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Avoir

Variantes Singulier Pluriel
Masculin avoir avoirs

Définitions de « avoir »

Trésor de la Langue Française informatisé

AVOIR1, verbe.

I.− Emploi trans. Être en relation (concrète ou abstraite, permanente ou occasionnelle) avec quelqu'un ou quelque chose.
A.− [Le suj. désigne une pers., l'obj. désigne soit une chose concr. ou abstr., soit une pers. dont on peut disposer]
1. [Avec l'idée de pouvoir en tirer profit ou parti, d'en jouir] Synon. posséder.
a) [L'obj. désigne un bien matériel] Être en possession de... Avoir un compte en banque, une maison, des rentes; avoir beaucoup d'argent :
1. Va faire ton paquet, et je te mènerai chez M. de Rênal, où tu seras précepteur des enfants. − Qu'aurai-je pour cela? − La nourriture, l'habillement et trois cents francs de gages. Stendhal, Le Rouge et le Noir,1830, p. 19.
2. À Londres, nous avons vécu quelque temps au Savoy, où nous prenions nos repas et où nous avions un petit appartement merveilleux avec une vue sur la Tamise... Gide, Si le grain ne meurt,1924, p. 586.
3. J'ai un complet en tussor beige. Mais il est d'été et m'enrhume. Giraudoux, L'Apollon de Bellac,1942, 5, p. 61.
[Le compl. d'obj. peut être un pron. ou un nominal] :
4. − Écoute, retiens ça... Quand tu n'auras plus rien et qu'ils auront tout, tes enfants te pousseront au ruisseau. Zola, La Terre,1887, p. 40.
[Avec un subst., attribut de l'obj., précédé des prép. comme ou pour] Avoir pour demeure un ancien presbytère.
Loc. Avoir de quoi. Posséder suffisamment d'argent pour parvenir au but recherché (le plus souvent donné par le cont. ou par un inf. suiv. cette loc. : avoir de quoi payer, de quoi vivre) :
5. Qui sait si vous aurez de quoi vous marier? E. de Guérin, Journal,1838, p. 221.
6. Pour tous, c'est-à-dire pour tous ceux qui avaient de quoi. Dans les ménages, l'ordinaire est souvent maigre. Faral, La Vie quotidienne au temps de st Louis,1942, p. 173.
Rem. 1. Le groupe de quoi senti comme un véritable compl. d'obj. a pu être substantivé :
7. Si je ne vous fais rien savoir d'ici vendredi midi, c'est que j'ai pas le temps ou que je n'ai pas de quoi. Je peux pas mieux vous dire. − Vous avez bien le temps et le de quoi, marmonnait le vieux. Malègue, Augustin,t. 1, 1933, p. 205.
Rem. 2. P. ext., la loc. avoir de quoi peut s'appliquer à des biens non matériels. Avoir de quoi causer, avoir de quoi écrire :
8. De tels propos tombés de la bouche d'un évêque dans l'oreille d'un jeune clerc à peu près inconnu de lui avaient de quoi me remplir de stupeur. Billy, Introïbo,1939, p. 66.
[Avec une valeur ingressive] Entrer en possession de, en jouissance de. Synon. obtenir.Nous pouvons avoir, nous avons eu ce livre, cette maison... à bon compte, pour une bouchée de pain :
9. Il m'a transporté pour Clarisse, et je n'aurai point de repos que je n'aye ce précieux livre; ... Sénac de Meilhan, L'Émigré,1797, p. 1567.
P. ext. [L'obj. désigne une chose assimilée à un bien matériel] Avoir une communication téléphonique; avoir la parole; avoir son bac, son train :
10. Je ne leur proposerai certainement pas de lire Grotius ou Pufendorf depuis que nous avons le commentaire de Tracy sur Montesquieu. Stendhal, De l'Amour,1822, p. 208.
11. Au bout de trois semaines, je montai en troisième où j'eus la troisième place. Dupanloup, Journal intime,1851-76, p. 18.
12. − Vous savez qu'il avait toujours, à l'école, le prix de lecture et de récitation. G. Duhamel, La Confession de minuit,1920, p. 174.
b) [L'obj. désigne une pers. dont on peut disposer ou avec laquelle se sont créées des relations prof. ou soc.]
Avoir des collaborateurs nombreux; avoir un bon médecin, de bons professeurs :
13. Nous avons maintenant des couvreurs sur le toit; le tapotement a succédé à l'infection. Flaubert, Correspondance,1867, p. 314.
14. − Ah! m'écriai-je, je n'avais pas songé le moins du monde que Jeanne eût un tuteur. A. France, Le Crime de Sylvestre Bonnard,1881, p. 400.
15. − Si je dois aller en prison, j'aurai quelques-uns de ces messieurs pour me porter mes valises... Van der Meersch, Invasion 14,1935, p. 464.
Dans le lang. amoureux. Posséder, être l'amant (ou la maîtresse) de... Cette femme, il n'a pas été longtemps à l'avoir :
16. M. de (...), qui avait vécu avec des princesses d'Allemagne, me disait : « Croyez-vous que M. de L. ait Madame de S.? » Je lui répondis : « Il n'en a pas même la prétention; il se donne pour ce qu'il est, pour un libertin, un homme qui aime les filles par-dessus tout. − Jeune homme, me répondit-il, n'en soyez pas dupe; c'est avec cela qu'on a des reines. » Chamfort, Caractères et anecdotes,1794, p. 102.
17. ... la Torpille est infiniment mieux que tout cela : vous avez tous été plus ou moins ses amants, nul de vous ne peut dire qu'elle a été sa maîtresse; elle peut toujours vous avoir, vous ne l'aurez jamais. Balzac, Splendeurs et misères des courtisanes,1847, p. 22.
18. Eh bien! oui, elle va avec tout le monde, elle se moque de vous, jamais vous ne l'aurez, ou bien vous l'aurez comme les autres, une fois, en passant. Zola, Au Bonheur des dames,1883, p. 607.
[Avec une idée de réciprocité] Être l'un avec l'autre, être l'un à l'autre. Synon. s'appartenir :
19. Adieu ma toute chérie, rêvons-nous cette nuit; nous nous aurons demain. Tu sais comme je t'embrasse. Flaubert, Correspondance,1846, p. 298.
Péj., fam. Avoir qqn.L'attraper (au propre et au fig.) d'où l'expression se faire avoir :
20. − Les Fridolins? Ils nous auront jusqu'au trognon. Vercors, Le Silence de la mer,1942, p. 12.
21. Je me suis dit : si j'arrive jusqu'à une traboule, ils peuvent courir, c'est pas des Lyonnais, c'est des Boches, jamais ils ne m'auront là-dedans! Voilà... E. Triolet, Le Premier accroc coûte deux cents francs,1945, p. 90.
[Avec un subst., attribut de l'obj., précédé des prép. comme et pour] Avoir pour chef M. X, avoir comme secrétaire Mlle Y :
22. Pour guide nous avons une vierge au teint pâle Qui jamais ne reçut le baiser d'or du hâle Des lèvres du soleil. T. Gautier, La Comédie de la mort,1838, p. 28.
23. ... nous avions pour professeur de rhétorique M. Collignon à qui ma reconnaissance reste acquise, ... Barrès, Mes cahiers,t. 4, 1906, p. 168.
24. À Paris, tout le monde descend. La scène suivante se passe chez Lévy. MmeLévy demande à son mari s'il a fait bon voyage. « Pas mauvais, répond Lévy; mais j'avais pour compagnon de wagon un antisémite... » Gide, Ainsi soit-il,1951, p. 1189.
P. anal. [Avec un subst. désignant une chose abstr., attribut de l'obj.; cet obj. est un inf. introduit par de (ou une prop. introduite par que)] Avoir pour habitude de prendre ses vacances en août :
25. On voit ici quel peut être le rôle du prêtre; il a pour mission de réveiller en nous cette vie palpitante et indivisible. Marcel, Journal métaphysique,1919, p. 199.
c) [L'obj. désigne une valeur quelconque qu'on peut mettre à profit] Synon. rencontrer, bénéficier de.Avoir du beau temps, de la chance, des loisirs :
26. J'aurais eu huit jours de plus de bonheur! ... Gobineau, Les Pléiades,1874, p. 296.
27. Dans quel but veux-tu me cacher que j'ai des droits sur elle et sur son enfant? Pagnol, Fanny,1932, III, 6, p. 191.
28. Il est vrai que, par les antennes de Brazzaville, nous eûmes toujours le moyen de publier ce qui nous parut utile. De Gaulle, Mémoires de guerre,1954, p. 131.
En partic. [L'obj. désigne un espace de temps dont on peut ou dont on doit tirer parti] Avoir le temps de..., une semaine pour..., avoir huit jours de libre :
29. Le train partait à midi, ils avaient le temps. Zola, Une Page d'amour,1878, p. 1092.
30. Un brin de toilette n'était pas de trop. Puisqu'il avait sa soirée libre, tant pis pour la conférence d'internat! On le barbait à la fin. Aragon, Les Beaux quartiers,1936, p. 369.
31. J'aurais aussi bien pu le [Charlie] lancer sur les parfums, les irradiations des poètes; leur température, leur plus ou moins de porosité... Il abondait aussitôt et l'on en avait pour des heures. Gide, Journal,1948, p. 327.
Rem. Dans tous ces cas, la relation peut être négative ou exprimer un excès : avoir du mauvais temps, de la malchance, trop de travail :
32. ... aussi, lorsqu'ils en sont là, il y a certitude qu'ils ont tout au plus six mois à vivre; ... Brillat-Savarin, Physiol. du goût,1825, p. 365.
33. − Vous irez coucher, ce soir, à La Force, répondit-il, j'ai un mandat d'amener décerné contre vous. Balzac, Splendeurs et misères des courtisanes,1847, p. 349.
34. Cartier aurait dit que si M. Zola avait cherché à avoir un procès et à se faire condamner, c'était pour éprouver une sensation qu'il ne connaissait pas encore, celle d'être en prison. Proust, La Prisonnière,1922, p. 41.
2. [Avec une idée de société occasionnelle] Recevoir. Avoir des invités, du monde à dîner :
35. J'ai ici ma sœur Eugénie et mon frère, car mon père qui ne peut plus voyager a été assez bon pour me les envoyer et se résoudre à rester lui deuxième au Cayla. M. de Guérin, Correspondance,1838, p. 367.
36. Voilà... Maintenant, vous restez à dîner? − Oh! Nous sommes aux regrets... C'est impossible... Nous avons du monde aujourd'hui. E. et J. de Goncourt, Renée Mauperin,1864, p. 125.
37. Je sais que vous avez participé ce matin à un de ces déjeuners d'orgie qu'il a avec une femme qui le déshonore. Proust, Le Côté de Guermantes 1,1920, p. 278.
B.− [Le suj. désigne une pers. (ou un animal), l'obj. indique une composante caractéristique du suj. ou une manière d'être momentanée ou permanente]
1. [L'obj. désigne une composante caractéristique du suj.]
a) [Dans le domaine des relations naturelles, électives ou affectives avec d'autres pers.] Synon. compter.Avoir des enfants, de nombreux amis, un amant :
38. − Avez-vous des sœurs? Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe,t. 4, 1848, p. 387.
39. − Oh! oui, répondit-elle, parlez... Protégez-moi... Défendez-moi... Je n'ai plus que vous en ce monde... Ponson du Terrail, Rocambole,t. 1, L'Héritage mystérieux, 1859, p. 35.
40. Mon attention éveillée, il ne me fut pas difficile de découvrir que j'avais des ennemis. Camus, La Chute,1956, p. 1513.
41. Louise habitait avec son mari, le couvreur, une chambre, rue Madame, sous les toits; elle eut un bébé et j'allai la voir avec ma mère. S. de Beauvoir, Mémoires d'une jeune fille rangée,1958, p. 132.
P. anal. Avoir une liaison.
Rem. Dans ce cas, la constr. avoir pour ou avoir comme... est possible. Avoir pour amis M. et MmeX (compter au nombre de ses amis M. et MmeX) :
42. J'ai pour ami d'enfance Andoche Finot, le fils du chapelier de la rue du Coq, le vieux qui m'a lancé dans le voyage pour la chapellerie. Balzac, César Birotteau,1837, p. 155.
43. J'avais pour amies de jeunes femmes mariées d'une façon plus splendide, ... G. Sand, Histoire de ma vie,t. 1, 1855, p. 44.
b) [L'obj. désigne une caractéristique physique ou morale du suj.] Avoir une jambe cassée, une grosse tête; avoir de l'esprit, du courage, de la patience :
44. De plus j'ai une mobilité nerveuse telle que je change de disposition avec la plus grande promptitude suivant les lieux et les sociétés, ... Maine de Biran, Journal,1818, p. 146.
45. Orgueilleux d'être ce proscrit, j'ai l'impertinence de me sentir fier des inimitiés de plume que mon agressive indépendance me suscita. Bloy, Journal,1892, p. 42.
46. Il avait des manières gracieuses. Un véritable homme du monde comme on en voit sur les images. G. Duhamel, Chronique des Pasquier,Le Notaire du Havre, 1933, p. 36.
47. Un sourire sceptique flotta sur les lèvres du juge qui avait de fines moustaches brunes. Simenon, Les Vacances de Maigret,1948, p. 115.
Rem. Dans ces emplois avoir + compl. d'obj. peut souvent être remplacé par des adj. qualificatifs : avoir de l'esprit « être spirituel », avoir de la patience « être patient », etc. [Avec un adj. attribut de l'obj. précisant la caractéristique de celui-ci et précédé d'un prédéterminant (cette constr. correspond à une tournure attributive dans laquelle le « subst.-obj. » serait suj. : il a les cheveux gris = ses cheveux sont gris)] Avoir l'oreille fine, le ventre creux, le nez crochu, la parole facile... :
48. Tous les portiers, (...), regrettaient les spectacles de la place Louis XV, où l'on coupait la tête à des femmes qui, me disait mon propre concierge de la rue de Lille, avaient le cou blanc comme de la chair de poulet. Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe,t. 2, 1848, p. 18.
49. Il avait la voix dure, les gestes fous, et les mères du quartier terrifiaient leurs marmots en menaçant de l'envoyer chercher, comme on envoie chercher les gendarmes. Zola, Au Bonheur des dames,1883, p. 567.
50. Les aliénés ont le meurtre encore plus facile que les hommes ordinaires. Céline, Voyage au bout de la nuit,1932, p. 529.
[Le compl. d'obj. est un pron. représentant une pers. servant de point de réf. et introd. par de] :
51. J'ai beaucoup d'elle dans l'expression du visage, ... Léautaud, In memoriam,1905, p. 188.
52. Ces anciens c'étaient des hommes et j'ai de qui tenir, pas vrai, Carminella? Ne rougis pas, ma femme! C'est la vie. Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 150.
Rem. 1. L'obj. peut être un pron. suivi d'un adj. introd. par de : avoir qqc. de triste, n'avoir rien de commun. 2. Un subst. introd. par une prép. peut jouer le rôle d'attribut de l'obj. : avoir les cheveux en bataille. 3. Une prop. peut aussi jouer le rôle d'attribut de l'obj. : avoir les yeux qui pleurent, le cœur qui saigne.
2. [L'obj. désigne une manière d'être momentanée ou permanente]
a) [La manière d'être est un état gén. passager dont le suj. est affecté] Synon. éprouver, ressentir.
Sur le plan physique. Avoir des rhumatismes, de la fièvre, des douleurs; avoir le vertige, des visions; qu'avez-vous? :
53. Le comte d'Erfeuil suivit Corinne, et pendant huit jours que l'infortunée eut la fièvre et le délire, il ne la quitta point; ... Mmede Staël, Corinne,t. 3, 1807, p. 258.
54. ... j'ai grande peine à marcher, j'éprouve une hésitation, un frémissement, dès que je me trouve debout; la terre semble me manquer, je chancelle, j'ai un léger mal de cœur, et je dois m'appuyer, dans la crainte de tomber; on a des vertiges à la tête, moi je croirais les avoir sous les pieds. Las Cases, Le Mémorial de Sainte-Hélène,t. 2, 1823, p. 516.
55. Il [Chantelouve] était en robe de chambre et il avait la bouche barrée par un porte-plume. Huysmans, Là-bas,t. 2, 1891, p. 26.
56. Moi, j'avais la bouche sèche, j'étais incapable de dire un mot. R. Martin du Gard, Les Thibault,Épilogue, 1940, p. 814.
[Avec un sens positif] Bénéficier de. Avoir une bonne santé, de la force, etc.
[Le compl. d'obj. peut être une prop.] :
57. − Ah ça, qu'est-ce que vous avez? reprit-elle, en le regardant. − J'ai... que j'étouffe; l'odeur de ces cassolettes est intolérable! Huysmans, Là-bas,t. 2, 1891, p. 159.
Sur un plan intellectuel, moral, social, etc. Avoir des ennuis, des soucis, de l'amertume; avoir le cafard :
58. ... nous avons une nouvelle affreuse à t'annoncer. Hugo, Correspondance,1821, p. 322.
59. Elle avait cette idée fixe que je resterais fille. Mauriac, Le Nœud de vipères,1932, p. 67.
60. Déjà ils avaient cet air d'absence qu'on a pour durer et traverser les catastrophes, quand le destin est le plus fort. Guéhenno, Journal d'une« Révolution », Été 1937, p. 195.
[Avec un sens positif] Avoir une idée; avoir des compensations :
61. En arrivant en Italie, elle eut des émotions charmantes. Gobineau, Les Pléiades,1874, p. 141.
62. − Je connais des femmes médecins, apôtres, artistes, dit-il. Elles ont de la décision, de l'intelligence, du sang-froid, de fortes et belles qualités. Chardonne, L'Épithalame,1921, p. 335.
Rem. Les rem. citées plus haut (I B 1 b) sont également valables ici. Les hommes avaient (...) des uniformes en guenilles (Maupassant, Contes et nouvelles, t. 2, Boule de suif, 1880, p. 114), j'ai (...) les joues qui me brûlent (Colette, Claudine à l'école, 1900, p. 59).
Loc. Malgré que j'en aie, plus rarement quoi qu'il en ait, en dépit qu'elle en ait. Quoi que j'(il, elle) éprouve :
63. La pompe de cette cérémonie, cette file noire qui arrêtait la circulation sur son passage (...) tout cela le flattait [Delobelle], l'exaltait, quoi qu'il en eût. A. Daudet, Fromont jeune et Risler aîné,1874, p. 273.
64. Ferrante devait tuer l'amour, éteindre cette lumière, la logique de son destin l'exigeait; mais il meurt en y croyant, malgré qu'il en ait. Montherlant, Notes de théâtre,1954, p. 1081.
b) [L'obj. désigne un vêt.] Synon. porter.Aujourd'hui, il a un costume gris (à distinguer du sens de posséder, cf. supra I A 1 a) :
65. Mais voyez comme ils sont fins! J'ai des gants et pourtant, ils ont vu mon anneau au travers... Camus, Les Esprits,adapté de P. de Larivey, 1953, II, 2, p. 480.
66. Presque nu, et non plus revêtu de la longue robe qu'il avait auparavant, les reins ceints du périzonium, il est sur la croix et expose sa chair martyrisée; Huyghe, Dialogue avec le visible,1955, p. 361.
c) [L'obj. désigne une manifestation passagère du suj.] Avoir un cri, un soupir.
d) [L'obj. est numériquement déterminé] Avoir quinze ans; avoir dix printemps :
67. ... elle a reçu une excellente éducation, et quoiqu'elle n'ait que quatorze ans, elle a des talents et de l'instruction. Sénac de Meilhan, L'Émigré,1797, p. 1663.
Rem. Dans cet emploi, l'âge ne pouvant toujours être déterminé avec précision, le compl. est souvent précédé de dans les qui signifie « environ » :
68. Elle devait avoir dans les vingt ans la petite amie de Robinson, ... Céline, Voyage au bout de la nuit,1932, p. 474.
3. [L'obj. désigne une manière d'être du suj. en relation avec d'autres êtres, et, plus rarement, avec des choses]
a) [L'obj. désigne une chose concr.] Avoir un geste de sympathie, une parole aimable pour chacun; avoir un entretien avec qqn :
69. wanda. − Moi non plus. (Elle hésite, approche un siège et s'assied). Je viens d'avoir avec lui une étrange conversation... sur l'amour! R. Martin du Gard, Un Taciturne,1932, II, 9, p. 1296.
Absol. Avoir un mot malheureux, un geste désabusé.
b) [L'obj. désigne une chose abstr.] Avoir de la sympathie, du goût, une passion pour qqn ou qqc. :
70. ... ce que j'assure et soutiens du fond de mon âme, c'est que je n'ai pour lui que la plus tendre amitié. Mmede Staël, Lettres de jeunesse,1787, p. 164.
71. Ces deux hommes excellents n'avaient qu'une passion, celle de diriger la vie d'un fils et neveu unique. Vigny, Le Journal d'un poète,1842, p. 1176.
72. Là, dans cette gare, Augustin eut, de revoir Anne une grande soif soudaine, douce et déchirante, une agonie de désir qui balaya tout le paysage qu'il avait sous les yeux, et l'envoya souffrir là-bas, dans celui où il n'était pas. Malègue, Augustin,t. 2, 1933, p. 235.
c) Loc. En avoir contre qqn. Lui en vouloir, ressentir à son égard certains griefs :
73. Oui, c'est contre toi qu'il en a, il m'a dit que le coron était empoisonné... Zola, Germinal,1885, p. 1290.
74. − Mais, ajoute-t-il, c'est surtout après l'officier boche que j'en ai. Barbusse, Le Feu,1916, p. 38.
C.− [Le suj. et l'obj. désignent une chose]
1. [L'obj. désigne une (ou plusieurs) des composantes du suj.] Cette maison a 5 pièces; Paris a de beaux musées :
75. La chambre à coucher avait un grand lit, une commode à ventre, des fauteuils; ... Huysmans, Là-bas,t. 1, 1891, p. 122.
76. Les haies n'ont plus que leurs pointes et leurs épines. Renard, Journal,1903, p. 867.
2. [L'obj. désigne une (ou plusieurs) des caractéristiques du suj.] Cette pièce a 3 m de long, cette peinture a une grande valeur, ce travail a le mérite de... :
77. ... il se proposait tout bonnement d'utiliser la propriété qu'ont les filaments de laine, quand on les presse en tous sens, de s'enchevêtrer et de constituer, par leur simple entrecroisement, cette étoffe qu'on appelle feutre. Verne, L'Île mystérieuse,1874, p. 311.
78. ... vous êtes le représentant du roi, mais la patience a des limites... Claudel, Le Livre de Christophe Colomb,1929, p. 1169.
3. [L'obj. désigne un état momentané du suj.] Qu'est-ce qu'a cette voiture? :
79. Le ciel avait un éclat, l'air avait une tendresse, qu'ils ne connaissaient pas. R. Rolland, Jean-Christophe,Le Matin, 1904, p. 201.
80. ... c'était le silence, assez sinistre, du canot à pétrole, en mer, quand le moteur a une panne. Montherlant, Les Célibataires,1934, p. 882.
Rem. gén. Avoir comme + adj. (ou part. passé) ou subst. Cette constr. permet d'énoncer un sentiment, une idée en lui donnant une nuance d'imprécision à l'aide du compar. comme. Synon. pour ainsi dire :
81. J'avais comme un mauvais pressentiment. Villiers de L'Isle-Adam, Contes cruels,Sombre récit, 1883, p. 278.
82. Il y eut comme un sursaut gigantesque dans cette file de deux milliers d'hommes. Benjamin, Gaspard,1915, p. 55.
83. − Je ne sais pas, dit Karelina. J'ai comme senti que c'était vous. Van der Meersch, L'Empreinte du Dieu,1936, p. 16.
II.− Verbe copule de loc. verbales. Le verbe avoir représente l'élément verbal d'une locution exprimant une manière d'être momentanée, occasionnelle ou permanente.
A.− Avoir + subst. (absence de prédéterminant).
1. [Non suivi d'un compl. prép.] Avoir confiance. chaud, cours, faim, froid, honte, mal, nom, peur, pied, pitié, raison, soif, sommeil, tort; n'avoir ni queue ni tête.
2. [Suivi d'un compl. prép. (subst. ou inf.)]
a) [Introd. par la prép. à] Avoir accès à, affaire à, chaud à, droit à, froid à, intérêt à, mal à, part à, peine à, profit à, recours à, etc.; avoir maille à partir, avoir voix au chapitre. Mar. Avoir voile à gré. ,,Porter bien la voile, être bon voilier`` (Lal 1848).
b) [Introd. par la prép. de] Avoir besoin de, conscience de, connaissance de, coutume de, dessein de, envie de, espoir de, garde de, hâte de, honte de, horreur de, idée de, licence de, lieu de, ordre de, peur de, pitié de, raison de, regret de, soin de, sujet de, tort de, vent de, etc.; au fig., avoir faim de, avoir soif de, etc.; avoir charge d'âmes, avoir force de loi, avoir gain de cause, etc.; n'avoir cure.
Rem. Un adv. peut s'intercaler entre avoir et le subst. qui le suit, avoir tout lieu de, avoir si peur de.
c) [Introd. par d'autres prép.] Avoir foi en, avoir barre sur, avoir commerce avec, avoir rang parmi, etc.
3. [Le subst. est qualifié par un adj.] Avoir beau jeu, bon cœur, bon dos, bon espoir, bon goût, bonne grâce, bonne mémoire, mauvaise grâce; avoir carte blanche, etc.
B.− Avoir + prédéterminant figé + subst.
1. [Avec l'art. déf.]
a) Avoir le bourdon, le cafard, l'œil, le pas, le trac (et tous les substituts de peur : avoir les foies, la frousse, la pétoche, la trouille, etc.).
b) [Le subst. peut être qualifié par un adj.] Avoir le beau rôle, le bras long, le cœur gros, le cœur bien accroché, la gorge serrée, la main heureuse, la partie belle, etc.
2. [Avec l'adj. poss.] Avoir ses aises, ses entrées, ses raisons, avoir sa tête, etc.; n'avoir pas son pareil.
3. [Avec l'art. déf. ou l'adj. poss. précédé de de] Avoir de la chance, du goût, du tact, etc. (et tous les substituts de chance : avoir du bol, du nez, du pot, etc.); avoir de ses nouvelles; avoir du bon. Avoir du chien. ,,Faire montre d'entrain ou avoir ce qu'on appelle le feu sacré`` (Sandry-Carr. Th. 1963). Avoir des planches. ,,Avoir du métier`` (Sandry-Carr. Th. 1963).
C.− Avoir + prédéterminant figé + subst. + prép.
1. [La prép. introduit un compl. qui joue le rôle d'un adj. (cf. supra II B 1 b)] Avoir la mort dans l'âme, le cœur sur la main, du pain sur la planche, les larmes aux yeux; avoir la tête à ce qu'on fait; avoir sa tête à soi; avoir les yeux dans sa poche; avoir une femme, un homme dans la peau; avoir les nerfs en pelote, à vif; avoir du vague à l'âme, du plomb dans l'aile.
2. [Les prép. de et plus rarement à introduisent un inf.] Avoir l'avantage de, la bonté de, le courage de, le devoir de, le droit de, la bonne fortune de, le front de, l'habitude de, l'honneur de, l'idée de, l'intention de, la liberté de, le loisir de, l'obligeance de, le plaisir de, le temps de, le tort de; avoir son mot à dire, avoir le cœur à rire, avoir du mal à, avoir d'autres chats à fouetter.
Rem. Le rôle d'une prop. inf. introd. par de peut être tenu par une prop. sub. introd. par que.
D.− Avoir + adj. + inf.Cette constr. ne se rencontre que lorsque beau tient le rôle d'adj. mais avec valeur adverbiale. Avoir beau dire, faire, penser; a beau mentir qui vient de loin.
E.− Avoir + prép. + subst. (déterminé ou non).
1. À. Avoir à cœur, à mépris, à merci; avoir à la bonne, à l'œil.
Rem. Le tour à mépris est un arch., Haase 1914 le cite en le faisant précéder du commentaire suiv. : ,,à précède un substantif attributif, construction très fréquente dans l'ancienne langue et qui subsiste encore dans quelques tours``.
2. En. Avoir en chantier, en horreur, en main, en tête, en vue.
3. Dans. Avoir dans le nez, dans le ventre.
4. Sous. Avoir sous la main.
5. Sur. Avoir sur le cœur.
F.− Loc. diverses
1. L'avoir sec*.
2. L'avoir échappé belle.
3. En avoir... Outre le sens de avoir reçu des coups ou avoir subi une disgrâce, et le sens arg. de en avoir. ,,Être un homme complet`` (Sandry-Carr. 1963) d'où être audacieux, cette loc. entre dans de nombreuses constructions. En avoir le cœur net, en avoir gros sur le cœur, en avoir dans l'aile, en avoir assez (et les tours fam. en avoir marre, plein le dos, plein les pattes, par-dessus la tête, ras le bol), en avoir de bonnes, sans en avoir l'air.
En avoir pour + indication de durée. Avoir besoin de l'espace de temps donné pour faire une chose (exprimée par en).
G.− N'avoir que faire. N'avoir pas besoin de quelqu'un ou de quelque chose, ne pas se soucier :
84. Nous n'avons que faire de l'érudition sans amour, quand il s'agit de Maurice. Mauriac, Journal 1,1934, p. 90.
85. ... j'ai l'impression d'écouter malgré moi à une porte et de recueillir des confidences dont je n'ai que faire. Green, Journal,1945, p. 240.
P. anal. N'avoir que répondre. N'avoir rien à répondre, rien qui permette de répondre :
86. À ça Arsule n'avait que répondre, sauf à tirer sa petite moue. Giono, Regain,1930, p. 171.
Rem. 1. Quelques-unes de ces loc. sont susceptibles de connaître des transformations, p. ex. avoir faim,faim peut être précisé par un adj. : avoir grand faim ou par un compl. de nom, faim étant alors précédé de l'art. figé une : avoir une faim de loup. 2. Des loc. telles que avoir faim, avoir soif peuvent être remplacées par le tour attributif corresp. : être affamé, être assoiffé.
III.− Emploi d'auxil.
A.− [Auxil. de mode]
1. Avoir à + inf. impliquant une idée, plus ou moins nette, d'obligation.Être contraint de. J'ai une lettre à écrire « je dois écrire une lettre » :
87. ... et pour quelques moments brillants de sagesse et de gloire qu'ils [les peuples] pourraient espérer, ils ont toujours à craindre des siècles de désordres et de calamité. Marat, Les Pamphlets,Suppl. de l'Offrande à la Patrie, 1789, p. 44.
88. J'ai maintenant à vous expliquer pourquoi je vous écris de Tours et non de Tocqueville où je devrais et voudrais être. Tocqueville, Correspondance[avec Gobineau], 1853, p. 200.
89. Puis il fallait voir les chemins dont Chargnat avait fait état : qui voudrait exploiter aurait à se lever de bonne heure. Pourrat, Gaspard des montagnes,À la belle bergère, 1925, p. 9.
90. − Alors, tout de même, est-ce qu'on ne pourrait pas me fiche la paix? J'ai à travailler, moi, j'ai à gagner ma vie. Montherlant, Les Célibataires,1934, p. 849.
91. Alors, vous aurez d'abord à réunir un conseil de famille. Druon, Les Grandes familles,t. 2, 1948, p. 184.
Loc. Avoir fort à fairefort équivaut à beaucoup.
2. N'avoir qu'à + inf.Il suffit de... :
92. Je vis. Je souffre encor. Battu de cent naufrages, Tremblant, j'affronte encor la mer et les orages, Quand je n'ai qu'à vouloir pour atteindre le port. Chénier, Élégies,Angleterre nouvelles souffrances, 1794, p. 163.
93. ... mais l'amour-propre bientôt lui dit à l'oreille qu'il n'aurait qu'à paraître pour triompher comme César. T. Gautier, Le Capitaine Fracasse,1863, p. 203.
94. don camille. − Parlez! Vous n'avez qu'un mot à dire. Deux fois déjà vous l'avez appelée. Je sens qu'elle n'attend que votre troisième appel : « Prouhèze, viens! »; elle est là, vous n'avez que son nom à prononcer. Claudel, Le Soulier de satin,1929, 2ejournée, 2, p. 758.
Iron. ou pour voiler une menace. Tu n'as qu'à te tenir tranquille (sous-entendu sinon...)
N'avoir plus qu'à. Il ne reste qu'à ... :
95. Ainsi, je dis zut! aux romans. Je n'aurai plus qu'à patauger dans mes épreuves des Petits bourgeois et du Programme. Balzac, Correspondance,1844, p. 671.
Plus est sous-entendu :
96. « Mais, si elle aime un jeune homme, les vieux n'ont qu'à plier bagage, » ajouta-t-il tristement. Duranty, Le Malheur d'Henriette Gérard,1860, p. 189.
B.− [Auxil. de temps ou d'aspect]
1. [Servant à former les temps composés]
a) [Des verbes trans. y compris le verbe avoir] :
97. Que de chagrins vous eussiez épargnés à toute la famille, si cette amitié avait toujours subsisté entre vous! La Martelière, Robert, chef de brigands,1793, I, 1, p. 3.
98. On lui doit, à coup sûr, d'avoir eu plus tôt le Racine parfait, et de l'avoir eu, dans sa perfection même, plus continuellement ferme et plus inaltérable. Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 5, 1859, p. 475.
99. Une association humaine de l'ordre de celle qui permit au Surréalisme de s'édifier − telle qu'on n'en avait plus connu [sic] d'aussi ambitieuse et d'aussi passionnée au moins depuis le Saint-Simonisme − ne laisse pas d'obéir à certaines lois de fluctuation... Breton, Les Manifestes du Surréalisme,1930, p. 80.
100. Pas une plainte. Pas un cri. Mais le son le plus pur qu'ait jamais formé le désespoir. Saint-Exupéry, Vol de nuit,1931, p. 127.
Rem. Le part. passé s'accorde en genre et en nombre avec le compl. d'obj. du verbe si celui-ci précède le verbe. À l'époque class. et dans certains cas, le part. passé était invariable.
b) [Des verbes intrans. imperf. (c.-à-d. n'aboutissant pas à un état résultant)] Marcher/avoir marché (p. oppos. à arriver/être arrivé) :
101. Elle mentait, Monsieur, elle a toujours menti. Je ne sais pas si dans sa vie cette fille-là a jamais dit un mot de vérité; ... Mérimée, Carmen,1847, p. 35.
102. Viens-tu? Viens-tu? Le coq a chanté, le cheval a henni, la voile est prête. Flaubert, La Tentation de st Antoine,1849, p. 306.
Rem. Le part. passé demeure invariable.
c) [De certains verbes intrans. admettant par ailleurs l'auxil. être, leur sens variant selon l'auxil. utilisé] Changer/avoir changé/être changé; convenir/avoir convenu/être convenu; demeurer/avoir demeuré/être demeuré et aussi augmenter, baisser, crever, croître, dégeler dégénérer, diminuer, disparaître, échouer, embellir, empirer, enlaidir, grandir, grossir, maigrir, paraître, prendre, pourrir, rajeunir, vieillir, etc. :
103. Il est, de tous les sophistes, le plus nuisible qui ait jamais paru, ... Fourier, Le Nouv. monde industr.,1830, p. 30.
104. On dit que pendant longtemps la ville sentit la mort; et je ne suis pas bien sûr que l'odeur ait entièrement disparu. Fromentin, Un Été dans le Sahara,1857, p. 135.
Rem. 1. Avec avoir, le changement est saisi en tant que tel, avec être il l'est dans son résultat. 2. Dans l'usage, une certaine liberté s'est établie, la Gramm. du fr. class. et mod. de Wagner-Pinchon 1962, § 314, cite le cas du verbe passer (traverser un endroit) qui s'emploie avec l'auxil. avoir ou avec l'auxil. être sans différence de sens et donne l'ex. suiv. : Laon? J'y ai passé en 1940 (ou J'y suis passé en 1940). 3. Là encore, le part. passé demeure invariable.
d) [De l'auxil. être] :
105. Cette soirée doit me laisser quelques souvenirs. C'est la seule bonne et où j'aie été moi depuis longtemps. Maine de Biran, Journal,1818, p. 115.
106. Milan a été pour moi de 1800 à 1821 le lieu où j'ai constamment désiré d'habiter. Stendhal, Vie de Henry Brulard,t. 2, 1836, p. 497.
Rem. On trouve, qqf., la forme avoir été pour signifier être allé, v. être :
107. Je suis sorti; j'ai été dans une église et j'ai longtemps prié. Du Camp, Mémoires d'un suicidé,1853, p. 285.
2. [Servant à former les temps composés du passif] :
108. Il peut paraître surprenant que de telles leçons m'ayent été données par un magistrat; ... Sénac de Meilhan, L'Émigré,1797, p. 1578.
109. ... il ressemblait comme il n'a jamais été ressemblé à un petit Allemand, bon, naïf et fidèle, ... Giraudoux, Siegfried et le Limousin,1922, p. 32.
110. Ma dette envers le Louvre est immense. J'ai l'impression d'avoir été nourri et élevé par lui. Green, Journal,1931, p. 68.
111. Il a été descendu par les avions de Balbo, évidemment : il avait un appareil de tourisme. Il a été condamné à six ans, puis il s'est évadé des Lipari. Malraux, L'Espoir,1937, pp. 497-98.
Rem. Avoir lui-même ne connaît pas la tournure passive.
3. [Servant à former les temps surcomposés (double auxil.)] Dès qu'il a eu fini..., dès qu'il a été sorti... :
112. le vice-roi. − Dès qu'il m'a eu atteint j'ai tout quitté et je suis là. Claudel, Le Soulier de satin,1929, 3ejournée, 13, p. 835.
113. Non, c'est trop naturel, je suis venu tout de suite, dès que le petit m'a eu dit... Aragon, Les Beaux quartiers,1936, p. 132.
Rem. 1. Bien que l'auxil. de la voix pronom. soit être, les formes surcomposées s'obtiennent à l'aide de s'être eu : quand il s'est eu blessé; ,,... le groupe s'est devient le signe obligé du pronominal composé, de telle sorte que la forme surcomposée, au lieu de procéder à un décalage dans le passé à l'aide de l'auxiliaire être lui-même auxilié par avoir (...), maintient le groupe s'est qui signifie à la fois état résultant et activité antérieure, et c'est cette idée d'une activité que le sujet a exercée sur lui-même, qui subit le décalage d'antériorité`` (R. Martin, Temps et aspect, Paris, Klincksieck, 1971, p. 66, note 154). 2. Sous la forme du part. passé, avoir entre dans la loc. eu égard*.
IV.− Verbe impers. Il y a.
A.− Morphème de présentation
1. Il y a + subst. (ou pron. prédicatif).Il y a est un présentatif pur comme voici* et voilà*, il peut être suivi d'un subst. précédé d'un art. ou d'un adj. indéf., d'un adj. poss., d'un adj. dém., ou encore de l'art. défini. Il y a opère un choix parmi tous les possibles : il y a le facteur qui passe (parmi tout ce qui peut passer le facteur est distingué) :
114. Nous avons dit que Regnier n'était point un Juvénal; il y en eut un pourtant au xviesiècle, ... Sainte-Beuve, Tabl. hist. et crit. de la poésie fr. et du théâtre fr. au XVIes.,1828, p. 144.
115. Ce qu'il y a eu de jouissances et de poésie dans cette vie de troubadour, nul ne le saura jamais. Baudelaire, Paradis artificiels,1860, p. 331.
116. − Au catéchisme, dit Poucette, il y a une petite fille qui est drôle, elle a les yeux pleins de larmes quand elle parle de Notre-Seigneur. Barrès, Mes cahiers,t. 11, 1914-17, p. 144.
117. Il y avait gros temps au large, un ciel bas et gris, de fortes lames plombées qui cataractaient sur la plage. Gracq, Un Beau ténébreux,1945, p. 13.
Il y a de quoi + inf.[Cet inf. peut être explicite ou implicite] Il y a des raisons pour... :
118. Je crois que mes notes et ma lettre ont été dictées par le bon sens le plus grossier qui ait jamais arrangé des mots et, au risque de te blesser (il y avait de quoi), j'ai cru faire mon devoir de toutes façons, en te déclarant ces choses. Flaubert, Correspondance,1854, p. 6.
119. C'est venu sur moi noir et lourd... Y avait pas de quoi rire, et puis ça m'a plus lâché. Céline, Voyage au bout de la nuit,1932, p. 300.
2. Il n'y a qu'à + inf.En alliance avec le tour exceptif ne... que, il y a présente ce qu'il faut faire et le pose comme suffisant. Synon. il suffit de... :
120. Il n'y a qu'à se faire tout petit. Claudel, Un Poète regarde la Croix,1938, p. 38.
3. Loc. Il y a gros à parier :
121. Il y a gros à parier que, dans un semblable milieu, le mysticisme de Gilles s'est exalté; ... Huysmans, Là-bas,t. 1, 1891, p. 73.
Populaire
Tout ce qu'il y a de... :
122. Une belle galère, ma foi, je l'avoue, haute de bords, bien ramée, couronnée de jolies voiles pourpres, un gaillard tout doré, un bateau tout ce qu'il y avait de capitonné aux endroits pour les officiers, avec en proue un superbe tableau à l'huile de foie de morue représentant « L'Infanta Combitta » en costume de polo. Céline, Voyage au bout de la nuit,1932, p. 228.
C'est... comme il n'y a pas. Signifiant que qqn ou qqc. est comme il n'est pas possible d'être :
123. Un cerveau, c'est tyran comme y a pas. Céline, Voyage au bout de la nuit,1932p. 300.
B.− [Jouant le rôle d'une prép. introduisant un compl. de temps] Il y a sert alors à fixer un point du passé séparé du présent par le délai qu'indique le compl. temporel. : il y a huit jours vise un point du temps situé dans le passé huit jours avant le présent. Il y a s'oppose donc d'une part à dans* qui marque symétriquement un point dans l'avenir à telle ou telle distance du présent et d'autre part à depuis* qui indique un laps de temps écoulé à partir du moment repéré et qui comporte toujours une idée de limite initiale :
124. J'étais alors à peu près instruit des assauts que cette jeune personne avait essuyés; je ne doutais pas qu'il n'y eût longtemps qu'elle avait perdu cette fleur précieuse, qui ne renaît jamais. Restif de La Bretonne, M. Nicolas,1796, p. 53.
125. Il y a à peu près deux mois que je me trouvai à dîner chez Madame d'Olmène. Leclercq, Proverbes dramatiques,La Répétition d'un proverbe ou Il ne faut pas dire : Fontaine, je ne boirai pas de ton eau, 1835, 2, p. 369.
126. Je me trouvai assis près de MmeRécamier. Il y avait douze ans que je ne l'avais rencontrée, et encore ne l'avais-je aperçue qu'un moment. Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe,t. 3, 1848, p. 388.
127. L'ensemble avait dû être de forte et splendide élégance, il y a quelque vingt ans, ... Fargue, Le Piéton de Paris,1939, p. 249.
Le temps du verbe avoir peut varier; il y avait situe un procès par antériorité au moment visé par l'imp. avait. En revanche, avec le fut. ou le passé composé qui ne fournissent pas, à l'encontre de l'imp. et du prés., de limite interne à partir de laquelle on peut évaluer le laps de temps écoulé, on ajoute obligatoirement une indication de temps qui précise l'espace du verbe avoir (il y aura demain..., il y a eu hier...). Mais on constate une tendance à l'invariabilité de il y a dans ses emplois après le tour présentatif c'est (c'était, ce fut, etc.), après la prép. de et après la loc. prépositive jusqu'à :
128. Mon instinct d'il y a trente-six ans ne me trompait pas. Valéry, Correspondance[avec Gide], 1929, p. 508.
Rem. Le pron. suj. il est souvent omis dans le lang. populaire.
C.− Substituts de il y a, morphème de présentation. Le verbe avoir précédé d'un pron. pers. suj. peut présenter lui aussi une phrase du discours et être remplacé sans grande variation de sens par il y a (surtout lorsque les pron. pers. sont nous ou vous avec valeur indéfinie). Vous avez des professeurs qui.../Il y a des professeurs qui... Peut-être peut-on sentir une légère nuance qui donne aux tours avec nous et vous un aspect plus personnel en faisant intervenir la personne de celui qui parle ou la personne de celui à qui l'on parle. C'est pourquoi les tours avec je ou tu présentent eux aussi une phase du discours mais dans laquelle le suj. est directement concerné. J'ai mon frère qui est malade/Il y a mon frère qui est malade.
PRONONC. : [avwa:ʀ]. Conjugaison :
Indicatif
Temps simples
Temps composés
Présent
Passé indéfini
J'ai Nous avons J'ai eu Nous avons eu
Tu as Vous avez Tu as eu Vous avez eu
Il a Ils ont Il a eu Ils ont eu
Imparfait
Plus-que-parfait
J'avais Nous avions J'avais eu Nous avions eu
Tu avais Vous aviez Tu avais eu Vous aviez eu
Il avait Ils avaient Il avait eu Ils avaient eu
Passé défini
Passé antérieur
J'eus Nous eûmes J'eus eu Nous eûmes eu
Tu eus Vous eûtes Tu eus eu Vous eûtes eu
Il eut Ils eurent Il eut eu Ils eurent eu
Futur
Futur antérieur
J'aurai Nous aurons J'aurai eu Nous aurons eu
Tu auras Vous aurez Tu auras eu Vous aurez eu
Il aura Ils auront Il aura eu Ils auront eu
Conditionnel
Conditionnel passé
J'aurais Nous aurions J'aurais eu Nous aurions eu
Tu aurais Vous auriez Tu aurais eu Vous auriez eu
Il aurait Ils auraient Il aurait eu Ils auraient eu

Subjonctif
Temps simples
Temps composés
Présent
Passé
Que j'aie Que j'aie eu
Que tu aies Que tu aies eu
Qu'il ait Qu'il ait eu
Que nous ayons Que nous ayons eu
Que vous ayez Que vous ayez eu
Qu'ils aient Qu'ils aient eu
Imparfait
Plus-que-parfait
Que j'eusse Que j'eusse eu
Que tu eusses Que tu eusses eu
Qu'il eût Qu'il eût eu
Que nous eussions Que nous eussions eu
Que vous eussiez Que vous eussiez eu
Qu'ils eussent Qu'ils eussent eu

Impératif
Présent
Passé
Aie ! Ayons ! Aie eu ! Ayons eu !
Ayez ! Ayez eu !

Participe
Présent
Passé
Ayant Eu
ÉTYMOL. ET HIST. A.− 1. 881-882 « posséder en soi ou sur soi, être doté de » (Séqu. de Sainte Eulalie, 2 ds A. Henry, Chrestomathie de la littér. en a.fr., p. 3 : Buona pulcella fut Eulalia : Bel auret corps, bellezour anima); 2. a) 881-882 « éprouver, concevoir (dans la conscience) » (Ibid., 27, ibid. : Tuit oram que por nos degnet preier Qued auuisset de nos Christus mercit Post la mort et a lui nos laist uenir); b) 950-1000 « éprouver, souffrir de qqc. (dans son corps ou dans son esprit) » (Passion de Clermont-Ferrand, 462, éd. D'Arco Silvio Avalle, p. 122 : Si alcuns d'els beven veren, non aura mal, zo sab per ver). B.− 1. a) 950-1000 « obtenir, devenir possesseur de » (Ibid., 270, p. 111 : Il no l'auseren deramar, mais chi l'aura, sort an gitad); b) ca 1150 « jouir de, posséder sexuellement » (Pèlerinage de Charlemagne, éd. E. Koschwitz-G. Thurau, 694 ds T.-L. : Ci estat Oliviers, qui dist si grant folie. Qu'en une sole nuit avreit cent feiz ma fille); c) 1690 « mettre (qqn) en son pouvoir, attraper » (Fur. : Je l'auray, on sous-entend, en mon pouvoir); 2. a) ca 1040 « posséder, être possesseur de » (Vie de Saint Alexis, 402, éd. G. Paris, p. 14 : O filz, cui ierent mes granz ereditez, Mes larges terres dont jo aveie assez, Mi grant palais en Rome la citet?); d'où b) ca 1040 indique une relation, le rapport de possession étant très atténué (Ibid., 150, ibid., p. 6 : Quant n'ai ton fil, ensemble o tei vueil estre). C.− 1. 950-1000 auxil. servant à former les temps composés de nombreux verbes pour exprimer l'action accomplie (Passion de Clermont-Ferrand, 137 ds K. Bartsch, Chrestomathie de l'a. fr., p. 8 : Et cum asez l'ont escarnid, dunc li vestent son vestiment, et el medeps si pres sa cruz, avan toz vai a pasïun); 2. ca 1040 auxil. d'aspect avec l'inf. et la prép. à, sert à exprimer l'action qui doit être accomplie (Vie de Saint Alexis, 33e, éd. G. Paris et L. Pannier, 1872, p. 147 : Por amistet ne d'ami ne d'amie, Ne por honors qui lui fussent tramises, N'en volt torner tant com il ad a vivre). D.− Impers. il y a. Ca 1040 sans l'adv. de lieu y (Alexis, éd. G. Paris et L. Pannier, 14c ds T.-L. : En icest siecle nen at parfite amor); ca 1100 (Roland, éd. Bédier, 734 : Dient Franceis que grant bataille i ad). Du lat. habere (FEW, t. 4, pp. 361-365) « tenir, occuper » (Caton, Orig., 7 ds TLL s.v., 2401, 48; Ennius, Scaen., 259, ibid., 35) et « habiter » − cf. habitare « habiter » − (Naevius, Com., 83, ibid., 14) également « se tenir » − cf. fr. habit, habitude − (Cicéron, Fam., 9, 9, 1 ds Ern.-Meillet, p. 287) attesté dep. le iiies. av. J.-C. au sens A 1 (Naevius, Trag., 54 ds TLL s.v., 2397, 8; Plaute, Poen., 87, ibid., 2410, 4), au sens A 2 a dep. le iiies. av. J.-C. (Livius Andronicus, Carm., frg. 13, ibid., 2403, 69), au sens A 2 b dep. Caton (Agr., 157, 9, ibid., 28); attesté au sens gén. de « posséder », B 2 a dep. Plaute (Asin., 189, ibid., 2398, 34), au sens B 2 b dep. Cicéron (De Orat., 1, 82, ibid., 2421, 16) et au sens de « avoir en son pouvoir » (Ovide, Met., 1, 187, ibid., 2430, 81) à rapprocher de B 1 c; attesté dès Caton comme auxil. de temps avec le part. passé d'un verbe et un compl. d'obj. (Caton, Agr., 3, 1, ibid., 2452, 73 : aedificare oportet, si agrum consitum habeas), cf. passé composé équivalent au parfait (Cicéron, Font., 29, ibid., 75 : quae comperta habemus, quae ipsi vidimus); attesté dep. Varron suivi d'un infinitif avec un sens d'obligation (Varron, R.R., 1, 1, 2 ds Ern.-Meillet, p. 287), il prend le sens de « avoir à » C 2 (Sénèque, Contr., 1, 1, 19 ds TLL s.v., 2454, 59 : quid habui facere); attesté en lat. chrét. à la 3epers. du sing. comme impers. « il y a » D (Saint-Jérôme, Commentarius in Ezech., 11, 2 − p. 97b, ibid., 2461, 80 : in Hebraeo ... non habet hunc numerum.. sed tricenarium).
STAT. − Fréq. abs. littér. : 1 237 605. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 773 315, b) 1 767 131; xxes. : a) 1 756 713, b) 1 746 879.
BBG. − Argelès (P.). Avoir et être. Intermédiaire des chercheurs et des curieux. 1899, t. 40, col. 112-114, 396, 488-489. − Aubert de La Rüe (E.). Le Fr. parlé aux îles Saint-Pierre-et-Miquelon. Vie Lang. 1969, p. 246. − Baker (A. T.). Le Fut. des verbes avoir et savoir. Romania. 1937, t. 63, pp. 1-30. − Bambeck (M.). Galloromanische Lexikalia aus volksprachlichen mittelterlichen Urkunden. In : [Mél. Gamillscheg (E.)]. München, 1968, p. 69. − Bél. 1957. − Bernelle (A.). L'Intermédiaire des linguistes curieux. Vie Lang. 1957, pp. 380-381. − Böström (N. E., I, F.). Les N. abstr. accompagnés d'un inf. et combinés avec avoir... Lund, Copenhagen, Paris, 1957, 261 p. − Braümer (W.). La Loc. n'avoir garde : son orig. et son hist. B. jeunes Rom. 1965, no11/12, pp. 21-29. − Bruant 1901. − Canada 1930. − Cassagnau (M.). Curiosités gramm. Une singularité ds la conjug. du verbe avoir et ds celle du verbe être. Vie Lang. 1963, pp. 403-404. − Chevalier (J.-C.). Exercices portant sur le fonctionnement des présentatifs. Lang. fr. 1969, no1, pp. 89-92. − Cohen 1946, pp. 31-33. − De Kock (J.). Avoir et être, auxil. de qq. régisseurs intrans. Une explication « actancielle ». Ling. antverp. 1968, pp. 109-114. − De Kock (J.). Avoir et être auxil. des formes actives, passives et pronom. Trav. Ling. Gand. 1969, no1, pp. 13-69. − Dem. 1802 (s.v. auxiliaire). − Dokoupil (G.). Elle eut un cri. Contribution à l'éclaircissement d'un fait ling. In : [Mél. Haškovec (P. M.)]. Brünn, 1936, pp. 110-115. − Duch. 1967, § 45, 63. − Duch. Beauté 1960, p. 76. − Engwer (T.). Avoir und être als Hilfsverben bei Intransitiven. Rom. Forsch. 1951, t. 63, pp. 79-94. − Foulq.-St-Jean 1962. − France 1907. − France Suppl. 1907. − Gaatone (D.). Avoir comme instrument de transformation... Vox rom. 1972, t. 31, pp. 92-98. − Georgin (R.). Le Fr. au Canada. Déf. Lang. fr. 1969, no47, p. 44. − Gottsch. Redens. 1930, passim. Gougenheim (G.). Une Catégorie lexico-gramm. : les loc. verbales. Et. Ling. appl. 1971, no2, pp. 56-64. − Goug. Lang. pop. 1929, passim.Goug. Mots t. 1 1962, passim. − Gramm. t. 1 1789. − Guiraud (P.). Le Champ morpho-sém. du mot tromper. B. Soc. Ling. 1968, t. 63, no1, p. 100. − Guiraud (P.). Mél. d'étymol. arg. et pop. Cah. Lexicol. 1970, t. 17, no2, p. 12. − Henricus. Avoir et être. Intermédiaire des chercheurs et des curieux. 1899, t. 39, col. 932-933. − Henry (A.). C'était il y a des lunes. Ét. de synt. fr. Paris, 1968, 134 p. − Hofmann (F.). Avoir und estre in den umschreibenden Zeiten des altfranzösischen intransitiven Zeitworts. Berlin, 1890, III-65 p. − Klein (H.-W.). La Répartition des verbes auxil. avoir et être ds l'usage mod. Classe (La) de fr. 1956, t. 6, pp. 298-302. − Kosmata (R.). Beobachtungen zum Gebrauch der Hilfsverben avoir und être im modernen Französisch. Vox rom. 1965, t. 24, pp. 238-268. − Larch. 1880. − Larch. Suppl. 1880. − La Rue 1954. − Le Bidois (R.). A propos des mots-tandem. Vie Lang. 1954, pp. 554-558. − Legros (E.). Avoir, eu et savoir, su à Liège du xviies. à nos jours. In : [Mél. Delbouille (M.)]. Gembloux, 1964, pp. 363-380. − Le Roux 1752. − Macr. 1883. − Mat. Louis-Philippe 1951, passim.Orr (J.) Vous avez beau faire. Sém. et synt. R. Ling. rom. 1957, t. 21, pp. 197-208. − Piron (M.). Barbe de paille ou barbe d'or. Vie Lang. 1953, pp. 567-568. − Pierreh. 1926. − Pierreh. Suppl. 1926. − Sandry-Carr. 1963. − Sandry-Carr. Courses 1963. − Sandry-Carr. Cycl. 1963. − Sandry-Carr. Peintres 1963. − Sandry-Carr. Th. 1963. − Spr. 1967. − Staaf (E.). Qq. rem. sur le fut. du verbe avoir en fr. In : [Mél. Salverda de Grave (J.-J.)]. Groningue, 1933, pp. 312-317. − Timm. 1892. − Todorov (C.). La Hiérarchie des liens ds le récit. Semiotica. 1971, t. 3, no2, p. 126, 129, 131. − Tournemille (J.). Au jardin des loc. fr. Vie Lang. 1955, pp. 102-103, 242-243, 338-340; 1956, pp. 194-195, 530-531; 1959, pp. 64-65, 631-633; 1964, pp. 496-498; 1965, pp. 83-86; 1967, pp. 291-292. − Treder (M.). Über die Verbindung von avoir und être mit intransitiven Verben. Berlin, 1915, 96 p. − Van Ginneken (J.). Avoir et être (du point de vue de la ling. gén.). In : [Mél. Bally (C.)]. Genève, 1939, pp. 83-92. − Vendryes (J.). Sur l'emploi de l'auxil. avoir pour marquer le passé. In : [Mél. Van Ginneken (J.)]. Paris, 1937, pp. 85-92. − Wind 1928, p. 17.

AVOIR2, subst. masc.

Biens mobiliers et immobiliers, fortune que l'on possède :
1. 1930. − Instituteur Mayenne, 28 ans, avancement prochain, épouserait collègue libre penseuse avec avoir sérieux. Montherlant, Les Jeunes filles,1936, p. 925.
2. ... les individus possèdent une fortune en titres ou en avoirs liquidables sans perte qu'ils peuvent destiner à une nouvelle affaire. Perroux, L'Écon. du XXes.,1964, p. 215.
En partic. Argent liquide dont dispose une personne en voyage :
3. Cela me suffisait et je n'étais nullement désireux de mener plus loin l'aventure, d'autant plus que je portais sur moi tout mon avoir et risquais gros, ... Gide, Carnets d'Égypte,1939, p. 1054.
COMPTAB. Partie droite d'un compte où sont portées les sommes dues par opposition à la partie gauche appelée doit*. ,,En comptabilité nationale le mot avoir a été remplacé par ressources et le mot doit par emplois`` (Pujol1970).
Au fig. :
4. Ils se sont faits les comptables de l'humanité. Mais c'est pour augmenter continuellement le doit et pour diminuer frauduleusement les avoirs. Péguy, L'Argent,1913, p. 1195.
Avoir fiscal. ,,Partie de dividende payée directement au fisc par la société émettrice mais qui vient en déduction de l'impôt sur le revenu. L'avoir fiscal doit être mentionné sur la déclaration d'impôts`` (Lemeunier 1969).
PHILOS. Parmi les dix catégories d'Aristote, celle qui exprime la relation du contenant au contenu, du possesseur à la chose possédée. ,,Dans une dialectique de l'être et de l'avoir, l'avoir est considéré comme ce qui peut être ajouté ou retranché, tandis que l'être est fondamental ou totalement assimilé`` (Miq. 1967) :
5. Être et avoir. − L'homme n'a pas d'être, il n'a que de l'avoir. S. Weil, La Pesanteur et la grâce,1943, p. 46.
6. ... c'est pourquoi la possession est le siège des passions − les passions de l'avoir − et ne rend pas compte de l'essence du consentement; ... Ricœur, Philos. de la volonté,1949, p. 324.
PRONONC. : [avwa:ʀ].
ÉTYMOL. ET HIST. − 1. Ca 1040 « biens, fortune » (Alexis, éd. G. Paris et L. Pannier 12c ds T.-L. : Que plus at cheir que tot aveir terrestre); 2. 1689 comptab. « partie d'un compte où sont portées les dettes actives » (J. Savary, Le Parfait Negociant, 2eéd., I, 333 ds Alwin Kuhn, Die Französische Handelssprache im 17. Jahrhundert, p. 171 : un tel doit donner [...] avoir ledit tel). Substantivation de avoir1*.
BBG. − Bach.-Dez. 1882. − Banque 1963. − Baudhuin 1968. − Comm. t. 1 1837. − Lar. comm. 1930. − Lemeunier 1969. − Marshall (F. W.). Les Poésies de Blondel de Nesle. Une ét. du lex. d'après l'examen des mss. Paris, 1958, pp. 39-42. − Miq. 1967. − Pujol 1970. − Réau-Rond. 1951. − Réau-Rond. Suppl. 1962. − Romeuf t. 1 1956.

Wiktionnaire

Nom commun - français

avoir \a.vwaʁ\ masculin

  1. (Philosophie) Ce que possède un individu.
    • Pour les hommes de Chronos, l’avoir d’un passé ne saurait être analogue à l’avoir des choses ; bien que mort et irretrouvable, ou plutôt parce que mort et irretrouvable, notre passé nous possède plus que nous ne le possédons. — (Micheline Sauvage, Le cas Don Juan, 1953, page 102)
  2. Ensemble des biens et richesses appartenant à un individu ou à une personne morale, possession.
    • M. Donnet, son père, a été maire de Caen pendant toute la durée du gouvernement de Juillet. Pourchassé sous le second Empire il perdra tout son avoir. — (Joseph Caillaux, Mes Mémoires, I, Ma jeunesse orgueilleuse, 1942, page 13)
    • Le 26 juillet : Nasser nationalise le Canal de Suez et décide de geler tous les avoirs de la Compagnie universelle du canal de Suez. — (Wikipédia, année 1955)
    • Par la nature de leurs richesses : ces bourgeois fortunés sont des « terriers » comme on dit à Lyon ; ils ont investi une grande part de leur avoir dans des fonds. — (Georges Duby et Robert Mandrou, Histoire de la civilisation française, tome 1, Armand Colin, 1958; édition de 1968, page 143)
  3. (En particulier) (Comptabilité) Somme d’argent qu’un établissement commercial (banque, entreprise, etc.) doit à son client, solde créditeur.
    • Les plaignants souhaitent poursuivre la compagnie aérienne canadienne qui a choisi d’offrir à ses clients américains des avoirs pour des voyages futurs et non des remboursements, a indiqué CTV News. — (Agence QMI, Air Canada pourrait se retrouver dans l’eau chaude, Le Journal de Montréal, 1er novembre 2020)
    • Vous avez un avoir de cent euros.
  4. Le fait de posséder, par opposition au fait d'être ou de faire.
    • Avoir ou être? La civilisation de consommation, inhumaine et aberrante, nous impose dès l'enfance la loi de l'avoir donc de la souffrance. — (Arnaud Desjardins, Les chemins de la sagesse, La Table Ronde, Pocket spiritualité, 1999, page 257)

Verbe - français

avoir \a.vwaʁ\ transitif direct 3e groupe (voir la conjugaison)

  1. Être en relation possessive, soit concrète ou abstraite, soit permanente ou occasionnelle, dont le possesseur est le sujet et le possédé est le complément d’objet direct.
    • Et les cédilles, ça ressemblait à rien ces zigouigouis, quant au verbe avoir qui s’accordait tantôt avec le complément d’objet direct tantôt pas, c’était un cauchemar. — (Akli Tadjer, Alphonse, Jean-Claude Lattès, 2005)
    • Pierre a deux filles. Cadet Rouselle a trois maisons.
    • La Mongolie n’a que deux voisins : la Russie et la Chine.
    • L’antilope a plusieurs prédateurs. J’ai un beau chapeau.
    • J’ai un très bon emploi.
    • Nous avons un logement très agréable.
    • Hélas ! Il mourra donc ! Il n'a pour sa défense
      Que les pleurs de sa mère et que son innocence.
      — (Jean Racine, Andromaque, 1667)
    • Je n’ai plus beaucoup d’argent.
    • Il avait ce jour-là un costume bleu. (porter)
    • Vous avez de la boue sur vos habits.
    • Ce bébé a de très beaux yeux.
    • J’ai un bras cassé.
    • Avoir affaire à quelqu’un ou avec quelqu’un.
    • Avoir l’âge de raison, avoir vingt ans.
    • Avoir de l’agilité.
    • Avoir quelque chose en aversion, sur le cœur.
    • Avoir peur, avoir la crainte de quelque chose.
    • Avoir des douleurs, avoir de la fièvre, la grippe, une angine, le sida, la tuberculose…
    • Avoir de la force, être fort.
    • Avoir soin de faire quelque chose.
    • Avoir froid, chaud, avoir faim, soif…
    • J’ai mal à la tête.
    • Cet oiseau a un très beau chant.
    • Avoir de l’ascendant, de l’autorité sur quelqu’un.
    • Avoir la confiance de quelqu’un.
    • Tu peux avoir confiance en lui, je le connais.
    • Avoir l’estime de quelqu’un, avoir de l’estime pour quelqu’un.
    • Avoir des qualités, avoir des vertus, des vices…
    • J’ai eu beaucoup de peine en apprenant son décès.
    • Avoir [la] foi (en quelque chose ou en quelqu’un)
    • Avoir honte (de quelque chose)
    • Avoir pitié (de quelqu’un)
    • Avoir raison, avoir tort.
    • Avoir des sentiments (pour quelqu’un)
    • Avoir du temps devant soi, avoir le temps…
    • Cet enfant a peur du loup.
    • Vous n’avez pas le droit de faire ça.
    • Avoir de la pluie, du beau temps…
    • Nous allons sûrement avoir beau temps cet après-midi.
    • Avoir un père, une mère, une femme, des enfants, une nombreuse parenté…
    • Avoir un médecin, un notaire, un avocat…
    • Avoir un maître, des domestiques, un chef…
    • Avoir des élèves, des auditeurs…
    • Avoir des poux, des puces…
    • Avoir des convives, des hôtes…
    • Avoir des amis, des ennemis…
      • Avoir des correspondants, des associés, des complices…
    • Avoir des gens à sa suite.
    • Avoir quelqu’un chez soi.
    • Avoir une personne à dîner, à déjeuner…
    • Cette ville a de beaux édifices, des rues larges, de vastes promenades.
    • Votre château a un parc magnifique.
    • Ma maison a cinq étages, a une belle vue.
    • Cette table a deux tiroirs.
    • Cette plante a de très belles fleurs.
    • Cette planche a six pieds de long.
    • Ce fruit a une forme allongée, une belle couleur.
    • L’architecture de cet édifice a un caractère imposant.
    • Cette poésie a de la douceur et de la grâce.
    • Ce rêve a quelque chose d’effrayant.
    • Cette pièce a beaucoup de succès.
    • Un tel accident peut avoir des suites.
    • Les plaisirs ont leurs dangers.
    • Cette maison a vingt locataires.
    • Cette ville a dix mille habitants.
    • Cet ouvrage a pour auteur un écrivain distingué.
    • Cette doctrine a de nombreux partisans.
    • Il a l’œil bleu.
    • Il a les cheveux blonds.
    • Si le monopole a pour but d’enrichir l’état, il a pour devoir de satisfaire à toutes les exigences de la consommation, […] — (Maxime Du Camp, Les Manufactures de Tabac : les établissemens du Gros-Caillou et de Reuilly, dans Revue des Deux Mondes, tome 76, 1868)
    • Ce canal, ouvert sur la rive gauche du Rhône, a pour but d’offrir à la navigation une voie indépendante des accidents du fleuve. — (Pierre-Joseph Proudhon, Canal d’Arles à Bouc, dans Manuel du Spéculateur à la Bourse, 1875)
  2. (Intransitif) Être dans un certain état, anormal.
    • Qu’est-ce que tu as ? Tu te sens mal ?
  3. Se procurer, obtenir quelque chose.
    • Il a eu tout ce qu’il demandait.
    • J’ai eu ce cheval à très bon marché.
    • Puis-je avoir la parole ?
  4. (Familier) Tromper, berner, leurrer quelqu’un[1].
    • J’ai l’impression que je me suis fait avoir.
    • Je t’ai eu.
    • Que pensent-ils de moi ? Que j’ai été battu sans doute, que j’ai cédé. « Ils m’ont eu. » — (François Mauriac, Le Nœud de vipères, Grasset, 1933, réédition Le Livre de Poche, page 143)
  5. (J’ai … qui …) (Populaire) Introduit une nouvelle information concernant le locuteur sans relation thème-rhème.
    • Oui, j’ai mon amie qui m’attend. — (Michèle Rakotoson, Elle, au printemps, 1996, ISBN 2907888641, page 22)
    • J’ai ma mère qui est malade.
  6. (Auxiliaire) Auxiliaire servant à former les temps composés, signifiant le passé, la complétion ou l’expérience. Note : Certains verbes demandent être comme auxiliaire. En français moderne, le passé composé est beaucoup plus courant que le passé simple.
    • Ça humait l’accord du participe passé avec l’auxiliaire avoir quand le complément d’objet est placé sans devant derrière. — (Dominique Lemaire, Le trèfle à quat’feuilles, Éditions L'Age d'Homme, 1987, p. 29)
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Littré (1872-1877)

AVOIR (a-voi. Au XVIe s. on écrivait aurai, auras, etc. mais on prononçait, d'après Bèze, arai, aras, etc. Au XVIIe s. d'après Dangeau, ayant, ayons, ayez se prononçaient a-iant, a-ions, a-iez. Aujourd'hui, c'est une prononciation fautive : il faut dire éiant, é-ions, é-iez. À Paris le peuple prononce eü ou evu au lieu de u [eu] ; c'est un archaïsme sur lequel on débattait encore au XVIIe siècle ; la prononciation u est aujourd'hui la seule correcte), j'ai, tu as, il a, nous avons, vous avez, ils ont ; j'avais ; j'eus, nous eûmes ; j'aurai ; j'aurais ; aie, ayons, ayez, qu'ils aient ; que j'aie, que tu aies, qu'il ait, que nous ayons, que vous ayez, qu'ils aient ; que j'eusse, que nous eussions ; ayant ; eu, eue v. a.
  • 1Posséder un objet physique, posséder quelqu'un ou quelque chose dans un certain état. Il a une propriété patrimoniale sur notre commune. Il faut user de ce qu'on a. Avoir de la fortune. Avoir des alliés. N'avoir pas d'enfants. Il n'a pas d'argent. N'avoir rien. Il eut un père très illustre. Et de quelques bons yeux qu'on ait vanté Lyncée, Il en a de meilleurs, Malherbe, II, 12. Il a l'oreille rouge et le teint bien fleuri, Molière, Tart. II, 3. J'ai pour aïeul le père et le maître des Dieux, Racine, Phèdre, IV, 6. J'aurais à cette heure de quoi vous écrire un beau poulet, Voiture, Lett. 38.

    Familièrement. Avoir de quoi, être dans l'aisance.

  • 2Porter, tenir. Avoir à la main une coupe, une boîte. Ayant un casque sur la tête. Il n'avait pas de canne en venant.

    En termes de jeux, avoir la boule, le dé, etc. Être en tour de jouer ou être le premier à jouer.

  • 3 Fig. Posséder une chose immatérielle, une qualité ; éprouver une sensation ou un sentiment ; être dans un état ; être âgé de ; être d'une dimension de. Qu'avez-vous ? c'est-à-dire quelle est votre émotion ? Avoir droit sur quelque chose. Avoir la paix. Avoir dans l'esprit. J'ai l'intention de. J'ai une opinion tout à fait opposée. Les hommes qui ont de la prudence. Ces gens ont coutume de. J'ai eu de la peine à me contenir. Avoir mal à la tête. Il avait vingt ans. Rue qui a 10 m. de large. Ces enfants… Ayant Dieu dans leur cœur ne le purent louer, Malherbe, I, 4. Et, pourvu qu'il soit cru, nous n'avons maladie Qu'il ne sache guérir, Malherbe, II, 12. Mais serait-ce raison qu'une même folie N'eût pas même loyer, Malherbe, ib. Tu as donc familiarité avec le prince d'Ithaque, Molière, la Princ. d'Él. III, 3. Le désir se fait mieux sentir parce qu'il a de l'agitation et du mouvement, Bossuet, le Tellier. Qu'avez-vous donc, dit-il, que vous ne mangez point ? Boileau, Sat. III. J'ai beaucoup de plaisir à voir les choses que j'avais imaginées, Voiture, Lettr. 38. Ayant un empire absolu sur les esprits, Boileau, Longin, Sublime, 32. Ah ! n'aie point pour moi si grande indifférence, Molière, l'Étour. II, 7. Je vous écris à la vue de la terre de Barbarie, et il n'y a entre elle et moi qu'un canal qui n'a pas plus que trois lieues de largeur, bien que ce soit l'Océan et la mer Méditerranée tout ensemble, Voiture, Lettr. 39. Le fer qui les tua [des enfants] leur donna cette grâce Que, si de faire bien ils n'eurent pas l'espace, Ils n'eurent pas le temps de faire mal aussi, Malherbe, I, 4. Quand j'avais de ma foi l'innocence première, Si la nuit de la mort m'eût privé de lumière, Je n'aurais pas la peur d'une éternelle nuit, Malherbe, ib. Eh bien ! ne mangeons plus de chose ayant eu vie, La Fontaine, Fab. X, 5. Ce qu'il y a eu en lui de plus éminent, c'est l'esprit qu'il avait sublime, La Bruyère, 1. Trouvant que j'avais peu de latin, il entreprit de m'en enseigner davantage, Rousseau, Conf. III. Oui, monsieur, seulement pour vous faire peur, et vous ôter l'envie de nous faire courir toutes les nuits, comme vous aviez de coutume, Molière, Scap. II, 5. Que, depuis quarante-deux ans qu'il servait le roi, il avait la consolation de ne lui avoir jamais donné de conseil que selon sa conscience, Bossuet, le Tellier.

    Par analogie il se dit des choses. Cette ville a de beaux édifices. Cette maison a beaucoup de locataires. Ah ! sire, un tel honneur a trop d'excès pour moi, Corneille, Hor. V, 2. Si tu l'aimes encor, ce sera ton supplice. - Je n'en murmure point, il a trop de justice, Corneille, Cinna, V, 3. Lorsque l'obéissance a tant d'impiété, La révolte devient une nécessité, Corneille, Rodog. III, 5. Seigneur, quand ce dessein aurait quelque justice, Corneille, Nicom. V, 5. Ce projet qui pour vous est tout brillant de gloire, N'aurait-il rien pour moi d'une action trop noire ? Corneille, Sertor. III, 2. Un moment de sa perte a pour moi des supplices, Corneille, ib. III, 4. Toutes les autres morts n'ont mérite ni marque ; Celle-ci porte seule un éclat radieux, Malherbe, II, 12. Les sceptres devant eux n'ont point de priviléges, Malherbe, ib. À ce coup nos frayeurs n'auront plus de raison, Puisque par vos conseils la France est gouvernée, Malherbe, IV, 2.

  • 4Trouver, rencontrer. Nous avons des gens capables d'exécuter votre projet. En te perdant j'ai sur qui me venger, Corneille, Rod. II. J'avais pour de tels coups certaine vieille en main, Molière, Éc. des f. III, 4. Et quand on a quelqu'un qu'on hait ou qui déplaît, Lui doit-on déclarer la chose comme elle est ? Molière, Mis. I, 1.
  • 5Se procurer, acquérir, obtenir, gagner, acheter. Ce qu'on a pour de l'argent. On a quatre pommes pour dix sous. On ne peut rien avoir de cet ouvrier. La cabale s'est réveillée aux simples conjectures qu'ils ont pu avoir de la chose, Molière, 2e placet au roi. Et que j'avais de quoi le connaître, Pascal, dans COUSIN. Il a trouvé le moyen de faire avoir des bénéfices sans argent, Pascal, Prov. 12.
  • 6Avoir à, suivi d'un infinitif, être chargé du soin de, être dans le cas de. Avoir une terre à cultiver. Il a de grands travaux à exécuter. Je n'ai absolument rien à vous écrire. Je n'ai rien à craindre. J'ai eu à choisir. Comme il y a toujours une grande différence entre les choses qui ont à être et celles qui sont en effet…, Voiture, Lett. 124. Vous avez à combattre et les dieux et les hommes, Racine, Iphig. V, 3. J'ai votre fille ensemble et ma gloire à défendre, Racine, ib. IV, 7. Que je serais heureux si j'avais à le faire, Racine, Bérén. III, 1. Son pouvoir n'ayant plus à s'étendre plus loin, Il brise l'instrument dont il n'a plus besoin, Rotrou, Bélis. V, 5. Il fut ensuite au sénat, et il demanda qu'on eût, par un sénatus-consulte, à dégager sa parole et à abolir toutes les dettes, Vertot, Révol. rom. liv. I. Le sénat lui ayant fait dire [à Mithridate] qu'il eût à retirer ses troupes de toutes ces provinces, Vertot, ib. liv. X, p. 33. On publia le décret du sénat qui ordonnait qu'on eût à les poursuivre aux dépens du public, Vertot, ib. liv. X, p. 45. Il nous fait remarquer que nous ayons à lui préparer les voies, Massillon, Délai.

    N'avoir qu'à, n'avoir rien autre chose à faire que de. Vous n'avez qu'à lever les yeux. Vous n'avez qu'à dire un mot, et la chose sera faite.

  • 7Avoir de, tenir de, avoir reçu de. J'ai cette terre du chef de mon père. De qui avez-vous la nouvelle ?
  • 8Engendrer, créer. Il avait des enfants de ses deux femmes. Elle a un fils du roi, Sévigné, 216.
  • 9Imiter, reproduire. Avoir les traits de quelqu'un. Elle n'avait d'une femme que le corps. Il a tout votre air. Avoir la couleur du minium.
  • 10Avoir pour, regarder comme. Avoir pour suspecte la vertu même, La Bruyère, 13. Et je vous supplierai d'avoir pour agréable Que je me fasse un peu grâce sur votre arrêt, Molière, Mis. I, 1. Eh bien, mes souverains, aurez-vous agréable Que, n'ayant pu la voir en sa fin lamentable, Nous la fassions au moins apporter devant nous ? Mairet, Sophon. V, 7.

    Avoir quelqu'un, quelque chose pour soi, l'avoir en sa faveur. Ils ont pour eux la justice. Elle a pour elle sa beauté. Il suffit que ta cause est la cause de Dieu, Et qu'avecque ton bras elle a, pour la défendre, Les soins de Richelieu, Malherbe, II, 12.

  • 11Avoir la parole dans une assemblée, avoir la permission de parler.
  • 12Avoir quelqu'un à dîner, lui donner à dîner. Il a eu beaucoup de monde à son bal.

    Avoir quelqu'un avec soi, être avec quelqu'un, en être accompagné. Il avait un ami avec lui.

  • 13Avoir une femme, obtenir ses faveurs. C'est une expression libre et de mauvaise compagnie.
  • 14En avoir, gallicisme qui signifie être irrité contre, songer à. Je ne sais à qui il en avait, Sévigné, 173. Je ne sais à qui en ont vos femmes avec leurs vœux, Sévigné, 511. Je lui demandai à qui elle en avait de se vouloir ruiner, Sévigné, 441. À qui en as-tu donc, ou si c'est aux anges que tu ris ? Hamilton, Gramm. 2.

    Vous en aurez, expression de menace, vous serez puni, maltraité.

    En avoir dans l'aile, être atteint de quelque perte, de quelque accident grave.

  • 15Avoir, verbe auxiliaire dans la conjugaison. J'ai dit. Il avait ordonné. Je crois avoir entendu dire. Ce qui a été dit par vous. L'événement ne m'a pas trompé.
  • 16Avoir se prend impersonnellement avec le pronom y dans beaucoup de locutions. Il y a, il existe. Il y aura des vices tant qu'il y aura des hommes. Il y en a qui pensent… Il y eut beaucoup de sang versé. Il y a de la honte à… Il y a longtemps que… Y a-t-il rien de plus indigne ? Pourvu qu'il y ait assez d'argent. Peut-il y avoir des doutes en une question si claire ? Il y aurait de la folie à douter d'une vérité si universellement reconnue, Boileau, Longin, Sublime, 32. Il faut convenir que ces Juifs sont des hommes comme il n'y en a point, Diderot, Nouv. max. Phil. 25.

    Il n'y a qu'à parler, c'est-à-dire il suffit de parler.

    Il n'y a qu'à pleuvoir, c'est-à-dire la pluie peut survenir.

    Familièrement. Ô vent donc, puisque vent y a, Viens dans les bras de notre belle, La Fontaine, Fab. IX, 7. Madame, puisque madame y a, Molière, G. Dand. I, 4.

    Tant y a, quoi qu'il en soit. Vous me vantez cet homme ; tant y a que je ne veux pas le voir. Tant y a qu'il n'est rien que votre chien ne prenne, Racine, Plaid. III, 3.

    Y ayant, puisqu'il y a, comme il y a. N'y ayant qu'une vérité de chaque chose, Descartes, Méth. 2. Rapsodie veut dire un amas de vers qu'on chantait, y ayant des gens qui gagnaient leur vie à les chanter, Boileau, Réflexions crit. n° 2. C'est ainsi que tous les interprètes ont expliqué ces mots… y en ayant même qui ont mis à la marge du texte grec…, Boileau, ib. N'y ayant rien de si inconcevable, Pascal, dans COUSIN.

  • 17S. m. terme de commerce. Avoir du poids, nom que les Anglais donnent à la livre de seize onces.

    PROVERBE

    Il n'est rien de tel que d'en avoir, c'est-à-dire si l'on n'a pas de bien, on n'est pas considéré.

REMARQUE

1. Faut-il dire : il y eut cent hommes tués, ou bien, il y eut cent hommes de tués ? L'usage aujourd'hui est d'employer de quand le substantif est sous-entendu ou qu'il est remplacé par le pronom en, et de supprimer de quand le substantif précède l'adjectif ou le participe ; ainsi on dira : il y eut cent hommes tués, et deux cents de blessés.

2. Les ennemis que j'ai eus à combattre, et les ennemis que j'ai eu à combattre. Il y a entre les deux locutions une distinction qui, quelquefois à peine sensible, l'est d'autres fois assez pour qu'on veuille choisir. Dans le premier cas, j'ai eu des ennemis, et je les ai combattus ; dans le second, il m'a fallu combattre des ennemis.

3. C'est une faute très grosse de dire, à la troisième personne du subjonctif présent, au singulier : qu'il aie, au lieu de : qu'il ait. Vaugelas la signale ; et il n'est pas rare de l'entendre encore aujourd'hui.

4. Dans les prétérits surcomposés, lorsque le complément direct du verbe est placé devant lui, doit-on prendre la forme variable eu, eue, ou la forme invariable eu ? J'avais beaucoup d'affaires ; je suis parti quand je les ai eu terminées, ou eues terminées. Les deux manières peuvent certainement se défendre ; et le poëte pour éviter un hiatus ne devrait se faire aucun scrupule d'accorder eu. Mais il est plus naturel de ne le pas accorder, JULLIEN.

5. Je vous aurais parlé, si je vous eusse trouvé ou si je vous avais trouvé. Si ne prend la construction du subjonctif qu'avec les auxiliaires.

6. En poésie, aie est monosyllabe, et pour l'employer, il faut qu'il soit suivi d'une voyelle. Mais dans le XVIIe siècle, on s'en servait devant une consonne, et on le faisait de deux syllabes : Que j'aie peine aussi d'en sortir par après, Molière, l'Étour. III, 5, 7. On observera que, bien que avoir soit un verbe actif, il n'a pas de passif ; on ne dit pas : ces choses ont été eues.

SYNONYME

AVOIR, POSSÉDER. Avoir est beaucoup plus général que posséder. On a de toutes les façons possibles, au lieu que posséder, c'est avoir, en exprimant précisément que l'on tient en sa main, en son pouvoir, la chose dont il s'agit.

HISTORIQUE

Xe s. Bel [elle] avret [avait] corps, bellezour anima, Eulal. Qued avuisset de nos christus mercit, ib. Si cum il semper solt haveir, Fragm. de Valenc. p. 468. E cum cil lo fisient, dunt ore aveist odit [ouï], ib. p. 469. Ne aiet niuls male voluntatem contra sem peer, ib. p. 469. Aiest [ayez] charté inter vos, ib. p. 469.

XIe s. Ce que il avereit pris, Lois de Guill. 6. N'i ad castel qui devant lui remaigne, Ch. de Rol. I. Ne n'ai tel gent qui la sue desrompe, ib. II. Prudhom i out [il y eut en lui la qualité de prudhomme] pour son seignur aider, ib. III. Ne nous aiuns les mals et les soufraites, ib. IV. Li reis Marsile out son conseil finet, ib. V. S'il veut ostages, il en aura, par veir [pour vrai], ib. VI. Tant i aurat de besans esmerez, ib. IX. Mout [ils] ont oüd et peines et ahans, ib. XI. Car de ferir oi je si grant besoin, ib. CIV. Il dist après : Paien, mal aies tu ! ib. CXLIV. Se je vif auques, mout grant prod [vous] i aurez, ib. CCLII. Vostre conseil ai-je evud touz temps, ib. CCLVI. Averum nous la victoire du champ ? ib.

XIIe s. Cité [il] n'i a qui, Ronc. p. 1. Qui France a à bailler, ib. p. 6. Bien a set ans, ib. p. 10. Illoc avoit [il y avait] un noble pugnaor, ib. p. 25. Et vous, aiez vostre grant ost banie, ib. p. 28. Et ses compeins qui oit [eut] nom Estramant, ib. p. 43. [Tu] Qui en la croiz eüs ton cors pené, ib. p. 56. En Margaric ot [il y eut] mout bon chevalier, ib. p. 63. Nous n'avienz nul meillor chevalier, ib. p. 73. Sonent li grailles [trompettes], quant que par l'ost en a, ib. p. 96. Tant que Dex voille, du champ aienz [ayons] l'onor, ib. p. 108. Quant l'emperere ot sa gent enterrée, ib. p. 156. Que n'oi [je n'eus], talent de fuïr ne d'aler, ib. p. 185. Hui vous aurai vaincu et recreant, ib. p. 188. Si vous ait Jesus Christ, qui en croix se peina ! ib. p. 192. Car joie a courte durée, Qui avient par tel folor, Couci, I. Se je vous aim, j'i assez ai raison, ib. II. Mais quant j'aurai de vous haïr envie, ib. II. Toute beautez qui sur autre resplent, Est mise en lui [elle], qu'il n'i a que mesprendre, ib. v. Dame, nul mal que j'aie, [je] Ne tieng fors à legier ; Car sans vous [je] ne pourroie [pourrai] Vivre, ne je nel quier [demande], ib. VIII. S'onques amis ot joie pour aimer [en raison de son amour], ib. X. Mais or en aiez merci [merci vous soit faite], Et si vous soit pardonné, ib. XI. Mort m'auriez à loi de traïtor, ib. XVI. Onques vers lui [elle] [je] n'oi faus cuer ne volage, ib. XI. Tous les soulas qu'ai eüs en ma vie, ib. XXII. S'onques nuls homs pour dure departie Ot cuer dolent, je l'aurai par raison, ib. XXIV. Fausse estes, voir plus que pie ; Ne mais pour vous [Je] N'averai Ja ieux plorous, Quesnes, Romancero, p. 89. Mais [que] cil en ait l'onor, cui Dex voudra aidier, Sax. IV. Guiteclins de Sassoigne, quand ce vint à son tans, De sa premiere fame ot deus vaslez enfans, ib. v. Jamais [nous] n'aurons tel aise de nos hontes vengier, ib. VI. Seignur, fait il as moines, car me laissez ester ; Vus n'avez ci que faire ; Deu en laissiez penser, Th. le mart. 147. E quant li reis out enquis des nuveles de Urie, cumandad lui qu'il returnast à sa maisun, qu'il i out ses aises, Rois, 155.

XIIIe s. À celui tans, avoit un empereour en Constantinoble qui avoit nom Sursac, Villehardouin, XLII. À Pepin [ils] orent guerre qu'avez oï conter, Berte, III. Car il ne plut à Dieu qui tout a à garder, ib. Fille, ce dist la vieille, mout forment vous [j'] ai chere, ib. XI. De ceste chose arez un petit à soufrir, ib. XII. Dont doi je prendre en gré, se j'ai froit et pouverte [pauvreté], ib. XXX. Qui Rainfroy ot à nom, ib. X. Car je ai si grant faim que ne sai que penser, ib. XLIII. [Vous] Voulez tuer vo [votre] fille ; trois jours a, ne dormi, ib. LXXXIX. Ne fust Morans [n'était Morant], de cui j'en oi [eus] defendement [empêchement], ib. XCV. C'est bien drois que mains cuers grant joie en avera, ib. CXXII. Pour l'amour qu'[il] ot à eus, ces armes [ce blason] [le roi] leur chargea [donna], ib. CXXXI. Et saciés de voir que il n'avoit que targier, Chr. de Rains, 225. Li enfes ploroit de grant fain, Por ce que n'avoit que mengier, Ren. 20501. Se porpensa que il feroit, Et comment à boivre averoit, ib. 6690. Avez-vos, fet-il, plus que dire ? ib. 8348. Sire, fis je, grant talent é [j'ai grand désir] De faire vostre volenté, la Rose, 2225. Car cil a moult poi de savoir, ib. 14056. Car j'ai de mon pere congié De faire ami et d'estre amie, ib. 5846. Appius ne pooit donter La pucele qui n'avoit cure Ne de li, ne de sa luxure, ib. 5621. Pourquoi nel' faites-vous entendre, Savoir s'il i a que reprendre ? ib. 5536. Comment encore eschaper porent De tel peril, sans pis avoir, Ou d'ame, ou de cors ou d'avoir, ib. 4521. Car le propre non lor pleüst, Qui accoustumé lor eüst, ib. 7174. Il convenroit qu'il sivist les pleges, se pleges y avoit, Beaumanoir, 58. Et soi ofrir contre cex à qui il a à fere, Beaumanoir, 61. Noz ne lor avons pas soufert, el tans de nostre baillie, quant partie l'a volu debatre ; mais, quant partie ne l'a pas debatu, noz l'avons eu beau soufrir, Beaumanoir, LXVI, 11. Ceulx envoient sus les Sarrazins quant il veulent guerroier à eulz ; et les Sarrazins envoient sus les crestiens, quant il ont à faire à eulz, Joinville, 264.

XIVe s. Et ceulx qui en telles choses se ont et se contiennent comme il convient et appartient, Oresme, Eth. 92. Nous, sur ce heut [eu] certaine information, avons retenu et retenons…, Du Cange, arramentum. Sire, ce dit Bertran, vous parlez pour noient ; S'autre chose n'i a, ce me dittes : Va-t'-en, Guesclin. 13526. Mais li bons cappitains lor dit : Laissiez ester ; J'arai de lor pourceaux, sans nous de riens grever, ib. 1214.

XVe s. Et si [les Escots] n'ont que faire de chau dieres ne de chaudrons, car ils cuisent bien leurs chairs au cuir des bestes mesmes, Froissart, I, I, 34. [Le roi voulait épargner ses gens et son artillerie] car il pensoit bien qu'il en auroit à faire, Froissart, I, I, 273. Et s'il euist justement pensé…, Froissart, III, IV, 28. Quand ceux de la ville virent le peril et le dommage si apparent, ils eurent conseil qu'ils se rendroient, sauves leurs vies, Froissart, I, I, 20. Et aussi il avoit bien cause qu'ils le festassent ; car ils ne l'avoient vu puis la bataille dessus dite, Froissart, I, I, 186. Il ne nous vaut rien ici demourer ni tenir ; nous n'y ariemes jamais nulle bonne aventure, Froissart, II, III, 34. Vous savez que je vous feis foy Pieça de tout ce que j'avoye, Et vous laissay en lieu de moy Le gaige que plus chier j'amoye, Orléans, Bal. 13. Je ferai, maugré qu'il en ait, Encontre luy une aliance, Orléans, Bal. 22. Et là ha continué à escripre, selon ce qu'on ha rapporté, Juvénal Des Ursins, Charles VI, 1420. … luy vint messaige de par le roy, qui lui mandoit qu'il avoit en propos de faire certain voyage, Bouciq. I, ch. 7. L'empereur avoit ja fait tout son apprest, afin que n'y eust que à partir, ib. I, ch. 31. Et alors le roy eut conseil avec ledit conte du Mayne, Commines, I, 3. Il avoit congnoissance en la cité, à cause qu'il y avoit eu administration par les années qu'ils avoient esté en paix, Commines, II, 3. Que s'il n'avoit debat par le dehors contre les grans, qu'il falloit qu'il l'eust avec ses serviteurs…, Commines, III, 1. Et eut lettres de la duchesse sa femme, que le roy Edouard n'estoit pas content, Commines, III, 7. Dieu avoit et a ce royaulme en especialle recommandation, Commines, IV, 7. Laquelle estoit veufve, long temps avoit, Commines, I, 2. Et ne les avoit en nulle hayne pour les choses passées, Commines, I, 10. Ilz commencerent à avoir division ensemble, quant ce fut à departir le butin, Commines, I, 15. C'est peu de chose que de peuple, se il n'est conduyt par quelques chiefs qu'ilz ayent en reverence et en crainte, Commines, II, 13. Après le sejour que eust le roy en ce village, Commines, V, 13. Le plus grand edifice que commença, cent ans a, roy tant au chasteau qu'en la ville, Commines, VIII, 18. Auquel lieu eut nouvelles ledit Ludovic, que son neveu le duc de Milan se mouroit, Commines, VII, 6. Il me fit appeller, et eut en conseil, s'il bailleroit ce sauf conduit ou non, Commines, VIII, 9. Et vindrent la pluspart malgré qu'on en eut, Commines, VIII, 10.

XVIe s. Que nul vivant, sur peine de la hart, N'aye à piller la valleur d'un liard, Marot, J. V, 144. Une isciatique, à laquelle j'estoys subject, plus de sept ans avoyt, Rabelais, Pant. II, 4. Je crois qu'en vous n'a [il n'y a] point tant de rudesse, Marot, II, 326. Long temps y ha que je vis en espoir, Et que rigueur ha dessus moi pouvoir, Marot, II, 345. Mais il peut tout, et veut, et lui agrée, Qu'un fils sacré aye mere sacrée, Marot, II, 362. Espece n'est de tribulation, Qui n'ait icy sa consolation, Marot, IV, 201. Si tu n'as point pitié de moy, Ayes au moins pitié de toy, Du Bellay, J. VII, 37, recto. Avoir le dessus, Montaigne, I, 19. Avoir où s'escrimer, Montaigne, I, 22. Pour la peur qu'il avait eue, Montaigne, I, 22. Ils feirent deffense que nul n'eust plus à aller là, Montaigne, I, 233. Et tout ainsi que Dieu les a associez en la lignée, aussi a la loy, La Boétie, 164. Et luy fut enjoinct expressement de la part du peuple, qu'il eust à s'embarquer, Amyot, Alcib. 35. Il se monstroit rebours à ceulx qui le cuidoient flatter, encore se roidissoit-il d'avantage contre ceulx qui le pensoient avoir par menaces, Amyot, Cat. d'Utiq. 1. Razant nos champs, dites, a' vous [avez-vous] point veu Cette beauté qui tant me fait la guerre ? Ronsard, 17. Et sans sçavoir combien la muse apporte D'honneur aux siens, je l'avois à mespris, Ronsard, 53.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

1. AVOIR. Ajoutez :
18 Terme de turf. Avoir un cheval, parier pour un cheval. Quand un pouleur demande : quel cheval avez-vous ? cela veut dire pour quel cheval pariez-vous ?

REMARQUE

Ajoutez :

7. Auxiliaire, placé autrement dans le XVIIe siècle que nous ne faisons d'ordinaire aujourd'hui. Je devais par la royauté Avoir commencé cet ouvrage [j'aurais dû… commencer], La Fontaine, Fabl. III, 2. Et quand ce même prélat [Fénelon] veut qu'on croie sur sa parole… la bonne foi lui devait avoir imposé silence, Bossuet, Remarques sur la réponse à la relation sur le quiétisme. Au reste cette construction est parfaitement correcte.

8. Des grammairiens ont dit que dans la locution : il y a longtemps, dix ans, etc. que, et il y a longtemps, dix ans, etc., sans que, une différence devait être établie ; que la première convenait quand l'action dont il s'agissait durait encore : il y a longtemps que je demeure dans cet appartement, et : il y a longtemps telle chose arriva. La distinction serait valable, si, dans la locution, le que était un relatif signifiant pendant lequel temps ; mais c'est une simple conjonction qui unit les deux membres. La seule remarque à faire, c'est que, quand il y a longtemps, dix ans, etc. commence la phrase, il est plus usuel de mettre le que : il y a longtemps que je suis malade, que j'ai quitté cet appartement.

9. Molière a donné à il y a pour complément un relatif. Pensez-vous qu'on soit capable d'aimer de certains maris qu'il y a ? Molière, G. Dand. III, 5. Rien ne s'oppose à cette construction.

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Étymologie de « avoir »

(IXe siècle) Du moyen français avoir, de l’ancien français avoir, aveir, du latin habere (« tenir, occuper », puis « habiter ») qui a pris le sens de « posséder » en bas latin. Apparenté à habit, habiter, habitude.
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Bourguign. aivoy ; provenç. aver ; espagn. haber ; portug. haver ; ital. avere ; du lat. habere. Comparez l'allemand haben, le gothique haban. Dans l'ancienne langue, on disait non pas il y a, mais simplement il a (illud habet), ce qui voulait le cas régime du substantif : il avoit un chastel, il y avait un château ; chastel est le cas régime : chastels ou chastaus serait le nominatif. Pourtant, l'adverbe y se montre dans cette locution dès le XIIIe siècle. La forme archaïque, sans y, s'est conservée dans le style marotique, au moins avec la négation : Entre Leclerc et son ami Coras, N'a pas longtemps, s'émurent grands débats, Racine, Épigr. Il y a lieu de remarquer avret dans un texte du Xe siècle ; c'est, étymologiquement, l'équivalent de habuerat, où l'u, comme dans ces formations, devint un v, habverat, avec l'accent par conséquent sur . On s'était étonné que le plus-que-parfait latin n'eût laissé aucune trace dans les langues romanes, où en effet on ne le trouve pas ; mais ces textes du Xe siècle montrent qu'il a existé, bien que transitoirement.

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Phonétique du mot « avoir »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
avoir avwar

Fréquence d'apparition du mot « avoir » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « avoir »

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Citations contenant le mot « avoir »

  • Elle est debout sur mes paupièresEt ses cheveux sont dans les miens,Elle a la forme de mes mains,Elle a la couleur de mes yeux,Elle s’engloutit dans mon ombreComme une pierre sur le ciel.Elle a toujours les yeux ouvertsEt ne me laisse pas dormir.Ses rêves en pleine lumièreFont s’évaporer les soleils,Me font rire, pleurer et rire,Parler sans avoir rien à dire.
    Paul Eluard — Capitale de la douleur
  • Certains pensent qu’il suffit d’avoir mauvais caractère pour avoir du caractère, comme s’il suffisait d’avoir mauvaise haleine pour avoir du souffle !
    Grégoire Lacroix — Les euphorismes de Grégoire
  • Pourquoi avoir peur du bonheur ?
    Virginie Despentes — Les jolies choses
  • Le menteur doit avoir bonne mémoire.
    Quintilien
  • Soyez le maître que vous voudriez avoir.
    Victor Hugo
  • Un jeune homme de 20 ans comparaissait jeudi après-midi pour avoir insulté et menacé de mort deux gendarmes. La présidente a retracé le parcours du prévenu entouré par son père et son oncle mais "abandonné par sa mère à l’âge de dix ans" et déjà condamné par le passé pour vol aggravé et violences. Le 22 juin dernier, sur la route entre Bagnères et Cieutat, une voiture s’immobilise au milieu de la chaussée. À côté, un jeune homme titube, ivre. Il fait des vilains gestes aux automobilistes qui circulent.
    ladepeche.fr — Bagnères-de-Bigorre. Condamné à 10 mois de prison pour avoir insulté et menacé les gendarmes - ladepeche.fr
  • Aucun intérêt d’avoir une arme de guerre chargée pour faire le planton. Pourquoi n’avaient ils pas l’obligation d’avoir le chargeur rangé (entraîné, il faut 5 secondes pour le mettre, charger l’arme et être opérationnel) ?
    Le Figaro.fr — Metz : un soldat mis en examen pour avoir accidentellement tué un militaire
  • Idée : l'avoir !
    Stanislaw Jerzy Lec — Nouvelles pensées échevelées
  • Après avoir posé un pied-à-terre lorsque France Télévision a décidé de se séparer de lui, celui qui prépare actuellement un nouvel album, est parvenu à rebondir. "Vous voyez, on ne me tue pas, je suis toujours debout parce que c'est ma nature et que personne n'arrivera à briser ma carapace", a-t-il encore déclaré très fier de lui. Il est vrai que Patrick Sébastien n'a jamais été aussi présent dans les médias pour présenter ses nombreux projets à venir.
    Closermag.fr — Patrick Sébastien révèle ce qu'il voudrait avoir lors de son enterrement - Closer
  • Avoir menti, c'est avoir souffert.
    Victor Hugo — Les Travailleurs de la Mer
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Traductions du mot « avoir »

Langue Traduction
Anglais to have
Espagnol haber
Italien avere
Allemand haben
Chinois 具有
Arabe يمتلك
Portugais ter
Russe иметь
Japonais 持つため
Basque eduki
Corse avè
Source : Google Translate API

Synonymes de « avoir »

Source : synonymes de avoir sur lebonsynonyme.fr

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Nombre de points du mot avoir au scrabble : 8 points

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