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Lyre

Variantes Singulier Pluriel
Féminin lyre lyres

Définitions de « lyre »

Trésor de la Langue Française informatisé

LYRE, subst. fém.

A. − MUSIQUE
1. Instrument à cordes dans l'antiquité gréco-romaine, constitué d'une caisse sonore (qui fut à l'origine, selon la légende, une carapace de tortue) d'où partent deux bras en forme de cornes d'animaux reliés par une traverse et des cordes (en nombre variable) de longueur égale, pincées du bout des doigts ou frappées avec un plectre. La lyre d'Orphée, d'Amphion, de Pindare. Quand on apprenait la déclamation et les différents modes de la lyre, c'était pour célébrer les dieux, ou pour répandre les chants sacrés des poëtes (Sand,Hist. vie, t. 2, 1855, p. 387).Je te confie l'invention d'Hermès! Je te remets l'arme prodigieuse, La Lyre! (Valéry,Variété III,1936, p. 101):
1. La lyre n'est attestée que (...) vers 1400 avant J.-C., mais elle a déjà sept cordes à ce moment, et cela suffirait pour infirmer les légendes sur l'accroissement du nombre de ses cordes à l'aube de l'époque historique, accroissement qui aurait atteint sept cordes, avec Terpandre, vers le VIIIe siècle avant J.-C. Encyclop. univ.t. 71970, p. 148, col. 2.
Écusson représentant une lyre, porté par les militaires qui font partie de la musique ou de la fanfare d'un corps de troupe. Mais quelle tunique! (...) le collet portait appliquées, non des palmes, mais des lyres (A. France,P. Nozières,1899, p. 72).
P. anal. Forme (de quelque chose) rappelant celle de la lyre. Sa poitrine bombée, des genoux ronds, la haute lyre de ses hanches (Toulet,J. fille verte,1918, p. 197).Des femmes au nez droit, aux hanches en lyre (Arnoux,Rhône,1944, p. 144).
En partic. Thème décoratif en forme de lyre (apparaissant dans le mobilier de la seconde moitié du xviiiesiècle). Parmi l'ombre, se dessinaient les lyres formant le dossier des chaises (Adam,Enfant Aust.,1902, p. 38).La table à coiffer Empire se réduit à une simple table rectangulaire à piètement en X ou en lyre (Viaux,Meuble Fr.,1962, p. 138).
2. P. anal. [Désigne divers instruments anciens à cordes et à archet, et dans les traditions méditerranéennes et extra-européennes] Lyre crétoise. Lyre des Mittou, Haut Nil (Lowie,Anthropol. cult., trad. par E. Métraux, 1936, p. 227).
3. ,,Instrument à percussion apparenté au chapeau chinois composé de plaquettes métalliques disposées dans un cadre en forme de lyre que l'on frappe au moyen d'un petit maillet`` (Mus. 1976). Voir Catal. Couesnon, 1934, p. 41.
B. − Littér., au fig. et p. métaph.
[La lyre symbolise la poésie lyrique, l'inspiration, l'art poét.] Lyre antique; lyre de Racine; faire résonner (les accords de) la lyre; lyre et délire. Salut, aube au teint frais, jeune soeur de Zéphire, Descends, muse, chantons, apporte-moi ma lyre (Chénier,Bucoliques,1794, p. 4).Voulez-vous qu'on m'applique le mot cruel où la lyre de Lamartine était traitée de tire-lire (Toulet,Corresp. avec un ami,1920, p. 31):
2. La vraie poésie n'exprime qu'une chose, les tourments de l'âme humaine devant la question de sa destinée. C'est là, messieurs, de quoi parle la véritable lyre, la lyre des grands poètes... Jouffroy, Mél. philos.,1833, p. 321.
[La lyre symbolise le poète] C'est pitié de voir un poète de vingt ans qui s'en va, une lyre qui se brise, un avenir qui s'évanouit (Hugo,Hernani,1830, p. i).Écartons l'image romantique du poète échevelé, au front fatal, qui se sent devenir lyre ou harpe au milieu des tempêtes ou dans la nuit, sous la lune, au bord d'un lac (Valéry,Regards sur monde act.,1931, p. 211).
Toute la lyre. Toutes les formes de l'inspiration poétique. Son doigt [d'Horace] souple à la fois touche à toute la lyre (Hugo,Toute la lyre, t. 1, 1885, p. 271).
P. ext., fam. Toute la série des choses du même ordre. Une série noire d'accidents et de catastrophes, fiacre emporté, piétons écrasés, foule ameutée, police, arrestation, commissariat, toute la lyre! (Farrère,Homme qui assass.,1907, p. 135).
C. − P. anal.
1. ANAT. Lyre (de David). Surface inférieure de la voûte à trois piliers du cerveau. Les piliers postérieurs [du trigone cérébral] qui circonscrivent une aire triangulaire à base postérieure, occupée par des fibres transversales intimement unies au corps calleux. Cet espace est appelé lyre de David (G. Gérard,Anat. hum.,1912, p. 324).
2. TECHNOL. [Désigne diverses pièces de dispositifs techn. en forme de lyre] Lyre de dilatation. La lyre hollandaise (...) est un diviseur formé de tiges d'acier à bords tranchants et encastrées dans un cadre rectangulaire de laiton muni de deux poignées (Pouriau,Laiterie,1895, p. 698).
3. ZOOLOGIE
a) Oiseau-lyre, faisan-lyre, ou p. ell., lyre. Synon. de ménure.C'est l'oiseau-lyre, dont l'appendice caudal figure le gracieux instrument d'Orphée (Verne,Enf. cap. Grant, t. 2, 1868, p. 185).
b) Nom vulgaire de deux poissons des côtes de France: le trigle lyre et le callionyme-lyre [callionyme, nom scientifique du dragonnet]. Dans la lyre (Callionymus Lyra), l'oesophage se renfle tout-à-coup pour former le cul-de-sac de l'estomac (Cuvier,Anat comp., t. 3, 1805, p. 429).
REM. 1.
Lyre-cithare, subst. fém.Instrument national de la Grèce ancienne, dérivé de la lyre. La Grèce connut beaucoup d'autres instruments à cordes [que la lyre et la cithare]. Ils appartenaient soit au même type que la lyre-cithare (cordes d'égale longueur et de tension diverse), soit au type de notre harpe (Hist. de la Mus.,t. 1, 1970, pp. 391-392 [Encyclop. de la Pléiade]).
2.
Lyre-guitare, subst. fém.Sorte de guitare en forme de lyre très en vogue au début du xixesiècle. Un instrument de musique dans le genre de la Lyre-guitare, appelé lyre organisée (Brevets d'invention, in Wright,1806, s.v. lyre organisée ds Quem. DDL t. 13).
3.
Lyrette, subst. fém.Petite lyre. Je saurai bien, dans un couplet, Vous égrener un chapelet De rimes blanches, Sur ma lyrette des dimanches (Ponchon,Muse cabaret,1920, p. 72).
4.
Lyreur, lyriste, subst. masc.,péj. Écrivain poète (lyrique). Le lyriste, en général, se détourne de ces pensées, qui le mèneraient haut et loin (Sand,Valvèdre,1861, 137 ds Quem. DDL t. 13).Les mieux chantants lyreurs firent des vers médiocres, L'esprit clos brusquement à la flore des mots (Ponchon,Muse cabaret,1920p. 229).
Prononc. et Orth.: [li:ʀ]. Att. ds Ac. dep. 1694. Homon. lire. Étymol. et Hist. 1. a) 1155 lire «instrument de musique antique à cordes pincées» lire e ... psalterïum (Wace, Brut, 3702 ds T.-L., s.v. lire); 1548 lyre (E. Forcadel, Le Chant des seraines, 5, in Wright ds Quem. DDL t. 14); b) 1680 «instrument des xvieet xviiesiècles intermédiaire entre la viole et le violon» (Rich.); 2. 1549 «art de faire des vers» (P. Ronsard, L'Hymne de France, 219 ds Œuvres compl., éd. P. Laumonier, t. I, p. 35); 3. 1803 fig. «objet qui reçoit les impressions et les traduit» (Chateaubr., Génie, t. 1, p. 435); 4. 1803 ornith. (Dict. d'hist. nat., Paris, Déterville); 1868 oiseau-lyre (Verne, loc. cit.); 5.1871-72 «ornement en forme de lyre» (Alman. Didot-Bottin, p.1063, 1recol. ds Littré Suppl.). Empr. au lat. lyra «lyre, instrument à cordes», «chant, poème lyrique» d'où «poésie», lui-même du gr. λ υ ́ ρ α de même sens. Fréq. abs. littér.: 952. Fréq. rel. littér.: xixes.: a)2387, b) 1913; xxes.: a) 989, b) 391.
DÉR.
Lyré, -ée, adj.,bot. Feuille lyrée. Feuille pennée, lorsqu'elle est terminée par un lobe arrondi beaucoup plus grand que les autres (d'apr. Forest. 1946; dict. xixeet xxes.) [liʀe]. 1resattest. 1783 bot. feuilles lyrées (E. Melchior de Vogüé, Rev. des Deux-Mondes, 15 janv., p. 353 ds Littré Suppl. 1877); de lyre, suff. -é*.
BBG. De Leenheer (G.). À propos d'un manuel de naturaliste du xviiies. R. belge Philol. Hist. 1970, t. 48, no3, p. 786 (s.v. lyre-guitare). _ Hasselrot 20es., 1972, p.8 (s.v. lyrette). _ Quem. DDL t.13 (s.v. lyre-guitare), t. 14, 18.

Wiktionnaire

Nom commun - français

lyre \liʁ\ féminin

  1. (Musique) Cordophone portable à cordes pincées parallèles au chevalet, dont la caisse de résonance ne se prolonge pas par un manche, qui était en usage chez les anciens.
    • Érato s'apprête donc à s'emparer de la lyre pour chanter lorsqu’Euterpe la retient : la lyre n'est pas l'instrument qui lui convient, elle appartient à la muse de la poésie et Érato ne saurait en tirer que des couacs : […]. — (Jacques Joly, Les Fêtes théâtrales de Métastase à la Cour de Vienne (1731-1767) , 1976, p. 389)
    • En donnant la lyre à Apollon, Hermès ne veut-il pas indiquer que toute activité de communication est un art et que, comme telle, cette activité doit s'inscrire au sein d'une poétique? — (Charles Le Blanc, Le complexe d'Hermès, Presses de l'Université d'Ottawa, 2009, p. 93)
  2. (Par extension) Ce qui a la forme de cet instrument de musique.
    • Ce chapeau de paille noire haut de forme, est garni d'un bord de plumes rouleautées, touffe de plumes noires de côté et lyre de plumes vertes posée en aigrette au milieu des plumes noires. — (Louise de Taillac, « Revue des magasins », dans Le Moniteur de la mode: journal du grand monde, Paris : chez Adolphe Goubaud & fils, 2e n° d'avril 1870, p. 122)
  3. (Figuré) (Littéraire) Action de faire des vers ; genre auquel se consacre le poète.
    • Sur son lit de mort, mon géniteur m’a fait jurer que si je ne parvenais pas à coiffer le tricorne, je me ferais au moins fonctionnaire et abandonnerais toute prétention à suivre ma vocation pour la lyre. — (Carlos Ruiz Zafón, L’Ombre du vent, 2001)
    • Il se sentait incapable d’inventer une nouvelle forme de poésie. Sa lyre ne possède pas sept cordes, elle n’en a qu’une ; et, à force d’en avoir joué, le public ne lui laissait plus que l’alternative de s’en servir à se pendre ou de se taire. — (Honoré de Balzac, Modeste Mignon, 1844)
  4. Série complète de choses du même genre.
    • Au coin des rues, le marchand étale les "enrollados" les plus parfumés, les "empanadas", les "ayuyas", toute une lyre de pâtisseries grasses et épicées — (Camille de Cordemoy, Au Chili, 1896)
    • Un mystère de poix et de goudron ! Noir, obscur, ténébreux, inextricable, toute la lyre, quoi ! s'écria Harry Dickson avec une sorte de fureur. — (Jean Ray, Harry Dickson, Le Mystère de la forêt, 1933)
  5. (Technique) Outil composé d’un manche muni d’un fil en métal permettant de couper des tranches ou de diviser des préparations culinaires.
    • J’ai acheté une lyre à foie gras, pour faire des tranches bien nettes.
  6. (Héraldique) Meuble représentant l’instrument du même nom dans les armoiries. Elle est généralement représentée sous une forme antique. Lorsque ses cordes sont d’un autre émail, on la dit cordée. À rapprocher de claricorde, guitare, harpe, luth, vièle et violon.
    • D’azur à la lyre d’argent, qui est de la commune de La Neuve-Lyre de l’Eure → voir illustration « armoiries avec une lyre »
  7. (Musique) Accessoire, composé d’un collier et d’une pince, qui maintient une partition sur un instrument et permet à l’instrumentiste de déambuler.
  8. (Industrie) Dispositif de tuyauterie en forme de u permettant le maintient en charge de la partie amont, et piégeant le gaz en créant un point haut. Lorsqu’elle est constituée d’un matériau souple, il peut servir à palier la dilatation des tuyaux.
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

LYRE. n. f.
Instrument de musique à cordes, qui était en usage chez les anciens. Jouer de la lyre. Les poètes grecs, en chantant leurs vers, s'accompagnaient de la lyre. Il s'emploie aussi parfois dans certaines phrases figurées, où il désigne l'action de faire des vers et le genre auquel se consacre le poète. Ainsi on dit : La lyre d'Anacréon chantait les plaisirs, celle de Pindare célébrait les vainqueurs. Prendre, accorder sa lyre. Quitter, déposer, suspendre sa lyre. Les maîtres de la lyre. Toute la lyre, signifie dans le langage familier toute la série de choses du même genre. Nous avons eu des cris des larmes, des reproches, des injures et toute la lyre.

Littré (1872-1877)

LYRE (li-r') s. f.
  • 1Instrument de musique à cordes, en usage parmi les anciens. Vous rencontrerez une troupe de prophètes qui descendront du lieu haut, précédés de personnes qui ont des lyres et des harpes, Sacy, Bible, Rois, I, X, 5. David et tout Israël jouait devant le Seigneur de toutes sortes d'instruments de musique, de la harpe, de la lyre, du tambour, des cistres et des timbales, Sacy, ib. II, VI, 5.

    Dans un sens spécial, chez les anciens, instrument à sons graves, formé par deux branches, soutenant un barreau sur lequel étaient placées des cordes qui sonnaient à vide. Par la lyre on entend ici généralement tout instrument de musique, dont les cordes sont tendues à vide, Rollin, Hist. anc. Œuv. t. XI, 1re part. p 247, dans POUGENS.

    Chez les modernes, sorte de guitare où la touche était placée entre deux branches recourbées comme celles de la lyre antique ; cet instrument très peu maniable était à la mode sous le Directoire et au commencement de ce siècle.

    Fig. Le même auteur [Dieu]… a donné aux oiseaux leurs chants si divers, et leur a mis dans l'estomac et le gosier une espèce de lyre et de guitare, pour annoncer, chacun à leur mode, les beautés de leur créateur, Bossuet, Élévat. sur myst. V, 1.

    Chez les Grecs, le nombre des cordes de la lyre a varié ; mais la plus ancienne et la plus usitée étant la lyre à sept cordes ; même à Sparte il fut défendu d'innover à cet égard,

    Fig. Ajouter une corde à sa lyre, prendre dans ses vers un nouveau ton, traiter un nouveau sujet. Et j'ajoute à ma lyre une corde d'airain, Hugo, Feuilles d'automne, XL.

  • 2 Fig. Le talent du poëte, l'action de faire des vers. La lyre d'Homère. La lyre de Pindare. Malherbe avec Racan parmi les chœurs des anges, Là-haut de l'Éternel célébrant les louanges, Ont emporté leur lyre, La Fontaine, Épître VIII. Je consacre ma lyre à la céleste charité, Racine, Cantiques, I. … Mille fois Ta louange a monté ma lyre avec ma voix, Chénier, Élég. 28. Quittez la lyre, ô ma Muse, Et déchiffrez ce mandat ; Vous voyez qu'on vous accuse De plusieurs crimes d'État, Béranger, Muse en fuite. Impose donc silence aux plaintes de ta lyre ; Des cœurs nés sans vertu l'infortune est l'écueil ; Mais toi, roi détrôné, que ton malheur t'inspire Un généreux orgueil ! Lamartine, Méd. I, 14. Quelquefois seulement, quand mon âme oppressée Sent en rhythmes nombreux déborder ma pensée, Au souffle inspirateur du soir, dans les déserts, Ma lyre abandonnée exhale encor des vers, Lamartine, ib. I, 20.

    Prendre, accorder sa lyre, se disposer à faire des vers. Quitter, déposer, suspendre sa lyre, cesser de faire des vers. Les maîtres de la lyre, les grands poëtes. Tels dans leurs fictions les maîtres de la lyre Représentent les dieux, enfants de leur délire Dans l'oubli du nectar laissant les cieux déserts, Gilbert, Ode à Monsieur.

  • 3 Terme d'astronomie. Constellation de l'hémisphère septentrional.
  • 4 Terme de zoologie. Nom vulgaire et spécifique de deux poissons : le callyonyme lyre (acanthoptérygiens), dit aussi lavandière et lacert, et la trigle lyre (acanthoptérygiens).

    Nom vulgaire et spécifique d'un oiseau, le ménure lyre (gallinacés).

    Lyre de David, coquille du genre harpe.

  • 5 Terme d'anatomie. Surface inférieure de la voûte à trois piliers du cerveau, où l'on remarque deux lignes longitudinales auxquelles viennent se rendre d'autres lignes transversales ou obliques.

HISTORIQUE

XIIe s. E David e tuz ces [ceux] de Israel juerent devant nostre seignur od multes manieres d'estrumens, od harpes, e lires, e tympans, e frestels, e cymbals, Rois, p. 139.

XVIe s. Seigneur, change et monte ma lyre, Afin qu'au lieu du vain martyre Qui se paist des cœurs ocieux…, Desportes, Œuvres chrest. XVIII, Ode. Adieu, vieille forest, le jouet de zephyre, Où premier j'accorday les langues de ma lyre, Ronsard, Contre les bûcherons de la forêt de Gatines.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

LYRE. Ajoutez :

6Engin en forme de lyre destiné à suspendre quelque chose. Suspensions et lyres pour lampes, Alman. Didot-Bottin, 187172, p. 1063, 1re col.
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Encyclopédie, 1re édition (1751)

LYRE, s. f. (Astr.) constellation de l’hémisphere septentrional. Voyez Étoile & Constellation.

Le nombre de ces étoiles dans les catalogues de Ptolomée & de Tycho est de dix, & dans le catalogue anglois de dix-neuf.

Lyre, (Musique anc.) en grec λύρα, χέλυς, en latin lyra, testudo, instrument de musique à cordes, dont les anciens faisoient tant d’estime, que d’abord les Poëtes en attribuerent l’invention à Mercure, & qu’ils la mirent ensuite entre les mains d’Apollon.

La lyre étoit différente de la cithare, 1°. en ce que les côtés étoient moins écartés l’un de l’autre ; 2°. en ce que sa base ressembloit à l’écaille d’une tortue, animal dont la figure, dit-on, avoit donné la premiere idée de cet instrument. La rondeur de cette base ne permettoit pas à la lyre de se tenir droite comme la cithare, & il falloit, pour en jouer, la serrer avec les genoux. On voit par-là qu’elle avoit quelque rapport à un luth posé debout, & dont le manche seroit fort court : & il y a grande apparence que ce dernier instrument lui doit son origine. En couvrant d’une table la base ou le ventre de la lyre, on en a formé le corps du luth, & en joignant par un ais les deux bras ou les deux côtés de la premiere, on en a fait le manche du second.

La lyre a fort varié pour le nombre des cordes. Celle d’Olympe & de Terpandre n’en avoit que trois, dont ces Musiciens savoient diversifier les sons avec tant d’art, que, s’il en faut croire Plutarque, ils l’emportoient de beaucoup sur ceux qui jouoient d’une lyre plus composée. En ajoutant une quatrieme corde à ces trois premieres, on rendit le tétracorde complet, & c’étoit la différente maniere dont on accordoit ces quatre cordes, qui constituoit les trois genres, diatonique, chromatique & enharmonique.

L’addition d’une cinquieme corde produisit le pentacorde, dont Pollux attribue l’invention aux Scythes. On avoit sur cet instrument la consonnance de la quinte, outre celle de la tierce & de la quarte que donnoit déja le tétracorde. Il est dit du musicien Phrynis, que de sa lyre à cinq cordes il tiroit douze sortes d’harmonies, ce qui ne peut s’entendre que de douze chants ou modulations différentes, & nullement de douze accords, puisqu’il est manifeste que cinq cordes n’en peuvent former que quatre, la deuxieme, la tierce, la quarte & la quinte.

L’union de deux tétracordes joints ensemble, de maniere que la corde la plus haute du premier devient la base du second, composa l’heptacorde, ou la lyre à sept cordes, la plus en usage & la plus célebre de toutes.

Cependant, quoiqu’on y trouvât les sept voix de la musique, l’octave y manquoit encore. Simonide l’y mit enfin, selon Pline, en y ajoutant une huitieme corde, c’est-à-dire en laissant un ton entier d’intervalle entre les deux tétracordes.

Long-tems après lui, Timothée Milésien, qui vivoit sous Philippe roi de Macédoine vers la cviij. olympiade, multiplia les cordes de la lyre jusqu’au nombre de douze, & alors la lyre contenoit trcis tétracordes joints ensemble, ce qui faisoit l’étendue de la douzieme, ou de la quinte par-dessus l’octave.

On touchoit de deux manieres les cordes de la lyre, ou en les pinçant avec les doigts, ou en les frappant avec l’instrument nommé plectrum, πλῆκτρον, du verbe πλήττειν ou πλήσσειν, percutere, frapper. Le plectrum étoit une espece de baguette d’ivoire ou de bois poli, plutôt que de métal pour épargner les cordes, & que le musicien tenoit de la main droite. Anciennement on ne jouoit point de la lyre sans plectrum ; c’étoit manquer à la bienséance que de la toucher avec les doigts ; & Plutarque, cité par Henri Etienne, nous apprend que les Lacédémoniens mirent à l’amende un joueur de lyre pour ce sujet. Le premier qui s’affranchit de la servitude du plectrum fut un certain Epigone, au rapport de Pollux & d’Athénée.

Il paroît par d’anciens monumens & par le témoignage de quelques auteurs, qu’on touchoit des deux mains certaines lyres, c’est-à-dire qu’on en pinçoit les cordes avec les doigts de la main gauche, ce qui s’appelloit jouer en-dedans, & qu’on frappoit ces mêmes cordes de la main droite armée du plectrum, ce qui s’appelloit jouer en-dehors. Ceux qui jouoient sans plectrum, pouvoient pincer les cordes avec les doigts des deux mains. Cette maniere de jouer étoit pratiquée sur la lyre simple, pourvu qu’elle eût un nombre de cordes suffisant, & encore plus sur la lyre à double cordes. Aspendius, un des plus fameux joueurs de lyre dont l’histoire fasse mention, ne se servoit que des doigts de la main gauche pour toucher les cordes de cet instrument, & il le faisoit avec tant de délicatesse, qu’il n’étoit presque entendu que de lui-même ; ce qui lui fit appliquer ces mots, mihi & fidibus cano, pour marquer qu’il ne jouoit que pour son unique plaisir.

Toutes ces observations que je tire de M. Burette sur la structure, le nombre des cordes, & le jeu de la lyre, le conduisent à rechercher quelle sorte de concert pouvoit s’exécuter par un seul instrument de cette espece ; mais je ne puis le suivre dans ce genre de détail. C’est assez de dire ici que la lyre à trois ou quatre cordes n’étoit susceptible d’aucune symphonie ; qu’on pouvoit sur le pentacorde jouer deux parties à la tierce l’une de l’autre ; enfin que plus le nombre des cordes se multiplioit sur la lyre, plus on trouvoit de facilité à composer sur cet instrument des airs qui fissent entendre en même tems différentes parties. La question est de savoir si les anciens ont profité de cet avantage, & je crois que s’ils n’en tirerent pas d’abord tout le parti possible, du moins ils y parvinrent merveilleusement dans la suite.

De-là vient que les poëtes n’entendent autre chose par la lyre que la plus belle & la plus touchante harmonie. C’est par la lyre qu’Orphée apprivoisoit les bêtes farouches, & enlevoit les bois & les rochers ; c’est par elle qu’il enchanta Cerbere, qu’il suspendit les tourmens d’Ixion & des Danaïdes ; c’est encore par elle qu’il toucha l’inéxorable Pluton, pour tirer des enfers la charmante Euridice.

Aussi l’auteur de Télémaque nous dit, d’après Homere, que lorsque le prêtre d’Apollon prenoit en main la lyre d’ivoire, les ours & les lions venoient le flatter & lécher ses piés ; les satyres sortoient des forêts, pour danser autour de lui ; les arbres même paroissoient émus, & vous auriez cru que les rochers attendris alloient descendre du haut des montagnes aux charmes de ses doux accens ; mais il ne chantoit que la grandeur des dieux, la vertu des héros & le mérite des rois, qui sont les peres de leurs peuples.

L’ancienne tragédie grecque se servoit de la lyre dans ses chœurs. Sophocle en joua dans sa piece nomméee Thamyris, & cet usage subsista tant que les chœurs conserverent leur simplicité grave & majestueuse.

Les anciens monumens de statues, de bas-reliefs & de médailles nous représentent plusieurs figures différentes de lyre, montées depuis trois cordes jusqu’à vingt, selon les changemens que les Musiciens firent à cet instrument.

Ammien Marcellin rapporte que de son tems, & cet auteur vivoit dans le iv. siecle de l’ere chrétienne, il y avoit des lyres aussi grosses que des chaises roulantes : Fabricantur lyræ ad speciem carpentorum ingentes. En effet, il paroît que dès le tems de Quintilien, qui a écrit deux siecles avant Ammien Marcellin, chaque son avoit déja sa corde particuliere dans la lyre. Les musiciens, c’est Quintilien qui parle, ayant divisé en cinq échelles, dont chacune a plusieurs degrés, tous les sons qu’on peut tirer de la lyre, ils ont placé entre les cordes qui donnent les premiers tons de chacune de ces échelles, d’autres cordes qui rendent des sons intermédiaires, & ces cordes ont été si bien multipliées, que, pour passer d’une des cinq maîtresses-cordes à l’autre, il y a autant de cordes que de degrés.

On sait que la lyre moderne est d’une figure approchante de la viole, avec cette différence, que son manche est beaucoup plus large, aussi-bien que ses touches, parce qu’elles sont couvertes de quinze cordes, dont les six premieres ne font que trois rangs ; & si on vouloit doubler chaque rang comme au luth, on auroit vingt-deux cordes ; mais bien loin qu’on y songe, cet instrument est absolument tombé de mode. Il y a cependant des gens de goût, qui prétendent que, pour la puissance de l’expression sur le sentiment, le clavessin même doit lui céder cette gloire.

Ils disent que la lyre a sur le clavessin les avantages qu’ont des expressions non-interrompues sur celles qui sont isolées. Le premier son de la lyre dure encore, lorsque le second son commence ; à ce second son, il s’en joint un troisieme, & tous ces sons se font entendre en même tems. Il est vrai que, sans beaucoup de science & de délicatesse, il est très-difficile de porter à l’ame l’impression puissante de cette union de sons confuse ; & voilà ce qui peut avoir dégradé la lyre : mais il n’en étoit pas vraissemblablement de même du jeu de Terpandre, de Phrynis & de Timothée ; ces grands maîtres pouvoient, par un savant emploi des sons continus, mouvoir les ressorts les plus secrets de la sensibilité. (D. J.)

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Étymologie de « lyre »

Provenç. esp. et ital. lira ; du lat. lyra, qui est le grex λύρα.

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(Date à préciser) Du latin lyra, emprunté au grec ancien λύρα, lúra.
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Phonétique du mot « lyre »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
lyre lir

Fréquence d'apparition du mot « lyre » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Citations contenant le mot « lyre »

  • Notre coeur est un instrument incomplet, une lyre où il manque des cordes, et où nous sommes forcés de rendre les accents de la joie sur le ton consacré aux soupirs.
    François René de Chateaubriand — Atala René
  • Oh ! La muse se doit aux peuples sans défense. J'oublie alors l'amour, la famille, l'enfance, Et les molles chansons et le loisir serein, Et j'ajoute à ma lyre une corde d'airain !
    Victor Hugo — Les Feuilles d'automne, Amis, un dernier mot !
  • La femme est une lyre qui ne livre ses secrets qu’à celui qui sait en jouer.
    Honoré de Balzac
  • Tu demandes qu’un jour mon fragile pinceau, fasse vivre pour nous un souvenir si beau. Et ma lyre aujourd’hui te répond et l’éveille.
    Max Jacob — Le laboratoire central
  • Les vers sont enfants de la lyre, Il faut les chanter, non les dire ; A peine aujourd'hui les lit-on.
    La Motte-Houdar — Odes
  • Quel orgueil d’être seul, les mains contre son front, À noter des vers doux comme un accord de lyre Et songeant à la mort prochaine, de se dire : Peut-être que j’écris des choses qui vivront !
    Georges Rodenbach
  • Heureux ceux qui ont une lyre dans le coeur, et dans l’esprit une musique qu’exécutent leurs actions !
    Joseph Joubert — Pensées
  • Salut ; c'est le printemps ! c'est l'ange de tendresse ! Ne devinez-vous pas pourquoi je bous d'ivresse ? Ange de ma grand-mère, ange de mon berceau, Ne devinez-vous pas que je deviens oiseau, Que ma lyre frissonne et que je bats de l'aile Comme hirondell
    Arthur Rimbaud — Un Coeur sous une soutane
  • Plus fortes que l'alcool, plus vastes que nos lyres, Fermentent les rousseurs amères de l'amour.
    Arthur Rimbaud — Poésies
  • Étrange histoire au zoo de Bâle, qui reste fermé au public jusqu’au 22 janvier : un poisson-ange lyre femelle a changé de sexe pour devenir mâle, et cela sans élément déclencheur connu
    Insolite. Zoo de Bâle : un poisson-ange lyre femelle change de sexe

Traductions du mot « lyre »

Langue Traduction
Anglais lyre
Espagnol lira
Italien lira
Allemand leier
Chinois 七弦琴
Arabe قيثارة
Portugais lira
Russe лира
Japonais lyre
Basque lira
Corse lira
Source : Google Translate API

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Nombre de points du mot lyre au scrabble : 7 points

Lyre

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