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Trésor

Variantes Singulier Pluriel
Masculin trésor trésors

Définitions de « trésor »

Trésor de la Langue Française informatisé

TRÉSOR, subst. masc.

A. −
1. Ensemble de choses de valeur (or, argent, objets précieux, pierreries, titres, etc.) accumulées et souvent soigneusement cachés. Synon. bien(s) (v. bien3II), fortune, ressources, richesses, magot2(fam.).Trésor fabuleux, immense, inestimable; trésor en pièces d'or, en pierres précieuses; les trésors de Crésus, de Golconde; cacher, enfouir, enterrer, garder un trésor; découvrir, déterrer, exhumer, mettre à jour un trésor; carte, plan d'un trésor; chasse au trésor; chercheur de trésors. Il n'y avait dans Saumur personne qui ne fût persuadé que Monsieur Grandet n'eût un trésor particulier, une cachette pleine de louis, et ne se donnât nuitamment les ineffables jouissances que procure la vue d'une grande masse d'or (Balzac, E. Grandet, 1834, p. 14).On dirait le trésor d'un rajah, armes et joyaux, poignards à manches de nacre, vêtements couturés de saphirs, aigrettes d'émeraude sur les casques, ceintures de turquoises (Taine, Notes Paris, 1867, p. 332).
[Comme terme de compar., d'évaluation, à valeur de superl.] Tous les trésors du monde. [La vertu] nous comble (...) d'un contentement intérieur plus précieux mille fois que tous les trésors de l'univers (J. de Maistre, Soirées St-Pétersb., t. 1, 1821, p. 218).Le pauvre diable aurait donné volontiers tous les trésors de la terre pour remuer seulement le bout de la langue (Tharaud, Dingley, 1906, p. 98).
En partic.
DR. La propriété d'un trésor appartient à celui qui le trouve dans son propre fonds: si le trésor est trouvé dans le fonds d'autrui, il appartient pour moitié à celui qui l'a découvert, et pour l'autre moitié au propriétaire du fonds. Le trésor est toute chose cachée ou enfouie sur laquelle personne ne peut justifier sa propriété, et qui est découverte par le pur effet du hasard (Code civil, 1804, art. 716, p. 130).Inventeur* d'un trésor.
Trésor de guerre. Réserve monétaire constituée par un État pour subvenir aux dépenses occasionnées par une guerre; p. ext., réserve d'argent destinée à faire face à certaines dépenses inattendues. Trésor de guerre nazi. Pour soutenir le trésor de guerre, il [Philibert Orry, contrôleur des finances] a dû rétablir, en 1733, l'impôt du dixième, émettre un emprunt (E. Schneider, Charbon, 1945, p. 118).
2. P. anal.
a) Somme d'argent considérée parfois comme importante parce qu'elle est le fruit d'économies, voire de privations. Il pouvait économiser une dizaine de mille francs qu'il joignait à un petit trésor destiné à Hortense (Balzac, Cous. Bette, 1846, p. 299).
b) Collection d'œuvres considérées comme précieuses dans le domaine artistique. Trésors archéologiques, picturaux; trésor de l'art antique, moderne, de la Renaissance; trésors du Louvre, du Vatican. Il vient de lui tomber, je ne sais comment, un trésor de dessins et de gravures du XVIIIesiècle: vingt Boucher, des Watteau superbes (Goncourt, Journal, 1856, p. 295).Le Prado rachète tout. C'est un fabuleux trésor de chefs-d'œuvre. Titien, Velasquez, Rubens, Goya, Patinir y ont des ensembles qu'aucun musée du monde ne peut réunir (T'Serstevens, Itinér. esp., 1933, p. 220).
c) P. métaph.
α) Ensemble de ressources naturelles ou produites par l'activité humaine, et propres à satisfaire les besoins, les désirs des hommes. Trésor(s) de la nature, de la terre; trésor(s) des vergers, de la vigne. Une barque de maraudeurs qui (...) ramenaient sans bruit sur leur bateau (...) un trésor vivant de poissons d'argent (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Hérit., 1884, p. 496).Tous les trésors de l'Europe, les draps de Flandre, les vins de France, les épices d'Orient (Faure, Hist. art, 1912, p. 306).
[Dans des périphrases poét.] Les trésors de Bacchus, de Cérès, de Pomone,... Les vendanges, les moissons, les fruits,... J'aurai quitté ces champs, quand la fertile automne Viendra les enrichir des trésors de Pomone (Michaud, Printemps proscrit, 1803, p. 94).Salut, terre féconde, terre de Saturne, mère des grands hommes! Puisses-tu porter long-temps les trésors de Cérès (Chateaubr., Martyrs, t. 3, 1810, p. 196).
β) LANG. RELIG., vieilli. Ensemble de choses, bonnes ou mauvaises, qui peuvent aider l'homme, le récompenser ou le punir, selon sa conduite. Le trésor des miséricordes divines, des vengeances célestes; le trésor des mérites de Jésus-Christ, des mérites des saints (Ac. 1798-1878).
d) Au plur., littér. Charmes du corps féminin. Synon. appas, attraits.Tes mouvements prenaient l'étrange caractère D'inquiétants miaulements, De mordillements de panthère. Puis tu livrais tes trésors blancs Avec des poses languissantes... (Cros, Coffret santal, 1873, p. 47).Elle élevait vers lui comme une prière les trésors d'un corps qui lui était tout entier dévoué (Gracq, Argol, 1938, p. 74).
3. ÉCON., FIN.
a) Ensemble des ressources financières d'un souverain. Synon. cassette.Dissiper, épuiser, gaspiller le trésor royal, impérial. Le duc d'Anjou avait commencé par dérober le trésor de la couronne, pour le dépenser en Italie (Barante, Hist. ducs Bourg., t. 4, 1821-24, p. 31).[Élisabeth] commença par distribuer aux indigens du duché tout ce qu'il y avait d'argent comptant dans le trésor ducal (Montalembert, Ste Élisabeth, 1836, p. 104).
b) ADMIN. PUBL. [Le plus souvent avec maj.] Trésor (public)
α) Ensemble des moyens financiers dont dispose l'État. La banque centrale finance un déficit du trésor public soit par avances directes, soit par achat d'effets publics émis sur le marché monétaire (Univers écon. et soc., 1960, p. 28-16):
1. [L'intervention du gouvernement] est un mal (...) parce qu'elle est coûteuse, soit pour le contribuable, quant [elle] est gratuite, c'est-à-dire, quand elle a lieu aux frais du trésor public; soit pour le consommateur, quand on prélève les frais en une taxe sur la marchandise. Say, Écon. pol., 1832, p. 198.
β) P. méton. Administration, qui relève du ministère des Finances, chargée de gérer le budget public pour le compte de l'État et des collectivités locales (en recouvrant les impôts, en répartissant l'argent entre les différents postes budgétaires, etc.). Recettes du Trésor; receveur-percepteur du Trésor; agent judiciaire, comptable, correspondant, inspecteur, ministre du Trésor; secrétaire d'État au Trésor; administration centrale du Trésor; direction du budget du Trésor; service du contentieux du Trésor; prêts, dépôts à terme du Trésor; gestion de la dette publique, des comptes spéciaux par le Trésor. Les Services du Trésor sont chargés d'encaisser les impôts établis par le Service des Contributions Directes et dont les principaux sont: pour le compte de l'État: la taxe proportionnelle, la surtaxe progressive, l'impôt sur les sociétés et le versement forfaitaire sur les salaires (Activ. serv. Trésor publ., 1959, p. 10).Les opérations des chèques postaux ne sont pas payées à leur juste prix parce qu'il y a intérêt à diriger vers les caisses du Trésor le maximum de disponibilités monétaires (Admin. P. et T., 1964, p. 12).
Bon du Trésor. Titre représentant une certaine valeur, et concernant un emprunt émis par le Trésor public. S'il n'y a pas assez d'argent et si les prix ont tendance à baisser, l'institut d'émission rachète des bons du Trésor et met ainsi en circulation des masses assez considérables de monnaie (Lesourd, Gérard, Hist. écon., 1966, p. 481).
4. P. méton.
a) Lieu (édifice, salle, etc.) où l'on conserve les objets et documents précieux appartenant à un souverain, à un haut personnage, à une collectivité. Salem arriva le premier, car, familier du palais, il avait trouvé une traverse du XVIesiècle pour aller du trésor à la salle Barberousse (Giraudoux, Siegfried et Lim., 1922, p. 272).
b) En partic.
α) ARCHÉOL. Bâtiment édifié dans un sanctuaire pour y abriter des objets d'art, des ex-voto et des offrandes. Le trésor des Athéniens à Delphes; le trésor de Délos. Les chaudrons ou les trépieds homériques, les broches, déposées en ex-voto dans le trésor de Delphes (L'Hist. et ses méth., 1961, p. 330).
β) Édifice ou partie d'édifice (chapelle, sacristie, etc.) renfermant les objets précieux et les objets d'art d'une église, d'une cathédrale (ornements, reliquaires, vases sacrés, manuscrits anciens, etc.). Trésor de Notre-Dame, de Saint-Denis. Félicien avait découvert un moyen de la passionner (...). C'était de lui parler (...) des anciens chefs-d'œuvre de broderie qu'il avait vus, conservés dans les trésors des cathédrales (Zola, Rêve, 1888, p. 96).Certaines reliures d'évangéliaires ou de psautiers du haut moyen âge, la plupart provenant des trésors des cathédrales ou des monastères (Civilis. écr., 1939, p. 10-15).
γ) HIST. DE FR. Trésor des Chartes. ,,Dépôt contenant les anciennes archives des rois de France`` (Lep. 1948). Guillaume de Nogaret fut chargé de la garde du Trésor des Chartes, où il essaya de (...) faire enregistrer toutes les lettres scellées (L'Hist. et ses méth., 1961, p. 407).
B. − P. anal. ou au fig.
1. Ce qui est tenu pour particulièrement beau, noble, précieux (sur un plan affectif, intellectuel, moral).
a) [À propos d'une chose]
α) [À propos d'une réalité concr.] Ses petits trésors de jeune fille étaient là: sa couronne, de la première fois qu'elle fit (...) sa communion; un brin de lavande flétrie, un petit cierge usé (Lamart., Cours litt., 1859, p. 198).Son plus cher trésor, c'étaient les bons points du catéchisme, bleus et roses, imprimés d'or (Aragon, Beaux quart., 1936, p. 53).
β) [À propos d'une réalité abstr.] Synon. richesse(s).Trésor intérieur, intime, moral, sentimental; l'indépendance, la liberté, le travail sont des trésors pour l'homme; les trésors de l'âme, de l'inconscient, de la pensée, de la réflexion; un/des trésor(s) de souvenirs cachés, enfouis dans la mémoire. Ils riaient (...) puisant avec délices dans ce trésor facétieux de leur enfance, qui n'appartenait qu'à eux seuls (Martin du G., Thib., Mort père, 1929, p. 1318).Plus nous devenons hommes c'est-à-dire conscients des trésors cachés dans le moindre des êtres et de la valeur que représente le plus humble atome pour l'unité finale, plus nous nous sentons perdus à l'idée de l'enfer (Teilhard de Ch., Milieu divin, 1955, p. 189).
En partic.
Ensemble des témoignages (littéraires, philosophiques, scientifiques, etc.), fruits de la pensée humaine, et qui constituent l'essentiel des ressources intellectuelles et de la culture d'un pays, d'une communauté. Trésor(s) historique(s), littéraire(s); trésor(s) de connaissances; trésor(s) de la civilisation; trésor(s) de légendes, de récits. Les héritiers cherchèrent partout (...) de trésors, aucun: si ce n'est des trésors de science renfermés dans la bibliothèque et les laboratoires (Dumas père, Monte-Cristo, t. 1, 1846, p. 226):
2. À mesure que s'accroît le trésor accumulé par les générations successives et dont la faculté d'éducation saisit les derniers venus, la disproportion s'accroît aussi entre le pouvoir d'invention dont chaque individu est doué et la somme des connaissances qui lui sont livrées, entre sa valeur propre et la richesse multiple qui lui vient de l'éducation. Gaultier, Bovarysme, 1902, p. 61.
LING. (lexicogr.). ,,Inventaire des unités lexicales d'une langue visant à l'exhaustivité`` (Mounin 1974) ; titre d'ouvrages d'érudition, notamment de dictionnaires et d'encyclopédies. Trésor de la langue grecque; Trésor de la langue latine; Trésor de la langue française; Trésor du Félibrige. Brunetto Latini (...) avait traduit en italien la morale d'Aristote; il rédigea, sous le titre de Trésor, une encyclopédie des connaissances de son temps (Ozanam, Philos. Dante, 1838, p. 61).Charles Lenormant publiait un Trésor de numismatique et de glyptique, de 1836 à 1850 (L'Hist. et ses méth., 1961, p. 379).
b) [À propos d'une pers.] Des hommes comme Alexis [de Tocqueville] sont un trésor pour leurs amis, un honneur pour leur pays, et l'objet du respect de tous les peuples (Ampère, Corresp., 1859, p. 385).Une vieille femme de ménage que nous avions cru un trésor envoyé de Dieu, se soûle (Bloy, Journal, 1903, p. 198).
[Empl. comme terme d'affection] Comme Rose avait gémi (...) la mère se pencha, bouleversée, pâlissante.Mon bijou, mon trésor, qu'est-ce que tu as? (...) Veux-tu boire? (Zola, Lourdes, 1894, p. 7).Ma grande chouchoute! Je t'en prie! Je t'en supplie, mon cher trésor! Écoute-moi! (Céline, Mort à crédit, 1936, p. 547).
2. Un/des trésor(s) de + subst. désignant une réalité abstr. (sentiment, trait de caractère, etc.).Une abondance, une grande quantité de. Dépenser, déployer, prodiguer des trésors d'amour, de bonté, de générosité, d'habileté, d'imagination, d'indulgence, de patience, de ruse. Mon cousin m'ouvrit son cœur: j'y découvris de vivaces ressentiments, des griefs qui, longtemps cachés, n'en étaient que plus redoutables et qui, hélas! ne me parurent pas dénués de fondement, bref, tout un trésor de haine dont je me trouvai l'objet désespéré et la cause (Duhamel, Confess. min., 1920, p. 179).MmeVerdurin, sous une apparence froide, cache des trésors de sensibilité (Proust, Sodome, 1922, p. 896).
Prononc. et Orth.: [tʀezɔ:ʀ]. Ac. 1694, 1718: thresor; dep. 1740: trésor. Étymol. et Hist. A. 1. Ca 1050 « ensemble de ressources financières dont dispose un souverain (les biens de celui-ci et ceux de l'Etat étant à l'origine confondus) » (St Alexis, éd. Chr. Storey, 526: De lur tresors prenent l'or e l'argent [cil ki l'ampirie bailissent]); ca 1100 (Roland, éd. J. Bédier, 602: Quan l'ot Marsilie, si l'ad baiset el col, Puis si cumencet a venir ses tresors [v. note, t. 2, Commentaire, p. 147]); ca 1150 (Thèbes, éd. G. Raynaud de Lage, 3331: Li rois leur dist: ,,[...] A bandon vous met mon tresor``); 1549 vuyder le thresor (Est.); 1671 thresor public « fiscus » (Pomey); 2. « ensemble de choses précieuses, amassées pour être conservées » a) déb. xiies. spéc. « appartenant à une abbaye, une église » plur. (Benedeit, St Brendan, éd. E. G. R. Waters, 676: L'abes del leu fait porter fors Ses reliques e ses tresors: Cruz e fertres e les tistes Bien engemmez de ametistes); ca 1170 id. (Chrétien de Troyes, Erec, éd. M. Roques, 6838); 1680 sing. tresor de Saint Denis (Rich.); b) 1135 en gén. (Wace, Ste Marguerite, éd. E. A. Francis, 491 ms. [A]: Et le vaiscel d'arain brisa, Quida avoir trové tresor Et grant plenté d'argent et d'or); c) 1160-74 « objet précieux » (Id., Rou, éd. A. J. Holden, II, 2011: Du chief de son braier une clef deffermerent Et cole et estamine et un froc en osterent [...] N'i out autre tresor); d) 1690 dr. art de descouvrir les tresors cachez (Fur.); 3. ca 1140 « ensemble de grandes richesses » (Voyage de Charlemagne, éd. G. Favati, 432: Li cuvertur(e)s fud bons [...] Melz en vaut li conreiz del tresor l(a) Amiral [cf. note et Alexandre de Paris, Alexandre, III, 4895 in Elliott Monographs, 37, p. 253]); ca 1150 (Thèbes, 1132); 1160-74 (Wace, Rou, III, 9361: Henri [...] partie out del tresor sa mere E grant partie out de son pere); 1529 style biblique (Saincte Bible, Jehan Petit, Matth. VI, N. T., fol. 3 d: Faictes voz tresors ou ciel ou vers n'ont povoir); 1660-68 p. métaph. poét. les tresors de Cerés (Boileau, Satires, VIII, 26 ds Œuvres, éd. F. Escal, Paris, 1966, p. 41); 4. ca 1175 « lieu où sont conservés des valeurs, des objets précieux » d'un grand personnage laïc (Benoît de Ste-Maure, Chron. ducs de Normandie, éd. C. Fahlin, 10020); 1334 Rouen « id., ainsi que des titres, archives ... » (doc. ds Havard, t. 4, col. 1432); 1362, déc. (Inventore des biens du thesaurier de Fescamp, éd. Ch. de Beaurepaire ds Bibl. Éc. chartes, t. 5, 1858-59, p. 163: l'entrée du thresor [de l'abbaye]); 1462, 4 nov.; 1478 tresor de noz chartres; tresor des chartes (Lettres de Louis XI, éd. J. de Vaësen et E. Charavay, t. 2, p. 84; t. 7, p. 33). B. Fig. « tout ce qui est excellent, précieux » 1. a) 1130-40 en parlant de pers. (Wace, Conception N.-D., éd. W. R. Ashford, 1348: bien ai gardé Le tresor que tu m'as doné [N.-D., en parlant de J.-C.]); fin xiies. (Sermons de St Bernard, éd. W. Foerster, p. 14, 25: s'il m'avient ke ju neglijousement vuarze si grant tressor [les âmes à lui confiées]) b) 1821 terme d'affection (Courier, Lettres Fr. et Ital., p. 907: Adieu! trésor [à sa femme]); 2. ca 1265 « titre donné à certains ouvrages d'érudition, linguistiques, encyclopédiques » (Brunet Latin, Tresor, éd. Fr. J. Carmody, I, 1: Ces livres est apielés Tresors); 1606 (Nicot); 3. 1541 « accumulation, grande quantité de quelque chose » lang. biblique (Saincte Bible, Anvers, Ant. de La Haye, Jacques, V, N. T., fol. LXXXIX b: Vous avez fait ung thresor de yre pour les derniers jours [thesaurizastis vobis iram]); 1794 lang. poét. (Chénier, Épîtres, p. 179: Depuis que de Pandore un regard téméraire Versa sur les humains un trésor de misère). Du lat. thesaurus « trésor (caché, enfoui) »; (fig.) « grande quantité; lieu où on conserve les richesses »; (fig.) « dépôt, conservatoire[thesaurus rerum omnium memoria, Cicéron] », ce dernier empl. plus développé à basse époque [thesauri scientiae, ives., St Jérôme], spéc. pour le titre d'ouvrages (ive-ves., St Augustin), cf. Thesaurus verus, sive disputatio... (ves., titre ds Blaise Lat. chrét.). Le sens « trésor public » [« fonds » et « lieu de conservation »] est rendu en lat. class. par aerarium. Fréq. abs. littér.: 3 662. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 8 132, b) 4 509; xxes.: a) 4 205, b) 3 688. Bbg. Höfler (M.). Rom. Forsch. 1971, t. 83, pp. 614-615.

Wiktionnaire

Nom commun - français

trésor \tʁe.zɔʁ\ masculin

  1. Amas d’or, d’argent, ou d’autres choses précieuses mises en réserve, cachées, enfouies.
    • Âmes de boue! qui n'estimez que l'or, je ne veux point toucher à vos trésors, quelque impure qu'en soit la source. — (Robespierre, Propositions d’articles additionnels à la déclaration des Droits de l’Homme et du citoyen, le 24 avril 1793 à la Convention)
  2. Lieu où le trésor est enfermé, comme dans les églises.
    • Il a toujours sur lui la clef de son trésor.
    • Ces sacraires sont munis d’armoires doubles, fortement ferrées […]. Ils servaient de trésors, car il était l’usage de placer, des deux côtés du maître autel des églises abbatiales ou cathédrales, des armoires destinées à renfermer les vases sacrés, les reliquaires et tous les objets précieux. — (Eugène Viollet-le-Duc, La Cité de Carcassonne, 1888)
  3. Ces mêmes reliques et ornements.
    • Le trésor de Reims. Le trésor de Chartres.
  4. (Vieilli) Ensemble des archives, titres, papiers d’une seigneurie, d’une communauté.
    • Le trésor des chartes des rois de France.
  5. Ensemble des ressources de l’État, des sommes destinées au service public.
    • Il se vit entouré d’individus qui trompèrent sa confiance, et ne cherchèrent, […], qu’à exploiter le trésor public à leur profit. — (Anonyme, Grèce. - Administration intérieure, Revue des Deux Mondes, 1829, tome 1)
    • Son prestige religieux est compromis. Son trésor est vide. Son armée, […], est réduite à fort peu de chose par les licenciements forcés et les désertions. — (Frédéric Weisgerber, Trois mois de campagne au Maroc : étude géographique de la région parcourue, Paris : Ernest Leroux, 1904, page 15)
    • A la mort d'un autre Gradis, l'intendant prétendit confisquer les biens du défunt au profit du Trésor, en vertu du droit d'aubaine.— (Léon Berman, Histoire des Juifs de France des origines à nos jours, 1937)
  6. Administration chargée de gérer ces ressources.
    • Son adjonction au ministre, avec le titre de directeur-général du trésor, fut accueillie comme une bonne nouvelle dans toutes les places de commerce du continent, …. — (Julie de Querangal, Philippe de Morvelle, Revue des Deux Mondes, tome 2, 4, 1833)
    • Il est plus que certain que des transactions sont intervenues entre les deux parties, au grand dam du Trésor. — (Léon Berman, Histoire des Juifs de France des origines à nos jours, 1937)
  7. (Figuré) Ce qui est d’une excellence, d’une utilité singulière.
    • Un véritable ami est un grand trésor. - Un bon domestique est un trésor dans une maison. - Les trésors d’érudition que cet ouvrage renferme.
  8. Grands recueils d’érudition.
    • Le trésor de la Langue grecque, d’Henri Estienne.
  9. (Religion) Réunion, d’un assemblage de diverses choses bonnes ou mauvaises.
    • Il est dit dans l’évangile : Amassez- vous des trésors que les vers et la rouille ne puissent point gâter et que les voleurs ne puissent point dérober. - Le trésor des miséricordes divines.
  10. Êtres et choses pour lesquelles on a un grand attachement.
    • Cet enfant est son trésor.
    • Tu viens, trésor ?
  11. (Au pluriel) Grandes richesses.
    • Les trésors de Crésus sont passés en proverbe. Ces mines recèlent des trésors. Il a amassé des trésors.
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

TRÉSOR. n. m.
Amas d'or, d'argent, ou d'autres choses précieuses mises en réserve, cachées, enfouies. Riche trésor. Trésor inestimable. Enfouir des trésors. Trouver un trésor caché. Il se dit aussi du Lieu où le trésor est renfermé. Il a toujours sur lui la clef de son trésor. Il se dit particulièrement du Lieu où, dans certaines églises, on garde des reliques et d'autres objets précieux. Il se dit aussi de Ces reliques et de ces ornements. Le trésor de Reims. Le trésor de Chartres. Il se disait autrefois de l'Ensemble des archives, titres, papiers d'une seigneurie, d'une communauté. Le trésor des chartes des rois de France. Il se dit également de l'Ensemble des ressources de l'État, des sommes destinées au service public. Cette guerre a épuisé le trésor de l'État, le trésor public. Il se dit encore de l'Administration chargée de gérer ces ressources.

TRÉSORS, au pluriel, s'emploie pour désigner de Grandes richesses. Les trésors de Crésus ont passé en proverbe. Ces mines recèlent des trésors. Il a amassé des trésors. Poétiquement, Les trésors de la terre, Les productions de la terre. Les trésors de Cérès, Les moissons, le blé. Les trésors de Bacchus, Les raisins, le vin. Les trésors du printemps, Les fleurs.

TRÉSOR se dit figurément de Tout ce qui est d'une excellence, d'une utilité singulière. Un véritable ami est un grand trésor. Un bon domestique est un trésor dans une maison. Les trésors d'érudition que cet ouvrage renferme. Il se dit particulièrement de Grands recueils d'érudition. Le Trésor de la Langue grecque, d'Henri Estienne. Dans le langage de l'Écriture et en termes de Dévotion, il se dit d'une Réunion, d'un assemblage de diverses choses bonnes ou mauvaises. Il est dit dans l'Évangile : Amassez-vous des trésors que les vers et la rouille ne puissent point gâter et que les voleurs ne puissent point dérober. Suivant saint Paul, le riche amasse sur sa tête des trésors de colère. Le trésor des miséricordes divines.

TRÉSOR se dit aussi de Toutes les choses pour lesquelles on a un grand attachement. Cet enfant est son trésor.

Littré (1872-1877)

TRÉSOR (tré-zor) s. m.
  • 1Amas d'or, d'argent ou d'autres objets précieux. Un passant lui demande [à un enfouisseur] à quel sujet ses cris. - C'est mon trésor que l'on m'a pris, La Fontaine, Fabl. IV, 20. On est venu lui dire… Que les ouvriers qui sont après son édifice, Parmi les fondements qu'ils en jettent encor, Avaient fait par hasard rencontre d'un trésor, Molière, l'Ét. II, 1. La vieillesse chagrine incessamment amasse, Garde, non pas pour soi, les trésors qu'elle entasse, Boileau, Art p. III. Qu'en un lieu que vous seul connaissez, Vous cachez des trésors par David amassés, Racine, Ath. I, 1. Il [Caligula] consuma dans un an les trésors que Tibère avait amassés ; et ces trésors montaient à deux milliards sept cents millions de sesterces (585 millions de notre monnaie), Pastoret, Instit. Mém. inscript. et belles-lettres. t. VII, p. 140.
  • 2 Au sens juridique Le trésor est toute chose cachée ou enfouie, sur laquelle personne ne peut justifier sa propriété, et qui est découverte par le pur effet du hasard, Code civ. art. 716.

    Droit de trésor, droit sur un trésor trouvé.

  • 3Lieu où le trésor est enfermé. Il a toujours sur lui la clef de son trésor. La forteresse, que défendait la triple enceinte, renfermait des palais somptueux pour loger le roi et les chefs des armées, et des trésors artistement construits pour contenir de grandes richesses, Mongez, Mém. hist. et beaux-arts, t. v, p. 221.

    Fig. Sa poche [du joueur] est un trésor ; Sous ses heureuses mains le cuivre devient or, Regnard, le Joueur, III, 6.

  • 4Dans les églises, lieu où l'on garde les reliques et les ornements.

    Il se dit aussi de ces reliques mêmes et de ces ornements.

  • 5Autrefois, lieu où l'on gardait les archives, les titres, les papiers d'une seigneurie, d'une communauté. Le trésor des chartes de telle abbaye, de telle seigneurie.
  • 6Trésor public, trésor de l'État, les revenus de l'État. La guerre appauvrit le trésor public. Autrefois le bien des particuliers faisait le trésor public ; mais pour lors [dans une démocratie dégénérée] le trésor public devint le patrimoine des particuliers, Montesquieu, Esp. III, 3. L'empereur écrivit que la conquête de Smolensk le rendait maître des salines russes, et que son ministre du trésor pouvait compter sur vingt-quatre millions de plus, Ségur, Hist. de Nap. VI, 5.

    Anciennement, chambre du trésor, juridiction qui était établie à Paris pour juger des affaires du domaine du roi.

  • 7 Absolument. Le Trésor, le lieu où les revenus de l'État sont déposés et administrés (avec un T majuscule). Aller au Trésor. Un employé du Trésor.
  • 8 Au plur. Grandes richesses. En assouvissant nos vengeances et nos secrètes jalousies, en accumulant dans nos coffres des trésors d'iniquité, sans jamais vouloir séparer le bien d'autrui d'avec le nôtre, Bossuet, Mar.-Thér. Des biens des nations ravisseurs altérés, Le bruit de nos trésors les a tous attirés [les Romains], Racine, Mithr. III, 1.

    Par extension, somme d'argent considérable. Il a dépensé des trésors pour cette affaire.

  • 9 Fig. Tout ce qui est d'une grande utilité, d'une excellence singulière, d'une grande beauté. Il y a des trésors en votre personne dont je saurai jouir en dépit de la mauvaise fortune, et avec lesquels je ne saurais jamais être pauvre ni triste, Voiture, Lett. 35. Et songez toutes deux que vous êtes Romaines… Un si glorieux titre est un digne trésor, Corneille, Hor. III, 5. Le père fut sage De leur montrer avant sa mort Que le travail est un trésor, La Fontaine, Fabl. v, 9. Les longues expériences de M. le Tellier étaient pour l'État un trésor inépuisable de sages conseils, Bossuet, le Tellier. La liberté leur était un trésor qu'ils [les Romains] préféraient à toutes les richesses de l'univers, Bossuet, Hist. III, 6. Rare et fameux esprit… Pour qui tient Apollon tous ses trésors ouverts, Boileau, Sat. II. Le trésor de l'honneur suppléait aux autres trésors, Montesquieu, Esp. v, 18. La modération est le trésor du sage, Voltaire, Disc. 4. Et l'on dirait de nous dans toute l'Europe : en France, sous le prétexte de la sûreté publique, on prive [en ouvrant les lettres] les citoyens de tout droit de propriété sur les lettres qui sont les productions du cœur et le trésor de la confiance, Mirabeau, Collection, t. I, p. 455. Quel art bâtit leurs murs [des abeilles], quel travail peut suffire à ces trésors de miel, à ces amas de cire ? Delille, Trois règnes, VII. Le christianisme, considéré lui-même comme passion, fournit des trésors immenses au poëte, Chateaubriand, Génie, II, III, 8.

    Ce livre est un trésor de doctrine, un trésor de recherches, il renferme beaucoup de science, d'érudition, de recherches. Son livre est d'agréments un fertile trésor, Boileau, Art p. III.

    Poétiquement. Les trésors de la terre, ses productions.

    Les trésors de Cérès, les moissons, le blé. La fourmi. .. Grossit ses magasins des trésors de Cérès, Boileau, Sat. VIII.

    Les trésors de Bacchus, les raisins, le vin.

    Les trésors de Flore, les trésors du printemps, les fleurs.

    Les trésors de l'automne, les fruits, les vendanges.

  • 10Titre donné à de grands recueils d'érudition ou autres. Le Trésor de la langue grecque. M. Farrenc publie une collection appelée le Trésor des pianistes. Le Trésor latin de Robert Estienne, et, à son défaut, le Dictionnaire de Charles Estienne qui est l'abrégé du Trésor, et dont un habile maître ne peut se passer, Rollin, Traité des Ét. I, 3.
  • 11Il se dit de personnes regardées comme particulièrement précieuses. Un ami véritable est un trésor. S'il [Attale] est si bien instruit dans l'art de commander, C'est un rare trésor qu'elle [Rome] devrait garder, Corneille, Nic. II, 3. C'est un trésor d'honneur que j'ai dans ma maison, Molière, Éc. des mar. II, 6. L'empereur reçut Arsène comme un trésor que le ciel même lui envoyait, Fléchier, Hist. de Théodose, III, 16. Ce que vous prenez pour une plainte est une admiration : cette fille est un trésor, Maintenon, Proverb. p. 7. Quel climat renfermait un si rare trésor [Esther] ? Racine, Esth. III, 4. Faisons de ce trésor [Joas] Jéhu dépositaire, Racine, Ath. III, 6. Vous avez raison, Télémaque, Antiope est un trésor digne d'être recherché dans les terres les plus éloignées, Fénelon, Tél. XXII. Ajoutez à cela le charme de la vie, Une femme : la mienne est un petit trésor, Collin D'Harleville, Vieux célib. II, 2.

    Par ironie. Votre frère est un trésor de folie qui tient bien sa place ici, Sévigné, 58.

  • 12Tout objet pour lequel on a un grand attachement. Cet enfant est mon trésor. L'Evangile dit : là où est votre trésor, là est votre cœur. Quel est cet autre enfant si cher à votre amour ? Ce grand attachement me surprend à mon tour ; Est-ce un trésor pour vous si précieux, si rare ? Racine, Athal. III, 4.

    Elliptiquement. Adieu ! trésor [à sa femme] ; embrasse le cher Paul, Courier, Lett. II, 172.

  • 13Attraits, charmes d'une femme. Ces trésors dont le ciel voulut vous embellir, Les avez-vous reçus pour les ensevelir ? Racine, Brit. II, 3. L'épouse veut encor Fuir l'époux qui l'embrasse ; Mais sur plus d'un trésor Le fripon fait main basse, Béranger, Soir des noces.
  • 14Dans l'Écriture, assemblage de diverses choses bonnes ou mauvaises, soit physiques, soit morales. Dieu tire de ses trésors les vents, la pluie. C'est là le trésor de colère que vous amassez pour les derniers jours, Sacy, Bible, St Jacq. Épît. cath. v, 3. Faites-vous des trésors dans le ciel, où ni la rouille, ni les vers ne les mangent point, Sacy, ib. Évang. St Matthieu VI, 20. Est-ce là le fruit du travail dont vous vous êtes consumés sous le soleil, vous amassant un trésor de haine et de colère éternelle au juste jugement de Dieu ? Bossuet, le Tellier. Dieu a des trésors de colère, comme des trésors de bonté ; et les uns et les autres sont également des trésors de sagesse et de science, Bourdaloue, Exhort. sur la trah. de Judas, t. I, p. 440. Un de ces hommes, en qui Dieu met ses dons d'intelligence et de conseil, et qu'il tire de temps en temps des trésors de sa providence pour assister les rois, Fléchier, le Tellier. Depuis que de Pandore un regard téméraire Versa sur les humains un trésor de misère, Chénier, Épîtres, II. Hommes présomptueux, avez-vous pénétré dans les trésors de la grêle, et connaissez-vous les réservoirs de cet abîme où le Seigneur a puisé la mort au jour de ses vengeances ? Chateaubriand, Génie, I, IV, 4.

    Fig. Des trésors de colère se sont amassés contre nous tous [les philosophes], et vous ne l'ignorez pas, Voltaire, Lett. d'Alembert, 8 juill. 1765.

    L'Église ouvre ses trésors, elle accorde des indulgences.

  • 15 Terme d'alchimie. Trésor incomparable des philosophes, la pierre parfaite.
  • 16Variété de poire appelée aussi poire d'amour.

HISTORIQUE

XIe s. Puis si cumencet à venir ses tresors [son trésor], Ch. de Rol. XLIV.

XIIe s. … j'ai des milie livres en mun tresor d'aveir ; Ainz [avant] les despenderai tuz (ço saciez pur veir), Que jo ne face tut l'orguil Thomas chaeir, Th. le mart. 132. E conuit que sis tresors li defailloit, Machab. I, 3.

XIIIe s. Rois, vous avez tresor d'or et d'argent, Plus que nus rois n'ot oncques, ce m'est vis, Quesnes, Romancero, p. 101. Se j'estoie asseurés de vos, je vous donroie de mon tresor tant que vous n'en oseriés mi tant prendre, Chron. de Rains, p. 23. Et le roy respondit que il n'avoit de quoy, et que il n'avoit si bon tresor dont il ne feust à la lie [au bout], Joinville, 212.

XIVe s. Les autres aumaires [armoires] de l'entrée du thresor, Bibl. des ch. 4e série, t. v, p. 163.

XVe s. Qui a les cuers, il a l'avoir ; Mais qui a l'avoir sans les cors [cœurs], Ce n'est pas li plus sains tresors, Deschamps, Miroir de mariage, p. 88. Ne tarda gueres qu'elle se retrouva devant le chevalier, auquel on pouvoit dire apertement : là où tel tresor est, là est ton cueur et tes pensées ; et ainsi estoit il, car il pensoit merveilleusement à la pucelle, Perceforest, t. v, f° 44. Mieulx vaut tresor d'onneur que d'or, Leroux de Lincy, Prov. t. II, p. 350.

XVIe s. Musser son tresor devant les larrons, Leroux de Lincy, t. II, p. 352.

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Encyclopédie, 1re édition (1751)

TRÉSOR, s. m. (Droit naturel & civil.) thesaurus est vetus quædam depositio pecuniæ, cujus non extat memoria, ut jam dominum non habeat : sic enim fit ejus qui invenerit quod non alterius sit, alioquin si quis aliquid vel lucri causâ, vel metûs, vel custodroe, condiderit sub terra, non est thesaurus cujus etiam furtum sit. Digest. lib. XLI. tit. I.

Selon cette définition, un trésor est un argent trouvé, & dont on ignore le maître. Je dis, dont on ignore le maître ; car si quelqu’un cache en terre son argent crainte d’être dépouillé, ou simplement faute d’endroits plus commodes pour le serrer, ce n’est pas un trésor ; & quiconque le prend, se rend coupable de larcin, comme ce valet dont il est parlé dans la comédie de Plaute, intitulée Aulularia. On demande donc à qui appartient un trésor trouvé, c’est-à-dire un argent dont on ignore le maître.

Selon le droit naturel tout seul, un trésor, de même que toutes les autres choses qui n’ont point de maître, appartiennent au corps de l’état, ou à ceux qui le représentent, en un mot, au souverain. Mais d’un autre côté, le souverain est censé laisser ces sortes de choses au premier occupant, tant qu’il ne se les réserve pas bien clairement à lui-même. Et lorsqu’il permet aux particuliers ou expressément, ou tacitement, de se les approprier ; celui qui trouve un trésor & qui s’en saisit, en devient par-là maître, quand même il l’auroit trouvé dans un fonds appartenant à autrui, si les lois civiles n’en disposent autrement ; parce que le trésor n’est pas accessoire du fonds, comme les métaux, les minéraux, & autres choses semblables qui y sont attachées naturellement, & dont à cause de cela le propriétaire du fonds peut être regardé comme en possession.

Les lois romaines qui donnent la moitié du trésor au maître du fonds, & l’autre moitié à celui qui y trouve un trésor, étendent cela à un ouvrier qui est payé par le maître du champ ou de la maison pour y travailler ; car, dit-on, il n’agit au nom de celui qui l’a loué qu’en ce qui regarde l’ouvrage qu’il a à faire. Nemo enim servorum opera thesaurum quæret : nec ea propter tum terram fodiebat, sed alii rei operam insumebat & fortuna aliud dedit. Digest. lib. XLI. tit. I. De acquir. rer. domin. leg. 43.

Platon décide qu’un trésor, & en général toutes les choses perdues, ne demeurent pas à celui qui les trouve, quoiqu’on ne sache point à qui elles appartiennent ; mais il prétend qu’il faut consulter là-dessus l’oracle de Delphes, pour disposer de ces choses comme il en ordonnera. C’est pousser le scrupule aussi loin que faisoit un philosophe chinois, nommé Chiungai, qui s’imaginant qu’il n’étoit pas permis de rien toucher que l’on soupçonnât le moins du monde être le fruit de quelque injustice, ne vouloit pas loger dans la maison de son pere, crainte qu’elle n’eût été bâtie par des fripons, ni manger chez ses parens ou ses freres, de peur que ce qu’ils lui donneroient ne fût mal aquis. On a lieu de croire que parmi les Juifs, les Romains du tems de Plaute & les Syriens, le trésor appartenoit au maître du champ où il avoit été trouvé ; mais ce qu’on sait plus certainement, c’est que les lois romaines ont fort varié sur cette matiere. Voyez le droit public de M. Domat, liv. I. tit. VI. sect. 3. & le jus privatum romano-german. de Titius, lib. VIII. cap. xiij.

Au reste il convient de savoir qu’il y a sur ce sujet parmi nous divers réglemens, des lois civiles selon les différens pays, comme aussi diverses opinions parmi les auteurs ; mais il seroit inutile d’entrer dans ce détail. (D. J.)

Trésor public, (Antiq. d’Athènes.) le trésor public d’Athènes étoit consacré à Jupiter sauveur, & à Plutus dieu des richesses. Dans la masse des revenus publics qui formoient ce trésor, on y gardoit toujours en réserve mille talens, 187 mille 500 livres sterlings, auxquels il étoit défendu de toucher sous des peines capitales, excepté dans les besoins les plus urgens de l’état.

Les fonds de subside qui fournissoient le trésor public d’Athènes provenoient de l’imposition, nommée tête, τέλη ; des phori, φόροι ; des eisphoræ, εἰσφοραί ; & des timemata, τιμήματα, c’est-à-dire des amendes, les autres mots ont été expliqués à leur article.

Leur trésor public étoit employé à trois sortes de dépenses, qui tiroient leurs noms de leur emploi. On appelloit 1°. τὰ χρήματα τῆς διοικήσεως, les fonds destinés aux dépenses civiles ; 2°. τὰ στρατιωτικὰ χρήματα, les fonds destinés pour la guerre ; 3°. τὰ θεωρικὰ, les fonds destinés pour la religion. Dans cette derniere classe étoient comprises les dépenses des théatres & des fêtes publiques.

Il y avoit un trésorier assigné à chaque branche des revenus publics, & l’on appelloit cette magistrature, ταμίας τῆς διοικήσεως, τῶν στρατιωτικῶν, & θεωρικῶν. Potter, archæol. græc. t. I. p. 82. (D. J.)

Trésor public, (Antiq. rom.) trésor de l’épargne formé des deniers publics.

Il y avoit dans le temple de Saturne, situé sur la pente du mont Capitole, trois trésors publics. Dans le trésor ordinaire, l’on mettoit l’argent des revenus annuels de la république, & l’on en tiroit de quoi subvenir aux dépenses ordinaires.

Le second trésor provenoit du vingtieme qu’on prenoit sur le bien des affranchis, sur les legs & successions qui étoient recueillis par d’autres héritiers que les enfans des morts, ce qui montoit à des sommes excessives. Ce second trésor étoit appellé par cette raison aurum vicesimarium.

Dans le troisieme étoit en réserve tout l’or que l’on avoit amassé depuis l’invasion des gaulois, & que l’on conservoit pour des extrémités pareilles, sur-tout en cas d’une nouvelle irruption de ces mêmes gaulois. Ce fut ce qui donna lieu à ce noble trait d’esprit de César au tribun qui gardoit ce trésor, quand ce grand capitaine le fit ouvrir par force, sous prétexte de la guerre civile : « Il est inutile, dit-il, de le réserver davantage, puisque j’ai mis Rome hors de danger d’être jamais attaquée par les Gaulois ».

C’étoit dans le troisieme trésor qu’étoient encore les sommes immenses que les triomphateurs apporterent des pays conquis. César s’empara de tout, & en fit des largesses incroyables. Cependant ce troisieme trésor public, ainsi que le second, s’appelloit sanctius ærarium, mais rien n’étoit sacré pour servir à l’ambition de ce nouveau maître de Rome.

Tout le monde sait que le mot général ærarium, qu’on donnoit à tous ces trésors, venoit de ce que la premiere monnoie des Romains étoit du cuivre. Quand la république fut soumise à l’autorité d’Auguste, il eut son trésor particulier sous le nom de siscus. Le même empereur établit un trésor militaire, ærarium militare.

Les pontifes avoient aussi leur trésor, ærarium, que l’on appelloit plus communément arca ; & ceux qui en avoient la garde se nommoient arcarii, dont il est fait mention dans le code Théodosien, & dans le code Justinien, liv. II. tit. VII. (D. J.)

Trésor, (Critique sacrée.) en grec θησαυρὸς, ce mot signifie 1°. un amas de richesses mises en réserve, Matth. vj. 19. ne cherchez point à amasser des trésors sur la terre : 2°. des coffres, des cassettes ; les mages après avoir déployé leurs trésors, θησαυροὺς αὐτῶν, Matth. ij. 11. c’est-à-dire après avoir ouvert les cassettes, les coffres où étoient renfermées les choses précieuses qu’ils vouloient présenter au Sauveur : 3°. magasin où l’on garde les provisions, Matth. xiij. 52. le pere de famille tire de sa dépense, ἐκ τοῦ θησαυροῦ, toutes sortes des provisions.

Le trésor de l’épargne étoit la tour où les rois de Juda faisoient porter leurs finances, IV. Rois, xx. 15. le trésor du temple étoit le lieu où l’on mettoit en réserve tout ce qui étoit consacré au Seigneur, Josué vj. 19. le trésor de Dieu est une expression métaphorique, pour marquer ses bienfaits, sa puissance, &c. Il tire de ses trésors, comme d’un arsenal, les traits dont il punit les méchans, Jérémie, l. 25. Les trésors d’iniquité désignent les richesses aquises par des voies injustes, Prov. x. 2. (D. J.)

Trésor des chartes du roi, est le dépôt des titres de la couronne, que l’on comprenoit tous anciennement sous le terme de chartes du roi.

On entend aussi par-là le lieu où ce dépôt est conservé.

Anciennement & jusqu’au tems de Philippe-Auguste, il n’y avoit point de lieu fixe pour y garder les chartes du roi ; ces actes étant alors en petit nombre, nos rois les faisoient porter à leur suite par-tout où ils alloient, soit pour leurs expéditions militaires, soit pour quelqu’autre voyage.

Guillaume le Breton & autres historiens rapportent, qu’en 1194 Philippe-Auguste ayant été surpris pendant son dîner, entre Blois & Fretteval, dans un lieu appellé Bellesoye, par Richard IV. dit Cœur de lion, roi d’Angleterre & duc de Normandie, avec lequel il étoit en guerre, il y perdit tout son équipage, notamment son scel & ses chartes, titres & papiers.

M. Brussel prétend néanmoins que cet enlevement n’eut pour objet que certaines pieces, & que les Anglois n’emporterent point de registres ni de titres considérables.

Il y a du moins lieu de croire que dans cette occasion les plus anciens titres furent perdus, parce qu’il ne se trouve rien au trésor des chartes que depuis Louis le Jeune, lequel, comme on sait, ne commença à regner qu’en 1137.

Philippe-Auguste, pour réparer la perte qui venoit de lui arriver, donna ordre que l’on fît des soigneuses recherches, pour remplacer les pieces qui avoient été enlevées.

Il chargea de ce soin Gaultier le jeune, Galterius junior, auquel du Tillet donna le titre de chambrier.

Ce Gaultier, autrement appellé frere Guerin, étoit religieux de l’ordre de S. Jean de Jérusalem. Il fut évêque de Senlis, garde des sceaux de France sous Philippe-Auguste, puis chancelier sous Louis VIII. & S. Louis.

Il recueillit ce qu’il put trouver de copies de chartes qui avoient été enlevées, & rétablit le surplus de mémoire le mieux qu’il lui fut possible.

Il fut arrêté que l’on mettroit ce qui avoit été ainsi rétabli, & ce qui seroit recueilli à l’avenir, en un lieu où ils ne fussent point exposés aux mêmes hasards ; & Paris fut choisi, comme la capitale du royaume, pour y conserver ce dépôt précieux.

Il est présentement placé dans un petit bâtiment en forme de tour quarrée, attenant la Ste Chapelle, du côté septentrional : au premier étage de ce bâtiment est le trésor de la Ste Chapelle ; & dans deux chambres l’une sur l’autre, au-dessus du trésor de la Ste Chapelle, est le trésor des chartes.

Mais ce dépôt n’a pu être placé dans cet endroit que sous le regne de S. Louis ; & seulement depuis 1246, la Ste Chapelle n’ayant été fondée par ce roi que le 12 Janvier de cette année.

Les chartes ou titres recueillis dans ce dépôt sont les contrats de mariages des rois & reines, princes & princesses de leur sang, les quittances de dot, assignations de douaire, lettres d’apanages, donations, testamens, contrats d’acquisition, échanges, & autres actes semblables, les déclarations de guerre, les traités de paix, d’alliance, &c.

On y trouve aussi quelques ordonnances de nos rois, mais elles n’y sont pas recueillies de suite, ni exactement ; car le registre de Philippe-Auguste & autres des regnes suivans jusqu’en 1381, ne sont pas des recueils d’ordonnances de ces princes, mais des registres de toutes les chartes qui s’expédioient en chancellerie, parmi lesquelles il se trouve quelques ordonnances.

Le roi enjoignoit pourtant quelquefois par ses ordonnances mêmes de les déposer en original au trésor des chartes, témoin celle de Philippe VI. touchant la régale du mois d’Octobre 1344, à la fin de laquelle il est dit qu’elle sera gardée par original au trésor des chartes & lettres du roi, ordonnances de la troisieme race, tome V.

Lorsque le trésor des chartes fut établi dans le lieu où il est présentement, on créa aussi-tôt un gardien de ce dépôt, que l’on appelle trésorier des chartes de France, & que l’on a depuis appellé trésorier-garde des chartes & papiers de la couronne, ou, comme on dit vulgairement, garde du trésor des chartes.

Suivant des lettres de Louis XI. de l’an 1481, il doit prêter serment de cette charge en la chambre des comptes.

En instituant le trésorier des chartes, on lui donna non-seulement la garde de ce dépôt, mais on le chargea aussi de recueillir les chartes & titres de la couronne, de les déposer dans le trésor, & d’en faire de bons & fideles inventaires.

Il nous reste encore quelques notions de ceux qui ont exercé la charge de trésorier des chartes.

Le plus ancien qui soit connu, est Me. Jean de Calais.

Depuis Etienne de Mornay qui l’étoit en 1305, on connoit assez exactement ceux qui ont rempli cette charge.

On trouve qu’en 1318, Pierre d’Estampes ou de Stampis étoit garde du trésor ; mais M. Dupuy dit qu’il y a lieu de douter si ce Pierre d’Estampes & ceux qui lui succéderent en cet emploi jusqu’en 1370, étoient véritablement gardes du trésor des chartes ; il prétend qu’ils étoient seulement gardes des chartes de la chambre des comptes, que l’on appelle aujourd’hui gardes des livres.

Cependant ils ne sont pas qualifiés simplement gardes des livres ou lettres du roi, mais gardes du trésor de lettres du roi ; par exemple, à la marge des lettres de Charles, régent du royaume, pour le rétablissement du bailliage royal de Saint-Jangon en Mâconnois, du mois de Décembre 1359, qui sont au mémorial D de la chambre des comptes de Paris ; fol. 1, est écrit : ego Adam Boucherii clericus domini regis & custos thesauri litterarum regiarum, recepi in camerâ compotorum originale hujus transcripti per manum magistri Johannis Aquil. die penult. Januarii, anno 1359. Voyez les ordonnances de la troisieme race, tom. III. p. 380, aux notes.

Dans la confirmation des privileges que le roi Jean accorda en Janvier 1350, aux habitans de la ville de Florence, il est dit qu’il fit tirer des registres de son pere (Philippe VI.) lesdites lettres de privileges qui sont du mois de Mai 1344, & ces registres s’entendent du trésor des chartes. Voyez les ordonnances de la troisieme race, tom. IV. pag. 37, & la note de M. Secousses, à la table des matieres, au mot trésor des chartes.

En 1364, Pierre Gonesse étoit garde des chartes & des privileges royaux dont on lui remettoit les originaux ; il donnoit des expéditions signées de lui des lettres qui y étoient contenues ; il est qualifié custos cartarum & privilegiorum regiorum, ce qui ne paroît pas équivoque. Voyez les ordonnances de la troisieme race, tom. IV. p. 474, 475 & 476.

Il est encore parlé du trésor des chartes dans des lettres de Charles V. du 14 Mars 1367, ordonnances de la troisieme race, tom. V. p. 100 & 103.

Les premiers gardes du trésor des chartes ne firent que des inventaires si succints, qu’on n’en peut presque point tirer d’instruction. Au mois de Janvier 1371, Charles V. ayant visité en personne son trésor des chartes, & voyant la confusion qui y étoit, en donna la garde à Gérard de Montaigu qu’il fit son notaire & secrétaire trésorier & garde de son trésor des chartes, & par ses lettres patentes il ordonna qu’à l’avenir ceux qui auroient la garde dudit trésor, seroient appellés trésoriers & ses secrétaires perpétuels.

Il est parlé de ce Gerard de Montaigu en ladite qualité à la marge des lettres de Charles V. du mois de Septembre 1371, qui sont au cinquieme volume des ordonnances de la troisieme race, p. 425 & 426. Il fut garde du trésor jusqu’en 1375. Dreux Bude lui succéda en cette fonction le 7 Février 1375. Le 22 Septembre 1376 le même Gerard de Montaigu étoit garde du trésor de la chapelle. Voyez le recueil des ordonnances de la troisieme race, p. 30, 56 & 218. Chopin, de dom. lib. III. p. 459, dit que Dreux (Draco) & Jean Bude, aïeul & pere de Guillaume Bude, furent successivement gardes du trésor des chartes, ainsi que Guillaume Budée le remarque en sa note sur la loi nec quicquam ff. de offic. proconsul.

Pour revenir aux inventaires du trésor des chartes, Gerard de Montaigu en fit un, mais qui fut encore très-succint, suivant lequel il y avoit alors 310 layettes ou boëtes, 109 registres, & quelques livres de juifs, desquels il n’est resté que quatre hébreux qui y sont encore. Montaigu mit à part les papiers inutiles & plusieurs coins de monnoie, qui sont à présent rongés de la rouille, & que l’on a mis en la chambre haute.

Les registres sont seulement cottés audit inventaire selon les tems, depuis Philippe Auguste jusqu’en 1381, tellement que pour trouver une charte dans ces registres, il faut savoir le tems qu’elle a été enregistrée en l’audience de la chancellerie, ou plutôt levée, parce qu’on n’en faisoit registre qu’après qu’elle avoit été délivrée.

Le 12 Septembre 1481, Jacques Louvet commença un inventaire qui n’étoit que de 75 layettes, selon l’ancienne quote, dont il s’en trouva deslors plusieurs de manque.

Suivant la commission qui avoit été donnée pour faire cet inventaire dès l’an 1474, on voit que le trésor fermoit à trois clés, dont l’une demeura à Jean Bude, ancien trésorier des chartes, une audit Louvet, trésorier actuel, & la troisieme à MM. de la chambre des comptes auxquels tout ce qui se faisoit se rapportoit par cahiers.

Sous le roi François I. on porta au trésor quinze coffres appellés les coffres des chanceliers, parce qu’ils contenoient les papiers trouvés chez les chanceliers du Prat, du Bourg & Poyet. Ceux de ce dernier furent saisis quand on lui fit son procès au mois de Juin 1542, & ensuite mis au trésor des chartes.

Il faut remarquer à cette occasion qu’anciennement après la mort ou démission des chanceliers ou gardes des sceaux, l’on retiroit d’eux ou de leurs héritiers les papiers du roi, ainsi qu’on l’a vu pratiquer par la décharge qui fut donnée aux héritiers du chancelier des Ursins.

Du tems que M. de Thou, fils du premier président, fut trésorier des chartes, M. du Tillet, greffier en chef du parlement, auteur du recueil des rois de France & autres œuvres qu’il composa tant sur les registres du parlement & sur ceux de la chambre des comptes, que sur le trésor des chartes, eut pour cet effet permission d’entrer au trésor même, de transporter ce dont il auroit besoin : ce qui fut fait avec si peu d’ordre, que les titres dont il s’étoit servi ne furent point remis à leur place, plusieurs ne furent point rapportés, & demeurerent chez lui ou se trouverent perdus.

Le désordre s’accrut encore par l’entrée qu’eut au trésor M. Brisson la premiere année qu’il fut avocat du roi, lequel emporta de ce dépôt beaucoup de bons mémoires, même les remontrances faites à l’occasion du concordat.

M. Jean de la Guesle, procureur général, voyant le circuit qu’il étoit obligé de faire pour avoir quelque titre du trésor, qu’il falloit présenter requête au roi, puis obtenir une lettre de cachet, fit démettre celui qui étoit alors trésorier des chartes, & unir cette charge à perpétuité à celle de procureur général, ce qui fut fait au mois de Janvier 1582 ; & le procureur général prend depuis ce tems la qualité de trésorier-garde des chartes & papiers de la couronne, & tel est le dernier état au moyen de quoi MM. Dupuy & Godefroi, commis sous M. Molé, procureur général, trésorier des chartes, firent en 1615 un inventaire lors duquel ils trouverent beaucoup de titres pourris, partie des layettes brisées & pourries faute d’avoir entretenu la couverture. Ils remirent l’ordre qui y est aujourd’hui, ayant rangé les layettes par les douze gouvernemens, puis les affaires étrangeres, les personnes & les mélanges, tellement qu’ils mirent en état 350 layettes, 15 coffres & 52 sacs. Pour les registres ils furent rangés selon l’ordre chronologique du regne des rois.

L’inventaire des layettes, coffres & sacs contient huit volumes de minute. MM. Dupuy & Godefroy n’acheverent pas celui des registres, ayant été occupés à d’autres affaires.

M. Molé fit apporter au trésor les papiers de M. de la Guesle, procureur général ; on les mit dans des sacs étiquetés, ce qui remplit une partie d’une grande armoire distribuée en quarante-deux guichets.

Le roi ayant fait raser le château de Mercurol en Auvergne, où étoient ses titres pour ledit pays, on les a mis au trésor des chartes dans la chambre haute ; mais on en a tiré peu d’utilité.

On y a aussi mis quelques papiers de M. Pithou, des papiers concernant Metz, Toul & Verdun, la Lorraine ; on apporta de Nancy six grands coffres qui sont au trésor.

M. Dupuy dit que les ministres ont négligé de faire porter les titres au trésor des chartes : que pour ce qui est des registres des chartes qui s’expédioient en la chancellerie, & pour lesquels on exige encore un droit, l’on n’en a point apporté au trésor des chartes depuis Charles IX. qu’à l’égard des originaux, on n’y en a point mis non plus depuis longtems, si ce n’est quelques pieces singulieres, comme le procès de la dissolution du mariage d’Henri IV. avec la reine Marguerite.

M. de Lomenie, secrétaire d’état, fit remettre à M. Molé, procureur général, les originaux des actes passés pour le mariage d’Henriette de France avec Charles I. roi d’Angleterre, pour être déposés au trésor de chartes.

Le cardinal de Richelieu v fit aussi mettre grand nombre de petits traités & actes faits par le roi avec les princes & états voisins.

On y chercha le contrat de mariage de Louis XIII. qui se trouva enfin dans un lieu où il ne devoit pas être.

Le garde des sceaux de Marillac fit rendre un arrêt du conseil d’état le 23 Septembre 1628, portant que les traités, actes de paix, mariages, alliances & négociations, de quelque nature qu’elles soient, passées avec les princes, seigneuries & communautés, tant dedans que dehors le royaume, seroient portés au trésor des chartes & ajoutés à l’inventaire d’icelui, & il fut enjoint aux chanceliers gardes des sceaux d’y tenir la main.

M. Dupuy dit que tout cela a encore été mal exécuté, & que les choses sont restées comme auparavant.

Mais par les soins de MM. Joly de Fleury pere & fils, plusieurs pieces anciennes très-importantes ont été récouvrées & miles au trésor des chartes.

Par exemple, le registre 84, qui depuis très-longtems étoit en deficit dans ce dépôt, s’étant trouvé dans la bibliotheque de M. Rouille du Coudray, conseiller d’état, & lors de sa mort arrivée en 1729, ayant passé entre les mains de M. de Fourqueux, procureur général de la chambre des comptes de Paris, son neveu, ce magistrat l’a remis au trésor des chartes, & ce registre a été réuni aux autres qui sont conservés dans ce dépôt. Voyez l’avertissement de M. Secousse qui est au troisieme volume des ordonnances de la troisieme race, p. 673.

Pour ce qui est des pieces modernes, il y a plus de cent ans que l’on n’en n’a mis aucune au trésor des chartes ; on en a d’abord mis quelques-unes aux archives du louvre, ensuite on a mis toutes celles qui sont survenues dans le dépôt des manuscrits de la bibliotheque du roi, où il y a déja plus de pieces qu’au trésor des chartes.

Il y a présentement plusieurs commissaires au trésor des chartes qui sont nommés par le roi, & qui sous l’inspection de M. le procureur général, travaillent aux inventaires & dépouillemens des pieces qui sont dans ce dépôt, dont on fait différentes tables & extraits, non-seulement par ordre des matieres, mais aussi des tables particulieres des noms de lieu, des noms des personnes, & singulierement de ceux des grands officiers de la couronne, des titres qui étoient alors usités, des noms des monnoies, & autres objets semblables qui méritent d’être remarqués.

On travaille aussi à une table générale des registres & à une autre de toutes les pieces originales qui sont au trésor ; on se propose même de faire une table générale de toutes les chartes du royaume qui se trouvent dispersées dans différens dépôts, depuis le commencement de la monarchie jusqu’en 1560, tems depuis lequel les actes qui ont suivi, ont été recueillis avec plus de soin dans différentes collections.

Il seroit à souhaiter que le public pût profiter bientôt de ce travail immense, dans lequel on puiseroit sans doute une infinité de connoissances curieuses & utiles. (A)

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Étymologie de « trésor »

Bourguign. trésô ; provenç. thesaur ; anc. catal. tesor ; espagn. tesoro ; anc. espagn. tresoro ; portug. thesouro ; ital. tesoro ; napolit. trasoro ; du lat. thesaurus, qui est le grec θησαυρὸς, qui vient, suivant les étymologistes, de θέω, poser, et d'une finale αυρος, analogue à la finale connue ωπη. Quant à l'r dans le français, elle est épenthétique, comme dans fronde, du lat. funda.

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Du latin thesaurus, lui-même issu du grec ancien θησαυρός, thêsaurós.
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Phonétique du mot « trésor »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
trésor tresɔr

Citations contenant le mot « trésor »

  • Les trésors d'un cœur pur ne souffrent pas partage.
    Robert Desnos — Fortunes, Gallimard
  • La virginité est le plus riche trésor des filles, mais il est bien malaisé de garder longtemps un trésor dont tous les hommes possèdent la clé.
    Maréchal de Bassompierre
  • Pour la saison estivale et dans le contexte particulier amené par la crise sanitaire, l'office de tourisme Ardèche Hermitage a décidé de mettre à profit sa créativité en élaborant une collection de chasses au trésor sur tout le territoire, gratuites et valables toute l'année. Une série de parcours ludiques et récréatifs réalisables en autonomie, à faire en famille, entre amis, à deux ou même en solo. Équipé d'un livret, il vous suffit de suivre les instructions et de résoudre les énigmes tout en faisant de belles découvertes.
    hebdo-ardeche.fr — Tournonais - Une chasse au trésor ludique !
  • Une chasse au trésor en plein air, entre amis ou en famille, a eu lieu, mercredi 29 juillet. Cette animation est proposée chaque mercredi jusqu’au 26 août, à la pointe de Primel, à 14 h 30.
    Le Telegramme — Chasse au trésor à la pointe de Primel - Saint-Jean-du-Doigt - Le Télégramme
  • Cette année, dans un contexte sanitaire qui restreint de nombreuses activités touristiques, la chasse au trésor des Portes de Meuse tire son épingle du jeu en misant sur une activité de découverte familiale, sur les grands espaces et le remarquable patrimoine du sud meusien.
    Culture - Loisirs | Sixième édition de la chasse au trésor des Portes de Meuse
  • Durant tout l'été, le conseil départemental de la Creuse va publier sur les réseaux 14 vidéos de trois minutes chacune afin de mieux connaître les trésors plus ou moins cachés de son patrimoine.
    France Bleu — La Creuse lance l'opération vidéo "un trésor dans mon département"
  • Du 10 au 12 juillet dernier l’émission la Carte aux trésors avait investi le ciel des Pyrénées-Atlantiques. Le tournage de l’émission, retardé par le coronavirus, a pu finalement reprendre normalement. 
    SudOuest.fr — L’émission de France 3, "La Carte aux trésors", atterrit dans le Béarn
  • On pense à celle du musée Condé, évidemment. Il s’agit, ni plus ni moins, de la deuxième collection de peintures anciennes après Le Louvre. Il fallait être le duc d’Aumale – première fortune de France à huit ans, quand il hérite de son parrain le dernier prince de Condé – pour amasser un tel trésor.
    Pic'Avenir — Les clefs du domaine de Chantilly
  • La carte au trésor est un jeu de piste géant, qui permettra aux deux candidats de résoudre trois énigmes en arpentant Porto-Vecchio, Bonifacio, Figari, Bitalza ou encore Santa Giulia.
    Corse Matin — L'émission la carte au trésor dans l'Extrême-Sud | Corse Matin
  • L’Université catholique de Lille s’apprête à vendre un inestimable manuscrit liturgique du XIe siècle. Pour qu’il ne quitte pas la France, ce document a été classé trésor national. Mais il cherche toujours acquéreur…
    La Vie.fr — “Vends trésor national, manuscrit du XIe siècle”
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Traductions du mot « trésor »

Langue Traduction
Anglais treasure
Espagnol tesoro
Italien tesoro
Allemand schatz
Chinois 宝藏
Arabe كنز
Portugais tesouro
Russe сокровище
Japonais
Basque altxorra
Corse tesoru
Source : Google Translate API

Synonymes de « trésor »

Source : synonymes de trésor sur lebonsynonyme.fr

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Nombre de points du mot trésor au scrabble : 5 points

Trésor

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