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Provision

Variantes Singulier Pluriel
Féminin provision provisions

Définitions de « provision »

Trésor de la Langue Française informatisé

PROVISION, subst. fém.

A.−
1. Assemblage de choses nécessaires à la subsistance, à l'entretien, à la protection d'une personne ou d'une collectivité. Synon. approvisionnement, réserve, stock.Provision de bois, de cartouches, de charbon, d'eau, de fuel, d'essence, d'huile, de pain, de pommes, de pommes de terre, de poudre, de vin; provision de guerre, pour l'hiver; magasin, soute à provisions. La récolte manqua, il y eut une hausse considérable, ce qui leur permit de réaliser de gros bénéfices en écoulant leur provision (Zola, Fortune Rougon,1871, p. 57):
1. À cette époque, tout homme qui possédait des armes était soldat; celui (...) qui pouvait en fournir à d'autres, qui, par les provisions qu'il avait rassemblées, se trouvait en état de subvenir à leurs besoins, devenait nécessairement un chef... Condorcet, Esq. tabl. hist.,1794, p. 32.
Provisions de bouche. V. bouche II A 2 a; provisions de carême (vx).V. carême A synt. c.
P. ext. Assemblage de choses utiles à la vie courante ou servant à des besoins. Provision d'encre; avoir, faire, renouveler sa provision; provision épuisée. Le reste de l'espace était occupé par une table et par la provision de papier qu'on nous livra presque aussitôt (Duhamel, Désert Bièvres,1937, p. 122).
Loc. verb. et proverbiales
Avoir provision de, loc. verb. Avoir en abondance, avoir en réserve. Synon. être approvisionné en, être muni de, être pourvu de.Baron voulut lui faire prendre du bouillon, dont MlleMolière avait toujours provision pour elle (A. France, Génie lat.,1909, p. 134).Sa main cherchait dans sa poche un caillou : il en avait toujours provision (Genevoix, Raboliot,1925, p. 299).
Faire provision de, loc. verb. Se pourvoir abondamment de. Synon. s'approvisionner en, se ravitailler en, se munir de, stocker.Le château commença à être serré de près. Cependant les vivres n'y manquaient pas; le pape en avait fait provision pour plus de deux années (Barante, Hist. ducs de Bourg.,t. 2, 1821-24, p. 236).Ces piles de bûches dont on fait provision pour l'hiver sous les avant-toits (Ramuz, Derborence,1934, p. 228).Au fig. V. infra 3.
Provision fait profusion, loc. proverbiale. ,,Quand on a dans un ménage une provision abondante de choses nécessaires à la vie, on en consomme plus que s'il fallait se les procurer à mesure`` (Ac.). La lutte est ouverte entre le prix des objets et celui de l'espace et de la main-d'œuvre. Le vieux dicton est en train de prendre toute sa vertu : provision devient profusion (J.-R. Bloch, Dest. du S.,1931, p. 142).
2. En partic., au plur. Achat(s) de choses, de produits de nécessité courante : nourriture, boisson, produits d'entretien; p. méton. produits achetés ou à acheter, en partic. réserves de nourriture. Synon. réserves, victuailles, vivres; achats, emplettes, courses; marché, ravitaillement.Nous avons mangé une partie de nos provisions et pris des forces pour l'escalade du pic (Maine de Biran, Journal,1816, p. 202).Elle déballa ses provisions : des olives, un lapin, du lard, une salade et deux litres de vin (Dabit, Hôtel Nord,1929, p. 144).
SYNT. Provisions du marché; panier de provisions; armoire, placard, filet, panier, sac à/aux provisions; avoir des provisions (pour X temps); être chargé de, se munir de provisions; acheter, apporter, augmenter, chercher, déballer, emmagasiner des/les/ses provisions.
Loc. verb.
Aller à la provision (vx), aux provisions (fam.), faire des/ les/ses provisions. Faire ses courses au marché ou chez les commerçants. Synon. faire ses commissions, son marché.Flore (...) dès le matin, allait à la provision (...) de façon à ce qu'il trouvât le déjeuner prêt quand il avait fini sa toilette (Balzac, Rabouill.,1842, p. 409).Maman va sortir pour aller aux provisions. Le joyeux dîner de Noël que nous aurons, ce soir! (Duhamel, Terre promise,1934, p. 217).
Faire des provisions. Faire des réserves. Attendez! Il faut d'abord faire des provisions! Elle cueillit les plus belles prunes qui étaient à sa portée, et en remplit son corsage rebondi (Rolland, J.-Chr.,Adolesc., 1905, p. 320).
3. Au fig. Réserve disponible de (quelque chose, surtout d'ordre intellectuel ou moral). Synon. quantité, cargaison (fam.), dose, réserve(s), stock.Avoir une provision d'optimisme. Déboires sur déboires. Successivement, on referme toutes les portes qu'on a entr'ouvertes, et on se regarde, de l'autre côté du seuil, avec une provision diminuante d'espoir dans l'œil (Barbusse, Feu,1916, p. 75).
Faire (ample) provision de + subst. abstr.Se pourvoir de (beaucoup de). Synon. s'armer de, se couvrir de.Faire (ample) provision de courage, d'énergie, de force, de patience. Laissons-la faire provision de gloire pour le temps où il y aura disette de plaisirs (Chateaubr., Rancé,1844, p. 16).Et si vous allez quêter la joie, faites d'abord provision de joie. Remerciez avant d'avoir reçu. Car l'espérance fait naître les raisons d'espérer (Alain, Propos,1921, p. 347).
B.− Spécialement
1. COMPTAB. [En matière de sociétés] ,,Somme affectée par l'entreprise à la couverture d'une charge ou d'une perte virtuelle, future ou éventuelle`` (Bern.-Colli 1981). Provisions pour pertes et charges. Un amortissement est une provision permettant le renouvellement de l'actif immobilisé (Villemer, Organ. industr.,1947, p. 208).Des versements à effectuer pour la dotation du fonds de provision pour créances irrécouvrables (Organ. hospit. Fr.,1957, p. 25).
2. DR., vx. ,,Lettres par lesquelles un bénéfice ou un office est conféré à qqn`` (Ac. 1798-1878). Le duc de Guise fut nommé lieutenant-général du royaume. Robertet apporta les provisions avec (...) célérité (Balzac, Martyr calv.,1841, p. 152).
3. DR. CIVIL
a) ,,Sommes accordées par le juge du fond ou par le juge des référés − en attendant le jugement définitif − lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, mais qu'il est impossible d'en déterminer actuellement le montant exact (dommages et intérêts en matière de responsabilité, paiement des salaires en cas de licenciement)`` (Jur. 1981).
Provision alimentaire. V. alimentaire 2.
b) Provision « ad litem » (littéral. « en vue du procès »). ,,Fonds que l'un des époux obtient de l'autre pour faire face aux frais du procès en divorce (C. civ. : art. 155-4)`` (Laurent-Boyer, Loc. lat. et adages du dr. fr. contemp., t. 1, 1977, s.v. ad litem).
c) ,,Acompte versé à un officier ministériel, à un avocat ou à un expert, à valoir sur le montant de ses émoluments ou de ses honoraires`` (cida 1973). Synon. avance.MmeCantinet fut constituée gardienne des scellés, et, sur les fonds trouvés, on lui alloua une provision de cinquante francs (Balzac, Cous. Pons,1847, p. 309).Je peux divorcer. Si on ne me demandait pas au greffe quarante-cinq francs de provision (Giraudoux, Folle,1944, ii, p. 142):
2. « Qu'est-ce que peut bien être devenu l'avocat choisi par Wasselin? » − « Oh! il aura mangé la provision. Avec les gens de loi, l'argent va toujours vite. » Duhamel, Notaire Havre,1933, p. 167.
4. DR. COMM. ,,Créance de somme d'argent que possède le tireur contre le tiré d'un effet de commerce`` (Jur. 1981). Synon. dépôt.Faire la provision d'une lettre de change (Ac.1835).Le Directoire inondant le marché de ses bons, de ses ordonnances de paiement sans provision (Lefebvre, Révol. fr.,1963, p. 562).
Chèque* sans provision.
5. DR. CANON. [Avant 1983] ,,Concession d'un office ecclésiastique faite selon les règles canoniques par l'autorité ecclésiastique compétente`` (Foi t. 1 1968).
C.− Par provision, loc. adv.
1. DROIT
a) Vx. Jugement exécutoire par provision. Jugement préalable, en attendant la sentence définitive, à titre provisoire. Mais avait-il affaire à l'État, il ne trouvait plus (...) que des tribunaux exceptionnels, des juges prévenus, une procédure rapide ou illusoire, un arrêt exécutoire par provision et sans appel (Tocqueville, Anc. Rég. et Révol.,1856, p. 296).
b) Par avance, en attendant un règlement officiel définitif. Le préfet peut autoriser par provision l'exécution de l'arrêté municipal (Baradat, Organ. préfect.,1907, p. 217).
2. P. ext., vx ou littér. Par avance, préalablement à quelque chose. Le marquis (...) s'endormit (...) sachant (...) dormir une heure quand il n'avait qu'une heure, et douze, par provision, quand il n'avait rien de mieux à faire (Sand, Beaux MM. Bois-Doré,t. 2, 1857, p. 269):
3. Durant deux automnes aussi j'ai lu Fichte; cette année vais-je avoir le temps? J'ai pris avec moi, par provision, la Doctrine de la Science. Gide, Journal,1894, p. 51.
REM.
Provisionner, verbe trans.,fin., vieilli mais à nouv. usité. Provisionner (un compte). Approvisionner (un compte). Part. passé en empl. adj. Je les ai payés [les appareils] en chèques bien provisionnés, je vous le jure (A. Soubiran, Les Hommes en blanc,t. 3, 1955, p. 264 ds Rob. 1985).
Prononc. et Orth. : [pʀ ɔvizjɔ ̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. a) Ca 1265 « attribution d'un salaire » (Brunet Latin, Trésor, éd. F. J. Carmody, p. 397, 35, var. des mss CFK); b) ca 1350 « mise en possession d'un bénéfice ou d'un office ecclésiastique » (Ordonnances, 16, 344 ds Bartzsch, p. 46); c) 1611 lettres de provision « lettres, ayant valeur de titre régulier, par lesquelles un bénéfice ou un office est conféré à quelqu'un » (Cotgr.); 1636 provisions plur. « id. » (Monet); 2. 1316 « ensemble de choses indispensables ou utiles que l'on réunit pour assurer la subsistance, l'entretien d'un individu ou d'un groupe » (Jean Maillart, Roman du comte d'Anjou, éd. M. Roques, 7636); 3. 1549 fig. « toute espèce de réserves intellectuelles ou morales » (Est.). B. 1. 1320 « prévoyance, précaution; mesure de prévoyance » (doc., Saint-Quentin ds Gdf.); 2. a) 1466 « décision judiciaire provisoire » (Louis XI, Lettres, III, 35 ds Bartzsch, p. 72); b) ca 1470 par provision « provisoirement, d'une manière qui ne représente pas une solution définitive » (Chastellain, IV, 408, 25 ds Heilemann Chastellain, p. 271); c) 1549 « en attendant qu'un jugement définitif soit rendu » (Est.); d) 1599 provision « jouissance d'un bien accordée préalablement à une partie en attendant qu'un jugement définitif soit rendu » (Les Coutumes du pays et duché de Normandie, Rouen, 37b d'apr. FEW t. 9, p. 487a); e) 1636 par provision « pour commencer, en attendant » (Monet); 3. « somme » a) ca 1470 « somme versée d'avance à quelqu'un, en acompte » (Chastellain, IV, 421 ds Gdf. Compl.); b) 1643 « créance que le tireur d'une lettre de change ou d'un chèque possède sur le tiré et qui sera payée à l'échéance » (Kuhn, p. 133); c) 1679 « somme remise d'avance à un courtier, un avoué, un avocat, à valoir sur ses honoraires » (Savary, Le Parfait négociant, II, 159 ds Kuhn, p. 214). Empr. au lat. provisio « action de prévoir; action de pourvoir à; précautions, prévoyance », dér. de providere « voir en avant; prévoir, pourvoir à » (v. pourvoir), en b. lat. « approvisionnement », en lat. médiév. « attribution d'un bénéfice ecclésiastique ». Fréq. abs. littér. : 1 415. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 764, b) 2 421; xxes. : a) 2 056, b) 1 978.

Wiktionnaire

Nom commun - français

provision \pʁɔ.vi.zjɔ̃\ féminin

  1. Réunion, faite par prévoyance, de choses nécessaires ou utiles, soit pour la subsistance d’une maison, d’une ville, d’une province, soit pour la défense d’une place de guerre.
    • Quatre heures après nous stoppions dans une clairière, décidés à renouveler la provision d'eau de la chaudière. — (Jean-Baptiste Charcot, Dans la mer du Groenland, 1928)
    • Vous devriez commander une provision de cierges de tout calibre qu'on allumerait devant le tabernacle ou la statue du Saint. — (Jean Rogissart, Passantes d’Octobre, Librairie Arthème Fayard, Paris, 1958)
    • Les provisions s’épuisèrent et l’équipage s’alimenta du produit de sa pêche. — (H. G. Wells, La Guerre dans les airs, 1908, traduction d’Henry-D. Davray et B. Kozakiewicz, Mercure de France, Paris, 1910, page 419 de l’édition de 1921)
    • Il n’a besoin ni de vin ni de bois pour cette année, il en a sa provision.
    • La place est munie de toutes sortes de provisions de guerre et de bouche. Par extension,
    • Faire provision de livres, faire bonne provision de livres pour la campagne.
  2. (Figuré) Réserve, quantité, dose, en parlant des choses morales.
    • Ne cherchez pas à lui donner des ridicules, il en a déjà sa provision, bonne provision, une bonne provision.
    • Cet homme, au cours de ses lectures, a fait provision de lieux communs sur tous les sujets.
    • Il faut avoir une grande provision de patience.
  3. (Droit) Ce qui est adjugé préalablement à une partie, en attendant le jugement définitif, et sans préjudice des droits réciproques au principal.
    • On lui a adjugé une provision de six mille euros.
    • Sentence de provision.
    • Cet homme ayant été lésé a obtenu une provision de trois mille francs.
    • Gagner la provision.
  4. Somme remise en acompte à un mandataire pour couvrir les premiers frais d’une opération, d’un procès, etc.
    • Un avocat demande rarement moins de 500 euros HT de provision (soit 598 euros TTC).
    • Pour l'homme de loi prévoyant, une mince provision en liquide vaut mieux qu'un gros chèque sans provision. — (Pierre Dac, Les Pensées, Éditions Saint-Germain-des Prés, 1972)
  5. (Commerce, Finance) Somme déposée entre les mains de celui sur qui une lettre de change ou un chèque est tiré et qui doit suffire à en opérer le paiement.
    • Faire la provision d’une lettre de change.
    • Un chèque sans provision.
  6. (Comptabilité) Passif dont l'échéance ou le montant n'est pas fixé de façon précise.
    • Un arrêté publié au Journal officiel du 30 décembre 2017 modifie le calcul du taux d'actualisation utilisé pour fixer le montant des provisions pour le démantèlement des installations nucléaires et le stockage des déchets radioactifs. Aux conditions économiques actuelles, la nouvelle formule oblige EDF à augmenter de plusieurs milliards d'euros ses provisions. — (Philippe Collet, Nucléaire : EDF contraint de revoir à la hausse ses provisions pour démantèlement, actu-environnement.com, 4 janvier 2018)
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

PROVISION. n. f.
Réunion, faite par prévoyance, de choses nécessaires ou utiles, soit pour la subsistance d'une maison, d'une ville, d'une province, soit pour la défense d'une place de guerre. Provision de vin, de blé, sel. Il n'a besoin ni de vin ni de bois pour cette année, il en a sa provision. La place est munie de toutes sortes de provisions de guerre et de bouche. Par extension, Faire provision de livres, faire bonne provision de livres pour la campagne. Aller aux provisions, faire ses provisions, Se pourvoir des choses nécessaires. Prov., Provision fait profusion, Quand on a dans un ménage une provision abondante de choses nécessaires à la vie, on en consomme plus que s'il fallait se les procurer à mesure.

PROVISION se dit figurément en parlant des Choses morales, et il signifie Réserve, quantité, dose. Ne cherchez pas à lui donner des ridicules, il en a déjà sa provision, bonne provision, une bonne provision. Cet homme, au cours de ses lectures, a fait provision de lieux communs sur tous les sujets. Il faut avoir une grande provision de patience. En termes de Palais, il désigne Ce qui est adjugé préalablement à une partie, en attendant le jugement définitif, et sans préjudice des droits réciproques au principal. On lui a adjugé une provision de six mille francs. Provision alimentaire. Sentence de provision. Cet homme ayant été lésé a obtenu une provision de trois mille francs. Gagner la provision. Il se dit aussi d'une Somme remise en acompte à un mandataire pour couvrir les premiers frais d'une opération, d'un procès, etc. En termes de Commerce et de Banque, il se dit de la Somme déposée entre les mains de celui sur qui une lettre de change ou un chèque est tiré et qui doit suffire à en opérer le paiement. Faire la provision d'une lettre de change. Un chèque sans provision.

PAR PROVISION, loc. adv. Provisoirement, en attendant et préalablement. Il a été ordonné par provision qu'il jouirait de la terre, qu'il toucherait la somme en donnant caution. Il s'emploie aussi dans le langage familier et par plaisanterie. Comme nous ne dînerons qu'à neuf heures, je vais par provision faire un second déjeuner.

Littré (1872-1877)

PROVISION (pro-vi-zion ; en vers, de quatre syllabes) s. f.
  • 1 Terme de palais. Ce qui est adjugé préalablement à une partie en attendant le jugement définitif. Sentence de provision. On lui a adjugé une provision de deux mille francs. Appius déclara qu'il n'y avait que le père seul qui pût réclamer la possession de celle qu'il prétendait être sa fille, et que, s'il était présent, il lui adjugerait la provision, Vertot, Révol. rom. v, 54.

    Provision alimentaire, somme allouée par la justice aux veuves ou aux femmes séparées sur les biens de leurs époux, aux pères ou aux mères sur les revenus de leurs enfants, etc.

    Fig. Les misères de ma vie n'étaient que des provisions de dédommagements et de jouissances pour un meilleur état, Rousseau, 1er dial.

  • 2 Terme de commerce et de banque. Fonds destinés par celui sur qui une lettre de change est tirée, à payer cette traite. Faire la provision d'une lettre de change.

    Terme de commerce. Rétribution due à un courtier, à un facteur ou à un commissionnaire du commerce, qui a été chargé d'une vente ou d'un achat.

  • 3 Terme ecclésiastique. Droit de pourvoir à un bénéfice.

    L'acte du supérieur qui a donné le titre. Un faux exposé rend la provision nulle.

  • 4 Au plur. Lettres par lesquelles un bénéfice ou un office est conféré à quelqu'un. Jamais Lauzun n'avait daigné me remercier du gouvernement de Berry ; il n'en avait pas pris les provisions, Paroles de Louis XIV, dans SÉV. 106. Les amis de mon père le pressaient d'envoyer chercher ses provisions de grand écuyer, Saint-Simon, 8, 103. Je ne doute pas que M. Sidrac ne soit celui qui doit m'expédier les provisions de ma cure, Voltaire, Oreilles, 1. Le cardinal de Richelieu n'eut les provisions de premier ministre qu'en 1629, le 21 novembre ; Louis XIII les signa seul de sa main, Voltaire, Mél. hist. Test. pol. de Richelieu, 8.
  • 5Amas, fait avec prévoyance, de différentes choses nécessaires. Provision de farine, de vin, de poudre. Provisions de guerre et de bouche. Aller à la provision. Faire provision de livres pour la campagne. Comme ce n'est pas assez, avant de commencer à rebâtir le logis où on demeure, que de l'abattre et de faire provision de matériaux et d'architectes, Descartes, Méth. III, 1. Ayant trouvé quelques provisions de bouche en se glissant à travers des décombres [dans Lisbonne renversée], ils réparèrent un peu leurs forces, Voltaire, Cand. 5.

    Avoir en provision, se dit de certaines denrées, beurre, café, etc. quand on ne les achète pas au fur et à mesure du besoin.

    Par plaisanterie. Il a eu bonne provision de bois pour son hiver, se dit d'un homme qui a reçu des coups de bâton.

    Au plur. Provisions se dit surtout d'objets de consommation pour le ménage.

    Faire ses provisions, se pourvoir des choses nécessaires.

    Provisions de carême, le beurre, l'huile, le poisson salé, les légumes, les fruits secs et tout ce que les catholiques mangent d'ordinaire dans le carême.

    Terme de marine. Les provisions, les vivres consommés par le commandant et les officiers.

  • 6 Fig. Nombre, quantité amassée avec prévoyance ou considérée comme une réserve. Puis donc qu'amour te fait d'amants provision, Régnier, Dial. Vous savez que, pour l'esprit, il n'en a pas, grâce à Dieu, grande provision, Molière, Fourb. II, 7. Tâchez de ne vous point mettre dans le mauvais temps, et faites provision de forces pour un si long trajet, Sévigné, 458. C'est une bonne provision, ma très chère, que d'avoir un bel et bon esprit, Sévigné, 14 fév. 1680. Quoi qu'il en soit, faites provision d'argent, Hamilton, Gramm. 6. Apprendre cinq ou six mots d'une langue morte : dès qu'un homme a cette provision par devers lui, il ne doit pas s'embarrasser de sa fortune, Montesquieu, Lett. pers. 117. Cette provision d'idées doit être un des principaux objets de l'éducation, Dumarsais, Œuv. t. I, p. 3.

    En avoir sa provision, avoir de quelque chose tout ce qu'il en faut, tout ce qu'on en peut avoir. Ma foi, son cœur en a sa provision [d'amour], Molière, Princ. d'Él. IV, 6.

    En avoir assez pour sa provision, être suffisamment pourvu, muni de quelque chose. Je voudrais, comme M. Jourdain, avoir le fouet devant tout le monde, et savoir non pas le latin, mais quelque peu de chicane, assez pour ma provision, Courier, Lett. II, 94.

    Faire des provisions, amasser les connaissances qui serviront un jour. La jeunesse n'est pas le temps de la récolte et des productions ; c'est celui de semer et de faire des provisions, Dumarsais, Œuv. t. I, p. 36.

    Il n'a pas fait de provisions pour, il ne s'est pas préparé à. Il n'a guères fait de provisions jusqu'à présent pour soutenir un malheur comme le sien, Sévigné, 437.

  • 7Par provision, loc. adv. Provisoirement, préalablement. Hé ! par provision, mon père, couchez-vous, Racine, Plaid. I, 4. Le parlement rendit un arrêt par lequel, en remettant à délibérer plus amplement sur leur institut [des jésuites], il leur permettait d'enseigner par provision la jeunesse, Voltaire, Hist. parl. XXVI. Pendant qu'on fait le procès du maître, le valet de chambre est pendu par provision, Dancourt, l'Opéra de village, sc. 11.

    Terme de jurisprudence. Jugement par provision, jugement exécutoire provisoirement, nonobstant le recours dirigé contre lui.

    Dans le langage général, en attendant et par précaution. Afin que je ne demeurasse point irrésolu en mes actions, pendant que la raison m'obligeait de l'être en mes jugements, je me formal une morale par provision qui ne consistait qu'en trois ou quatre maximes…, Descartes, Méth. III, 1. Je me sentais un peu plus oppressée, je jugeai bien qu'il fallait me saigner avant que de partir, afin de mettre cette saignée par provision dans mes ballots, Sévigné, 10 juillet 1675.

    On a dit, dans un sens analogue, de provision. Si vous étiez ici ma chère fille, vous vous moqueriez de moi : j'écris de provision…, Sévigné, 24. Ceci [cette lettre] est un peu de provision ; car je ne vous écrirai que demain ; mais je veux vous écrire présentement ce que je viens d'apprendre, Sévigné, 12 fév. 1671.

    PROVERBE

    Provision, destruction, ou provision, profusion, c'est-à-dire quand on a dans un ménage une provision, on consomme plus que si on achetait à mesure

HISTORIQUE

XIVe s. Pierre fery [frappa] Guillaume sur son chief en telle maniere que, se n'eust esté la grace de Dieu, avec la provision [prévoyance] dudit Guillaume, il eust esté mort et occis, Du Cange, prorisio. Les gens dient aucunes bestes estre prudentes, pour ce que il ont une industrie naturele de faire leur provision, Oresme, Eth. 178.

XVe s. Voulentiers ceulx qui font les choses en craincte y donnent les bonnes provisions, Commines, II, 4.

XVIe s. Ayant un peu d'eau et de pain à costé de son livre, [ce] qui estoit toute la provision de son repas, Montaigne, I, 311. La premiere provision de quoy ils [les Romains] se servoient à brider la rebellion des peuples de nouvelle conqueste, c'estoit leur oster armes et chevaux, Montaigne, I, 361. Il avoit du savoir en sa teste, mais non pas plus qu'il lui en falloit pour sa pourvision, Despériers, Contes, CXVI. Elle cacha en un petit coin son nouvel ami, et alla ouvrir la porte à l'ami de provision [de réserve, en titre], Yver, p. 646. En compte n'y a point de provision [le juge n'alloue rien provisoirement au créancier], Loysel, 205. Depuis, les puinés y ont pris [aux fiefs] quelques provisions et apanages, qui leur ont, quasi partout, esté enfin faits patrimoniaux, Loysel, 612. La commune ne faisoit autre chose, que dire seulement qu'elle en estoit bien desplaisante, sans y donner autre provision, Amyot, P. AEM. 52. Celle provision et munition d'engins se trouva lors tout à propos pour les Syracusains, Amyot, Marcel. 52.

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Encyclopédie, 1re édition (1751)

PROVISION, s. f. (Gram.) amas que l’économie bien ou mal entendue fait dans un tems d’abondance & de bon marché, pour un tems de disette & de cherté.

Provision, (Jurisprudence.) ce terme signifie en général un acte, par lequel on pourvoit à quelque chose.

Provision se prend quelquefois pour possession, comme quand on dit que l’on adjuge la provision à celui qui a le droit le plus apparent, c’est-à-dire, que la possession que l’on adjuge n’est pas irrévocable, mais seulement en attendant que le fond soit jugé.

Provision se prend aussi pour exécution provisoire, comme quand on dit que la provision est dûe au titre, c’est-à-dire, qu’entre deux contendans celui qui est fondé en titre doit par provision être maintenu, sauf à juger autrement en définitive si le titre est contesté.

Provision est aussi une somme de deniers que l’on adjuge à quelqu’un pour servir à sa subsistance, & pour fournir aux frais d’un procès, en attendant que l’on ait statué sur le fond des contestations.

Pour obtenir une provision, il faut être fondé en titre ou qualité notoire.

Par exemple, une veuve qui plaide pour son douaire peut obtenir une provision.

Il en est de même en cas de partage d’une succession directe, un héritier qui n’a encore rien reçu, soit entre-vifs ou autrement, est bien fondé à demander une provision, lorsque le partage ne peut être fait promptement.

Un enfant qui est en possession de sa filiation peut aussi demander une provision à celui qui refuse de le reconnoître pour son pere.

Un tuteur qui n’a pas encore rendu compte étant réputé débiteur, peut de même être condamné à payer une provision à son mineur, lorsque le compte n’est pas prêt.

Une femme qui plaide en séparation, peut demander une provision sur les biens de son mari, une partie saisie sur les biens saisis réellement ; une personne blessée en obtient aussi sur un rapport en chirurgie, pour ses alimens & médicamens, mais on ne peut pas en accorder aux deux parties.

Les provisions peuvent être adjugées en tout état de cause, même en cas d’appel. Elles sont arbitraires, & plus ou moins fortes, selon la qualité des parties, les biens & autres circonstances.

Il y a des cas où l’on peut obtenir jusqu’à deux ou trois provisions successivement ; cela dépend aussi des circonstances.

Lorsque les provisions sont pour alimens, elles se prennent par préférence à toutes autres créances. Voyez Papon, l. XVIII. tit. 1.

Provision alimentaire, est une somme de deniers qui est accordée à quelqu’un à titre d’alimens. Voyez l’article précédent.

Provision de corps, dans les coutumes, anciennes ordonnances, signifie la même chose que provision alimentaire. Voyez les deux articles précédens.

Provision en fait de bénéfice, est une lettre-patente du collateur, par laquelle il déclare qu’il confere à un tel un tel bénéfice vacant de telle maniere.

Il y a différentes sortes de provisions, les unes accordées par le roi, ou par quelqu’autre collateur laïc ; les autres qui sont accordées par des collateurs ecclésiastiques.

Le roi donne des provisions en régale, par droit de joyeux avénement & par droit de serment de fidélité, il en donne aussi comme plein collateur de certains bénéfices. Voyez Regale, Joyeux avénement, Serment de fidélité.

Quelques seigneurs, & même de simples particuliers, donnent aussi des provisions de certains bénéfices dont ils ont la pleine collation. Voyez Collation, Patronage : & sur les provisions en général on peut voir Rebuffe, Fevret, d’Hericourt, Fuet, la Combe, les mémoires du clergé. (A)

Provision canonique, est celle qui est conforme aux canons, soit pour la capacité du collateur, soit pour les qualités & capacités du pourvu, soit pour la forme en la quelle elle est expédiée.

Provision colorée, est celle qui a la couleur & l’apparence d’un titre légitime, laquelle pourroit être arguée de nullité pour quelques défauts qui s’y rencontrent, mais qui sont couverts par la possession paisible & triennale, pourvu qu’elle n’ait point été prise & retenue par force & par violence. Voyez regle de pacificis possessoribus, & Titre coloré. (A)

Provision en commende, est celle par laquelle un bénéfice régulier est conferé à un régulier pour le tenir en commende.

Le pape seul peut conferer en commende, ou ceux auxquels il en a donné le pouvoir par des indults. Voyez Commende.

Provision de cour de Rome, est celle qui est expédiée par les officiers de la chancellerie romaine, pour les bénéfices qui sont à la collation du pape.

On n’entend ordinairement par le terme de provisions de cour de Rome, que celles qui sont expédiées pour les bénéfices ordinaires ; celles que le pape donne pour les bénéfices consistoriaux sont appellées bulles. Voyez Bénéfices consistoriaux, Bulles

Pour obtenir des provisions de cour de Rome, il faut s’adresser à une banquier expéditionnaire, qui doit mettre sur son registre la date des procurations, concordats, & autres pieces, avec le nom des notaires & des témoins pour en délivrer l’extrait en cas de compulsoire.

L’expéditionaire envoie ensuite à Rome son mémoire avec les pieces justificatives.

Son solliciteur correspondant à Rome dresse un mémoire pour retenir la date, & porte ce mémoire chez l’officier des petites dates, ou chez son substitut.

Quand le courier, porteur du mémoire & des pieces, arrive avant minuit, l’impétrant a la date du jour de l’arrivée du courier ; mais si le mémoire n’est porté qu’après minuit, on n’a la date que du lendemain.

La date étant mise sur le mémoire par le préfet des dates, le banquier correspondant dresse la supplique, tant sur la procuration du résignant, si c’est une résignation, que sur le mémoire qu’on lui a envoyé de France.

Pour la Bretagne, & autres pays d’obédience, on ne retient point de date à Rome ; l’expéditionnaire porte la supplique au sous-dataire, s’il s’agit d’une résignation, ou si c’est sur une vacance par mort, à l’officier qu’on appelle per obitum.

Quand le S. siege est vacant, on ne retient point de date, mais les provisions de Rome sont présumées datées du jour de l’élection du pape, & non du jour de son couronnement.

Les provisions de cour de Rome sont tenues pour expédiées, & ont effet du jour de l’arrivée du courier, au lieu que les bulles pour les bénéfices consistoriaux ne sont datées que du jour que le pape accorde la grace ; il en est de même des expéditions de la chancellerie romaine pour les bénéfices de Bretagne.

Il y a des provisions sur dates retenues, d’autres sur dates courantes. Voyez Provision sur date, &c.

La provision de cour de Rome contient la supplique & la signature : la supplique de l’impétrant commence en ces termes : Beatissime pater supplicat humiliter sanetitati vestræ devotus illius orator N…

Elle a quatre parties ; la premiere énonce le bénéfice que l’on demande, les qualités exprimées au vrai, les genres de vacance, & le diocèse où le bénéfice est situé : la seconde partie comprend la supplication de l’impétrant, son diocèse, ses qualités, les bénéfices qu’il possede, ou sur lesquels il a un droit qui est venu à sa connoissance : la troisieme partie énonce le troisieme genre de vacance qui est exprimé, & les genres de vacance généraux sous lesquels l’impétrant demande le bénéfice au pape par une ampliation de grace, comme per obitum, & aut alio quovis modo ; & la quatrieme contient les dispenses & dérogations qu’il faut demander ; autrement on ne les accorderoit point, & néanmoins on peut en avoir besoin dans quelques occasions.

La clause aut aliquo quovis modo, que l’on met dans la supplique, est une clause générale qui produit une extension d’un cas à un autre, & supplée au défaut de la cause particuliere lorsqu’elle se trouve fausse.

La réponse ou signature est en ces termes : fiat ut petitur, quand c’est le pape qui signe ; ou bien concessum ut petitur, quand c’est le préfet de la signature : en France on ne fait aucune différence de ces deux sortes de signatures.

Les provisions que donne le pape sont aussi appelées signatures, parce qu’on donne à l’acte le nom de la plus noble partie, qui est la souscription.

La supplique doit précéder la signature, parce que l’on n’a point d’égard en France aux provisions que le pape donne de son propre mouvement, si ce n’est pour la Bretagne.

L’expression du bénéfice & des qualités de l’impétrant doit être faite au vrai dans la supplique, autrement il y auroit obreption ou subreption, ce qui rendroit la grace nulle, quand même l’impétrant seroit de bonne foi.

Les religieux doivent exprimer dans leur supplique non-seulement les bénéfices dont ils sont pourvus, mais aussi les pensions qu’ils ont sur les bénéfices ; au lieu que les séculiers ne sont pas obligés d’exprimer les pensions, à moins qu’il ne fût question d’en imposer une seconde sur un bénéfice qui en seroit déja chargé d’une ; & cela quand même les deux pensions ensemble n’excéderoient pas la troisieme partie des fruits.

On est aussi obligé dans les provisions de cour de Rome, d’exprimer tous les bénéfices dont l’impétrant est pourvu, & ce, à peine de nullité ; tellement que le défaut d’expression du plus petit bénéfice, & même d’un bénéfice litigieux, rendroit les provisions nulles & subreptices, sans qu’on pût les valider en rejettant la faute sur le banquier, ni réparer l’omission en exprimant depuis le bénéfice omis.

Pour la France, il n’est nécessaire d’exprimer la véritable valeur que des bénéfices taxés dans les livres de la chambre apostolique : il suffit pour les autres d’exposer que le bénéfice n’excéde pas la valeur de 24 ducats de revenu.

L’impétrant doit désigner le bénéfice qu’il demande, de telle maniere qu’il n’y ait point d’équivoque ; & s’il s’agit d’un canonicat ou prébende qui n’ait point de nom particulier, il faut exprimer le nom du dernier titulaire ; & s’il y en a deux du même nom dans cette église, il faut désigner celui dont il s’agit, de façon qu’on ne puisse s’y méprendre.

Deux provisions données par le pape à deux personnes différentes sur un même genre de vacance, se détruisent mutuellement, quand même une des deux seroit nulle, & obtenue par une course ambitieuse, à moins que ce ne sût d’une nullité intrinseque ; car en ce cas, la provision nulle ne donneroit pas lieu au concours.

Une signature par le fiat, & une autre par le concessum, se détruisent aussi mutuellement, quand elles sont de même date pour le même bénéfice, & sur le même genre de vacance, quoique l’une soit du pape, & l’autre seulement du préfet de la signature.

Pour éviter le concours dans les vacances par mort & par dévolut, on retient ordinairement plusieurs dates, dans l’espérance qu’il se trouvera à la fin quelque provision sans concours.

On ne marque point l’heure dans les provisions de cour de Rome, mais on tient registre de l’arrivée du courier.

Les provisions sont écrites sur le protocole, qui est le livre des minutes ; on les enregistre non pas suivant la priorité du tems auquel elles ont été accordées, mais indifféremment, & à mesure qu’elles sont portées au registre par les expéditionnaires.

Lorsque les provisions de cour de Rome peuvent être déclarées nulles par rapport à quelque défaut, on obtient un rescrit du pape, appellé perinde valere, quand il s’agit de bulles ; mais si c’est une simple signature, on la rectifie par une autre, appellée cui prius.

Les provisions des bénéfices consistoriaux s’expédient par bulles. Voyez Bulles. (A)

Provision cui prius est une nouvelle signature de cour de Rome, ainsi appellée parce qu’elle est accordée à la même personne qui en avoit déja obtenu une premiere ; on n’y fait point mention de la premiere : elles ne different l’une de l’autre, qu’en ce que la derniere contient quelque expression qui n’étoit pas dans la premiere signature ; elle s’accorde de la même date, lorsqu’il y a quelque défaut d’expression, omission, ou autre chose qui n’auroit pas été refusée dans la premiere signature : pour avoir la provision reformée, nommée cui prius, il faut renvoyer à l’expéditionaire de Rome la premiere signature, dont il fait une copie, dans laquelle il corrige le défaut de la premiere, ou bien il y insere ce qu’il y avoit d’omis, & il porte l’une & l’autre au soudataire, qui met au bas de la copie, comme d’une seconde supplique, ces mots cui prius adverte ad datam ; afin que le préfet des dates voyant l’ordre, ne fasse point difficulté d’y mettre la premiere date ; ensuite l’expéditionaire la porte dans les offices où la premiere a passé, laquelle est déchirée comme inutile ; de sorte que la seconde signature ou provision est comme s’il n’y en avoit point eu de premiere.

Quand les provisions ont été expédiées par bulles, il faut pour les rectifier obtenir un rescrit du pape, appellé perinde valere. Voyez le recueil des décisions sur les bénéfices, par Drapier.

Provisions pro cupientibus profiteri, sont des provisions qu’un ecclésiastique séculier obtient en cour de Rome, pour un bénéfice regulier, avec la clause pro cupiente profiteri, qui signifie que l’impétrant desire de faire profession religieuse.

Un pourvû par le pape, sous la condition de prendre l’habit & de faire profession, n’est point pourvû en commende d’abord, pour l’être ensuite en titre lorsqu’il aura exécuté le decret, il est d’abord pourvû en titre ; mais ses provisions ne sont que conditionnelles, & elles n’ont point d’effet, s’il n’exécute pas dans le tems prescrit, la condition qui y est exprimée.

Les chevaliers de Malthe donnent des provisions, même des cures de leur ordre, sous cette condition, pro cupiente profiteri. Il y a dans les privileges de cet ordre des bulles qui établissent ce droit, & il est autorisé au grand conseil & dans d’autres tribunaux. Voyez le recueil des bénéfices de Drapier.

Provision sur dates retenues ou petites dates, est une signature de cour de Rome, qui s’accorde sous la date du jour que le banquier de Rome a requis le bénéfice, quoique la signature ne soit expédiée que long-tems après, il n’y a que les François qui jouissent de ce privilege ; les autres nations chrétiennes, qui reconnoissent le pape, n’ont leur expédition que de la date courante, c’est-à-dire du jour que la grace a été accordée & la supplique signée. Voyez le traité de l’usage & pratique de cour de Rome, par Castel, & le recueil des décisions sur les bénéfices, par Drapier.

Provision sur date courante est une signature de cour de Rome, qui n’est expédiée que sous la date du jour que la grace a été accordée. Voyez l’article précédent.

Provision par dévolut est celle qui est obtenue du pape ou de l’ordinaire, fondée sur le défaut ou nullité de titre, inhabileté & incapacité en la personne du possesseur. Voyez Dévolut.

Provision par dévolution est celle que le collateur supérieur accorde, lorsque le collateur ordinaire n’a pas conferé dans le tems prescrit. Voyez Dévolution.

Provision in formâ dignum, est celle que le pape accorde à l’impétrant, sous la condition qu’il soit trouvé capable par l’Evêque du diocèse où le bénéfice est situé, auquel il le renvoie pour être par lui examiné. On les appelle in formâ dignum, parce que l’ancienne formule de ces provisions commençoit par ces mots : dignum arbitramur & congruunt ut illis se reddat sedes apostolica, gratiosam quibus, &c. Ces sortes de provisions sont plutôt des mandats de providendo, que des provisions parfaites, parce que si l’impétrant est trouvé indigne ou incapable par l’évêque ou par son grand-vicaire, ils le peuvent refuser, sans avoir égard à ces provisions de cour de Rome.

Dans le style de la daterie de Rome, on reconnoît deux sortes de provisions in formâ dignum. L’une qu’on appelle in formâ dignum antiquâ, qui est celle dont on vient de parler ; l’autre qu’on appelle in formâ dignum novissimâ. Celle-ci fut introduite pour les bénéfices sujets aux reserves apostoliques ; par cette nouvelle forme les papes limiterent le terme de trente jours, aux commissaires, pour l’exécution des provisions apostoliques ; autrement, ce tems passé, l’ordinaire le plus voisin seroit censé délégué executeur, au refus de l’ordinaire naturel ; mais en France, la distinction entre ces deux formes d’expéditions n’est point en usage.

Provision en forme gracieuse est celle qui est donnée par le pape, sur l’attestation des vie & mœurs de l’impétrant, par laquelle il est informé de sa suffisance & de sa capacité.

Provision par mort, ou per obitum, on sous-entend ultimi possessoris, est celle qui est donnée sur la vacance du bénéfice arrivée par la mort du dernier possesseur.

Provision nouvelle est une nouvelle grace pour revalider une premiere provision ; elle suppose un titre précédent, dont la validité est douteuse ; elle s’obtient ou sur des provisions du pape, ou sur des provisions de l’ordinaire ; sur de simples provisions du pape, quand il y a erreur, omission ou quelqu’autre défaut ; sur les provisions de l’ordinaire, lorsque la validité en est douteuse par quelque défaut réparable : on peut même en ce cas impétrer & obtenir du pape le bénéfice, par le même genre de vacance, avec la clause jura juribus addendo, sans renoncer au droit acquis par la premiere provision ; soit qu’elle s’obtienne sur des provisions du pape, ou sur des provisions de l’ordinaire, il faut dans l’un & l’autre cas énoncer tout ce que contient la premiere provision, avec la cause pour laquelle on doute de sa validité. voyez le traité de l’usage & pratique de la cour de Rome, par Castel, avec les notes de Royer.

Provision per obitum, ou par mort, voyez Provision par mort.

Provisions de l’ordinaire, sont celles qui sont données par le collateur ordinaire du bénéfice, soient qu’elles soient émanées du collateur immédiat, ou du collateur supérieur par droit de dévolution.

On les appelle provisions de l’ordinaire, pour les distinguer des provisions de cour de Rome qui sont accordées par le pape.

Pour que la provision de l’ordinaire soit valable, il faut qu’elle soit rédigée par écrit, qu’elle soit reçue par un notaire royal & apostolique, ou par le greffier du collateur ; qu’elle soit signée du collateur & de deux témoins, dont les noms, demeures & qualités soient insérées dans les provisions, & que les témoins ne soient point parens, ni domestiques du collateur, ni de celui auquel il confere.

Les provisions doivent être scellées & enregistrées dans le mois au greffe des insinuations ecclésiastiques du diocèse où est situé le bénéfice ; & si cela ne se pouvoit faire dans ce délai, il faudroit les faire insinuer dans ce même délai au greffe du diocèse où les provisions ont été faites, & deux mois après au greffe du diocèse où le bénéfice est situé.

Quand l’ordinaire confere par les mêmes provisions deux bénéfices à la même personne, & que ces bénéfices sont situés en différens diocèses, il faut faire insinuer les provisions dans un mois au greffe du diocèse où est situé l’un des bénéfices, & dans le mois suivant au greffe du diocèse où est l’autre bénéfice.

Faute par le pourvu d’avoir fait insinuer dans le tems prescrit les provisions de l’ordinaire, celles que le pape auroit données pour une juste cause prévaudroient quoique postérieures.

Une provision de l’ordinaire nulle dans son principe, & d’une nullité intrinseque, n’empêche pas la prévention ; mais lorsqu’elle peut seulement être annullée, elle arrête la prévention.

Le collateur ordinaire n’est pas tenu d’exprimer dans les provisions qu’il donne, le genre de vacance ; & lorsqu’il n’en exprime aucun, tous les genres de vacance y sont censés compris.

Les provisions de l’ordinaire, quoique données après les six mois qui lui sont accordés pour conférer, sont bonnes & valables.

Lorsqu’il se trouve deux provisions pour le même bénéfice données le même jour à deux personnes différentes par le même collateur sur le même genre de vacance, sans que l’on puisse connoître laquelle des deux est la premiere, ces deux provisions se détruisent mutuellement.

Mais quand de deux provisions du même jour, l’une a été donnée par l’évêque, l’autre par son grand-vicaire, celle de l’évêque prévaut.

Les provisions des collateurs ordinaires doivent être adressées aux notaires royaux apostoliques, ou aux greffiers des chapitres qui ont la collation du bénéfice. Voyez l’édit de 1691.

Provision en régale, est celle qui est donnée par le roi pour un bénéfice vacant en régale. Voyez Regale.

Provision en titre, est celle qui est donnée à un ecclésiastique pour être titulaire du bénéfice & non pas simple commendataire. On ne peut donner des provisions en titre d’un bénéfice régulier qu’à des réguliers. Voyez Benefice, Commende, Provision en commende, Titre, Titulaire.

Provisions en fait de charges et offices, sont des lettres-patentes par lesquelles le roi, ou quelqu’autre seigneur, confere à quelqu’un le titre d’un office pour en faire les fonctions.

Avant que les offices eussent été rendus stables & permanens, il n’y avoit que de simples commissions, qui étoient annales ; ensuite elles furent indéfinies, mais néanmoins toujours révocables ad nutum.

On n’entend donc par le terme de provisions, que les lettres qui conferent indéfiniment le titre d’un office.

On mettoit cependant autrefois dans les provisions cette clause, quandiu nobis placuerit, pour tant qu’il nous plaira ; mais depuis que Louis XI. eut déclaré que les offices ne seroient révocables que pour forfaiture, les provisions sont regardées comme un titre perpétuel.

Pour les offices royaux, il faut obtenir des provisions du roi, lesquelles s’expédient au grand sceau.

Pour les offices des justices seigneuriales, c’est le seigneur qui donne des provisions sous son scel particulier ; mais ces provisions ne sont proprement que des commissions toujours révocables ad nutum.

Ce ne sont pas les provisions du roi qui donnent la propriété de l’office, elles n’en conferent que le titre, de maniere qu’une autre personne peut en être propriétaire ; & dans ce cas celui qui a des provisions du roi est ce qu’on appelle l’homme du roi.

Le sceau des provisions accordées par le roi, ou par un prince apanagiste, purge toutes les hypotheques & privileges qui pourroient être prétendus sur l’office par les créanciers du résignant, quand il n’y a pas eu d’opposition au sceau avant l’obtention des provisions.

On forme aussi opposition au titre de l’office pour empêcher qu’il n’en soit scellé aucunes provisions au préjudice de l’opposant qui prétend avoir droit à la propriété de l’office. Voyez le style de la chancellerie, & les articles Office, Opposition au sceau, Opposition au titre. (A)

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Étymologie de « provision »

Génev. porvision ; provenç. provisio ; espagn. provision ; ital. provisione ; du lat. provisionem, de provisum, supin de providere (voy. POURVOIR).

Version électronique créée par François Gannaz - http://www.littre.org - licence Creative Commons Attribution

Du latin provisio.
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Phonétique du mot « provision »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
provision prɔvizjɔ̃

Fréquence d'apparition du mot « provision » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « provision »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « provision »

  • On ne saurait emporter en voyage un fardeau plus précieux qu'une provision de bon sens.
    Anonyme — Chants de l'Edda
  • Le serment d'amour est la forme sentimentale du chèque sans provision.
    Georges-Armand Masson
  • Il y a des gens qui semblent n’avoir appris à écrire que pour signer des chèques sans provision.
    André Birabeau
  • Mange selon la hauteur de ton sac à provisions, marche selon la largeur de ton pas.
    Proverbe tibétain
  • Le monde ressemble à un logement, où l'on reçoit les voyageurs : celui qui néglige de faire les provisions dont il a besoin pour passer outre est un insensé.
    Proverbe oriental
  • Il faut de fameuses provisions de génie ou de vertu pour se passer des autres...
    Adrienne Choquette — Laure Clouet
  • Il n'est point de provision de battements réservés quelque part par ton coeur.
    Antoine de Saint-Exupéry — Citadelle
  • La peur est l'âme de l'avarice; les provisions et trésors sont des précautions, l'ordre est un moyen d'en faire revue; et la crainte du prodigue y est peut-être plus naturelle que la crainte des voleurs.
    Alain — Les Aventures du coeur
  • (Article actualisé le 10 juillet 2020- 15h30 GMT). La CIMA, aidée par le cabinet Finactu, procède en ce moment au recalcul des provisions de gestion de certaines compagnies Vie. Et, sans surprise, les résultats présentent des montants énormes, pouvant s’élever à 25%, voire à plus de 100%, du chiffre d’affaires annuel. Bien entendu, de tels montants à provisionner conduiraient nombre de compagnies à reconsidérer l’intérêt de poursuivre l’activité avec une perte qu’elles mettraient des années à éponger.
    Financial Afrik — Provision de gestion : la CIMA veut-elle fermer les compagnies Vie ? | Financial Afrik
  • C'est triste de faire un chèque sans provision, mais c'est encore plus triste d'en faire un "avec" provision.
    Tristan Bernard
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Images d'illustration du mot « provision »

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Traductions du mot « provision »

Langue Traduction
Anglais provision
Espagnol provisión
Italien fornitura
Allemand bereitstellung
Chinois 规定
Arabe تقديم
Portugais provisão
Russe обеспечение
Japonais 支給
Basque xedapen
Corse prestazione
Source : Google Translate API

Synonymes de « provision »

Source : synonymes de provision sur lebonsynonyme.fr

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Provision

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