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Roi

Variantes Singulier Pluriel
Masculin roi rois

Définitions de « roi »

Trésor de la Langue Française informatisé

ROI, subst. masc.

I.
A. −
1. Homme qui règne (politiquement). Roi absolu, légitime; jeune, pauvre, vieux roi; le feu roi; le roi David; le roi d'Angleterre; S.M. l'empereur et roi; sacre d'un roi; le métier de roi; faire déposer un roi. Nous partîmes, le président et moi, pour aller saluer le roi et la reine des Belges (Joffre, Mém., t. 1, 1931, p. 478).Le roi n'est plus roi de France, mais, comme en 1791, « roi des Français » (Vedel, Dr. constit., 1949, p. 77).
Roi constitutionnel. Roi exerçant le pouvoir dans le cadre d'une monarchie constitutionnelle. Nous avons comme vous savez un roi constitutionnel qui tient beaucoup à l'appui des bayonnettes (Tocqueville, Corresp.[avec Reeve], 1846, p. 96).
En appos. Le prophète roi (...) le nomme [le tonnerre], avec beaucoup d'élégance orientale, le cri de la nue (J. de Maistre, Soirées St-Pétersb., t. 1, 1821, p. 382).
En compos. L'homme-roi est envoyé de Dieu pour le bien de l'État (Bonald, Législ. primit., t. 1, 1802, p. 336).L'enfant-roi mourut au Temple, le 20 prairial (8 juin) (Lefebvre, Révol. fr., 1963, p. 442).Vice-roi*.
2. HISTOIRE
a) [Accompagné d'un adj. ou d'un compl. déterminatif, désigne un ou des rois précis; l'usage des majuscules est variable]
[En France] Les rois fainéants. V. fainéant.Le Roi Très(-)Chrétien. V. chrétien I A hist.
Les rois chevelus. Les rois mérovingiens. L'étymologie des mots cour, ville (...) donne raison à M. Renan, en nous révélant le mode d'existence des rois chevelus (A. France, Vie littér., 1888, p. 296).
Le Roi(-)Soleil, le grand roi. Louis XIV. Jusque sous le grand Roi, les poètes à perruques avaient leur franc-parler. Molière n'épargnait rien. La Fontaine raillait tout (Rolland, J.-Chr., Révolte, 1907, p. 525).L'étonnante lumière que les Mémoires [de Saint-Simon] nous ouvrent sur la mentalité d'un grand seigneur à la cour du Roi Soleil (M. Bloch, Apol. pour hist., 1944, p. 25).
Le roi bourgeois, le roi(-)citoyen. Louis-Philippe. Il racontait l'histoire des bas de laine, dans lesquels le roi citoyen cachait ses gros sous (Zola, Ventre Paris, 1873, p. 661).Lorsque le roi bourgeois n'était encore que le duc d'Orléans (Grandjean, Orfèvr. XIXes., 1962, p. 17).V. citoyen ex. 14.
Le roi de Rome. [Titre donné par Napoléon Ierà son fils] Napoléon II, l'Aiglon. J'ai vu aussi le roi de Rome enfant dans les bras de sa nourrice (Sand, Hist. vie, t. 2, 1855, p. 172).
[À l'étranger]
Le roi des rois. Agammemnon. [Iphigénie] répand des bienfaits autour d'elle, en fille du roi des rois (Staël, Allemagne, t. 2, 1810, p. 50).
Le grand roi, le roi des rois. Le roi des Perses. Principem dat deus formoit tout le droit politique de la Perse (...). Cependant l'autorité du grand Roi n'étoit pas aussi absolue que celle des sultans de Constantinople de nos jours (Chateaubr., Essai Révol., t. 1, 1797, p. 323).Ce n'est pas notre propos d'examiner si c'est bien l'image variée du Roi des Rois qui apparaît sur les dariques perses (L'Hist. et ses méth., 1961, p. 358).
Le roi catholique. Le roi d'Espagne. La plus grande puissance de l'Espagne, (...) c'était sa flotte. Le roi catholique, qui avait les meilleurs hommes de guerre de l'Europe, avait aussi les meilleurs hommes de mer (Hugo, Rhin, 1842, p. 431).
Les rois catholiques. [Titre donné par le pape après la prise de Grenade] Ferdinand II d'Aragon et Isabelle de Castille. Le fils de Jeanne La Folle et de Philippe Le Beau, héritier des rois catholiques par sa mère et du saint-empire par son père (A. de Broglie, Diplom. et dr. nouv., 1868, p. 252).
Roi des Romains. Dans le Saint Empire, empereur élu mais non couronné par le pape; celui qui est choisi par les électeurs pour succéder à l'empereur, du vivant même de celui-ci. [Le duc de Thuringe] se laissa élire roi des Romains à la diète de Francfort en 1246, et fut sacré l'année suivante (Montalembert, Ste Élisabeth, 1836, p. 328).
b) En compos. Roi-prophète. David ou Salomon. Les autres [des Religieux] répétoient, dans un éternel cantique, ou les soupirs de Job, ou les plaintes de Jérémie, ou les pénitences du roi-prophète (Chateaubr., Œuvres compl., t. 14, Lettre [à M. de Fontanes], Paris, Ladvocat, 1827, p. 298).La haute stature du Roi-prophète, de l'époux du Cantique des Cantiques (Villiers de l'I.-A., Contes cruels, 1883, p. 401).
c) JUD. Livre(s) des Rois. Partie de l'Ancien Testament comprenant deux livres (I et II Rois) dans le texte hébreu, racontant l'histoire d'Israël et de ses rois, de Salomon à la destruction de Jérusalem par Nabuchodonosor; partie de l'Ancien Testament comprenant quatre livres dans la version des Septante et dans celle de la Vulgate, c'est-à-dire deux livres de Samuel (I et II Rois) et deux livres des Rois (III et IV Rois équivalant aux I et II Rois du texte hébreu) racontant l'histoire d'Israël depuis la fin de la période des Juges jusqu'à la destruction de Jérusalem. Les allusions de la Bible à l'usage de sceller sont très nombreuses (Genèse, Exode, Livre des Rois, Jérémie) (L'Hist. et ses méth., 1961, p. 397).Pendant les travaux, la Bible n'est plus ouverte à l'Évangile de saint Jean, mais aux livres des Rois (I, 6) ou des Chroniques (II, 2, 3) (Naudon, Fr.-maçonn., 1963, p. 97).
Au sing. [Précédé d'un ordinal] Les navires du roi Salomon avaient pareillement ramené du pays d'Ophir des singes et des paons, ainsi qu'il est dit au troisième Livre des Rois (X. 22) (A. France, Puits ste Claire, 1895, p. 121).
Rois. [Abrév. utilisée pour ces livres] La biblique Eçyon-Gèber, (...) la ville que Salomon avait choisie comme (...) point de départ des expéditions maritimes vers Ophir (voir I Rois IX 26) (Philos., Relig., 1957, p. 42-1).
3. [Personnage(s) assimilé(s) à un/des roi(s) par la tradition]
a) COUTUMES et RELIG. [Souvent écrit avec majuscule]
α) Les Rois mages. V. mage1A.
Sous la forme les Rois, les trois Rois. L'étoile éclairait mon chemin Qui mena les trois Rois au Berceau surhumain (Leconte de Lisle, Poèmes trag., 1886, p. 96):
1. Les Pères de l'Église s'accordent avec la tradition qui en a fait [des Mages] trois rois. (...) le peuple, en sa naïve curiosité, s'inquiétait non seulement de la venue des Rois, mais de leur départ. Dévigne, Légend. de Fr., 1942, p. 99.
Fête, jour des Rois et, p. ell., les Rois. Fête commémorant l'adoration de l'Enfant-Jésus par les mages à Bethléem (le 6 janvier ou le deuxième dimanche après Noël dans la liturgie catholique) et donnant lieu à la coutume profane de tirer les rois. Synon. relig. Épiphanie.Le jour des Rois étant arrivé, l'envie d'amuser Sara me fit offrir une collation pour tirer le gâteau (Restif de La Bret., M. Nicolas, 1796, p. 19).Cette année-là, aux rois, il neigeait depuis une semaine (Maupass., Contes et nouv., t. 2, MllePerle, 1886, p. 632).V. infra II A 2 a ex. de Dévigne.
Galette*, gâteau* des Rois.
Faire les Rois (vieilli), tirer les Rois. Se réunir pour une fête qui consiste à partager la galette des Rois contenant la fève qui rend roi ou reine celui ou celle qui la trouve. [M. Rouault] s'était cassé la jambe, la veille au soir, en revenant de faire les Rois, chez un voisin (Flaub., MmeBovary, t. 1, 1857, p. 13).Au jour de l'Épiphanie, MmeBavretel conviait les amis d'Armand à venir « tirer les rois » (Gide, Si le grain, 1924, p. 474).
Vx. Chandelle des Rois. Grosse chandelle cannelée que les marchands de chandelles offraient à leurs clients le jour des Rois. (Dict. xixes.).
β) ASTRON. [P. allus. aux trois rois mages] Les Trois Rois. Synon. de baudrier* d'Orion.Au sud-est d'Orion, sur la ligne des Trois Rois, resplendit la plus magnifique de toutes les étoiles, Sirius (Flammarion, Astron. pop., 1880, p. 723).
b) HIST. Roi d'Yvetot. Titre que porta jusqu'au xvies. le seigneur de la terre d'Yvetot qui était à l'origine un franc-alleu. Il me contait, ce matin-là, l'histoire du petit roi d'Yvetot, d'après la chanson (A. France, Bonnard, 1881, p. 388).
4. Loc., expr., proverbes
a) Roi de, en + subst. Roi de carreau. Roi faible, sans autorité ou dont le pouvoir est limité. (Dict. xixes.). Roi de carton. Synon. de roi de carreau.V. carton A 2 ex. de Sorel.Roi de théâtre. Personnage incarnant un roi au théâtre. Le duc barbu et immobile (...) semblait comme un roi de théâtre sur son estrade (Bourges, Crépusc. dieux, 1884, p. 156).P. anal., péj. Souverain faible, sans autorité ou dont le pouvoir est limité. (Dict. xixes., Lar. Lang. fr.). Roi en peinture. Synon. de roi de carreau.V. peinture II B 2 a ex. de Hugo.
b) La cour du roi Pétaud. V. cour2I A p. anal.
c) Vieilli. ,,C'était du temps du roi Guillemot. C'était dans l'ancien temps`` (Ac. 1835, 1878).
d) Fam. [P. allus. aux mercenaires du roi de Prusse qui étaient mal payés ainsi qu'à la défaite des Français à Rossbach, en 1757, face à la Prusse] Travailler pour le roi de Prusse. Se donner du mal pour un maigre profit, pour rien:
2. Voici de longues années déjà que je travaille pour un roi que nous n'aimons guère, le roi de Prusse (...) quelques lignes de vous pourraient me donner (...) un coup d'épaule salubre. Villiers de L'I.-A., Corresp., 1880, p. 277.
[Avec un verbe autre que travailler ou avec un subst.] Personne ne paraît encore (...). Ce sera comme hier! nous aurons attendu pour le roi de Prusse (Sue, Myst. Paris, t. 7, 1843, p. 3).Ce sont des frais très lourds, des correspondances qui n'en finissent pas... des dérangements pour le roi de Prusse (Mirbeau, Journal femme ch., 1900, p. 286).
e) L'exactitude est la politesse des rois. V. exactitude ex. 2.
5. [Constr. partic., loc. faisant allus. aux caractéristiques − autorité, majesté, distinction, richesse, libéralité, etc. − qu'on prête aux rois]
a) Empl. adj. Qui a les ou des caractéristiques propres à un roi. Le roi, dans le régime féodal, était le suzerain des suzerains, (...) [il] se montrait vraiment roi (Guizot, Hist. civilis., leçon 9, 1828, p. 28).Louis XVI, n'étant plus assez roi, fut déplacé par une République plus roi (Péguy, Argent, 1913, p. 1244).
b) De roi
[En parlant d'une chose concr. ou abstr.] Qui a certaines caractéristiques propres à un roi, aux objets qui lui appartiennent; qui est digne d'un roi. Plaisir de roi. On lui donne [à O'Relly] carte blanche. On lui accorde cinq mille hommes, un pouvoir de roi; et il part (Baudry des Loz., Voy. Louisiane, 1802, p. 129).Voici une édition nouvelle [des Contes de Perrault] (...); elle est unique, elle est monumentale; ce sont des étrennes de roi (Sainte-Beuve, Nouv. lundis, t. 1, 1861, p. 297).
Morceau de roi. Mets délicieux. La soupe au lait de notre gouvernante était un vrai régal, « un morceau de roi », pour employer ses propres expressions (Fabre, Xavière, 1890, p. 15).P. anal. Dans le dossier ultra secret, à vrai dire, il n'y a qu'un morceau qui compte, un morceau de roi: les lettres de l'Empereur Guillaume (Clemenceau, Vers réparation, 1899, p. 282).En partic. [En parlant d'une femme] V. morceau I C p. anal.
Choix de/du roi. Fait pour un couple d'avoir pour premiers enfants un garçon et une fille. Deux enfants sont nés déjà, garçon et fille: un choix de roi (Pesquidoux, Livre raison, 1932, p. 29).Souhait de roi (vx). Désir que les deux premiers enfants d'un couple soient un garçon et une fille; p. méton., ce désir réalisé. (Ds Rey-Chantr. Expr. 1979).
[P. réf. à l'émail des armes des rois de France] Loc. adj. inv. (Couleur) bleu(-)de(-)roi et, p. ell., bleu(-)roi. Bleu très vif. L'uniforme gris-de-fer de cette dernière compagnie différait de celui des sept autres, couleur bleu-de-roi avec retroussis à l'hermine (Chateaubr., Mém., t. 1, 1848, p. 396).Les pompiers, en uniforme bleu roi, boutons dorés, képis galonnés de rouge (Vailland, Drôle de jeu, 1945, p. 126).V. lumière A 1 b ex. de T'Serstevens.
Empl. subst. masc. Soudain j'avais voulu avoir un élément préféré: le feu; une couleur, le bleu de roi; un parfum, le lilas blanc (Giraudoux, Simon, 1926, p. 137).[Le saphir] du Cachemire, devenu très rare, est d'un bleu-roi velouté (Metta, Pierres préc., 1960, p. 74).
c) En roi. À la manière d'un roi; avec magnificence, avec majesté. Vivre en roi. L'inépuisable trésor du soleil et de l'ombre qu'il remuait en roi, à pleines mains (Faure, Hist. art, 1921, p. 44).
d) [Dans une compar. indiquant un summum] Séjour délicieux! réduit enchanté! murmura-t-il comme se parlant à lui-même. Tapis d'Aubusson, damas de Gênes, porcelaines de Saxe (...) Monsieur le marquis, vous êtes ici comme un roi (Sandeau, Mllede La Seiglière, 1848, p. 225).Heureux comme un roi. Très heureux, heureux au plus haut point. Costals, à Gênes, entre son travail et ses aventures féminines, était heureux comme un roi (Montherl., Lépreuses, 1939, p. 1373).
B. − Empl. abs.
1. [Désigne le roi qui règne ici et maintenant, dans un cont. donné] On a été fort étonné, mardi soir dans Paris, d'apprendre que le roi a fait retirer la loi sur la presse (Delécluze, Journal, 1827, p. 439).
SYNT. Ambassadeur du roi; fils, fille, frère du roi; chambre, palais du roi; conseil, édit, service, armées du roi; volonté du roi; au nom du roi; de par le roi; auprès du roi; écrire, parler au roi; présenter qqn, qqc. au roi; remettre qqc. au roi; vive le roi!
2. [Dans des syntagmes, des loc. et des expr., roi désignant le roi du moment ou le roi en tant que représentant permanent de la royauté dans sa continuité; l'usage de la majuscule varie]
a) Subst. + du (parfois de, le) roi
[Le subst. déterminé désigne une pers.] Avocat du roi. V. avocat1III hist.Camelot* du roi. Lieutenant de/du roi. V. lieutenant B 3 a.Procureur du roi. V. procureur A 2.
Commissaire du roi. Personne choisie pour remplir par commission diverses fonctions, en particulier de justice et de police. Un commissaire du roi au Châtelet allait porter le 24 au monastère des Champs le même ordre de renvoyer les pensionnaires (Sainte-Beuve, Port-Royal, t. 4, 1859, p. 13).
Homme du roi. ,,Celui qui a commission du roi pour quelque affaire relative au service du roi ou du public`` (Ac. 1835, 1878).
Gens du roi. Magistrats chargés du Ministère Public (tribunaux inférieurs et cours souveraines). Les gens du roi près le Parlement et le Châtelet (Barante, Hist. ducs Bourg., t. 4, 1821-24, p. 289).
[Le subst. déterminé désigne une chose concr. ou abstr.] Petit, (grand) coucher du roi (v. coucher2); lever du roi (v. lever2); bouche du roi (v. bouche II A 2 b hist.); hôtel du roi (v. hôtel A 1); poids de roi, poids le roi (v. poids II B 1 vx).
Coin du roi. Coin généralement gravé à l'effigie ou aux armes du roi pour frapper les monnaies légales. De la monnaie marquée au coin du roi (Ac.1835, 1878).
Denier(s) du roi (vieilli). Ensemble des revenus des impôts levés par l'État. Gérer les deniers du roi (Ac.1798-1878).Nous ne sommes pas du Parlement. Nous payons l'impôt, nous ne le faisons pas. Si le Parlement lésine sur les deniers du roi, c'est son affaire et non la nôtre (Musset, Mouche, 1854, p. 269).
Main du roi (vx). ,,La puissance et l'autorité du roi interposée dans les procédures judiciaires entre particuliers`` (Ac. 1798-1878). Mettre qqc. sous la main du roi (vx). ,,Saisir quelque chose en justice au nom du roi`` (Ac. 1798-1878).
Maison du roi. Ensemble des domestiques, des officiers au service du roi et composant la Maison civile et la Maison militaire; ensemble des services correspondants particulièrement développés et organisés en France, aux xviieet xviiies. et qui disparurent définitivement à la Révolution de 1848. La haute noblesse continua de garder la préférence pour les fonctions supérieures de la diplomatie et de l'armée comme pour la Maison du Roi (Lefebvre, Révol. fr., 1963, p. 558).Maison militaire du roi. Ensemble des troupes chargées de protéger la personne du roi. Il y avait, dans le corps de la maison militaire du roi, où mon père m'avait fait servir quelques années, un jeune Breton (Lamart., Nouv. Confid., 1851, p. 134).
Ordre(s) du roi. Au sing. Ordre de chevalerie de Saint-Michel; décoration correspondante. Chevalier de l'Ordre du Roi (Ac.1798).Au plur. Ordres de chevalerie de Saint-Michel et du Saint-Esprit; décorations correspondantes. La première de toutes les décorations, qu'on appelloit les ordres du roi, ne demandoit que cent ans d'admission dans le ministère public (Bonald, Essai analyt., 1800, p. 211).
Pied(-)de(-)roi. Unité de mesure (v. pied 2eSection). Un couteau catalan effilé et pointu, long d'un pied-de-roi (Ponson du Terr., Rocambole, t. 3, 1859, p. 515).
Taux du roi (vx). ,,Prix d'une chose réglé par l'autorité du Roi`` (Ac. 1798).
Les coffres du roi. Les finances de l'État. Il en reviendra tant dans les coffres du roi (Ac.1798-1878).
Région. (Canada). Chemin du roi. V. chemin I A 2 b.
b) Loc. et expr.
[Concernant la pers. du roi]
Le roi ne meurt pas/point. Il y a toujours un roi puisque, lorsque le roi meurt, son héritier lui succède immédiatement. [Dans un cont. métaph.] Tout cela passe, mais le roi ne meurt pas; l'amour est mort, vive l'amour! (Musset, Il faut qu'une porte, 1845, p. 256).
Le roi est mort, vive le roi! [Formule par laquelle un héraut annonce la mort du roi et l'avènement de son successeur; formule reprise dans la lang. cour.]:
3. un héraut, d'une voix solennelle: « Le roi est mort, le roi est mort. » toute la cour, en se précipitant vers le Dauphin: « Vive le roi! » Delavigne, Louis XI, 1832, V, 16, p. 226.
Vive le roi, vive la Ligue*.
Le roi règne et ne gouverne pas. V. régner A 1 a et gouverner ex. 17.
[Concernant des institutions, des coutumes sous la royauté]
Le pavé du roi. V. pavé I A 2 a.
Être au pain du roi, manger le pain du roi. [Expr. utilisée pour parler des prisonniers et des soldats et faisant allusion au fait qu'ils sont nourris gratuitement par l'État] Peu après il a fait la visite des troupes de la garnison, (...) il a fort mal traité les Suisses: il leur a reproché qu'ils ne méritaient pas de porter l'habit du Roi, et d'en manger le pain (Marat, Pamphlets, Relation fid. affaires Nancy, 1790, p. 248).
P. plaisant. ,,Loger dans la maison du roi. Être en prison`` (Ac. 1835, 1878).
Servir le roi. Être soldat, au service du royaume. Comment ne pas y aller demain matin s'il [le roi] nous appelle tous [les officiers]? J'ai servi treize ans le roi (Vigny, Journal poète, 1830, p. 911).
[Dans lesquelles le roi sert de réf.] Ou le roi n'est pas noble. V. noble1A 1 a.Noble comme le roi. V. noble1A 1 a.Être plus royaliste* que le roi.
Fam. Le roi n'est pas son cousin. [Indique qu'une pers. est heureuse et fière de qqc.] [Edmond Barbentane] a dans la poche de l'argent prêté par Jacques Schoelzer. Le roi n'est pas son cousin (Aragon, Beaux quart., 1936, p. 470).
Fam. Le roi dit: nous voulons. [Réplique à une pers. voulant trop impérativement qqc.] Le dauphin: Arrêtez, je le veux. Marie, en souriant: Le roi dit: nous voulons. Le dauphin: Eh bien! je vous en prie, restez (Delavigne, Louis XI, 1832, II, 2, p. 38).
Vieilli. Qui aura de beaux chevaux, si ce n'est le roi? Pourquoi s'étonner qu'un homme riche, puissant ait des choses magnifiques? (Dict. xixes.).
Où il n'y a rien, le roi perd ses droits. Il est inutile de demander quelque chose à une personne qui ne possède rien. Là où il n'y a rien, le roi perd ses droits, reprit sir Arthur, et je ne puis te donner ce que je n'ai pas encore (Ponson du Terr., Rocambole, t. 3, 1859, p. 371).
Fam. Aller où le roi (ne) va (qu')à pied, en personne, n'envoie personne, va seul. Aller aux toilettes, aller faire ses besoins. (Dict. xixeet xxes.). [P. allus. à cette expr.] :
4. Pour se venger (...), tout ce que Dorothée put imaginer, ce fut de faire choix et élection à certaines fins du devant de porte de Barthélemy. Chaque soir, la nuit venue, elle s'y rendait en tapinois et y faisait ce que le roi lui-même ne peut faire faire par quelque autre. Pourrat, Gaspard, 1922, p. 184.
C. − P. méton., JEUX. [La pers. du roi sert de réf. à des pièces de jeux ou, p. anal., à la division principale d'un jeu]
1. JEU DE CARTES
a) Chacune des quatre cartes d'un jeu représentant un roi. Roi de cœur, de pique, etc. Sois sage, finissons la partie. Tiens, voilà encore un roi. Lui, tenant sa carte levée, continuait à gronder (Zola, Faute Abbé Mouret, 1875, p. 1494).
b) Roi (de piquet). Au jeu du piquet à écrire (sorte de piquet), division d'une partie comprenant deux ides. Une partie complète est composée de douze rois ou de vingt-quatre ides (Ac.1835, 1878).Le peintre resta près d'Adélaïde qui lui proposa six rois de piquet, il accepta (Balzac, Bourse, 1832, p. 418).
2. JEU D'ÉCHECS. Pièce principale du jeu représentant, de façon parfois stylisée, un roi. Attention à la tour du roi! Tu la manœuvres en dépit du sens commun (Miomandre, Écrit sur eau, 1908, p. 195).V. mat ex. de Green.
II. − P. anal. (de souveraineté, de primauté, de puissance; l'anal. porte sur des hommes ou sur des animaux, des végétaux, des choses de genre masc.)
A. − [Le subst. désigne une pers. de sexe masc.]
1. Celui qui domine quelqu'un, quelque chose, qui exerce un pouvoir souverain, qui l'emporte sur les autres au sein d'un groupe, dans un lieu, dans une situation donnée, par différentes qualités. Roi de la mode. [Lucien] causait avec l'évêque comme s'il eût été le roi du salon (Balzac, Illus. perdues, 1843, p. 688).Pour les gluaux, j'étais le roi, je peux le dire sans me vanter (Genevoix, Raboliot, 1925, p. 138).
Empl. hypocor. Tout m'aimait. Ma tante m'appelait « mon petit roi » (Guéhenno, Journal homme 40 ans, 1934, p. 23).
Loc. et expr.
Vieilli. Le roi des hommes. [Qualifie un homme très gentil, prévenant] C'était le roi des hommes, ce brave M. Pons. Tous les mois, il me donnait cent sous (Balzac, Cous. Pons, 1847, p. 292).
[Peut-être p. allus. à la comédie d'Aristophane: Les Oiseaux] Le roi des oiseaux. [Qualifie un personnage original, comique] :
5. − Des avares (...), j'en ai vu pour plus de trois cent mille francs. Mais pas un pour approcher du Grabié des Griffoux, qui vivait en forêt près de chez-moi. Celui-là, le roi des oiseaux! Il avait bien de quoi, le bougre... Pourrat, Gaspard, 1930, p. 171.
Le roi des + subst. (désignant une catégorie dépréciée d'hommes). Le pire, le plus grand de cette catégorie. Le roi des cons, des imbéciles. Je déteste les raseurs, et c'est le roi des raseurs (Duhamel, Passion J. Pasquier, 1945, p. 26).
Empl. adj. L'historien alors était roi (Marrou, Connaiss. hist., 1954, p. 13).Expr. Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois. V. borgne.
En compos. L'artiste-roi a pris pour lui, ni plus ni moins que la chapelle de la Vierge (Michelet, Chemins Europe, 1874, p. 235).V. jeudi ex. de Weinand.
2. En partic.
a) Celui qui a ou qui reçoit le titre de roi dans des circonstances données. Dans chaque université les étudiants élisent un roi (Nerval, L. Burckart, 1839, p. 140).La comtesse d'Urgel envoya une couronne estimée à quarante mille sols pour couronner un roi des jongleurs (Faral, Vie temps st Louis, 1942, p. 180).Petit oiseau de bois qui fera « roi » l'année durant, celui qui l'aura abattu d'une flèche habile (Menon, Lecotté, Vill. Fr., 1, 1954, p. 53).
Vieilli
Roi de l'oiseau. ,,Celui des tireurs d'arbalète qui abat l'oiseau`` (Littré).
Roi des pèlerins. ,,Celui d'entre eux qui a vu le premier le clocher du lieu où ils vont en pèlerinage`` (Ac. 1798-1878).
Roi du bal. Celui qui donne le bal, qui ouvre le bal; celui pour qui est donné le bal; p. ext., homme le plus brillant du bal. Il avait bien l'air d'être le roi du bal, avec cette assurance qui ne le quittait jamais, sa haute taille qui dominait tous les autres, ses mouvements aisés de beau danseur (Moselly, Terres lorr., 1907, p. 83).
Roi de la fève (vieilli), roi. Quand on tire les rois, celui qui trouve la fève dans le gâteau ou celui qui est choisi par la reine, celle qui a trouvé la fève. V. fève ex. 6, reine ex.
Le roi boit! [Exclam. répétée gén. deux fois par les participants à la fête, chaque fois que le roi boit] La fête des Rois, le joyeux cri « Le Roi boit » seraient un reste des Saturnales antiques (Dévigne, Légend. de Fr., 1942, p. 99).V. gâteau ex. 2.
HISTOIRE
HIST. ANC. Roi du festin. Convive qui était désigné pour présider à un repas et dont le rôle consistait à commander de boire plus ou moins, de chanter, de réciter des vers, de jouer:
6. Près de Lycus, sa fille, idole de la fête, Est admise. La rose a couronné sa tête. Mais pour que la décence impose un juste frein, Lui-même est par eux tous élu roi du festin... Chénier, Bucoliques, 1794, p. 205.
En compos. Archonte-roi. V. archonte synt.
HIST. DU MOY. ÂGE. Personnage important ayant autorité sur un ensemble de personnes. Roi des ribauds. V. ribaud.
Roi d'armes. Dignitaire à la tête des hérauts d'armes. Le roi d'armes Jarretière les montra du doigt à Gwynplaine (Hugo, Homme qui rit, t. 3, 1869, p. 112).
Chef d'une association, d'une corporation. Roi de la basoche. [Les merciers] furent longtemps soumis à un roi des merciers, qui exerçait aussi une certaine autorité sur d'autres métiers, et qui fut aboli par l'édit de 1597 (MarionInstit.1923, p. 372, s.v. merciers).
Roi de Thune(s). Chef d'une association de gueux au xves. Maxime gravée au clou sur le mur par un roi de Thunes condamné aux galères (Hugo, Misér., t. 2, 1862, p. 196).
b) Roi de + subst. rel. à un secteur écon.Synon. de magnat (v. ce mot B).Roi de la chaussure, du pétrole. [Jérome] devint un roi de l'industrie (Zola, Travail, t. 1, 1901, p. 85).V. combinat ex.
c) Roi de + subst. rel. à une discipline sportive.Celui qui occupe une place prééminente, qui excelle dans une discipline; champion. Dans sa chambre à lui, il y avait comme embellissement, des séries entières de cartes (...) les « Rois du volant »... les « Rois de la pédale » et les « Héros de l'aviation » (Céline, Mort à crédit, 1936, p. 394).
d) JEUX, vieilli. Jouer au roi dépouillé*. Jouer au roi détrôné. Dans un jeu d'enfants, essayer de faire descendre un enfant du lieu élevé où on l'a mis, pour prendre sa place. Au fig. Chercher à prendre la position considérée comme avantageuse de quelqu'un et vice versa. (Ds Littré).
3. [Désignant une puissance surnaturelle, l'homme ou un homme important; l'usage des majuscules varie]
[Le subst. est suivi d'un adj. ou d'un compl. déterminatif]
Le roi céleste, le roi du ciel (et de la terre), le roi des anges, le roi des rois. Dieu. [Le père de la Rédemption] aborde le dey d'Alger, il lui parle, au nom de ce Roi céleste dont il est l'ambassadeur (Chateaubr., Génie, t. 2, 1803, p. 397).Je n'ai qu'un maître, qui est le Roi du Ciel (A. France, Clio, 1900, p. 127).À part, bien entendu, Dieu lui-même, âme des âmes, roi des anges, immanent à l'espace (Poulet, Métam. cercle, 1961, p. 192).V. royauté ex. de Weill.
Le roi des Juifs. Le Christ. V. INRI ex. de Claudel:
7. Avons-nous étendu le manteau de nos jours Des pieds du blasphémé jusqu'au blasphémateur. (...) Avons-nous déroulé le manteau de nos jours Entre le roi des Juifs et le préfet de Rome. Péguy, Ève, 1913, pp. 829-830.
Le roi des dieux. Jupiter. Oreste [à Jupiter]: Quitte ce ton, bonhomme: il sied mal au roi des Dieux (Sartre, Mouches, 1943, iii, 2, p. 94).
Le roi des enfers
Satan. Le cadre même du poème, qu'est-il autre chose qu'une exploration du monde immatériel, où figurent tous ses habitans (...), depuis le roi des enfers et son peuple de réprouvés, jusqu'aux chœurs les plus sublimes des séraphins? (Ozanam, Philos. Dante, 1838, p. 252).
Pluton. Jupiter [à Pluton]: (...) prête-moi une oreille attentive!... Roi des enfers, c'est moi qui vous appelle! (Crémieux, Orphée, 1858, i, 4, p. 38).
Le roi de la création, de la nature, de l'univers. L'homme. [Les animaux en Arabie] se souviennent mieux des jours d'Éden, où ils étaient encore soumis volontairement à la domination du roi de la nature (Lamart., Voy. Orient, t. 2, 1835, p. 16).Nous le voyons [le tigre] (...), une patte sur une proie magnifique, parfois le roi de la création lui-même, qu'il vient d'abattre (Barrès, Cahiers, t. 8, 1910, p. 252):
8. L'homme, sans ailes, sans plumage, tout nu, serait plus misérable, dans nos climats, que le corbeau carnivore et que le faible roitelet, si la Providence n'avait remis entre ses mains le feu, cette ame de la nature. Quel tableau lamentable il présente! Combien il est à plaindre celui qu'on a nommé le roi de l'univers! Bern. de St.-P., Harm. nat., 1814, p. 289.
Le roi des aulnes. V. aulne rem.
En compos. Le Christ-Roi. Un jésuite formé par la seule tradition ignatienne aurait dit: le secret de la vie spirituelle est de suivre le Christ-roi et de l'imiter (Bremond,Hist. sent. relig., t. 3, 1921, p. 264).Fête du Christ-Roi. La fête du Christ-Roi, étendue à toute l'Église par Pie XI, veut attester le droit du Sauveur à être reconnu comme législateur, chef et juge suprême de toute l'humanité (Foit. 11968).
4. Poét. Le roi du jour. Le soleil. Le roi du jour s'apprêtait à répandre Sur l'horizon ses nouvelles clartés (Baour-Lormian, Ossian, 1827, p. 5).
B. − En appos. ou en compos. [Avec un subst. désignant une collectivité] Peuple(-)roi. Peuple qui l'emporte sur les autres. La vie spirituelle des peuples rois (Faure, Espr. formes, 1927, p. 119).
En partic. Le peuple romain. Le peuple-roi avili par l'habitude d'être nourri aux dépens du trésor public, corrompu par les largesses des sénateurs (Condorcet, Esq. tabl. hist., 1794, p. 75).Le Colisée n'est que la formule de pierre des besoins monstrueux du peuple roi (Faure, Hist. art, 1909, p. 146).
C. − Animal, végétal, chose qui exerce un pouvoir souverain, qui domine, l'emporte sur les autres dans des circonstances données, par certaines qualités.
1. [Le subst. désigne un animal] Le rouge-gorge est le roi de l'automne; il en porte les couleurs (Alain, Propos, 1923, p. 539).
Littéraire
Le roi des animaux. Le lion. J'ai vu un lion dont on irritait la colère par le simple bruit d'un tambour: après quelques roulements, la voix du roi des animaux se faisait entendre (Bern. de St-P.,Harm. nat., 1814, p. 340).
Le roi des airs. L'aigle. Roi des airs, lui criai-je [à un aigle], règne ici loin des tyrans qui te feraient la guerre, mais ne sois pas tyran toi-même (Dusaulx, Voy. Barège, t. 1, 1796, p. 267).
Le roi des oiseaux. L'aigle, le phénix ou le paon:
9. [Les autres] Vantoient le privilege unique De ce roi des oiseaux, de cet enfant du ciel, Qui, vieux, sur un bûcher de cedre aromatique, Se consume lui-même, et renaît immortel. Florian, Fables, 1792, p. 86.
En partic. [Entre dans la dénom. d'un animal] Roi de(s) caille(s). Synon. râle de(s) genêts (v. râle1).Broche admirablement garnie de cailles, rois de cailles, et de ces petits râles à pieds verts qui sont toujours si gras (Brillat-Sav., Physiol. goût, 1825, p. 376).On ne cherche pas le râle de genêts, le râle rouge ou le roi des cailles (comme il est communément appelé dans certaines régions), on le rencontre (Vidron, Chasse, 1945, p. 12).
2. [Le subst. désigne une plante ou un fruit] On appréciait fort dans le temps le Melon; il [Saint-Amant] y célèbre à pleine bouche ce roi des fruits (Sainte-Beuve, Caus. lundi, t. 12, 1855, p. 183).Littér. Le roi des forêts. Le chêne ou le sapin. Le voyageur, assis à ses pieds [d'un chêne], admire ses inébranlables rameaux (...); mais le pâtre qui contemple le roi des forêts du haut de la colline, le voit élever au-dessus de son feuillage verdoyant une couronne desséchée (Chateaubr., Martyrs, t. 3, 1810, p. 129).
3. [Le subst. désigne une chose concr.] [L'or] était considéré comme le plus parfait, comme le roi des métaux (Wurtz, Dict. chim., t. 2, vol. 1, 1873, p. 625).L'Inde sous les rajahs, livre magnifiquement illustré et le roi de la saison (Mallarmé, Dern. mode, 1874, p. 841).
4. [Le subst. désigne une chose abstr.] Le temps, ce Roi cruel, m'assignant mon tombeau (Chênedollé, Journal, 1808, p. 34).La charité, ce roi des sentiments créé par le catholicisme (Péladan, Vice supr., 1884, p. 201).
5. Empl. adj. Région forestière, où l'arbre était roi (Vidal de La Bl., Tabl. géogr. Fr., 1908, p. 190).Si le hasard est roi, voici la marche dans les ténèbres (Camus, Homme rév., 1951, p. 95).
6. En appos. ou en compos. La lueur du jour sur l'écorce argentée, sur le bord des feuilles tremblantes, est un regard d'orgueil de l'astre roi (Faure, Hist. art, 1921, p. 89).[L'émeraude] atteint et parfois même dépasse en prix le diamant-roi (Metta, Pierres préc., 1960, p. 77).
Prononc. et Orth.: [ʀwɑ], [ʀwa]. Homon. roie. Warn. 1968 [a], parfois [ɑ]; Rob. 1985 [a], mais Lar. Lang. fr. [ɑ] et Martinet-Walter 1973 [ɑ], [a]. Pour [ɑ] par assimilation aux deux articulations post., [ʀ] et [w], voir G. Straka ds Trav. Ling. Litt. Strasbourg t. 19 n o1 1981, p. 215. Ac. 1694, 1718: roy; dep. 1740: roi. Étymol. et Hist. A. 1. a) Ca 880 rex « souverain d'un État » (Eulalie, 12 ds Henry Chrestomathie, p. 3); 2emoit. xes. rei (St Léger, éd. J. Linskill, 14); ca 1170 les livres des rois « libres de la Bible consacrés aux rois hébreux » (Rois, éd. E. R. Curtius, p. 173); 1606 Roy Très-chrestien titre donné aux rois de France (Nicot); b) 1543 couleur de roy « brun foncé » (Cptes des Célestins, fol. 108 ds Gay) − 1611, Cotgr.; 1690 bleu de roy (Fur., s.v. bleu); 1549 gens du roy « officiers du roi » (Est., s.v. gens); 1606 maison du roy (Nicot, s.v. maison); 2. a) fin xes. reis en parlant de Jésus-Christ (Passion, éd. D'Arco Silvio Avalle, 34); 1550 roi des Juifs (Bible Louvain, Mat. 2, 2 d'apr. FEW t. 10, p. 367a); b) ca 1145 en parlant de Dieu reis de majesté (Wace, Conception N.D., éd. W. R. Ashford, 635); 1155 Rei de glorie (Id., Brut, éd. I. Arnold, 10027); c) ca 1165 en parlant de Jupiter rei (Benoît de Ste-Maure, Troie, éd. L. Constans, 25831); 3. 1324 feste des trois Roys « Épiphanie » (Guerre de Metz ds A. Thierbach ds Untersuchungen zur benennung der kirchenfeste, p. 22); d'où 1533 trouver la feubve au guasteau des Roys (Rabelais, Pantagruéline prognostication, éd. M. A. Screech, p. 10); 1549 estre Roy de la feue (Est.); 4. 1842 astron. les trois rois (Ac. Compl.). B. Jeux 1. 1176 échecs roi (Chrétien de Troyes, Cligès, éd. A. Micha, 2335); 2. 1661 cartes (Molière, Fâcheux, II, 2); 3. 1832 piquet (Balzac, loc. cit.). C. 1. 1175-80 fig. « celui qui a tout le bien être d'un roi » (Renart, éd. M. Roques, V, 5152); 2. désigne celui qui est le meilleur dans un domaine particulier ca 1245 roi désigne le plus grand des ménestrels de son époque (Huon de Cambrai, Regrets N.D., 1, 4 ds T.-L.); fin xiiies. roi des hiraus (Jakemes, Castelain de Couci, 2002, ibid.); 1269-78 roi des ribauz, v. ribaud. Du lat. regem, acc. de rex, regis « souverain », « Jupiter » et « chef, maître », également att. en lat. médiév. au sens de « roi de la fève » rex fabe en 1334 ds Latham. Fréq. abs. littér.: 25 604. (Roi-soleil: 13. Roy: 69). Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 68 067, b) 34 905; xxes.: a) 19 182, b) 20 565. Bbg. Dub. Pol. 1962, p. 411. − Gall. 1955, p. 76. − Quem. DDL t. 9 (s.v. roi de la route), 11 (s.v. roi citoyen), 13, 20 (s.v. soldat-roi), 30. − Vardar Soc. pol. 1973 [1970], p. 304. − Walt. 1885, p. 82.

Wiktionnaire

Adjectif - ancien français

roi \Prononciation ?\ masculin

  1. Variante de roit.

Nom commun - ancien français

roi masculin

  1. Roi.
    • La roine n’a pas fait ke cortoise,
      Ki me reprist, ele et ses fieux, li rois,
      Encor ne soit ma parole françoise;
      Ne child ne sont bien apris ne cortois,
      Si la puet on bien entendre en françois,
      S’il m’ont repris se j’ai dit mots d’Artois,
      Car je ne fui pas norris à Pontoise.
      — (Conon de Béthune)
    La reine ne s’est pas montrée courtoise,
    lorsqu’ils m’ont fait des reproches, elle et le roi, son fils.
    Certes, mon langage n’est pas celui de France,
    mais on peut l’apprendre en bon français.
    Ils sont malappris et discourtois
    ceux qui ont blâmé mes mots d’Artois,
    car je n’ai pas été élevé à Pontoise.

Nom commun - français

roi \ʁwa\ masculin (pour une femme, on dit : reine)

  1. (Noblesse) Titre porté par celui qui règne sur un peuple, un État, en particulier un État monarchique, et qui tient sa fonction de l'hérédité ou de l'élection ; celui qui est à la tête d'un royaume.
    • Choisir, proclamer, déposer un roi.
    • En présence de Sa Majesté le Roi.
    • Roi des rois : titre honorifique porté par différents souverains au cours de l’Histoire ; Agamemnon, les rois Assyriens et le négus furent appelés ainsi.
    • Roi des Juifs : titre décerné par les Romains à Hérode le Grand et à ses descendants qui régnèrent sur la Palestine en vassaux de Rome ; titre donné à Jésus-Christ dans les Écritures.
    • Roi des Romains : nom donné, avant son couronnement par le pape, à l'empereur élu du Saint-Empire romain.
    • Les Rois maudits : suite romanesque historique de Maurice Druon (1955-1977).
    • Le fou, le bouffon du roi, qui était chargé de distraire la cour par ses extravagances et ses insolences.
    • Les fléaux célestes ne durent qu’un temps, ils ne ravagent que quelques contrées, et ces pertes, quoique douloureuses, se réparent ; mais les crimes des rois font souffrir bien longtemps des peuples entiers. — (Frédéric II & Voltaire, L’Anti-Machiavel, 1739 (édition de 1947))
    • Les rois sont dans l’ordre moral ce que sont les monstres dans l’ordre physique. L’histoire des rois est le martyrologe des nations. — (Henri Grégoire, Séance de la Convention du 22 septembre 1792)
    • Les rois sont les plus superbes des mortels, ils en sont donc les plus lâches ; qu’ils entendent gronder le tonnerre de la colère du peuple, ils trembleront au fond de leurs palais ; qu’ils tremblent, ils ne sont déjà plus. — (Maximilien Robespierre, Sur le parti de prendre à l’égard de Louis XVI, novembre 1792)
    • Carcassonne alors fit partie du domaine royal, et un sénéchal y commandait pour le roi de France. — (Eugène Viollet-le-Duc, La Cité de Carcassonne, 1888)
    • Une rivalité politique envenimée par les dissentiments religieux préparait depuis longtemps la guerre entre le roi d’Espagne et la reine d’Angleterre. — (Frédéric Zurcher et Élie-Philippe Margollé, Les Naufrages célèbres, Hachette, Paris, 1873, 3e édition, 1877, page 8)
    • Henri IV est le grand-père de Louis XIV, Cotton, le grand-oncle du P. la Chaise : deux royautés, deux dynasties, celle des rois, celle des confesseurs jésuites. — (Jules Michelet, Le prêtre, la femme, la famille, Paris : Chamerot, 1862 (8e édition), page 17)
  2. (Figuré) (Anciennement) Celui qui est à la tête d'une collectivité.
    • Les corporations de l'Ancien Régime se choisissaient un roi.
    • Le roi des merciers.
  3. (Figuré) Homme qui occupe une position éminente dans un domaine, qui excelle dans sa partie, qui surpasse ses pareils ; celui dont on accomplit toutes les volontés. Note : s'emploie souvent avec un complément de nom.
    • Le client n’est roi que parce que l’employé ne peut le remettre à sa place quand il devient odieux ; la servilité dérive de la précarité. — (Pierre Lazuly, L’Idéologie du client, in « Le Monde diplomatique », décembre 1998)
    • Cette démonstration unique dans les annales sera complétée par des exhibitions acrobatiques des deux as de la Djiquitovka, Serge et Michel Pakhomoff, rois de la haute voltige à cheval. — (J.-C. Vuilleumier, XVIe Concours hippique de Tramelan, dans L'Impartial, jeudi 28 juillet 1977, page 13)
    • Mine de rien, il est parvenu en quelques années à devenir l'un des producteurs les plus courtisés de la place… Un succès sur quatre en France, c'est lui. Fabrizio, le roi du porno et de l'intello ! — (Thibaut Amant, Les tueurs ont besoin d'amour, Éditions Le Manuscrit, 2001, page 21)
    • Le boom immobilier espagnol a fait des rois du béton les hommes les plus riches du pays, loin devant les banquiers et les industriels, révèle Magazine, le supplément dominical du journal El Mundo, qui publie un classement des 100 plus grandes fortunes du pays. — (Les rois du béton à la tête des plus grandes fortunes du royaume d’Espagne, in BatiWeb)
    • Les géants de l’acier ont détrôné les rois du pétrole en 2004. […]. Les dix hommes d'affaires qui se sont le plus enrichis l'an dernier détiennent tous des parts dans les sociétés métallurgiques. — (Pascal Airault, Russie : les magnats de l’acier roulent sur l’or, Jeuneafrique.com, 14 février 2005)
    • (Par extension) (En parlant d'animaux) À peine les ont-ils déposés sur les planches,
      Que ces rois de l’azur, maladroits et honteux,
      Laissent piteusement leurs grandes ailes blanches
      Comme des avirons traîner à coté d’eux.
      — (Charles Baudelaire, L’Albatros in « Les Fleurs du mal »)
    • (Par antithèse) (Par moquerie) C'était lourd et ça me forçait à me déplacer en roi de la scoliose, tout tordu. — (David Goudreault, La bête à sa mère, Stanké, 2015, page 159)
  4. Ellipse de roi des cons.
    • Bravo pour la perspicacité, Malaussène ! Bravo ! Pour être le roi, tu peux dire que tu es vraiment le roi ! C'est toi, le responsable ! — (Daniel Pennac, La saga Malaussène : Au bonheur des ogres, Éditions Gallimard, 2012, chap. 24)
  5. (Cartes à jouer) Aux cartes, chacune des quatre cartes qui représente une figure masculine couronnée.
    • Cette fois, le gentilhomme n’avait pas tourné un roi, mais le sept de trèfle. J’avais deux cœurs et trois atouts : le roi et l’as de cœur, l’as, le dix, et le neuf de trèfle. — (Gaston Leroux, L’Homme qui a vu le diable, 1908)
    • Si deux joueurs abattent un brelan, celui de la valeur la plus haute l'emporte. Celui toutefois, qui a la chance d'obtenir un brelan de Valets, dénommé le favori, l'emporte sur tous les autres brelans, même ceux des As, des Rois ou des Dames. — (Frans Gerver, Le guide Marabout de Tous les Jeux de Cartes, Verviers : Gérard & Cie, 1966, page 89)
  6. (Échecs) Pièce la plus importante du jeu d’échecs dont il faut s’emparer pour gagner la partie.
    • Le roi, en rocquant, ne doit sauter que deux cases, c'est à-dire, que la tour avec laquelle il rocque, se mettra sur la case attenant immédiatement au roi, et celui-ci, sautant par dessus, se placera de l'autre côté de la tour. — (Hilaire Le Gai, Almanach des jeux : Académie nouvelle, Paris : Passard, 1853, page 168)
    • Lorsque le roi est en prise, il est en échec. Le joueur devra obligatoirement parer cet échec. S’il n’existe aucun coup pour soustraire le roi à l’échec, le roi est alors échec et mat et la partie est perdue. — (F. Leysour de Rohello, Les règles du jeu d’échecs, 2008)
  7. Roi mage, personnage de la Bible venu adorer Jésus à sa naissance.
    • La fête des rois.

Adjectif - français

roi invariable

  1. Se dit d’une couleur d’un bleu moyen soutenu. Il s’agit du bleu du drapeau français. #318CE7
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

ROI. n. m.
Monarque, prince souverain d'un État ayant le titre de royaume. Roi légitime. Roi absolu. Roi constitutionnel. Roi héréditaire. Roi électif. Roi de France et de Navarre. Les rois d'Israël. La cour d'un roi. Proclamer un roi. Couronner, sacrer un roi. Élire un roi. Le roi des rois, le roi du ciel et de la terre, Dieu. Le roi très chrétien, Le roi de France. Le roi catholique, Le roi d'Espagne. Le roi très fidèle, Le roi de Portugal. Roi des Romains, Titre que l'on donnait dans l'empire germanique, à celui qui était désigné par les électeurs pour succéder à la dignité d'empereur. Grand roi, Titre porté dans l'antiquité, par le roi des Perses. Les livres des Rois, Les quatre livres de l'Ancien Testament qui contiennent l'histoire du peuple de Dieu, depuis Samuel jusqu'à la captivité de Babylone. Les rois mages, Les trois personnages qui vinrent de l'Orient à Bethléem pour adorer l'Enfant Jésus. Le jour des Rois, la fête des Rois, Le jour de l'Épiphanie, qui commémore l'adoration des rois mages. Tirer les Rois, Partager, au moment de l'Épiphanie, un gâteau dans lequel a été mise une fève. On appelle Gâteau des Rois ou Galette des Rois Ce même gâteau; et Roi de la fève Celui à qui échoit la part où se trouve la fève. Ce fut un tel qui fut roi. Le roi boit. Fig., Il est heureux comme un roi se dit d'un Homme extrêmement heureux dans sa condition. Fig. et fam., C'est un morceau de roi se dit d'un Mets exquis et délicieux. Il se dit aussi d'une Belle fille. Fig., C'est un plaisir de roi, C'est un plaisir très grand, très vif. Fig. et fam., C'est la cour du roi Pétaud, chacun y est maître, ou simplement C'est la cour du roi Pétaud se dit d'une Maison, d'une compagnie où chacun parle haut et veut commander. Prov. et fig., Au royaume des aveugles les borgnes sont rois. Voyez AVEUGLE.

ROI, employé absolument, se dit du Roi qui règne dans le pays où l'on est, ou dans le pays et au moment dont on parle. Par commandement exprès du roi. Le service du roi. Le lever du roi. Un emploi à la nomination du roi. Le roi séant en son conseil. De par le roi, Formule qui signifie De la part du roi, au nom du roi et qui se mettait au commencement de divers actes publics portant sommation, injonction, etc. La maison du roi. Voyez MAISON. Les gens du roi se disait des Procureurs et avocats généraux, des procureurs et avocats du roi. Fig., La bouche du roi ou simplement La bouche, Les officiers qui apprêtaient les repas du roi, et les offices où ils travaillaient. Les carrosses du roi, Les voitures dont le roi faisait usage, qui le suivaient dans ses chasses, dans ses voyages et où ne pouvaient monter que les personnes de noblesse, présentées au roi. Le pavé du roi s'est dit, depuis le règne d'Henri IV, des Grandes routes pavées de la France. Les ordres du roi, Les ordres de chevalerie de Saint-Michel et du Saint-Esprit. Chevalier des ordres du roi. Poids de roi, pied de roi, Poids, mesure officielle avant la Révolution. Lieutenant de roi. Voyez LIEUTENANT. Le roi est mort, vive le roi Mots par lesquels un héraut annonçait au peuple la mort du roi et l'avènement de son successeur. Il se disait aussi proverbialement pour exprimer que Le roi mort, son héritier lui succédait sans délai. On disait encore en ce sens : Le roi ne meurt pas. Le roi dit : Nous voulons se dit, familièrement et ironiquement, à quelqu'un qui dit d'un ton impératif : Je veux. Fam., Le roi n'est pas son cousin. Voyez COUSIN. Pop., Aller où le roi ne va qu'en personne, où le roi va à pied, où le roi n'envoie personne, Aller à la garde-robe. Prov. et fig., Où il n'y a rien le roi perd ses droits. Voyez DROIT.

ROI se dit figurément dans un certain nombre de locutions : Roi d'armes, Le chef des hérauts d'armes. Roi des arpenteurs, roi des barbiers, roi des merciers, etc., Titres donnés autrefois aux chefs de certaines corporations. Dans un sens analogue, on dit, à propos de Riches industriels Le roi de l'acier; Le roi des pétroles, etc. Roi de la basoche, Celui des clercs du Palais qui présidait leur communauté. Voyez BASOCHE.

ROI se dit aussi, en parlant de Certains animaux qu'on regarde comme les plus nobles de tous. Le lion est le roi des animaux. L'aigle est le roi des oiseaux. Il se dit, aux jeux de Cartes, de la Principale figure de chaque couleur. Roi de cœur. Roi de carreau. Roi de pique. Roi de trèfle. Roi d'atout. Tierce au roi. Quatorze de rois. Brelan de rois. Il se dit, au jeu des Échecs, de la Principale pièce du jeu. On ne prend point le roi, il faut lui donner échec et mat pour gagner.

Littré (1872-1877)

ROI (roi) s. m.
  • 1Chef souverain de certains États. De grands rois tous les jours la fortune se joue, Tristan, M. de Chrispe, I, 3. Les rois ne sont jamais de faibles ennemis, Corneille, Méd. III, 3. Pour être plus qu'un roi, tu te crois quelque chose ! Corneille, Cinna, III, 4. Un roi, quoique vaincu, garde son caractère, Corneille, Perthar. V, 2. Qui sert le mieux son roi ne fait que son devoir, Corneille, Agésil. V, 7. Un grand roi pèse tout d'un contrepoids égal, Rend le bien pour le bien et le mal pour le mal, Rotrou, Antig. IV, 1. Il prendra la dîme de vos troupeaux, et vous serez ses serviteurs, vous crierez alors contre votre roi, Sacy, Bible, Rois, I, VIII, 17. …Tout compté, mieux vaut en bonne foi S'abandonner à quelque puissant roi, Que s'appuyer de plusieurs petits princes, La Fontaine, Fabl. VIII, 18. Défiez-vous des rois ; Leur faveur est glissante ; on s'y trompe ; et le pire, C'est qu'il en coûte cher…, La Fontaine, ib. X, 10. Le perroquet dit : sire roi, Crois-tu qu'après un tel outrage Je me doive fier à toi ? La Fontaine, ib. X, 12. Tout ce qu'il y a de grand sur la terre s'unit contre le christianisme naissant, les savants, les sages, les rois ; les uns écrivent, les autres condamnent, les autres tuent, Pascal, Pens. XVIII, 12, édit. HAVET. Qui aurait eu l'amitié du roi d'Angleterre, du roi de Pologne et de la reine de Suède [tous princes dépossédés], aurait-il cru pouvoir manquer de retraite et d'asile au monde ? Pascal, ib. VI, 35. Il faut parler aux rois à genoux ; il faut se tenir debout dans la chambre des princes ; c'est une sottise et une bassesse d'esprit que de leur refuser ces devoirs, Pascal, Condit. des grands, II. Par les soins d'un si grand roi [Louis XIV], la France entière n'est plus, pour ainsi parler, qu'une seule forteresse qui montre de tous côtés un front redoutable, Bossuet, Marie-Thér. Les rois, non plus que le soleil, n'ont pas reçu en vain l'éclat qui les environne, Bossuet, ib. La gloire du roi et sa dignité est la multitude du peuple ; sa honte est de le voir amoindri et diminué par sa faute, Bossuet, Politique, X, I, 12. Celui qui règne dans les cieux et de qui relèvent tous les empires, à qui seul appartient la gloire, la majesté et l'indépendance, est aussi le seul qui se glorifie de faire la loi aux rois et de leur donner, quand il lui plaît, de grandes et de terribles leçons, Bossuet, Reine d'Angleterre. Il est nécessaire de lui donner tout ensemble [à un Dauphin] les vertus d'un roi et celles d'un particulier, Fléchier, Duc de Mont. Alexandre : Comment prétendez-vous que je vous traite ? - Porus : En roi, Racine, Alex. V, 3. Je puis faire les rois, je puis les déposer, Racine, Bérén. III, 1. Nommer un roi père du peuple, est moins faire son éloge que l'appeler par son nom ou faire sa définition, La Bruyère, X. Les bons rois sont très rares et la plupart sont si méchants que les dieux ne seraient pas justes si, après avoir souffert qu'ils aient abusé de leur puissance pendant la vie, ils ne les punissaient après leur mort, Fénelon, Tél. XIX. Un roi qui verse le sang de tant d'hommes, et qui cause tant de malheurs pour acquérir un peu de gloire ou pour étendre les bornes de son royaume, est indigne de la gloire qu'il cherche, Fénelon, ib. XI. Deux rois n'étaient tolérables qu'à Lacédémone : ils n'y formaient pas la constitution ; mais ils étaient une partie de la constitution, Montesquieu, Esp. XI, 10. Quand les Romains ne voulaient point de roi, cela signifiait qu'ils voulaient garder leurs manières, et ne pas prendre celles des peuples d'Afrique et d'Orient, Montesquieu, ib. XIX, 3. J'ai dans la tête que la guerre offensive a fait les premiers rois, et que la guerre défensive a fait les premières républiques, Voltaire, Dial. XXIV, 5. Le roi est précisément et à la lettre l'économe de toute la nation, Voltaire, Pol. et lég. Embelliss. de Paris. Le premier qui fut roi fut un soldat heureux, Voltaire, Mérope, I, 3. Vous ressemblez à un marquis gaulois que j'ai connu dans mes courses [le marquis de Lassay] ; il a fait des mémoires dans lesquels il dit : plus je me suis examiné, plus j'ai vu que je n'étais propre qu'à être roi, Voltaire, Dial. XXIX, 8. Je vous envoie une épître qui contient l'apologie de ces pauvres rois, contre lesquels tout l'univers glose, en enviant cent fois leur fortune prétendue, Lettre du roi de Prusse à Voltaire, 5 mars 1749. Toute l'occupation des rois, ou de ceux qu'ils chargent de leurs fonctions, se rapporte à deux seuls objets : étendre leur domination au dehors, et la rendre plus absolue au dedans, Rousseau, Paix perp. Nous sommes dans l'usage de nommer rois les chefs des peuples barbares qui ont pillé et ensuite envahi les provinces de l'empire romain ; cependant ils n'étaient pas rois proprement : c'étaient d'ordinaire des chefs qui marchaient à une entreprise à la tête d'une peuplade qui les avait choisis, ou qui les suivait librement, Condillac, Hist. anc. I, 4.

    Fig. Les grands hommes sont mes rois, monsieur ; mais la converse n'a pas lieu ici : les rois ne sont pas mes grands hommes, Voltaire, Lett. Maupertuis, 22 juin 1740.

    Faire le roi, exercer une autorité comparée à l'autorité royale. Et on leur plaindra [aux gouverneurs de provinces] un honneur, une distinction, une occasion de faire plaisir à des gens de qualité dans une province ! et pourquoi veulent-ils être aimés et honorés, et faire donc les rois ? n'est-ce pas pour le service du vrai roi ? Sévigné, 6 nov. 1689.

    Fig. Vivre en roi, faire une dépense de roi, vivre, dépenser magnifiquement.

    Il a un cœur de roi, c'est un homme généreux, libéral.

    Être heureux comme un roi, comme un petit roi, être extrêmement heureux dans sa condition. Être heureux comme un roi, dit le peuple hébété ; Hélas ! pour le bonheur que fait la majesté ? Voltaire, 1er disc.

    Parler en roi, faire le roi, trancher du roi, être impérieux et hautain. Qui tranche trop du roi ne règne pas longtemps, Corneille, Nicom. III, 1.

    Par exagération. Se croire le roi du monde, être au comble du bonheur. Il releva la tête que l'attendrissement avait fait pencher, et se crut le roi du monde puisqu'il régnait sur un cœur qui renfermait tous les trésors de la vie, Staël, Corinne, VII, 3.

    C'est un plaisir de roi, c'est un grand plaisir.

    Un manger de roi, un morceau de roi, un morceau digne de la bouche d'un roi, se dit d'un mets exquis, délicieux.

    Fig. …Je sais que la vengeance Est un morceau du roi ; car vous vivez en dieux, La Fontaine, Fabl. X, 12. Ma foi, Colette est un morceau de roi, La Fontaine, Berc.

    Souhait de roi, fils et fille.

    Jouer au roi dépouillé, se dit quand plusieurs personnes sont après quelqu'un pour le piller, le ruiner.

    Roi détrôné, jeu d'enfants qui consiste en ce que, l'un étant monté sur un banc, un tas de feuilles ou de paille, un tertre quelconque, d'autres tâchent, en le tirant ou le poussant, de le faire descendre et de prendre sa place. Jouer au roi détrôné.

    Fig. En parlant de deux ou plusieurs personnes qui s'enlèvent successivement ou réciproquement une position regardée comme avantageuse. Ils jouent au roi détrôné.

    C'est un roi en peinture, un roi de cartes, un roi de carreau, se dit d'un prince faible qui ne sait pas user de son autorité. Un duel met les gens en mauvaise posture, Et notre roi n'est pas un monarque en peinture, Molière, Fâch. I, 10.

    Fig. C'était du temps du roi Guillemot, c'était dans l'ancien temps. Bâtiments du temps du roi Guillemot, comme celui-ci ! oh ! ce que j'en ai déjà vu ne me plaît point du tout, Dancourt, Vacances, sc. 9.

  • 2Le roi Catholique, le roi d'Espagne.

    Anciennement. Le roi Très Chrétien, le roi de France. La reine d'Espagne crie toujours miséricorde… elle arrêta l'autre jour le roi par delà l'heure de la messe, il lui dit : Madame, ce serait une belle chose que la reine Catholique empêchât le roi Très Chrétien d'aller à la messe, Sévigné, 374. Et malgré les serments que Louis de Valois, Que le roi Très Chrétien a prêtés sur la croix, Delavigne, Louis XI, II, 11.

    Roi des Romains, titre que l'on donnait dans l'empire germanique à celui qui était désigné par les électeurs pour succéder à la dignité d'empereur.

    Roi de Rome, titre que Napoléon 1er avait donné à son fils.

    Terme d'histoire ancienne. Le grand roi, le roi de Perse. Leur ambition [des monarques persans] se bornait à porter seuls le titre fastueux de grand roi et de roi des rois, Rollin, Hist. anc. Œuv. t. V, p. 478, dans POUGENS.

    Roi des Juifs, se dit, dans l'Écriture, de Jésus-Christ.

    Roi d'Yvetot, nom que prenaient les seigneurs d'Yvetot, terre dans le pays de Caux, en Normandie. Il était un roi d'Yvetot Peu connu dans l'histoire, Se levant tard, se couchant tôt, Dormant fort bien sans gloire, Béranger, Roi d'Yvetot.

  • 3Roi des rois, se dit d'un roi qui, par prééminence, commande à d'autres rois. Ce nom de roi des rois et de chef de la Grèce Chatouillait de mon cœur l'orgueilleuse faiblesse, Racine, Iphig. I, 1.

    Fig. Le roi des rois, Dieu. Il y a cette différence entre les rois de la terre et le roi des rois, que les princes ne rendent pas leurs sujets fidèles, mais qu'ils les trouvent tels ; au lieu que Dieu ne trouve jamais les hommes qu'infidèles, et qu'il les rend fidèles quand il le faut, Pascal, Lett. à Mlle de Roannez, V. La terre, son origine et sa sépulture, n'est pas encore assez basse pour la recevoir ; elle voudrait disparaître tout entière devant la majesté du roi des rois, Bossuet, Mar.-Thér. Je vais au roi des rois demander aujourd'hui Le prix de tous les maux que j'ai soufferts pour lui, Voltaire, Zaïre, II, 3.

    Le roi du ciel, Dieu. Il nous avertit que, pour trouver à la mort quelque reste de nos travaux… avec le roi de la terre il faut encore servir le roi du ciel, Bossuet, Louis de Bourbon.

  • 4Quand on dit absolument le roi, on entend le roi qui règne dans le pays où l'on est. Hors qu'un commandement exprès du roi me vienne De trouver bons les vers dont on se met en peine…, Molière, Mis. II, 7. Les Écossais, à qui il [Charles 1er] se donne, le livrent aux parlementaires anglais, et les gardes fidèles de nos rois trahissent le leur, Bossuet, Reine d'Anglet. Le feu roi, le prédécesseur du roi régnant.

    Servir le roi, se disait pour être militaire, servir dans les troupes du royaume.

    Dans la marine, bâtiment du roi, bâtiment armé par le gouvernement et monté par des officiers et des marins de la marine royale.

    Il est noble comme le roi, se dit d'un homme de noblesse ancienne.

    Cela est vrai ou le roi n'est pas noble, se dit pour affirmer une chose.

    Le roi n'est pas son cousin, se dit de quelqu'un qui est fier ou glorieux, ou qui vient d'obtenir quelque grand succès.

    Être sur le pavé du roi, être dans la rue.

    Loger dans la maison du roi, être en prison.

    Être au pain du roi, manger le pain du roi, se disait des soldats et aussi des prisonniers.

    Qui aura de beaux chevaux, si ce n'est le roi ? se dit quand quelqu'un s'étonne de voir un homme riche bien logé, bien meublé, etc.

    Pour se moquer de celui qui dit d'un ton absolu : je veux, on répond : le roi dit : nous voulons.

    Populairement. Aller où le roi va à pied, ne va qu'en personne, n'envoie personne, aller à ses nécessités.

  • 5Le roi ne meurt pas, se disait en France pour signifier qu'à la mort du roi, son parent mâle le plus proche est dans l'instant, et par le seul droit de sa naissance, en possession de l'autorité royale.

    De par le roi, voy. PAR, n° 17.

    Vive le roi ! acclamation publique pour la longue vie et la prospérité du roi.

    La maison du roi, voy. MAISON, n° 19.

    La bouche du roi, ou, simplement, la bouche, les officiers qui apprêtent le manger pour le roi, et les offices où ils travaillent.

    Commissaire du roi, homme du roi, celui qui a commission du roi pour quelque affaire relative au service du roi ou du public.

    Procureur du roi, avocat du roi, se disait quand la France était en royaume, voy. PROCUREUR, AVOCAT.

    On disait de même au palais : les gens du roi.

    Lieutenant de roi de telle place, celui qui en a le commandement en l'absence du gouverneur.

  • 6 Anciennement. Main du roi, la puissance et l'autorité du roi interposées dans les procédures judiciaires entre particuliers.

    Dans l'ancien style de la procédure, mettre quelque chose sous la main du roi, saisir quelque chose en justice au nom du roi.

  • 7 Anciennement. Les ordres du roi, les ordres de chevalerie de Saint-Michel et du Saint-Esprit.

    L'ordre du roi, l'ordre de Saint-Michel, pris séparément.

  • 8 Anciennement. Coin du roi, morceau de fer trempé et gravé pour marquer la monnaie.

    Taux du roi, le prix d'une chose réglé par l'autorité du roi (on dit aujourd'hui taux légal).

    Poids du roi, et, plus ordinairement, poids de roi, le lieu où l'on pèse les grosses marchandises (on dit aujourd'hui poids public).

    Les deniers du roi, le produit des impositions.

    Les coffres du roi, les finances du roi.

    Pied de roi, ancienne mesure, la sixième partie de la toise, ou 325 millimètres.

  • 9Vraiment roi, prince qui accomplit tous les devoirs de la royauté. Mais un roi vraiment roi qui, sage en ses projets, Du bonheur du public ait cimenté sa gloire, Il faut, pour le trouver, courir toute l'histoire, Boileau, Épître 1.

    Le plus roi, le prince qui porte le plus le caractère de la royauté. L'estime que le plus grand, ou, pour parler avec M. Pellisson, le plus roi entre les rois [Louis XIV] a conçue de votre mérite, Leibnitz à Bossuet, dans BOSSUET Projet de réunion, Lett. VIII.

    Être moins roi, sortir un peu de la dignité royale. Le plaisir d'un roi qui mérite de l'être, est de l'être moins quelquefois…, La Bruyère, X.

    Le moins roi, le prince qui a le moins les défauts des rois. Il n'y a que le roi de Prusse que je mets de niveau avec vous, parce que c'est de tous les rois le moins roi et le plus homme, Voltaire, Lett. Maupertuis, 1740.

  • 10Le Livre des Rois, les quatre livres de l'Ancien Testament contenant l'histoire des Hébreux depuis Samuel jusqu'à la captivité de Babylone.
  • 11Celui qui commande aux choses comme fait un roi à ses sujets. Roi de ses passions, il a ce qu'il désire, Racan, Bergeries, dans RICHELET. L'homme de la nature est le chef et le roi, Boileau, Sat. VIII.

    Fig. L'avare, d'autre part, n'aime que la richesse, C'est son roi, Régnier, Sat. IX.

  • 12 Fig. et familièrement. Le premier, le principal, le meilleur en son genre. J'ai le roi des maris, Il n'en est pas de meilleur dans Paris, La Fontaine, Gag. Je sais… Qu'on te peut appeler le roi des serviteurs, Molière, l'Ét. I, 2. Dansez vite, obéissez donc, Il est le roi du rigodon, Béranger, Ménétr. de Meudon.

    C'est le roi des hommes, se dit d'un homme excellent qui aime à obliger, à faire plaisir.

    Le roi des fous, l'homme le plus fou qu'il y ait. Je soutiens, moi, qu'il faut être le roi des fous Pour se faire prier d'épouser une fille Jeune, riche héritière et de noble famille, Destouches, Phil. mar. III, 3.

  • 13Roi d'armes, le chef des hérauts d'armes.

    Le roi du bal, celui qui donne le bal, ou en l'honneur de qui on donne le bal et qui ouvre la danse.

    Le roi de la basoche, celui d'entre les clercs du palais qui présidait une certaine juridiction qu'ils tenaient autrefois.

    Le roi des pèlerins, celui d'entre eux qui a vu le premier le clocher du lieu où ils vont en pèlerinage.

    Le roi de l'oiseau, celui des tireurs d'arbalète qui abat l'oiseau.

    Chez les anciens, le roi du festin, celui qui présidait à un festin. Nous tirâmes au sort le roi du festin ; il devait écarter la licence, sans nuire à la liberté, Barthélemy, Anach. ch. 25.

  • 14Titre qui se donnait à tous les chefs de corporation jouissant de quelque privilége public. Roi des barbiers, des merciers, etc.

    Roi des violons, le chef des vingt-quatre violons du roi et de tous les violons de France, sans la permission duquel il n'y avait pas de violon qui osât jouer publiquement, Richelet.

  • 15Roi, titre que l'on donnait, à Malte, au plus ancien des chevaliers embarqués sur une des galères de l'ordre ; il commandait la garde, et avait à sa charge les armes du navire.
  • 16Roi de théâtre, l'acteur qui fait les rois. Tiens-toi un peu, enfonce ton bonnet en méchant garçon ; campe-toi sur un pied ; mets la main au côté ; fais les yeux furibonds ; marche un peu en roi de théâtre, Molière, Scapin, I, 7.

    Fig. Un roi de théâtre, synonyme de roi en peinture, voy. plus haut, n° 1.

    Roi de théâtre se dit aussi d'un prince qui veut toujours se montrer, se produire en public.

  • 17Chez les catholiques, le jour des Rois (avec une R majuscule), l'Épiphanie. Où j'étais résolu… De boire et de manger comme aux veilles des Rois, Régnier, Sat. X.

    Faire ou tirer les Rois, dîner ou souper en société ou en famille le jour des Rois, et partager entre les convives un gâteau où il y a une fève. Mon fils est retourné en basse Bretagne faire les Rois, Sévigné, 397. Le roi fit à Versailles de magnifiques Rois avec beaucoup de dames, Saint-Simon, 190, 38.

    Gâteau des Rois, le gâteau où il y a une fève, ce jour-là.

    Chandelle des Rois, voy. CHANDELLE.

    Le roi de la fève, voy. FÈVE. Ce fut un tel qui fut roi.

    Le roi boit, cri que poussent les convives pendant que le roi de la fève boit.

  • 18Roi se dit de certains animaux qu'on regarde comme les plus nobles de tous. Le roi des animaux, le lion. De par le roi des animaux, Qui dans son antre était malade, Fut fait savoir à ses vassaux, Que chaque espèce en ambassade Envoyât gens le visiter, La Fontaine, Fabl. VI, 14.

    Le roi des oiseaux, l'aigle.

    Roi des animaux se dit quelquefois de l'homme. Ce maître prétendu qui leur donne des lois, Ce roi des animaux, combien a-t-il de rois ? Boileau, Sat. VIII.

    Par extension, le roi des forêts, le chêne. Quand le roi des forêts, victime désignée, Doit fatiguer enfin le fer de la cognée, Masson, Helvét. III.

  • 19Roi des chevrotains, nom donné à l'antilope pygmée de Pallas, ruminants (Cap).

    Roi des cailles, le râle des genêts.

    Roi de a mer, la coryphène hippure (poissons acanthoptérygiens), appelée dauphin.

    Roi des rougets, l'apogon commun.

    Le roi, nom vulgaire du papillon grand nacré. On dit aussi roi des papillons.

    Roi du sud, belle variété de cône (coquilles).

  • 20Le roi des abeilles, voy. ABEILLE.
  • 21Les Trois Rois, nom de trois étoiles placées sur une même ligne dans la constellation d'Orion. On les appelle aussi le baudrier d'Orion, le râteau, la ceinture d'Orion, le bâton de Jacob.
  • 22Au jeu de cartes, la carte figurant un roi dans chaque couleur. Ou, querellant tout bas le ciel qu'elle regarde, à la bête gémir d'un roi venu sans garde, Boileau, Sat. X.

    Se dit absolument du roi de cœur, à la guimbarde.

    Roi appelé, celui qui est avec l'ombre au quadrille.

    Roi qui parle, sorte de jeu de cartes qui se jouait du temps de Louis XIV. 10 septembre : Monseigneur fit jouer vingt-huit personnes au roi qui parle, Dangeau, I, 220. Le 26 : dans l'appartement, il y eut un roi qui parle, où trente personnes jouèrent à la même table, Dangeau, ib. p. 223.

  • 23Aux échecs, la principale pièce du jeu. On ne prend point le roi, il faut lui donner échec et mat pour gagner. Si les petites choses peignent les hommes, il est permis de rapporter qu'il [Charles XII] faisait toujours marcher le roi à ce jeu [les échecs] ; il s'en servait plus que des autres pièces, et par-là il perdait toutes les parties, Voltaire, Charles XII, 5.
  • 24Dans l'ancienne minéralogie, le roi des métaux, l'or.
  • 25 Terme d'alchimie. Le roi, le soufre ou l'or minéral.

    Le roi et la reine, le soufre et le mercure qu'on doit faire cuire ensemble.

  • 26Roi d'été, variété de poire.

PROVERBES

Un Dieu, un roi, une loi, se dit pour combattre les hérésies.

Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois, voy. AVEUGLE.

C'est la cour du roi Pétaud, voy. PÉTAUD.

SYNONYME

ROI, TYRAN, PRINCE, SOUVERAIN, EMPEREUR. Le roi se distinguait du tyran dans l'antiquité en ce qu'il possédait légitimement l'autorité ; depuis le moyen âge, il se distingue des ducs, comtes, princes, souverains aussi, en ce que le roi a été dans l'origine suzerain de ces ducs, comtes et princes ; enfin il se distingue de l'empereur, en ce que l'empereur est un titre dérivé de l'empire romain.

HISTORIQUE

Xe s. Chi [qui] rex eret à cels dis sovre pagiens, Eulalie.

XIe s. E qui enfraint la pais le rei, Lois de Guill. I. Charles li reis, nostre emperere magne, Ch. de Rol. I.

XIIe s. Que roi [l'amour] me fait de folie, Couci, III. Car cil qui voit tel amor desevrer [séparer]… A assez plus de duel [deuil] et de pesance Que n'auroit jà li rois s'il perdoit France, ib. XXIV. Raoul ot droit, si con je ai apris ; Le tort en ot li rois de Saint Denis, Raoul de C. 33.

XIIIe s. [Il y] Avoit un roi en France de moult grant seigneurie, Berte, II. Ha ! Diex, fait-ele, sire, vrai rois, vrai gouvernere, ib. XLIV. [Dieu] C'est li rois souverains en cui du tout [je] m'afi, ib. LIX. Ha ! Diex, con je seroie rois [quelle satisfaction j'aurais], Se le pooie as poins tenir [un putois] à mon chief por le froit covrir, Por ce que il bone pel a ! Ren. 2516. Por ce qu'il ne vost porter corone d'or là ù le rei des reis Jhesu Crist le fiz de Dieu porta corone d'espines, Ass. de Jér. I, 22. Mais on a conté maintes fois : Où vient li rois, là va li lois, Ph. Mouskes, ms. p. 735, dans LACURNE.

XIVe s. Cellui n'est pas roy, qui n'est de soy et par soy suffisant en touz biens, Oresme, Éth. 246. Il advint une fois que beaucoup de chevaliers et de dames jouoyent au roy qui ne ment, pour dire verité du nom de s'amie, Le Chev. de la Tour, Instr. à ses filles, dans LACURNE. L'an mil trois cent trente et ung, bourgois de Tournay emprendrent une très noble et belle feste de trente ung roys pour jouster l'an trente et ung… et principalement Jacques de Cobry l'esmeut et commencha, prendant grand peine et supportant grandz fraiz pour l'estaurer, lequel fut nommé pour ceste feste le roy Ghalot, qui jadis conquist trente roys, Caffiaux, Régence d'Aubert de Bavière, p. 48.

XVe s. Car comme uns asnes couronnez Est uns rois terriens sans lettre, Deschamps, Poésies mss. f° 550. Maleureus suis par toute lettre, Voire, par Dieu, roy des mescheans [ceux qui ont mauvaise chance], Deschamps, ib. f° 382. Cent mille foiz vous doy remercier, Chiere dame, de vostre doulz octroy ; Car vous m'avez fait plus riche d'un roy, Deschamps, Art de faire des chansons. Comme homme soit si notable chose, que chascun soit un roy et chascun soit un monde, Christine de Pisan, Charles V, I, 12.

XVIe s. Les ephores condemnerent à l'amende leur roy Archidamus, à cause qu'il avoit espousé une petite femme, disans qu'il leur engendreroit des roytelets, non pas des roys, Amyot, Agésil. II. Il n'y a dignité temporelle en France qui entre en comparaison avec celle du roy ; et neantmoins il n'y a parole en laquelle nos devanciers se soient tant licentieusement desbordés qu'en cette-ci : roy des merciers, roy des barbiers, roy d'armes, roy des ribaux…, Pasquier, Rech. VIII, p. 720, dans LACURNE. Il n'y a rien qui soit tant à craindre, que quand un royaume tombe entre les mains d'un enfant ; chacun en son particulier veut jouer au roy despouillé, Pasquier, ib. VI, p. 536. Quand quelquesfois je pense à ma premiere vie, Du tans que je vivois seul roy de mon desir, Desportes, Amours d'Hippolyte, X. De meschant homme bon roi, Cotgrave Il [Dieu] mit des cœurs de rois au sein des artisans, Et aux cervaux des rois des esprits de paysans, D'Aubigné, Tragiques, Feux. Samuel tient son rang, juge et prophete sage, à qui ce peuple sot, friand de son dommage, Demande un roi : lui donc, instituant les rois, Annonce leurs defauts que l'on prend pour des droits, D'Aubigné, ib. la Chambre dorée. Soubz roys l'on vit en plus grand abandon [licence] que soubz loys, Bonivard, Chron. de Gen. III, 28.

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Encyclopédie, 1re édition (1751)

ROI, voyez Roitelet.

Roi ou Mere des cailles, voyez Rasle de genet.

Roi des vautours, Vautour des Indes, (Hist. nat. Ornitholog.) vultur monachus. Klein. Oiseau qui est à-peu-près de la grosseur d’un dindon femelle ; il a deux piés trois pouces de longueur depuis la pointe du bec jusqu’à l’extrémité de la queue ; les aîles étant pliées s’étendent jusqu’au bout de la queue. La tête & le haut du cou sont couverts d’une peau unie, variée de différentes couleurs, telles que l’orangé, le brun, le rouge, le pourpre, &c. On voit dans plusieurs endroits de cette peau des poils courts & noirs. Au-dessous de la partie nue du cou, il y a une espece de collier formé par des plumes assez longues d’un cendré foncé : ce collier entoure le cou, & descend un peu vers la poitrine : le reste du cou, le dos & les petites plumes des ailes sont d’un blanc mêlé d’une légere teinte de roussâtre. Le croupion & les plumes du dessus de la queue ont une couleur noire. (Le roi des vautours qu’Ewards a décrit, avoit le croupion & les plumes du dessus de la queue blancs.) La poitrine, le ventre, les côtés du corps, les jambes, les plumes du dessous de la queue & celles de la face inférieure des ailes sont blancs. La couleur des grandes plumes de l’aile est d’un noir changeant en un verd très-obscur ; les moyennes sont de la même couleur, & elles ont les bords extérieurs gris ; la queue est noire, le bec, les piés & les ongles sont rouges. On trouve cet oiseau à Cayenne. Derham l’a décrit sous le nom de vautour des Indes. Ornit. de M. Brisson, tom. I. Voyez Oiseau.

Roi, (Gouvern. polit.) Voici les vers qu’il faut graver sur la porte des palais des rois.

Hoc reges habent
Magnificum & ingens, nulla quòd rapit dies
Prodesse miseris, supplices fido lare protegere.

Le plus beau présent que les Dieux puissent faire aux hommes, c’est d’un roi qui aime son peuple & qui en est aimé, qui se confie en ses voisins & qui a leur confiance, enfin qui par sa justice & son humanité fait envier aux nations étrangeres le bonheur qu’ont ses sujets de vivre sous sa puissance.

Les oreilles d’un tel roi s’ouvrent à la plainte. Il arrête le bras de l’oppresseur : il renverse la tyrannie. Jamais le murmure ne s’eleve contre lui ; & quand les ennemis s’approchent, le danger ne s’approche point. Ses sujets forment un rempart d’airain autour de sa personne ; & l’armée d’un tyran fuit devant eux comme une plume légere au gré du vent qui l’agite.

« Favori du ciel, dit le bramine inspiré, toi à qui les fils des hommes tes égaux, ont confié le souverain pouvoir ; toi qu’ils ont chargé du soin de les conduire, regarde moins l’éclat du rang que l’importance du dépôt. La pourpre est ton habillement, un trône ton siege : la couronne de majesté pare ton front : le sceptre de la puissance orne ta main ; mais tu ne brilles sous cet appareil qu’autant qu’il sert au bien de l’état. »

Quant à l’autorité des rois, c’est à moi de m’y soumettre ; & c’est à l’auteur de Télemaque qu’il appartient d’en établir l’étendue & les bornes.

Un roi, dit-il, liv. V. p. 168 ; un roi peut tout sur les peuples : mais les lois peuvent tout sur lui. Il a une puissance absolue pour faire le bien, & les mains liées s’il vouloit faire le mal. Les lois lui confient les peuples comme le plus précieux de tous les dépôts, à condition qu’il sera le pere de ses sujets : elles veulent qu’un seul homme serve par sa sagesse & sa modération, à la félicité de tant d’hommes ; & non pas que tant d’hommes servent par leur misere & par leur servitude, à flatter l’orgueil & la mollesse d’un seul homme.

Un roi ne doit rien avoir au-dessus des autres, excepté ce qui est nécessaire, ou pour le soulager dans ses pénibles fonctions, ou pour imprimer au peuple le respect de celui qui est né pour soutenir les lois. Il doit être au-dehors le défenseur de la patrie ; & au-dedans le juge des peuples, pour les rendre bons, sages & heureux.

Il doit les gouverner selon les lois de l’état, comme Dieu gouverne le monde selon les lois de la nature. Rarement employe-t-il sa toute-puissance pour en interrompre & en changer le cours, c’est-à-dire, que les dérogations & les nouveautés seront comme des miracles dans l’ordre de la bonne politique.

Quelques lauriers que la guerre lui promette, ils sont tôt ou tard funestes à la main qui les cueille :

En vain aux conquérans
L’erreur parmi les rois donne les premiers rangs.
Entre tous les héros ce sont les plus vulgaires ;
Chaque siecle est fecond en heureux téméraires......
Mais un roi vraiment roi, qui, sage en ses projets,
Sache en un calme heureux maintenir ses sujets,
Qui du bonheur public ait cimenté sa gloire ;
Il faut, pour le trouver, courir toute l’histoire.
La terre compte peu de ces rois bienfaisans ;
Le ciel à les former se prépare long-tems !
Tel fut cet empereur, sous qui Rome adorée,
Vit renaître les jours de Saturne & de Rhée ;
Qui rendit de son joug l’univers amoureux,
Qu’on n’alla jamais voir sans revenir heureux,
Qui soupiroit le soir, si sa main fortunée
N’avoit par ses bienfaits signalé la journée :
Le cours ne fut pas long d’un empire si doux.

Seneque (vers 463.) peint encore plus simplement, plus laconiquement & plus énergiquement, mais non pas avec ce brillant coloris, la gloire & les devoirs des rois. Je finis toutefois par ces maximes :

Pulchrum eminere est inter illustres viros ;
Consulere patriæ ; parcere afflictis ; ferâ
Cæde abstinere, tempus atque iræ dare ;
Orbi quietem ; sæculo pacem suo.
Hæc summa virtus : petitur hâc cælum viâ !

Roi, (Critique sacrée.) rex. Ce titre est donné indifféremment dans l’Ecriture aux souverains, soit que leurs états aient le titre de royaume ou d’empire. Les pontifes répondirent : nous n’avons d’autre roi que Céfar. Jean. 19. 15. Ce mot désigne aussi les chefs, les magistrats qui gouvernent un état ; non erat rex in Israël, Juges, j. 31. c’est-à-dire, il n’y avoit point de chefs en Israël, aux ordres duquel le peuple obéît. 3°. Il se prend pour guide, conducteur, soit parmi les hommes, soit parmi les bêtes. La sauterelle n’a point de roi (regem), Prov. xxx. 27. Il se prend, 4°. pour les grands, pour toutes les personnes puissantes en crédit ou en autorité : Je parlois de tes témoignages en présence des grands de ce monde, in conspectu regum. Ps. cxviij. 16. 5°. Pour les fideles ; tu nous as faits rois à notre Dieu, fecisti nos Deo nostro reges. 6°. Enfin, pour ceux qui par leur prééminence l’emportent au-dessus des autres. Il est roi sur tous les fils de l’orgueil, ipse est rex super universos filios superbiæ. Job. xlj. 25. Le roi des rois, & le seigneur des dominations est le titre que Saint Paul donne à l’Etre suprème. I. Tim. vj. 15. (D. J.)

Roi, nom que les anciens donnerent ou à Jupiter ou au principal ministre de la religion dans les républiques.

Après que les Athéniens eurent secoué le joug de leurs rois, ils éleverent une statue à Jupiter sous le nom de Jupiter-roi, pour faire connoître qu’à l’avenir ils ne vouloient point d’autre maître. A Lébadie on offroit de même des sacrifices à Jupiter roi, & on trouve que ce titre lui est souvent donné chez les anciens.

Mais ils ne le croyoient pas tellement attaché à la suprème puissance de ce dieu, qu’ils ne l’attribuassent quelquefois à certains hommes distingués par leur dignité. Ainsi le second magistrat d’Athènes ou le second archonte s’appelloit roi, βασιλεύς ; mais il n’avoit d’autres fonctions que celles de présider aux mysteres & aux sacrifices : hors de là nulle supériorité. Dans le gouvernement politique, sa femme avec le titre de reine partageoit aussi ses fonctions sacrées. L’origine de ce sacerdoce, dit Demostènes dans l’oraison contre Néera, venoit de ce qu’anciennement dans Athènes le roi exerçoit les fonctions de grand-prêtre ; & la reine, à cause de sa dignité, entroit dans le plus secret des mysteres. Lorsque Thésée eut rendu la liberté à Athènes en substituant la démocratie à l’état monarchique, le peuple continua d’élire entre les principaux & les meilleurs citoyens un roi pour les choses sacrées, & ordonna par une loi, que sa femme seroit toujours athénienne de naissance, & vierge quand il l’épouseroit, afin que les choses sacrées fussent administrées avec la pureté convenable ; & de peur qu’on n’abolît cette loi, elle fut gravée sur une colonne de pierre. Ce roi présidoit donc aux mysteres ; il jugeoit les affaires qui regardoient le violement des choses sacrées. En cas de meurtre, il rapportoit l’affaire au sénat de l’aréopage ; & déposant sa couronne, il s’asseyoit parmi les autres magistrats pour juger avec eux. Le roi & la reine avoient sous eux plusieurs ministres qui servoient aux cérémonies de la religion : tels que les épimeletes, les hiérophantes, les gereres, les ceryces, &c.

La même chose se pratiqua chez les Romains. Quelque mécontens qu’ils fussent de leur dernier roi, ils avoient cependant reçu tant de bienfaits des six premiers, qu’ils ne purent absolument en abolir le nom : mais aussi ne lui attribuerent-ils que des fonctions qui ne pouvoient jamais menacer la liberté, je veux dire le soin des cérémonies religieuses. Il lui étoit d’ailleurs défendu de remplir aucune magistrature ni d’haranguer le peuple. On le choisissoit parmi les plus anciens pontifes & augures, mais il étoit toujours subordonné au souverain pontife : cette dignité subsista jusqu’au regne du grand Théodose.

Roi, archonte, (Antiq. grecq.) C’est ainsi qu’on appelloit le second des neuf archontes d’Athènes. Il avoit pour son département ce qui concernoit la célébration des fêtes, les sacrifices & la religion. Il décidoit sous le grand portique sur les crimes d’impiété & de sacrilege. Il statuoit sur les cérémonies & les mysteres, sur les malheurs causés par la chute des bâtimens & des autres choses inanimées. C’étoit à lui d’introduire les meurtriers dans l’aréopage ; & il jugeoit avec cette célebre compagnie, en quittant sa couronne, qui étoit la marque de sa dignité. Pendant qu’il examinoit un procès, les parties ne pouvoient assister aux mysteres ni aux autres cérémonies de la religion. Pollux remarque que l’épouse du roi-archonte prenoit le titre de reine : elle devoit être athénienne de naissance : son mari comme inspecteur sur les affaires religieuses & sacrées, étoit honoré du nom d’archonte-roi, parce que les premiers rois d’Athènes étoient comme les grands sacrificateurs de la nation. Ils immoloient les victimes publiques, & leurs femmes offroient les sacrifices secrets avant le regne de Thesée. Les Romains, en détruisant la royauté, conserverent un roi des sacrifices sur le modele d’Athènes (D. J.)

Roi-d’armes, (Hist. de France.) C’étoit un officier de France qui annonçoit la guerre, les treves, les traités de paix & les tournois. C’est le premier & le chef des héraults-d’armes : nos ancêtres lui ont donné le titre de roi, qui signifie seulement premier chef. La plupart des savans assurent que ce fut Louis-le-Gros qui donna à Louis de Roussy le titre de roi-d’armes, inconnu jusques-là. Cet établissement fut imité par-tout, honoré de plusieurs privileges, de pensions considérables ; & les souverains à qui les rois-d’armes étoient envoyés, affectoient pour faire éclater leur grandeur dans les autres pays, de leur faire de beaux-présens.

Philippe de Comines a remarqué que Louis XI quoique fort avare, donna à un roi-d’armes que le roi d’Angleterre lui avoit envoyé, trois cens écus d’or de sa propre main, & trente aunes de velours cramoisi, & lui promit encore mille écus. Le rang de leur maître les rendoit respectables, & ils jouissoient des mêmes privileges que le droit des gens accorde aux ambassadeurs, pourvu qu’ils se renfermassent dans les bornes de leur commission ; mais s’ils violoient les lois de ce droit, ils perdoient leurs privileges. Froissart observe, que le roi-d’armes du duc de Gueldres ayant défié le roi Charles VI. clandestinement dans la ville de Tournai, & sans lui en donner connoissance, « il fut arrêté, mis en prison, & cuida être mort, dit cet historien, pour ce que tel défi étoit contre les formes & contre l’usage accoutumé, & de plus dans un lieu mal convenable, Tournai n’étant qu’une petite ville de Flandre ».

Le respect qu’on avoit pour les rois-d’armes suivis de leurs héraults, étoit si grand, qu’ils ont quelquefois, étant revêtus de leur cotte-d’armes, arrêté par leur présence, en criant hola, la fureur de deux armées dans le fort du combat. Froissart a observé, que dans un furieux assaut donné à la ville de Villepode en Galice, à la parole des héraults, cesserent les assaillans & se reposerent.

Le roi-d’armes avoit un titre particulier qui étoit mont-joie S. Denys ; & les autres héraults portoient le titre des seize principales provinces du royaume, comme Bourgogne, Normandie, Guienne, Champagne.

Il y a en Angleterre trois rois-d’armes, sous le titre de la jarretiere, de Clarence, & de Norroy. En Ecosse, les rois-d’armes & les héraults ont été employés dans les tournois, dans les combats à plaisance ou à outrance, à fer émoulu ou à lance mornée, que les seigneurs particuliers faisoient avec la permission du roi. Mais ils sont à-présent sans emploi par tout pays ; & on ne les voit plus parcourir les provinces, pour reconnoître les vrais nobles, les armoiries des familles & leurs blasons, en un mot, pour découvrir les abus que l’on commettoit concernant la noblesse & les généalogies. Voyez Roi d’armes, hist. d’Angl.

Quant aux cottes qui sont l’habit qui marquoit leur titre & leur pouvoir, celle du roi-d’armes est différente de celle des héraults, 1°. en ce que les trois grandes fleurs-de-lis qui sont au-devant & auderriere de la cotte, sont surmontées d’une couronne royale de fleurs-de-lis fermée. 2°. En ce qu’elle est bordée tout-au-tour d’une broderie d’or, entre les galons & la frange ; & 3°. parce que sur les manches, les mots montjoye S. Denys sont en broderie avec ces mots roi-d’armes de France sur la manche gauche.

Roi-d’armes, dit Favin, portoit la cotte de velours violet, avec l’écu de France couronné & entouré de deux ordres de France sur les quatre endroits de sa cotte-d’armes. Il ajoute qu’il falloit autrefois être noble de trois races, tant de l’estoc paternel que du côté maternel, pour être reçu montjoye. Le même Favin a décrit particulierement le baptême du roi-d’armes ; c’étoit ainsi qu’on appelloit l’imposition du nom qu’on lui donnoit à sa réception : cette cérémonie se faisoit par le renversement d’une coupe de vin sur sa tête.

M. Ducange a inseré dans son glossaire, sous le mot Heraldus, la réception du roi-d’armes du titre de mont-joie. Les valets de chambre du roi devoient le revêtir d’habits royaux, comme le roi même. Le connetable & les maréchaux de France devoient l’aller prendre pour le mener à la messe du roi, accompagné de plusieurs chevaliers & écuyers ; les héraults ordinaires & les poursuivans marchoient devant lui deux à deux ; un chevalier devoit porter l’épée avec laquelle on le faisoit alors chevalier, tandis qu’un autre portoit sur une lance sa cotte-d’armes. (D. J.)

Roi d’armes d’Angleterre, le roi d’armes étoit autrefois un officier fort considérable dans les armées & dans les grandes cérémonies ; il commandoit aux héros & aux poursuivans d’armes, présidoit à leur chapitre, & avoit jurisdiction sur les armoiries. Voyez Héraut & Armes.

Nous avons en Angleterre trois rois d’armes, sçavoir, Gaster, Clarence, & Norroy.

Gaster premier roi d’armes. Voyez Gaster.

Cet officier fut établi par Henri V. il accompagne les chevaliers de la jarretiere aux assemblées, le maréchal aux solemnités & aux funérailles des personnes de la premiere noblesse, & il porte l’ordre de la jarretiere aux princes & aux rois étrangers ; mais dans ces sortes d’occasions, il est toujours accompagné de quelqu’un des premiers pairs du royaume.

Clarence roi d’armes, il est ainsi appellé du duc de Clarence, qui posseda le premier cette dignité. Sa fonction est d’ordonner des obseques de la noblesse inférieure, des baronets, des chevaliers, des écuyers, & des gentilhommes, au sud de la riviere du Trent. Voyez Clarence.

Norroy roi d’armes, exerce les mêmes fonctions au nord du Trent. On appelle ces deux derniers, hérauts provinciaux, parce qu’ils partagent pour leurs fonctions le royaume en deux provinces. V. Héraut.

Ils ont pouvoir par une charte, de visiter les familles nobles, de rechercher leur généalogie, de distinguer leurs armoiries, de fixer à chacun les armes qui lui conviennent, & régler avec le Gaster la conduite des autres hérauts.

Autrefois les rois d’armes étoient créés & couronnés solemnellement par les rois mêmes ; mais aujourd’hui c’est le grand maréchal qui est chargé de les installer, & qui dans cette fonction représente la personne du roi.

On peut ajouter aux deux rois d’armes précédens, le Lyon roi d’armes pour l’Ecosse, qui est le second en Angleterre, & dont le couronnement se fait avec beaucoup de solemnité. Il est chargé de publier les édits du roi, de régler les funérailles, & de casser les armoiries.

Roi de la bazoche, (Jurisp.) Voyez Bazoche.

Roi de la féve, (Antiq. rom.) les enfans tiroient au sort avec des féves, à qui seroit roi ; ils faisoient à la fin de Décembre, pendant les saturnales, ce que nous avons transporté au commencement de Janvier, à l’occasion de la fête des rois. Cet usage de se servir de féve, pouvoit tirer son origine de ce que chez les Grecs on en usoit pour l’élection des magistrats ; d’où est venu ce précepte énigmatique de Pythagore, κυάμων ἀπέχου, a fabis abstine, ne vous mêlez point du gouvernement. Ciceron dit quelque part, fabam mimum, la farce de la féve, parce que cette royauté de la féve étoit une espece de royauté de théâtre. (D. J.)

Roi du festin, (Critiq. sacrée.) la coutume d’occident de faire les rois, pour dire se régaler ; créer un roi de la fête, est bien ancienne dans les festins ; ce qui concerne cette coutume chez les Grecs & les Romains, appartient à la littérature prophane. Voyez-en l’article qui suit.

Pour ce qui regarde l’usage des Juifs, nous en sommes instruits par l’Ecclésiast. ch. xxxij. v. 1. & suiv. Voici ce qu’en dit ce livre. Si l’on vous nomme le roi d’un festin (ἡγούμενον) la vulgate dit rectorem aut regem, ne vous élevez pas par cette raison au-dessus des autres ; mais après avoir eu soin de tous les convives, & avoir tout bien réglé, vous vous mettrez à table avec les conviés, vous vous rejouirez avec eux, & même pour l’ornement, vous pouvez recevoir ou prendre la couronne. Ces paroles justifient que dans ces repas mêmes où il n’y avoit point d’excès, on mettoit une couronne de fleurs, ou de quelque feuillage, sur la tête du roi du festin ; ainsi l’usage des couronnes dans les festins, régnoit chez les Juifs, comme chez les Grecs & chez les Romains, & n’étoit blâmé de personne, quoiqu’il l’ait été furieusement par Tertullien, dans son livre de coronâ.

Le chapitre de l’Ecclésiastique, que nous venons de citer, nous apprend encore que les Juifs aimoient à réunir dans leurs festins, les chants & la musique ; une agréable mélodie, avec un vin délicieux, est comme un sceau d’émeraudes enchâssé dans de l’or. C’est au verset 7. qu’on lit ces paroles. Voyez les Commentaires de Drusius, où vous trouverez beaucoup d’érudition sur cet usage. (D. J.)

Roi du festin, ou roi de la table ; (Antiq. grecq. & rom.) anciennement, dit Plutarque, on créoit un chef, un législateur, un roi de la table, dans les repas les plus sages. Je trouve qu’il se faisoit de deux manieres, ou par le sort du dé, ou par le choix des convives. Horace veut que le dé en décide.

. . . . . Quem Venus arbitrum
Dicet bibendi ? Od. 7. l. II.


Et ailleurs,

Nec regna vini sortiere talis. Od. 4. l. I.

Plaute ne s’en rapporte pas au hasard ; les personnages qu’il introduit se donnent eux-mêmes des maîtres & des maîtresses ; do hanc tibi florentem florenti, tu sic eris dictatrix nobis, dit un de ses acteurs, en mettant une couronne de fleurs sur la tête d’une jeune personne. Et dans un autre endroit ; strategum te facio huic convivio. Plutarque parle comme Plaute, dans la quatrieme question du liv. I. Ἐμαυτὸν αἵρουμαι συμποσίαρχον ὑμῶν.

Ce roi donnoit en effet des lois, & prescrivoit sous certaines peines, ce que chacun devoit faire, soit de boire, de chanter, de haranguer, ou de réjouir la compagnie par quelqu’autre talent. Ciceron dit que Verres, qui avoit foulé aux piés toutes les lois du peuple romain, obéissoit ponctuellement aux lois de la table. Iste enim prætor severus ac diligens, qui populi romani legibus nunquam paruisset, iis diligenter legibus parebat, quæ in poculis ponebantur.

Cependant on ne faisoit pas un roi dans tous les repas, & on ne s’en avisoit guere dans les derniers tems, qu’au milieu du festin ; c’étoit une ressource de gayeté quand on commençoit à craindre la langueur, & pour lors chacun renouvelloit son attention à paroître bon convive. Ce dernier acte s’appelloit chez les Romains comessatio, du mot grec κῶμος, dit Varron, parce que les anciens Romains qui habitoient plus volontiers la campagne que la ville, se regaloient à tour de rôle, & soupoient ainsi tantôt dans un village & tantôt dans un autre. Horace, Martial, Lucien, Arien, nous parlent aussi beaucoup des rois de table dans les saturnales. (D. J.)

Roi, dans le Commerce, est un titre qui a été donné à plusieurs chefs de différens corps ou communautés. Il y avoit autrefois à Paris un roi des barbiers, un roi des arpenteurs ; il y a encore un roi de la bazoche, qui est à la tête de la petite jurisdiction que tiennent dans la cour du palais, les clercs des procureurs au parlement ; & un roi des violons.

Roi des Merciers, c’étoit autrefois à Paris, & même par toute la France, le premier, ou pour mieux dire le seul officier qui veillât sur tout ce qui concernoit le commerce.

Quelques-uns attribuent à Charlemagne l’institution de cette espece de magistrature mercantille ; il est du moins certain qu’elle étoit très-ancienne, & l’on donnoit à celui qui l’exerçoit le nom de roi des merciers, parce qu’alors il n’y avoit que les merciers qui fissent tout le commerce ; les autres corps des marchands qui en ont été tirés, n’ayant été établis qu’assez tard sous les rois de la troisieme race.

Ce roi des merciers donnoit les lettres de maîtrise & les brevets d’apprentissage, pour lesquels on lui payoit des droits assez forts ; il en tiroit aussi de considérables des visites qui se faisoient de son ordonnance, & par ses officiers, pour les poids & mesures, & pour l’examen de la bonne ou mauvaise qualité des ouvrages & marchandises. Il avoit dans les principales villes de province, des lieutenans, pour y exercer la même jurisdiction dont il jouissoit dans la capitale.

Les grands abus qui se commettoient dans l’exercice de cette charge, engagerent François I. à la supprimer en 1544 ; elle fut rétablie l’année suivante. Henri III. la supprima de nouveau en 1581, par un édit qui n’eut point d’exécution à cause des troubles de la ligue. Enfin Henri IV, en 1597. supprima le roi des merciers, ses lieutenans & officiers, cassant, annullant & revoquant toutes les lettres d’apprentissage ou de maîtrise données par cet officier ou en son nom ; défense à lui d’en expédier à l’avenir, ni d’entreprendre aucune visite à peine d’être puni, lui & ses officiers, comme faussaires, & de dix mille écus d’amende. Depuis ce tems là, il n’est plus fait mention du roi des merciers ; les lettres sont expédiées, & les visites faites par les maîtres & gardes des corps des marchands, & par les jurés des communautés des arts & métiers chacun dans son district ; & sur ceux de son métier & de sa profession.

Roi des violons ; c’est à Paris le chef perpétuel de la communauté des maîtres à danser & joueurs d’instrumens. Il est pourvu par des lettres de provisions du roi, & est un des officiers de sa maison. Diction. de Com. & de Trév.

Roi du nord, est le titre du troisieme des hérauts d’armes provinciaux d’Angleterre. Voyez Roi d’armes & Héraut.

Sa jurisdiction s’étend du côté septentrional de la riviere de Trent, comme celle du second héraut d’armes, nommé Clarencieux, s’étend du côté méridional, Voyez Clarencieux.

Roi des ribauds, (Jurisprud.) Voyez Prevôté de l’hôtel.

Roi des Sacrifices, (Antiq. Rom.) rex sacrorum, rex sacrificalis, rex sacrificulus, Tite-Live, l. XXVI. c. vj. Sous le consulat de Lucius Junius Brutus, & de Marcus Valerius Publicola, le peuple murmurant de ce que l’abolition du gouvernement monarchique sembloit déroger à la religion, parce qu’il y avoit certains sacrifices qui étant réservés aux rois personnellement, ne pouvoient plus se faire ; on établit un sacrificateur qui en remplit les fonctions, & on l’appella roi des sacrifices ; mais afin que le nom de roi même ne fît point d’ombrage, ce roi des sacrifices fut soumis au grand Pontife, exclus de toutes les magistratures, & privé de la liberté de haranguer le peuple.

Lorsqu’il étoit obligé de se trouver aux assemblées des comices, par rapport aux sacrifices dont il avoit l’intendance ; aussi-tôt que les cérémonies étoient finies, il se rétiroit, pour montrer qu’il n’avoit aucune part aux affaires civiles. C’étoit au grand pontife & aux augures qu’appartenoit le droit de choisir le roi des sacrifices, qu’ils tiroient ordinairement d’entre les patrices les plus vénérables par leur âge & par leur probité ; son élection se faisoit dans le champ de Mars, où le peuple se trouvoit assemblé par centuries ; la maison qu’habitoit le roi des sacrifices, s’appelloit regia, & sa femme reine, regina.

C. M. Papyrius, fut le premier à qui on confia ce ministere ; & la coutume de créer un roi des sacrifices subsista chez les Romains jusqu’au tems de Théodose, qui l’abolit, de même que les autres cérémonies religieuses du paganisme. (D. J.)

Rois livre des, (Critiq. sacrée) Il y a quatre livres de l’ancien testament qui portent ce nom, parce qu’ils comprennent plusieurs actions des rois des juifs, & quelques détails de leur gouvernement. Ces quatre livres n’en faisoient anciennement que deux dans le code hébraïque, dont le premier portoit le nom de Samuel, & l’autre celui des rois ou des regnes.

Le premier livre comprend, dans 31 chapitres, l’espace d’environ cent ans, depuis la naissance de Samuel, en 2849, jusqu’à la mort de Saül, en 2949. Le second livre des rois contient, en 24 chapitres, l’histoire du regne de David, pendant l’espace d’environ 40 ans, depuis sa seconde onction à Hébron, l’an du monde 2949, jusqu’à l’an 2988.

On ignore l’auteur de ces deux premiers livres des rois ; quelques-uns les attribuent à Samuel, dont le nom se lit à la tête dans l’original hébreu ; mais en tout cas, il n’est pas l’auteur du total, car sa mort se trouve dans le vingt-cinquieme chapitre du premier livre ; quand au second livre, ceux qui le donnent à Gad & à Nathan, ne se sont pas apperçus qu’il s’y trouve des faits qui ne peuvent être du tems de Samuel ni de Nathan ; aussi les meilleurs critiques conjecturent qu’ils sont l’ouvrage d’Esdras, sur des originaux de Samuel, & autres écrivains du tems de David.

Le troisieme livre des rois comprend, en 22 chapitres, l’histoire de cent vingt-six ans, depuis l’association de Salomon au royaume, l’an du monde 2989, jusqu’à la mort de Josaphat, roi de Juda, en 3115. Le quatrieme livre des rois renferme, en 25 chapitres, l’histoire de deux cent vingt-sept ans, depuis la mort de Josaphat, en 3115, jusqu’au commencement du regne d’Evilmérodach, roi de Babylone, qui tira Jéchonias de prison, en 3442.

On ne connoit pas mieux l’auteur des deux derniers livres des rois, que celui des deux premiers. Il est assez vrai-semblable que tous ces quatre livres sont de la main d’Esdras qui les a disposés sur les matériaux qu’il possédoit ; il y a du moins bien des traits auxquels on croit reconnoître Esdras ; mais on y trouve en même tems des contrariétés qui ne conviennent point à son tems, & qu’il n’a pas pris la peine de concilier. (D. J.)

Rois pasteurs, (Hist. sacrée.) quelques savans ont ainsi nommé les six chefs des Israëlites, Ephraim, Beria, Rapho, Saraph, Thalé, & Thaan, dont il est parlé dans le I. liv. de Paralipomènes, ch. vij. ou plutôt, Salathis, Beon, Apachnas, Apophis, Janias, & Assis, rois égyptiens. Comme il paroît qu’il y a une interruption dans l’écriture, depuis la mort de Joseph, par où finit la genèse, jusqu’à la nativité de Moïse, par où commence l’exode, c’est là que M. Boivin place l’histoire de ces six rois pasteurs ; mais nous nous contenterons de remarquer que le fondement de cette prétendue royauté des Hébreux, ne se trouve que dans un fragment de Manéthon, rapporté par Josephe, dans lequel, le même Manéthon fait venir les rois pasteurs de M. Boivin, de l’orient, & que Josephe lui-même n’assure point la domination de ses ancêtres en Egypte, avec le titre de rois. D’ailleurs les Juifs n’ont jamais été en état de faire une irruption dans l’Egypte, avec une armée de deux cent quarante mille hommes, comme M. Boivin l’imagine. Voyez sur tout cela, les réflexions de M. l’abbé Banier, dans l’hist. de l’acad. des Inscrip. tom. III. (D. J.)

Rois de Rome, (Hist. Rom.) Rome commença d’abord à être gouvernée par des rois ; elle préféra, selon l’usage de ce tems-là, dit Justin, l. I. c. j. le gouvernement monarchique aux autres sortes de gouvernemens ; cependant ce n’étoit point une monarchie absolue, mais mitigée & bornée dans sa puissance. L’élection des rois de Rome, se faisoit par le peuple, après avoir pris les augures, & le sénat servoit en quelque sorte de barriere à l’autorité monarchique, qui ne pouvoit rien faire de considérable sans prendre son avis. Denys d’Halicarnasse, l. II. c. xiv. & l. VII. c. xxxviij. vous détaillera les privileges des rois de Rome ; je ne ferai que les indiquer.

Ils avoient droit, 1°. de présider à tout ce qui concernoit la religion, & d’en être l’arbitre souverain. 2°. D’être le conservateur des lois, des usages & du droit de la patrie. 3°. De juger toutes les affaires où il s’agissoit d’injures atroces faites à un citoyen. 4°. D’assembler le sénat & d’y présider ; de faire au peuple le rapport de ses decrets, & par-là, de les rendre autentiques. 5°. D’assembler le peuple pour le haranguer. 6°. De faire exécuter les décrets du sénat. Voilà tout ce qui regardoit les affaires civiles, & les tems de paix.

A l’égard de la guerre, le roi avoit un très-grand pouvoir, parce que tout ce qui la concerne demande une prompte exécution, & un grand secret, étant fort dangereux de mettre en délibération dans un conseil public, les projets d’un général d’armée. Malgré cela, le peuple romain étoit le souverain arbitre de la guerre & de la paix.

Les marques de la royauté étoient la couronne d’or, la robe de pourpre mêlée de blanc, la chaire curule d’ivoire, & le sceptre au haut duquel étoit la représentation d’une aigle. Il étoit accompagné de douze licteurs, portant sur leurs épaules un faisceau de baguettes, liées avec des courroies de cuir, & du milieu de chaque faisceau sortoit une hache. Ces licteurs lui servoient en même-tems de gardes, & d’exécuteurs de ses commandemens, & de la justice ; soit qu’il fallût trancher la tête, ou fouetter quelque coupable, car c’étoit les deux genres de supplices ordinaires chez les Romains ; alors ils délioient leurs faisceaux, & se servoient des courroies pour lier les criminels, des baguettes pour les fouetter, & de la hache pour trancher la tête. Quelques-uns prétendent que ces licteurs étoient de l’institution de Romulus ; d’autres, de Tullus Hostilius ; & d’autres, en plus grand nombre, à la tête desquels il faut mettre Florus, l. I. c. v. l’attribuent à Tarquin l’ancien.

Quoi qu’il en soit, les gardes que prit Romulus, & si l’on veut les licteurs armés d’une hache d’arme, couronnés de faisceaux de verges, désignoient le droit de glaive, symbole de la souveraineté ; mais sous cet appareil de la royauté, le pouvoir royal ne laissoit pas, en ce genre, d’être resserré dans des bornes assez étroites, & il n’avoit guere d’autre autorité que celle de convoquer le sénat, & les assemblées du peuple, d’y proposer les affaires, de marcher à la tête de l’armée quand la guerre avoit été résolue par un decret public, & d’ordonner de l’emploi des finances qui étoient sous la garde de deux trésoriers, qu’on appella depuis questeurs.

Les premiers soins de Romulus furent d’établir différentes lois, par rapport à la religion & au gouvernement civil, mais qui ne furent publiées qu’avec le consentement de tout le peuple romain, qui de tous les peuples du monde, se montra le plus fier dès son origine, & le plus jaloux de sa liberté. C’étoit lui qui, dans ses assemblées, autorisoit les lois qui avoient été dirigées par le roi & le sénat. Tout ce qui concernoit la guerre & la paix, la création des magistrats, l’élection même du souverain, dépendoit de ses suffrages. Le sénat s’étoit seulement reservé le pouvoir d’approuver ou de rejetter ses projets, qui, sans ce tempérament & le concours de ses lumieres, eussent été souvent trop précipités & trop tumultueux.

Telle étoit la constitution fondamentale de cet état, qui n’étoit ni purement monarchique, ni aussi entierement républicain. Le roi, le sénat, & le peuple, étoient pour ainsi-dire dans une dépendance réciproque ; & il résultoit de cette mutuelle dépendance un équilibre d’autorité qui modéroit celle du prince, & qui assuroit en même tems le pouvoir du sénat, & la liberté du peuple.

Déjà Rome commençoit à se rendre redoutable à ses voisins ; il ne lui manquoit que des femmes pour en assurer la durée. Romulus envoya des députés pour en demander aux Sabins, qui refuserent sa proposition ; il résolut de s’en venger : & pour y réussir, il ne trouva point de meilleur expédient que de célébrer à Rome des jeux solemnels en l’honneur de Neptune. Les Sabins ne manquerent pas d’accourir à cette solemnité ; mais pendant qu’ils étoient attachés à voir le spectacle, les Romains, par ordre de Romulus, enleverent toutes les filles, & mirent hors de Rome, les peres & les meres qui reclamoient en vain l’hospitalité violée. Leurs filles répandirent d’abord beaucoup de larmes, elles souffrirent ensuite qu’on les consolât ; le tems à la fin adoucit l’aversion qu’elles avoient pour leurs ravisseurs, dont elles firent depuis leurs époux légitimes. Il est vrai que l’enlevement des Sabines causa une guerre qui dura quelques années ; mais les deux peuples firent la paix, & n’en firent qu’un seul pour s’unir encore plus étroitement. Rome commença dès-lors à être regardée comme la plus puissante ville de l’Italie ; on y comptoit déjà jusqu’à quarante-sept mille habitans, tous soldats, tous animés du même esprit, & qui n’avoient pour objet que de conserver leur liberté, & de se rendre maîtres de celle de leurs voisins.

Cependant Romulus osa regner trop impérieusement sur ses sujets, & sur un peuple nouveau, qui vouloit bien lui obéir, mais qui prétendoit qu’il dépendît lui-même des lois dont il étoit convenu dans l’établissement de l’état. Ce prince au-contraire rappelloit à lui seul toute l’autorité qu’il eut dû partager avec le sénat & l’assemblée du peuple. Il fit la guerre à ceux de Comerin, de Fidene, & à ceux de Veïe, petite ville comprise entre les cinquante-trois peuples que Pline dit qui habitoient l’ancien Latium, mais qui étoient si peu considérables, qu’à peine avoient-ils un nom dans le tems même qu’ils subsistoient, si on en excepte Veïe, ville célebre de la Toscane. Romulus vainquit ces peuples les uns après les autres, prit leurs villes, en ruina quelques-unes, s’empara d’une partie du territoire des autres, dont il disposa depuis de sa seule autorité. Le sénat en fut offensé, & il souffroit impatiemment que le gouvernement se tournât en pure monarchie. Il se défit d’un prince qui devenoit trop absolu. Romulus âgée de cinquante-cinq ans, & après trente-sept années de regne, disparut, sans qu’on ait pû découvrir de quelle maniere on l’avoit fait périr. Le sénat, qui ne vouloit pas qu’on crût qu’il y eût contribué, lui dressa des autels après sa mort, & il fit un dieu de celui qu’il n’avoit pû souffrir pour souverain.

Après la mort de Romulus, il s’éleva deux partis dans Rome. Les anciens sénateurs demandoient pour monarque un romain d’origine ; les Sabins qui n’avoient point eu de rois depuis Tatius, en vouloient un de leur nation. Enfin après beaucoup de contestations, ils demeurerent d’accord que les anciens sénateurs nommeroient le roi de Rome, mais qu’ils seroient obligés de le choisir parmi les Sabins. Leur choix tomba sur un sabin de la ville de Cures, mais qui demeuroit à la campagne. Il s’appelloit Numa Pompilius, homme de bien, sage, modéré, équitable, & qui ne cherchant point à se donner de la considération par des conquêtes, se distingua par des vertus pacifiques. Il travailla pendant tout son regne, à la faveur d’une longue paix, à tourner les esprits du côté de la religion, & à inspirer aux Romains une grande crainte des dieux. Il bâtit de nouveaux temples ; il institua des fêtes, & comme les réponses des oracles & les prédictions des augures & des aruspices faisoient toute la religion de ce peuple grossier, il n’eut pas de peine à lui persuader que des divinités qui présidoient à ce qui devoit arriver d’heureux & de malheureux, pouvoient bien être la cause du bonheur ou du malheur qu’elles annonçoient ; la vénération pour ces êtres supérieurs, d’autant plus redoutables qu’ils étoient plus inconnus, fut une suite de ces préjugés.

Rome se remplit insensiblement de superstition ; la politique les adopta, & s’en servit utilement pour tenir dans la soumission un peuple encore féroce. Il ne sut même plus permis de rien entreprendre qui concernât les affaires d’état, sans consulter ces fausses divinités ; & Numa pour autoriser ces pieuses institutions, & s’attirer le respect du peuple, feignit de les avoir reçues d’une nymphe appellée Egérie, qui avoit révélé, disoit-il, la maniere dont les dieux vouloient être servis.

Sa mort, après un regne de quarante-trois ans, laissa la couronne à Tullus Hostilius, que les Romains élurent pour troisieme roi de Rome ; c’étoit un prince ambitieux, hardi, entreprenant, plus amateur de la guerre que de la paix, & qui sur le plan de Romulus, ne songea à aggrandir son état que par de nouvelles conquêtes. Tout le monde sait que le courage & l’adresse victorieuse du dernier des Horaces, fit reconnoître l’autorité de Rome dans la capitale des Albains, suivant les conditions du combat, qui avoient adjugé l’empire & la domination au victorieux.

Tullus Hostilius ruina cette ville, dont il transféra les habitans à Rome ; ils y reçurent le droit de citoyens, & même les principaux furent admis dans le sénat ; tels furent les Juliens, les Servitiens, les Quintiens, les Curiaces, & les Cléliens, dont les descendans remplirent depuis les principales dignités de l’état, & rendirent de très-grands services à la république. Tullus Hostillius ayant fortifié Rome par cette augmentation d’habitans, tourna ses armes contre les Sabins, l’an de Rome 113.

Le détail de cette guerre n’est point de mon sujet, je me contenterai de dire que ce prince, après avoir remporté différens avantages contre les ennemis de Rome, mourut dans la trente-deuxieme année de son regne ; qu’Ancus Martius, petit-fils de Numa, fut élû en la place d’Hostilius, par l’assemblée du peuple, & que le sénat confirma ensuite cette nouvelle élection, l’an de Rome 114.

Comme ce prince tiroit toute sa gloire de son ayeul, il s’appliqua à imiter ses vertus paisibles & son attachement à la religion. Il institua des cérémonies sa crées qui devoient précéder les déclarations de guerre ; mais ses pieuses institutions, plus propres à faire connoître sa justice que son courage, le rendirent méprisable aux peuples voisins. Rome vit bientôt ses frontieres ravagées par les incursions des Latins, & Ancus reconnut par sa propre expérience, que le trône exige encore d’autres vertus que la piété. Il se détermina donc à prendre les armes, & cette guerre fut aussi heureuse qu’elle étoit juste. Il battit les ennemis, ruina leurs villes, en transporta les habitans à Rome, & réunit leur territoire à celui de cette capitale.

Tarquin, premier ou l’ancien, quoiqu’étranger, parvint l’an de Rome 138, à la couronne, après la mort d’Ancus, & il l’acheta par des secours gratuits qu’il avoit donnés auparavant aux principaux du peuple. Ce fut pour conserver leur affection, & récompenser ses créatures, qu’il en fit entrer cent dans le sénat ; mais pour ne pas confondre les différens ordres de l’état, il les fit patriciens, au rapport de Denis d’Halicarnasse, avant que de les élever à la dignité de sénateurs, qui se trouverent jusqu’au nombre de trois cens, où il demeura fixé pendant plusieurs siecles. On sera peut-être étonné que dans un état gouverné par un roi, & assisté du sénat, les lois, les ordonnances, & le résultat de toutes les délibérations, se fissent toujours au nom du peuple, sans faire mention du prince qui regnoit ; mais on doit se souvenir que ce peuple généreux s’étoit réservé la meilleure part dans le gouvernement. Il ne se prenoit aucune résolution, soit pour la guerre ou pour la paix, que dans ses assemblées ; on les appelloit dans ce tems-là assemblées par curies, parce qu’elles ne devoient être composées que de seuls habitans de Rome divisés en trente curies ; c’est-là qu’on créoit les rois, qu’on élisoit les magistrats & les prêtres, qu’on faisoit des lois, & qu’on administroit la justice.

Servius Tullius fut nommé le sixieme roi de Rome, l’an 175 de la fondation de cette ville. Ce prince tout républicain, malgré sa dignité, mais qui ne pouvoit pourtant souffrir que le gouvernement dépendît souvent de la vile populace, résolut de faire passer toute l’autorité dans le corps de la noblesse & des patriciens, où il espéroit trouver des vues plus justes & moins d’entêtement.

Ce prince pour parvenir à ses fins, divisa d’abord tous les habitans de la ville, sans distinction de naissance ou de rang, en quatre tribus, appellées les tribus de la ville. Il rangea sous vingt-six autres tribus, les citoyens qui demeuroient à la campagne, & dans le territoire de Rome. Il institua ensuite le cens, qui n’étoit autre chose qu’un rôle & un dénombrement de tous les citoyens romains, dans lequel on comprit leur âge, leurs facultés, leur profession, le nom de leur tribu & de leur curie, & le nombre de leurs enfans & de leurs esclaves. Il se trouva alors dans Rome, & aux environs, plus de quatre-vingt mille citoyens capables de porter les armes.

Servius partagea ce grand nombre d’hommes en six classes, & composa chaque classe de différentes centuries de gens de pié. Toutes les centuries montoient au nombre de cent quatre-vingt-treize, commandées chacune par un centurion de mérite reconnu. Le prince ayant établi cette distinction entre les citoyens d’une même république, ordonna qu’on assembleroit le peuple par centuries, lorsqu’il seroit question d’élire des magistrats, de faire des lois, de déclarer la guerre, ou d’examiner les crimes commis contre la république, ou contre les privileges de chaque ordre. L’assemblée se devoit tenir hors de la ville, & dans le champ de Mars. C’étoit au souverain, ou au premier magistrat, à convoquer ces assemblées, comme celles des curies ; & toutes les délibérations y étoient pareillement précédées par les auspices, ce qui donnoit beaucoup d’autorité au prince, & aux patriciens, qui étoient revêtus des principales charges du sacerdoce.

On convint, outre cela, qu’on recueilleroit les suffrages par centuries, au-lieu qu’ils se comptoient auparavant par tête, & que les quatre-vingt-dix-huit centuries de la premiere classe donneroient leurs voix les premiers. Servius, par ce réglement, transporta adroitement dans ce corps composé des grands de Rome, toute l’autorité du gouvernement ; & sans priver ouvertement les plébéïens du droit de suffrage, il sut par cette disposition le rendre inutile. Car toute la nation n’étant composée que de cent quatre-vingt-treize centuries, & s’en trouvant quatre-vingt-dix-huit dans la premiere classe, s’il y en avoit seulement quatre-vingt-dix-sept du même avis, c’est-à-dire une de plus que la moitié des cent quatre-vingt-treize, l’affaire étoit conclue, & alors la premiere classe, composée des grands de Rome, formoit seule les decrets publics. S’il manquoit quelque voix, & que quelques centuries de la premiere classe ne fussent pas du même sentiment que les autres, on appelloit la seconde classe. Mais quand ces deux classes se trouvoient d’avis conforme, il étoit inutile de passer à la troisieme. Ainsi le petit peuple se trouvoit sans pouvoir, quand on recueilloit les voix par centuries, au-lieu que quand on les prenoit par curies, comme les riches étoient confondus avec les pauvres, le moindre plébéïen avoit autant de crédit que le plus considérable des sénateurs. Depuis ce tems-là les assemblées par curies ne se firent plus que pour élire les flamines, c’est-à-dire les prêtres de Jupiter, de Mars, de Romulus, & pour l’élection du grand curion, & de quelques magistrats subalternes.

La royauté après cet établissement, parut à Servius comme une piece hors d’œuvre & inutile, dans un état presque républicain. On prétend que pour achever son ouvrage, & pour rendre la liberté entiere aux Romains, il avoit résolu d’abdiquer généreusement la couronne, & de réduire le gouvernement en pure république, sous la régence de deux magistrats annuels qui seroient élus dans une assemblée générale du peuple romain. Mais un dessein si héroïque n’eut point d’effet, par l’ambition de Tarquin le superbe, gendre de Servius, qui dans l’impatience de regner, fit assassiner son roi & son beau-pere. Il prit en même tems possession du trône, l’an de Rome 218, sans nulle forme d’élection, & sans consulter ni le sénat ni le peuple, comme si cette suprème dignité eût été un bien héréditaire, ou une conquête qu’il n’eut dûe qu’à son courage.

Une action si atroce, que l’assassinat de son roi, le fit regarder avec horreur par tous les gens de bien. Tout le monde détestoit également son ambition & sa cruauté. Parricide & tyran en même tems, il venoit d’ôter la vie à son beau-pere, & la liberté à sa patrie ; comme il n’étoit monté sur le trône que par ce double crime, il ne s’y maintint que par de nouvelles violences. Plusieurs sénateurs, des premiers de Rome, périrent par des ordres secrets, sans autre faute que celle d’avoir osé déplorer le malheur de leur patrie. Il n’épargna pas même Marcus Junius, qui avoit épousé une Tarquinie, fille de Tarquin l’ancien, mais qui lui étoit suspect à cause de ses richesses. Il se défit en même tems du fils aîné de cet illustre romain, dont il redoutoit le courage & le ressentiment.

Les autres sénateurs incertains de leur destinée, se tenoient cachés dans leurs maisons. Le tyran n’en consultoit aucun ; le sénat n’étoit plus convoqué ; il ne se tenoit plus aucune assemblée du peuple. Un pouvoir despotique & cruel s’étoit élevé sur la ruine des lois & de la liberté. Les différens ordres de l’état également opprimés, attendoient tous avec impatience quelque changement sans l’oser espérer, lorsque l’impudicité de Sextus, fils de Tarquin, & la mort violente de la chaste Lucrece, firent éclater cette haine générale que tous les Romains avoient contre le roi. La pitié pour le sort de cette infortunée romaine, & la haine des tyrans, firent prendre les armes au peuple. L’armée touchée des mêmes sentimens se révolta ; & par un decret public, les Tarquins furent bannis de Rome. Le sénat, pour engager le peuple plus étroitement dans la révolte, & pour le rendre plus irréconciliable avec les Tarquins, souffrit qu’il pillât les meubles du palais. L’abus que ce prince avoit fait de la puissance souveraine, fit proscrire la royauté même ; on dévoua aux dieux des enfers, & on condamna aux plus grands supplices, ceux qui entreprendroient de rétablir la monarchie.

L’état républicain succéda au monarchique ; voyez République romaine, Gouv. de Rome.

Le sénat & la noblesse profiterent des débris de la royauté ; ils s’en approprierent tous les droits ; Rome devint en partie un état aristocratique, c’est-à-dire que la noblesse s’empara de la plus grande partie de l’autorité souveraine. Au-lieu d’un prince perpétuel, on élut pour gouverner l’état deux magistrats annuels tirés du corps du sénat, auxquels on donna le titre modeste de consuls, pour leur faire connoître qu’ils étoient moins les souverains de la république, que ses conseillers, & qu’ils ne devoient avoir pour objet que sa conservation & sa gloire. Voyez Consul. (D. J.)

Roi des Romains, (Hist. mod.) dans l’empire d’Allemagne, c’est le prince élu par les électeurs pendant la vie de l’empereur, pour avoir la conduite & le maniement des affaires en son absence, comme vicaire général de l’empire, & pour succéder après sa mort au nom & à la dignité d’empereur, sans qu’il soit besoin d’autre élection ou confirmation.

Cette qualité, dans le sens où on la prend aujourd’hui, étoit tout-à-fait inconnue du tems des premiers empereurs de la maison de Charlemagne, qui étoient empereurs & rois des Romains, c’est-à-dire, souverains de la ville de Rome tout ensemble. Ils donnoient à leurs héritiers présomptifs la qualité de roi d’Italie, comme les anciens empereurs romains faisoient prendre celle de César à leurs successeurs désignés à l’empire.

Le nom de roi des Romains ne commença à être en usage que sous le regne d’Othon I. & les empereurs le prenoient, quoiqu’en pleine possession de l’empire, & de la dignité impériale, jusqu’à ce qu’ils eussent été couronnés par les papes. C’est en ce dernier sens qu’il faut entendre le texte de la bulle d’or, quand elle fait mention du roi des Romains, dont elle n’a jamais parlé dans le sens où l’on emploie aujourd’hui ce terme, que nous avons d’abord défini suivant l’usage présent : car le dessein de Charles IV. en faisant la bulle d’or, étoit de rendre l’empire purement électif, de fonder & d’affermir les prérogatives des électeurs. Or, ce qui s’est passé dans la maison d’Autriche depuis 200 ans, montre assez clairement que rien n’est plus contraire à cette liberté que l’élection d’un roi des Romains, du vivant même de l’empereur. Les électeurs prévirent bien ces inconvéniens, lorsque Charles V. voulut faire élire Ferdinand son frere roi des Romains, & prétendirent les prévenir par un réglement conclu entre eux & cet empereur à Schwinfurt, en 1532, mais que la maison d’Autriche a bien su rendre inutile.

Le roi des Romains est choisi par les électeurs, & confirmé par l’empereur ; il est couronné d’une couronne ouverte, qu’on appelle romaine, mais on ne lui prête aucun serment de fidélité qu’après la mort de l’empereur ; on lui donne le titre d’auguste, & non celui de toujours auguste, qui est réservé à l’empereur. L’aigle éployée qu’il porte dans ses armes, n’est qu’à une tête. En vertu de son titre, il est sans contestation successeur de l’empereur. Après sa mort, & pendant la vie de l’empereur, vicaire unique & universel, second chef & régent de l’empire. Il est vrai que tant que l’empereur réside dans l’empire, tous ces titres magnifiques sont pour le roi des Romains des honneurs sans pouvoir.

Le roi des Romains a d’ailleurs des avantages qui lui sont communs avec l’empereur, comme de présider aux dietes, de les convoquer de l’aveu des électeurs, & de les congédier ; de faire des comtes & des barons, de donner des lettres de noblesse, d’accorder des privileges aux universités ; de mettre les rébelles au ban de l’empire, en observant toutefois les formalités ordinaires ; de rappeller les proscrits, de commuer les peines, &c. mais il reconnoît l’empereur pour son supérieur. Il doit n’agir qu’au nom & par ordre de l’empereur ; c’est au-moins ce qu’il doit promettre, par la capitulation qu’on lui fait signer après son élection. Supposé qu’il n’ait pas l’âge de dix-huit ans, & qu’avant que de l’avoir atteint, il parvienne à l’empire, on lui impose la condition de n’agir en qualité d’empereur, que sous l’autorité des vicaires de l’empire, comme ses tuteurs, jusqu’à ce qu’il ait les années de majorité fixées par la bulle d’or, les actes néanmoins & les ordonnances doivent être rendus en son nom.

Le roi des Romains est traité de majesté royale par tous les princes, & dans les cérémonies ; il marche au côté gauche de l’empereur, un pas ou deux derriere. Quand il s’y trouve seul, le maréchal de la cour ne porte l’épée devant lui que dans le fourreau, au lieu qu’on la porte nue devant l’empereur. Le même roi traite l’empereur de majesté, & l’appelle son seigneur, mais l’empereur ne le traite que de dilection.

Comme la bulle d’or, quand il s’agit d’élire un empereur, parle seulement d’élire un roi des Romains futur empereur ; c’est toujours une condition préliminaire, que le sujet à qui on destine l’empire, soit choisi & déclaré roi des Romains par les électeurs, ainsi que nous l’avons vu pratiquer dans les deux dernieres élections. Heiss, hist. de l’empire, t. III.

Roi, piê de, on dit en France, pié de roi, qui est une certaine mesure, dont la longueur est déterminée par tout le royaume par l’autorité du prince. On lui donne ce nom pour le distinguer du pié de ville, qui n’est pas le même dans toutes les villes du royaume : c’est pourquoi les Mathématiciens se servent toujours du pié de roi.

Un pendule long de 5 piés de roi fait en une heure 1846 vibrations simples : l’on pourroit donc retrouver, par le moyen du pendule, la longueur du pié de roi, si cette mesure venoit à être perdue ou altérée. Voyez Pied, Mesure, Pendule, &c. (E)

Roi rendu, jeu du, c’est un jeu qui suit presque en tout les regles & la maniere de jouer le quadrille, à la réserve qu’il est libre à celui qui a le roi appellé, de le rendre à celui qui l’appelle, qui doit en échange lui donner un carte de son jeu.

Ce jeu ne se joue de la sorte, que pour empêcher qu’on ne joue de petits jeux, ce qui ôte beaucoup de l’agrément du quadrille ordinaire, & fait que cette maniere de jouer plus gênante, a trouvé plus de partisans parmi les personnes d’un amusement plus sérieux.

Ce quadrille ne differe absolument de l’autre qu’en ce qui est permis à celui qui a le roi appellé, de se rendre à l’hombre, ce qui fait qu’il y a quelques régles particulieres. Celui qui a le roi appellé à mauvais jeu, peut rendre le roi appellé à l’hombre, qui doit lui donner en échange telle carte que bon lui semblera de son jeu, & chaque joueur est en droit de voir la carte échangée.

Celui qui, ayant la carte appellée, auroit beau jeu, & rendroit le roi pour faire perdre l’hombre, feroit la bête, sans que l’hombre fût exempt pour cela de la faire aussi, s’il ne gagnoit pas le jeu. Il faut que le roi appellé ait trois mains pour être dans ce cas.

Celui à qui l’on a rendu le roi est obligé de faire six mains avec ce secours, tous les joueurs étant réunis contre lui.

Il ne partage avec personne s’il gagne, & paie seul s’il perd.

L’on ne peut point rendre le roi à celui qui joue avec spadille forcé, il y a des maisons où l’on rend toujours le roi appellé, & où celui qui joue, joue toujours seul, & le dernier est obligé de jouer si tous les autres ont passé, en appellant un roi qu’on lui rend, en spadille si l’on en est convenu.

Roi au jeu des échecs, est la premiere & la principale piece du jeu. C’est de la perte de cette piece que dépend la perte de la partie ; c’est encore elle qui la fait finir. Le roi se place au milieu du damier sur la quatrieme case blanche ou noire, selon sa couleur. Quant à sa marche, elle est fort grave, il ne va jamais que de case en case, en droite ligne & obliquement, devant, derriere, à côté, lorsqu’il ne trouve point d’obstacles qui l’arrêtent. Il ne fait qu’un pas à la fois, à moins qu’il ne saute ; voyez Saute : pour lors il peut sauter deux cases seulement de son côté, ou de celui de la dame ; car le saut de trois cases n’est plus usité.

Quand le roi saute de son côté, il prend la place de son chevalier, & sa tour se place auprès de lui à la case de son fou.

Si c’est du côté de la dame qu’il saute, il prend la place de son fou, & la tour de ce côté prend la case de la dame.

Il y a cinq choses au jeu des échecs qui empêchent le roi de sauter : 1°. s’il se trouve quelque piece entre lui & la tour ; 2°. quand cette tour a changé de place ; 3°. si le roi a été obligé de sortir de sa place ; 4°. s’il est en échec, & 5°. lorsque la case au-dessus de laquelle il veut sauter, est une de quelque piece de son ennemi, qui pourroit le faire échec en passant. Quoiqu’il soit permis aux rois de se remuer de tous côtés, ils ne peuvent néanmoins jamais se joindre, il faut qu’il y ait au-moins une case de distance entre eux : & quand chaque roi est en marche, il prend, si bon lui semble, toutes les pieces qui se rencontrent dans son chemin.

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Étymologie de « roi »

Bressan, ray ; prov. roi, rey, re ; esp. rey ; ital. re ; du lat. règem ; comparez le gothique reiks, le kymrique rîx, l'irl. rig, et le sanscr. rajan.

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(Date à préciser) Du moyen français roy, de l’ancien français roi, rei, rex, du latin rex (« roi, chef »), via son accusatif rēgem, du verbe rēgĕre (« diriger »).
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Phonétique du mot « roi »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
roi rwa

Citations contenant le mot « roi »

  • Il ne serait pas décent et à honneur à un roi de France de venger les querelles d'un duc d'Orléans.
    Louis XII
  • Le bâton est le roi du monde.
    Proverbe français
  • Le coq est roi sur son fumier.
    Sénèque — L'apocolokyntose
  • Les rois aiment plus qu'on ne le croit la contradiction.
    Honoré de Balzac — Le Bal de Sceaux
  • L'exactitude est la politesse des rois.
    Louis XVIII — Cité par le banquier Laffitte dans ses Souvenirs
  • Enfant mâle, l’enfant-roi.
    Shashi Deshpande — Question de temps
  • Le premier qui fut roi fut un soldat heureux ; Qui sert bien son pays n'a pas besoin d'aïeux.
    François Marie Arouet, dit Voltaire — Mérope, I, 3, Polyphonte Ériphyle, 1732 (II, 1, Alcméon)
  • Mais le trône soutient la majesté des rois Au-dessus des mépris, comme au-dessus des lois.
    Pierre Corneille — Médée, II, 3, Créon
  • Celui qui règne dans les cieux, et de qui relèvent tous les empires, à qui seul appartient la gloire, la majesté et l'indépendance, est aussi le seul qui se glorifie de faire la loi aux rois, et de leur donner, quand il lui plaît, de grandes et terribles leçons.
    Jacques Bénigne Bossuet — Oraison funèbre d'Henriette Marie de France, reine de la Grande-Bretagne
  • Dissimuler, vertu de roi et de femme de chambre.
    Voltaire
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Traductions du mot « roi »

Langue Traduction
Anglais king
Espagnol rey
Italien re
Allemand könig
Chinois 国王
Arabe ملك
Portugais rei
Russe король
Japonais キング
Basque king
Corse
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Synonymes de « roi »

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Roi

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