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Gorger

Définitions de « gorger »

Trésor de la Langue Française informatisé

GORGER, verbe trans.

A. − Qqn gorge qqn de qqc.
1. [Le compl. prép. de désigne un aliment; le compl. d'obj. une pers. ou un animal] Faire manger, boire à profusion, avec excès. Le 8 juillet, vers le soir, Bogun gorge d'eau-de-vie les paysans, les enflamme par ses discours et les lance furieux sur les batteries des Polonais (Mérimée, Cosaques d'autrefois,1865, p. 189).Il achetait, de ses propres deniers, des joujoux pour ses meilleurs élèves (...) il leur faisait faire des dînettes, les gorgeant de friandises, de sucreries et de gâteaux (Maupass., Contes et nouv., t. 2, Moiron, 1887, p. 1144).
[P. ell. du compl. prép. de] Synon. de rassasier.Il gorgera les foules. On s'endormira sur les portes, l'estomac plein jusqu'aux dents (Flaub., Tentation,1856, p. 645).
En partic. Synon. de gaver.On achevait de les gorger [les oies] et on m'a servi le premier foie gras de la saison (Pesquidoux, Chez nous,1921, p. 41).
Emploi pronom. réfl. Manger à profusion, avec excès. Synon. fam. se bourrer, s'empiffrer de (qqc.).Les riches du jour se gorgent de friandises (Baudel., Salon,1846, p. 174).Nous avons été dîner dans un petit restaurant où je me gorgeai sans scrupule de viande rouge et de choux à la crème (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 68).
[P. ell. du compl. prép. de] Dans le Voyage de Chapelle et Bachaumont, on mange beaucoup (...) on se gorge, on s'empiffre, ce sont les termes, et c'est le plaisir; la gourmandise rabelaisienne s'y montre dans tout son plein (Sainte-Beuve, Caus. lundi, t. 11, 1856, p. 46).
2. P. anal. et au fig. [Avec un compl. prép. de] Pourvoir à profusion (quelqu'un) de (quelque chose). Synon. combler.Le luxe de Napoléon et sa magnificence durent le faire paraître un roi d'Asie : là, comme à Tilsitt, il gorgea de diamants tous ceux qui l'approchèrent (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 413).Je veux, quand je te reverrai, te couvrir d'amour, de voluptés, d'ivresse. Je veux te gorger de toutes les félicités de la chair, t'en rendre lasse, t'en faire mourir (Flaub., Corresp.,1846, p. 253) :
1. ... il est plaisant d'entendre nos historiens crier : « On nous ignore! on nous met à l'écart! » et cependant les éditeurs gorgent de « vies romancées », d'« indiscrétions de l'histoire », de « dessous » et de « révélations » frelatées un public avide d'être trompé. L. Febvre, Combats pour hist., Entre Benda et Seignobos, 1933, p. 80.
[P. ell. du compl. prép. de] Dieu seul avait le pouvoir de gorger ainsi une âme, de la faire déborder et ruisseler en des flots de joie (Huysmans, En route, t. 2, 1895, p. 213).Gorgée elle-même depuis cinq ans par les rabatteurs de la Compagnie, elle [la presse] ne cherche dans le scandale parlementaire qu'un alibi à son propre déshonneur (Bernanos, Gde peur,1931, p. 276).
Emploi pronom. réfl. Se pourvoir à profusion de (quelque chose), jouir à satiété de (quelque chose). Se gorger d'or, de connaissances, de volupté. Les voyages, les jouissances de l'art, la musique surtout dont il s'était gorgé, lui avaient été d'abord une diversion intermittente et passionnée (Rolland, J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p. 1531) :
2. ... il était enveloppé de délices (...) il se gorgea de ces cheveux blonds [des soldats], de ces visages hâlés où les yeux semblaient des lacs de glacier, de ces tailles étroites, de ces cuisses incroyablement longues et musculeuses. Il murmura : « Comme ils sont beaux! » Il ne touchait plus terre... Sartre, Mort ds âme,1949, p. 82.
B. − Qqc./qqn gorge qqc. de qqc.Remplir jusqu'à saturation. Synon. saturer.Elle [la revue] ressuscite, certains samedis, certains dimanches pluvieux qui gorgent le promenoir d'une foule odorante (Colette, Music-hall,1913, p. 214).Ces palmiers (...) ont de longues et larges feuilles que l'atmosphère gorge d'humidité (Vidal de La Bl., Princ. géogr. hum.,1921, p. 122).
Rare. [Le suj. désigne ce qui gorge] Synon. de engorger.Un grouillement continu de piétons gorgeait toutes les voies qui vont de la Concorde à la Bastille (Romains, Hommes bonne vol.,1932, p. 187).
Au fig. Je vais la tête un peu penchée et la figure sombre cependant que je jouis des émotions inépuisables qui me gorgent (Barrès, Cahiers, t. 4, 1904-06, p. 229).
Emploi pronom. passif. Se remplir jusqu'à saturation. Un bruit sourd d'eau qui ruisselle et dont se gorgeait la terre, montait de tous les watergangs (Van der Meersch, Empreinte dieu,1936, p. 223).Ces petites taches gonflent, se gorgent de sérosité et crèvent laissant écouler un liquide citrin (Garcin, Guide vétér.,1944, p. 227).
Prononc. et Orth. : [gɔ ʀ ʒe]. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1remoitié xives. [date du ms. S] gorjat (G. de Coinci, Mir. Vierge, éd. V. F. Kœnig, I Mir 36, 257 var.); ca 1393 part. passé « rempli (de), bourré » (Ménagier, II, 98 ds T.-L. : un brouet gorgé de lievres, de vëel, de connins). Dér. de gorge*; dés. -er. Fréq. abs. littér. : 164.
DÉR.
Gorgeur, -euse, subst.Personne qui gorge les oies. Synon. gaveur.La « gorgeuse » apparaît. Elle sort, revient, apportant une chaise basse, un crible de maïs et une jarre d'eau. Et c'est le gavage (Pesquidoux, Chez nous,1921, p. 48).[gɔ ʀ ʒ œ:ʀ]. 1reattest. 1921 id.; de gorger, suff. -eur2*, -euse*.

Wiktionnaire

Verbe - français

gorger \ɡɔʁ.ʒe\ transitif ou pronominal 1er groupe (voir la conjugaison) (pronominal : se gorger)

  1. Alimenter avec excès.
    • Vuillet était la bête noire d’Aristide. Il ne se passait pas de semaine sans que les deux journalistes échangeassent les plus grossières injures. En province, où l’on cultive encore la périphrase, la polémique met le catéchisme poissard en beau langage : Aristide appelait son adversaire « frère Judas », ou encore « serviteur de saint Antoine », et Vuillet répondait galamment en traitant le républicain de « monstre gorgé de sang dont la guillotine était l’ignoble pourvoyeuse. » — (Émile Zola, La Fortune des Rougon, G. Charpentier, Paris, 1871, chapitre III ; réédition 1879, page 99)
    • Des coteaux d’Arbois, de Poligny et de Salins, […] les vignerons à rouge trogne bénissaient le Seigneur dont le bon soleil gorgeait de vie les pampres vigoureux et emplissait leurs futailles. — (Louis Pergaud, La Disparition mystérieuse, dans Les Rustiques, nouvelles villageoises, 1921)
    • (Pronominal) Et pourtant les figuiers s'obstinent à pousser spontanément parmi les gravats et je me gorge, sans rien payer, de leurs fruits cramoisis. — (Ludovic Naudeau, La France se regarde : le Problème de la natalité, Librairie Hachette, Paris, 1931)
    • (Figuré)Les enfants aiment les pommes vertes, et les pommes vertes leur font du mal. Il doit en être de même pour le mélodrame, qui indigestionne le public, quand il s’en gorge. — (Émile Zola, La critique naturaliste, 1881)
    • Syn avance de quelques pas qui font crisser la neige et se redresse de toute sa taille, tournant son visage vers le soleil. La chaleur s'accumule et il s’en gorge comme on rechargerait ses batteries. — (Vincent Gessler, Cygnis, L'Atalante, 2010, page 20)
  2. (Par analogie) Remplir à profusion.
    • Ici et là, on voit des péniches accostées à des silos se remplir interminablement de grains poussiéreux. Nulle part on ne les gorge autant qu'à La Chapelle-Montlinard, qui aligne au bord d'un bassin une demi-douzaine de silos, […]. — (Jean Rolin, Chemins d'eau, Editions de la Table Ronde, 2013, chap. 33)
  3. Engraisser certains animaux, en particulier la volaille.
    • On gorge les dindons.
  4. Combler quelqu’un d’avantages au-delà de ses espérances, de ses désirs.
    • On les a gorgés d’honneurs, d’emplois, de biens, d'argent.
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

GORGER. v. tr.
Alimenter avec excès. Il ne faut pas gorger les enfants. On les a gorgés de vin et de viandes. Il signifie spécialement Engraisser certains animaux, en particulier la volaille. On gorge les dindons. Il signifie, figurément et familièrement, Combler quelqu'un d'avantages au-delà de ses espérances, de ses désirs. On les a gorgés d'honneurs, d'emplois, de biens. Gorger quelqu'un d'argent. Spécialement, en termes d'Art vétérinaire, Ce cheval a les jambes gorgées, Il les a enflées et pleines de mauvaises humeurs.

Littré (1872-1877)

GORGER (gor-jé. Le g prend un e devant a et o : gorgeant, gorgeons) v. a.
  • 1Mettre dans la gorge. C'est pendant la nuit qu'elle [la mère d'un pétrel] le nourrit [son petit] en le gorgeant, par intervalles, de la substance du poisson qu'elle pêche tout le jour à la mer, Buffon, Ois. t. XVII, p. 463.
  • 2Il se dit de l'action de l'homme qui gorge des pigeons, des dindons pour les engraisser.
  • 3Donner à manger avec excès. Il ne faut pas gorger les enfants.

    Fig. Combler. On les a gorgés de biens, d'or et d'argent.

  • 4Au reversi, gorger le quinola, contraindre à le jouer.
  • 5 Terme d'artificier. Gorger une fusée, la remplir de composition jusqu'au-dessus de la gorge.
  • 6 Terme de vétérinaire. Tuméfier. Les eaux ont gorgé les jambes de ce cheval.
  • 7 V. n. Au reversi, gorger, être forcé de jouer un as ou un quinola, sans faire le reversi.
  • 8Se gorger, v. réfl. S'emplir de nourriture. Si l'on se gorgeait de boire et de manger, Pascal, Prov. 9.

    Terme de fauconnerie. Un oiseau s'est gorgé, c'est-à-dire il a pris sa nourriture.

    Par extension, se remplir. Les pores vidés d'air se gorgent de celui qui est fourni par les feuilles, Bonnet, Usage des feuilles, 4e mémoire.

    Fig. Un pirate à nos yeux se gorge de butin, La Fontaine, Fianç.

HISTORIQUE

XIVe s. Quant vostre esprevier est gorgé, Ménagier, III, 2.

XVIe s. Des hommes pleins et gorgez de toutes sortes de commoditez, Montaigne, I, 246. Junius se vouloit gorger et remplir de la fortune, ce pendant qu'il la tenoit, Amyot, Galba, 21.

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Encyclopédie, 1re édition (1751)

GORGER, en terme d’Artificier, c’est remplir de composition le trou de l’ame d’un artifice ; ce qui ne se fait que rarement.

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Étymologie de « gorger »

Gorge ; wallon, gourgî, avaler ; saintongeois, gouger.

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(XIVe siècle) Dénominal de gorge.
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Phonétique du mot « gorger »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
gorger gɔrʒe

Fréquence d'apparition du mot « gorger » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « gorger »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « gorger »

  • On la prend souvent pour un légume, mais c’est bien un fruit d’un point de vue botanique. La tomate nous vient du Pérou : ce sont les Incas qui ont été les premiers à la cultiver et à la manger. En France, elle est arrivée au XVIe siècle, mais on l’utilisait alors comme plante d’ornement plutôt que comme aliment. Ce fruit d’été est à déguster entre la mi-juin et la mi-octobre, car la tomate a besoin de se gorger de soleil, de chaleur et de lumière. Une tomate cueillie en hiver sera fade et farineuse, alors qu’elle devient goûtue et charnue une fois l’été venu. Lundi, Marion Sauveur vous propose de la cuisiner en tartare.
    Europe 1 — Comment préparer le tartare de tomates ?
  • Ce qu'il y a parfois de beau avec l'automne, c'est lorsque le matin se lève après une semaine de pluie, de vent et brouillard et que tout l'espace, brutalement, semble se gorger de soleil.
    Victor-Lévy Beaulieu — L'Héritage
  • Notre âme est une bête féroce ; toujours affamée, il faut la gorger jusqu'à la gueule pour qu'elle ne se jette pas sur nous. Rien n'apaise plus qu'un long travail.
    Gustave Flaubert — Mlle Leroyer de Chantepie - 1er Mars 1858
  • Le procédé est simple et sans risque pour la santé : afin d'alourdir le poids des escalopes de poulet surgelées, pourquoi ne pas les gorger d'eau, et ainsi vendre de l'eau au prix du poulet ? C'est une question qu'aurait pu se poser cette entreprise danoise, qui fournit plusieurs associations caritatives françaises, lesquelles ont été surprises à la cuisson desdites escalopes. En effet, la viande rétrécissait considérablement au contact de la chaleur, laissant échapper une quantité de liquide très importante.
    Poulet gorgé d'eau : encore une arnaque ? Ce qu'on sait
  • 1. On commence par laver les framboises sous un léger filet d’eau. Attention, pas à grande eau, sinon elles vont se gorger d’eau et avoir moins de goût. Si elles sont trop acides, on les mélange à un peu de sucre. 
    Europe 1 — La recette de la ganache framboise-chocolat, simple et savoureuse
  • L’entomologiste professionnel à la retraite Robert Loiselle ne peut confirmer l’espèce de cette tique à partir des photos qu’il a observées. Il remarque cependant que la tique était petite, ce qui signifie qu’elle n’avait pas eu le temps de se gorger de sang.
    Le Journal de Québec — Sa fille piquée par une tique: une mère inquiète à Saguenay | JDQ
  • On commence par laver les framboises sous un léger filet d’eau. Pas à grande eau sinon elles vont se gorger d’eau et avoir moins de goût. Si elles sont trop acides, on les mélange à un peu de sucre et on mixe jusqu’à obtenir un mélange bien homogène. Vous allez encore avoir les grains de framboise qui vont chatouiller votre palais. J’aime bien avoir du croquant. Mais si ça vous dérange : passez cette purée dans un tamis.
    Europe 1 — Une ganache frambroise-chocolat
  • En pratique. Pour se forger un rempart solide contre les virus, il faut se gorger d’aliments bien pourvus en zinc : huîtres (39,3 mg/100g), germes de blé grillés (16,7 mg/100g), foie de veau (12 mg/100g), viande de bœuf (9 mg/100g), lentilles (5,5 mg/100g) ou pain complet (5 mg/100g). Les végétariens, les personnes âgées et les femmes enceintes sont souvent déficitaires.
    Femme Actuelle — Laryngite, angine : les meilleurs remèdes naturels contre les maux de gorge : Femme Actuelle Le MAG

Images d'illustration du mot « gorger »

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Traductions du mot « gorger »

Langue Traduction
Anglais gorge
Espagnol garganta
Italien gola
Allemand schlucht
Chinois 峡谷
Arabe الخانق
Portugais desfiladeiro
Russe теснина
Japonais 峡谷
Basque arroila
Corse gola
Source : Google Translate API

Synonymes de « gorger »

Source : synonymes de gorger sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « gorger »

Combien de points fait le mot gorger au Scrabble ?

Nombre de points du mot gorger au scrabble : 8 points

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