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Nature

Variantes Singulier Pluriel
Féminin nature natures

Définitions de « nature »

Trésor de la Langue Française informatisé

NATURE, subst. fém.

I. − Ensemble de la réalité matérielle considérée comme indépendante de l'activité et de l'histoire humaines.
A. −
1. Milieu terrestre particulier, défini par le relief, le sol, le climat, l'eau, la végétation. Une nature aride, désertique, désolée, luxuriante, tropicale, sauvage. Le ciel était pur et serein, l'air frais; la nature aussi donnait sa fête. Toute la population de Paris était sur pied (Maine de Biran, Journal, 1814, p.15).À Dettelbach réapparition des vignes. Quatre végétaux marquent la limite de quatre natures et de quatre climats: le bouleau, la vigne, l'olivier et le palmier, toujours en marchant vers le soleil (Chateaubr., Mém., t.4, 1848, p.295).C'était la continuation de la solitude avec le commencement de la liberté; un jardin fermé, mais une nature âcre, riche, voluptueuse et odorante; les mêmes songes que dans le couvent, mais de jeunes hommes entrevus; une grille, mais sur la rue (Hugo, Misér., t.2, 1862, p.83).C'était à la fois Asnières, Saardam et Puteaux, un de ces paysages parisiens des bords de la Seine, tels que les peint Hervier, sales et rayonnants, misérables et gais, populaires et vivants, où la nature passe çà et là, entre la bâtisse, le travail et l'industrie, comme un brin d'herbe entre les doigts d'un homme (Goncourt, R. Mauperin, 1864, p.12):
1. Je pourrais aller au gré de ma fantaisie, m'arrêter à l'endroit où le soir viendrait me surprendre, avoir des nuits paisibles et connaître des réveils délicieux, en pleine nature, dans la lumière de l'aube. T'Serstevens, Itinér. esp., 1933, p.15.
[Comme source d'émotions ou de sensations, dans une conception romantique] Déjà les premières ombres de la nuit commençoient à envelopper le bosquet d'orangers, et donnoient à la nature cette teinte de mélancolie qui favorise si bien les méditations religieuses et les tendres rêveries (Cottin, Mathilde, t.1, 1805, p.147).Au travers des murs de charmille on apercevait çà et là, par les trouées du feuillage, une belle lune éclairant un paysage étendu et tranquille. Cette nature ravissante était d'accord avec les nouveaux sentiments qui cherchaient à s'emparer du coeur de Madame de Chasteller (Stendhal, L. Leuwen, t.1, 1836, p.311):
2. Et que sera-ce si ces objets qui se présentent à vos yeux sont ces vallons, ces forêts, ces monts sans nombre, ces glaces infinies, en un mot cette nature tantôt riante, tantôt sublime des grandes Alpes; si à chaque instant un spectacle attachant provoque cette admiration expansive, ce besoin de partager des émotions dont le flot ne peut tenir tout entier dans le coeur, et que leur religieuse pureté affranchit du joug d'une pudique réserve? Toepffer, Nouv. genev., 1839, p.383.
[Comme milieu-refuge opposé à la ville ou à tout espace modelé par l'activité humaine, pris pour symboles de la société, de la civilisation] Le retour à la nature. Aussi, son premier soin fut-il de chercher un asile écarté aux environs des eaux. Il sentait instinctivement le besoin de se rapprocher de la nature, des émotions vraies et de cette vie végétative à laquelle nous nous laissons si complaisamment aller au milieu des champs (Balzac, Peau chagr., 1831, p.277).
Fam. Disparaître, être dans la nature. Disparaître, être dans un lieu inconnu. On m'avait parachuté quelque part dans la nature. Je suis tombé dans le noir, j'avais bien atterri, je n'avais rien de cassé (Triolet, Le Rendez-vous des étrangers, Paris, Laffont, 1973 [1956], p.32).
Se cacher, déserter, s'évader:
3. −Mauron, c'est le pitaine. Il est dans la nature. −Dans la nature? répéta-t-elle. −Il croit que c'est meilleur pour sa santé. Sartre, Mort ds âme, 1949, p.130.
2. Environnement terrestre, en tant qu'il sert de cadre de vie à l'espèce humaine, qu'il lui fournit des ressources. Les objets que la nature ne livre pas tout préparés pour satisfaire nos besoins, peuvent y être rendus propres par notre industrie (Say, Écon. pol., 1832, p.59).[Les hautes cheminées éteintes témoignaient] des combats de l'industrie et de la concurrence, dans ces profondeurs de la terre. Dans cette violente et rapide conquête de la nature par l'homme, on va, on va à l'aveugle: les règlements sont méprisés, les eaux inondent les mines, les champs, la route même s'affaissent (Michelet, Journal, 1839, p.300).Les forces et les processus que l'homme parvient maintenant à maîtriser commencent à égaler en grandeur et en intensité la nature elle-même, et la totalité de notre milieu ambiant est à présent soumise à l'influence humaine (Science, 1957, no125, p.143 ds Moscovici, Essai sur l'hist. hum. de la nature, Paris, Flammarion, 1968, p.7):
4. Or, la nature dans son ensemble, sans doute parce qu'elle a paru inépuisable, n'a pas figuré pendant fort longtemps dans la comptabilité des entreprises ni dans celle des nations d'Europe ou d'Amérique; l'eau, l'air ou les paysages ont été considérés comme des dons gratuits de la nature, dont chacun pouvait disposer à sa guise... P. Aguesse, L'Écol., Paris, Seghers, 1975 [1971], p.180.
B. −
1. Ensemble de l'univers, en tant qu'il est le lieu, la source et le résultat de phénomènes matériels. Les lois* de la nature. La physique, se délivrant peu à peu des explications vagues introduites par Descartes, comme elle s'était débarrassée des absurdités scolastiques, n'est plus que l'art d'interroger la nature par des expériences, pour chercher à en déduire ensuite, par le calcul, des faits plus généraux. La pesanteur de l'air est connue et mesurée; on découvre que la transmission de la lumière n'est pas instantanée, on en détermine la vitesse; on calcule les effets qui doivent en résulter pour la position apparente des corps célestes; le rayon solaire est décomposé en rayons plus simples, différemment réfrangibles et diversement colorés (Condorcet, Esq. tabl. hist., 1794, p.178).La loi suivant laquelle cette force [dans les atomes] varie en fonction de la distance n'est peut-être pas la loi de Newton, mais c'est une loi analogue; au lieu de l'exposant 2, nous avons probablement un exposant différent, et c'est de ce changement d'exposant que sort toute la diversité des phénomènes physiques, la variété des qualités et des sensations, tout le monde coloré et sonore qui nous entoure, toute la Nature en un mot (H. Poincaré, Valeur sc., 1905, p.191).
[Comme agent extérieur opposé au vivant] :
5. De même dans l'ordre organique, une fois admis ce pouvoir mystérieux de la vie, aussi petit et aussi élémentaire que possible, il [Lamarck] le supposait se développant lui-même, se composant, se confectionnant peu à peu avec le temps; le besoin sourd, la seule habitude dans les milieux divers faisait naître à la longue les organes, contrairement au pouvoir constant de la nature qui les détruisait: car M.de Lamarck séparait la vie d'avec la nature. La nature, à ses yeux, c'était la pierre et la cendre, le granit de la tombe, la mort! La vie n'y intervenait que comme un accident étrange et singulièrement industrieux, une lutte prolongée, avec plus ou moins de succès et d'équilibre çà et là, mais toujours finalement vaincue; l'immobilité froide était régnante après comme devant. Sainte-Beuve, Volupté, t.1, 1834, p.193.
2. [Très fréq., dans des formulations ayant une origine anthropomorphique ou finaliste] Étudiez-la, suivez-la, cette nature atroce: vous ne la verrez jamais créer que pour détruire, n'arriver à ses fins que par des meurtres, et ne s'engraisser, comme le Minotaure, que du malheur et de la destruction des hommes (Sade, La Nouvelle Justine, 1797ds Desné, Les Matérialistes fr. au 18es., Paris, éd. Buchet-Chastel, 1965, p.164).Au reste, en demeurant toujours dans les bornes que les conditions nécessaires de l'existence prescrivoient, la Nature s'est abandonnée à toute sa fécondité dans ce que ces conditions ne limitoient pas; et sans sortir jamais du petit nombre des combinaisons possibles entre les modifications essentielles des organes importans, elle semble s'être jouée à l'infini dans toutes les parties accessoires (Cuvier, Anat. comp., t.1, 1805, p.58).À l'égard des corps qui jouissent de la vie, la nature a tout fait peu à peu et successivement: il n'est plus possible d'en douter (...). En composant et compliquant de plus en plus l'organisation animale, la nature a créé progressivement les différents organes spéciaux ainsi que les facultés dont les animaux jouissent (Lamarck, Philos. zool., t.1, 1809, p.17):
6. On peut considérer le phénomène de l'explosion stellaire comme une nouvelle astuce de la nature pour avancer encore sur la voie de la complexité. Pour engendrer des noyaux lourds, il a fallu créer des lieux de grande chaleur: les creusets stellaires. H. Reeves, Patience dans l'azur, Paris, éd. du Seuil, 1981, p.88.
Qqn est une force de la nature. V. force I B 3 e.
[Comme puissance maternelle, comme principe cosmique de fécondité] Ces hauts monts que blanchit un éternel hiver, ce chaos, semblent les débris d'un monde, les Titans... on croit voir là dans ces enfantements monstrueux sans forme, sans ordre, la nature mère travaillée, agitée, déchirée, gémir dans les travaux d'un avortement (Chénier, Amérique, 1794, p.85).Je n'avais pas cette ressource; la nature, ma mère chérie, depuis que j'étais seul, me semblait au contraire plus vaste et plus vide que jamais (Musset, Confess. enf. s., 1836, p.42).
C. −
1. BIOL. Force spécifique au vivant. Synon. force vitale*.On peut donc assurer, avec vraisemblance, que la puberté de la fille naturelle ne se manifestera (au moins dans un climat semblable au nôtre) qu'après que le corps aura presque fini sa croissance, et l'on peut assurer avec certitude que, dans tous les climats, la nature, livrée à elle-même, n'accordera à une fille la faculté de devenir mère qu'après lui avoir donné la force d'en remplir les devoirs (Laclos, Éduc. femmes, 1803, p.437):
7. On peut dire certainement qu'il y a dans les êtres vivants la force vitale qui donne à l'être son évolution, sa forme. Cette forme est indépendante de la matière; c'est le pouvoir législatif qui est au-dessus de la matière et qui la dispose; mais le pouvoir exécutif de cet arrangement est tout à fait matériel et physico-chimique (...). La nature intervient donc avec ses propriétés comme une force exécutive de toute idée. Cl. Bernard, Princ. méd. exp., 1878, p.243.
HIST. DE LA MÉD. Nature curative, médicatrice. ,,Propriétés inhérentes aux tissus et aux humeurs, qui font qu'un organe lésé dans certaines limites revient peu à peu à son état naturel`` (Littré). D'ailleurs, la médecine antique ou d'observation, concluant forcément à l'expectation comme traitement, était passive et se résumait essentiellement dans le pronostic, se bornant à rechercher les bonnes influences, à éviter les mauvaises et à favoriser les bonnes dispositions de la nature curative ou médicatrice (Cl. Bernard, Princ. méd. exp., 1878, p.10).
[Dans des expr. de la lang. cour. reflétant les conceptions anciennes de la méd., et notamment de la méd. hippocratique] Laisser faire la nature. Mon remède est de rien faire, de laisser faire dame Nature qui s'en tire seule, à moins de cas aigus. La santé est comme les enfants, on la gâte par trop de soins (E. de Guérin, Lettres, 1839, p.262).
Au fig. Payer son tribut à la nature. Mourir. (Dict. xixeet xxes.).
2. Conditionnements physiologiques de l'individu. Besoins de la nature. −L'amour! −Mais qu'est-ce donc que l'amour? −On l'a poétisé à l'usage des niais. −Un grossier besoin périodique, une loi criarde de la nature, de la nature éternelle qui reproduit et multiplie, un penchant brutal, un charnel croisement de sexe, un spasme! (Borel, Champavert, 1833, p.192).
D. − ARTS PLAST., ESTHÉT.
1.
a) Réalité sensible qui constitue l'objet ou le point de départ de l'oeuvre artistique. Synon. réel, visible.L'imitation de la nature. Il ne faut pas que les objets que l'on peint soient d'une vérité matérielle; il faut que les chairs ne soient pas les chairs de la nature; en un mot, il faut rendre les vérités par des illusions (Chênedollé, Journal, 1807, p.21).Le premier [type de dessin] est négatif, incorrect à force de réalité, naturel, mais saugrenu; le second est un dessin naturaliste, mais idéalisé, dessin d'un génie qui sait choisir, arranger, corriger, deviner, gourmander la nature; enfin le troisième qui est le plus noble et le plus étrange, peut négliger la nature; il en représente une autre, analogue à l'esprit et au tempérament de l'auteur (Baudel., Salon, 1846, p.120).L'artiste, si réaliste soit-il, a planté son chevalet devant le «motif» et ce terme même, dans sa bouche, indique déjà que la Nature ne lui fournit qu'un prétexte et un départ (Huyghe, Dialog. avec visible, 1955, p.72):
8. J'embrasse d'un regard l'humanité qui a vécu et qui, devant la nature, à toute heure, sous tous les climats, dans toutes les circonstances, s'est senti l'impérieux besoin de créer humainement, de reproduire par les arts les objets et les êtres (...). Chaque grand artiste est venu nous donner une traduction nouvelle et personnelle de la nature. La réalité est ici l'élément fixe, et les divers tempéraments sont les éléments créateurs qui ont donné aux oeuvres des caractères différents. Zola, Les Paysagistesds Mon Salon/Manet, Paris, Garnier-Flammarion, 1970 [1867], p.98.
Loc. et expr.
D'après nature. À partir du réel, du modèle. Vers la rue du Renard, du côté de ces bons endroits où nous allions dessiner d'après nature (Flaub.,Corresp., 1845, p.41).
Sur (la) nature. À partir du réel, du modèle. Je vois un bel enfant qui n'est pas rose comme le Mars de M. Landi; qui n'est pas étiolé comme l'Adonis de M. Prudhon, dont le ton de couleur rappelle l'Amour du Caravage, et paraît avoir été étudié sur la nature (Jouy,Hermite,t.3, 1813, p.335).Nul abstracteur de quintessence, réfugié dans son atelier, matelassé de mépris pour les apparences, n'a atteint à l'invention plastique de Van Gogh, peignant exclusivement sur nature (Lhote,Peint. d'abord,1942, p.136).
Aussi, moins, plus ... que nature. Aussi, moins, plus... que ne l'est le modèle, le sujet. Ces miroirs qui défigurent à tel point, qu'en s'y regardant on peut se croire ou plus petit ou plus grand que nature (Balzac,Méd. camp.,1833, p.70).P.iron. [Avec des adj. d'évaluation esthétique impliquant la modification du réel par l'artiste] Plus beau, plus vrai que nature. Mon Dieu! peut-on s'amuser à faire laid... plus laid que nature! (Goncourt,R. Mauperin,1864, p.205).L'égotisme littéraire consiste finalement à jouer le rôle de soi; à se faire un peu plus nature que nature (Valéry,Variété II,1929, p.96).
Vieilli. (Tableau, statue) de demi-nature, de quart de nature, etc. (Tableau, statue) qui représente la réalité réduite à la moitié, au quart, etc. Mille cierges allumés sur le maître autel éclairent deux statues de cette Notre-Dame: l'une de demi-nature (...) l'autre, de dix-huit pouces environ (Dusaulx,Voy. Barège,t.2, 1796, p.43).Vers cent mille francs, le portrait serait un sixième de nature. −Vers deux cent mille francs, un quart de nature (Taine,Notes Paris,1867, p.170).
b) Vieilli. Réalité choisie en vertu de sa valeur significative ou à partir de conventions esthétiques. Synon. modèle, sujet.On craint de dégrader son burin, sa plume ou son pinceau, en descendant à la peinture des scènes populaires; et abusant du principe que les arts ne doivent se proposer que l'imitation d'une nature choisie, on s'expose à retomber dans l'afféterie et dans le maniéré (JouyHermite,t.3, 1813p. 26):
9. Cette pureté de trait que l'on vante tant dans les ouvrages de Raphaël et des Grecs, dépend absolument du beau genre des natures qu'ils choisissaient. Elle eût été impraticable pour eux-mêmes, s'ils n'avaient eu à exprimer que des natures communes. Ainsi, il ne faut pas confondre le trait pur avec le trait exact. Rubens est un très-grand dessinateur; mais la qualité des objets qu'il avait à peindre, leurs formes inégales et raboteuses, leurs gros contours, exigeaient qu'il donnât à son dessin une terminaison plutôt bossante, si je puis ainsi parler, que finie et arrêtée en ligne élégante et précise. Joubert, Pensées, 1824, p.17.
Belle nature. [Idéal valorisant l'art antique élaboré dans la 1remoitié du 17es. par les milieux romains en réaction contre la peinture de l'époque, et devenu un concept-clé de la critique esthétique en France aux 17eet 18esiècles (d'apr. B. Tocanne, L'Idée de nature en France dans la seconde moitié du 17es., Presses univ. de Lille, 1978, II, pp.752-755)] On pourrait comparer les proportions du corps des hommes de différentes nations, avec celles que suivent les dessinateurs, pour représenter la belle nature, en divisant la hauteur du corps en huit parties (Voy. La Pérouse,t.1, 1797, p.166).
Nature morte*.
2. Représentation du réel par les moyens spécifiques de l'art. L'auteur, dans son oeuvre, doit être comme Dieu dans l'univers, présent partout, et visible nulle part. L'art étant une seconde nature, le créateur de cette nature-là doit agir par des procédés analogues. Que l'on sente dans tous les atomes, à tous les aspects, une impassibilité cachée et infinie (Flaub., Corresp., 1852, p.62):
10. En dépit des insolentes théories modernes, défendant, ici le réalisme intégral, là l'abstraction pure (deux visages d'un Janus anti-pictural), l'artiste complet ne poursuit qu'un but: rendre ses symboles plastiques transparents, de façon qu'on perçoive, derrière leurs irisations, −inespérée, et comme silhouettée −la réalité. Cette «nature» transposée, le public ne consent à la reconnaître qu'après un siècle, ou deux. Lhote, Peint. d'abord, 1942, p.7.
3. Vieilli. Caractère de sincérité, de vérité. Sa naïveté [du conteur] pleine de sens, de force, et son ton de nature, supérieur aux règles de l'art, nous charmaient tellement, que nous resserrions notre cercle pour ne rien perdre de ses contes (Dusaulx, Voy. Barège, t.2, 1796, p.183).La littérature du dix-huitième siècle, à part quelques beaux génies qui la dominent, cette littérature, placée entre la littérature classique du dix-septième siècle et la littérature romantique du dix-neuvième, sans manquer de naturel, manque de nature (Chateaubr., Mém., t.1, 1848, p.477).
E. −
1. HIST. DE LA PHILOS. Principe (caché, immatériel) de production et de génération. Dans les philosophies du Moyen Âge, comme dans celles de l'Antiquité, un être naturel est une substance active, dont l'essence cause les opérations et les détermine avec nécessité. La nature n'est que l'ensemble des natures; ses attributs restent donc la fécondité et la nécessité (Gilson, Espr. philos. médiév., 1932, p.162).Sans être des choses en soi ou des substances comme les éléments, ces agrégats [d'atomes], ces «formes» douent les corps auxquels elles adhèrent de véritables propriétés spécifiques: Épicure les nomme «natures» (J. Vuillemin, Essai signif. mort, 1949, p.44).
2. Nature des choses. Ordre nécessaire ou gouverné par une finalité. Synon. nécessité, providence.Il est dans la nature des choses que la marche de la Raison soit lentement progressive (Robesp., Discours, Guerre, t.8, 1792, p.81).Après cela, je ne puis croire que la nature des choses permette qu'un gouvernement aussi monstrueux subsiste (Staël, Lettres div., 1794, p.613):
11. ... [une] condition servile qui résulte, selon le philosophe [Platon], d'une inégalité qui est dans la nature des choses. A. Bonnard, De l'Iliade au Parthénon, Paris, Union gén. d'éd., 1968 [1954], p.171.
II. − Nature humaine ou absol. nature (p.oppos. à civilisation, culture)
A. −
1. Ensemble des caractères qui définissent l'homme, considérés comme innés, comme indépendants à la fois des déterminations biologiques et des déterminations sociales, historiques, culturelles. Un roi est un homme ayant les facultés et les besoins de la nature humaine: un roi qui se voit ou qui pense à soi ne se voit pas roi mais homme qui cherche à se connaître (Maine de Biran, Journal, 1817, p.75).Le thème de la nature humaine n'avait cessé de susciter l'interrogation, de Socrate à Montaigne et Pascal, mais c'était pour y découvrir l'inconnu, l'incertitude, la contradiction, l'erreur (...). Lorsqu'enfin, avec Jean-Jacques, la nature humaine émergea comme plénitude, vertu, vérité, bonté, ce fut aussitôt pour nous en reconnaître exilés et la déplorer comme un paradis irrémédiablement perdu. Et il fallut peu, par la suite, pour découvrir que ce paradis était aussi imaginaire que l'autre (E. Morin, Le Paradigme perdu: la nature humaine, Paris, éd. du Seuil, 1973, p.20):
12. La civilisation, la vie est une chose apprise et inventée (...). Les hommes après quelques années de paix oublient trop cette vérité; ils arrivent à croire que la culture est chose innée, qu'elle est la même chose que la nature. La sauvagerie est toujours là à deux pas, et, dès qu'on lâche pied, elle recommence. Sainte-Beuve, Cahiers, 1869, p.99.
2. Principe normatif découlant de l'essence humaine. Que toutes ces sectes hypocrites qui s'élèvent au milieu de vous cessent de vouloir étouffer, par leurs croassements impies, la voix sacrée de la Nature et les cris touchans de l'humanité (Robesp., Discours, Guerre, t.8, 1792, p.147).Le goût du morbide, l'attirance vers les spectacles et les actes qui heurtent la saine nature (Druon, Gdes fam., t.2, 1948, p.16):
13. [L'époque moderne] fut celle des massacres religieux, des guerres sacrées, de la dépopulation du Nouveau Monde. Elle y vit rétablir l'ancien esclavage, mais plus barbare, plus fécond en crimes contre la Nature... Condorcet, Esq. tabl. hist., 1794, p.134.
Contre-nature*; cf. aussi infra IV B.
Sensibilité morale, attachement fondé sur la parenté. Roger: C'est [à] regret que je vous afflige, mais je te l'ai déjà dit, je ne puis quitter mes camarades... Un serment solemnel m'attache à eux... Clémence: Eh quoi? Tu pourrois être insensible au cri de la nature?... Victor: Ah, Roger! rends-moi mon père, je le sens à mon coeur; il m'est impossible d'étouffer la voix qui me parle pour toi (Guilbert de Pixér., Victor, 1798, iii, 10, p.50).
3. État de nature. État de l'homme antérieur à la constitution de la société. Ainsi il n'y eut rien de parfait en législation que la loi naturelle; en religion que la religion naturelle; en droit que le droit naturel; en société que la société naturelle; et même comme si la famille n'étoit pas une société ou que l'homme pût naître et vivre sans famille, on opposa l'état de pure nature à tout état de société. C'est là la grande erreur de J-J Rousseau, et même de l'Esprit des lois (Bonald,Législ. primit., t.1, 1802, p.172).
P.euphém. et p.plaisant. Être dans l'état de nature. Être nu. (Dict. xixeet xxes.). Synon. in naturalibus.
B. − Dispositions psycho-physiologiques dominantes qui déterminent la personnalité d'un individu. Synon. complexion, naturel, tempérament.Avoir, être d'une nature agressive, aimante, gaie, maladive, morbide, ouverte, passive, passionnée, renfermée, sanguine, sournoise, vicieuse. Il est des défauts de complexion, qui s'opposent au libre développement de l'âme: il est des natures sombres et grossières, où pénètre mal le rayon de Dieu (Ozanam, Philos. Dante, 1838, p.130).Je ne savais pas qu'une nature exagérément primesautière n'excluait en lui ni la sincérité ni la droiture (Billy, Introïbo, 1939, p.97).
Seconde nature. Trait de caractère acquis modifiant la personnalité originelle. La tristesse qui depuis un an est devenue ma seconde nature (Hugo, Lettres fiancée, 1821, p.43).J'y ai été soumis [à l'École des Chartes] à une certaine méthode de travail, à certaine discipline intellectuelle et morale, qui me sont devenues une seconde nature (Martin du G., Souv. autobiogr., 1955, p.li).
[P.méton.] La personne elle-même. Quelqu'une de ces natures riches et embrasées, telles qu'en produit encore Naples ou la ville aux gondoles (Toepffer, Nouv. genev., 1839, p.464).Sa marche assurée, sa taille souple, ses narines roses et ouvertes, ses grands yeux légèrement cerclés de bleu, dénotaient une de ces natures ardentes qui répandent autour d'elles un parfum de volupté (Dumas fils, Dame Cam., 1848, p.89).Oh! cette Julia!... Quelle femme! hein?... Quelle nature! (Pailleron, Âge ingrat, 1879, i, 6, p.26):
14. Je lis les conversations de Goethe par Eckermann, et je trouve que l'écrivain allemand divisait l'humanité en deux classes, les poupées jouant un rôle appris, et les natures [it. ds le texte], le petit groupe d'êtres tels que Dieu les a créés. Goncourt, Journal, 1892, p.286.
Petite nature. Personne faible, physiquement ou moralement. Visiblement, elle retrouvait en lui quelque chose de son propre goût du plaisir, mais le tempérament, hélas! est celui de sa mère. «Ta mère! Une si petite nature!» (Bernanos, Mauv. rêve, 1948, p.902).
De nature, par nature, loc. adv. Synon. par tempérament.Je conteste fort peu: j'aime la liberté par instinct, par nature (Courier, Pamphlets pol., Réponses aux anon., 1, 1822, p.148).Brave autant qu'Achille, la bravoure d'Hector est cependant d'une tout autre qualité. Non bravoure de nature, mais de raison. Courage conquis sur sa propre nature, discipline qu'il s'est imposée (A. Bonnard, De l'Iliade au Parthénon, Paris, Union gén. d'éd., 1968 [1954], p.68).
III. − [La nature d'une chose, d'un être]
A. − Ensemble des qualités, des propriétés qui définissent un être, un phénomène ou une chose concrète, qui lui confèrent son identité. Comment, en effet, connaître les causes qui procurent l'opulence aux nations, quand on n'a pas des idées claires sur la nature des richesses elles-mêmes? (Say, Écon. pol., 1832, p.28).C'est la nature de la femme d'être volontiers regardée, palpée, curieusement observée, c'est-à-dire adorée (Michelet, Journal, 1857, p.336).
La nature + adj. + compl. en de.La nature divine de Jésus-Christ. Par sa nature spongieuse (...) [la couche d'humus] filtre et retient l'eau des pluies, en ralentit l'évaporation (Pesquidoux, Livre raison, 1928, p.12).
Par nature, de nature (plus rare), loc. adv. En raison des propriétés de la chose, de l'être dont il est question. Le pouvoir n'étant qu'un homme semblable en tout aux autres hommes, sans aucun privilège, aucune supériorité de nature (Lamennaisds L'Avenir, 1831, p.179).Toute définition est par nature partielle: elle est restrictive (J. Bousquet, Trad. du silence, 1936, p.101).L'unité de mesure de son style [de J. Renard], c'est la phrase. D'une phrase à l'autre il n'y a ni mouvement, ni passage. Il n'y a rien: le vide. Il est voué par nature au discontinu (Sartre, Carnets de la drôle de guerre, nov. 1939-mars 1940, Paris, Gallimard, 1983, p.420).
[Avec art. poss.] Les biens sont immeubles, ou par leur nature, ou par leur destination, ou par l'objet auquel ils s'appliquent (Code civil, 1804, art. 517, p.95).Le pouvoir, étant répressif de sa nature, a besoin d'une grande concentration pour opposer une résistance égale au mouvement populaire (Balzac, Méd. camp., 1833, p.157).
Être de nature à, loc. verb. Être susceptible d'avoir pour effet de. Cette philosophie pouvait être vraie, mais elle était de nature à faire désirer la mort (Stendhal, Rouge et Noir, 1830, p.499).Comprises et appliquées comme elles devaient l'être, ces mesures étaient de nature à arrêter net toute menace d'épidémie (Camus, Peste, 1947, p.1258).
PHILOS., THÉOL. Essence. L'origine de la pensée a occupé tous les véritables philosophes. Y a-t-il deux natures dans l'homme? S'il n'y en a qu'une, est-ce l'âme ou la matière? (Staël, Allemagne, t.4, 1810, p.15).Le Christ s'avance, sous les traits d'un griffon, dont le corps terrestre et les ailes aériennes rappellent l'union hypostatique des deux natures humaine et divine (Ozanam, Philos. Dante, 1838, p.152).
GRAMM. La nature des constituants de la phrase est différente de leur fonction (...). Un groupe du nom peut avoir des fonctions différentes; il peut être sujet (mon père) ou objet (sa lecture) dans la phrase: mon père achève sa lecture (J. Dubois, R. Lagane,La Nouv. gramm. du fr.,Paris, Larousse, 1973, p.19).
B. − Synon. de type, sorte.Les modifications que les mêmes natures de terrain ne manquent point de faire subir à l'homme (Cabanis, Rapp. phys. et mor., t.2, 1808, p.162).Ces trois natures de dépenses formaient un total mensuel de soixante-six francs (Balzac, Cous. Pons, 1847, p.48).Les natures d'activité et les pouvoirs de négociation des entreprises (Perroux, Écon. XXes., 1964, p.400):
15. Il y a donc plusieurs natures d'espérances, plusieurs sortes de charités, diverses essences de foi? Flaub., Tentation, 1849, p.345.
[Fréq. dans un compl. introd. par de] Des obstacles de toutes natures; un tissu de même nature. On n'a distingué jusqu'à présent dans les organisations politiques, que trois pouvoirs. J'en démêle cinq, de natures diverses, dans une monarchie constitutionnelle (Constant, Princ. pol., 1815, p.19).
Rem. Le sentiment que ces expr. sont grammaticalisées entraîne parfois le sing.: Dans ces expéditions de toute nature, j'étais souvent à l'avant-garde (Latouche, L'Héritier, Lettres amans, 1821, p.30).
C. − En nature, loc. adv.
1. DR. [En parlant d'un bien meuble] Dans sa réalité physique (s'oppose à en valeur, en argent). Ils rendront la valeur estimative de ceux des meubles qu'ils ne pourraient représenter en nature (Code civil, 1804, art. 453, p.84).Mais M. de Capmas étant convenu avec vous que vous auriez deux lits de plume et ceux-ci étant les seuls existants dans notre mobilier, je vous les restituerai en nature ou en argent (Lamart., Corresp., 1831, p.133).Un négociant possède un magasin entier rempli d'indigo qui ne peut servir en nature, ni à nourrir, ni à vêtir, et qui n'en est pas moins une richesse (Say, Écon. pol., 1832, p.257).
Payer en nature. Payer avec des produits ou avec du travail. Scapin battra la caisse devant la porte promettant un spectacle extraordinaire et mirifique aux badauds ébahis avec cette facilité de payer leur place en nature (Gautier, Fracasse, 1863, p.161).P.plaisant. [En parlant d'une femme] Accorder ses faveurs en échange d'un service.
2. [En parlant de plantes, de produits] Vieilli. En l'état, sans transformation. Nous aborderons la droguerie en la révolutionnant, en vendant ses produits concentrés au lieu de les vendre en nature (Balzac, C. Birotteau, 1837, p.92).La matière glycogène serait-elle portée en nature dans tous les organes, seulement les uns la conserveraient, les autres la changeraient en sucre? (Cl. Bernard, Notes, 1860, p.167).
3. Synon. de en réalité, en vrai (p.oppos. à sous une forme représentée).Au théâtre, tu entends parler du plaisir de bien faire: ici tu vas l'éprouver et le sentir; tu vas trouver en nature la misere, la générosité et la reconnoissance (Saint-Martin, Homme désir, 1790, p.172):
16. C'est alors que je suis tombé pile sur ce livre (...) et que je l'ai ouvert sur le Martyre de Saint Maurice, qu'on voit ici mieux qu'en nature, ce tableau que j'avais longuement contemplé à l'Escorial. Aragon, Blanche ou l'oubli, Paris, Laffont, 1974 [1967], p.88.
Synon. de en chair et en os.Comment d'ailleurs ne songerais-je pas à votre jolie mine, puisque je l'ai là, devant moi, clouée sur mon armoire aux pipes! Je voudrais bien la voir en nature (Flaub., Corresp., 1867, p.336).
IV. − En emploi adj.
A. −
1. Qui est conforme à la réalité. Le Christ, mitré, rouge, à barbe fourchue, byzantin par l'immobilité, d'un idéal profond, terrible plus que noble, est pourtant réel, nature, s'il en fut jamais (Michelet, Chemins Europe, 1874, p.261).
En emploi adv. Il paraît que les Martial de La Touche y sont [dans un livre] peints nature (Benoit, Atlant., 1919, p.16).
Grandeur nature. V. grandeur I B 1.
P.méton. Banal, trivial. Tu ne sens pas que (...) tous ces personnages-là sont légers comme des rhinocéros, qu'ils parlent pour ne rien dire et que c'est trop nature? (Flaub., Corresp., 1858, p.295).Leverdet: Balbine amoureuse de ce gandin, que c'est nature! (Dumas fils, Ami femmes, 1864, v, 3, p.189).
2. [En parlant d'une pers. ou d'un comportement] Spontané. Réjane est admirable par son dramatique, tout simple, tout nature (Goncourt, Journal, 1888, p.866).
3. [En parlant d'aliments] Sans accompagnement, sans préparation particulière. Steak, yaourt nature. Le dîner (...) était composé d'un bouillon épaissi par des îles réunies de semoule, d'un boeuf nature, d'un gigot aux haricots (Huysmans, Oblat, t.1, 1903, p.58).Le mari, grand blessé de guerre, commandait un café nature, sa femme un café rhum (Dabit, Hôtel Nord, 1929, p.41).
B. − Contre nature. Qui n'est pas naturel (dans les diverses accept. normatives de l'adj.). Des amours contre nature. Quand Rome eut des vertus, ce furent des vertus contre nature. Le premier Brutus égorge ses fils, et le second assassine son père (Chateaubr., Génie, t.2, 1803, p.578).Cette interpolation [du Richard III de Shakespeare] est tout à fait de mauvais goût et contre nature (Delécluze, Journal, 1828, p.492).Est-il possible que des hommes se tuent pour une cuisinière! C'est tout à fait contre nature (Erckm.-Chatr., Ami Fritz, 1864, p.146).V. aussi contre-nature*.
V. − En emploi adv., rare, pop. Synon. de naturellement (v. ce mot).Seulement ça ne me dit pas où qu'turbine mon homme −Nature (F. Carco, Jésus-la-Caille, Paris, Le Livre de poche, 1914, pp.56-57).Alors c'est sur lui que Sulphart passa sa rage: −nature, toi tu t'en fous, bouseux, t'as pas soif. C'est pas dans l'usage de boire quand on est aux champs (Dorgelès, Croix de bois, 1919, p.233).−Je vous écoute, inspecteur: je vous serais seulement obligé de me dire ce que j'ai à voir dans l'affaire dont vous me parlez... −Oh, nature! Vous ferai pas griller. Simple. Savez-vous que la femme du professeur Beurdeley a été assassinée? (Aragon, Beaux quart., 1936, p.435).
REM.
Naturopathe, subst.,naturopathie, subst. fém.V. -pathe, -pathie.
Prononc. et Orth.: [naty:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. 1. 1119 «force active qui a établi et maintient l'ordre de l'univers» (Philippe de Thaon, Comput, éd. E. Mall, 389); 1580 les lois de nature (Montaigne, Essais, I, 33, éd. P.Villey, I, 218); 1668 payer le tribut à la nature (La Fontaine, Fables, V, XII, Les Médecins, éd. A. Régnier, I, 402); 1673 laisser faire la nature (Molière, Malade Imaginaire, III, 3); 2. 1426 «organisation particulière de chacun des êtres vivants, mouvement qui le porte vers les choses nécessaires à sa conservation» (Alain Chartier, Le Quadrilogue invectif, éd. E. Droz, 16, 22); 3. 1535 contre* nature; 4. 1580 «faculté innée qui rend l'homme capable de discerner le bien et le mal» (Montaigne, op. cit., I, 16, 70); 5. 1584 «ensemble du monde, des êtres et des choses, univers en tant qu'ordonné et régi par les lois» (Jacques de Romien, Palinodies ds Satires françaises du 16es., II, 89); d'où 1690 «opérations, productions de la nature (par opposition à celles de la civilisation)» (Fur.); 1696 «le monde physique» (La Bruyère, Des Jugements, 110, éd. G. Servois, III, 123); 6. 1580 «la nature considérée comme modèle des arts» (B. Palissy, Disc. admirables, p.194 ds IGLF); 1663 d'après nature (Molière, Critique de l'École des Femmes, VI, éd. R. Bray, 2, p.329); 1671 plus grand, plus petit que nature (Pomey); 1763 la nature inanimée (Bachaumont, Mém., t.1, p.104); 7. 1734 en nature «en objets réels, dans un échange» (Dubos, Hist. mon franc., 1, p.108). II. 1. a) 1remoitié du xiies. «ensemble des caractères, des propriétés qui définissent les objets» (Lapidaire de Marbode ds Anglo-Norman Lapidaries, éd. P.Studer et J. Evans, p.48, 496); b) ca 1165 «essences, attributs propres à un être» (Eneas, éd. Salverda de Grave, 436); spéc. xiiies. nature humaine (Isopet de Lyon, 1669 ds T.-L.); 1755 la nature animale (Mirabeau, Ami Hommes, t.1, p.14); 1761 nature végétale (Rousseau, Nouv. Héloïse, t.3, p.229); 2. ca 1170 «disposition, tendance que l'être apporte en naissant» par nature (Chrétien de Troies, Roman de Perceval, éd. Lecoy, 241); d'où a) ca 1480 «complexion, tempérament de chaque individu» (Mistere du Viel Testament, éd. J. de Rothschild, 43144); b) 1559 «la personne elle-même» (Amyot, Agésilas, 11 ds Littré); 3. début du xiiies. «constitution du corps humain, principe de vie qui l'anime et le soutient» (Li Epistle S. Bernart a Mont Deu, éd. V. Honemann, p.244); 1690 forcer nature (Fur.); 4. 1607 «affections naturelles de l'homme qui ont pour objet des personnes auxquelles il est uni par les liens du sang» (E. Pasquier, Recherches, V, 3 ds Gdf. Compl.). III. 1560 théol. «état naturel de l'homme (par opposition à la grâce)» (Bible, éd. A. Rebul, p.15 vod'apr. FEW t.7, p.46b); 1690 état de nature «état de l'homme non régénéré par le baptême» (Fur.); 1738 le pur état de nature (Argens, Lettres Juives, t.3, p.149); 1761 l'homme de la nature «homme tel que la nature le fait» (Rousseau, op. cit., t.4, p.144). IV. Emploi adj. 1. 1808, 10 déc. «conforme à la nature» c'est nature (L'Ambigu, t.23, p.473 ds R. Philol. fr. t.20, p.75); 1836 (Stendhal, L. Leuwen, t.2, p.364: ceci est moitié nature, moitié comédie); 2. 1860 «spontané» (Michelet, Journal, p.524: La dernière fut très spontanée, toute naïve et toute nature); 3. 1865 «au naturel» un boeuf-nature (Vallès, Réfract., p.11). V. Emploi adv. 1914 (Carco, loc. cit.). Empr. au lat. natura «le fait de la naissance, état naturel et constitutif des choses, tempérament, caractère, cours des choses». Fréq. abs. littér.: 29921. Fréq. rel. littér.: xixes.: a)62436, b) 37771; xxes.: a) 29876, b) 35766. Bbg. Ehrard (J.). L'Idée de nature en France dans la première moitié du 18es. Paris, 1963, passim. _ Gohin 1903, p.297, 338. _ Gritti (J.). La Notion de nature chez Bonald... Cah. Lexicol. 1969, no14, pp.26-32. _ Lenoble (R.). Hist. de l'idée de nature. Paris, 1969, pp.217-238. _ Mauzi (R.). L'Idée du bonheur au xviiies. Paris, 1965, pp.559-570. _ Merleau-Ponty (M.). Résumés de cours. Collège de France 1952-1960. Paris, 1968, pp.91-137; 171-180. _ Tocanne (B.). L'Idée de nature en France dans la seconde moitié du xviies. Lille, 1978, 1072 p.(Thèse. Paris IV. 1975. 2 vol.).

Wiktionnaire

Adjectif - français

nature \na.tyʁ\ masculin et féminin identiques

  1. Qui est spontané, sans fard, direct, dans son comportement.
    • Élevée sans mère depuis l’âge de douze ans, j’étais très simple, très saine, très « nature » — (Léon Frapié, La maternelle (1904), Librairie Universelle, 1908, page 1)
    • Mais elle reste nature. Ses nichons débordent. Ses fesses sont comme la houle. On ne voit qu’elle. On n’entend qu’Elle. Nine. — (Victor Méric, Les Compagnons de l’Escopette, Éditions de l’Épi, Paris, 1930, page 189)
    • Les gens nature qui suivent leur nature je n’aime pas ça, les gens sincères, les gens : merci pour votre sincérité Mathilde Seigner. Je ne peux même pas en parler. — (Christine Angot, La peur du lendemain, nouvelle, supplément au magazine « Elle », 2000, page 28.)
  2. (Cuisine) Non assaisonné. — Note d’usage : Il est dans ce sens invariable en genre et en nombre.
    • Bœuf nature : Bœuf simplement bouilli.
    • Riz nature : Riz sans sauce.

Nom commun - français

nature \na.tyʁ\ féminin

  1. Ensemble des êtres et des choses, monde, univers. Ensemble en tant qu’ordonné et régi par des lois.
    • Nous sommes si éloignés de connaître tous les agens [sic] de la nature, et leurs divers modes d’action ; qu’il ne serait pas philosophique de nier les phénomènes, uniquement parce qu’ils sont inexplicables dans l’état actuel de nos connaissances. — (Pierre-Simon de Laplace, Essai philosophique sur les probabilités, Mme Ve Courcier, Paris, 1814 (2e édition))
    • Vue de loin, la nature semble harmonieuse. Vue de près, on y observe que les plantes cherchent à s’étouffer les unes les autres et que les animaux utilisent la prédation et le parasitisme. — (« L’Insoutenable Légèreté du darwinisme », dans Le Québec sceptique, no 60, été 2006, pp. 40–47)
    • Rainie adorait ces montagnes. […]. Elle pensait que la nature se devait d'être grandiose, une présence suffisamment majestueuse pour faire trembler dans leurs bottes les simples mortels. — (Lisa Gardner, Disparue, traduit de l'américain par Cécile Deniard, Éditions Albin Michel, 2008, chap. 10)
  2. (Par personnification) Puissance, force active et créatrice.
    • Ces malfaiteurs littéraires voudraient persuader de tels hommes qu’ils n’ont pas besoin d’excuse et que leur conduite se conforme au dictamen de la nature. — (Abbé Paul Buysse, Vers la Foi catholique : L’Église de Jésus, 1926, pp. 188-189)
    • La nature ne fait rien en vain.
    • La nature agit, opère par les voies les plus simples et les plus courtes.
    • La nature est admirable jusque dans ses moindres ouvrages.
    • Les jeux, les caprices de la nature.
  3. Campagne avec ses aspects divers, mer, montagnes, bois, prés, rivières.
    • Les spectacles de la nature, le sentiment de la nature.
    • La nature étale ici toute sa magnificence.
    • Les harmonies de la nature.
    1. (En particulier) Productions qui ne sont pas de la main de l’homme.
      • L’art perfectionne la nature, ajoute à la nature.
      • Dans ce magnifique jardin, l’art l’emporte sur la nature.
      • Ma solution est grossière mais elle est à la mesure de l’urgence : arrêtons un moment de parler d’écologie, de nature, de salut de la planète, de protection de la biosphère. Pourquoi ? Parce que cela renvoie toujours à quelque chose d’extérieur, quelque chose que l’on considère comme à travers une vitre, qui nous concerne peut-être, mais à la marge. Vous aurez remarqué qu’il en est tout autrement dès qu’on parle de territoire.— (Bruno Latour, propos recueillis par « Il faut faire coïncider la notion de territoire avec celle de subsistance », Le Monde, 23 juillet 2018)
  4. Essence d’un être ou d’une chose avec les attributs physiques ou moraux qui lui sont propres.
    • Aussi à Lima, tous les étrangers vont-ils à l’église, non pour entendre chanter aux moines l’office divin, mais pour admirer, sous leur costume national, ces femmes d’une nature à part. — (Flora Tristan, Les Femmes de Lima, dans Revue de Paris, tome 32, 1836)
    • « Nous ne connaissons rien, dit le baron de Bielfeld, nous ne connaissons rien de la nature ou de l’essence de Dieu ; — pour savoir ce qu’il est, il faut être Dieu même. » — (Edgar Poe, Eureka, 1848, traduction de Charles Baudelaire, 1864)
    • Mon Dieu ! des mœurs du temps mettons-nous moins en peine,
      Et faisons un peu grâce à la nature humaine :
      Ne l’examinons point dans la grande rigueur,
      Et voyons ses défauts avec quelque douceur.
      — (Molière, Le Misanthrope, I, scène 1, 1666)
    • La nature humaine n’est point stationnaire et, chaque jour, elle apporte un contingent nouveau de découvertes plus ou moins sensationnelles. — (Chanoine Kir, Le Problème religieux à la portée de tout le monde, imprimerie des Orphelins d’Auteuil, Paris, 1923, réédition de 1950, p. 19)
    • La nature de l’aimant est d’attirer le fer.
    1. Complexion, tempérament, disposition, tendance de chaque individu. Par extension, il peut se dire, dans la même acception, des animaux.
      • J’avais pour invité, dans un bar de Montmartre, le chasseur d’une boîte de nuit qui, sous son beau costume, abritait une nature inquiète. — (Francis Carco, Images cachées, Éditions Albin Michel, Paris, 1928 ; Préface de la 3e édition de 1929)
      • Lui non plus n’aurait pas voulu choquer Jim par son manque de délicatesse, mais sa nature brutale subitement l’emportait. — (Francis Carco, L’Homme de minuit, Éditions Albin Michel, Paris, 1938)
      • Comment peut-on accorder de l’importance au discours surréaliste du mouvement woke qui est complètement déconnecté de la nature humaine intrinsèque? La peur de passer au tribunal d’inquisition de cette religion le ferait-il trembler? — (Guy Perkins, Plumes de cheval, Le Journal de Québec, 11 février 2021)
      • Il est de nature bilieuse, lymphatique.
      • Une nature heureuse, indolente, perverse, dépravée.
      • C’est une belle nature. — Il est triste, il est gai de nature.
      • Le singe est malin et imitateur de sa nature.
      • De par sa nature, le chien est ami de l’homme.
      • Un mot de nature : Un mot qui révèle le caractère d’un individu.
      • Le « sans dot » d’Harpagon est un mot de nature.
    2. (Figuré) Faculté innée qui rend l’homme capable de discerner le bien et le mal.
      • Aussi l’injustice est-elle le défaut capital des natures féminines. Cela vient du peu de bon sens et de réflexion que nous avons signalé […] — (Arthur Schopenhauer, Essai sur les femmes, dans Pensées & Fragments, traduction par J. Bourdeau, Félix Alcan, éditeur, 1900 (16e éd.))
      • Il faut se secourir les uns les autres, c’est la loi de la nature.
      • Cette action, ce sentiment est conforme, est contraire à la nature.
  5. Éléments constitutifs, propriété d’un objet matériel.
    • Le carbone imbrûlé dépend de la nature du combustible et de la mise en œuvre de la combustion. — (François Audibert, Les Huiles usagées : reraffinage et valorisation énergétique, TECHNIP, 2003, page 194)
    • La nature d’un terrain, du sol, d’une plante.
  6. Instinct de chaque être animé ; mouvement qui le porte vers les choses nécessaires à sa conservation.
    • Fulk Ephrinell s’entretient avec miss Horatia Bluett, et je comprends qu’il y ait eu rapprochement entre ces deux natures si parfaitement anglo-saxonnes. — (Jules Verne, Claudius Bombarnac, chapitre IV, J. Hetzel et Cie, Paris, 1892)
    • Chaque animal a sa nature particulière.
    • Chaque animal obéit à sa nature, suit l’instinct de sa nature.
    • On peut améliorer, corriger sa nature.
    1. (En particulier) Principe de vie qui anime et soutient le corps.
      • Ce médecin a pour système de laisser agir la nature.
      • Il y a des maladies où il faut abandonner la nature à elle-même.
      • Les forces de la nature ont un terme.
  7. (Philosophie, Théologie) État originel de l’homme, par opposition à l’état de grâce ou l’état de l’homme tel qu’on le suppose antérieurement à toute civilisation.
    • La nature corrompue.
    • La nature déchue et rétablie par Jésus-Christ.
    • La nature fragile.
    • De l’état de nature, le baptême nous fait passer à l’état de grâce. Dans ce sens, la théologie catholique oppose aussi nature à miracle.
    • La loi de nature : Par opposition à l’ancienne loi et à la Loi de grâce.
    • Jean-Jacques Rousseau imagine un chimérique état de nature où l’homme aurait été parfaitement heureux et bon.
  8. Modèle, soit physique, soit moral, des arts d’imitation.
    • Observer la nature.
    • Prendre la nature pour guide.
    • Cet auteur, ce peintre, ce comédien s’éloigne, s’écarte de la nature.
    • Étudier la nature.
    1. (Art) Ce que l’artiste a sous les yeux pour l’imiter.
      • Dessiner, peindre, modeler d’après nature.
      • Un paysage fait d’après nature.
      • Un tableau de nature morte.
      • Figures plus grandes, plus petites que nature : Figures qui ont des proportions plus grandes, plus petites que les proportions naturelles.
      • Figures de demi-nature : Figures qui n’ont que la moitié des proportions naturelles.
  9. Sorte ; espèce.
    • On n’a jamais vu d’affaires de cette nature.
    • La nature d’un événement.
    • On ne sait que répondre à une demande de cette nature.
    • On ne peut tolérer une réponse de cette nature.
    • Une nouvelle de nature inquiétante.
    • Des affaires de nature suspecte.
  10. (Vieilli) Organes sexuels chez les femelles des animaux.
  11. (Grammaire) Classe lexicale d’un mot, tel que les noms, les verbes, les adjectifs, etc.
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

NATURE. n. f.
L'ensemble des êtres et des choses. Dieu est l'auteur, le maître de la nature. Toute la nature annonce, révèle, publie qu'il y a un Dieu. Il désigne aussi cet Ensemble en tant qu'ordonné et régi par des lois. Pénétrer dans les secrets de la nature. Les lois de la nature. Les mystères de la nature. Les merveilles de la nature. L'étude de la nature. Lire dans le grand livre de la nature. Il signifie encore, par une sorte de personnification, la Puissance, la force active qui a établi cet ordre. La nature ne fait rien en vain. La nature agit, opère par les voies les plus simples et les plus courtes. La nature est admirable jusque dans ses moindres ouvrages. Les jeux, les caprices de la nature. Il se dit aussi du Monde physique avec ses aspects divers, mer, montagnes, bois, champs, rivières. Les spectacles de la nature, le sentiment de la nature. La nature étale ici toute sa magnificence. Les harmonies de la nature. Il se dit en outre de Ce qui constitue tout être en général. La nature divine. La nature humaine. La nature humaine désigne par extension le Genre humain. Il veut du mal à toute la nature humaine.

NATURE désigne encore l'Essence d'un être ou d'une chose avec les attributs qui lui sont propres. La nature de Dieu est d'être bon. La nature de l'âme est de penser. La nature de la matière consiste dans l'étendue. Il est dans la nature du feu de s'élever. La nature de l'aimant est d'attirer le fer. Il se dit aussi, en parlant des Êtres animés, pour désigner l'Organisation particulière de chacun d'eux, le mouvement qui le porte vers les choses nécessaires à sa conservation. Chaque animal a sa nature particulière. Chaque animal obéit à sa nature, suit l'instinct de sa nature. On peut améliorer, corriger sa nature. Contenter la nature. Forcer la nature. Payer le tribut à la nature, Mourir. Prov., L'habitude est une seconde nature.

NATURE se dit aussi de la Constitution du corps humain, du principe de vie qui l'anime et le soutient. Ce médecin a pour système de laisser agir la nature. Il y a des maladies où il faut abandonner la nature à elle-même. Les forces de la nature ont un terme. Il se dit encore de la Complexion, du tempérament de chaque individu. Il est de nature bilieuse, lymphatique. Il désigne également une Disposition, une tendance que l'être apporte en naissant. Une nature heureuse. Une nature indolente, perverse, dépravée. C'est une belle nature. Il est triste, il est gai de sa nature. Par extension, il peut se dire, dans la même acception, des Animaux. Le singe est malin et imitateur de sa nature. De sa nature, de nature, le chien est ami de l'homme. Un mot de nature, Un mot qui révèle le caractère d'un individu. Le " sans dot " d'Harpagon est un mot de nature.

NATURE se dit, figurément, de la Faculté innée qui rend l'homme capable de discerner le bien et le mal. La nature nous ordonne de ne pas faire à autrui ce que nous ne voudrions pas qui nous fût fait à nous-mêmes. La nature nous donne les premières notions du juste et de l'injuste. Il faut se secourir les uns les autres, c'est la loi de la nature. Cette action, ce sentiment est conforme, est contraire à la nature. La nature se révolte à ce spectacle. Contre nature, Contraire à l'ordre naturel. Un sentiment contre nature. Un vice contre nature. Il se dit particulièrement des Affections naturelles de l'homme, de celles qui ont pour objet les personnes auxquelles on est uni par les liens du sang. Le cri, la voix, les sentiments de la nature. Brutus, en condamnant ses fils sacrifia la nature à l'amour de la patrie. En termes de Théologie, il désigne l'État naturel de l'homme, par opposition à l'État de grâce. La nature corrompue. La nature déchue et rétablie par JÉSUS-CHRIST. La nature fragile. De l'état de nature, le baptême nous fait passer à l'état de grâce. Dans ce sens, la Théologie oppose aussi Nature à Miracle. La loi de nature, par opposition à l'Ancienne loi et à la Loi de grâce. L'état de nature, L'état de l'homme tel qu'on le suppose antérieurement à toute civilisation. Jean-Jacques Rousseau imagine un chimérique état de nature où l'homme aurait été parfaitement heureux et bon.

NATURE se dit souvent des Opérations, des productions de la nature, par opposition à Celles de l'art. L'art perfectionne la nature, ajoute à la nature. Dans ce magnifique jardin, l'art l'emporte sur la nature. Il se dit aussi de la Nature, soit physique, soit morale, considérée comme modèle des arts d'imitation. Observer la nature. Prendre la nature pour guide. Cet auteur, ce peintre, ce comédien s'éloigne, s'écarte de la nature. Étudier la nature. Il se dit particulièrement, dans les arts plastiques, de l'Être ou de la chose que l'artiste a sous les yeux pour l'imiter. Dessiner, peindre, modeler d'après nature. Un paysage fait d'après nature. Un tableau de nature morte ou, par ellipse, Une nature morte. Fig., C'est plus beau que nature se dit familièrement d'un Événement, d'un acte, d'une parole qui dépasse ce qu'on voit, ce qu'on entend ordinairement. Figures plus grandes, plus petites que nature, Figures qui ont des proportions plus grandes, plus petites que les proportions naturelles. Figures de demi-nature, Figures qui n'ont que la moitié des proportions naturelles. En termes de Cuisine, on dit elliptiquement Bœuf nature pour désigner du Bœuf simplement bouilli.

NATURE se dit encore de Certaines choses considérées telles qu'elles sont matériellement, par opposition à l'argent qu'elles peuvent valoir. On lui a laissé le choix de recevoir sa nourriture en argent ou en nature On lui a ordonné de me restituer mes meubles en nature, ou de m'en payer le prix. Payer en nature, Payer avec les productions naturelles du sol. Il y a des rentes, des fermages qui sont payables en nature.

NATURE se dit aussi des Éléments constitutifs d'un objet matériel. La nature d'un terrain, du sol. La nature d'une plante. Il signifie aussi quelquefois Sorte, espèce. On n'a jamais vu d'affaires de cette nature. La nature d'un événement. On ne sait que répondre à une demande de cette nature. On ne peut tolérer une réponse de cette nature. Une nouvelle de nature inquiétante. Des affaires de nature suspecte.

NATURE se dit quelquefois des Parties qui servent à la génération, surtout dans les femelles des animaux.

Littré (1872-1877)

NATURE (na-tu-r') s. f.

Résumé

  • 1° Ensemble de tous les êtres qui composent l'univers.
  • 2° Ordre établi dans l'univers, ou système des lois qui président à l'existence des choses et à la succession des êtres.
  • 3° Sorte de personnification de l'ensemble des lois naturelles, puissance des choses naturelles, force active qui établit et conserve l'ordre naturel.
  • 4° Dans un sens très lâche, l'ensemble des choses qui sont sous les yeux, sous la main de l'homme.
  • 5° Ce qui constitue tout être en général, soit incréé, soit créé.
  • 6° L'essence, les attributs, la condition propre d'un être ou d'une chose.
  • 7° La nature des choses, en général, la nécessité qui résulte de la constitution des choses.
  • 8° Ensemble des propriétés qu'un être vivant tient de sa naissance, de son organisation, de sa conformation primitive, par opposition à celles qu'il peut devoir à l'art.
  • 9° Il se dit, par extension, de ce qui est comparé à une espèce d'être vivant.
  • 10° Nature humaine.
  • 11° La condition de l'homme telle qu'on la suppose antérieurement à toute civilisation.
  • 12° Ce qui appartient d'origine à l'être humain, par opposition à coutume.
  • 13° En théologie, l'état naturel de l'homme, par opposition à l'état de grâce.
  • 14° La constitution du corps vivant, le principe qui le soutient.
  • 15° La complexion, le tempérament de chaque individu.
  • 16° L'ensemble des sentiments innés.
  • 17° Une certaine disposition ou inclination de l'âme.
  • 18° L'ensemble des affections du sang, de la famille.
  • 19° Sorte, espèce.
  • 20° Nature se dit des opérations, des productions de la nature, par opposition à celles de l'art.
  • 21° La nature soit physique, soit morale, considérée comme modèle des arts d'imitation.
  • 22° Particulièrement, en peinture et en sculpture, l'objet réel qu'on se propose de représenter.
  • 23° Les parties qui servent à la génération.
  • 24° État matériel de certaines choses par opposition à l'argent qu'elles peuvent valoir
  • 25° En métallurgie, prendre nature.
  • 26° En musique, chanter par nature.
  • 27° Bœufs de nature.
  • 28° En cuisine, bœuf, côtelette nature.
  • 29° Contre nature.
  • 1Ensemble de tous les êtres qui composent l'univers. Au lieu de cette philosophie spéculative qu'on enseigne dans les écoles, on en peut trouver une pratique, par laquelle, connaissant la force et les actions du feu, de l'eau, de l'air, des astres, des cieux et de tous les autres corps qui nous environnent aussi distinctement que nous connaissons les divers métiers de nos artisans, nous les pourrions employer en même façon à tous les usages auxquels ils sont propres, et ainsi nous rendre comme maîtres et possesseurs de la nature, Descartes, Méth. VI, 2. Que l'homme contemple la nature entière dans sa haute et pleine majesté… que la terre lui apparaisse comme un point… si notre vue s'arrête là, que l'imagination passe outre : elle se lassera plutôt de concevoir que la nature de fournir ; tout ce monde visible n'est qu'un trait imperceptible dans l'ample sein de la nature, Pascal, Pens. I, 1, éd. HAVET. Qu'est-ce que l'homme dans la nature ? un néant à l'égard de l'infini, un tout à l'égard du néant ; un milieu entre rien et tout, Pascal, ib. I, 1. Je regarde de toutes parts, et ne vois partout qu'obscurité ; la nature ne m'offre rien qui ne soit matière de doute et d'inquiétude, Pascal, ib. XIV, 2. Non-seulement parce que je ne me sentirais pas assez fort pour trouver dans la nature de quoi convaincre des athées endurcis, mais encore parce que cette connaissance, sans Jésus-Christ, est inutile et stérile, Pascal, ib. X, 5. C'est une chose étrange qu'ils [les hommes] aient voulu comprendre les principes des choses, et de là arriver jusqu'à connaître tout par une présomption aussi infinie que leur objet ; car il est sans doute qu'on ne peut former ce dessein sans une présomption ou sans une capacité infinie comme la nature, Pascal, ib. I, 1. Il savait parler à chacun selon ses talents… aux voyageurs curieux de ce qu'ils avaient découvert ou dans la nature, ou dans le gouvernement, ou dans le commerce, Bossuet, Louis de Bourbon. Multipliez vos jours, comme les cerfs et les corbeaux, que la fable ou l'histoire de la nature fait vivre durant tant de siècles, Bossuet, Sermons, Mort, 1. L'homme de la nature est le chef et le roi, Boileau, Sat. VIII. Votre nature n'est qu'un mot inventé pour signifier l'universalité des choses, Voltaire, Dialog. XXIX, 2. La nature est le trône extérieur de la magnificence divine, Buffon, Quadrup. t. IV, p. 12. Virgile en de riants vallons A célébré l'agriculture ; Vous, l'abbé, c'est dans les salons Que vous observez la nature, Chénier M. J. Épître à Delille. On ne rencontre point le nom de ses ancêtres [de l'homme sauvage d'Amérique] dans les fastes des empires ; les contemporains de ses aïeux sont de vieux chênes encore debout ; monuments de la nature et non de l'histoire, les tombeaux de ses pères s'élèvent inconnus dans des forêts ignorées, Chateaubriand, Itin. 3e part. Ah ! c'est là qu'entouré d'un rempart de verdure, D'un horizon borné qui suffit à mes vœux, J'aime à fixer mes pas, et, seul dans la nature, à n'entendre que l'onde, à ne voir que les cieux, Lamartine, Méd. I, 6. Mais la nature est là qui t'invite et qui t'aime ; Plonge-toi dans son sein qu'elle t'ouvre toujours ; Quand tout change pour toi, la nature est la même, Et le même soleil se lève sur tes jours, Lamartine, ib. I, 6. Dieu, pour le concevoir, a fait l'intelligence ; Sous la nature enfin découvre son auteur, Lamartine, ib. I, 6. L'impassible nature a déjà tout repris, Hugo, Rayons et ombres, XXXIV.

    Il n'y a rien de meilleur, de plus mauvais, de plus beau, de plus laid dans la nature, dans toute la nature, se dit d'une personne très bonne, très mauvaise, etc.

    La nature inorganique, l'ensemble des substances qui n'ont ni organisation ni vie.

    La nature végétale, l'ensemble des végétaux. Tout ce que vous voyez, c'est la nature végétale et inanimée ; et, quoi qu'on puisse faire, elle laisse toujours une idée de solitude qui attriste, Rousseau, Hél. IV, 11.

    La nature animale, l'ensemble des animaux.

    Système de la nature, titre du grand ouvrage de Linné, où tous les objets de la nature, minéraux, végétaux et animaux, sont classés suivant leurs affinités.

    Le système de la nature de d'Holbach, système d'athéisme et de matérialisme. Il y avait là [dans le système de Spinosa] de la philosophie ; mais je suis forcé de dire que je n'en trouve aucune dans le Système de la nature, Voltaire, Dict. philos. Dieu, 4.

  • 2Ordre établi dans l'univers, ou système des lois qui président à l'existence des choses et à la succession des êtres. Les merveilles de la nature. Les lois de la nature. Il ne faut pas juger la nature selon nous, mais selon elle, Pascal, Pens. XXV, 19. La nature a des perfections pour montrer qu'elle est l'image de Dieu, et des défauts pour montrer qu'elle n'en est que l'image, Pascal, ib. XXIV, 70. Notre âme est jetée dans le corps, où elle trouve nombre, temps, dimension ; elle raisonne là-dessus, et appelle cela nature, nécessité, et ne peut croire autre chose, Pascal, ib. X, 1. Réaumur, dont la main si savante et si sûre A percé tant de fois la nuit de la nature, Voltaire, 4e disc. La nature est le système des lois établies par le créateur pour l'existence des choses et pour la succession des êtres ; la nature n'est point une chose, car cette chose serait tout ; la nature n'est point un être, car cet être serait Dieu ; mais on peut la considérer comme une puissance vive, immense, qui embrasse tout, qui anime tout, et qui, subordonnée à celle du premier être, n'a commencé d'agir que par son ordre, Buffon, Quadrup. t. IV, p. 1. Il faut traduire la nature, comme elle s'offre aux sens ; et son interprète ne doit jamais être son commentateur, J. Sennebier, Ess. sur l'art d'observer, t. II, p. 35, dans POUGENS.
  • 3Sorte de personnification de l'ensemble des lois naturelles, puissance des choses naturelles, force active qui établit et conserve l'ordre naturel. C'est une œuvre où nature a fait tous ses efforts, Malherbe, V, 2. Je dois définir ce que j'entends proprement, lorsque je dis que la nature m'enseigne quelque chose ; car je prends ici la nature en une signification plus resserrée que lorsque je l'appelle un assemblage ou une complexion de toutes les choses que Dieu m'a données, Descartes, Médit. VI, 14. Souvent la nature nous dément, et ne s'assujettit pas à ses propres règles, Pascal, Pens. III, 16. La nature recommence toujours les mêmes choses, les ans, les jours, les heures… ainsi se fait une espèce d'infini et d'éternel, Pascal, ib. XXV, 9. Pourquoi ma durée à cent ans plutôt qu'à mille ? quelle raison a eue la nature de me la donner telle, et de choisir ce nombre plutôt qu'un autre dans l'infinité ? Pascal, ib. XXV, 16 bis. La nature s'imite : une graine jetée en bonne terre produit, Pascal, ib. XXV, 65. Sous le nom de nature, nous entendons une sagesse profonde qui développe avec ordre et selon de justes règles tous les mouvements que nous voyons, Bossuet, Conn. IV, 1. Quoique Dieu et la nature aient fait tous les hommes égaux, en les formant d'une même boue, Bossuet, Gornay. La simplicité d'une vie particulière qui goûte doucement et innocemment ce peu de biens que la nature nous donne, Bossuet, Duch. d'Orl. La nature, cruelle usurière, nous ôte tantôt un sens et tantôt un autre, Bossuet, Bourgoing. Toute la nature s'épuise pour la parer [une femme], Bossuet, la Vallière. Tel en un secret vallon… Croît à l'abri de l'aquilon Un jeune lis, l'amour de la nature, Racine, Ath. II, 9. Il n'est pas surprenant que les effets de la nature donnent bien de la peine aux philosophes, Fontenelle, Oracles, 1, Avant-propos. Non que la nature ait été aussi soigneuse qu'on le dit quelquefois de mettre dans chaque pays les plantes qui devaient convenir aux maladies des habitants…, Fontenelle, Tournefort. Ce sont [les goûts et dégoûts] des avis secrets de la nature, si cependant la nature a un soin de nous si exact et auquel on puisse tant se fier, Fontenelle, Tschirnhaus. J'ai pris la nature sur le fait, mot de Fonten. dans VOLT. Micromégas, 6. La nature agit toujours avec lenteur et, pour ainsi dire, avec épargne, Montesquieu, Lett. pers. 114. Et si je vous disais qu'il n'y a point de nature, que tout est art dans l'univers, et que l'art annonce un ouvrier, Voltaire, Dial. XXIX, 2. La nature, à un philosophe : Mon pauvre enfant, veux-tu que je te dise la vérité ? c'est qu'on m'a donné un nom qui ne me convient pas ; on m'appelle nature, et je suis tout art, Voltaire, Dict. phil. Nature. Tant la nature même en toute nation Grava l'être suprême et la religion, Voltaire, Orphel. I, 1. La nature est comme ces grands princes qui comptent pour rien la perte de quatre cent mille hommes, pourvu qu'ils viennent à bout de leurs augustes desseins, Voltaire, l'Homme aux 40 écus, Entretien avec un géomètre. La nature, libre au milieu des limites que nous pensons lui prescrire, est plus riche que nos idées et plus vaste que nos systèmes, Buffon, Ois. t. XIV, p. 30. Lorsqu'on nomme la nature purement et simplement, on en fait une espèce d'être idéal, auquel on a coutume de rapporter, comme cause, tous les effets constants, tous les phénomènes de l'univers, Buffon, ib. t. I, p. 3. Tout doit finir sans doute ; mais les grands ouvrages de la nature ont une vie si longue que nous vieillissons, nous mourons sans voir leurs progrès vers la décrépitude, Bailly, Hist. de l'astr. mod. t. III, p. 226, dans POUGENS. Le mot de nature est un de ces mots dont on se sert d'autant plus souvent que ceux qui les entendent ou qui les prononcent y attachent plus rarement une idée précise, Condorcet, Tronchin. La nature n'est point avare, la nature n'est point prodigue, la nature ne s'épuise point : ce sont des mots vides de sens, Marmontel, Élém. litt. Œuv. t. IX, p. 298, dans POUGENS. Telle sur un rameau durant la nuit obscure Philomèle plaintive attendrit la nature, Delille, Géorg. IV. Combien la nature est féconde En plaisirs ainsi qu'en douleurs ! Béranger, la Nature. Payer le tribut ou tribut à la nature, mourir. Tous deux [les médecins] s'étant trouvés différents pour la cure, Leur malade paya le tribut à nature, La Fontaine, Fabl. V, 12.

    Philosophie de la nature, sorte de panthéisme de quelques philosophes allemands.

    Terme de physique. Jeux de la nature, phénomènes qui, présentant quelque singularité, sont considérés comme des caprices de la nature.

  • 4Dans un sens très lâche, l'ensemble des choses qui sont sous les yeux, sous la main de l'homme. Rien n'est plus commun que les bonnes choses, il n'est question que de le discerner… la nature, qui seule est bonne, est toute familière et commune, Pascal, Géométr. II. La nature se perpétue par des reproductions ; elle se détruit par les jouissances, Mirabeau, Collection, t. V, p. 410.
  • 5Ce qui constitue tout être en général, soit incréé, soit créé. La nature de Dieu. La nature angélique. La nature humaine. Comme l'homme n'est pas une nature purement intelligente, et qu'il est, ainsi qu'il a été dit, une nature intelligente unie à un corps, Bossuet, Connaiss. IV, 1. Il faudrait être de la nature des anges, pour se maintenir dans le monde et pour se sauver de la contagion, Bourdaloue, 14e dim. après la Pentec. Dominic. t. III, p. 414.

    Terme de théologie. Les deux natures de Jésus-Christ, la nature divine et la nature humaine. La foi embrasse plusieurs vérités qui semblent se contredire… la source en est dans l'union des deux natures en Jésus-Christ, Pascal, Pens. XXIV, 12. Le mystère du Rédempteur, qui, unissant en lui les deux natures, humaine et divine, a retiré les hommes de la corruption du péché pour les réconcilier à Dieu, en la personne divine, Pascal, ib. XI, 10 bis. L'hérésie des monothélites, qui, par une bizarrerie presque inconcevable, en reconnaissant deux natures en Notre-Seigneur, n'y voulaient reconnaître qu'une seule volonté, Bossuet, Hist. I, 11.

  • 6L'essence, les attributs, la condition propre d'un être ou d'une chose. La nature du feu est de brûler. Ô vraiment divine aventure, Que ton respect fasse marcher Les astres contre leur nature, Malherbe, VI, 2. S'ils [les philosophes] vous ont donné Dieu pour objet, ce n'a été que pour exercer votre superbe : ils vous ont fait penser que vous lui étiez semblables et conformes par votre nature ; et ceux qui ont vu la vanité de cette prétention vous ont jetés dans l'autre précipice, en vous faisant entendre que votre nature était pareille à celle des bêtes, Pascal, Pens. XII, 2. La vraie nature de l'homme, son vrai bien, et la vraie vertu, et la vraie religion, sont choses dont la connaissance est inséparable, Pascal, ib. XI, 2. Notre nature est dans le mouvement ; le repos entier est la mort, Pascal, ib. XXV, 7. La nature de l'amour-propre et de ce moi humain est de n'aimer que soi, Pascal, ib. II, 8. Nous connaissons l'existence et la nature du fini, parce que nous sommes finis et étendus comme lui ; nous connaissons l'existence de l'infini, parce qu'il a étendue comme nous, mais non des bornes comme nous, Pascal, ib. X, 1. Le temps, dont la nature est de n'être jamais que dans un moment qui s'enfuit d'une course précipitée et irrévocable, Bossuet, Yol. de Monterby. Encore que notre esprit soit de nature à vivre toujours, Bossuet, Duch. d'Orl. Voulez-vous savoir en un mot ce que c'est que l'homme ? tout son devoir, tout son objet, toute sa nature, c'est de craindre Dieu, Bossuet, ib. La mort ne nous laisse pas assez de corps pour occuper quelque place… notre chair change bientôt de nature, notre corps prend un autre nom…, Bossuet, ib. Il est impossible que nous ne rencontrions des objets qui ont des natures ou des qualités contraires aux nôtres, Fléchier, Sermons, I, 136. Ne nous emportons point contre les hommes, en voyant leur dureté, leur ingratitude, leur injustice… ils sont ainsi faits, c'est leur nature, La Bruyère, XI.

    Fig. C'est une grande querelle que celle de l'Angleterre avec ses colonies : savez-vous, mon ami, par où nature veut qu'elle finisse ? Par une rupture, Diderot, Sur les lettres d'un fermier.

  • 7La nature des choses, en général, la nécessité qui résulte de la constitution des choses. Les lois, dans la signification la plus étendue, sont les rapports nécessaires qui dérivent de la nature des choses, Montesquieu, Espr. I, 1.

    De la nature des choses, titre d'un poëme latin de Lucrèce, qui est une exposition du système d'Épicure.

    Il est dans la nature des choses, il arrive naturellement, inévitablement. Il est dans la nature des choses que la faveur l'emporte souvent sur le mérite.

  • 8Ensemble des propriétés qu'un être vivant tient de sa naissance, de son organisation, de sa conformation primitive, par opposition à celles qu'il peut devoir à l'art. Chaque animal obéit à sa nature. Mais on ne voit qu'à Rome une vertu si pure ; Le reste de la terre est d'une autre nature, Corneille, Nic. II, 3. Bocchoris comptait pour rien les hommes, croyant qu'ils n'étaient faits que pour lui, et qu'il était d'une autre nature qu'eux, Fénelon, Tél. II. Sa nation farouche est d'une autre nature Que les tristes humains qu'enferment nos remparts, Voltaire, Orphel. I, 3.

    Passer en nature, devenir le propre de. Le parfait parmi les parfaits … celui à qui la vertu a passé en nature, Bossuet, États d'orais. VI, 10. La contagion du premier péché par lequel la source des hommes étant infectée, la corruption nous est passée en nature, Bossuet, 1er sermon, Pentec. 1.

  • 9Il se dit, par extension, de ce qui est comparé à une espèce d'être vivant, tel qu'un peuple, un gouvernement, etc. Chaque peuple a le sien [gouvernement] conforme à sa nature, Corneille, Cinna, II, 1. Polybe a très bien conclu que Carthage devait à la fin obéir à Rome par la seule nature des deux républiques, Bossuet, Hist. III, 6. Il y a cette différence entre la nature d'un gouvernement et son principe, que sa nature est ce qui le fait être tel ; et son principe, ce qui le fait agir, Montesquieu, Espr. III, 1. Les circonstances et la nature du gouvernement font les vices et les vertus des nations, D'Alembert, Éloges, Montesquieu.
  • 10Nature humaine, ou, simplement, nature, la totalité des conditions physiques et morales de l'être humain. La nature pâtit à la vue d'un grand péril. Les besoins de la nature. Ceux qui sont dans le déréglement disent à ceux qui sont dans l'ordre que ce sont eux qui s'éloignent de la nature, et ils la croient suivre, Pascal, Pens. VI, 4, éd. HAVET. Il pourrait sembler au premier abord que la voix commune de la nature, qui désire toujours ardemment la vie, devrait décider cette question [si une longue vie est désirable], Bossuet, Yol. de Monterby. Que la fortune ne tente donc pas de nous tirer du néant, ni de forcer la bassesse de notre nature, Bossuet, Duch. d'Orl. Mais je crois bien en vérité Qu'en lui, tout comme en moi, souffrit dame nature, Dancourt, Céphale et Procris, I, 2. Nature, tu frémis… terreur d'un autre monde, Abîme de l'éternité, Saurin, Beverlei, V, 5.

    Alphabet de nature, alphabet considéré et distribué d'après les mouvements des organes de la parole, glotte, voile du palais, langue, dents, lèvres.

    Fig. Les cinq sens de nature, toutes les forces dont on dispose. M. le duc d'Orléans lui avait dit franchement [à Mme de Saint-Simon] qu'il y faisait [à sa nomination de dame d'honneur] tous ses cinq sens de nature, Saint-Simon, 273, 188. (On dit d'ordinaire mettre et non faire les cinq sens de nature.)

    On dit qu'un homme est ennemi de nature, quand il se plaît à faire du mal à soi et à autrui, ou quand il condamne toute sorte de divertissements.

    Forcer nature, vouloir faire plus qu'on ne peut.

    La nature humaine, signifie aussi le genre humain. Vous voulez un grand mal à la nature humaine ? - Oui, j'ai conçu pour elle une effroyable haine, Molière, Mis. I, 1.

    La nature raisonnable, l'espèce humaine considérée en tant que douée de raison. C'était la véritable grandeur de la nature raisonnable, lorsque, sans avoir besoin des choses extérieures… elle faisait sa félicité par la seule innocence de ses désirs, Bossuet, Sermons, l'Honneur, 1.

  • 11La condition de l'homme telle qu'on la suppose antérieurement à toute civilisation. L'homme dans l'état de nature. Ah ! que dirait maître Pangloss, s'il voyait comme la pure nature est faite ? Tout est bien, soit ; mais j'avoue qu'il est bien cruel d'être mis à la broche par des Oreillons, Voltaire, Candide, 16. Enfant de la nature, il est libre, bon et rude comme elle, Al. Duval, Menuis. de Livonie, II, 5. Le frère d'Amélie s'était endormi l'homme de la société, il se réveillait l'homme de la nature, Chateaubriand, Natch. livre II. Dans l'état de nature… l'homme exempt de tout vice et de la corruption des temps où nous vivons, ne parlait point, mais criait, murmurait ou grognait, selon ses affections du moment, Courier, 9e lettre au censeur.

    Familièrement. Être dans l'état de pure nature, être tout nu.

  • 12Ce qui appartient d'origine à l'être humain, par opposition à coutume. Elle [la coutume] contraint la nature, et quelquefois la nature la surmonte, et retient l'homme dans son instinct, malgré toute coutume, bonne ou mauvaise, Pascal, Pens. III, 4. J'ai bien peur que cette nature ne soit elle-même qu'une première coutume, comme la coutume est une seconde nature, Pascal, ib. III, 13.
  • 13 Terme de théologie. Nature, l'état naturel de l'homme par opposition à l'état de grâce. Le baptême fait passer l'homme de l'état de nature à l'état de grâce. La foi chrétienne ne va principalement qu'à établir ces deux choses : la corruption de la nature et la rédemption de Jésus-Christ, Pascal, Pens. IX, 1. Qui ne confesserait pas devant Dieu, dans l'humiliation de son âme, que vraiment notre maladie est extrême, et que les plaies de notre nature sont bien profondes ? Bossuet, 1er sermon, Pentec. 1. La nature, quoique impuissante, n'a jamais été sans flatteurs, qui l'ont enflée par de vains éloges, parce qu'en effet ils ont vu en elle quelque chose de fort excellent ; mais ils ne se sont point aperçus qu'il en était comme des restes d'un édifice autrefois très régulier et très magnifique, Bossuet, ib. Dompter par la pénitence la délicatesse des sens et de la nature, Bossuet, Bourgoing. Si, depuis la chute de la nature, tout ce qui est en nous ou autour de nous est pour nous un nouveau péril, Massillon, Carême, prière 1. La loi de nature, se dit par opposition à l'ancienne loi et à la loi de grâce.
  • 14La constitution du corps vivant, le principe qui le soutient. La nature commence à s'affaiblir en lui. Une nature défaillante. La médecine tantôt aide la nature, tantôt la laisse agir. Des douleurs vives et longues tout ensemble… les forces de la nature usées par le soin même qu'on prend de la soutenir, Fléchier, Dauphine. Il [Hercule] conserva, par l'ordre de Jupiter, cette nature subtile et immortelle, cette flamme céleste qui est le vrai principe de vie et qu'il avait reçue du père des dieux, Fénelon, Tél. X. Ceux qui parlent de médecine font souvent de la nature une espèce d'être moral qui a des volontés, qui supporte impatiemment la contradiction, qui a quelquefois assez de sagacité pour sauver le malade et bien diriger ses efforts, mais qui, malgré les bonnes intentions qu'on lui suppose, est sujet à se tromper presque aussi souvent que les médecins, Condorcet, Tronchin.

    Nature médicatrice, ensemble des actions dérivant des propriétés inhérentes aux tissus et aux humeurs, qui font qu'un organe lésé dans de certaines limites revient peu à peu à son état naturel.

  • 15La complexion, le tempérament de chaque individu. Il est de nature bilieuse, sanguine. Sa nature est sèche, robuste.
  • 16L'ensemble des sentiments innés. Avant que la raison, s'expliquant par la voix, Eût instruit les humains, eût enseigné des lois, Tous les hommes suivaient la grossière nature, Boileau, Art p. IV. Pour moi, loin des cités, sur les bords du Permesse, Je suivais la nature, et cherchais la sagesse, Voltaire, 6e disc. Jamais la nature ne nous trompe ; c'est toujours nous qui nous trompons, Rousseau, Ém. III.

    Sorte de constitution morale qui nous fait discerner plus par sentiment que par raison le bien et le mal. La nature nous donne les premières notions du juste et de l'injuste. Crime qui fait frémir la nature. Il se faut entr'aider ; c'est la loi de nature, La Fontaine, Fabl. VIII, 17. Rois, vous foulez aux pieds les droits de la nature ! Gilbert, Au prince de Salm. Nous avons oublié la nature et ses lois ; Les cris des préjugés ont fait taire sa voix, Chénier M. J. Fén. III, 2.

  • 17Une certaine disposition ou inclination de l'âme. Une nature heureuse. Il est enclin de sa nature à tel vice. Il y a des coups de miséricorde et de grâce qui renversent la nature la plus fière, Fléchier, Serm. t. I, p. 291. Vos inégalités ne viennent que d'une légèreté de nature, Massillon, Carême, Inconst. Malgré les frémissements secrets de votre nature, accoutumez votre délicatesse à ces œuvres de religion, Massillon, Panégyr. Ste Magdeleine.

    La partie morale chez les animaux. La nature fidèle du chien.

    De nature, par une condition essentielle à l'être. Le singe est malicieux de nature. Il est bien âne de nature, qui ne sait lire son écriture.

    Par nature, même sens. Envieux par nature, et brigands par métier, Ils vendent l'infamie à qui la veut payer, Chénier M. J. la Calomnie.

  • 18L'ensemble des affections du sang, de la famille. Pour aimer un mari l'on ne hait pas ses frères. La nature en tout temps garde ses premiers droits, Corneille, Hor. III, 4. La nature est trop forte, et ses aimables traits, Imprimés dans le sang, ne s'effacent jamais, Corneille, Poly. V, 3. La nature et l'amour ont leurs droits séparés ; L'un n'ôte point à l'autre une âme qu'il possède, Corneille, Rodog. IV, 3. Qu'un père vous ait aimé, c'est un sentiment que la nature inspire, Bossuet, Louis de Bourbon. La nature pour lui n'est plus qu'une chimère, Racine, Théb. II, 3. La nature à mes yeux n'est rien que l'habitude, Voltaire, Fanat. IV, 1. Ce n'est pas aux tyrans à sentir la nature, Voltaire, Mérope, IV, 2. La nature en mon cœur est toujours entendue, Voltaire, Oreste, I, 3.
  • 19Sorte, espèce. Considérer, quand on plante, la nature du terrain. …Une grande offense est de cette nature Que toujours l'offenseur impute à l'offensé Un vif ressentiment dont il le croit blessé, Corneille, Rodog. I, 7. Car enfin cet effet est de telle nature Que sa source en doit être à nos yeux toute pure, Corneille, Perthar. II, 5. Un prêtre de Tyane alla demander à ce faux prophète Alexandre si les oracles qui se rendaient alors à Claros, à Delphes, étaient véritablement des réponses d'Apollon ; Alexandre eut des égards pour ces oracles qui étaient de la nature du sien, Fontenelle, Oracl. II, 3. La chaîne du couchant appartient aux montagnes de Judée ; moins élevée et plus inégale que la chaîne de l'est, elle en diffère encore par sa nature, Chateaubriand, Itin. 3e part.

    Terme d'alchimie. Nature fuyante au feu, le mercure.

  • 20Nature se dit des opérations, des productions de la nature, par opposition à celles de l'art. L'art perfectionne la nature. Ô maison d'Aristippe, ô jardins d'Épicure, Vous qui me présentez, dans vos enclos divers, Ce qui souvent manque à mes vers, Le mérite de l'art soumis à la nature, Voltaire, Ép. 76. J'avais vu les grands fleuves de l'Amérique avec ce plaisir qu'inspirent la solitude et la nature, Chateaubriand, Itin. 3e part.
  • 21La nature soit physique soit morale considérée comme modèle des arts d'imitation. Que la nature donc soit votre étude unique, Boileau, Art p. III. La nature, féconde en bizarres portraits, Dans chaque âme est marquée à de différents traits, Boileau, ib. Racine est presque toujours dans la nature, et Corneille n'y est presque jamais, Voltaire, Lett. Laharpe, 22 janv. 1773. Démontrez-leur qu'il est faux, ainsi qu'ils le prétendent, que toute nature soit belle, et qu'il n'y ait de laide nature que celle qui n'est pas à sa place, Diderot, Lett. sur les sourds et muets.
  • 22Particulièrement, en peinture et en sculpture, l'objet réel qu'on se propose de représenter. Quelqu'un n'a-t-il point vu Comme on dessine sur nature ? La Fontaine, Cas. Que dirait-on d'un peintre qui ne représenterait les hommes que comme ils sont faits communément, petits, mal tournés, mal proportionnés, de mauvais air ? Ce serait là pourtant la nature, Fontenelle, Réfl. poét. Œuv. t. V, p. 144, dans POUGENS. Si vous prenez des natures énormes, que votre scène soit presque immobile ; si vous prenez des natures petites, que votre scène soit tumultueuse et troublée, Diderot, Salon de 1767, Œuv. t. XIV, p. 63, dans POUGENS.

    Peindre d'après nature, peindre d'après les objets mêmes qu'on veut représenter. D'un côté du tableau c'est Madame Royale peinte en miniature… vis-à-vis de la princesse est le jeune prince, beau comme un ange, d'après nature aussi, Sévigné, 372.

    Fig. D'après nature, conformément à la réalité. Mais lorsque vous peignez les hommes, il faut peindre d'après nature, Molière, Critique, 7. Voilà ce qui s'appelle un ris d'après nature, Regnard, le Distr. I, 4.

    Belle nature, en termes d'art et de poésie, la nature imitée seulement dans les objets agréables à l'œil, à l'imagination, à l'oreille.

    Nature idéale, celle dont le modèle absolument parfait n'existe que dans l'imagination de l'artiste.

    Figures plus grandes, plus petites que nature, figures qui sont au-dessus, au-dessous des proportions naturelles. Les dieux d'Homère sont des hommes plus grands et plus forts que nature, soit au physique, soit au moral, Marmontel, Élém. litt. Œuv. t. VIII, p. 371, dans POUGENS.

    Figures de demi-nature, ou figures demi-nature, figures qui n'ont que la moitié des proportions naturelles.

    Nature morte, se dit des animaux tués et, particulièrement, du gibier, dont l'imitation exclusive forme un genre particulier de peinture. Ce sont des natures mortes. Peintre de nature morte.

    Nature s'emploie quelquefois adjectivement dans le langage familier. Comme cela est nature ! c'est-à-dire comme cela est naturel !

  • 23Les parties qui servent à la génération, surtout dans les femelles des animaux. La nature d'une jument.

    Nature de baleine, nom donné quelquefois au sperma ceti.

  • 24État matériel de certaines choses, par opposition à l'argent qu'elles peuvent valoir. Une dîme qui se lèverait en nature sur la récolte, Rousseau, Pologne, 11.

    Payer en nature, payer avec les productions naturelles du sol.

  • 25 Terme de métallurgie. Prendre nature, se dit de l'acier qui, dans les fours à puddler, est rouge, poreux et à l'état naissant, Comptes rendus, Acad. des sc. t. LII, p. 632.
  • 26 Terme de musique. Chanter par nature, se disait pour passer de bémol en bécarre, parce que l'on quitte le bémol pour la note naturelle.
  • 27Bœufs de nature, expression impropre dont on se sert pour caractériser les animaux de l'espèce bovine plus aptes à être soumis à l'engraissement qu'au travail.

    Diamant de nature, voy. DIAMANT.

  • 28En cuisine, bœuf nature, côtelettes nature, c'est-à-dire sans sauce, sans apprêt.
  • 29Contre nature, loc. adv. D'une manière contraire à l'ordre moral, aux sentiments. Il est contre nature qu'un père persécute ses enfants.

    Vice contre nature, la pédérastie.

PROVERBES

L'habitude est une seconde nature.

L'accoutumance est une autre nature.

Nature passe nourriture, ou, inversement, nourriture passe nature, c'est-à-dire que tantôt la nature prévaut sur l'éducation, tantôt l'éducation sur la nature.

HISTORIQUE

XIIe s. N'i [en une belle femme] perdi pas nature ses uevres [œuvres] ne son tans, Sax. V.

XIIIe s. Aristotes dit que nature est cele par cui totes choses se muevent ou se reposent par eles meismes, Latini, Trés. p. 148. Il vont tousjours touz nuz ; mais il cueuvrent leur nature d'un pou de drap, Marc Pol, p. 608. Et ma dame truis [je trouve] de merci si dure, Qu'a peu je di qu'en son cuer faut nature, Eust. Lepeintre, dans Couci. Quant la saison du douz temps s'asseüre, Que toute riens à sa douce nature Vient et retrait, se trop n'est de malaire, ib. p. 125. Mais ele par estoit de si fine nature…, Berte, XLII.

XIVe s. Regardez ces banieres en ce champ venteler ; Veez la fleur de lis qui vous vient visiter ; à vo droite nature pensez de retourner, Guesclin. 21104. Toutes choses ont en elles par nature une chose divine, Oresme, Eth. 223. À les considerer [les vices] en tant comme il ont nature de mal, et vertu en tant comme elle a nature et raison de bien, Oresme, ib. 52. Et pour ce que telz habiz [habitudes] sont vers choses singulieres et sensibles, il semble que l'en les ait de nature, Oresme, ib. 181. Dieu et nature ne font riens pour nient, H. de Mondeville, f° 12.

XVe s. Et tu me veux maintenant murdrir : il te vient de mauvaise nature, Froissart, II, III, 13. Un grand tyran, et meneur de compaignies de gens d'armes, ennemy de Dieu et de nature humaine, Boucic. III, 22. Et parleray premierement des bestes doulces qui viandent, pour ce que elles sont plus gentilz et plus nobles, et premierement du cerf et de toute sa nature, Gaston Phoebus, Livre de chasse, prol.

XVIe s. Mais c'est l'erreur des œuvres de nature : Longtemps le beau sur la terre ne dure, Desportes, Épitaphes, Diane, Complainte. On luy fera boire une drachme de nature de baleine dissoute en eau de buglosse, Paré, X, 2. Ce sont natures belles et fortes qui se maintiennent au travers d'une mauvaise institution, Montaigne, I, 147. Nostre mere nature, Montaigne, I, 200. Si tout le papier que j'ay autrefois barbouillé pour les dames estoit en nature, Montaigne, I, 293. Homme de bonne et doulce nature, Amyot, Lyc. 8. Voilà comment les grandes natures ambitieuses, ne pouvant tenir moyen et se garder d'exceder en trop ès gouvernemens des choses publiques, sont souventefois plus cause de mal que de bien, Amyot, Agés. 11. À chascun plaist le sort de sa nature, Leroux de Lincy, Prov. t. II, p. 226. Nature a produit à toute beste son ennemi, Leroux de Lincy, ib. p. 352. Nature fait chien chasser, Leroux de Lincy, ib. Nature ne puet mentir, Leroux de Lincy, ib.

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Étymologie de « nature »

(1119) Du latin natura (« le fait de la naissance, état naturel et constitutif des choses, caractère, cours des choses, ensemble des êtres et des choses »), venant lui même de nascor (« naître, provenir »).
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Provenç. espagn. et ital. natura ; du lat. natura, qui vient du radical na, pour gna, sanscr. jan, lat. gignere, du suffixe turus, tri, tor, qui fait des noms d'agent ; natura signifie donc l'engendrante, la force qui engendre.

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Phonétique du mot « nature »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
nature natyr

Fréquence d'apparition du mot « nature » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « nature »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « nature »

  • « Tu la payes en nature ? » dit-il. Ça me gêne de dire oui, mais je dis oui si ça peut le rassurer. Non, la chose m’intéresse en tant que spectacle d’art. Il me répond qu’il ne joue pas pour son plaisir, ni pour le plaisir des autres.
    Jean Giono — Œuvres romanesques complètes
  • Comme il n’y avait pas de trace de règlement en argent, il y avait forcément paiement en nature. Si cela ne s’était pas passé avant le crime, cela s’était passé après.
    Paule Constant — La bête à chagrin
  • C’est un peu cela que vous allez faire tout à l’heure, quand elle voudra bien vous recevoir, non ? Les argents, c’est pas tout ! Ceux qui les ont, ils ne les lâchent pas ainsi. Faut, qu’en plus, on paie en nature ! C’est la loi.
    Jean Anouilh — Colombe
  • Charlie, qui avait accepté la suggestion de Susie de le payer en nature, directement sur son bureau. « Si c’est pas drôle. T’es encore avocat ? Hé, Gary, regarde ça C’est le type qui s’est occupé de mon premier divorce » Gary leva les yeux, se concentra pendant une fraction de seconde, puis poussa un grognement et se replongea dans ses ruminations intimes.
    Scott Phillips — La moisson de glace
  • Pour vous être agréable, je puis vous proposer l’arrangement suivant au lieu de vous payer, Dieu sait quand, en espèces, je vous paye en nature c’est-à-dire que je vous prends huit jours avec moi, et vous initie à mes procédés.
    Jules Romain — Knock ou Le Triomphe de la Médecine
  • Si l’assimilation n’est pas folie, c’est à coup sûr sottise, car vouloir être assimilé, c’est oublier que nul ne peut changer de faune ; c’est méconnaître « altérité » qui est loi de Nature.
    Aimé Césaire — L’Etudiant noir
  • Ne vous souvient-il plus que l'amour est, comme la médecine, seulement l'art d'aider la nature.
    Pierre Choderlos de Laclos — Les Liaisons dangereuses
  • L'art fait qu'une copie offre souvent plus de charme que la nature elle-même.
    Johan Joachim Winckelmann — Pensées sur l'imitation des Grecs dans la peinture et la sculpture
  • La nature est une baguette magique pétrifiée.
    Novalis
  • Tous ces caprices philosophiques appelés des devoirs n'ont aucun rapport avec la nature.
    Charles Fourier — Théorie de l'unité universelle
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Traductions du mot « nature »

Langue Traduction
Anglais nature
Espagnol naturaleza
Italien natura
Allemand natur
Chinois 性质
Arabe طبيعة
Portugais natureza
Russe природа
Japonais 自然
Basque natura
Corse natura
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Synonymes de « nature »

Source : synonymes de nature sur lebonsynonyme.fr

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Nature

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