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Pays

Définitions de « pays »

Trésor de la Langue Française informatisé

PAYS1, subst. masc.

Division territoriale habitée par une collectivité, et constituant une entité géographique et humaine.
A. −
1. [Dans une accept. large] Nation, État. Les pays de l'Europe, du monde; la capitale, les frontières d'un pays. Angleterre! pays charmant, vers lequel voguent les navires; frais rivages, parcs ombragés, où vont les jeunes miss promener leur mélancolie! (Toepffer,Nouv. genev.,1839, p.111).Les grands hommes d'un pays, son histoire, ses moeurs, c'est presque un langage commun aux peuples (Giraudoux,Siegfried,1928, iv, 5, p.180):
1. La passion mystérieuse avec laquelle j'avais pensé autrefois à l'Autriche parce que c'était le pays d'où venait Albertine (son oncle y avait été conseiller d'ambassade), que sa singularité géographique, la race qui l'habitait, ses monuments, ses paysages, je pouvais les considérer (ainsi que dans un atlas, dans un recueil de vues) dans le sourire, dans les manières d'Albertine... Proust,Sodome,1922, p.1119.
Région. (Canada). Les vieux pays. L'Europe. Ses vieux pays, c'était l'Angleterre, la mangeuse d'homme et d'argent (...) c'était la France (M. Trudel,Vézine,1946, p.237 ds Richesses Québec 1982, p.1752).
SYNT. Les grands et les petits pays; un pays proche, éloigné, lointain; les pays étrangers; les pays méridionaux, septentrionaux, occidentaux, orientaux; les pays germaniques, latins, scandinaves; le beau pays de France; les habitants, les naturels d'un pays; la langue d'un pays; entrer dans un pays; découvrir, visiter, quitter un pays.
2. [Dans une accept. restreinte]
a) Partie plus ou moins étendue d'une nation: province, région, canton. Habitudes, traditions d'un pays; vin* de pays. Le ciel (...) sourit toujours en Touraine, où les automnes sont magnifiques. Dans ce pays hospitalier, les vendangeurs sont nourris au logis (Balzac,Lys,1836, p.124).Je voudrais que vous puissiez voir l'émotion éphémère, j'en suis convaincu, obtenue par ces mesures dans un pays comme la Lorraine (Barrès,Cahiers, t.5, 1907, p.102):
2. [Il y avait dans la France agricole du xixesiècle une] immense diversité des poids et mesures basés tantôt sur la journée de travail (le journal de terre de nos trisaïeuls), tantôt sur l'animal de trait (la bovée) ou sur la quantité de semences employées (la seterée) (...). Les usagers de ces mesures archaïques se claquemuraient existentiellement en petites unités régionales, les pays [it. ds le texte]. Ceux-ci sont assimilés aujourd'hui encore aux pagus, ou pagi de l'ancienne Gaule. Le Matin,8 juill. 1983, p.25, col. 1.
Pays + subst. ou adj.
Pays de + nom propre (formant des noms géographiques)Pays d'Auge, de Caux, de Galles. Le pauvre et peu industrieux Valaisan est resté catholique, le pays de Vaud protestant (Michelet,Journal,1830, p.75).
Pays + adj. tiré d'un nom propre désignant une ville, une province, etc.Pays basque, breton, niçois. Une fête de village dans le pays messin. Le dimanche, on danse; le lundi matin, il y a une messe pour les parents (Barrès,Cahiers, t.5, 1906, p.279).De grands monuments sur lesquels plane un souffle d'art singularisent aujourd'hui les contrées du limon et de la brique. Le pays toulousain s'oppose aux pays bordelais (Vidal de La Bl.,Princ. géogr. hum.,1921, p.162).
Loc. et expr.
Battre, courir le pays. Parcourir toute la région (dans un but d'exploration, de recherche). Les garnisons de Lens, d'Hesdin et des autres forteresses couraient le pays, arrêtaient les convois, gênaient l'armée du roi (Barante,Hist. ducs Bourg., t.4, 1821-24, p.9).On battait tout le pays pour le rendre intenable aux réguliers chinois (Mille,Barnavaux,1908, p.156):
3. En quittant le coron (...), Catherine était allée à Montsou par le pavé. Depuis l'âge de dix ans, depuis qu'elle gagnait sa vie à la fosse, elle courait ainsi le pays toute seule, dans la complète liberté des familles de houilleurs... Zola,Germinal,1885, p.1242.
(Agir, se conduire) comme en pays conquis. Nous sommes dans la salle de travail, les étrangers ne peuvent pas s'y installer comme en pays conquis... Vous y viendrez à votre tour... (Curel,Nouv. idole,1899, ii, 1, p.191).
(Être, se trouver) en pays inconnu. Être environné de personnes, de choses que l'on ne connaît pas. Anton. en pays de connaissance.Le concert commença, je ne connaissais pas ce qu'on jouait, je me trouvais en pays inconnu (Proust,Prisonn.,1922, p.249).En pays de connaissance. Anton. en pays inconnu.Je cessai bientôt de m'interroger parce que j'avais l'impression d'être en pays de connaissance (Sartre,Nausée,1938, p.166).
Gagner (du) pays (vieilli). Faire du chemin, gagner du terrain. Prompt comme l'éclair [le lièvre], gagne pays, et puis s'arrête (Florian, Fables,1792, p.110).
Tirer pays (vieilli, pop.). S'enfuir. (Dict.xixeet xxes.; J.-F. Rolland, Dict. mauv. lang., 1813, p.101).
Voir du pays. Effectuer de longs et lointains déplacements. Tu vas me suivre. −Quitter ma maison, je lui dis. −Cognac, il me dit, tu es jeune. Tu verras du pays et de la rigolade (Salacrou,Terre ronde,1938, ii, 1, p.173):
4. ... nous allons loin cette fois (...). On dit que le Petit Tondu, il nous emmène chez le Grand Mogol, quoi! au fin fond des Asies, en passant par chez les Cosaques et le Grand Turc... Ah! la la, on va en voir du pays; on va en manger des drôles de soupes... Adam,Enf. Aust.,1902, p.51.
Au fig. Faire voir du pays à qqn. Lui donner beaucoup de travail, lui faire éprouver de nombreux tourments. Synon. en faire voir (de toutes les couleurs*).Et pour faire voir du pays à monsieur Fiodor, laissez-moi rire! Un homme de cette espèce-là, caressant et rusé comme une femme, aussi féroce qu'un petit chat! (Bernanos,Joie,1928, p.617).
À vue de pays. Sans connaître précisément la route à suivre, en se repérant sur le seul aspect des lieux. (Dict.xixeet xxes.).
Au fig., vieilli. Au jugé, d'une manière approximative. Synon. à vue de nez*.[Gobseck] pesa les pierres en évaluant à vue de pays (et Dieu sait comme!) le poids des montures (Balzac,Gobseck,1830, p.413).Quant à l'Académie (...) j'estimais à vue de pays que, du train dont nous y allons et pour peu que nous mourions encore, il [M. de Pontmartin] avait chance d'y arriver à son tour (Sainte-Beuve,Nouv. lundis, t.3, 1862, p.46).
b) Petite ville, village. Synon. fam. bled, coin, patelin.Le curé, l'instituteur du pays; habiter un petit pays, un pays perdu; rentrer au pays; c'est la fête au pays. Bien des filles du pays eussent voulu épouser ce bel homme; mais lui (...) les avait toutes évincées (Châteaubriant,Lourdines,1911, p.57).On pénétrait dans le petit pays où il y avait quelques maisons, une usine de limonade et une gare de marchandise (Triolet,Prem. accroc,1945, p.226):
5. ... elles passent, l'une après l'autre, la revue de tous les gens du pays qui auraient pu faire le coup... Il se trouve qu'il y en a des tas... Tous ceux-là qu'elles détestent, tous ceux-là contre qui elles ont une jalousie, une rancune, un dépit... Mirbeau,Journal femme ch.,1900, p.165.
c) P. anal. Grande ville, quartier d'une grande ville. Le pays Mouffetard a ses coutumes propres et des lois qui n'ont plus ni sens ni vigueur au delà du fleuve Monge (Duhamel,Confess. min.,1920, p.55).Curieux pays que Paris, où tous les possibles sont concevables, toutes les expériences permises (Schaeffer,Rech. mus. concr.,1952, p.74).
Pays latin (vieilli). Quartier latin. Un étudiant passait-il par là pour gagner le pays latin, sa vive imagination lui faisait comparer cette vie obscure et végétative à celle du lierre qui tapisse de froides murailles (Balzac,Double fam.,1830, p.227).Ici [dans la rue Guy-de-la-Brosse] ne demeurent que de petits rentiers (...) des étudiants désireux d'étudier, de tout jeunes gens de lettres qui redoutent autour de leur solitude les tentations du pays latin (Bourget,Disciple,1889, p.12).
3. En partic. [Le pays est envisagé d'après différents points de vue, dans une accept. large ou restreinte]
a) [Du point de vue de sa géogr. phys.] Pays tempéré, de montagnes. Nous étions alors en novembre: le temps des pluies froides dans ces pays de plaine, où les vents de mer amènent sans cesse le brouillard (Erckm.-Chatr.,Hist. paysan, t.2, 1870, p.239).Les gens du Nord appellent la Provence un pays chaud... (Colette,Naiss. jour,1928, p.31):
6. ...le contraste s'accuse entre le haut-pays dont le sol friable couvert d'une couche de terre noire a permis de pratiquer des clairières agricoles, et le bas-pays où la forêt de pins et de sapins, encore dominante, n'est interrompue que par des lacs et des marécages. Vidal de La Bl.,Princ. géogr. hum.,1921, p.189.
Le plat(-)pays. V. plat1I A 1 b.
La Flandre. Avec la mer du Nord pour dernier terrain vague Et des vagues de dunes pour arrêter les vagues Et de vagues rochers que les marées dépassent Et qui ont à jamais le coeur à marée basse Avec infiniment de brumes à venir Avec le vent d'est écoutez-le tenir Le plat pays qui est le mien (J. Brel, Le Plat paysds J. Clouzet, Jacques Brel, Choix de textes, 1964, p.121).
SYNT. Pays accidenté, sauvage; pays pluvieux, du soleil; pays de forêts, de lacs; pays(-)bas, pays(-)haut; une étendue de pays.
Arg. (Les) pays-bas. Postérieur, sexe de la femme. (Ds France 1907, Cellard-Rey 1980).
P. méton. (Un, une) pays(-)chaud. Personne originaire d'un pays chaud. Il n'y entend rien [à la jalousie], votre Shakespeare. Son Othello n'est pas un jaloux, c'est un nègre, un pays chaud, passionné, brutal, rien de plus (A. Daudet, Pte paroisse,1895, p.89).J'ai voulu, la première année de notre mariage, secouer ma silencieuse oisiveté de petite pays-chaud (Colette,Cl. s'en va,1903, pp.8-9).
b) [Du point de vue de son écon.] Pays fertile, industriel, en voie de développement; ressources d'un pays. On peut tourmenter impunément les hommes, mais on ne peut jamais les contraindre à ce genre de travail qui fait la richesse des pays agricoles (Baudry des Loz.,Voy. Louisiane,1802, p.336).L'industrie suisse est à la veille de grandes souffrances, les impôts vont aller toujours augmentant, le pays quoi qu'on en ait dit quelquefois est pauvre (Gobineau,Corresp. [avec Tocqueville], 1850, p.155):
7. ... l'inégalité dynamique entre les économies nationales (...) se prolonge par les formes nouvelles de compétition internationale dont font usage les grandes économies modernes. Celles-ci implantent dans des pays développés ou dans des pays à croissance retardée, des «blocs d'investissement» et des ensembles industriels. Perroux,Écon. XXes.,1964, p.189.
SYNT. Pays avancé, développé, florissant, neuf, prospère, riche; pays sous-développé, en voie de développement; pays de chasse, de pêche, de culture, d'élevage; pays exportateur, importateur; mise en valeur, modernisation du pays; balance commerciale, revenu national d'un pays.
Du pays.[En parlant d'une production, alimentaire notamment] Qui provient de la région dont il est question. Jambon, vin du pays; produits du pays. Les mousselines, les draps fins, ont dégoûté des toiles et des étoffes du pays (Dusaulx,Voy. Barège, t.1, 1796, p.84).Le pâté d'Armagnac, massif, fait à la graisse d'oie, garni de prunes du pays, croustillant et onctueux à la fois (Pesquidoux,Livre raison,1928, p.163).
(C'est le) pays de (qqc.). Le pays, la région est réputé(e) pour telle ou telle production.
[Le compl. désigne une chose concr.] Le Bordelais est le pays des grands vins; la Hollande est le pays des tulipes:
8. Lorsque les hommes commencèrent à entrer en rapport par delà la barrière montagneuse qui borde la Méditerranée, le Sud représenta pour l'ultramontain le pays des fruits, de même que, par une généralisation semblable, l'Europe centrale apparut au méditerranéen comme le pays des forêts. Vidal de La Bl.,Princ. géogr. hum.,1921, p.81.
[Le compl. désigne une réalité abstr.] Angoulême, ce pays de plaisir, de bon temps et de rien-faire... (Michelet,Journal,1835, p.175).Daudet revenait sur cette idée que le Midi n'est pas le pays de la couleur des images (Goncourt,Journal,1894, p.544).
P. métaph. La poésie populaire est le pays de la licence, de toutes les licences; on pourrait même dire que la licence est la seule vraie règle de sa versification (Gourmont,Esthét. lang. fr.,1899, p.265).
c) [D'un point de vue admin., jur., pol.] Pays démocratique, multinational; la juridiction d'un pays; gouverner un pays. Si la loi du pays prescrit la peine de mort pour tout vol domestique, tout domestique sait que s'il vole son maître, il s'expose à la mort (Maistre,Soirées St-Pétersb.,t.1, 1821, p.248).Le mot d'ordre de l'URSS est de rejoindre et de dépasser les pays capitalistes les plus avancés (Nizan,Conspir.,1938, p.66):
9. Les dispositions de la présente loi peuvent être invoquées par l'auteur de toute oeuvre littéraire, scientifique ou artistique publiée pour la première fois sur le territoire français ou sur le territoire des colonies françaises, des pays de protectorat ou placés sous mandat français. Civilis. écr.,1939, p.16-12.
SYNT. Pays communiste, républicain, socialiste, totalitaire; administrer, diriger, gérer (les affaires d')un pays; législation, parlement d'un pays; monnaie du pays, structures du pays.
HISTOIRE
Pays de concordat. Province où les bénéfices étaient soumis au concordat passé entre François 1eret Léon X. (Dict.xixes.). Anton. pays d'obédience*.
Pays coutumier, de coutume. Province régie par des coutumes locales. (Dict.xixeet xxes.).
Pays de droit écrit. Province où l'on suivait le droit romain. V. emphythéose ex.
Pays d'élection(s)*.
Pays d'états. Province où les impôts étaient décidés par l'assemblée des états provinciaux. La France (...) resta (...) divisée en «pays d'élections», où l'intendant, maître de sa généralité, ne redoutait que le parlement, et en «pays d'états», où il lui fallait compter avec les états provinciaux qui accrurent leur autonomie (Lefebvre,Révol. fr.,1963, p.107).
Pays de franc-salé*. Le bassin de Laval, cette marche du Maine, fut, avant la Révolution, la limite entre les pays où se percevait la gabelle, et la Bretagne, pays de franc-salé, qui en était exempte (Vidal de La Bl.,Tabl. géogr. Fr.,1908, p.324).
Pays de grande, de petite gabelle*. Cette ancienne marche frontière entre pays de grande et de petite gabelle, abrutie durant des siècles par une surveillance et une répression féroces (H. Bazin, Vipère,1948, p.16).
Pays d'imposition. Province qui n'avait ni élections ni états, et où les intendants administraient les impôts. (Ds Lar. 20e-Lar. Lang. fr.).
Pays de nantissement.*
Pays d'obédience*. Anton. pays de concordat (v. supra).
Pays de sapience. La Normandie (en raison de la sagesse de sa coutume). (Dict.xixeet xxes.).
d) [D'un point de vue intellectuel, relig.] Pays civilisé, policé; pays catholique, islamique, protestant; littérature, vie culturelle du pays. Sur les moeurs de l'Angleterre pays qu'il aime, comme pays de liberté, il nous cite ces curieuses anecdotes (Goncourt,Journal,1865, p.130).Je viens d'un pays barbare. Nous ne sommes chrétiens que depuis le douzième siècle (Audiberti,Mal court,1947, ii, p.171):
10. ... quand leurs conquêtes [des Romains] se furent étendues en Afrique, en Sicile et en Grèce; quand ils se furent régalés aux dépens des vaincus dans des pays où la civilisation était plus avancée, ils emportèrent à Rome des préparations qui les avaient charmés chez les étrangers, et tout porte à croire qu'elles y furent bien reçues. Brillat-Sav.,Physiol. goût,1825, p.264.
B. − Nation, région à laquelle on appartient par la naissance (la relation d'appartenance étant généralement indiquée par le possessif).
1. [Dans une accept. large] Nation d'origine, patrie. Pays d'origine; pays natal; la gloire, le salut du pays; défendre, sauver son pays; être au service de son pays; mourir pour son pays. Je ne crains rien tant, s'il s'agit de patriotisme, que de paraître enfler la voix; nos meilleurs motifs d'aimer et de servir notre pays sont d'ordre pratique, presque tangibles et, si je puis dire, personnels (Barrès,Cahiers, t.5, 1906, p.267).Rappelez-vous la formule finale du serment olympique: «... pour l'honneur de notre pays et la gloire du sport» (J.-R. Bloch, Destin du S.,1931, p.128):
11. Comment! Cette Angleterre que vous chérissez tant, votre pays, celui de vos braves aïeux, cette terre que vous appelez depuis que vous êtes au monde!... Vous ne voulez plus rien faire pour elle?... Être rien pour elle?... Vous l'oubliez? Gobineau,Pléiades,1874, p.46.
2. [Dans une accept. restreinte] Province natale, village natal. Rentrer, retourner au pays, dans son pays. Nous avions déjeuné avec un jeune homme qui retourne dans l'île de Ré, son pays, après avoir fait un tour en Allemagne (Michelet,Journal,1835, p.171).C'est un Breton qui revient au pays natal Après avoir fait plusieurs mauvais coups (Prévert,Paroles,1946, p.79).
3. Loc. et expr.
(Avoir) le mal*, la maladie* du pays. Un homme dans un bouge assommant à coups de rouge le mal du pays (Prévert,Paroles,1946p.283).
(C'est un) enfant du pays. (C'est une) personne originaire du village, de la localité. Mais mon village qui n'avait pas vu naître Voussard (...) ne voulut pas l'adopter. Même à l'ancienneté, Voussard ne gagna point son grade d'«enfant du pays» (Colette,Mais. Cl.,1922, p.170).
(Entendre) causer, parler du pays (fig.). (Se faire) prendre à partie de façon brutale. Il y a eu beau tapage une minute passée (...). Ils se sont causé du pays un bon coup (Aymé,Jument,1933, p.288).
Être bien de son pays (fig., vieilli). Ne rien connaître du monde, être simple, naïf. De quel pays venez-vous? D'où sortez-vous? Vous me paraissez bien de votre pays avec les majorités que vous vous promettez (Mérimée,Lettres Panizzi, t.1, 1861, p.173).
Nul n'est prophète* en son pays.
C. − P. méton.
1. Ensemble des habitants, des citoyens d'une nation. Il faut dire la vérité au pays; le pays se prononce par un vote; le pays fête son héros. Aujourd'hui, vous avez pour vous l'opinion publique, les magistrats, le pays tout entier qu'on insulte, qu'on outrage, qu'on veut tyranniser (Scribe,Bertrand,1833, iv, 6, p.203).Le gouvernement va demander au pays un effort énorme (Romains,Hommes bonne vol.,1938, p.160):
12. Malgré l'abomination des temps, un garçon de plus n'était pas de trop, chez le père Fouchard, dont les affaires prospéraient. Tandis que râlait le pays entier, saigné aux quatre membres, il avait trouvé le moyen d'élargir (...) son commerce de boucher ambulant... Zola,Débâcle,1892, p.504.
Pays légal
HIST. [Sous la monarchie censitaire] ,,Ensemble des citoyens qui remplissent les conditions du cens électoral, par opposition à suffrage universel`` (Littré). V. aussi légal ex. 3.
,,L'ensemble des citoyens disposant du droit de vote et les gouvernants choisis par ces citoyens`` (Debb.-Daudet Pol. 1981). Il y a une contradiction espagnole. Face au «pays légal», bloqué, il y a un «pays réel», fluide (L'Express, 12 avr. 1976, p.82, col. 2).
Pays réel. ,,L'ensemble des individus d'une nation qui, soit ne peuvent exprimer leurs choix politiques (absence de droit de vote), soit sont en désaccord avec les gouvernants en place`` (Debb.-Daudet Pol. 1981). Le gouvernement de Vichy, à la fin de la guerre, correspondait au pays légal mais non au pays réel (Debb.-Daudet Pol. 1981).Il est parfois question de «pays réel» derrière le «pays officiel»; on pourrait parler de même du XIXesiècle (Huyghe,Dialog. avec visible,1955, p.155).
2. Tout le pays. Population d'un village, d'une région. Ainsi raisonnait ce bon curé, regretté de tout le pays (Courier,Pamphlets pol., Pétition pour vill., 1822, p.144).L'exode était attendu. Tout le pays se mettait aux portes (Pesquidoux,Livre raison,1928, p.176).
D. − P. anal. ou au fig. Domaine fabuleux, irréel, généralement peuplé d'êtres et de choses imaginaires, rêvés. Le pays des songes; Alice au pays des merveilles (de Lewis Carroll). La musique (...) les soulevait ensemble au pays du rêve, sur les ailes sans cesse élargies du rythme (Zola,Joie de vivre,1884, p.888):
13. ... peu à peu, l'Espagne de ma carte devenait, sous la lampe, un pays de contes de fées. Je balisais ce fermier, ces trente moutons, ce ruisseau. Je portais, à sa place exacte, cette bergère qu'avaient négligée les géographes. Saint-Exup.,Terre hommes,1939, p.145.
Pays bleu. Pays du rêve, de l'idéal (radieux comme le ciel bleu). Ô Lune (...) Du haut des pays bleus où, radieux sérail, Les astres vont te suivre en pimpant attirail (...) Vois-tu les amoureux (...)? (Baudel.,Fl. du Mal,1857, p.146).Voilà des petits garçons qui sont des conquérants et des petites filles qui sont des héroïnes (...). Ils sont venus (...) de la Grèce et de Rome, et des pays bleus, pour danser ensemble (A. France,Nos enfants,1887, p.10).
Pays de Cocagne*.
Pays du Tendre*. [P. allus. au pays allégorique imaginé par Mllede Scudéry au xviies.] De grands bourgeois (...) eux aussi rêvent à Mllede Scudéry, au pays du Tendre, dont ce quartier était autrefois la capitale, à l'élite des précieuses (Fargue,Piéton Paris,1939, p.114).
Prononc. et Orth.: [pei], [pεi]. Littré, DG, Passy 1914, Barbeau-Rodhe 1930, Warn. 1968 ont un [j] de transition, le plus souvent en combinaison avec [ε]. Ainsi Barbeau-Rodhe 1930: [pei], [pεji] et Warn. 1968: [pεi], [pεji] dans un ,,parler de ton soutenu``, [pei] dans le ,,parler courant``. Passy 1914, en revanche, [pei], [peji]. Martinon Comment prononce 1913, p.190, croit à la plus grande fréq. des prononc. sans [j]. Ac. 1694: pais, pays; dep.1718: pays. Étymol. et Hist.1. 2emoitié xes. «région géographique habitée, plus ou moins nettement délimitée» (St Léger, éd. J. Linskill, 211: Tuit li omne de ciel païs, trestuit apresdrent a venir; Et sancz Lethgiers lis predïat); ca 1050 (St Alexis, éd. Chr. Storey, 182: Est vus l'esample par trestut le païs, Que cele imagine parlat pur Alexis); ca 1100 (Roland, éd. J. Bédier, 1859: Si lungement tuz tens m'avez servit, A oes Carlon si granz païs cunquis; 2333: Cunquis l'en [Charlemagne, par Durendal] ai païs e teres tantes...); début xiies. (Benedeit, St Brendan, éd. E. G. R. Waters, 1821: Ja nuvele vait par païs [per partes terrarum] Que venuz est de paräis); 2. «division territoriale considérée des points de vue géographique et humain» a) ca 1100 désigne l'Espagne (Roland, 17, 134, 266); id. la Barbarie (ibid., 1236); id. la France (ibid., 1861); ca 1200 (Jean Bodel, Saisnes, éd. F. Menzel et E. Stengel, 352: Alemaingne ont destruite le grant païs plenier); fin xives. li païs d'Engleterre (Jean Froissart, Chron., II, § 5, éd. S. Luce, t.9, p.6); av. 1514 pais de Savoie (J. Lemaire de Belges, Exploration de pitié ds OEuvres, éd. J. Stecher, t.4, p.173); b) 1315 selonc la coustume du pay (Cart. du Mont-S.-Mart., B.N. lat. 5478, fol. 132 rods Gdf. Compl.); 1532 pays d'Anjou (Bourdigné, Faifeu, 22 ds Hug.); 3. contrée, territoire auquel on appartient, dont on est originaire ou dont on a la charge; patrie «ca 1100 (Roland, 3207: Jo [l'émir Baligant] vos durrai un pan de mun païs); début xiies. (Benedeit, op. cit., 777: Puis revendras en tun païs [ad patriam tuam redibis], Ileoc muras ù tu nasquis); ca 1170 (Marie de France, Lais, éd. J. Rychner, Guigemar, 70: ...S'en vait li ber en sun païs Veeir sun pere e sun seignur); ca 1200 (Chastelain de Couci [?] Chanson, éd. A. Lerond, XXV, 5: Cascuns pleure sa tere et son païs Quant se depart de ses carnels amis); 1269-78 p.ext. (Jean de Meun, Rose, éd. F. Lecoy, 5004: Mout est chetis e fols naîs Qui croit que ci soit ses païs: N'est pas vostre païs en terre, Ce peut l'en bien des clers enquerre Qui Boëce De Confort lisent); loc. a) 1611 péj. estre bien de son païs «avoir la simplicité, la rusticité de son terroir» (Cotgr.); b) du pays, de pays «du terroir dont on parle» 1671 langage du païs; raisins du païs (Pomey); 1798 vin de pays (Ac.); c) 1718 avoir la maladie du pays «en avoir la nostalgie» (Ac.); 4. p.ext. a) ca 1130 désigne l'enfer (Li Ver del Juise, 68 ds T.-L.: en enfer... lo doleros païs; b) «domaine attribué à différentes réalités ou abstractions» 1643 (Corneille, Menteur, I, 1: Le pays du beau monde et des galanteries [les Tuileries]); 1668 (La Fontaine, Fables, III, 1: La feinte est un pays plein de terres désertes); 5. «contrée, région géographique considérée des points de vue physique, climatique» a) 1160-74 plain païs «terrain ouvert, rase campagne» (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, II, 1056); 1376 plat païs (Modus et Ratio, 246, 33 ds T.-L.); b) 1256 caus paiis; froit paiis (Régime du corps de A. de Sienne, 50, 9: 50, 12 ds T.-L.); 1377 fort païs, bon païs «pays boisé» (Gace de La Buigne, Deduis, 9091; 10119); 6. ca 1274 «ensemble de gens habitant une contrée» (Adenet le Roi, Berte, éd. A. Henry, 3272: Tous li païs i ert venus conmunaument; 3312: ...tres-tous li païs contre li acoroit); 7. «partie d'une nation considérée par rapport à certaines particularités administratives, économiques...» 1355 pays coustumier (Traité entre Charles de Navarre et Jean roi de France ds Isambert, Rec. gén. anc. lois fr., t.4, p.738: bounes genz... de la Languedoïl et du pays coustumier); 1510 pays de droit écrit (Coutume d'Auvergne ds Nouv. coutumier gén. éd. Bourdot de Richebourg, t.4, p.1174a); 1690 pays d'Estats; pays d'Election (Fur.). Du b. lat. pagensis propr. «habitant du pagus, du canton» (2emoitié vies., Grégoire de Tours ds Blaise Lat. chrét.); «compatriote» (fin viiie-déb. ixes., Capit. Car. Magni ds Blaise Latin. Med. Aev.); «paysan, campagnard» (ixes., Agobard, ibid.) cf. paysan*. Pagensis a, dans ces sens, évincé paganus (autre dér. de pagus, v. de mot) lorsque ce dernier désigna les païens (v. ce mot). La désignation du «pays» par pagensis s'explique prob. par sa qualification, dans un 1ertemps, d'un subst. désignant un territoire: ager, territorium... (Few t.7, p.471b). Bbg. Dub. Pol. 1962, p.370. _Quem. DDL t.13, 14. _Rabotin (M.). Le Vocab. pol. et socio-ethnique à Montréal de 1829 à 1842. Paris-Bruxelles, 1975, p.81, 84.

PAYS2, PAYSE, subst.

Région., fam. Personne originaire du même village, de la même région qu'une autre personne. Synon. compatriote.Quant à madame Correur, elle venait d'accepter le bras d'un lieutenant de dragons, un pays à elle, qui lui devait un peu son épaulette (Zola, E. Rougon, 1876, p.105).Maître Nicolas (...) lui confia qu'il était natif, comme elle, des Marches de Lorraine (...). Elle lui répondait avec confiance, comme payse à pays et amie à ami (A. France, J. d'Arc, t.2, 1908, p.243).
En partic., au fém. Promise, fiancée. Si je ne devais pas fidélité à une certaine payse dont le nom respectable est inscrit sur mon bras gauche, j'aurais déjà offert mon coeur et ma main, n'importe laquelle, à la dite citoyenne (Feuillet, Bellah, 1850, p.40).Après avoir échangé un serment dans la langue locale, l'ouvrier saisonnier ou le soldat laisse au village sa payse, sa «promise» (Brie), sa «blonde» (Beauce) (Menon, Lecotté, Vill. Fr., 1, 1954, p.106).
Prononc. et Orth.: [pei], [pεi], [-i:z]. Att. ds Ac. dep.1798. Étymol. et Hist. 1605 pays masc. «compatriote» (Discours faict au Roy par Mathault, n'aguières venu de Paradis, 38 ds Quem. DDL t.19: Et quoy pays? ... l'on ne boit, ny ne mange ceans?), cf. Nicot 1606, s.v. lanceman, p.366 et Fur. 1690; 1788 payse fém. (Fér. Crit.). Tiré de pays1* [l'attest. de payse, Jean Lemaire de Belges ds OEuvres, J. Stecher, t.4, p.455 semble douteuse, v. FEW t.7, p.472a, note 13].
STAT. Pays1 et 2. Fréq. abs. littér.: 22121. (payse: 22). Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 36642, b) 29372; xxes.: a) 31339, b) 28223.

Wiktionnaire

Nom commun 1 - français

pays \pe.i\ ou \pɛ.i\ masculin singulier et pluriel identiques

  1. (Géographie) Territoire d’une nation.
    • Pourtant, le grand trouble qu’avait introduit dans son âme la révélation, sans transition, de ce pays si dissemblable au sien, se calmait lentement, mais sensiblement. — (Isabelle Eberhardt, Le Major, 1903)
    • Les mauvaises herbes sont pour l'agriculture de tous les pays un fléau dont il est malaisé de chiffrer l’importance. — (Les mauvaises herbes et leur destruction, dans Almanach de l'Agriculteur français - 1932, page 82, éditions La Terre nationale)
  2. (Par extension) Patrie.
    • Cette trahison se colore de grands mots. Aimer son pays c’est toujours, selon l’opinion régnante, aimer la gloire, la richesse, et le pouvoir. Cette vertu est un peu trop facile. — (Alain, Souvenirs de guerre, page 236, Hartmann, 1937)
    • Mourir pour son pays est un si digne sort […] — (Corneille)
  3. Province natale.
    • Le pays des terribles Cadets de Gascogne, le pays des madrés, des malins, des finauds, des habiles, […], ce pays là ne serait plus qu’un pays de hongres, voué à la décadence et à la destruction ? — (Ludovic Naudeau, La France se regarde : le Problème de la natalité, Librairie Hachette, Paris, 1931)
  4. Fraction cohérente du territoire national.
    • Pour donner , en effet, un digne apanage à son frère, Louis XI joignit au pays de Guyenne les judicatures du pays toulousain qui se trouvaient sur la rive gauche de la Garonne. — (Abbé Henri-Dominique Larrondo, Monographie de la commune de Merville (Haute-Garonne), dans Monographies de communes, concours ouvert en 1897 par la Société des agriculteurs de France, Paris & Lille : J. Lefort - A. Taffin-Lefort, successeur, 1898, p.57)
  5. (En particulier) Village duquel on est issu.
    • Descendre au pays.
    • J’ai reçu des nouvelles du pays.
    • Ce n’est pas de sitôt que je rentrerai au pays.
  6. (Par métonymie) Nation, État.
    • Le 13 novembre 1970, dans les premiers jours du gouvernement Allende, on réalisa au Chili une étude préliminaire sur les relations militaires de ce pays avec les USA. — (Armando Uribe, Le livre noir de l’intervention américaine au Chili, traduction de Karine Berriot & Françoise Campo, Seuil, 1974)
  7. (Par métonymie) Population d’une contrée.
    • C’est un pays protestant.
  8. Région géographique.
    • De tous les pays circonvoisins, des campagnes et des villes, malades et infirmes, paralytiques, culs-de-jatte et pieds-bots accouraient dans des carrioles, dans des calèches, sur des ânes, sur leurs moignons calleux. — (Octave Mirbeau, Rabalan)
  9. Zone géographique, du point de vue du climat, de la fertilité, etc.
    • C’est un pays chaud.
    • C’est le pays de la soif ! (le désert)
  10. Contrée, région ou terre productrice.
    • A onze heures il arrivait à Fresnay-les-Chaumes, déjeunait à l'unique bouchon de ce hameau de Pithiviers-le-Vieil, d'un chanteau de pain bis et d'un hareng saur, additionnés d'un petit vin du pays qui lui fit faire une de ces grimaces ! — (Louis Boussenard, « La bande des chauffeurs : roman historique et dramatique », dans L'Œil de la police, n° 17, 2e année, s.d. (1909 ?), p. 6)
    • L’utilisation des pesticides a beaucoup augmenté dans les pays en développement à la fin des années 60 et pendant les années 70, à mesure que l’agriculture se modernisait. — (Agriculture mondiale: horizon 2010, page 174, FAO, 1995)
    • Montreuil est le pays des pêches.
    • C’est un pays à miel.
    • Le Charolais est un pays d’élevage.
  11. (Par extension) Terroir, campagne.
    • Vous me direz ce que vous pensez de ce petit vin de pays.
  12. (Militaire) Terrain.
    • Battre le pays : Explorer, reconnaître le terrain.
  13. Monde imaginaire.
    • Alice au pays des merveilles — (titre d’un roman de Lewis Caroll)
  14. (Poétique) (Figuré) Domaine, monde, univers.
    • C'est tellement mystérieux le pays des larmes. — (Antoine de Saint-Exupéry, Le Petit Prince, VII)
    • Évitez de vous retrouver un jour dans le pays des chimères.
    • Le pays de l’érudition et des faits est inépuisable. — (D’Alembert)
    • Il fait équipe avec les enfants, invité dans leur pays, celui qu'il a raté et qui l'envahit aujourd'hui comme une maladie. — (Anaïs Barbeau-Lavalette, La femme qui fuit, éditions Marchand de feuilles, Montréal, 2015, p. 357)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

PAYS. n. m.
Territoire d'un peuple, d'une nation. Pays riche, florissant. Pays catholique. Pays protestant. Pays civilisé. En pays nègre. Voyager en pays étranger. Il a visité tous les pays du monde. Chaque pays a ses usages, ses mœurs, ses habitudes. Telle est la coutume, tel est l'usage constant du pays. Pays d'états se disait des Provinces de France où les impositions étaient consenties et réparties par l'assemblée des états; Pays d'élection, de Celles où les impositions étaient réparties par des agents du pouvoir central appelés élus. Pays d'obédience se disait des Provinces où le pape nommait à certains bénéfices. Pays coutumier se disait du Pays où l'on suivait une coutume provinciale ou locale; et Pays de droit écrit, du Pays où l'on suivait le droit romain. Le pays latin s'est dit à Paris du Quartier où se trouvent la Sorbonne et la plupart des écoles. On dit plutôt aujourd'hui le Quartier latin. Fig., Pays de cocagne, Pays où tout abonde, où l'on fait bonne chère à bon marché.

PAYS signifie, par extension, Patrie ou Province natale. La France est mon pays. Mourir pour le salut de son pays. Aimer son pays. L'amour du pays. Défendre, sauver son pays. Il n'est jamais sorti de son pays. Quitter son pays. Retourner dans son pays. De quel pays êtes-vous? Je suis né en Touraine : c'est mon pays. Fig., Cet homme est bien de son pays, Il a bien le caractère des gens de son pays. Il signifie aussi : Il est bien simple, bien crédule. Vraiment vous êtes bien de votre pays pour croire de pareilles absurdités. Prov., Nul n'est prophète en son pays, Un homme de mérite est souvent moins considéré dans son pays que dans tout autre.

PAYS désigne aussi, dans un sens restreint, le Village auquel on appartient. Aller au pays. Descendre au pays. Il est familier, excepté dans cette phrase : Avoir le mal du pays, Être triste, abattu, malade parce qu'on est éloigné de son pays et qu'on désire vivement y retourner.

PAYS signifie aussi Région, contrée. Pays à blé. Pays de bois. Pays de chasse. Pays gras, maigre, riche, pauvre, stérile, fertile, inculte. Pays montagneux, marécageux. Pays chaud, froid, humide. Pays peuplé. Haut pays. Bas pays. Pays plat, Pays de plaines, par opposition à Pays montueux; et Plat pays, La campagne. Vin de pays, Petit vin qu'on boit dans le pays où il a été récolté. Voilà d'assez bon vin pour du vin de pays. Gagner pays, Avancer, faire du chemin. La nuit vient, gagnons pays. En termes de Guerre, Battre le pays, Explorer, reconnaître le pays. Battre du pays, Voir, parcourir beaucoup de lieux différents; et, figurément, Traiter beaucoup de sujets différents. Voir du pays, Voyager. Fig. et fam., Faire voir du pays à une personne, L'obliger à prendre bien de la peine, lui susciter beaucoup d'embarras. Il signifie aussi, par extension, Entraîner une personne plus loin qu'elle ne l'eût voulu. Fig. et fam., Savoir la carte du pays, Connaître les gens avec qui on doit vivre. Fig., Être en pays de connaissance, Se trouver parmi des gens de sa connaissance. Il s'applique aussi en général à Toutes les choses que l'on connaît. Fig., Parler, juger à vue de pays, Parler, juger d'après un premier aperçu et avant d'avoir approfondi les choses. Fig., De quel pays venez-vous? se dit d'une Personne qui ignore quelque chose que tout le monde sait. Fig., Un pays perdu, Un lieu où il y a peu de ressources, et, particulièrement, Un quartier éloigné du centre des affaires et de la société. Vous habitez un pays perdu. Il est allé se loger en pays perdu.

PAYS s'emploie quelquefois figurément. Les modernes ont découvert dans les sciences de nouveaux pays, des pays inconnus. Il faut renvoyer cela au pays des chimères.

PAYS signifie, populairement, Compatriote; et il fait au féminin Payse. C'est mon pays, c'est un de mes pays. Bonjour, pays. Elle a rencontré une de ses payses.

Littré (1872-1877)

PAYS (pè-yî ; l's se lie : un pè-yî-z abondant ; au XVIe siècle, Palsgrave, p. 13, dit qu'on prononce pa-i) s. m.
  • 1Région, contrée. Des pays sont tous de maçons, d'autres tous de soldats, Pascal, Pens. III, 4. Leurs années [des hommes] se poussent comme des flots ; ils ne cessent de s'écouler, tant qu'enfin après avoir fait un peu plus de bruit et traversé un peu plus de pays les uns que les autres…, Bossuet, Duch. d'Orl. Quel pays reculé le cache à mes bienfaits ? Racine, Esth. II, 3. Ce célèbre Huniade montra que, s'il avait été mieux secouru, les chrétiens n'auraient pas perdu tous les pays que les mahométans possèdent en Europe, Voltaire, Mœurs, 92.

    Pays plat, pays de plaine, par opposition à pays montueux.

    Plat pays, la campagne par opposition aux lieux fortifiés. Les combats précédents vous ont rendu maître du plat pays, Rollin, Hist. anc. Œuv. t. I, p. 434, dans POUGENS.

    Le haut pays, la partie montagneuse d'une contrée. Il partit d'Antioche, capitale de son royaume, en la cent-quarante-septième année, passa l'Euphrate et traversa le haut pays, Sacy, Bible, Machab. I, III, 37.

    Terme de chasse. Grand pays, grand bois, grande étendue de terrain dans laquelle on chasse.

    Pays de chicane, nom que les militaires donnent à des terrains entrecoupés, accidentés, propres à une guerre d'embuscades.

    Courir le pays, aller çà et là dans un pays. Eh ! mon enfant, me dit-elle, d'un ton qui me fit tressaillir, vous voilà courant le pays bien jeune, Rousseau, Confes. II.

    Fig. Courir le pays, être l'objet du bruit public. Il enferme sa femme en une tour carrée, Lui va soir et matin reprocher son forfait ; Cette honte qu'aurait le silence enterrée, Court le pays et vit du vacarme qu'il fait, La Fontaine, Coupe.

    Passer pays, traverser un canton. Ce qui me fâche, c'est de ne recevoir de vos lettres qu'à Nantes ; je ne les hasarderai point en passant pays, Sévigné, 3 mai 1680. Henri IV passait pays à cheval avec une très petite suite, Saint-Simon, 9, 106.

    Gagner pays, du pays, voy. GAGNER, n° 14.

    Tirer pays, s'en aller, s'enfuir, voy. TIRER.

    Battre du pays, parcourir beaucoup de lieux différents.

    Fig. Battre du pays, traiter beaucoup de sujets différents. Nous causons fort agréablement, le maître du logis et moi ; je ne sais quel pays nous ne battons point, Sévigné, 25 août 1677.

    Terme de guerre. Battre le pays, l'explorer.

    Voir le pays, parcourir un pays pour l'examiner. Elle a voulu voir le pays ; c'est une petite satisfaction qu'on ne doit pas refuser à une personne de son âge, Voltaire, Jenni, 7.

    Voir du pays, voyager. Ce mois-ci ne m'a pas paru si immense que l'autre, c'est que je n'ai pas vu tant de pays, Sévigné, 437. Astolfe, qui ne demandait qu'à voir du pays, ne se fait point prier, Fontenelle, les Mondes, 2e soir. Voir du pays est un appât auquel un Génevois ne résiste guère, Rousseau, Confes. II.

    Fig. Faire voir du pays à un homme, lui donner de l'exercice, de la peine, lui susciter beaucoup d'affaires. Si vous prenez le chemin de dire : qu'est-ce que cent écus plus ou moins ? ce style fait bien voir du pays, Sévigné, 12 févr. 1672. Perpenna le traître me fit mourir ; sans lui j'aurais fait voir bien du pays à mes ennemis, Fénelon, Dial. des morts anc. 44 (Sertorius, Mercure). Par ma foi, monsieur Turcaret, je vous ferai bien voir du pays, sur ma parole, Lesage, Turcaret, I, 10.

    À vue de pays, voy. VUE.

    Fig. Savoir la carte du pays, connaître les gens avec qui l'on a à faire.

    Être en pays de connaissance, se trouver parmi les gens de sa connaissance, et aussi connaître ce dont il s'agit. Cette société plaît fort au marquis… il est en pays de connaissance, Sévigné, 10 janv. 1689.

    Familièrement et fig. De quel pays venez-vous ? se dit à celui qui ignore une nouvelle, une chose connue de tout le monde. De l'amour nous fâcher ! de quel pays venez-vous donc ? Marivaux, Serm. indiscr. III, 7.

  • 2Pays considéré par rapport à certaines conditions politiques ou administratives. Pays d'états, provinces de France où la noblesse, le clergé et la bourgeoisie nommaient des états provinciaux qui accordaient et asseyaient les impôts.

    Pays d'élection, provinces où les impositions étaient assises par les élus et autres officiers créés à cet effet.

    Pays d'obédience, provinces où le pape nommait à certains bénéfices.

    Pays de concordat, se disait des provinces où les matières bénéficiales devaient être réglées selon le concordat fait entre François Ier et Léon X.

    Pays de franc-salé, provinces qui étaient exemptes de la gabelle.

    Pays conquis, les conquêtes faites par la France depuis Louis XIII.

    Pays coutumier, provinces où l'on suivait une coutume locale. Pays de droit écrit, provinces où l'on décidait les affaires par l'autorité du droit romain.

    Pays de sapience, nom donné à la Normandie, parce que la coutume des Normands était une des plus sages de France.

    Pays rouges, pays où existaient les cours vehmiques.

  • 3 Particulièrement. Région, contrée, ville où l'on est né, patrie. Avant que d'être à vous, je suis à mon pays, Corneille, Hor. II, 5. Préparez-vous à voir vos pays désolés, Corneille, Nicom. III, 1. Mon pays, mes enfants, pour vous j'ai tout quitté, Corneille, Phèdre, I, 3. Du doux pays de nos aïeux Serons-nous toujours exilées ? Corneille, Esth. I, 2. Ce temple est mon pays, je n'en connais point d'autre, Corneille, Ath. II, 7. La prévention du pays, jointe à l'orgueil de la nation, nous fait oublier que la raison est de tous les climats, et que l'on pense juste partout où il y a des hommes, La Bruyère, XII. Le mérite de M. Guglielmini fut reconnu jusque dans son pays, Fontenelle, Guglielmini. Vous que j'appris à pleurer sur la France, Dites surtout aux fils des nouveaux preux Que j'ai chanté la gloire et l'espérance Pour consoler mon pays malheureux, Béranger, Bonne vieille.

    Absolument. Le pays, la patrie. Mourir pour le pays n'est pas un triste sort ; C'est s'immortaliser par une belle mort, Corneille, Cid, IV, 5. L'intérêt du pays n'est point ce qui l'engage, Corneille, Cinna, III, 1. De l'amour du pays noblement transporté, Racine, Théb. III, 4.

    On a accusé de néologisme pays pour patrie : C'est comme la patrie, vieux mot assez usé ; on dit le pays ; voyez nos orateurs, ils n'y manqueraient pas pour dix écus, Musset, Lettres de Dupuis et Cotonet, 1836. Les exemples ci-dessus montrent que l'accusation est mal fondée.

    Fig. et familièrement. Il est bien de son pays, il est bien simple, bien malavisé (locution provenant de ce qu'il n'y a rien qui forme tant les hommes que les voyages). Va, déloyal, va-t'en, je te le dis : Je suis bien sotte et bien de mon pays De te garder la foi de mariage, La Fontaine, Richard.

  • 4Plus particulièrement encore. Le canton, la localité où l'on est né (sens le plus voisin de la signification étymologique) ; en cet emploi, il se dit d'ordinaire sans adjectif possessif. Il est certain que, si elle n'avait pas été mangée, elle serait revenue au pays, Voltaire, Ingénu, 1. Tant qu'au pays le cousin restera, Picard, Maison en loterie, SC. 10. Dis au général d'Anthouard que, si je ne vais au pays, je suis ruiné sans ressource, Courier, Lett. I, 236. Dès lors on me conseilla de quitter le pays : va-t'en, Blondeau, va-t'en, me dit un de nos voisins ; que veux-tu faire ici, ayant fâché le maire ? Courier, Pierre Clavier dit Blondeau.

    Vin de pays, vin recueilli dans le canton, lorsque le canton n'a pas un cru renommé.

    Des grammairiens condamnent l'Académie et veulent qu'on dise vin du pays ; mais l'Académie n'a fait qu'enregistrer l'usage ; puis vin de pays et vin du pays ne sont pas synonymes : le vin du pays, c'est le vin du pays dans lequel je suis, un vin du voisinage ; vin de pays est un vin du voisinage, mais sans renommée.

    Cheval de pays, celui dont la race est originaire du pays.

    Mal du pays, désir violent et qui rend malade, de revoir le canton où l'on est né (voy. NOSTALGIE).

  • 5 Par catachrèse et populairement. Celui qui est du même pays, du même canton. Mon cher pays, secourez-moi, lui-dis-je, Voltaire, P. diable. C'est une bonne femme qui verra avec plaisir un pays de son fils et de son mari, Rousseau, Confess. VII.

    Au féminin, payse. Messieurs, dit-il, je vous la recommande, C'est ma payse, elle est jeune et friande, Marmontel, Poëme sur la musique, ch. V.

  • 6Les habitants mêmes du pays. Chaque pays a ses usages, ses mœurs.

    Pays légal, nom donné, dans le langage parlementaire, à l'ensemble des citoyens qui remplissent les conditions du cens électoral, par opposition à suffrage universel.

  • 7 Fig. Un pays perdu, une localité éloignée, un lieu où il y a peu de ressources, un quartier éloigné du centre des affaires ou de la société. Où la vas-tu chercher [la gloire] ? ce temple prétendu, Pour parler ton jargon, n'est qu'un pays perdu, Piron, Métrom. III, 9.
  • 8À Paris, le pays latin, le quartier où sont la plupart des colléges. Les rois du pays latin Ont pour sceptre une férule, Maynard, Poésies, dans LE ROUX, Dict. comique. Ce qui est mien, ce qui est sien, ce qui est vôtre sont des expressions venues du quartier de l'Université, qu'on appelle autrement le pays latin, Caillières, Bon et mauvais usage, convers. 2e.

    Pays de cocagne, lieu où l'on a tout à souhait (voy. COCAGNE).

  • 9 Fig. Il se dit de tout ce que l'on compare à un pays. Mais puisque nous voici dedans les Tuileries, Le pays du beau monde et des galanteries, Corneille, le Ment. I, 1. Quelque découverte que l'on ait faite dans le pays de l'amour-propre, il y reste encore bien des terres inconnues, La Rochefoucauld, Réflex. 3. Je définis la cour un pays où les gens, Tristes, gais, prêts à tout, à tout indifférents, Sont ce qu'il plaît au prince, ou, s'ils ne peuvent l'être, Tâchent au moins de le paraître, La Fontaine, Fables, VIII, 14. Il y a des cœurs délicats ; quand cela se trouve avec un esprit sec, cela fait des progrès merveilleux dans le pays de la jalousie, Sévigné, 6 août 1680. C'est un pays [la cour] qui n'est point pour moi, Sévigné, 12 avr. 1680. Nous dévidons beaucoup de chapitres, et de tous pays nous revenons à vous, Sévigné, 26 août 1677. C'est trop se moquer de ne les faire savants [Pétau et Huet] que par les fautes dont on les accuse, et de ne prouver leurs voyages dans les vastes pays de l'antiquité que parce qu'ils s'y sont souvent déroutés, Bossuet, 6e avert. 103. Le pays de l'érudition et des faits est inépuisable, D'Alembert, Disc. prélim. Encycl. Œuv. t. I, p. 251, dans POUGENS.

    Le pays d'où l'on ne revient pas, le tombeau, la mort. Lui ont donné trois fois le vin émétique, et l'ont envoyé au pays d'où personne ne revient, Patin, Lett. t. III, p. 2, dans POUGENS.

  • 10Familièrement et par plaisanterie. Une partie du corps. Le pays, les pays d'en bas, les parties inférieures du corps. Parlez-moi un peu de votre santé en détail ; car vous avez des pays, hélas ! où il s'est fait autrefois de grands ravages, Sévigné, 27 nov. 1689.
  • 11Les Pays-bas, la Belgique et la Hollande.

    Par plaisanterie. Les Pays-bas, les parties inférieures du corps. Par cas fortuit, l'enfant de chœur Lucas Avait usé l'étui des Pays-bas, Gresset, Lutrin vivant.

PROVERBES

Autant de pays, autant de guises, c'est-à-dire les peuples ont des mœurs différentes.

Il est sots de tous pays, dans les lieux les plus polis il se trouve des gens qui n'ont guère d'esprit.

Pays ruiné vaut mieux que pays perdu, se dit pour excuser le dégât qu'on fait en quelque province pour empêcher les ennemis d'y subsister et de s'en emparer.

Accommodez-vous, le pays est large, c'est-à-dire il y a lieu de s'accommoder sans incommoder un autre.

Bon pays, mauvais chemin, c'est-à-dire là où la terre est bonne les chemins sont fangeux et mauvais.

Nul n'est prophète en son pays, c'est-à-dire un homme de mérite est ordinairement moins considéré en son pays qu'ailleurs.

HISTORIQUE

XIe s. En cest païs nous est venuz confondre, Ch. de Rol. II.

XIIe s. Chascun plore sa terre et son païs, Quant il se part de ses coraus amis [amis de cœur], Couci, XXIV. Alemaigne [ils] ont destruite, le grant païs plenier, Sax. XVI.

XIIIe s. Mout a eü grant guerre au païs longuement, Berte, LXVII. Par estrange païs [je] quiers mon chevissement [ma subsistance], ib. XLVII. Tout li païs i ert [était] venus communement, ib. CXXXIII.

XVe s. Le pays d'Angleterre estoit en branle et en differend l'un contre l'autre, Froissart, II, II, 4. Alez vous en, prenez païs, Yver, vous ne demourrez plus, Orléans, Rond. Et ferma ledit conte un grand pays de son charroy et de son artillerie, et mist tout son ost dedans, Commines, I, 6.

XVIe s. Cette isle [l'Atlantide] tenoit plus de païs que l'Afrique et l'Asie ensemble, Montaigne, I, 231. Les seigneurs de Carthage, voyants que leur pays se depeuploit…, Montaigne, I, 233. Ils vivent en une contrée de pays très plaisante, Montaigne, I, 236. Le roy Emmanuel leur donna le temps de vuider ses pays, Montaigne, I, 298. Pour remettre son païs en liberté, Montaigne, II, 43. Ô mon pays doux ! Je meurs loin de vous, Voire et volontiers ! Th. de Bèze, cité par V. Chauffour, Réformateurs du XVIe siècle, t. I, p. 391. Qui a pays n'a que faire de patrie ; duquel nom pays tous les anciens poetes et orateurs françois en ceste signifiance l'ont usurpé, Fontaine, Quintil Horatian, p. 165.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

PAYS. Ajoutez :
12Avancer pays, faire du chemin.

Fig. Avancer pays, avancer en âge. Je n'en ai pas une [incommodité], et n'ayant pas ouï dire qu'en avançant pays, on trouvât la parfaite santé…, Sévigné, à Mme de Grignan, 11 juin 1690, dans Lett. inéd. éd Capmas, t. II, p. 399.

13Pays s'est dit, sous l'ancienne monarchie, de l'assemblée des États généraux de la province, dans les pays d'États. Il y a lieu de craindre que nous ne puissions pas faire mettre Notre-Dame-de-la-Garde [le gouvernement de Scudéry] sur le pays [aux frais de la province], Mlle de Scudéry, p. 171, par Rathery et Boutron, Paris, 1873.
14 Pays, au sens de la population qui l'occupe On les bat trop ; les chanoines les accablent ; et vous verrez que tout ce pays-là, qui doit nourrir Versoy, s'en ira en Suisse, si vous ne le protégez, Voltaire, Lett. au duc de Choiseul, 7 sept. 1780.
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Encyclopédie, 1re édition (1751)

PAYS, s. m. (Gram.) ce mot désigne un espace indéterminé ; il se dit encore de différentes portions plus ou moins grandes de la surface de la terre.

Il se prend aussi quelquefois en figures, & l’on dit, les modernes ont découvert dans les sciences bien des pays inconnus aux anciens.

Pays, iles, (Géog. mod.) les îles pays sont des îles de la mer des Indes, au sud des îles Mariannes. Elles ne furent connues de nom qu’en 1696 ; & nous ne les connoissons que par une lettre du P. le Clain jésuite, inserée dans les lettres édifiantes, t. I. p. 114. & suiv.

Ce pere dit, qu’étant arrivé à la bourgade de Guivam, dans l’île de Samal, la derniere & la plus méridionale des Pintados orientaux, il y trouva vingt-neuf des habitans de ces îles Pays, que les vents d’est qui regnent sur ces mers depuis le mois de Décembre jusqu’au mois de Mai, y avoient jettés, à 300 lieues de leur pays. Ils s’étoient embarqués sur de petits vaisseaux au nombre de trente-cinq personnes, pour passer à une île voisine, qu’il leur fut impossible de gagner, ni aucune autre de leur connoissance, à cause d’un vent violent qui les emporta en l’autre mer, où ils voguerent deux mois sans pouvoir prendre terre, jusqu’à ce qu’enfin ils se trouverent à la vûe de la bourgade de Guivam, où un guivamois qui étoit au bord de la mer, leur servit de guide, & les fit entrer au port le 28 Décembre 1696. La structure de leur petit vaisseau, & la forme de leurs voiles qui sont les mêmes que celles des îles Marianes, firent juger que les îles Pays n’étoient pas fort éloignées de ces dernieres.

Ceux qui échouerent à la bourgade de Guivam, étoient à demi-nus. Le tour & la couleur de leur visage approchoit du tour & de la couleur du visage des habitans des Philippines, quoique leur langue fût fort différente. Les hommes & les femmes n’avoient qu’une espece de ceinture sur les reins & les cuisses, & sur les épaules une grosse toile liée par-devant, & pendant négligemment par-derriere. La femme de la bande qui paroissoit la plus considérable, avoit plusieurs anneaux & plusieurs colliers qu’on jugeoit être faits d’écailles de tortue. Ils n’avoient aucune connoissance de la divinité, ni des idoles ; tout leur soin étoit de chercher à boire & à manger, quand ils avoient faim ou soif ; ils ne connoissoient aucun métal, & leurs cheveux qu’ils laissent toujours croître, leur tomboient sur les épaules. (D. J.)

Pays-Bas, les, (Géog. mod.) contrée d’Europe composée de dix-sept provinces, situées entre l’Allemagne, la France & la mer du nord. Les dix-sept provinces sont les duchés de Brabant, de Limbourg, de Luxembourg, de Gueldres, le marquisat d’Anvers, les comtés de Flandres, d’Artois, de Hainaut, de Hollande, de Namur, de Zéelande, de Zutphen, les seigneuries de Frise, de Malines, d’Utrecht, d’Overissel & de Groningue ; l’archevêché de Cambrai & l’évêché de Liege y sont encore enclaves. Huit de ces provinces qui sont vers le nord, ayant sécoué la domination espagnole, formerent une république qui est aujourd’hui la plus puissante de l’Europe, & qu’on connoît sous le nom de Provinces-Unies. Voyez Provinces-Unies.

On a vérifié dans le conseil espagnol en 1663, que l’Espagne, depuis Charles V. c’est-à-dire en moins de 150 ans, avoit dépensé plus de 1873 millions de livres, à 28 livres le marc, pour conserver les Pays-Bas, indépendamment des revenus du pays qui y ont été consumés. Si à ces revenus du pays l’on ajoute ce qu’il en a coûté depuis 1663 jusques en 1715, on trouvera que l’Espagne auroit gagné plus de 1900 millions, ou 100 millions de livres de rente annuelle, à 28 livres le marc, à abandonner les Pays-Bas, lorsque Charles V. alla fixer son séjour en Espagne. (D. J.)

Pays réunis, (Géog. mod) nom que l’on donne à un grand nombre de fiefs, divisés en fiefs relevant des évêchés de Metz, Toul & Verdun ; en fiefs compris dans la basse Alsace, & en fiefs mouvans des comtés de Chini.

Pays des ténebres, (Géog. mod.) contrée de la grande Tartarie, dans la partie la plus septentrionale de cette région. On lui a donné le nom de ténebres, à cause que pendant une partie de l’hiver les grands brouillards qu’il y fait, empêchent que le soleil n’y paroisse. Il s’y trouve beaucoup d’hermines, & de renards. Les habitans vivent presque comme des bêtes, & ne reconnoissent ni lois, ni rois, ni chefs. (D. J.)

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Étymologie de « pays »

Bourg. poyi, paï ; provenc. pays, pais, paes, pahis ; espagn. pais ; portug. paiz ; ital. paese. Les formes en es, ese viennent du latin pagensis ; les formes en is viennent de pagesius, tous deux dérivés de pagus, canton : ager pagensis ou pagesius, territoire d'un canton, d'où, par extension, région, patrie.

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(Date à préciser) Du latin pagensis, dérivé de pagus (« canton, bourg ») qui fut employé pour désigner l’assise territoriale des comtés médiévaux.
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Phonétique du mot « pays »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
pays pei

Fréquence d'apparition du mot « pays » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « pays »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « pays »

  • Connais-tu le pays où fleurit l'oranger, Le pays des fruits d'or et des roses vermeilles ?
    Jules BarbierMichel Carré — Livret de Mignon (opéra-comique d'Ambroise Thomas)
  • Un pays sans usines Est un pays en ruines.
    Muhammad Al-Id Khalifa
  • Autant de pays, autant de moeurs.
    Zénobios
  • Où qu'il soit, où qu'il aille, l'homme continue à penser avec les mots, avec la syntaxe de son pays.
    Roger Martin du Gard
  • En pays jeune, les lendemains vendent des surlendemains.
    Henri Michaux — Tranches de savoir, Cercle des Arts
  • Je suis concitoyen de toute âme qui pense : La vérité, c'est mon pays.
    Alphonse de Prât de Lamartine — Poésies diverses, la Marseillaise de la paix
  • Nul n'est prophète dans son pays.
    Saint Luc
  • Le gouvernement espagnol a réaffirmé mardi que le pays était «sûr» pour les touristes malgré le net rebond de l'épidémie qui a amené France, Allemagne et Royaume-Uni à déconseiller les voyages dans certaines régions ou à rétablir une quarantaine.
    L'Espagne réaffirme être un pays «sûr» pour les touristes malgré le rebond de l'épidémie
  • Le Conseil d’État fait application de la théorie des circonstances exceptionnelles à la promulgation prématurée d’une « loi du pays » polynésienne dans le contexte de la pandémie de covid-19, tout en veillant à préserver le droit au recours.
    Promulgation des « lois du pays » polynésiennes et circonstances exceptionnelles - Administratif | Dalloz Actualité
  • Tous les tableaux humains qu'un Esprit pur m'apporte S'animeront pour toi quand devant notre porte Les grands pays muets longuement s'étendront.
    Alfred, comte de Vigny — Les Destinées, la Maison du berger
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Images d'illustration du mot « pays »

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Traductions du mot « pays »

Langue Traduction
Anglais country
Espagnol país
Italien nazione
Allemand land
Chinois 国家
Arabe بلد
Portugais país
Russe страна
Japonais
Basque country
Corse paese
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Synonymes de « pays »

Source : synonymes de pays sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « pays »

Combien de points fait le mot pays au Scrabble ?

Nombre de points du mot pays au scrabble : 9 points

Pays

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