. 168, § 2 in fine; fin xies. [ms.] (Sponsus ds Henry Chrestomathie, n o140, p. 252, 22: Oiet, virgines ... Aiet presen que vos comandarum!); 2. fin xes. la rel. est ell. du verbe (Passion, 7; 8: Per tot obred [Christus] que verus Deus, Per tot sosteg que hom carnels); 3. ca 1100 le verbe de la sub. introd. est un inf.; le verbe de la régissante est négatif et implique une idée d'indétermination (Roland, 987: Se ne l'assaill, dunc ne faz jo que creire), v. que interr. II 2 b. B. La rel. introd. constitue un compl. de propos; mode subj. ca 1150 (Thèbes, éd. G. Raynaud de Lage, 4019: Que mon fils puisse, pas ne cuit Que hom soit pris en mon conduit); ca 1165 que jou sace (Guillaume d'Angleterre, éd. M. Wilmotte, 1611). C. Que est suj. neutre 1. 1160-74 (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, III, 7264: De voz terres vos chaceront E que piés iert, vos ocieront); xiiies. (Ordene de chevalerie ds Barbazan et Méon, Fabliaux et contes, t. 1, p. 77, 474: Fai que dois, aviegne que puet); 2. la prop. introd. par que remplit la fonction de suj. dans une phrase à prédicat a) le thème isolé par que est un inf. α) ca 1200 (Chevalier au cygne, 224 ds T.-L. t. 8, 14, 9: C'est li miex que je voie que la vile assieger); 1280 (Clef d'amors, 896, ibid., 14, 8); β) ca 1260 que de (Philippe de Novare, Quatre âges de l'homme, 133, ibid., 14, 29); b) le thème isolé par que est un subst. v. Moignet, op. cit., p. 159, ca 1210 (Raoul de Houdenc, Meraugis, 4575, ibid., 14, 2: C'est li nons qui plus droit se nome Que li tuens); 1269-78 (Jean de Meun, Rose, éd. F. Lecoy, 14167). . Que interr. Pron. rel. du genre inanimé I. Interr. indir. 1. a) 2emoit. xes. en fonction d'attribut du suj. (St Léger, éd. J. Linskill, 156: Ne soth ... qu'es devenguz); b) 1230-35 élément d'un interr. comp. (Mort le Roi Artu, éd. J. Frappier, § 14, 13, p. 10: savez vos que ce est que vos m'avez otroie?); 2. a) ca 1050 en fonction de régime dir. (St Alexis, éd. Chr. Storey, 270: ... ne sevent que funt); ca 1100 (Roland, 460; 1982); dans la lang. mod., l'interr. indir. est devenue rel., que ayant été remplacé par ce que; b) le verbe de l'interr. introduite par que est l'inf., le verbe de la régissante étant le plus souvent négatif et impliquant interr., délibération (avoir, savoir, laisser...), cf. que rel. II A 3 ca 1100 (Roland, 2123: Or ad li quens ... asez que faire); ca 1170 (Guillaume d'Angleterre, éd. M. Wilmotte, 1604; N'ai que faire de cel latin); fin xiies. (Raoul de Cambrai, éd. P. Meyer et A. Longnon, 1172: ne sai qe penser); 3. en fonction de suj. ca 1170 agn. (Rois, II, 34-35, p. 96: ne me aperceif pru que est dulz e que amer). II. Interr. dir. 1. en fonction de régime dir. fin xes. (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 83: Que m'en darez e'l vos tradrai?); ca 1050 (St Alexis, 501); 2. de compl. de propos fin xes. (Passion, 497: Lui que aiude?); ca 1170 (Chrétien de Troyes, Erec, éd. M. Roques, 3725: Moi que chaut?; 4391: A vos que tient?); 3. d'attribut du suj. a) ca 1050 (St Alexis, 107: ... qu'est devenut?); b) élém. d'un interr. comp. marquant l'insistance et constituant l'origine de la forme mod. qu'est-ce que; ce antécédent de la rel. figure comme suj. de est, que comme attribut 1174-77 (Renart, éd. M. Roques, 6955: Renart, frere, que ce puet estre?); ca 1179 (ibid., 2076: Ce que est ore que vos dites?); 1230-35 (Mort le roi Artu, éd. J. Frappier, 52, 22, p. 62: que est ce que vos dites?); 4. de suj. 1remoit. xiies. agn. (Psautier d'Oxford, éd. Fr. Michel, CXIII, 5: Que est a tei...? [quid est tibi]). . Que adv. I. Interr. 1. Phrase positive « pourquoi » a) fin xes. interr. dir. (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 183: Maior forsfait que i querem?); 1remoit. xiies. (Psautier d'Oxford, éd. Fr. Michel, CXIII, 5: que tu ies convertiz ariere? [quia (« pourquoi ») conversus es retrorsum?]); b) ca 1135 interr. indir. (Couronnement de Louis, éd. Y. G. Lepage, 1501); 2. ca 1050 phrase négative ; exprime un regret « pourquoi ne ... pas? » (St Alexis, 419; 438: E de ta medra que n'aveies mercit?) II. Exclam. ca 1165 « combien » (Guillaume d'Angleterre, éd. M. Wilmotte, 844: ... que m'ont traï Li marceant de pute orine...!); fin xiiies. [ms.] (Gautier d'Arras, Ille et Galeron, éd. A. G. Cowper, 2465, var. P: Caitive riens, que Dix le het!). . Que conj. représente la conj. lat. quia, qui, dans la lang. class. exprime la cause, fréq. en corrélation avec eo, hoc, ob id ... Dans la lang. vulg., quia assume peu à peu d'autres empl., prenant la première place parmi les conj. complétives. Dès Plaute, quia concurrence quod pour introduire une prop. constituant le suj. ou le compl. du verbe principal « ce fait que; à savoir que » (Plaute, Mil., 1210: istuc mihi acerbumst quia...; Stich., 506 ds Lat. Gramm. Synt. und Stil., § 316c: mi volup est ... quia). Quia est empl. en concurrence avec quod pour introduire une complétive apr. les verbes d'opinion, d'affirmation et de sentiment [quod ayant alterné avec la prop. infinitive], dep. Pétrone, 46, 4: dixi quia (A. Stefenelli, die Volksprache im Werk des Petron, Stuttgart, 1962, pp. 100-102); il est fréq. dans cet empl. dans les trad. du gr., chez les auteurs chrét. (v. J. Herman, La Formation du système roman des conj. de subordination, Berlin, 1963, pp. 37-40). De même à la faveur des trad. bibliques, quia s'emploie en concurrence avec quod pour introduire le discours direct (cf. la conj. gr. ο ́ τ ι), v. Lat. Gramm., id., § 312a, δ; Lerch t. 1, p. 143. D'autre part, à basse époque, quia s'affaiblit progressivement en qua devant consonne init. et qui devant voyelle; ces deux formes s'étant par la suite, empl. indistinctement, qua se localisa notamment en Italie du Nord et du Sud, et qui en Italie centrale, dans le domaine ibéro-roman et dans le domaine gallo-rom. où il est relevé au viiies. sous la forme que. Cette forme favorise sa confusion avec le rel. quem, cas régime (que rel.) et la conj. quam, spéc. dans son empl. en corrélation avec un compar. (ixes.), v. FEW t. 2, 1466ab et J. Herman, op. cit., pp. 125-129. . Que rel. cas régime atone masc. sing. est issu du lat. class. quem (acc. masc. sing. du rel. qui). Après l'ext. des formes du masc. au fém. et au neutre, la perte de la distinction du nombre − la déclinaison s'étant, d'autre part, réduite aux cas suj. et régime − que devint la forme atone du cas régime des trois genres sans distinction de nombre. Il est également relevé comme cas suj. neutre, et, dans certains dial. (supra I A 2), masc.-fém., entrant en concurrence avec qui*. L'ext. de que(m) est perceptible relativement tôt: quem pour quam, acc. fém. sing.: Pompéi 2188 ds Vään., § 285: futuit quem voluit; anno 380: ancilla ... quem amice deflent ds Löfstedt, p. 133; − quem pour quas, acc. fém. plur.: vie-viies. Form. andec., 58 ds Vään., ibid.; − quem pour quod, acc. neutre sing.: fin ives. Peregr. Aeth., 4, 2 ds Löfstedt, p. 131, v. aussi Vään., ibid. À basse époque, on relève également la forme que pour quem (locus ... que comparavit sibi CIL III, 6399 d'apr. V. Väänänen ds Congrès internat. Ling. et Philol. rom., Québec, 1976, p. 271). Que(m) est enfin susceptible d'être confondu avec quae, neutre plur., rendu par que apr. monophtongaison de ae, écrit e. Qu(a)e, prenant une grande extension, pourra représenter les trois genres, sans distinction de nombre, cf. vies. quae pour quam Grégoire de Tours: fovea quae fratri tuo parabis, v. V. Väänänen, Congrès..., pp. 270-271. - Que, rattaché à un antécédent de sens temp. [I B 2] est rendu en lat. par quod (Plaute, Amph., 302: jam diu est, quod...; Pline, Lettres, IV, 27: Tertius dies est, quod...; de même Peregr. Aeth., 2, 2 ds Löfstedt, p. 56), ou, à basse époque, par l'adv. rel. qua (his diebus qua, Peregr. Aeth., 5, 4, ibid., p. 125), cf. Vään., § 379 in fine; Lat. Gramm. Synt. und Stil., 1964, § 355, b. . Que pron. interr. est issu du lat. quid « quelque chose, quoi », nomin. et acc. neutre sing. du pron. interr. quis en position atone (cf. quoi*). Que est du genre inan. et du cas régime; il ne fonctionne comme suj. que dans certains dial., notamment l'agn. et le pic., cf. que3en fonction de suj. masc. fém.; v. G. Moignet, Gramm. a. fr., 1973, p. 170. . Que adv. représente l'empl. adv. du pron. interr. que. Cf. le pron. interr. neutre lat. quid pris à l'empl. adv. « pourquoi » dans la lang. class. Fréq. abs. littér.: 1 570 612. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 2 287 743, b) 1 971 207; xxes.: a) 2 181 841, b) 2 359 176. Bbg. Antoine (G.). La Coordination en fr. Paris, 1962, pp. 371-373, 439-443, 1185-1186. − Bement (N. S.). The early history of Fr. pour que. Rom. Philol. 1955/56, t. 9, pp. 429-435. − Berthelon (Ch.). L'Expr. du plus haut degré en fr. contemp. Berne, 1955, pp. 21-26, 41-42, 117-119. − Bonnard (H.). Que de que! Fr. Monde. 1968, n o59, pp. 13-18; Le Syst. des pron. qui, que, quoi en fr. Fr. mod. 1961, t. 29, pp. 168-182, 241-251. − Boone (A.). La Synt. des phrases complexes comportant une complétive introd. par que. Thèse, Gand, 1976. − Bureau (C.). Synt. fonctionnelle du fr. Québec, 1978, p. 104; pp. 107-112, 148-149. − Calan (E. de). Ét. sur le rel. fr. Linguistique. Paris. 1972, t. 8, n o2, pp. 137-143. − Currie (M.). La Prop. subst. en tête de phrase ds la lang. fr. St. neophilol. 1971, t. 43, pp. 31-60. − De Boer (C.). Que concessif en fr. 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Article lié : « Quoique » ou « quoi que » ?

Wiktionnaire

Conjonction 3 - français

que \kə\

  1. Synonyme de la locution conjonctive sans que, le mot sans étant sous-entendu.
    • Je suis encore la petite fille que j’étais, qui ne pouvait pas s’endormir que tout ne fût en ordre dans sa chambre et bien plié au chevet du lit les vêtements quittés…
      C’est ainsi que je voudrais me préparer à mourir.
      — (André Gide, La porte étroite, 1909, réédition Le Livre de Poche, page 172)
    • Le chétif petit homme baissait le nez à tout moment, car il ne levait jamais les yeux que son regard ne croisât celui de Joseph et ce regard lui était insoutenable. — (Julien Green, « Moïra », 1950, réédition Le Livre de Poche, pages 25-26)
    • – […] tu ne sortiras pas de cette chambre que tu n’aies appris. — (Julien Green, Moïra, 1950, réédition Le Livre de Poche, page 62)

Conjonction 2 - français

que \kə\ comparatif

  1. Signifie un critère de comparaison.
    • Ne cherchez pas pourquoi
      Si j’ai le cœur aussi dur
      Aussi dur que du bois
      — (Paroles de la chanson Aussi dur que du bois par Johnny Hallyday, 1967)
    • Il est plus grand que son père.

Conjonction 1 - français

que \kə\ conjonction de subordination

  1. Complémenteur pour nominaliser une phrase.
    • Mais tu sais que tu mens — (Paroles de la chanson Pas cette chanson par Johnny Hallyday, 1962)
    • Il est clair que nous ne sommes pas parfaits.
  2. Subordinatif de sens général permettant d’introduire et associer une clause conditionnelle, causale ou déclenchante (voire plusieurs) à celle affirmant la réalisation d’un ou plusieurs effets.
    • Que tu viennes d’un château
      De nulle part ou d’un ruisseau
      Quand tu voudras je serai là.
      — (Étienne Roda-Gil, paroles de la chanson Je serai là par Johnny Hallyday, 1967)
  3. Sert à introduire une subordonnée circonstancielle de temps après une principale négative.
    • Hâtivement, les corps étaient jetés dans les fosses. Ils n’avaient pas fini de basculer, que les pelletées de chaux s’écrasaient sur leurs visages et la terre les recouvrait de façon anonyme dans des trous que l’on creusait de plus en plus profonds. — (Albert Camus, La Peste, 1947.)
  4. La proposition subordonnante qu’il introduit se conjugue alors au subjonctif, respectivement présent ou passé, alors que la proposition subordonnée causée ou déclenchée (employant un sujet distinct) se conjugue alors respectivement à l’indicatif (le plus souvent au futur simple ou antérieur) ou au conditionnel (présent ou passé).
    • Que nous gagnions ou pas, j’aurai eu ma commission.
    • (Littéraire) (Vieilli) Que nous eussions gagné ou pas, j’aurais eu ma commission. Irréel du passé. Syntagme inusité en français moderne.
  5. Si la proposition conditionnelle, causale introduite par que est employée comme subordonnée d’une clause principale impersonnelle ou directement comme sujet impersonnel de la proposition principale, elle se met au subjonctif (présent ou passé, selon qu’elle s’est effectivement réalisée ou non) ; la proposition principale se conjugue à l’indicatif ou au conditionnel.
    • Que j’aie tort ou raison
      De vouloir t’aimer,
      Qui leur donne le droit
      À tous de nous juger ?
      — (source à préciser)
      • Il ne m’a pas paru important que nous ayons gagné.
  6. Remplace une autre conjonction pour éviter la répétition, lorsque plusieurs subordonnées introduites par la même conjonction sont coordonnées ou juxtaposées (cette substitution est facultative, bien que très fréquente). Note d’usage : Traditionnellement, quand que remplace si, le verbe peut être conjugué au subjonctif, au moins dans certains cas[1].
    • Si c’est une vérité et que je l’aie méconnue […] — (Paul Bourget, Le Tribun, page 234)
    • Si tu viens et que je sois absent, attends-moi. — (Albert Hamon, Objectif Concours grammaire et analyse, Éditions Hachette Éducation, page 137)
    • Si tu viens et que je ne suis pas là […] — (Marie-Dominique Porée-Rongier, La Grammaire française pour les Nuls, Éditions First-Gründ, 2011, page 222)
  7. Utilisé en conjonction avec un autre terme (souvent une préposition) pour former une conjonction de subordination.
  8. (Littéraire) Efface une dislocation et réintègre un thème dans une phrase[2].
    • C’est une belle fleur que la rose. (← C’est une belle fleur, la rose.)
    • Qu’est-ce que c’est que la liberté ? (← Qu’est-ce que c’est, la liberté ?)
    • Les Italiens ne peuvent nous pardonner l’occupation de la Tunisie. Ce fut pour eux un coup terrible, que cet établissement des Français sur une terre qu’ils pensaient être à leur merci. Leur dépit fut immense, et la plaie saignera longtemps. — (Eugène Blairat, Tunis : Impressions de voyages, Paris : Librairie Ch. Delagrave, 1891)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

QUE. Pronom relatif des deux genres et des deux nombres
, servant de complément au verbe qui le suit. L'e s'élide devant une voyelle ou une h muette. Celui que vous avez vu. Les gens que vous avez obligés. La personne que vous connaissez. Les espérances que vous lui avez données. Pour le peu qu'il m'en coûte. Les guerriers grecs qu'Hector a tués. Il sert encore d'attribut dans la proposition qui le suit. Ne voyez-vous pas, aveugle que vous êtes, le piège qui vous est tendu? La cruelle qu'elle est... Voilà ce que je suis. Il remplace aussi, en parlant des Choses, Pendant lequel, dans lequel, etc. L'hiver qu'il fit si froid. Le jour que cela est arrivé. Au moment que je le reverrai. Précédé de c'est, il forme une locution toute faite, c'est... que, qui sert ordinairement à attirer l'attention sur le complément, l'attribut ou l'adverbe qui se trouve placé dans la première partie de la phrase. C'est de vous que je parle. C'est à cette personne que je m'intéresse. C'est lui que j'appelle. C'est pour elle qu'on a fait cela. C'est dans cette maison qu'il habite. C'est là qu'il demeure. Où est-ce qu'on trouvera ce livre? Est-ce demain qu'il viendra?

QUE se dit aussi pour Quelle chose. Je ne sais qu'en penser. Il ne sait plus que faire ni que dire. Je n'ai que faire, Je n'ai aucune affaire. Je n'ai que faire de lui, Je n'ai aucun besoin de lui. Je n'ai que faire de ses dons, de ses conseils, Je n'ai nul besoin de ses dons, de ses conseils. Je n'ai que faire de vous dire... Il n'est pas nécessaire de vous dire... Je n'ai que faire à cela, Je n'ai aucun intérêt à cela. Je n'ai que faire là, Je ne suis pas nécessaire là. Je ne sais que faire à cela, Il ne dépend pas de moi d'y rien faire, d'y remédier. Advienne que pourra, Qu'il arrive ce qu'il pourra arriver.

QUE est aussi pronom interrogatif et signifie Quelle chose. Que faites-vous? Que vous en semble? Que vous en reviendra-t-il? Qu'attendez-vous? Qu'est-ce que c'est? Que pensez-vous faire? Que faire? Que devenir? Fam., Que diable dites-vous là? Par extension, Que sert de se flatter? À quoi sert de se flatter? Que m'importe? En quoi cela m'importe-t-il?

Littré (1872-1877)

QUE (ke) pron. relatif, ou mieux conjonctif
  • 1Lequel, laquelle, lesquels, lesquelles. Il ne s'emploie que comme régime ; il est des deux genres, et des deux nombres ; l'e s'élide devant une voyelle ou une h muette. Ces hommes que vous avez vus. Cette femme que vous connaissez. Les livres que vous lisez. Les choses qu'on vous a dites.

    Que construit avec un verbe suivi d'un verbe à l'infinitif dépendant lui-même de ce que. Des disputes théologiques que l'on a toujours remarquées devenir frivoles à mesure qu'elles sont plus vives, Montesquieu, Rom. 22.

  • 2Que, d'après la construction ordinaire, ne doit pas être séparé de son antécédent ; cependant il est quelques cas où cela peut se faire : c'est le goût et l'oreille qui en décident ; mais il ne faut pas que la clarté en souffre. Et j'ai des gens en main que j'emploierai pour vous, Molière, Mis. III, 7. N'allez point présenter un espoir à mon cœur, Qu'il recevrait peut-être avec trop de douceur, Molière, Mélic. II, 3. Nous perdons des moments en bagatelles pures, Qu'il faudrait employer à prendre des mesures, Molière, Tart. V, 3.
  • 3Que se dit archaïquement pour ce que, représentant le latin neutre quod. Le roi [Henri IV manqué par Chatel] vit, et ce misérable… Qui n'avait jamais éprouvé Que peut un visage d'Alcide, Malherbe, II, 4.

    En cet emploi il se dit surtout avec les verbes avoir, savoir, pouvoir (joints à ne). Mon esprit satisfait n'aura que désirer, Racan, Psaume L. …C'est demain qu'elle [Médée] sort de nos terres ; Nous n'avons désormais que craindre de sa part, Corneille, Médée, II, 4. Surpris, ravi, confus, je n'ai que repartir [répondre], Corneille, Suiv. III, 10. L'autre aussitôt de s'excuser, Alléguant un grand rhume ; il ne pouvait que dire Sans odorat…, La Fontaine, Fabl. VII, 7. Les traits du visage très beaux et si bien proportionnés qu'on n'y trouvait que reprendre, La Fontaine, Psyché, II, p. 163. Ne sachant que conjecturer du dessein de son mari, ni à quelle mort se résoudre, La Fontaine, ib. II, p. 112. Madame, je suis votre sœur, autrefois l'épouse de Cupidon, maintenant esclave, et ne sachant presque que devenir, La Fontaine, ib. p. 148. S'il faut agir, je ne sais que faire ; s'il faut parler, je ne sais que dire, Rousseau, Confess. I.

    Je n'ai que faire, je n'ai rien à faire. Qui n'a point de procès, au palais n'a que faire, Régnier, Sat. XVI.

    Je n'ai que faire de, je n'ai aucun besoin de. Il a été affermi dans son pouvoir par une force étrangère… qui n'a que faire des bonnes maximes pour produire les bons succès, Guez de Balzac, Socrate chrétien, VIII. Je n'ai que faire de votre aide, Molière, Méd. m. lui, 1, 2. Je n'ai que faire de vos dons, Molière, l'Av. IV, 5.

    Je n'ai que faire de vous dire… il n'est pas nécessaire de vous dire…

    Je n'ai que faire à cela, je n'ai aucun intérêt à cela.

    Je n'ai que faire là, je ne suis pas nécessaire là. Vous êtes un sot de venir vous fourrer où vous n'avez que faire, Molière, Méd. m. lui, I, 2.

    Je ne puis que faire à cela, je n'y puis, je n'y sais que faire, je ne peux qu'y faire, il ne dépend pas de moi d'y rien faire, d'y remédier.

  • 4Faire que fou, que sage, agir en fou, en sage ; en remplissant l'ellipse on a : faire [ce] que [ferait un] sage. Disant qu'il ferait que sage De garder le coin du feu, La Fontaine, Fabl. V, 2.
  • 5Que, construit avec un adjectif et le verbe être, fait une sorte de locution qui signifie étant (que est ici adjectif conjonctif ; voyez les exemples : la cruelle laquelle elle est ; innocent lequel il était). La cruelle qu'elle est [la mort] se bouche les oreilles, Et nous laisse crier, Malherbe, VI, 18. Innocent qu'il était, il [Jésus] voulut endurer, Corneille, Imit. II, 1. Comme un petit fou qu'il était, Scarron, Rom. com. I, 1. David, tout roi qu'il était, instruit d'un secret si important, envisageait comme une béatitude l'attachement à cette loi, Bourdaloue, Purif. de la Vierge, Myst. t. II, p. 165. Infortunés que vous êtes, vous avez abandonné la loi de votre Dieu, et c'est ce qui vous a perdus, Bourdaloue, ib. p. 168. Aveugle que j'étais ! je crus voir la nature…, Voltaire, Temple du Goût. Le libertin, mon Dieu, que c'était là ! Voltaire, Enf. prod. I, 1.

    Il s'emploie en ce sens avec un autre verbe que être, pourvu que ce verbe suppose le verbe être. Habile qu'il se jugeait, il accepta la mission. Innocent qu'il se savait, il avait la tête haute.

    Avec un participe il signifie après que. Arrivé qu'il fut, il se mit à la besogne. Établi qu'il eut son monde en un bon endroit, il songea à lui.

    Après un adjectif et avec le subjonctif, dans le sens de quelque… que. Ma crainte toutefois n'est pas trop dissipée ; Et doux que soit le mal, je crains d'être trompée, Molière, Sgan. 22. Aujourd'hui on dirait : si doux que soit, ou tout doux qu'est.

  • 6Que je crois, locution familière et elliptique pour : à ce que je crois. Vous n'êtes pas d'ici, que je crois, Molière, G. Dand. I, 2. [Il] Verra, que vous croyez, la promesse accomplie…, Molière, Sgan. 23. On aura, que je pense, Grande joie à me voir après dix jours d'absence, Molière, Éc. des f. I, 2. Et ce sera bientôt ? - Cremante : Ce sera, que je crois, Dans huit jours au plus tard, Quinault, Mère coq. V, 4.

    On dit de même : que je sache, à ce que je sache. Il n'est point de destin plus cruel, que je sache, Molière, Amph. III, 1.

  • 7Ce que c'est, quelle chose c'est. Il ne sait que par ouï dire Ce que c'est que la cour, la mer, et ton empire, Fortune…, La Fontaine, Fabl. VII, 12. Je ne sais point, seigneur, ce que c'est que d'aimer, Regnard, Démocr. III, 3.

    Familièrement. Ce que c'est que de nous ! voyez quelle est la condition des humains. Ce que c'est que de nous ! moi, cela me confond, Regnard, le Légat. V, 7.

    Archaïquement on supprimait ce. Je ne sais que c'est de flatter personne, Guez de Balzac, liv. I, lett. 3. Le roi ne sait que c'est d'honorer à demi, Corneille, Hor. IV, 2. Voilà, voilà que c'est de ne voir pas Jeannette, Et d'avoir en tout temps une langue indiscrète, Molière, l'Ét. IV, 8.

  • 8Ancienne construction de que, très usitée au XVIIe et au XVIIIe siècles, dans laquelle le membre où est que est rattaché par qui à un membre suivant et dépendant. Et que pourra faire un époux Que vous voulez qui soit jour et nuit avec vous ? La Fontaine, Fabl. VII, 2. Sur les éloges que l'envie Doit avouer qui vous sont dus, Vous ne voulez pas qu'on appuie, La Fontaine, ib. VIII, 4. Mais pour guérir le mal qu'il dit qui le possède…, Molière, Éc. des f. II, 6. Toutes choses qu'on voit bien qui sont…, Bossuet, Connaiss. IV, 2. On fit au comte d'Estrées une grande opération qu'on n'expliqua point, mais qu'on prétendit qui l'empêcherait d'avoir des enfants, Saint-Simon, 113, 238. Le silence de l'Écriture sur ces démons que l'on prétend qui président aux oracles…, Fontenelle, Oracles, I, 5. Si nous attendons… nous attendons ce que Jésus-Christ a prédit qui n'arriverait jamais, Massillon, Confér. Zèle contre les scandales. Voici cette épître qu'on prétend qui lui attira tant d'ennemis, Voltaire, Comment. sur l'ép. à Ariste (de Corneille).

    Cette construction a été employée, comme on voit, par les meilleurs écrivains ; elle est vive et très commode ; il serait fort utile de la remettre en honneur.

  • 9Que, interrogativement, quelle chose ? Qu'est-ce-ci, mes enfants ? écoutez-vous vos flammes ? Corneille, Hor. II, 7. Qu'est ceci ? dit-il à son monde ; Je trouve bien peu d'herbe en tous ces râteliers, La Fontaine, Fabl. IV, 21. De sorte que, ne voulant pas dire : je ne sais, il [Montaigne] dit : que sais - je ? dont il fait sa devise, Pascal, Entret. avec M. de Saci. Hé ! que puis-je au milieu de ce peuple abattu ? Racine, Athal. 1, I. Que vous semble, mes sœurs, de l'état où nous sommes ? Racine, Esth. II, 9. Que ne quitterait-on pas Pour plaire au maître du monde ? Quinault, Proserp. I, 11. Que sera-ce, s'il faut que je voie, que j'entende ce que je n'ose imaginer sans frémir ? Montesquieu, Lett. pers. 155. J'étais malheureux ; que suis-je donc aujourd'hui ? Rousseau, Hél. III, 19.

    Il se construit avec l'infinitif. Que devenir ? Mais quand nous serions rois, que donner à des dieux ? La Fontaine, Phil. et Bauc. Le héraut du printemps lui [au milan] demanda la vie : Aussi bien, que manger en qui n'a que le son ? La Fontaine, Fabl. IX, 18.

    Familièrement. Que diable ? quelle chose, avec diable pris d'une façon exclamative. Si vous n'êtes pas malade, que diable ne le dites-vous donc ? Molière, Méd. m. lui, II, 9. Que diable est-ce là ? les gens de ce pays-ci sont-ils insensés ? Molière, Pourc. I, 12.

    Que interrogatif employé par redondance avec le verbe savoir. Que sait-on ce qui arrivera ? Dict. de l'Acad. au mot SAVOIR. Que sait-on s'il le voudra ? ib. Que savons-nous ce que la Providence garde à M. de Vardes ? Sévigné, 17 avr. 1682.

  • 10Qu'est-ce ? quelle chose est-ce ? Qu'est-ce de moi ? faible est ma main…, Régnier, Stances relig. Qu'est-ce là ? lui dit-il - Rien. - Quoi ! rien ! - Peu de chose, La Fontaine, Fabl. I, 5.

    Qu'est-ce que… ? même sens. Qu'est-ce que tout cela, qu'un avertissement… ? La Fontaine, Fabl. VIII, 1. Dieux ! qu'est-ce que j'entends ? Racine, Phèdre, II, 5. Qu'est-ce qu'un livre de Jean-Jacques contre la comédie ? Jean-Jacques est-il devenu Père de l'Église ? Voltaire, Lett. Thiriot, 17 sept. 1758. Qu'est-ce que ce Confucius dont on parle tant, si on le compare à Sidney et à Montesquieu ? Raynal, Hist. phil. I, 21.

  • 11Que dans les phrases interrogatives, suivi de que, et signifiant quelle chose… si ce n'est… Et que puis-je espérer qu'un tourment éternel, Si je poursuis un crime, aimant le criminel ? Corneille, Cid, III, 3. Que fais-tu, Jupiter, que du haut de la nue Tu n'en perdes la race [des puces], afin de me venger ? La Fontaine, Fabl. VIII, 5. Mais quoi ! que feras-tu que de l'eau toute claire ? Molière, l'Ét. III, 1. Que peut-on donc avoir que de l'estime pour une religion qui connaît si bien les défauts de l'homme ? Pascal, Pens. XI, 11, édit. HAVET. Qu'ont été durant tout ce temps les Alboin, les Astolphe et les Didier, que des ennemis de Rome et de l'Église romaine ? Bossuet, Var. XIII, 34. Hélas ! et qu'ai-je fait que de trop vous aimer ? Racine, Bérén. V, 5. Que font les obstacles que piquer vos désirs ? Massillon, Carême, Prière 2. Qu'y entendons-nous que des peintures vagues et superficielles ? Massillon, Carême, Confess. Que restait-il à un guerrier qu'à demander raison du tort qu'on lui faisait ? Montesquieu, Espr. XXVIII, 14.
  • 12Que, pourquoi, à quoi ? Que parlez-vous ici d'Albe et de sa victoire ? Corneille, Hor. IV, 2. Que tardez-vous, seigneur, à la répudier ? Racine, Brit. II, 2.

    Que sert de se flatter, de dissimuler, etc. ? à quoi sert-il de se flatter, de dissimuler, etc. ? Du zèle de ma loi que sert de vous parer ? Racine, Athal. I, 1.

    En ce sens il se construit souvent avec ne. Les ruines d'une maison Se peuvent réparer : que n'est cet avantage Pour les ruines du visage ? La Fontaine, Fabl. VIII, 5. Si le choix est si beau, que ne le prenez-vous ? Molière, Femm. sav. III, 7.

    Que, en quoi ? Que peut vous offenser sa flamme ou sa retraite, Puisque vous n'aspirez qu'à vous en voir défaite ? Corneille, D. Sanche, III, 6. Que te peut nuire enfin une telle tempête ? Corneille, Imit. III, 46. Que lui était [à Dieu] nécessaire le témoignage d'aussi faibles créatures que nous le sommes ? Bourdaloue, Serm. pour le dim. dans l'oct. de l'Ascension, II.

  • 13Que exclamatif et dans le sens de combien (en cet emploi, que est équivalent au relatif latin quand il est exclamatif : O qui tuarum pennarum est nitor ! Phèdre.) Mon Dieu, mon créateur, Que ta magnificence étonne tout le monde ! Malherbe, I, 1. Que bien plus aisément j'en saurais triompher ! Corneille, Rodog. IV, 3. Que c'est un sort cruel d'aimer par politique ? Corneille, Sertor. I, 3. Qu'il est partout de traîtres ! Qu'il est peu de sujets fidèles à leurs maîtres ! Corneille, Nicom. V, 8. Ah ! mon fils, que la tendresse d'un père est aisément rappelée, et que les offenses d'un fils s'évanouissent vite au moindre mot de repentir ! Molière, Festin, V, 1. Que ses douleurs l'ont rendue savante dans la science de l'Évangile ! Bossuet, Reine d'Anglet. Que nous nous pardonnons aisément nos fautes, quand la fortune nous les pardonne ! Bossuet, ib. Ô mon pauvre tyran, que tu as perdu à être si riche, et que Diogène a gagné à ne posséder rien ! Fénelon, Dial. des morts anc. 27. Que les Français sont grands quand leur maître les guide ! Voltaire, Fontenoi. Qu'aimable et tendre doit être un mari qui peint sa femme sous des traits si charmants ! Rousseau, Lett. au comte de B. 26 janv. 1765. Que vous prenez de soins superflus ! Rousseau, Hél. III, 21. Que de fous et de méchants dans ce meilleur des mondes possibles ! D'Alembert, Lett. à Voltaire, 11 août 1766. Qu'aimable est la vertu que la grâce environne ! Chénier, l'Aveugle.
  • 14Que, avec un nom de temps, signifie durant lequel, laquelle, lesquels, lesquelles. Le jour suivant, que les vapeurs de Bacchus furent dissipées, Xanthus fut extrêmement surpris de ne plus trouver son anneau, La Fontaine, Vie d'Ésope. Il perdit la voix Du moment qu'il gagna ce qui cause nos peines [l'argent], La Fontaine, Fabl. VIII, 2. Et moi-même Au moment que je fais cette moralité…, La Fontaine, ib. VIII, 4. Du temps que les bêtes parlaient, La Fontaine, ib. IV, 1. Un certain loup, dans la saison Que les tièdes zéphyrs ont l'herbe rajeunie, Et que les animaux quittent tous la maison, La Fontaine, ib. V, 8. L'argent dans une bourse entre agréablement ; Mais, le terme venu que nous devons le rendre, C'est lors que les douleurs commencent à nous prendre, Molière, l'Ét. I, 6. Je ne m'ennuyais point cet hiver que je vous avais, Sévigné, 28 août 1675. Vous devez prendre désormais quelque intérêt à mes affaires, tout au moins pour un an, qui est le temps que vous avez affermé le Buron, Sévigné, à d'Hérigoyen, 20 juill. 1686. J'y serai [à Grignan] jusqu'au mois de septembre, que j'irai à Bourbilly…, Sévigné, à Bussy, 15 juill. 1673. Le temps n'est plus, ma chère fille, que ce m'était une grande consolation de recevoir une grande lettre de vous, Sévigné, 17 janv. 1680. Cette pauvre diablesse de Voisin, qui est à l'heure que je vous parle, brûlée à petit feu à la Grève, Sévigné, 21 février 1680. Où est le temps que vous ne mangiez qu'une tête de bécasse par jour, et que vous mouriez de peur d'être trop grasse ? Sévigné, 6 janv. 1672. C'est un infortuné… qui ne se croit formé que pour les jours rapides qu'il paraît sur la terre, Massillon, Carême, Prière 2. Au commencement que l'évêque avait seul entre les mains tout le revenu de son Église, en était-il plus fastueux ? Massillon, Confér. Us. des reven. ecclésiast. Une nuit que j'étais dans cet état tranquille où l'âme, plus à elle-même, semble être délivrée de la chaîne qui la tient assujettie, Montesquieu, Temple de Gnide. Au mois de juillet… que le pays [Montmorency] est plus agréable, Rousseau, Lett. à Malesherbes. Qu'elle soit toujours coiffée en cheveux jusqu'à l'âge de trente ans, qu'une pareille coiffure devient indécente et ridicule dans une femme, Rousseau, Lett. à Mme Roguin, 31 mars 1764. Dans ma jeunesse, que je croyais trouver dans le monde les mêmes gens que j'avais connus dans mes livres, Rousseau, 2e lett. à M. de Malesherbes. Je joue de la harpe ou du clavecin jusqu'à huit et demie, que nous soupons, Genlis, Ad. et Th. t. I, p. 31, dans POUGENS.

    Par assimilation on a fait maintenant que, à présent que, sorte de conjonctions composées qui signifient en ce temps où, et qui sont formées comme pendant que, alors que. L'Espagne pleurait seule ; maintenant que la France et l'Espagne mêlent leurs larmes et en versent des torrents, qui pourrait les arrêter ? Bossuet, Mar.-Thér.

  • 15De la même façon on a fait, avec toutes sortes de substantifs et que, des composés où que signifie selon lequel, laquelle, lesquels, lesquelles. De la façon enfin qu'avec toi j'ai vécu, Les vainqueurs sont jaloux du bonheur du vaincu, Corneille, Cinna, V, 1. On se défend d'abord, mais de l'air qu'on s'y prend On fait entendre assez que notre cœur se rend, Molière, Tart. IV, 5. Elle [Mme de la Fayette] vous remercie tendrement de la manière que vous comprenez sa douleur, Sévigné, 12 avr. 1680. Commencez par décider… si je vendrai mes grains à Noël prochain au prix qu'ils se trouveront, Sévigné, à Mme de Guitaut, 22 nov. 1692. Elle [Mme de Fontevrault] pensa mourir de douleur en le voyant [son père] en l'état qu'il est [frappé d'apoplexie], Sévigné, 12 juin 1675. Les écrits que vous m'avez fait l'honneur de m'envoyer n'envisagent point la matière du côté que je la regarde ici, Bossuet, Lettres, 237. Me voyait-il de l'œil qu'il me voit aujourd'hui ? Racine, Andr. II, 1. Comme un arbre plus d'une fois mort et déraciné, selon l'expression d'un apôtre, vous allez rester pour toujours sur le côté que vous tomberez, Massillon, Carême, Inconst. Je tournai la tête du côté que partait la voix, Lesage, Gil Blas, I, 1. Le public ne prendrait pas le mot de secte dans le sens que je l'avais écrit, Rousseau, Lett. à M. de Bastide, 16 juin 1760. Pardonnez si je ne puis voir les périls qui vous effrayent du même œil que les voit une mère, Rousseau, Lett. à Mme de Créqui, 13 oct. 1758.
  • 16En dépit qu'il en ait, voy. DÉPIT 1, n° 2, et la remarque 2.

REMARQUE

1. On dit : Faites ce que bon vous semblera, et non ce qui bon vous semblera. La construction est : Faites ce que bon vous semblera de faire.

2. Que signifiant combien est un adverbe de quantité qui ne peut modifier un mot précédé d'un des adverbes bien, très , fort, extrêmement. Ainsi il y aura faute dans les vers suivants : Hélas ! après les pleurs que j'ai versés pour vous, Que cet heureux instant me doit être bien doux ! Crébillon, dans GIRAULT-DUVIVIER.

HISTORIQUE

IXe s. Si Lodwighs sagrament quae son fradre Karle jurat, conservat…, Serment. In o quid il mi altresi fazet, ib.

Xe s. E de cel peril que super els metreiet, Frag. de Valenc. p. 468. Cel edre [ce lierre] sost que [sous lequel] cil sedebat, ib. p. 468.

XIe s. Ce dist Rolans : compainz, que faites-vous ? Ch. de Rol. CIV. Qu'est devenus li gascons Engelers, ib. CLXXIII. Respont Rolanz : jà fereie que folz, ib. LXXXI. Deus, dit li quens [le comte], or ne sai je que face, ib. CXLVI. Eh ! reis amis, que [pourquoi] vous ici nen estes ? ib. CXXVI. An la sameine [semaine] qued il s'en dut aler, St-Alexis, LIX.

XIIe s. Mult fait l'amours que vilaine Qui comence por faillir, Couci, IV. Quant [je] voi venir le bel tanz et la flour, Que l'erbe vers resplent aval la prée, ib. XVII. Sire, ce dist Sebile, savez que [ce dont] je vous prie ? Sax. VII.

XIIIe s. Tout droit en ce termine que je ici vous di, Berte, I. Diex ! que ne savent or qu'ele est fame Pepin ? ib. LV. Moi ne chaut qu'on en fasse, ib. XVI. Je ne sai que penser, ib. XLIII. Pour le bien que il voient que Diex leur a rendu, ib. CXXXVII. Que m'est-il avenu ? qu'ont ces gens empensé ? ib. X. En temps doux et joli Que erbelete poignent et pré sont raverdi, ib. I. Entour la Saint Jehan que la rose est fleurie, ib. II. L'eure soit beneoite, que je onques vous vi, ib. LIX.

XIVe s. Il n'y a rien que metre ne que oster [aux œuvres bien faites], Oresme, Eth. 44. Qu'est-ce que de fortune quant à tourner se prent ; Cellui n'est mie sages qui s'y fie forment, Guesclin. 9780. Et que n'y aliez vous ? dit li prince briefment, ib. 13544.

XVe s. Pour voir qu'on [ce qu'on] voudroit faire du roi, qui en prison estoit [Edouard II], Froissart, I, I, 25. Et lui recorderent que une poignée de gens que ils estoient, avoient deconfit le roi d'Escosse et toute sa puissance, Froissart, 1, I, 307. Ils trouverent les nefs et les vaisseaux tous prests qu'on leur avoit amenés d'Angleterre, Froissart, I, I, 29. Avoit mis en deliberation s'il feroit mourir ses hostages, ou qu'il en feroit, Commines, II, 1. Voicy que je feroie, Commines, III, 8. Sans nul besoin qu'il en soit, ib. I, 5. Il me ferit une fois ou deux ; dont il fist que foul, car j'en fis pis que d'avant, Les 15 joyes de mariage, p. 24.

XVIe s. Dont dist Gargantua : que diantre ! vous estes maulvais chevaulcheurs, Rabelais, Garg. I, 12. Un jour de vendredy, que tout le monde s'estoit mis en devotion, Rabelais, Pant. II, 2. Beu que il eust, et rendu le hanap, Rabelais, ib. IV, 51. Esmerveillez vous dadvantaige de la queue des beliers de Scythie, que pesoyt plus de 30 livres, Rabelais, ib. I, 16. Là son precepteur repetoyt ce qu'avoyt esté leu, Rabelais, ib. I, 23. Tout ce que leur estoyt servy à table, Rabelais, ib. I, 23. Que feit-il ? - Que il feit, mes bonnes gens ? escoutez, Rabelais, ib. II, 4. Que dyable de languaige est ceci ? Rabelais, ib. II, 6. Mais qu'est-ce que je mets si grand peine à refuter ceste rage brutale ? Calvin, Instit. 470. Qu'est-ce à dire que Dieu ne voit point les pechez, sinon qu'il ne les punit point ? Calvin, ib. 511. Un grand vouloir de ne me souvenir D'homme que vive, Marot, I, 381. Qu'estoy-je avant qu'entrer en ce passage ?… Qu'est-ce qu'aymer et s'en plaindre souvent ? …Que suis-je donq'lorsque mon cœur en fend ?…, Du Bellay, J. III, 55, recto. Qu'ay je fait, que trop aymer ? Du Bellay, J. IV, 34, verso. À ce dernier roole, il n'y a plus que feindre, Montaigne, I, 67. Je ne suis pas bon naturaliste, qu'ils disent, Montaigne, I, 61. Elle les a estably ez regions que bon luy a semblé, Montaigne, I, 109. Qu'est-il plus farouche que de veoir… [qu'y a-t-il de plus… que de…] ? Montaigne, I, 118. Les voulez-vous [les philosophes] rendre juges des droicts d'un procez, des actions d'un homme ? Ils en sont bien prests : ils cherchent encores s'il y a vie ; que c'est qu'agir et souffrir, Montaigne, I, 140. À treize ans que je sorti du college, j'avois achevé mon cours…, Montaigne, I, 196. Sçavoir commander aux passions qu'il faut, La Boétie, 163. Elle monta mille fois les degrés D'une grand' tour qui descouvroit la plaine, Et les forests et chemins qu'elle pense Qu'on peut venir à Montaulban de France, La Boétie, 486. Qu'est-ce qu'on pense qui donna à si petit nombre de gens… le cœur de…, La Boétie, 17. Qu'est-ce qui engraisse plutost un cheval ? l'œil de son maistre, La Boétie, 214. Je vous laisse à penser que, en lieu et avecques la compaignie qui y est, peult faire ou dire vostre cousine, Marguerite de Navarre, Lett. 4. Ils ne sçavent que dire, Marguerite de Navarre, ib. 35. Que te semble de ce qu'un tel a fait ? Amyot, Lyc. 36. L'année que Phaedon fut prevost à Athenes, Amyot, Thésée, 44. Du costé que passe la riviere d'Anapus, Amyot, Timol. 31. Il reprit le chemin qu'il estoit venu, D'Aubigné, Hist. II, 475. Les princes penchent aisement du costé que leur inclination naturelle les conduit, D'Aubigné, ib. II, 250. L'encre qu'on escrit [à écrire], Paré, X, 8.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1. QUE. - REM. Ajoutez :
3Arrivé qu'il fut.., cette tournure est condamnée par Vaugelas, bien, dit-il, qu'une infinité de gens s'en servent, et en parlant et en écrivant. Malgré l'arrêt de Vaugelas, cette tournure est bonne et mérite d'être conservée.
4Que, dans l'usage ancien, pouvait être rapporté, non, comme à présent où cela est nécessaire, au verbe de la proposition subordonnée, mais au verbe, quand il s'en trouvait, d'une incise précédant le verbe de la proposition subordonnée. Je fais des vers qu'encor qu'Apollon les avoue, Dedans la cour peut-être on leur fera la moue, Régnier, Sat. X. Au mot QUI, n° 13, comparez un emploi tout semblable.
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Étymologie de « que »

Lat. quod, neutre de qui (voy. QUI). On peut penser que que représente quem, quam, quae aussi bien que quod ; mais la forme qued nous ramène à quod. Dans quelques cas qui n'ont pas prévalu, on a dit que pour qui, comme l'italien che.

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(Conjonction 1) Du latin quia, qui exprime la cause.
(Conjonction 2) Du latin quam.
(Pronom relatif) Du latin qui, quae, quod ; dans l’ancien français, que devint la forme atone du cas régime, sans distinction de genre ni de nombre.
(Pronom interrogatif) Du latin quid.
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Phonétique du mot « que »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
que

Fréquence d'apparition du mot « que » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « que »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « que »

  • On ne regrette que ce que l'on aime.
    Paul Toupin — Le Deuil d'une princesse
  • Fais ce que veux, deviens ce que peux.
    Yvon Deveault
  • Que d’époux ne sont séparés que par le mariage !
    Alfred Capus
  • Signe ce que tu éclaires, non ce que tu assombris.
    René Char
  • Ne fais que ce que te dicte ton coeur.
    Lady Diana
  • À l'été 2000, le Stade rennais sortait le chéquier et dépensait 140 millions de francs (21,3 millions d'euros) pour s'offrir une pépite brésilienne de 21 ans : Severino Lucas. Un gros coup qui s'est rapidement transformé en bide, au point de devenir un flop symbolique du foot français. Vingt ans plus tard, Lucas a toujours sa place dans le livre des records du Stade rennais, dont il reste officiellement la recrue la plus chère de l'histoire du club breton. Du Brésil, il accepte de revenir sur cette drôle d'aventure rennaise, dont il garde malgré tout quelques bons souvenirs.
    SOFOOT.com — Severino Lucas : « Je rêve que mes fils jouent au Stade rennais » / France / Rennes / SOFOOT.com
  • Que fait le participe passé entre deux que ?
    M. Sarradon — Exercices gradués de grammaire et d'orthographe
  • Il faut que tout change pour que tout demeure.
    Lampesuda
  • On ne vole que ce que l'on désire.
    Boris Vian
  • Boutique le Point
    Le Point — Maladie de Lyme : un vaccin d'ici à 2025 ? - Le Point
Voir toutes les citations du mot « que » →

Traductions du mot « que »

Langue Traduction
Anglais than
Espagnol que
Italien di
Allemand als
Chinois
Arabe ان
Portugais do que
Russe чем
Japonais より
Basque baino
Corse chè
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Synonymes de « que »

Source : synonymes de que sur lebonsynonyme.fr

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