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Nation

Variantes Singulier Pluriel
Féminin nation nations

Définitions de « nation »

Trésor de la Langue Française informatisé

NATION, subst. fém.

A. − Vx. Groupe d'hommes dont les membres sont unis par une origine réelle ou supposée commune et qui sont organisés primitivement sur un territoire. Synon. gent1, tribu.Ces derniers [les Bitchys] habitaient plus au sud, mais peut-être à moins de sept à huit lieues: car ces nations, comme celles du Canada, changent de nom et de langage à chaque bourgade (Voy. La Pérouse, t.3, 1797, p.62):
1. Il est bon de prévenir le lecteur pour qu'il ne se laisse pas éblouir par l'expression imposante de nation [it. ds le texte]. Elle ne signifie rien autre chose que chaque tribu de sauvages, assujettie sous un même chef, dont la langue et quelques usages diffèrent un peu des autres; en sorte qu'une nation n'est souvent pas composée de deux mille individus, et qu'on rencontre des villages ou des nations beaucoup moins considérables. Baudry des Loz.,Voy. Louisiane, 1802, pp.20-21.
B. −
1.
a) Groupe humain, généralement assez vaste, dont les membres sont liés par des affinités tenant à un ensemble d'éléments communs ethniques, sociaux (langue, religion, etc.) et subjectifs (traditions historiques, culturelles, etc.) dont la cohérence repose sur une aspiration à former ou à maintenir une communauté. Esprit, génie, humeur, moeurs d'une nation; nation barbare, civilisée, cultivée, instruite, policée. Le caractère, les opinions, et surtout les langues, constituent l'unité des nations dans l'ordre moral; et, dans l'ordre physique même, elles sont dessinées par des caractères éminemment distinctifs (J. de Maistre,Corresp., t.3, 1810, p.482).L'historien et le philosophe cherchent une définition objective de (...) la nation : la nation est-elle fondée sur la langue commune ou sur les conceptions de la vie? (Merleau-Ponty,Phénoménol. perception, 1945, p.417):
2. ... l'idée même de nation en général ne se laisse pas capturer aisément (...). Le fait essentiel qui les constitue [les nations], leur principe d'existence, le lien interne qui enchaîne entre eux les individus d'un peuple, et les générations entre elles, n'est pas, dans diverses nations de la même nature. Tantôt la race, tantôt la langue, tantôt le territoire, tantôt les souvenirs, tantôt les intérêts instituent diversement l'unité nationale d'une agglomération humaine organisée. Valéry,Regards sur monde act., 1931, p.37.
Sagesse* des nations.
Rem. 1. Il convient de distinguer en ce sens nation et état. Nation implique une idée de spontanéité, de communauté d'origine. État implique une idée d'organisation politique et administrative. Une nation peut être partagée, appartenir à plusieurs états, un état peut comprendre plusieurs nations. 2. Nation désigne un groupe humain envisagé sous le rapport de la communauté d'origine, de langue; peuple désigne un groupe humain envisagé du point de vue du gouvernement et des rapports politiques. Ces familles ainsi réunies en un corps, forment une nation sous le rapport de la communauté d'origine, un peuple sous le rapport de la communauté de territoire, un état sous le rapport de la communauté de lois (Bonald, Législ. primit., t.2, 1802, p.74).
b) En partic.
[Au Moy. Âge] Groupement de maîtres et d'étudiants à l'intérieur des universités, selon un découpage linguistique. La faculté des arts de l'université de Paris comprenait quatre nations: anglaise (incluant les Allemands), française (incluant Italiens et Espagnols), picarde (incluant les Flamands), normande (FédouMoy. Âge1980).
Au plur. [Dans l'Ancien Testament] Peuples idolâtres, ceux qui ne font pas partie du peuple élu. Synon. gentil1.Toute (...) guerre est une guerre sainte dans laquelle Jahvé intervient nécessairement pour porter secours à son peuple et anéantir les nations et leurs divinités (Allmen1956).
c) Synon. de nationalité (v. ce mot B 1).Le port est encombré de vaisseaux de toutes nations et de différents tonnages (Gautier,Tra los montes,1843, p.12).Dans l'intimité les Américains se laissent aller quelquefois à dire: «Nous sommes la nation qui a la peau la plus blanche du globe!» Et cette conviction les amène à traiter les hommes de toutes les autres nationalités blanches comme des nègres (Goncourt,Journal,1879, p.53).
MAR. Pavillon de nation. Signe distinctif de la nationalité hissé à la corne des navires. (Dict. xixeet xxes.).
2. Groupe humain stable, établi sur un territoire défini constituant une unité économique, caractérisé par une auto-conscience ethnique (marquée par l'idée de la communauté d'origine et de destinée historique), une langue et une culture communes, formant une communauté politique personnifiée par une autorité souveraine et correspondant à un stade évolué du mode et des rapports de production. Des colonnes de conscrits, de soldats et de volontaires se croisaient, se mêlaient bruyamment (...). Madame de Béranger avait peur de ces rencontres fréquentes (...). Les volontaires criaient souvent Vive la nation! et elle se croyait en 93 (Sand,Hist. vie, t.2, 1855, p.414).Aucune [personne humaine] ne doit être privée des moyens positifs de travailler librement, sans dépendance servile à l'égard de qui que ce soit. C'est donc dans la nation que le droit de tous les individus, aujourd'hui, demain et toujours, trouve sa garantie (Jaurès,Ét. soc., 1901, p.132):
3. L'étude de la nation française nous a montré un cas où la plupart des composantes de la nation (marché national constitué ou en voie de constitution, langue nationale développée, unification politique, État centralisé) se trouvaient en place sans que pour autant puisse se créer la nation. Celle-ci ne put apparaître, en tant que telle, à la surface des rapports sociaux, qu'au moment où se cristallisèrent les contradictions de classes, où elles nécessitèrent l'intervention directe des masses populaires. R. Martelli,La Nation, Paris, Éd. soc., 1979, p.69.
SYNT. Nation commerçante, exportatrice, importatrice, industrialisée, industrielle, maritime; nations alliées, bélligérantes, ennemies; nations voisines; nations européennes, germaniques, latines, occidentales; nations civilisées, développées, en voie de développement; grandes nations.
Rem. À partir de la Révolution nation prend un sens politique précis et désigne une forme d'organisation sociale spécifique. Conjointement à cette acception, nation s'applique encore à cette époque à des groupes humains ayant eu des expériences d'organisation politique autonome, groupes qui ont en partie survécu à leur intégration dans le royaume de France avant 1789. Ces organisations possédaient les traits caractéristiques de toute ethnie et formaient un ensemble spécifique qui à la fin de l'Ancien Régime était désigné par province. La nation provençale (...) n'auroit pu céder les Avignonois au pape. La reine Jeanne le pouvoit-elle, contre les réclamations mêmes de la nation provençale? Non; les Avignonois sont donc toujours restés de droit une portion intégrante de la Provence, et par conséquent, de la nation françoise à laquelle la Provence a été incorporée (Robesp., Discours, Pétit. peuple avign., t.6, 1790, p.588).
DR. INTERNAT. Clause de la nation la plus favorisée. Clause insérée dans un traité international et stipulant que l'État signataire s'engage à accorder aux ressortissants de son cocontractant tous les avantages déjà accordés ou qui pourront être accordés à un pays tiers. La nouvelle note iranienne annoncera la dénonciation de cet accord aux termes duquel l'Angleterre jouissait de la clause de la nation la plus favorisée (Le Monde, 19 janv. 1952, p.3, col. 4).La clause de la nation la plus favorisée crée des compétitions entre les divers pays, qui sont généralement tous désireux de l'obtenir, et par là, contribue à l'abaissement des tarifs douaniers et à l'extension des accords de réciprocité entre les pays. Mais par ailleurs, elle soude les économies de pays associés et contribue à la formation de «blocs» économiques opposés les uns aux autres (Bouv.-Ibarr.1975).
Société* des Nations. Organisation* des Nations Unies.
3. P. méton. Territoire occupé par ce groupe humain. Synon. patrie, pays.Une nation est une grande association séculaire (...) entre des provinces en partie congénères formant noyau, et autour desquelles se groupent d'autres provinces liées les unes aux autres par des intérêts communs (Renan,Réf. intellect., 1871, p.202).
C. − [Désigne un ensemble de pers.]
1. Ensemble des personnes qui composent ce groupe (B2). Il traita de la paix, mais avec le consentement unanime de sa nation. Quelques révoltés, il est vrai, refusèrent de ratifier le traité; mais quel poids pouvoient avoir leurs réclamations après le voeu contraire, exprimé librement par la masse entière du peuple! (Genlis,Chev. Cygne, t.1, 1795, p.176).Quand on n'a pas pour soi l'opinion publique, c'est-à-dire la nation... on peut susciter des troubles, des complots, on peut faire des révoltes, mais non pas des révolutions! (Scribe,Bertrand, 1833, i, 6, p.134).Il tenait en profond mépris le gros de la nation française, ce ramassis de paysans et de manoeuvres qu'on appelle le peuple, ou la vile multitude (About,Nez notaire, 1862, p.8).
2. [Désigne un ensemble de pers. appartenant à une catégorie partic.]
Vieilli ou littér. Ensemble des personnes formant un groupe homogène, qui ont des traits caractéristiques (physiques, psychiques, comportementaux, etc.) communs. Nation des poètes. C'est un coup-d'oeil charmant que toute cette nation citadine réunie sous l'ombrage d'arbres magnifiques et sur les gazons dont le Danube entretient la verdure (Staël,Allemagne, t.1, 1810, p.118).À peine ces trois rangées de maisons de la place Royale furent-elles dressées (...) que la nation des gens de justice envahit la place entière (Nerval,Nouv. et fantais., 1855, p.182).Toute la nation littéraire s'ordonnait en un petit nombre de tribus, selon les lois naïves des contrastes que l'on croyait exister entre l'art et la nature (Valéry,Variété IV, 1938, p.12).
HIST. [Pendant la Révolution française] Ensemble des personnes formant le Tiers État. Le Tiers embrasse donc tout ce qui appartient à la nation; et tout ce qui n'est pas le Tiers ne peut pas se regarder comme étant de la nation (Sieyès,Tiers état, 1789, p.32).Au fur et à mesure que s'approfondissent les luttes révolutionnaires, la nation tend, dans le langage du temps, à s'identifier au peuple révolutionnaire qui a abattu la monarchie (R. Martelli,La Nation, Paris, Éd. soc., 1979, p.22).
Vieilli. Ensemble des personnes appartenant à une même nation qui vivent dans un pays étranger. Synon. colonie.Toutes les «nations» de l'hôtel montrent beaucoup de gentillesses (Barrès,Amit. fr., 1903, p.51).
D. −
1. [Désigne une collectivité p. oppos. à un individu, une classe, un groupe] Collectivité nationale. Intérêts de la nation. Il ne faut plus nous dire continuellement: la France est un état monarchique; et faire découler ensuite de cet axiôme les droits du roi, comme la première et la plus précieuse partie de la constitution; et secondairement la portion de droits que l'on veut bien accorder à la nation (Robesp.,Discours, Contre veto, t.6, 1789, p.88).Pour lui, il n'était de joli départ pour les frontières qu'après avoir nettoyé le pays de la gangrène réactionnaire qui rongeait les forces vives de la nation (Aymé,Jument, 1933, p.89).La nation garantit l'égal accès de l'enfant et de l'adulte à l'instruction, à la formation professionnelle et à la culture (Constitution du 27 oct.1946,préambule).
2. DR. CONSTIT.
a) ,,Élément de l'État constitué par le groupement des individus fixé sur un territoire déterminé et soumis à l'autorité d'un même gouvernement. La nation est la substance humaine de l'État`` (Cap. 1936). L'idée de consulter la nation était lancée dans la circulation et s'associait à l'idée de liberté (Bainville,Hist. Fr., t.2, 1924, p.22).
b) [Dans la théorie classique issue de la Révolution française] ,,Personne juridique constituée par l'ensemble des individus composant l'État, mais distincte de ceux-ci et titulaire du droit subjectif de souveraineté`` (Cap. 1936). L'homme de leur choix sera constamment celui qui, à tous égards, offrira le plus de garanties comme administrateur local, et comme électeur des députés dont le mandat doit émaner de la nation entière (Lamennais dsL'Avenir,, 1831, p.277).Il tordait dans sa main le collet brodé du député de l'Aisne. «Le peuple me connaît. Il ne vous connaît pas. Je suis l'élu de la nation. Vous êtes les délégués obscurs d'un département» (A. France,Lys rouge, 1894, p.42).Dans la doctrine française, telle qu'elle a été exprimée dans nos constitutions de l'époque révolutionnaire et de 1848, la nation est le titulaire originaire de la souveraineté. La nation est une personne avec tous les attributs de la personnalité, la conscience et la volonté. La personne nation est, en réalité, distincte de l'État; elle lui est antérieure (L. Duguit,Traité de dr. constit., t.1, 1927, p.607 ds Rob.).
Prononc.: [nasjɔ ̃], [nɑ-]. Martinet-Walter 1973 [-a-], [-ɑ-] (11/6). Étymol. et Hist. 1. a) 1remoitié xiies. naciuns «les païens, p. oppos. aux juifs (dans la Bible)» (Psautier Oxford, éd. F. Michel, ps. 109, 7 [= 110, 6], p.171); b) ca 1175 nascion «ensemble d'êtres humains caractérisé par une communauté d'origine, de langue, de culture, etc.» (Chronique Ducs Normandie, éd. C. Fahlin, 11969); 2. a) ca 1470 nation «division de l'université de Paris» (Georges Chastellain, Chron., éd. J. Kervyn de Lettenhove, t.1, p.347: les quatre nations); b) 3equart xves. «personnes d'une même nation se trouvant dans un pays étranger, colonie» (Id., ibid., t.2, p.280: les nations des marchans de la ville de Bruges); c) 1765 «division territoriale de l'ordre de Malte» (Encyclop. t.9, p.951b); 3. a) 1651-57 p.ext. «catégorie d'individus unis par une communauté d'intérêts, de profession, etc.; engeance» (Scarron, Roman com., éd. E. Magne, p.25: [les] provinciaux, la plus incommode nation du monde); b) 1668 «espèce animale» (La Fontaine, Fables, IV, 6); 4. a) 1789 dep. la Révolution: «personne juridique constituée par l'ensemble des individus composant l'État... (Cap. 1936)» (Arrêté du 23 juil. ds Réimpr. de l'anc. Moniteur, t.I, p.197b ds Ranft, p.99: crime de lèse-nation); b) ca 1899 dr. internat. clause de la nation la plus favorisée (Gde Encyclop.). Empr. au lat. natio (dér. de nasci «naître») «naissance; ensemble d'individus nés en même temps ou dans le même lieu, nation», lat. chrét. nationes plur. «les nations païennes (p.oppos. au peuple de Dieu)», lat. médiév. natio au sens 2 a (1245 ds Nierm.). Fréq. abs. littér.: 9391. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 26999, b) 7144; xxes.: a) 6332, b) 9261. Bbg. Dub. Pol. 1962, p.350. _Eskenazi (A.). Peuple et nation ds l'Esprit des lois. Ét. sur le 18e s. Clermont-Ferrand, 1979, pp.41-45. _Merk (G.). L'Étymol. de Race. Rapp. entre generatio, ratio et natio. Trav. Ling. Litt. Strasbourg. 1969, t.7, pp.177-188. _Muller (Fr. W.). Zur Geschichte des Wortes und Begriffes «nation» im frz... Rom. Forsch. 1947, t.58-59, pp.247-321. _Quem. DDL t.11, 14. _Rabotin (M.). Le Vocab. pol. et socio-ethnique à Montréal de 1829 à 1842. Paris-Bruxelles, 1975, p.71,73. −Siccardo (Fr.). Nationalisme. Contributo linguistico. Contributo storico-letterario. Gênes, 1984, pp.23-45. _Vardar Soc. pol. 1973 [1970], p.271.

Wiktionnaire

Nom commun - français

nation \na.sjɔ̃\ féminin

  1. Ethnie, peuple, communauté humaine qui possède une unité historique, linguistique, culturelle, économique plus ou moins forte.
    • Merci, répondit le Cœur-Loyal avec effusion, merci, mes frères, la nation comanche est une grande et noble nation, que j’aime, je suis heureux d’avoir été adopté par elle. — (Gustave Aimard, Les Trappeurs de l’Arkansas, 1858)
    • (Chez les Amérindiens) Une nation rassemblait des tribus qui parlaient le même dialecte et suivaient les mêmes coutumes. [...] Ce n'est qu'aux heures de crise, cependant, que les tribus éprouvaient le sentiment d'appartenir à une même nation. — (Jean Hamelin (dir.), Histoire du Québec, Edisem, 1977, p. 30)
    • De nos jours, on commet une erreur plus grave : on confond la race avec la nation, et l’on attribue à des groupes ethnographiques ou plutôt linguistiques une souveraineté analogue à celle des peuples réellement existants. — (Ernest Renan, Qu’est-ce qu’une nation ?, conférence faite en Sorbonne, le 11 mars 1882)
    • En rentrant dans le giron de la nation française, Bordeaux, naguère capitale continentale du royaume d’Angleterre, subissait un dommage considérable. — (Léon Berman, Histoire des Juifs de France des origines à nos jours, 1937)
    • Il serait bon encore d’invoquer la protection du grand thaumaturge vers qui des milliers et des milliers de pèlerins venaient de toutes les provinces, de toutes les nations. — (Jean Rogissart, Passantes d’Octobre, Librairie Arthème Fayard, Paris, 1958)
    • Par exemple, les séparatistes corses se considèrent sûrement comme une nation séparée et distincte, ou au moins différente, de la France métropolitaine. — (Panayiotis Jerasimof Vatikiotis, L’Islam et l’État, 1987, traduction d’Odette Guitard, 1992, p. 175)
  2. (En particulier) Ensemble des personnes d’un même peuple qui se trouvent dans un pays étranger.
    • En cette occasion, l’ambassadeur assembla la nation.
  3. (Éducation, Histoire) Dans l’ancienne Université de Paris, collège d’étudiants rassemblés selon leur origine géographique ou leur patois.
    • On distinguait quatre nations : celle de France, celle de Picardie, celle de Normandie et celle d’Allemagne.
    • L’actuel palais de l’Institut était le Collège des Quatre Nations.
  4. (Histoire) Regroupement à valeur juridique d’individus de même origine dans une ville étrangère.
    • Gadagne était un membre important de la nation italienne de Lyon.
  5. État dont se dote un peuple ou un ensemble de peuples.
    • Il savait qu’il était en Amérique, une grande et puissante nation, dont les citoyens avaient des manières sèches et humoristiques, se servaient à tout propos de revolvers et de couteaux à virole […] — (H. G. Wells, La Guerre dans les airs, 1908, traduction d’Henry-D. Davray et B. Kozakiewicz, Mercure de France, Paris, 1910, page 380 de l’édition de 1921)
    • Des conciliabules inutiles se tiennent entre les envoyés des nations. — (Paul Nizan, Les Chiens de garde, 1932)
    • L’internationalisme sentimental d’avant 1914 n’a pas résisté au choc des nations. Dans tous les pays en guerre, socialistes et syndicalistes, dans leur grande majorité, ont participé à la défense nationale. — (Jacques Delpierrié de Bayac, Histoire du Front populaire, Fayard, 1972, p. 17)
  6. Ensemble des citoyens considérés comme constituant un corps social distinct du gouvernement qui les régit.
    • Il apprit que cent seize millions de dollars-or avaient quitté la Trésorerie en un jour, happés par une nation en panique. — (André Maurois, Chantiers américains, 1933)
  7. Communauté humaine qui se reconnaît des traits communs, culturels ou ethniques, au nom desquels elle veut constituer une entité politique souveraine.
    • De même que les duchés de France, jadis indépendants, durent se fusionner en une nation, de même à présent les nations auraient dû s’adapter à une fusion plus vaste […] — (H. G. Wells, La Guerre dans les airs, 1908, traduction d’Henry-D. Davray et B. Kozakiewicz, Mercure de France, Paris, 1910, page 120 de l’édition de 1921)
    • La France est sans doute la seule nation à laquelle il était loisible d’adhérer par autre chose que son identité, la seule nation à laquelle on puisse se rallier par sa culture et par sa langue. — (Jean-Louis Crémieux-Brilhac, « Ce qui reste du gaullisme, c’est un sens aigu du social », dans Marianne, 12 juin 2010)
  8. (Religion) (Au pluriel) Peuples infidèles et idolâtres, par opposition aux Juifs.
    • Saint Paul a été appelé l’apôtre des nations.
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

NATION. n. f.
L'ensemble des personnes nées ou naturalisées dans un pays et vivant sous un même gouvernement. Nation puissante, belliqueuse, civilisée, policée, barbare, riche, pauvre, commerçante. Deux nations rivales, amies, ennemies, alliées. Chaque nation a ses coutumes, ses mœurs. La nation française espagnole, anglaise. Les diverses nations de l'Asie, de l'Amérique. Le génie d'une nation. Les nations septentrionales, méridionales. Les droits, les libertés, les lois, la constitution, le gouvernement d'une nation. La nation armée, Régime militaire d'après lequel la nation tout entière concourt à la défense nationale. Société des Nations. Voyez SOCIÉTÉ.

NATION se dit aussi de l'Ensemble des citoyens considérés comme constituant un corps social distinct du gouvernement qui les régit. Ce ministère a pour lui, contre lui la nation. Il se dit quelquefois des Habitants d'un même pays, bien qu'ils ne vivent pas sous le même gouvernement. Ainsi, en parlant de l'Italie et de l'Allemagne à l'époque où elles étaient partagées en divers États et en divers gouvernements, on ne laisse pas de dire La nation italienne, la nation allemande. Il s'est dit des Personnes d'une même nation qui se trouvent dans un pays étranger. Dans cette occasion, l'ambassadeur assembla la nation. Il se disait, dans l'ancienne Université de Paris, pour classer, suivant leur origine, ceux qui la composaient. On distinguait quatre nations : celle de France, celle de Picardie, celle de Normandie et celle d'Allemagne. L'actuel palais de l'Institut était le Collège des Quatre Nations.

NATIONS, au pluriel, désigne, en termes de l'Écriture sainte, les Peuples infidèles et idolâtres, par opposition aux chrétiens. Saint Paul a été appelé l'apôtre des nations.

Littré (1872-1877)

NATION (na-sion ; en vers, de trois syllabes) s. f.
  • 1Réunion d'hommes habitant un même territoire, soumis ou non à un même gouvernement, ayant depuis longtemps des intérêts assez communs pour qu'on les regarde comme appartenant à la même race. Auguste journée où deux fières nations [l'espagnole et la française], longtemps ennemies et alors réconciliées par Marie-Thérèse, s'avancent sur leurs confins, leurs rois à leur tête, non plus pour se combattre, mais pour s'embrasser, Bossuet, Mar.-Thér. Dieu a préparé dans son conseil éternel les premières familles qui sont la source des nations, et, dans toutes les nations, les qualités dominantes qui devaient en faire la fortune ; il a aussi ordonné dans les nations les familles particulières dont elles sont composées, mais principalement celles qui devaient gouverner ces nations, et, en particulier, dans ces familles, tous les hommes par lesquels elles devaient ou s'élever, ou se soutenir, ou s'abattre, Bossuet, ib. Alger, tu disais dans ton cœur avare : les nations sont ma proie, Bossuet, ib. Quand on regarde la facilité incroyable avec laquelle la religion a été renversée ou rétablie par Henri, par Marie et par Élisabeth, on ne trouve ni la nation si rebelle, ni ses parlements si fiers et si factieux, Bossuet, Reine d'Anglet. La France, seule nation de l'univers qui depuis douze siècles presque accomplis n'a jamais vu sur le trône que des princes enfants de l'Église, Bossuet, ib. Les rois d'Angleterre qui ont régné depuis tant de siècles sur une des plus belliqueuses nations de l'univers, plus encore par leur courage que par l'autorité de leur sceptre, Bossuet, Duch. d'Orl. Si elle eut de la joie de régner sur une grande nation, Bossuet, Reine d'Angl. Ceux qui sont instruits des affaires, étant obligés d'avouer que le roi [Charles 1er d'Angleterre] n'avait point donné d'ouverture ni de prétexte aux excès sacriléges dont nous abhorrons la mémoire, en accusent la fierté indomptable de la nation, Bossuet, ib. Vous serez de sa vue [de Mardochée] affranchi dans dix jours ; La nation entière est promise aux vautours, Racine, Esth. II, 1. Le czar acheta le cabinet [d'anatomie de Ruysch], et l'envoya à Pétersbourg, présent des plus utiles qu'il pût faire à la Moscovie, qui se trouvait tout d'un coup et sans peine en possession de ce qui avait coûté tant de travaux à un des plus habiles hommes des nations savantes, Fontenelle, Ruysch. Sous les deux premières races, on assembla souvent la nation, c'est-à-dire les seigneurs et les évêques ; il n'était point encore question des communes, Montesquieu, Esp. XXVIII, 9. Comme les nations destructives font des maux qui durent plus qu'elles, il y a des nations industrieuses qui font des biens qui ne finissent pas même avec elles, Montesquieu, ib. XVIII, 7. Je suis sévère pour les nations, répondit Oswald : je crois toujours qu'elles méritent leur sort, quel qu'il soit, Staël, Corinne, IV, 2. Les nations, reines par nos conquêtes, Ceignaient de fleurs le front de nos soldats, Béranger, Vieux sergent.

    La grande nation, nom donné d'abord à la France républicaine, et dont l'empereur Napoléon 1er se servit pour désigner après ses victoires la nation française. La grande nation à vaincre accoutumée, Chénier M. J. la Mort du général Hoche, 1798. Depuis dix ans, leurs routes [des départements de l'Est] étaient couvertes de voyageurs de tous les pays, qui venaient admirer la grande nation, sa capitale chaque jour embellie, les chefs-d'œuvre de tous les arts et de tous les siècles que la victoire y avait rassemblés, Ségur, Hist. de Nap. III, 1.

    Une nation de soldats, une nation dont tous les hommes sont ou soldats, ou propres à la guerre. Une nation de soldats va combattre contre des peuples qui ne sont que citoyens, Montesquieu, Rom. V.

  • 2Tous ceux d'une même nation qui vivent en pays étranger. Aucun ne pourra se dire consul de la nation française dans les pays étrangers sans avoir commission de nous. …faisons défenses aux consuls d'emprunter au nom de la nation aucunes sommes de deniers des Turcs, Mores, Juifs ou autres, Ordonn. marine, août 1681.
  • 3Il se dit, dans le langage des fables, des animaux comparés aux hommes. La nation des belettes, Non plus que celle des chats, Ne veut aucun bien aux rats, La Fontaine, Fabl. IV, 6.
  • 4Dans le langage de l'Écriture, les nations, les païens, les gentils. Les rois des nations, devant toi [la nouvelle Jérusalem] prosternés, De tes pieds baisent la poussière, Racine, Ath. III, 7. Qui a changé mon héritage en la retraite des esprits immondes, et livré Jérusalem à tous les excès des nations ? Massillon, Carême, Enf. prod.

    Docteur des nations, apôtre des nations, locutions par lesquelles les prédicateurs ont souvent désigné saint Paul.

  • 5 Fig. Toute espèce de gens considérés comme faisant une sorte de nation à part. Pourquoi me déchirez vous par vos blasphèmes, nation impie ? Bossuet, Anne de Gonz. Connais-tu la nation dévote ? Boileau, Sat. X. Je savais que la nation des poëtes, et surtout des mauvais poëtes, est une nation farouche qui prend feu aisément, et que ces esprits avides de louanges ne digéreraient pas facilement une raillerie, quelque douce qu'elle pût être, Boileau, Disc. sur la satire. Je te parlerai d'une certaine nation qu'on appelle les nouvellistes, Montesquieu, Lett. pers. 130. Henri VIII, voulant réformer l'Église d'Angleterre, détruisit les moines, nation paresseuse elle-même et qui entretenait la paresse des autres, Montesquieu, Esp. XXIII, 29.
  • 6Dans l'ancienne université de Paris, nom donné à certaines provinces qui la composaient. L'université était formée de quatre nations, qui avaient leurs titres particuliers : l'honorable nation de France, la fidèle nation de Picardie, la vénérable nation de Normandie, la constante nation de Germanie ; c'étaient les procureurs de ces nations, avec les doyens des trois facultés supérieures, qui formaient le tribunal du recteur.
  • 7L'ordre de Malte était également divisé par nations, qu'on désignait plus communément sous le nom de langues.
  • 8Collége des quatre nations, collége fondé par Mazarin, pour recevoir les élèves appartenant aux provinces espagnoles, italiennes, allemandes et flamandes nouvellement réunies à la France.

SYNONYME

NATION, PEUPLE. Dans le sens étymologique, nation marque un rapport commun de naissance, d'origine, et peuple un rapport de nombre et d'ensemble. De là résulte que l'usage considère surtout nation comme représentant le corps des habitants d'un même pays, et peuple comme représentant ce même corps dans ses rapports politiques. Mais l'usage confond souvent ces deux mots ; et, sous la constitution de 1791, on avait adopté la formule : la nation, la loi, le roi.

HISTORIQUE

XIIIe s. En tel cas deit un homme estre creus de l'essoine de celui qui par lui l'a contremandé, de quelque nassion que il seit, Ass. de Jér. 98.

XVe s. Là fut fait un cri et un ban de par le roi… que tantost toutes manieres de gens qui n'estoient de la nation de Londres… partissent, Froissart, II, II, 115. Les marchands d'estrange pays, qui ont accoustumé, depuis si longtemps qu'il n'est memoire du contraire, de communiquer et marchander en la ville de Bruges, lesquels on appelloit les nations, Mathieu de Coucy, Hist. de Charles VII, p. 628, dans LACURNE.

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Étymologie de « nation »

Provenc. natio, naision ; espagn. nacion ; portug. nação ; ital. nazione ; du lat. nationem, qui vient de natus, né. Nation dans l'ancienne langue signifiait aussi, comme en latin, naissance, nature.

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(1160) Du latin natio (« progéniture, engeance, peuple »). nacion (Vers 1270). Natio, qualifiant principalement la gens. Utilisé en ancien français pour naissance, extraction, provenance. Désignant le lieu particulier, la province d’origine dans un pays donné, sans référence à la « naturalité » (nationalité, en langage moderne) ou l’appartenance régnicole.
  • Nous qui sommes Gascons, en sommes mieux pourvus (de qualités) qu’autre nation de France ne peut être de l’Europe. — (Montluc (1499–1577), Commentaires, 1. VIII)
  • Gens de diverses nations assemblés en une ville pour demeurer ensemble. — (Nicot, Thrésor de la langue française, 1606)
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Phonétique du mot « nation »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
nation neiʃœn

Fréquence d'apparition du mot « nation » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « nation »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « nation »

  • La nation est une famille, le nationalisme une abstraction.
    André Frossard — Le Monde de Jean-Paul II
  • La terre est ma patrie, le genre humain ma nation.
    Tevfik Fikret — Kocatürk
  • Le gouvernement d'un pays n'est pas la nation, encore moins la patrie.
    Henri Lacordaire — Lettres, à un jeune homme
  • La France est une nation qui s'ennuie.
    Alphonse de Prât de Lamartine — Discours, 10 janvier 1839
  • La cruelle ironie de l’Histoire veut que, cent ans plus tard, le pays du Cèdre, indépendant depuis 1943, ressemble à une nation en perdition. Le cataclysme qui s’est abattu sur la population, confrontée à une chute libre de la monnaie et à une paupérisation galopante, n’est pas seulement économique et monétaire. Ce qui se joue dans cette faillite aux proportions dantesques, au-delà de la stabilité de la livre et de la survie de la classe moyenne, c’est l’avenir même du pays, sa raison d’être, et osons le mot, un peu de son âme.
    Le Monde.fr — Le Liban, une nation en perdition
  • La plus méprisable des nations est aujourd'hui la nôtre, parce qu'elle n'a nulle espèce d'honneur et qu'elle ne songe qu'à l'argent et au repos.
    François Joachim de Pierre, cardinal de Bernis — Lettre au comte de Choiseul, 1758
  • Une nation est une âme, un principe spirituel. Deux choses qui, à vrai dire, n'en font qu'une constituent cette âme, ce principe spirituel. L'une est dans le passé, l'autre dans le présent. L'une est la possession en commun d'un riche legs de souvenirs ; l'autre est le consentement actuel, le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l'héritage qu'on a reçu indivis.
    Ernest Renan — Qu'est-ce qu'une nation ?, Lévy
  • L'Amérique est la seule nation idéaliste du monde.
    Théodore Wilson — Discours de 1919
  • Les nations étant inévitablement plus bêtes que les individus, toute pensée a le devoir de se sentir en révolte.
    Émile Chartier, dit Alain — Correspondance avec Romain Rolland, Salut et Fraternité , Albin Michel
  • Une nation n'a de caractère que lorsqu'elle est libre.
    Anne Louise Germaine Necker, baronne de Staël-Holstein, dite Mme de Staël — De la littérature
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Traductions du mot « nation »

Langue Traduction
Anglais nation
Espagnol nación
Italien nazione
Allemand nation
Chinois 国家
Arabe الأمة
Portugais nação
Russe нация
Japonais 国家
Basque nazioaren
Corse nazione
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Synonymes de « nation »

Source : synonymes de nation sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « nation »

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Nombre de points du mot nation au scrabble : 6 points

Nation

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