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Nerf

Variantes Singulier Pluriel
Masculin nerf nerfs

Définitions de « nerf »

Trésor de la Langue Française informatisé

NERF, subst. masc.

A. − ANAT. Filament blanchâtre et cylindrique composé de faisceaux de fibres nerveuses, reliant un centre nerveux à un organe et conduisant les incitations sensorielles, sensitives, motrices ou sécrétoires. Filet, branche, ramification d'un nerf; chronaxie d'un nerf. Le curare agit localement sur les nerfs. Il agit sur les centres nerveux, et quand un nerf a été séparé des centres, il n'agit pas sur lui (Cl. Bernard, Notes, 1860, p.46).Les émotions s'accompagnent, comme chacun le sait, de modifications de la circulation du sang. Elles déterminent par l'intermédiaire des nerfs vasomoteurs la dilatation ou la contraction des petites artères (Carrel,L'Homme, 1935, p.170):
1. Le plus gros et le plus postérieur, que Lyonet a nommé premier ganglion frontal, se prolonge en arrière en un gros nerf récurrent qui suit toute la longueur du corps du côté du dos. Ce nerf récurrent donne des filets à l'oesophage et à ses muscles. Cuvier,Anat. comp., t.2, 1805, p.327.
SYNT. Nerf acoustique, auriculaire, cardiaque, carotidien, cervical, crânien, crural, cutané, dorsal, facial, intercostal, lacrymal, lombaire, olfactif, optique, pelvien, pneumogastrique, sacré, sciatique, vague, vésical; nerf érecteur, obturateur, vasodilatateur; nerfs cérébro-spinaux, végétatifs, périphériques, rachidiens; nerfs afférents, efférents; nerfs moteurs, sensitifs.
Au plur. et dans le lang. cour. Organe récepteur des excitations extérieures entraînant des manifestations physiques ou psychologiques influençant notablement le comportement; constitution nerveuse de quelqu'un. Calmer, dominer ses nerfs; avoir les nerfs délicats. Toutes ces circonstances unies à un extrême ébranlement de nerfs me donnent quelquefois l'idée que je ne vous reverrai plus, et la mort sous cette forme m'attendrit extrêmement (Staël,Lettres L. de Narbonne, 1792, p.46).Heureux les gens qui n'ont pas de nerfs, les gens calmes et forts, ceux qui ne sont pas naturellement et toujours agités, comme les feuilles du tremble! (Flaub.,Corresp., 1867, p.307):
2. Dans ses années d'adolescence, où il était plus livré à ses nerfs, perpétuellement alternaient en lui des périodes d'exaltation et des périodes de dépression, se succédant d'une façon brusque. Rolland,J.-Chr., Maison, 1909, p.943.
1. [Dans des loc. et expr. exprimant un état de nervosité plus ou moins intense] Avoir ses nerfs (vieilli); avoir les nerfs en pelote, en vrille (fam.); avoir mal aux nerfs; avoir les nerfs à vif, tendus, crispés, rompus; attaque de nerfs; avoir les nerfs à bout, à fleur de peau; être à fleur de nerfs, à bout de nerfs; être trahi par ses nerfs; vivre sur les/ses nerfs; perdre les/ses nerfs. Je suis sorti avant la fin, malade des nerfs, et donnant au diable la maladresse de notre ami (J.-J. Ampère, Corresp., 1824, p.287).Ces souvenirs étaient si poignants à évoquer, ce soir, que, brusquement, ses nerfs le trahirent (Martin du G., Thib., Été 14, 1936, p.322):
3. Elle courut à la porte, en chemise. Finocle enfonça sa tête dans l'oreiller chaud, il entendit des cris, se boucha les oreilles, et, les nerfs écorchés, bondit à la fenêtre qu'il ouvrit grande... Aymé,Rue sans nom, 1930, p.252.
Crise* de nerfs.
2. [Dans des loc. et expr. exprimant l'agacement, l'énervement] Porter sur les nerfs. Enfin! s'écria Marguerite en reparaissant, le voilà parti; ce garçon-là me porte horriblement sur les nerfs (Dumas fils, Dame Cam., 1848, p.87).
Vieilli. Donner sur les nerfs. Quand je vois des gens d'esprit comme vous se laisser berner de la sorte, ça me donne sur les nerfs, et je ne puis me retenir de leur crier casse-cou! (Theuriet,Mariage Gérard, 1875, p.70).
Fam. Taper sur les nerfs. Dieu! Que son ton péremptoire me tapait sur les nerfs, quand je l'entendais affirmer: −L'oeuvre de chaque auteur doit pouvoir se résumer dans une formule (Gide,Si le grain, 1924, p.541).
Passer ses nerfs sur qqn. Qu'est-ce qui m'arrive après tout? Il faut voir les choses comme elles sont... J'aurai eu les nerfs mal montés, et j'ai cherché querelle à mes illusions, pour passer mes nerfs sur quelqu'un (Goncourt,Ch. Demailly, 1860, p.246).
3. [Dans des loc. et expr. exprimant une qualité de tempérament]
a) [Tempérament irritable] Pelote de nerfs; boule de nerfs (fam.). Il m'avait dit: «Je ne veux plus que vous entendiez ces absurdités, ça vous rend malade». Et c'était vrai, parce qu'on me prend pour une femme sèche et que je suis, au fond, un paquet de nerfs (Proust,Temps retr., 1922, p.1013).
b) [Tempérament calme, tranquille] Nerfs d'acier; nerfs solides; être maître de ses nerfs. Mes nerfs sont mieux trempés, peut-être, que ceux des plus flegmatiques et des plus blafards: j'affirme, toutefois, très humblement, que j'ai eu peur, ici, −et pour de bon (Villiers de L'I.-A., Contes cruels, 1883, p.306).Voyez-vous, monsieur le Président, il faut, pour (...) endurer la fièvre de l'huile, une tête solide et des nerfs à toute épreuve (Duhamel,Passion J. Pasquier, 1945, p.151).
4. En partic. Guerre des nerfs. V. guerre B 1.
B. − [Terme de l'anc. anat., passé dans le lang. cour.] Tendon, ligament maintenant un muscle à son point d'attache. Tandis qu'il me parle, je regarde sa peau sèche, ses yeux creux, ses narines minces et les nerfs de son cou, et il me semble que l'araignée de la mort pose déjà ses fils (Renard,Journal, 1895, p.306).Ses cuisses étaient aussi dures que du bronze, dit-il, elle semblait quasiment toute en nerfs (Bernanos,M. Ouine, 1943, p.1500):
4. Les doigts, ne voulant pas lâcher prise, s'enfonçaient dans l'écorce comme des griffes de fer, et les nerfs se tendaient sur la main près de se rompre, ainsi que les cordes d'un violon dont on tourne trop les chevilles. Gautier,Fracasse, 1863, p.413.
1. En partic.
a) Nerf de boeuf (v. ce mot B).
b) Filament blanchâtre, tendon, aponévrose qui se rencontre dans une viande. On m'apporte un rosbif, dont j'examine la viande aqueuse et sans graisse, rayée de nerfs blancs, dont mes yeux de peintre regardent le rouge noirâtre, si différent du rouge rose du boeuf (Goncourt,Journal, 1870, p.624).
2. P. anal. (de forme)
a) ARCHIT. Nervure (v. ce mot B 1).
En partic. Nerfs d'ogives. ,,Sortes de moulures saillantes soutenant les pendentifs d'une voûte`` (Adeline, Lex. termes art, 1884).
b) RELIURE. Cordelette servant à relier les feuillets au dos d'un livre. Dos à quatre nerfs, sans nerfs. Mon ami, vous vous doutez bien que je ne suis pas parti de Paris sans fourrer quelques vieux livres dans ma poche; en voici un qui est curieux, quoiqu'il ne soit pas très-rare; (...) qui a une jolie reliure en maroquin rouge, très-habilement montée sur nerfs (Du Camp,Hollande, 1859, p.27).
3. Au fig., au sing.
a) Force, vigueur physique ou morale d'une personne. Il n'a pas le nerf nécessaire pour s'emparer d'une idée et la retourner en tout sens. Il la happe et la laisse retomber (Constant,Journaux, 1804, p.180).Les plaisanteries s'accentuaient: le café, ça donnait du nerf, c'était excellent pour les hommes qui dormaient trop; et, chaque fois qu'un des convives mariés en avalait une gorgée, on se tenait les côtes (Zola,Terre, 1887, p.192):
5. Le prince saisit le papier que lui tendait Sophie. Ce qu'il y trouva, ce fut l'accablement, ou, pour mieux dire, la prostration d'un homme sans nerf et sans courage qui, chargé du loyer de ses fautes, succombe sous le poids, et crie bonnement aux échos, demandant merci et de l'aide. Gobineau,Pléiades, 1874, p.99.
En partic. Vigueur de style, de composition d'une oeuvre artistique; mordant dans l'exécution. Chénier a de la chaleur et de l'énergie dans la pensée, des situations tragiques, mais son style manque de vigueur, de nerf et d'éclat, il est au-dessous de sa pensée (Chênedollé,Journal, 1833, p.175).L'harmonie à cinq est peu à peu délaissée pour le quatuor, qui laisse plus de jeu aux mouvements des parties intérieures de l'harmonie, qui donne plus de nerf à la sonorité (Gevaert,Orchestr., 1885, p.311).
[Dans une exclam. encourageant à l'effort] Du nerf! Le suivant se présentait: −Essaye vite! Et du nerf!... épatant! Sur mesure! (Benjamin,Gaspard, 1915, p.13).
b) Élément qui conditionne l'efficacité de quelque chose. Être le nerf de qqc. La crainte de Dieu et la confiance en Dieu: sa vie me paraît être dans ces deux mots. N'est-ce pas le nerf de la famille chrétienne? (Amiel,Journal, 1866, p.108).D'autre part, si la qualification fait défaut, on ne voit pas sur quoi la négation qui est le nerf de l'argumentation peut reposer (G. Marcel,Journal, 1914, p.39).La fraude −nerf du commerce −À notre époque s'exerce Sur les escargots itou: Ainsi des gens, sans vergogne, Vont déclarant de «Bourgogne» Ceux qu'ils cueillent n'importe où (Ponchon,Muse cabaret, 1920, p.146).
Le nerf (de la guerre). L'argent (v. guerre A 5 c). Absol. Remerciez MmePaul Meurice pour sa lettre si bonne et si charmante et si utile, et précipitez-moi à ses pieds. N'oubliez pas les 500 francs, le nerf! (Hugo,Corresp., 1862, p.409).
Prononc. et Orth.: [nε:ʀ]. V. cerf. À partir du xviiies. et encore au début du xxes., hésitations dans la prononc. soignée. Littré recommande d'apr. Ac. [nε ʀf] au sing. seulement, mais note des exceptions ; même rem. ds Barbeau-Rodhe 1930. [nε:ʀ] s'est généralisé depuis. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. A. 1. Ca 1100 «tendon, ligament» (Roland, éd. J. Bédier, 3970); 1202 spéc. «tendon dans une viande» (Renart, éd. M. Roques, Br. XVIII, p.14, 15947); 1278 id. nerf de buef «verge du taureau, ou ligament cervical, ou corde du jarret du boeuf ou du taureau durcis par dessication et dont on se sert notamment pour frapper» (Doc. en fr. des Arch. angevines de Naples, t.1, p.121 d'apr. R. Arveiller ds Mél. J. Horrent, p.10); 2. 1314 «chacun des filaments qui mettent les différentes parties du corps en communication avec le cerveau et la moelle épinière» (H. de Mondeville, Chirurgie, 77 ds T.-L.); 3. 1534 au fig. «ce qui est la condition d'une action efficace» (Rabelais, Gargantua, éd. R. Calder, M. A. Screech, V. L. Saulnier, chap. 44, p.261: guerre faicte sans bonne provision d'argent n'a q'un souspirail de vigueur. Les nerfz des batailles sont les pecunes); 4. 1559 id. au plur. «force» (Amyot, Vies des hommes illustres, Timoléon, t.1, fo189 vo); 1671 au sing. (Pomey). B. 1. 1268 «courroie du bouclier» (Claris et Laris, 2440 ds T.-L.); ca 1282 «corde (d'un arc ou d'une arbalète)» (Gouvernement des rois, 414, 16, ibid.); 1552 «id. (d'un instrument de musique)» (Ronsard, Les Amours ds OEuvres, éd. P.Laumonier, t.4, p.30: les nerfz de ma lyre); 1680 reliure (Rich.); 2. 1605 vén. nerf de cerf «membre génital du cerf» (A. du Pinet, Les Commentaires de M. P.André Matthiolus sur les six livres de Pedacius Dioscoride, p.144); 3. 1676 archit. (Félibien). C. Au plur. loc. a) 1755 maladie de nerfs (Abbé Prévost, Nouv. lettres angloises ou Hist. du chevalier Grandisson, t.3, p.43); b) 1756 ébranlement de nerfs (R.-L. D'Argenson, Journal et mémoires, t.9, p.222); 1825 crise de nerfs (Brillat-Sav., Physiol. goût, p.458); c) 1762-79 avoir des nerfs (Diderot, Le Neveu de Rameau, éd. J. Fabre, p.67: Autrefois, Mademoiselle avoit des vapeurs; ce sont aujourdhuy des nerfs); 1851 avoir ses nerfs (Dumas père, Villefort, III, 5); d) 1817 porter sur les nerfs (Jouy, L'Hermite de la Guiane, 29 janv. ds Quem. DDL t.3); 1871 taper sur les nerfs (Flaub., Corresp., p.304); e) 1876 passer ses nerfs (sur qqn) (Goncourt, loc. cit.); f) 1901 mettre les nerfs en pelotes (Bruant); g) 1929 (avoir les) nerfs à bout (Colette, Sido, p.136). Du lat. nervus «tendon, ligament; nerf», également «corde (d'un arc, de la lyre); lanière de cuir», et au fig. «force, vigueur; partie essentielle d'une chose». Fréq. abs. littér.: 3891. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 9473, b) 6192; xxes.: a) 3194, b) 3224.
DÉR. 1
Nerval, -ale, -als, adj.a) Anat. [Correspond à supra A] Qui a rapport aux nerfs. Le docteur fit une brochure dans laquelle il rappela l'antiquité de ces eaux, célébrées par Pline (...), et prouva qu'elles étaient le remède infaillible de ces affections nervales (Jouy,Hermite, t.4, 1813, p.106).b) Thérap. [Correspond à supra B] Qui soulage les nerfs. Le camphre fait partie de (...) préparations (...) telles que (...) le baume nerval (Lebeau, Courtois,Pharm. chim., t.2, 1929, p.521). [nε ʀval]. Att. ds Ac. 1798. 1resattest. a) 1590 «qui est bon pour les nerfs» (A. Paré, OEuvres, éd. J.-F. Malgaigne, t.2, p.542), b) 1771 «qui se rapporte aux nerfs» (Trév.); de nerf, suff. -al*.
2.
Nervisme, subst. masc.,,Doctrine issue des travaux de Pavlov et développée par les auteurs russes, fondée sur «la soumission à l'organisation nerveuse de tous les processus ayant lieu dans l'organisme, aussi bien à l'état normal, qu'à l'état pathologique» (Bikov)`` (March. 1970). [nε ʀvism̭]. 1reattest. 1958 (Garnier-Del.); de nerf, suff. -isme*.
BBG. Quem. DDL t.3, 5, 8, 16 (s.v. nerval).

Wiktionnaire

Nom commun - ancien français

nerf \Prononciation ?\ masculin

  1. (Anatomie) Nerf.

Nom commun - français

nerf \nɛʁ\ masculin

  1. (Anatomie) Chacun des filaments blanchâtres qui, distribués dans tout le corps, transmettent au cerveau les sensations provoquées par les objets extérieurs ou par l’organisme lui-même, et aux muscles les impulsions motrices.
    • Ainsi que cela se produisait chaque fois qu’il avait trop pompé le jour d’avant, il se sentait la tête un peu fiévreuse, le front chaud, les nerfs excités et la gorge sèche. — (Louis Pergaud, « Joséphine est enceinte », dans Les Rustiques, nouvelles villageoises, 1921)
    • Rentré en Russie, Pavlov […] découvrit les nerfs réglant la sécrétion pancréatique et réalisa son expérience classique sur l’alimentation fictive. — (E. Asratian, I. Pavlov : sa vie et son œuvre, Éditions en langues étrangères, Moscou, 1953, page 13)
    • Les conjugaisons des nerfs ; nerf de la première, de la seconde conjugaison, etc.
    • La racine antérieure, la racine postérieure des nerfs ; nerf de la première, de la seconde paire, etc.
    • Les nerfs de la sensibilité ; les nerfs du mouvement.
    • Le nerf intercostal ; le nerf caverneux ; le nerf optique ; le nerf sciatique ; le nerf grand sympathique ; les nerfs crâniens ; les nerfs spinaux.
  2. (Familier) Excitation ou émoi qui se traduit par des manifestations physiques ou psychologiques et peut modifier le comportement.
    • « Je vous demande pardon, Xavier, reprenait Blanche Frontenac qui avait de « bons retours ». Il faut m’excuser, je ne tiens pas toujours mes nerfs… » — (François Mauriac, Le Mystère Frontenac, 1933, réédition Le Livre de Poche, page 22)
    • Il ne rendait visite qu’à sa mère et encore, cette dernière, entourée de vieilles personnes ridicules et sujette elle-même à des radotages, lui agaçait les nerfs […] — (Francis Carco, L’Homme de minuit, Éditions Albin Michel, Paris, 1938)
    • Maladie de nerfs ; attaque de nerfs.
    • Avoir mal aux nerfs ; avoir les nerfs irritables, agacés ; cela fait mal aux nerfs ; cela donne, cela porte sur les nerfs.
  3. (Usage critiqué) Ligaments des muscles.
    • Un nerf foulé.
    • La contraction des nerfs.
    • Le nerf du jarret.
  4. (Figuré) Force, vigueur.
    • Cet homme a du nerf, on ne le fait pas fléchir aisément.
    • Il n’a pas de nerf, la moindre résistance le fait céder.
    • Ce style manque de nerf.
  5. (Au pluriel) (Par analogie) (Reliure) Cordelettes placées au dos du livre à relier et sur lesquelles on coud les cahiers.
    • Nerfs. Saillies produites sur le dos des volumes par les ficelles ou rubans sur lesquels sont cousus les cahiers du livre ; on les appelle encore nervures. — (Albert Maire, Manuel pratique du bibliothécaire, Alphonse Picard et fils, 1896, Lexique des termes du livre, page 366)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

NERF. (L'F se prononce devant une voyelle et quelquefois quand il termine une phrase.) n. m.
Chacun des petits filaments blanchâtres qui, distribués dans tout le corps, transmettent au cerveau les sensations provoquées par les objets extérieurs ou par l'organisme lui-même, et aux muscles les impulsions motrices. Les conjugaisons des nerfs. Nerf de la première, de la seconde conjugaison, etc., La racine antérieure, la racine postérieure des nerfs. Nerf de la première, de la seconde paire, etc., Les nerfs de la sensibilité. Les nerfs du mouvement, Le nerf intercostal. Le nerf caverneux. Le nerf optique. Le nerf sciatique. Le nerf grand sympathique, Les nerfs crâniens. Les nerfs spinaux. Maladie de nerfs. Attaque de nerfs. Avoir mal aux nerfs. Avoir les nerfs irritables, agacés. Cela fait mal aux nerfs. Cela donne, cela porte sur les nerfs. Cela calme les nerfs. Fam., Avoir ses nerfs se dit d'une Personne qui se montre agacée, énervée. Il se dit improprement, dans le langage vulgaire, des Ligaments des muscles. Un nerf foulé. La contraction des nerfs. Le nerf du jarret. Nerf de bœuf, Partie épaisse du ligament cervical et postérieur du bœuf, qu'on a fait sécher et dont on se sert comme canne ou comme matraque. Donner des coups de nerf de bœuf.

NERF signifie figurément Force, vigueur. Cet homme a du nerf, on ne le fait pas fléchir aisément. Il n'a pas de nerf, la moindre résistance le fait céder. Ce style manque de nerf. Prov., L'argent est le nerf de la guerre, On ne soutient la guerre qu'avec beaucoup d'argent.

NERF se dit, par analogie, en termes de Reliure, des Cordelettes qui sont placées au dos du livre à relier et sur lesquelles on coud les cahiers. Livre cousu sur nerfs. Faux nerfs, Petites bandes de carton souple collées sous le dos d'un livre qu'on relie, pour imiter les nerfs.

Littré (1872-1877)

NERF (nèrf, d'après l'Académie, qui dit qu'au singulier l'f se fait sentir ; cependant plusieurs disent nêr sans f ; et dans tous les cas l'f est toujours muette dans nerf de bœuf ; au pluriel, l'f ne se fait jamais sentir : des nêr ; l's ne se lie pas : des nêr affaiblis ; cependant quelques-uns lient l's : des nêr-z affaiblis) s. m.
  • 1Nom donné dans une très ancienne anatomie, et alors que l'on n'avait pas fait la distinction des nerfs proprement dits, aux ligaments et aux tendons ; acception qui s'est conservée dans le langage vulgaire. Un nerf foulé. Quand l'âge dans mes nerfs a fait couler sa glace, Corneille, Cid, I, 6. C'est pour cette raison que jusqu'aujourd'hui les enfants d'Israël ne mangent point du nerf des bêtes, se souvenant de celui qui fut touché en la cuisse de Jacob, Sacy, Bible, Genèse, XII, 32. Ils ont été tellement frappés de la frayeur que leur a donnée notre canon, que les nerfs du dos qui servent à se tourner, et ceux qui font remuer les jambes pour s'enfuir, n'ont pu être arrêtés par la volonté d'acquérir de la gloire, Sévigné, 5 août 1676. Tous les nerfs tendus et les bras entrelacés [de deux lutteurs] comme des serpents, chacun s'efforçant d'enlever de terre son ennemi, Fénelon, Tél. V.
  • 2Proprement. Petits filaments qui mettent en communication le cerveau et la moelle épinière avec la circonférence du corps, et qui transmettent les sensations au centre et les volontés à la circonférence (nerfs blancs, ou cérébro-rachidiens, ou de la vie animale), et aussi petits filaments qui partent des ganglions et qui se rendent aux organes de la vie végétative, présidant aux fonctions de ces organes (nerfs gris, ou mous, ou sympathiques, ou végétatifs, ou de la vie organique). Les nerfs de la sensibilité. Les nerfs du mouvement. Les uns font des nerfs un canal par lequel passe un fluide invisible ; les autres en font un violon dont les cordes sont pincées par un archet qu'on ne voit pas davantage, Voltaire, Dict. phil. Anatomie. S'il est un caractère qui paraisse propre à l'homme, c'est d'être pourvu de nerfs, Bonnet, Contempl. nat. III, 6. La découverte de l'origine des nerfs a conduit à placer l'âme dans le cerveau, Bonnet, Ess. anal. Ame, ch. 5. Mais comment de ces nerfs le mobile faisceau De notre âme à nos sens, de nos sens à notre âme Va-t-il du sentiment communiquer la flamme ? Delille, Trois règnes, VII.

    Nerf intercostal, voy. INTERCOSTAL.

    Nerf grand sympathique, voy. SYMPATHIQUE.

    Avoir mal aux nerfs, éprouver des sensations mal définies, pénibles, qui portent à la tristesse.

    Donner sur les nerfs, causer de l'impatience.

    Attaque de nerfs, voy. ATTAQUE.

    Avoir ses nerfs, avoir des nerfs, être agacé, facile à agacer.

  • 3Nerf de bœuf, nom vulgaire de la partie épaisse du bord supérieur libre du ligament jaune élastique cervical postérieur du bœuf ou du cheval, desséchée et disposée artificiellement en forme de cylindre ; c'est par suite d'une erreur populaire que cette partie est prise pour le membre génital du bœuf, arraché et desséché. Soutenir avec des nerfs de bœuf les panneaux d'une porte. Je vais appeler quelqu'un, demander un nerf de bœuf, te faire tenir par trois ou quatre, et te rouer de mille coups, Molière, D. Juan, IV, 1. Et, si dans la province Il se donnait en tout vingt coups de nerf de bœuf, Mon père pour sa part en emboursait dix-neuf, Racine, Plaid. I, 5.

    Nerf de bœuf, instrument de supplice dont étaient armés les surveillants de la chiourme dans les galères. Tout nu, las ! en chemise Me faut ramer Nuit et jour sans feintise Sur cette mer ; Du nerf de bœuf sans cesse Battu je suis ; Je n'ai plus de caresse De mes amis, Chanson de 1621, dans JAL. Il ramera sous le nerf de bœuf dans les galères d'Alger, Rousseau, Em. IV.

  • 4 Terme de relieur. Ficelle qui est sur le dos d'un livre qu'on relie, et qui est recouverte par la peau ou le parchemin. Presser, pincer les nerfs d'un livre. Cousez sur quatre nerfs ou sur six tout au plus ; Les nerfs multipliés sont au moins superflus, Lesné, la Reliure, p. 52, 1820. Couture à nerfs fendus ; cette couture est la plus ancienne et la meilleure de toutes ; les deux nerfs se touchent, les nerfs de droite reçoivent un cahier, les nerfs de gauche en reçoivent un autre, et ainsi de suite, et alternativement chaque cahier est cousu sur toute sa longueur et à point arrière, c'est-à-dire que le fil fait un tour sur chaque ficelle ou nerf, Lesné, ib. p.152.

    Nerf postiche ou faux nerf, ce qui simule un nerf. Quand vous aurez taillé, paré vos couvertures, Ajoutez vos faux dos et vos fausses nervures ; Les nerfs étaient cousus au livre anciennement ; Mais, depuis que l'on tient pour un grand agrément Que les livres communs, comme les livres riches, Soient faits à dos brisés, on met des nerfs postiches, Lesné, ib. p. 68.

  • 5Cordes de différents instruments. Et bande de tes mains les nerfs de ton rebec, Régnier, Sat X. … Les nerfs brisés de la lyre expirante Sont foulés sous les pieds de la jeune bacchante, Lamartine, Mort de Socrate.
  • 6 Fig. Force, vigueur, comparée à la force que donnent les nerfs ou tendons. La visite des Églises, qui est le nerf du gouvernement ecclésiastique, Bossuet, Méd. sur l'Év. la Cène, 70e jour. Le serment fut toujours le nerf de leur discipline militaire [aux Romains], Montesquieu, Rom. 1. Le tribun se vanta d'avoir coupé les nerfs de l'ordre des sénateurs, Montesquieu, Espr. II, 18. Quand un gouvernement n'a plus d'autre nerf que l'argent, Rousseau, Contr. 5. Son objet principal devait être d'intercepter le commerce de ses ennemis, de leur couper le double nerf qu'ils tiraient de leurs matelots, de leurs capitaux, et de saper ainsi les deux fondements de la grandeur anglaise, Raynal, Hist. phil. XVIII, 49. Cicéron, à qui l'on reprochait d'être flatteur et de manquer de nerf, n'était que ce qu'il fallait être pour persuader les Romains, Marmontel, Élém. de litt. t. VI, p. 384, dans POUGENS.

    Le nerf des affaires, de la guerre, etc., l'argent. Un bâtiment [que l'on construisait]… manquant du nerf de la guerre, Sévigné, 26 oct. 1688. J'aurais pour le succès quelque bonne espérance, Si de quelque argent frais nous avions le secours ! C'est le nerf de la guerre ainsi que des amours, Regnard, Fol. amour. I, 7. Parce qu'on ne s'égorge qu'à prix d'argent, et que ce nerf de la guerre manque à tous ceux qui la font aujourd'hui, D'Alembert, Lett. au roi de Pr. 11 oct. 1782. De l'or, mon Dieu ! de l'or ; c'est le nerf de l'intrigue, Beaumarchais, Barb. de Sév. I, 6.

  • 7Nerfs, au plur. Se dit quelquefois en architecture pour nervures.

    Nerfs d'ogives, corps saillants qui soutiennent les pendentifs.

  • 8 Terme de pêche. Se dit des cordes qui sont attachées au bout de l'épervier, et qui servent à le serrer quand le poisson est pris.
  • 9 Terme de métallurgie. Filaments allongés qui déterminent et annoncent la ténacité et la malléabilité d'un métal. Le bon fer, c'est-à-dire le fer qui est presque tout nerf, est au moins cinq fois aussi tenace que le fer sans nerf et à gros chaînons, Buffon, Hist. min. Introd. Œuvr. t. VII, p. 66.

HISTORIQUE

XIe s. Trestuit si nerf mult lui sont estendant [tous ses nerfs sont distendus par les chevaux qui le mettent en pièces], Ch. de Rol. CCXXI.

XIIIe s. Il en porroit venir apostumes, et porroit les niers ferir, dont maint peril aviennent, Alebrand, f° 41. Et sembloit bien langoreuse et malade vraiement ; car les ners de ladite jambe estoient contrez, Miracles St Loys, p. 158.

XIVe s. Le nerf est de complecion froide et seiche, très sensible, H. de Mondeville, f° 9.

XVIe s. La poesie d'Antimachus et la peinture de Dionysius sont bien pleines de nerfs et vigueur, mais…, Amyot, Timol. 47. Puisque la defiance est un des principaux nerfs de la sagesse en temps si dangereux, Lanoue, 60. Le principal nerf en ceci est l'exemple et l'authorité du roi, Lanoue, 93. Pour y attirer les nerfs [forces] des ennemis, D'Aubigné, Hist. II, 57. Ils ne purent trouver en ce courage nerf qui tendist à estre deserteur de ses amis, D'Aubigné, ib. II, 233. Nerf est icy usurpé largement pour ligament, nerf et tendon, Paré, I, 8.

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Encyclopédie, 1re édition (1751)

NERF, s. m. en Anatomie, corps rond, blanc & long, semblable à une corde composée de différens fils ou fibres, qui prend son origine ou du cerveau, ou du cervelet, moyennant la moëlle alongée & de la moëlle épiniere, qui se distribue dans toutes les parties du corps, qui sert à y porter un suc particulier que quelques physiciens appellent esprits animaux, qui est l’organe des sensations, & sert à l’exécution des différens mouvemens. Voyez Sensation, Mouvement musculaire, &c.

Origine des nerfs. De chaque point de la substance corticale du cerveau partent de petites fibres médullaires qui s’unissant ensemble dans leur progrès, deviennent enfin sensibles & forment ainsi la moëlle du cerveau & l’épine. Voyez Cerveau & Moelle, &c.

De-là elles prolongent, & peu après elles deviennent distinctes & séparées au moyen de différentes enveloppes que leur fournit la dure-mere & la pie-mere, & forment par-là différens faisceaux ou nerfs qui ressemblent, eu égard à la position de leurs fibrilles composantes, à autant de queues de cheval enveloppées dans deux tuniques. Voyez Fibre.

Il est probable que les fibres médullaires du cervelet partent des environs des parties antérieures de la moëlle alongée, se joignent en partie aux nerfs qui en sortent, mais de maniere à retenir toujours leur origine, leur cours & leur fonction particuliere. Le reste des fibres du cervelet se mêle si intimement avec celles du cerveau, qu’il n’y a peut-être pas dans toute la moëlle alongée de l’épine une seule partie où il ne se trouve des fibres de chacune de ces deux especes, & ainsi ces deux especes de fibres contribuent l’un l’autre à former le corps de chaque nerf, quoique leur fonction & leurs effets particuliers soient fort différens. Voyez Cervelet, &c.

Ces nerfs qui se forment de cette sorte & que la moëlle alongée envoie sont au nombre de dix paires ; quoique ce soit mal à-propos qu’on les appelle de la sorte, puisque la plûpart sont composés de plusieurs nerfs distincts & très-gros. Il en part de la même maniere trente paires de la moëlle épiniere, à quoi on peut ajouter les deux nerfs intercostaux.

Tandis que les nerfs sont dans la moëlle, ils ne présentent qu’une espece de pulpe ; mais en la quittant, ils prennent une gaine qui leur est fournie par la pie-mere ; sous cette enveloppe ils avancent jusqu’à la dure-mere, qui leur fournit encore une autre tunique. Voyez Dure-mere & Pie-Mere.

La substance des nerfs renfermée dans ces deux membranes n’est pas différente de la substance du cerveau, elle n’est qu’une moëlle qui se répand dans toute l’étendue des tuyaux nerveux, & qui est sans doute envoyée du cerveau ; mais y est-elle renfermée dans des petits vaisseaux de la longueur du nerf ? Ou est-elle contenue dans des cellules ? C’est ce qu’on ne sauroit déterminer.

Les enveloppes de ces nerfs sont par-tout garnies de vaisseaux sanguins, lymphatiques & d’autres vésicules d’une texture très-fine qui servent à ramasser, à renforcer & à resserrer les fibrilles, & d’où on doit tirer l’explication de la plûpart des phénomenes, maladies des nerfs, &c.

Lorsque les extrémités des nerfs se distribuent dans les parties auxquelles elles appartiennent, ils se dégagent alors de leur enveloppe, ils s’épanouissent en une espece de membrane, ou se réduisent en une pulpe molle. Voyez Membrane & Pulpe.

Or si l’on considere 1° que toute la substance vasculaire du cerveau contribue à la formation des fibrilles des nerfs, quoiqu’elle s’y continue même totalement, & qu’elle y finit. 2° Que lorsque la moëlle alongée est comprimée, tiraillée, & qu’elle tombe en pourriture ; toutes les actions qui dépendoient des nerfs qui en sortent, cessent immédiatement après, quoique les nerfs restent entiers & intactes. 3° Que les nerfs exécutent par-tout presque dans un instant leurs opérations, tant celles qui ont rapport aux mouvemens que celles qui ont rapport aux sensations, & cela soit qu’ils soient lâches, courbes, crasses, rétrogrades & obliques. 4° Que quand ils sont entierement liés ou comprimés, quoiqu’à tous autres égards ils restent entiers, ils perdent alors toute leur action dans les parties comprises entre la ligature & les extrémités auxquelles ils tendent, sans en perdre cependant dans les parties comprises entre la ligature & la moëlle du cerveau ou le cervelet, il paroîtra évidemment que les fibres nerveuses tirent continuellement de la moelle du cerveau un suc qu’elles transmettent par autant de canaux distincts à chacun des points de tout le corps, & que ce n’est que par le moyen de ce suc qu’elles exécutent toutes leurs fonctions dans les sensations & le mouvement musculaire, &c. cette humeur est ce qu’on appelle proprement, esprits animaux ou suc nerveux. Voyez Animal, Esprit, &c.

On a supposé, il y a long-tems, que les nerfs sont des petits tuyaux, mais on a eu bien de la peine à découvrir leurs cavités, enfin on a cru que M. Lewenhock étoit venu à bout de rendre sensibles les cavités qui sont dans les nerfs, mais cette découverte souffre encore quelque difficulté.

Il ne paroît pas qu’il y ait la moindre probabilité dans cette opinion (qui a cependant ses partisans), que les nerfs exécutent leurs opérations par la vibration des fibrilles tendues ; en effet c’est un sentiment contraire à la nature des nerfs, dont la substance est molle, pulpeuse, flasque, croissée & ondée, & suivant lequel on ne sauroit expliquer cette distinction, avec laquelle les objets de nos sensations nous sont représentés, & avec laquelle s’exécutent les mouvemens musculaires.

Or de même que le sang artériel est porté continuellement dans toutes les parties du corps qui sont garnies de vaisseaux sanguins, de même aussi on conçoit qu’un suc préparé dans la substance corticale du cerveau & dans le cervelet, se porte de-là continuellement à chaque point du corps à-travers les nerfs. La petitesse des vaisseaux de la substance corticale, telle que les injections de Ruisch la font connoître, quoique cependant ces injections ne démontrent que des vaisseaux artériels beaucoup plus gros, par conséquent que les moindres vaisseaux secrétoires, prouvent combien ces vaisseaux nerveux doivent être déliés, & d’un autre côté la grosseur du volume du cerveau comparée à la petitesse de chaque fibrille, fait voir que leur nombre peut être au-delà de toutes les bornes que l’imagination paroît lui donner. Voyez Filament.

De plus la grande quantité de suc qui s’y porte constamment & qui y est agitée d’un mouvement violent, y remplira continuellement ces petits canaux, les ouvrira & mettra toujours en action ; mais comme il se prépare à chaque moment de nouveaux sucs & que le dernier chasse continuellement le premier, il semble aussi-tôt qu’il a fait sa derniere fonction être chassé hors des derniers filamens dans des vaisseaux quelconques, de sorte qu’il fait ainsi sa circulation dans le corps comme toutes les autres liqueurs. Voyez Circulation.

M. Vieussens a cru avoir trouvé des tuyaux qu’il a nommés nevro-lymphatiques, mais sa découverte n’est pas confirmée.

Si nous considérons sur-tout la grandeur du volume du cerveau, du cervelet, de la moëlle alongée & de la moëlle de l’épine, eu égard au volume des autres solides du corps ; le grand nombre de nerfs qui se distribuent de-là dans tout le corps ; que le cerveau & la moëlle de l’épine sont la base d’un embryon, de laquelle, selon le grand Malpighi, se forment ensuite les autres parties ; enfin qu’il n’y a à peine aucune partie dans le corps qui ne sente & qui ne se remue, il paroîtra très-probable que toutes les parties solides du corps sont tissues de fibres nerveuses, & ne sont composées d’autres choses. Voyez Filamens & Solides.

Les anciens ne comptoient que sept paires de nerfs qui partent du cerveau, dont ils marquent les usages dans ces deux vers latins,


Optica prima, oculos movet altera, tertia gustat,
Quarta & quinta audit, vaga sexta est, septima linguæ.


mais les modernes, comme nous l’avons déja observé, en comptent un plus grand nombre.

Selon eux, les nerfs de la moëlle alongée sont au nombre de dix paires, dont la premiere se nomme nerfs olfactifs ; la seconde, nerfs optiques ; la troisieme, nerfs moteurs des yeux, moteurs communs, oculaires communs, musculaires communs. oculo-musculaires communs ; la quatrieme, nerfs trochléateurs, musculaires obliques supérieurs, communément nommés nerfs pathétiques ; la cinquieme, nerfs innominés, nerfs trijumaux ; la sixieme, moteurs externes, oculaires externes, musculaires externes, oculo-musculaires externes ; la septieme paire, nerfs auditifs ; la huitieme paire, la petite vague, nerf sympathique moyen ; la neuvieme paire, nerfs hypoglosses, nerfs gustatifs, nerfs linguaux ; la dixieme paire, nerfs sous-occipitaux. Voyez Olfactif, Optique, Vague, &c.

Les nerfs de la moëlle épiniere sont 1° une paire de nerfs accessoires ou associés de la huitieme paire de la moëlle alongée ; 2° une paire de nerfs intercostaux ou grands nerfs sympathiques ; 3° sept paires de nerfs intervertebaux du col ou nerfs cervicaux ; 4° douze paires de nerfs intervertebaux du dos, ou nerfs dorsaux, costaux, vrais intercostaux ; 5° cinq paires de nerfs intervertebraux des lombes, ou nerfs lombaires ; 6° cinq ou six paires de nerfs sacrés. Voyez Accessoires & Intercostaux.

Les autres nerfs qui ont des noms particuliers sont 1° les branches des nerfs de la moëlle allongée ; comme sont 1° les trois branches de la cinquieme paire, dont l’une a été nommée nerf orbitaire supérieur, l’autre nerf maxillaire supérieur, & le troisieme nerf maxillaire inférieur ; 2° les deux branches ou portions du nerf auditif, dont l’une se nomme portion molle & l’autre portion dure. Voyez Orbitaire, Maxillaire, Auditif, &c.

2°. Les branches des nerfs de la moëlle épiniere, tels sont 1° les nerfs diaphragmatiques ; 2° les nerfs brachiaux, dont les six branches différentes ont toutes différens noms, savoir le nerf musculo-cutané, le nerf median, le nerf cubital, le nerf cutané interne, le nerf radial, le nerf axillaire ou articulaire ; 3° les nerfs cruraux, que l’on divise en trois portions, savoir le nerf crural du fémur ou nerf crural supérieur, le nerf crural du tibia ou nerf crural jambier, le nerf crural du pié ou nerf crural pédieux ; 4° les nerfs sciatiques qui produisent le nerf sciatique crural, le nerf sciatique poplité, le nerf sciatique tibial, le nerf sciatique peronier, le nerf plantaire interne, le nerf plantaire externe. Voyez Diaphragmatique, Brachial, Crural, &c.

3°. Les rameaux de quelques-unes des branches dont nous avons fait mention, ont aussi des noms particuliers ; tels sont les canaux des branches de la cinquieme paire, par exemple, le rameau frontal, le rameau nasal, & le rameau lacrymal de la premiere branche, &c. Voyez Frontal, Nasal & Lacrymal.

Vieussens, Willis & Beretini nous ont particulierement donné des Planches sur les nerfs ; l’ouvrage de ce dernier est intitulé : Beretini tabulæ anatomicæ, &c. Romæ 1741, in-fol. Voyez Névrographie & Névologie.

Nerfs, jeux de la nature sur les (Physiol.) les nerfs, de même que les vaisseaux sanguins, se répandent dans toutes les parties, quoique d’une maniere fort différente. Le diametre des vaisseaux sanguins est toujours proportionné au nombre de leurs divisions, & à leur éloignement du cœur. Il n’en est pas de même des nerfs qui grossissent en plusieurs endroits, & forment des tumeurs qu’on nomme ganglions. Les vaisseaux sanguins ne communiquent ensemble que dans leurs rameaux ; les nerfs se rencontrent à la sortie du crâne, du canal de l’épine, ou dans ses cavités. Leur exilité, leurs entrelacemens, leurs engagemens dans les membranes, & les ligamens qu’ils trouvent sur le passage, en rendent la poursuite très-difficile ; ils se dérobent pour lors aux recherches des mains & des yeux des meilleurs Anatomistes, & avant que de se cacher, ils ne fournissent pas moins de jeux de la nature dans leurs décours, que les vaisseaux sanguins qu’ils accompagnent ; mais il nous doit presque suffire d’en faire la remarque, & d’en citer quelques exemples pour preuve : un détail étendu seroit plus ennuyeux que profitable, & les réflexions que nous avons faites ailleurs sur cette matiere en général, trouvent ici leur application. Nous ajouterons encore qu’il ne faut compter en observations réelles de jeux des nerfs, que sur celles des grands maîtres de l’art ; telles sont les tables névrologiques d’Eustachius.

La division générale du nerf maxillaire en trois, n’est pas toujours constante ; car le premier de ces rameaux sous orbitaires, donne quelquefois un filet aux dents molaires supérieures.

Le nerf moteur externe donne quelquefois un filet nerveux double, & le nerf de la sixieme paire est quelquefois réellement double, ou fendu en deux avant son engagement dans la dure-mere.

Les filets postérieurs du tronc gauche du pléxus pulmonaire sont quelquefois plus considérables que les filets antérieurs du tronc droit.

Les deux nerfs accessoires de la huitieme paire jettent quelquefois des filets sans communication avec le ganglion, ni avec le plan antérieur.

L’union & le mélange plexiforme des cinq gros nerfs vertébraux, varient souvent dans les cadavres, ainsi que les six nerfs brachiaux qui en naissent, varient dans leur origine. Le nerf médian est dans quelques sujets formé par l’union de deux seules branches, au lieu de trois.

Les nerfs de l’os sacrum se comptent par paires, dont le nombre augmente quelquefois. L’entrelacement de la troisieme paire souffre aussi ses jeux.

Le nerf de la huitieme paire que Winslow appelle sympathique moyen, & d’autres la paire vague, donne comme on sait, une branche qui communique avec la neuvieme paire ; mais on a vû dans quelques sujets, cette branche communiquer avec le ganglion supérieur du nerf intercostal.

La paire occipitale, nommée la dixieme paire de Willis, a une origine différente dans plusieurs sujets ; quelquefois cette origine est double, & perce la dure-mere avec l’artere vertébrale, comme Eustachi l’a dépeinte. Tab. 17. fig. 2.

L’origine du nerf intercostal est encore une question. On peut, peut-être, regarder le filet qui vient de la sixieme paire, comme son principe, parce qu’on observe quelquefois par un jeu de la nature, que les filets du nerf ophthalmique, nommé par M. Winslow nerf orbitaire, ne s’y joignent pas. Ce nerf intercostal forme dans le bas ventre un ganglion très-considérable, qu’on a nommé mal-à-propos sémi-lunaire, puisque sa forme varie autant que sa grosseur. Le ganglion sémi-lunaire droit & gauche, sont quelquefois réunis en un seul ; quelquefois on en rencontre trois, quatre, & davantage.

Au reste, tous les pléxus hépatiques, spléniques, mésentériques, rénal, hypogastriques, qui viennent des filets du tronc de l’intercostal, varient si fort dans leur distribution, leur grosseur & leur nombre, que ceux qu’on observe d’un côté, sont pour l’ordinaire très-differens de ceux qu’on observe de l’autre ; de sorte qu’il n’est pas possible de décrire de telles variétés, qui sont peut-être la cause de plusieurs mouvemens sympathiques particuliers à certaines personnes, & que d’autres n’éprouvent point au même degré.

Ajoutez que tous les nerfs de la moëlle épiniere, qu’on nomme cervicaux, au nombre de sept paires, grossissent après avoir percé la premiere envelope, & forment comme le nerf intercostal, des ganglions qui sont plus ou moins remarquables dans les différens sujets.

Enfin l’histoire des nerfs intestinaux est si composée, qu’il n’est pas possible de la donner ; car ils ont des origines & des distributions différentes presque dans chaque sujet. (D. J.)

Nerf, ou Nervure, par analogie aux nerfs des animaux, (Coupes des pierres.) est une arcade de pierre en saillie sur le nud des voûtes gothiques, pour en appuyer & orner les angles saillans par des moulures, & fortifier les pendentifs. Plusieurs églises gothiques ont des morceaux curieux en ce genre. L’église de saint Eustache à Paris, quoique bâtie vers le tems de la renaissance de l’Architecture, a sur la croisée des deux nerfs, un pendentif fort bien exécuté.

On donne différens noms aux nervures par rapport à leur situation ; celles qui traversent perpendiculairement, s’appellent arcs doubleaux, comme aa, bb, fig. 18 ; celles qui traversent diagonalement, s’appellent arcs d’ogives, comme b, ab ; celles qui traversent obliquement entre les arcs doubleaux & les ogives, s’appellent liernes & tiercerons, comme bo, bo, mo. (D)

Nerfs, (Jardinage.) les nerfs d’un végétal sont les tuyaux longitudinaux qui portent le suc nourricier dans les parties les plus élevées.

Nerf, (Maréchalerie.) on appelle improprement ainsi un tendon qui coule derriere les os des jambes. Ses bonnes qualités sont d’être gros & bien détaché, c’est-à-dire apparent à la vue, & détaché de l’os. Le nerf failli est celui qui va si fort en diminuant vers le pli du genou, qu’à peine le sent-on en cet endroit ; ce qui est un mauvais prognostic pour la force du cheval.

Nerf ferure, en termes de Manege ; signifie une entorse, une enflure douloureuse, ou une atteinte violente, que le cheval se donne aux nerfs des jambes de devant avec la pince des piés de derriere.

Nerf de cerf, (Vennerie.) c’est le membre qui sert à la génération.

Nerfs, s. m. pl. (Terme de Relieurs.) les Relieurs appellent de la sorte les ficelles ou petites cordes qu’ils mettent au dos de leurs livres, & sur lesquelles se cousent & s’arrêtent les cahiers dont ils sont composés.

Nerf de bœuf, (Terme de Sellier.) c’est le nerf séché qui se tire de la partie génitale de cet animal. Quand ce nerf est réduit en maniere de filasse longue de huit à dix pouces, par le moyen de certaines grosses cardes de fer, il s’emploie par les Selliers à nerver avec la colle forte, les arçons des selles & les panneaux des chaises & carosses ; il entre aussi dans la fabrique des batoirs propres à jouer à la paume. A Paris ce sont ces ouvriers qui le préparent, qui le portent vendre aux marchands merciers quincailliers, par paquets du poids d’une livre ; & c’est chez ces marchands, que les artisans qui en ont besoin les vont acheter. (D. J.)

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Étymologie de « nerf »

(Date à préciser) Du moyen français, de l’ancien français, du latin nervus (« tendon, nerf »), lui même issu de l’indo-européen commun *(s)neu[1] (« attacher, lier ») qui donne le grec ancien νεῦρον, neûron.
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

(Date à préciser) Du moyen français, de l’ancien français, du latin nervus (« tendon, nerf »), lui même issu de l’indo-européen commun *(s)neu[1] (« attacher, lier ») qui donne le grec ancien νεῦρον, neûron.
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Génev. nierfe, niarfe ; provenç. nervi ; espagn. nervio ; ital. nervo ; du lat. nervus, grec νεῦρον, le terme signifie proprement lien, corde, ligament, et, très tardivement, nerf. Comparez anc. haut all. snara, all. mod. Schnur, corde.

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Phonétique du mot « nerf »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
nerf nɛr

Fréquence d'apparition du mot « nerf » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Citations contenant le mot « nerf »

  • Une crise de nerfs n'est pas une opinion.
    Henri Fauconnier — Malaisie
  • C'est drôle, les hommes. Ça vous tape sur les nerfs ou ça veut vous priver de vous énerver.
    Réjean Ducharme — Dévadé
  • La pipe est la pierre de touche des nerfs.
    Alphonse Rabbe — Album d'un pessismiste
  • La joie est le nerf de toutes les affaires humaines.
    Pierre Bayle — Pensées diverses sur la comète
  • Le nerf optique est celui qui amène les idées lumineuses au cerveau.
    Jean-Charles — La Foire aux cancres
  • Aime tes ennemis. C'est le meilleur moyen de leur porter sur les nerfs.
    Bernard Werber — La révolution des fourmis
  • Il y a une chose que les enfants usent encore plus vite que leurs fonds de culottes, ce sont les nerfs de leurs parents.
    Anonyme
  • Le nerf, la saveur de la religion, c'est le repentir.
    Hubert Monteilhet — Devoirs de vacances
  • Le nerf de la guerre, c'est l'argent.
    Bion de Phlossa
  • Argent : C'est le nerf de la guerre, ainsi que des amours.
    Jean-François Regnard — Les folies amoureuses
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Images d'illustration du mot « nerf »

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Traductions du mot « nerf »

Langue Traduction
Anglais nerve
Espagnol nervio
Italien nervo
Allemand nerv
Chinois 神经
Arabe عصب
Portugais nervo
Russe нерв
Japonais 神経
Basque nerbio
Corse nervu
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Synonymes de « nerf »

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Nerf

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