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Venir

Définitions de « venir »

Trésor de la Langue Française informatisé

VENIR, verbe intrans.

I. − [Sens spatial]
A. − [Constr. sans compl. de lieu] Se déplacer dans la direction d'un lieu ou d'une personne de référence. Venir avec qqn; venir en personne; venir d'une minute à l'autre; venir à cheval, à pied, en voiture, par le train; venir par Paris; venir en permission, en vacances; venir pour quelque chose, pour dîner; s'en aller comme on est venu. Le chasseur lui fit part d'un coup de téléphone; le comte d'Orgel regrettait de ne pouvoir venir après dîner (Radiguet, Bal, 1923, p. 72).
Aller et venir. Comme il habitait au-dessus de chez nous, je l'entendais aller et venir, frapper du pied, renverser des chaises, bâiller longuement (Duhamel, Terre promise, 1934, p. 99).Ne faire qu'aller et venir. V. aller1I A 1 b.
Locutions
Venir à l'aide de qqn, venir en aide à qqn. Aider quelqu'un, aller près de quelqu'un pour l'aider. Il a l'air d'un mendiant et personne n'y fait attention. Ne trouvant nulle âme pour venir à son aide, il se décide à dépenser au moins ce qu'il a dans sa poche (Barbusse, Feu, 1916, p. 158).Il fit un emprunt à un de ses camarades, aussi pauvre que lui et qui se priva pour lui venir en aide (Vailland, Drôle de jeu, 1945, p. 183).
Venir au secours de qqn. S'approcher de quelqu'un pour le secourir; secourir quelqu'un. Tu sais bien, ma fille, dit Baccarat, que nous sommes seules ici, que personne ne viendra à ton secours (Ponson du Terr., Rocambole, t. 3, 1859, p. 290).Toutes les fois que le baron venait au secours de quelqu'un, pécuniairement, l'obligé devait venir au secours du baron, physiquement (Montherl., Célibataires, 1934, p. 803).
DR. Venir de son chef ou par représentation. Se présenter pour avoir sa part d'une succession d'un partage. Les enfants ou leurs descendants succèdent à leurs père et mère, (...). Ils succèdent par égales portions et par tête, quand ils sont tous au premier degré et appelés de leur chef: ils succèdent par souche, lorsqu'ils viennent tous ou en partie par représentation (Code civil 1990, Paris, Litec, 1990, art. 745, p. 352).
[Constr. avec faire]
Faire venir qqn.Demander à quelqu'un de se rendre auprès de soi; appeler, convoquer quelqu'un. J'ai fait venir un serrurier de Rouen, et lui ai commandé pour ma chambre des persiennes de fer (Maupass., Contes et nouv., t. 2, Horla, 1886, p. 1121).Il imaginait Catherine chez lui; il fit venir les ouvriers et se dit que quand elle reviendrait, l'appartement sentirait affreusement la peinture (Nizan, Conspir., 1938, p. 162).
Faire venir qqc.Faire apporter, faire livrer quelque chose. J'ai résolu de prendre ici mes quartiers d'hiver. J'ai fait venir des livres (Tocqueville, Corresp.[avec Gobineau], 1853, p. 200).
[Constr. avec voir] Voir quelqu'un, quelque chose qui arrive. Voir venir les nuages, la pluie, la tempête. Flick justement, sur le seuil du quartier, prenait le frais après dîner, en roulant une cigarette (...), quand il les vit venir du coin de l'œil (Courteline, Train 8 h. 47, 1888, p. 231).Je vois venir Haudouin avec cet air qu'il avait de ne pas se presser en mettant quand même une lieue derrière lui à chaque demi-heure (Aymé, Jument, 1933, p. 165).
Loc. fig. Voir venir qqn (avec ses gros sabots). V. sabot A 2 b.
Empl. impers. Au milieu du sillage, derrière, une petite chose grise, ayant la même forme que le navire et le suivant toujours entre deux eaux: le requin. Il y a toujours un requin qui suit, rarement deux; seulement, quand on l'a pêché, il en vient un autre (Loti, Mon frère Yves, 1883, p. 69).Les malades? Depuis quelque temps, il en vient d'un peu partout (Romains, Knock, 1923, iii, 3, p. 16).
B. − [Constr. avec un compl. de lieu indiquant le terme du déplacement]
1.
a) Aller auprès d'une personne, dans un lieu, pris comme référence. Venir à l'école, à Marseille, en Écosse; venir chez qqn; venir dans les bras, sur les genoux de qqn. Elle m'avait dit de venir cette nuit, de venir dans sa chambre (Cros, Coffret santal, 1873, p. 13).Ma tante n'est pas là, reprend Annie, vous pouvez venir à la maison, vous coucherez dans sa chambre (Vailland, Drôle de jeu, 1945, p. 245).
[Le suj. désigne une chose] Odeur, lumière qui vient jusqu'à qqn; paroles qui viennent aux oreilles, aux lèvres de qqn; l'eau m'en vient à la bouche. Une bouffée de chaleur lui vint au visage (Martin du G., Thib., Mort père, 1929, p. 1314).
Loc. Faire venir les larmes aux yeux. Faire pleurer, émouvoir. On soulève, en marchant, une épaisse poussière blanchâtre qui prend à la gorge et fait venir les larmes aux yeux (Gide, Journal, 1943, p. 204).
b) Aller, se diriger vers. Venir au devant de qqn, sur qqn/qqc., vers qqc. C'est le lendemain que l'armée fit son entrée à Mayence. Toute la ville vint à notre rencontre (Erckm.-Chatr., Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 64).Elle vint à son oncle: Eh bien! mon oncle, ça va un peu? (Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p. 210).
[Le suj. désigne une chose] La brume venait vers eux, spectrale, à une vitesse folle (Peisson, Parti Liverpool, 1932, p. 183).
Fam. [Pour exprimer le défi, la menace] Qu'il y vienne! Aide-moi, Jean, on va le mener chez M. le maire. Viens-y donc! Arrive me toucher, si tu peux, cagot! Le roulier se planta devant sa maison, la menace au bout du poing tendu (Adam, Enf. Aust., 1902, p. 239).La ferme! J' la fermerai si j' veux, saleté!Un trois kilos te la fermerait vite!Non, mais chez qui?Viens-y voir, mais viens-y donc! Ils écument et grincent et s'avancent l'un vers l'autre (Barbusse, Feu, 1916, p. 31).
MAR. Venir au lof*. Venir au vent*. Venir sur tribord, sur babord. Gouverner de manière à se diriger un peu plus vers tribord, vers babord (d'apr. Gruss 1952).
c) Venir à qqn. [P. allus. à l'Évangile selon St Marc, X, 13] Aller trouver quelqu'un, s'adresser à quelqu'un. Je viens à vous, Seigneur, père auquel il faut croire (Hugo, Contempl., t. 2, 1856, p. 401).
2. Au fig., ou p. métaph. [Le suj. désigne une idée, un affect] Se présenter à. Espérance, pensée qui vient à qqn; venir dans l'esprit, à l'idée de qqn; sentiment qui vient au cœur de qqn; la peur lui vient au ventre. Que de choses ici viennent à la pensée! (Valéry, Variété [I], 1924, p. 130).Je restai immobile près de la portière, dans un grand tourbillon de pensées. Les nobles attitudes me viennent toujours trop tard à l'esprit (Sagan, Bonjour tristesse, 1954, p. 60).
Empl. impers. Il vient une idée, une pensée, un sentiment de honte à qqn; il lui vient à l'idée, à l'esprit de + inf. La honte de son ignorance s'en allait, il lui venait un orgueil, depuis qu'il se sentait penser (Zola, Germinal, 1885, p. 1275).Il ne viendrait à la pensée de personne de puiser dans le dictionnaire une poignée de mots et d'appeler cela un texte (Huyghe, Dialog. avec visible, 1955, p. 100).
3. [Le compl. désigne un niveau, une hauteur, une limite] Arriver à.
a) [Le suj. désigne une pers.] Le garçon se plaça devant moi. Nulle erreur possible. Il me venait presque à l'épaule, et je pus le constater d'une manière indiscutable (Duhamel, Suzanne, 1941, p. 176).
P. métaph. Ne pas venir à la cheville* de qqn. Beaucoup de saints se sont humiliés devant des êtres qui ne leur venaient pas à la cheville (Duhamel, Journ. Salavin, 1927, p. 76).
b) [Le suj. désigne une chose] Un homme à longue barbe grise, vêtu d'une redingote recousue à la ficelle, paraissait craindre le froid aux cheveux: son chapeau boule lui venait aux oreilles (Hamp, Champagne, 1909, p. 215).Des blés superbes qui leur venaient aux épaules (Benjamin, Gaspard, 1915, p. 62).
4. [Le suj. désigne une pers.]
a) [Le compl. désigne un but, une étape ou le résultat d'un processus ou d'une évolution] Arriver, parvenir à. Venir à composition, à résipiscence; venir à la démocratie.
Loc. Y venir. S'y résoudre, l'accepter. Plaise au ciel, quand tu auras trente ans, t'accorder une bonne place à Bicêtre ou aux Repenties, puisque tu dois y venir tôt ou tard! (Janin, Âne mort, 1829, p. 81):
« N'importe, il a tort; c'est si bête, le mariage! » − « Tu parles légèrement, mon ami! » répliqua M. Des Aulnays, tandis qu'une larme roulait dans ses yeux, au souvenir de sa défunte. Et Forchambeaux répéta plusieurs fois de suite, en ricanant: − « Vous y viendrez vous-même, vous y viendrez ! » Cisy protesta. Il aimait mieux se divertir, « être régence ». Flaub., Éduc. sent., t. 2, 1869, p. 24.
Venir à bout de qqc. V. bout I C 2 b.
b) [Le compl. désigne un problème, une question, un sujet] Arriver à, aborder. Venir à un sujet, à une question. Trêve d'arguties, monsieur, et venons au fait (Dumas père, P. Jones, 1838, v, 5, p. 198).
[Constr. avec un inf.] Venir à considérer, à envisager qqc. Ne sachant rien l'un de l'autre et de préoccupations si différentes, leur conversation se traîna juqu'à ce qu'ils vinssent à parler des animaux (Barrès, Enn. Lois, 1893, p. 46).
c) Loc. En venir à
α) Arriver à. Synon. venir à (supra I B 4 a et b).Devenir passive, être contredite et contrainte, peiner, c'est là, semble-t-il, pour la volonté, une étrange façon d'en venir à ses fins (Blondel, Action, 1893, p. 150).Le père accusait sa bru de dresser son garçon contre lui, car il n'avait jamais pardonné à Adélaïde d'être entrée sans un sou dans sa maison, (...). Quand la dispute en venait à ce point, la malédiction paternelle était en route, et Honoré jurait qu'il allait quitter la baraque le lendemain (Aymé, Jument, 1933, p. 32).
β) Finir par, utiliser en dernier recours. En venir aux dernières extrémités, aux grands moyens; en venir jusque-là. Il disait que si les Girondins s'obstinaient à se mettre en travers de toutes les mesures nécessaires au salut de la patrie, il faudrait en venir aux coups tôt ou tard (Erckm.-Chatr., Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 97).Flaubert et Tourgueneff discutaient jusqu'à en venir presque aux mains, sur le roman d'un de leurs camarades (Blanche, Modèles, 1928, p. 179).
Loc. Où veut-il en venir? Que cherche-t-il? Quel est son but en fin de compte? Tu vois dans mes yeux quelque chose qui hésite, tu vois que je te laisse parler au lieu d'appeler mes soldats; alors tu marques, tu attaques tant que tu peux. Où veux-tu en venir, petite furie? (Anouilh, Antig., 1946, p. 180).
γ) [Constr. avec un inf.] Finir par. Après avoir dit à Brigitte que je doutais de sa conduite passée, j'en doutai véritablement, et dès que j'en doutai, je n'y crus pas. J'en venais à me figurer que Brigitte me trompait, elle que je ne quittais pas une heure par jour (Musset, Confess. enf. s., 1836, p. 274).Il était susceptible; il en vint à ne plus ouvrir la bouche que lorsqu'il s'agissait d'annoncer un accident, un malheur, enfin quelque événement en soi assez grave pour que son accent eût chance de passer inaperçu (Paulhan, Fleurs Tarbes, 1941, p. 55).
C. − [Constr. avec un compl. prép. de]
1. [Le compl. indique le point de départ, la provenance]
a) [Le suj. désigne un animé] Arriver en provenance de. D'où vient-il? venir du ciel, de la mer; venir de nulle part. Quand il s'est amené au lycée de Tulle, il venait de Paris, il m'en a jeté plein la vue (Beauvoir, Mandarins, 1954, p. 254).
b) [Le suj. désigne une chose] Provenir de, être apporté de. Épée qui vient de Tolède; thé qui vient de Ceylan, de Chine; lumière qui vient du soleil; un air de danse venait de la salle. Un immense vent venait de l'Est comme un souffle de malédiction divine qu'eussent annoncé des prophètes (Gide, Journal, Feuillets, 1896, p. 79).Le vin de votre père vient directement du producteur (H. Bazin, Vipère, 1948, p. 180).
[Constr. avec faire] La mère de M. Rosenthal faisait venir d'Oxford les graines de raygrass (Nizan, Conspir., 1938, p. 133).
En partic. Provenir par héritage de. Intaille représentant Alexandrine, la fille de Mmede Pompadour, legs fait au duc de Chabot et qui lui vient de famille (Goncourt, Journal, 1887, p. 707).J'ai même dû vendre, l'an dernier, un domaine de cent soixante hectares, la Michouille, qui me venait de ma grand'mère maternelle (Romains, Knock, 1923, ii, 5, p. 12).
2. [Le compl. indique l'orig.]
a) [Le suj. désigne une pers.] Sortir de, être issu de, descendre de. Venir d'une bonne famille, d'une vieille famille périgourdine, de la petite bourgeoisie. Tout le genre humain vient d'un couple (J. de Maistre, Soirées St-Pétersb., t. 1, 1821, p. 94).
b) [Le suj. désigne une chose] Avoir son origine dans. C'est de Dieu que vient la force qui délivre, parce que c'est de Dieu que vient l'amour qui unit (Lamennais, Paroles croyant, 1834, p. 257).J'ai vérifié par ailleurs que Dani n'a vu personne du service entre le moment où je lui ai transmis le rendez-vous et le moment de son arrestation. Il n'a donc pu en parler qu'à Mathilde. Conclus: la fuite ne peut venir que de Mathilde ou de moi (Vailland, Drôle de jeu, 1945, p. 48).
En partic. [Le suj. désigne une lang., un mot]
Avoir pour origine étymologique. Le français vient du latin. Le plus répandu des petits dictionnaires manuels a soin de spécifier que écaille vient du latin squama, ce qui est absurde (Gourmont, Esthét. lang. fr., 1899, p. 154).
Être un dérivé de. Désirable vient de désir. Bleuet vient de bleu. Ne tenir aucun compte de la stupide orthographe des dictionnaires qui sont tous faits par des ânes (Hugo, Corresp., 1862, p. 375).
3. [Le compl. indique la cause] Avoir sa cause dans, être l'effet de. Synon. provenir.Le malheur vient du vice, et non de la pauvreté (Toepffer, Nouv. genev., 1839, p. 226).Ma chère maman, qui ne me reconnaissait plus, me demandait d'où venait cette paresse nouvelle (A. France, Pt Pierre, 1918, p. 78).
Venir de ce que + ind.L'étrangeté superficielle du texte vient de ce qu'étant une succession de notes prises au jour le jour, il a le décousu des notes et les lueurs soudaines de beautés non développées (Durry, Nerval, 1956, p. 100).
Empl. impers. De là vient que, d'où vient que + ind.C'est pourquoi. De là vient que chacun juge les actions des autres comme il juge les siennes propres, de tout près, du dedans, avec toutes leurs innombrables nuances et leurs contradictions qui empêchent les classifications, les étiquetages grossiers; de là vient que personne ne peut jamais avoir de la conduite d'autrui cette vision panoramique qui seule permet la rancune ou le blâme (Sarraute, Ère soupçon, 1956, p. 36).
II. − [Sens temporel]
A. − [Idée d'apparition dans le temps]
1. [Le suj. désigne une pers.] Arriver à un certain moment, dans la vie sociale, etc. Venir à son heure, trop tard, trop tôt; venir après qqn; venir à temps. Comment se peut-il (c'est ici le mystère) que ceux qui vinrent après nous, et qui s'en iront tout de même (...) aient eu d'autres désirs que les nôtres, et d'autres dieux? (Valéry, Variété[I], 1924, p. 110).
Empl. impers. Je suis (...) bien aise qu'il vienne de temps en temps quelque homme assez hardi pour rompre en visière à ces docteurs si sûrs de doctrines qu'ils n'ont pas inventées (Delacroix, Journal, 1853, p. 109).
En partic. Venir au jour, au monde, ou, p. ell., venir. Naître. Les autres avaient tout trouvé en venant au monde, moi, j'avance par mon courage et ma chance (Erckm.-Chatr., Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 270).L'enfant vint au monde, mais c'était encore une fille (Cendrars, Bourlinguer, 1948, p. 118).
2. [Le suj. désigne un événement] Se produire, survenir. Prendre les choses comme elles viennent. Il me dit (...) Qu'il n'avait pas encor voiture, Mais que cela viendrait bientôt (Baudel., Fl. du Mal, 1865, p. 290).Ah! puisque tout ne peut être sauvé, apprenons du moins à préserver la maison de l'amour! Vienne la peste, vienne la guerre et, toutes portes closes, vous à côté de nous, nous défendrons jusqu'à la fin (Camus, État de siège, 1948, 3epart., p. 298).
Empl. impers. Par suite d'un refroidissement, il lui vint une angine (Flaub., Cœur simple, 1877, p. 56).
Laisser venir, voir venir (supra I A). Attendre en observant le développement, l'évolution des événements. Impose de suite l'idée que tu n'es pas facile à attraper, cela donne un air capable; et puis laisse venir (Gobineau, Pléiades, 1874, p. 80).J'ai déjà mis de côté, pour vous les remettre dès lundi, un certain nombre d'obligations qui vous assurent une centaine de mille francs de rente. Avec cela vous pourrez voir venir (Mauriac, Nœud vip., 1932, p. 225).
Loc. Tout vient à point à qui sait attendre. V. attendre II B 1 c.Prendre les choses comme elles viennent. V. prendre 1resection I C 2 b β.
3. [Le suj. désigne un moment, une période de temps] Arriver, apparaître, se manifester dans le cours du temps. Le moment, le temps, l'heure vient (de + inf.) ; l'automne vient; son heure viendra; le jour, le soir venu; la nuit venue. Fritz reprenait son histoire sentimentale, et c'est ainsi que venait l'heure de dormir (Erckm.-Chatr., Ami Fritz, 1864, p. 111).Mon parrain, regardant la cour que dorait le soleil, sourit avec mélancolie:Quel temps radieux! Les derniers beaux jours nous sont les plus chers. Ils nous semblent une faveur du ciel, fit ma mère. Bientôt viendront les temps froids et sombres (A. France, Pt Pierre, 1918, p. 161).
Empl. impers. Quand on a travaillé toute sa vie, il vient un moment où on s'aperçoit qu'on aurait pu faire autre chose, et, alors, on regrette, oh! oui, on regrette! (Maupass., Contes et nouv., t. 1, Bois, 1886, p. 557).Dans chaque existence humaine, il vient un jour, une heure, un bref instant, où Dieu, tout à coup, daigne apparaître dans toute son évidence et nous tend brusquement la main (Martin du G., Thib., Mort père, 1929, p. 1261).
4. Loc. adj. À venir. Qui doit arriver, se produire; futur. L'existence, le monde à venir; les générations, les hommes à venir; les siècles, les temps à venir. La médiocrité de sa vie, et non pas seulement à l'hôpital, de l'étude du bouillon Chartier, de sa chambre, mais de sa vie à venir, mais de ce lendemain pour lequel il esquintait sa jeunesse (Aragon, Beaux quart., 1936, p. 289).Les mots, le rythme, la tonalité, la mélodie, les harmonies d'une même œuvre à venir, dont l'intelligence de l'artiste n'embrasse pas encore le sens réel et la figure (Rolland, Beethoven, t. 1, 1937, p. 210).
B. − [Idée de développement dans le temps]
1. [Le suj. désigne un végétal] Pousser. Blé qui vient bien, mal; arbre long à venir. Ma tante Elisabeth me raconta que mon grand-père était né à Avignon, ville de Provence, pays où venaient les oranges, me dit-elle avec l'accent du regret (...) « Il y a donc un pays où les orangers viennent en pleine terre », dis-je à ma tante? (Stendhal, H. Brulard, t. 1, 1836, p. 93).
[Constr. avec faire] Un jardin pour faire venir des légumes (Mauriac, Nœud vip., 1932, p. 112).
2. P. anal.
a) [Le suj. désigne un enfant ou le petit d'un animal] La Blanchette a fait veau la semaine dernière, et le petit vient bien: c'est une génisse blanche (Erckm.-Chatr., Ami Fritz, 1864, p. 30).Je me porte comme trois Turcs, ma Léna aussi, et vos deux fillettes viennent à ravir (Sand, Corresp., t. 5, 1868, p. 259).
b) [Le suj. désigne un symptôme de réaction] Le sang réagit. À certains, dans des cas analogues, des boutons viennent sur tout le corps (Audiberti, Quoat, 1946, 2etabl., p. 73).
C. − Au fig. [Le suj. désigne des idées, des productions intellectuelles ou artistiques] Arriver, se manifester, se développer. Ce matin, travaillé à mon livre avec ces éternelles difficultés: les idées viennent, les mots refusent de se montrer (Green, Journal, 1957, p. 319).
Venir bien, mal. Se développer bien, mal. Je travaille depuis deux jours à (...) un petit Samuel d'après sir Joshua Reynolds (...) à l'aquarelle. Cela vient horriblement mal (Mérimée, Lettres Mmede La Rochejacquelein, 1856, p. 38).J'ai abandonné mon Sterne qui venait mal, et travaille maintenant à un pastiche de Proust avec grand plaisir (Maurois, Mes songes, 1933, p. 142).
GRAV., PHOT. Dont le tirage est bon, mauvais. Épreuve, tirage qui vient bien, mal. [MrBelgrand à sa fille:] « Et toi, tu as tiré les photographies? » « Oui, père, » répondit-elle. « J'ai les quatre faces du chapiteau de la Passion: (...) Il y avait une lumière excellente. Les clichés seront très bien venus (...) » (Bourget, Conflits int., 1925, p. 43).
III. − Empl. semi-auxil.
A. − Venir + inf.
1. [Indique le but du mouvement au terme duquel se réalise l'action exprimée par l'inf., le commencement de l'action exprimée par l'inf.] Venir acheter, réclamer qqc.; venir voir qqc.; venir chercher, voir qqn; venir demander conseil. Juliette eut presque de la joie lorsqu'elle entendit le pas de sa grand-mère qui venait vérifier au salon le bon fonctionnement des convenances (Miomandre, Écrit eau, 1908, p. 137).
2. [Indique le caractère fortuit ou possible de l'action exprimée par l'inf.] On viendra sans doute dire que. Que le courtisan ne vienne pas ramper sur mon amour; que la vipère ne vienne pas jeter son venin sur mes fleurs (Dumas père, Intrigue et amour, 1847, 7etabl., 3, p. 274).
3. [Indique une mise en relief de l'action exprimée par l'inf.] Vous venez prétendre que; ne venez pas dire que. Le souvenir vague et confus venait étinceler par moments à son esprit (Sue, Atar-Gull, 1831, p. 18).Mais une occupation vint la distraire (Flaub., Cœur simple, 1877, p. 25).
B. − Venir à + inf.
1. [Indique que l'action exprimée par l'inf. se produit par hasard, fortuitement, dans une prop. introd. par si] S'il venait à pleuvoir. À quoi bon, dis-moi, retarder plus longtemps notre union? Si le monde venait à s'apercevoir de notre liaison, on dirait bien du mal de moi (Borel, Champavert, 1833, p. 20).Que ferais-je si jamais tout ce que nous sommes en train d'entreprendre vient à rater? (Vailland, Drôle de jeu, 1945, p. 120).
2. [Indique que l'action exprimée par l'inf. commence] Se mettre à. La pluie vient à tomber. Tout porte à croire que nous allons vers la famine. L'on s'y attend, et que le pain même vienne bientôt à manquer (Gide, Journal, 1943, p. 180).
C. − Venir de + inf.[Indique que l'action exprimée par l'inf. s'est achevée très récemment] Venir d'acheter une maison, d'écrire quelques mots, de faire qqc.; venir d'arriver, de rentrer; il vient de mourir. Armand avait encore un grand frère, qui venait d'achever ses études de médecine et commençait à chercher clientèle (Gide, Si le grain, 1924, p. 472).
IV. − Empl. pronom., vieilli ou région. S'en venir
A. − [Sens spatial] Synon. de venir (supra I).
1. [Constr. sans compl. de lieu] Là-bas, au bout de l'allée, dans le sentier de lune, deux jeunes gens s'en venaient en se tenant par la taille. Ils s'en venaient, enlacés, charmants, à petits pas (Maupass., Contes et nouv., t. 1, J. Romain, 1886, p. 1298).
2. [Constr. avec un compl. indiquant le lieu où l'on va] Puche, à ce moment, était descendu de sa meule. Il s'en venait vers ses hommes d'un petit pas de promenade, en se dandinant (Benjamin, Gaspard, 1915, p. 59).
B. − Empl. semi-auxil. Synon. de venir (supra III).
1. [Constr. avec un inf.] Une joyeuse chanson montait l'escalier, et s'en vint frapper à la porte (Murger, Scènes vie boh., 1851, p. 245).
2. [Constr. avec un inf. introd. par à] Quand l'art italien, comme un fleuve autrefois, S'en venait à passer par une grande ville, Ce n'était pas alors une eau rare et stérile, Mais un fleuve puissant à la superbe voix (Barbier, Ïambes, 1840, p. 166).
Prononc. et Orth.: [vəni:ʀ], (il) vient [-vjε ̃]. Att. ds Ac. dep. 1694. Conjug. ind. prés.: je viens, tu viens, il vient, nous venons, vous venez, ils viennent; imp.: je venais; passé simple: je vins; fut.: je viendrai; passé composé: je suis venu; plus-que-parfait: j'étais venu; passé ant.: je fus venu; futur ant.: je serai venu, cond.: je viendrais; cond. passé: je serais venu; subj. prés.: que je vienne; imp.: que je vinsse ; passé que je fus venu; plus-que-parfait: que je fusse venu: impér.: viens, venons, venez; passé: sois venu, soyons venu, soyez venu; inf. prés.: venir; passé: être venu; part. prés.: venant; passé: venu, -ue; étant venu. Étymol. et Hist. A. 1. Venir a + subst. marquant le terme du mouvement a) ca 880 « se déplacer pour arriver près du point de référence » (Eulalie, 28 ds Henry Chrestomathie, p. 3); ca 1050 en venir « id. » (Alexis, éd. Chr. Storey, 113); spéc. 1690 « atteindre un certain point » (Fur.); 1842 mar. (Ac. Compl.: Venir au vent [...]. Venir à bâbord ou à tribord); b) 1176-81 fig. venir à + subst. abstr. « apparaître dans l'esprit, être conçu » (Chrétien de Troyes, Charrete, éd. M. Roques, 495); 2. venir de + subst. indiquant l'origine du mouvement a) ca 1050 « arriver en provenance de » (Alexis, 251); b) ca 1170 fig. « provenir, découler de » (Chrétien de Troyes, Erec, éd. M. Roques, 4392); spéc. ca 1250 « descendre (de quelqu'un) » (Grant mal fist Adam, I, 28 ds T.-L.); 1606 « dériver (d'un mot) » (Nicot, s.v. bohourd); c) loc. 1176-81 don vos vient? (Chrétien de Troyes, Charrete, 137); 1580 d'où venoit celà (Montaigne, Essais, I, 20, éd. P. Villey et V.-L. Saulnier, p. 96); 1664 d'où vient que (Molière, Tartuffe, I, 1); 3. a) ca 1050 venir sans compl. de lieu (Alexis, 467); ca 1050 faire venir qqn « lui demander de venir » (ibid., 335); 1539 venir au secours (Est.); b) loc. 1176-81 aler et venir (Chrétien de Troyes, Charrete, 4117); av. 1399 à tous venans « à tous ceux qui se présentent » (J. d'Outrem., Chron., I, 72 ds Gdf. Compl.); 1559 à tout venant (Amyot, Rom., 6 ds Littré); 1559 fig. premier venu « celui pris au hasard » (Id., Vies, Compar. de Lysand. av. Sylla, p. 1781, éd. 1567 ds Gdf. Compl.); 1580 un nouveau venu (Montaigne, op. cit., II, 4, p. 364). B. En relation avec le temps 1. a) ca 980 « se présenter à un certain moment » (Passion, éd. d'Arco Silvio Avalle, 57); ca 1100 impers. (Roland, éd. J. Bédier, 162); déb. xiies. a venir « qui doit arriver » (St Brendan, éd. E. G. R. Waters, 300); ca 1170 qui vient « qui s'approche » (Chrétien de Troyes, Erec, 6493); b) loc. α) 1275 venir a vie « naître » (Adenet le Roi, Berte, éd. A. Henry, 85), supplanté par venir au monde 1560 (Bible, Rebul 4 Eschas 4, 29 d'apr. FEW t. 14, p. 240a); 1690 impers. (Fur.: à force de prier il lui vint une fille); β) 1539 venir tout à point « arriver avec opportunité » (Est.); puis 1611 tout vient à poinct qui peut attendre (Cotgr.); 1868 tout vient à point à qui sait attendre (Littré, s.v. point); γ) 1670 fig. voir venir (qqn) « deviner ses intentions » (Molière, Bourgeois gentilhomme, III, 12); av. 1747 laisser venir « ne pas se presser » (Lesage, Turcaret, III, 9 ds Littré); 2. 1225-30 « arriver, se développer (de plantes) » (Guillaume de Lorris, Rose, éd. F. Lecoy, 1396); ca 1245 « se développer (de quelqu'un) » (Philippe Mousket, Chron., 1342 ds T.-L.); spéc. techn. « se produire, se manifester » 1767 peint. (Dider., Salon de 1767, Œuv. t. XIV, p. 302 ds Pougens ds Littré); 1872 phot., impr. bien venir, mal venir (Littré). C. Venir à indique l'aboutissement après une évolution 1. + subst. ca 1050 « parvenir à un certain stade » (Alexis, 443); ca 1100 en venir a (Roland, 1286); 1160-74 i venir « y parvenir » (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, II, 2624); spéc. ca 1170 venir à chief « parvenir à ses fins » (Marie de France, Lais, éd. J. Rychner, Guiguemar, 740); 1538 venir a composition (Est., s.v. deditionem subire); 1549 venir à bout (Est.); 1575 venir aux mains (Thevet, Cosmogr., XIII, 12 ds Gdf. Compl.); 1674 en venir aux coups (La Fontaine, Contes, IV, 16, 191); 2. + inf. ca 1150 venir a + inf. subst. « se résoudre à » (Wace, St Nicolas, éd. E. Ronsjö, 312); xiiies. venir a + inf. (Du Segretain moine ds Rec. gén. de fabliaux, éd. A. de Montaiglon et G. Raynaud, t. 4, p. 215). D. Avec l'inf. venir servant de simple auxil. 1. fin xes. venir + inf. « faire en sorte de » (Passion, 407); 2. ca 1050 venir a surtout à la 3epers. + inf. « se trouver en train de » (Alexis, 47); 3. ca 1225 venir de + inf. « avoir juste fini de » (Gautier de Coinci, Mir., éd. V. Fr. Koenig, I Mir 12, 44). Du lat. venire « venir », « arriver, se présenter », « parvenir à », « venir à quelque chose, venir dans tel ou tel état » et « en venir à ». Fréq. abs. littér.: 98 961. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 142 843, b) 153 800; xxes.: a) 144 519, b) 129 650. Bbg. Bambeck (M.). Galloromanische Lexikalia aus volksprachlichen mittelalterlichen Urkunden. Mél. Gamillscheg (E.) 1968, p. 69. − Dabène (L.). Aller et venir: de la ling. à la didact. Mél. Pottier (B.) 1988, pp. 217-224. − Dejay (D.). Les Rel. actancielles appréhendées à travers un corpus de verbes fr. Thèse, Nancy, 1986, pp. 37-42. − Gardies (J.-L.). Élém. pour une gramm. pure de l'aspect. Modèles ling. 1981, pp. 112-134. − Goug. Mots t. 1 1962, pp. 257-258. − Kerbrat-Orecchioni (C.). L'Énonciation de la subjectivité ds le lang. Paris, 1980, pp. 50-54. − Lanly (A.). Morphol. hist. des verbes fr. Paris, 1977, pp. 318-321. − Letoublon (Fr.). Il vient de pleuvoir, il va faire beau. Z. fr. Spr. Lit. 1984, t. 94, pp. 25-41. − Nef (F.). Les Verbes aspectuels du français... Semantikos. 1980, t. 4, no1, p. 39. − Pinchon (J.). Les Pron. adv. en et y. Genève, 1972, pp. 263-265. − Quem. DDL t. 9, 27, 34. − Sankoff (G.), Thibault (P.). L'Alternance entre les auxil. avoir et être en fr. parlé à Montréal. Lang. fr. 1977, no34, pp. 97-99.

Wiktionnaire

Verbe - français

venir \və.niʁ\ ou \vniʁ\ intransitif : 3e groupe (voir la conjugaison)

  1. Se rendre sur le lieu où se trouve celui qui parle ou dont on parle.
    • venez ici, mon enfant. — (1854, Gustave Chouquet, Easy Conversations in French‎, page 9)
    • Il serait bon encore d’invoquer la protection du grand thaumaturge vers qui des milliers et des milliers de pèlerins venaient de toutes les provinces, de toutes les nations. — (Jean Rogissart, Passantes d’Octobre, Librairie Arthème Fayard, Paris, 1958)
    • Un léger souffle l’avertissait de ces présences. Geisha le comparait à ces vagues vents coulis traversant certaines pièces bien closes sans qu’on puisse découvrir d’où ils viennent. — (Francis Carco, Brumes, Éditions Albin Michel, Paris, 1935, page 53)
    • Le pain était arrivé, non sans peine et sans perte : en venant de Grandpré, où se trouvait la boulangerie, plusieurs chariots étaient restés embourbés, d’autres étaient tombés dans les mains de l’ennemi ; […]. — (Goethe, Campagne de France, 1822 ; traduction française de Jacques Porchat, Paris : Hachette, 1889, page 79)
    • L’empressement des envoyés des puissances pour venir adresser leurs félicitations à la cour des Tuileries avait été extrême. — (Albert Mansfeld, Napoléon III, Paris, 1861, volume 2, page 301)
  2. S’étendre jusqu’à un point précis, atteindre une limite.
    • La marée vient jusqu’à la falaise.
    • Votre fils me vient à l’épaule.
  3. Survenir, arriver, se produire inopinément ou fortuitement.
    • Le vent vient brutalement.
    • Un malheur ne vient jamais seul.
  4. Se déplacer en sens inverse, quand celui qui parle invite un autre à l’accompagner.
    • Nous allons nous promener, venez avec nous.
  5. Parvenir à la connaissance de quelqu’un.
    • Cette rumeur est venue jusqu’ici.
    • Il me vint à l’esprit de lui faire cette proposition.
    • Ce goût lui est venu naturellement.
  6. Arriver par succession, échoir.
    • Les biens qui viennent du côté du père, de la mère.
  7. Succéder.
    • Le printemps vient après l’hiver.
    • Un jour viendra ou vous perdrez tout.
  8. Provenir de ; trouver son origine dans.
    • Les produits viennent surtout naturellement des grandes régions de l’industrie textile : Mulhouse pour les tissus de coton et la mercerie, le Nord pour les lainages, Troyes pour la bonneterie. — (Jean Pierre Fruit, Vexin normand ou Vexin parisien?: Contribution à l'étude géographique de l’espace rural, Presse Universitaires de France, 1974, page 158)
    • Ce mot vient du latin. — Mon aversion pour les chiens vient d’une vieille morsure.
  9. Naître → voir venir au monde.
    • Cet enfant est venu à terme.
  10. Pousser ; croître ; être produit.
    • Le métis ayant le salvelin pour mère et la truite pour père et vice versa est également d’un développement remarquable et vient dans les eaux moins profondes que celles qu’exige le premier. — (Jean-Pierre Joseph Koltz, Traité de Pisciculture pratique, 4e édition revue & augmentée, Paris : G. Masson, 1883, page 105)
    • Les arbres n’y viennent pas, il est vrai, si ce n’est dans les jardins abrités; mais c’est moins à cause du froid excessif qu’à cause des grands vents qui soufflent constamment de la mer. — (Jules Leclercq, La Terre de glace, Féroë, Islande, les geysers, le mont Hékla, Paris : E. Plon & Cie, 1883, page 36)
    • De même le chasseur, quand il intervint pour guider les migrations naturelles des troupeaux, qu’il se contentait au début de suivre, devint un pasteur ; puis éleveur, quand il fit venir artificiellement, « agriculturalement », une partie du fourrage. — (René Dumont, Voyages en France d’un agronome, Librairie de Médicis, 1951, note no 1 page 13)
  11. Semi-auxiliaire du passé récent. → voir venir de.
    • Et ce qu’il y a de certain, c’est que l’Esprit que nous venons de voir chez les idolâtres pythoniser la statue, la matière inerte et l’animal, c’est-à-dire les médiums de pierre, de bois ou de chair vive, communique à chacun d’eux une partie de ses propres facultés, sa vie, son intelligence, sa science et son mouvement au sein de l’air, où il règne en prince ; principes aeris hujus […] — (Roger Gougenot des Mousseaux, Les hauts phénomènes de la magie, 1864)
    • Si l'un des pèlerins venait à mourir sur le bateau, le capitaine devrait ne point pratiquer aussitôt l’immersion, mais bien atterrir quelque part et faire ensevelir le défunt dans un cimetière. — (« Pèlerinage en Terre Sainte au temps jadis », dans Jérusalem, tome 4, 1911, page 368)
  12. Forme impersonnelle, voir aussi revenir.
    • Entre plage et campagne, la vie est ici si douce et la nourriture si variée et délicieuse que l’envie d’aller visiter les autres régions ou sites touristiques, de Messine à Agrigente, ne nous vient pas. — (Abdourahman Waberi, « En Sicile, l’été, je rencontre des migrants qui me ressemblent trait pour trait », Le Monde. Mis en ligne le 18 août 2019)
    • Il me vient une idée !
    • Il vient un moment où il faut savoir faire preuve de tempérance.
  13. (Intransitif) Jouir.
    • Tandis que l’un haletait : « Encore » d’une voix faussement féminine, l’autre cria un « Je viens ! » qui me plaqua contre le mur. — (Gérard Mordillat, Vive la Sociale !, 1981, page 81)
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Littré (1872-1877)

VENIR (ve-nir), je viens, tu viens, il vient, nous venons, vous venez, ils viennent ; je venais ; je vins, nous vînmes ; je viendrai ; je viendrais ; viens, qu'il vienne, venons, venez ; que je vienne, que nous venions, que vous veniez ; que je vinsse, que nous vinssions, qu'il vînt ; venant ; venu v. n.

Résumé

  • 1° Se transporter d'un lieu dans celui où se trouve la personne qui parle ou à qui l'on parle.
  • En termes de marine, venir à.
  • 3° Arriver à l'endroit où est la personne qui parle.
  • 4° Aller d'un lieu plus éloigné à un lieu plus proche de celui qui parle.
  • 5° Aller d'un lieu proche à un lieu éloigné, mais seulement quand celui qui parle demande qu'on l'accompagne.
  • 6° Aller et venir.
  • 7° Il se dit des choses inanimées qui ont un mouvement.
  • 8° Être apporté, en parlant des choses.
  • 9° Quelquefois venir, devant un infinitif, ne fait guère que renforcer l'idée exprimée par cet infinitif.
  • 10° Faire venir quelqu'un, le mander, lui donner ordre ou avis de venir.
  • 11° Sortir, en parlant des liquides contenus dans un vaisseau.
  • 12° Monter, s'élever.
  • 13° Tomber fortuitement en la possession, en parlant des choses.
  • 14° Être transmis d'âge en âge, en parlant de traditions, de livres, d'ouvrages.
  • 15° Venir au monde, naître.
  • 16° Apparaître à la surface du corps.
  • 17° Survenir fortuitement, par accident, inopinément.
  • 18° Laisser venir un coup, au jeu de la paume.
  • 19° Venir par succession, en parlant de choses. Venir à succession, en parlant de personnes.
  • 20° Échoir par quelque hasard.
  • 21° Se produire suivant l'ordre des temps.
  • 22° Fig. Il se dit des choses qui sont supposées se mouvoir.
  • 23° Intervenir, se rencontrer à la traverse.
  • 24° Être issu, être sorti.
  • 25° Dériver, en parlant de mots, de langues.
  • 26° Provenir, être reçu de.
  • 27° Émaner, procéder.
  • 28° Se former dans l'esprit, dans la mémoire, dans le cœur.
  • 29° Naître, être produit.
  • 30° Avoir une certaine croissance.
  • 31° Il se dit de ce qui s'accomplit, vient comme il faut.
  • 32° Venir à rien.
  • 33° Venir à, passer à ce qui est de notre objet.
  • 34° Venir à une chose, se résoudre à la faire, à l'accepter.
  • 35° Se porter à quelque chose d'excessif.
  • 36° Venir à, réussir à, atteindre.
  • 37° En venir.
  • 38° En venir à, aborder un sujet sur lequel on hésite.
  • 39° Venir à, suivi d'un infinitif, marque quelque chose d'inattendu, de fortuit.
  • 40° Venir de, suivi d'un infinitif, se dit d'une chose faite depuis peu de temps.
  • 41° V. réfl. S'en venir.
  • 42° S. m. Le venir.
  • 43° Un venez-y-voir.
  • 44° Va-et-vient.
  • 1Se transporter d'un lieu dans celui où se trouve la personne qui parle ou à qui l'on parle. D'où venez-vous ? Il est venu ici, ou, simplement, il est venu. Je viens pour vous dire. Venez nous voir. Il vient de Rome. Il est venu à pied, à cheval, en voiture. Qu'il vienne, je l'attends. Elle va revenir… elle vient, je la vois, Corneille, Cid, III, 1. Mes chiens n'appellent point au delà des colonnes Où sont tant d'honnêtes personnes [animaux malfaisants pendus] ; Il y viendra, le drôle ! il y vint, à son dam, La Fontaine, Fabl. XII, 23. Venez, venez, ma fille, on n'attend plus que vous ; Venez remercier un père qui vous aime, Et qui veut à l'autel vous conduire lui-même, Racine, Iphig. IV, 4. Oui, je viens dans son temple adorer l'Éternel, Racine, Athal. I, 1. Seigneur, je viens à vous ; car enfin aujourd'hui, Si vous m'abandonnez, quel sera mon appui ? Racine, Mithr. I, 2. Ils feront comme le roi d'Espagne, lequel se trouva mieux, dit Pascal, de croire sur les antipodes Christophe Colomb qui en venait, que le pape Zacharie qui n'y avait jamais été, D'Alembert, Œuv. t. IV, p. 258. L'esprit de la prière et de la solitude… Appela de tout temps les âmes de son choix : Venez, venez, dit-il à l'amour qui regrette, Au génie opprimé sous un ingrat oubli…, Lamartine, Harm. I, 11.

    Impersonnellement. Il vient dans cette maison toute sorte de gens.

    Venir au secours, à l'aide, venir pour secourir, pour aider. Cet effort généreux de votre amour parfaite Vient-il à mon secours, vient-il à ma défaite ? Corneille, Poly. IV, 3.

    Venir sur, marcher vers quelqu'un avec le dessein de l'attaquer. Je l'ai surprise dans les bras d'un jeune homme, qui, dès qu'il s'est vu découvert, est venu sur moi, Montesquieu, Lett. pers. 159.

    Fig. Il s'en est allé comme il était venu, il n'a rien fait de ce qu'il aurait dû faire. Jean s'en alla comme il était venu, Mangeant le fonds avec le revenu, La Fontaine, Son épit. faite par lui-même.

    Fig. Il semble qu'il vienne de l'autre monde, voy. MONDE 1, n° 24.

    Fig. De quel pays venez-vous ? d'où venez-vous ? se dit à ceux qui ignorent une nouvelle connue de tout le monde, ce qui se passe publiquement, ce qui est dans la pratique commune. Mme Verteuil : Vous m'étonnez toujours ; mais d'où venez-vous donc ? - Formont : D'où je viens, madame ? - Mme Verteuil : Oui. - Formont : De mon pays, j'espère, Collin D'Harleville, Mœurs du jour, II, 11.

    Voir venir quelqu'un, l'apercevoir quand il est en marche pour venir. Du haut de la terrasse je le voyais venir.

    Fig. Voir venir quelqu'un, voir ce qu'il fera ou quel est son dessein. Il ne manquera pas de vouloir se justifier ; je l'écouterai, je le verrai venir, Lesage, Diable boit. 4. Mais… il est quelquefois très bon de voir venir, Dorat, Feinte par amour, III, 4. Il voulait la maison ; voyons-le venir, Al. Duval, Maison à vendre, sc. 15.

    Je vous vois venir, je devine ce que vous pensez, ce que vous allez faire ou dire. Lubin : Vous avez envie de me tirer les vers du nez. - G. Dandin : Non, ce n'est pas cela. - Lubin : Eh ! quelque sot… Je vous vois venir, Molière, G. Dand. II, 7. Le laquais de M. de Rozelles a voulu me faire jaser ; moi, qui connais cela, je l'ai vu venir, Genlis, Théât. d'éduc. le Magistrat, II, 1.

    Voir venir, se dit, à certains jeux de cartes, quand on jette une carte insignifiante pour engager les positions à se dessiner.

    Laisser venir, voir venir, attendre, ne pas se presser. Dans cette affaire nous n'avons qu'à laisser venir, qu'à voir venir. Peine perdue que ce travail-là… laissons-les venir ; je ne prends pas facilement l'épouvante, Lesage, Turcaret, III, 9.

  • 2 Terme de marine. Venir à, gouverner de manière à obtenir un résultat donné. Venir au vent, se dit d'un bâtiment qu'on incline de manière à recevoir plus de vent dans ses voiles.

    Venir é bâbord ou à tribord, se dit du navire à qui l'on fait décrire une courbe à droite ou à gauche de la route qu'il suivait.

  • 3Arriver à l'endroit où est la personne qui parle. Quel jour vient le courrier ? Il est parti de Lyon, et vient demain.
  • 4Aller d'un lieu plus éloigné à un lieu plus proche de celui qui parle. Il est venu de Rome à Lyon.
  • 5Aller d'un lieu proche à un lieu éloigné, mais seulement quand celui qui parle demande qu'on l'accompagne. Je pars pour Lyon, voulez-vous venir avec moi ? Venez avec nous aux Tuileries. Venez sauver César de sa propre fureur, Racine, Brit. v, 8.
  • 6Aller et venir, se dit de ceux qui vont, qui partent, et qui reviennent. Il fit bien valoir la beauté de la Provence, et comme tout y est vif et passant et brillant, à cause de ces vaisseaux et de ces galères, et de ceux qui vont et viennent d'Italie, Sévigné, 18 août 1680.

    Ne faire qu'aller et venir, être continuellement en mouvement.

    En un autre sens, ne faire qu'aller et venir, mettre très peu de temps à aller quelque part et revenir.

  • 7Il se dit des choses inanimées, qui ont un mouvement. La lumière vient de côté. Le vent vient du nord. Les eaux venant des pôles n'ont pu gagner ces contrées méridionales encore brûlantes que quand elles ont été refroidies, Buffon, Add. théor. terr. Œuv. t. XIII, p. 163.

    Impersonnellement. Il vient beaucoup de vent de ce côté.

    Fig. Ses revenus viennent bien, ils sont payés sûrement et régulièrement.

  • 8Être apporté, en parlant des choses. Cette denrée vient de l'Orient.

    Impersonnellement. Il vient du blé de cette province. Vient-il de la province une satire fade, D'un plaisant du pays insipide boutade, Pour la faire courir on dit qu'elle est de moi, Boileau, Épît. VI.

  • 9Quelquefois venir, devant un infinitif, ne fait guère que renforcer l'idée exprimée par cet infinitif. Que, devant Troie en flamme, Hécube désolée Ne vienne pas pousser une plainte ampoulée, Boileau, Art p. III. Du haut de ce balcon votre malheureux frère Vint tomber tout sanglant…, Delille, Homme des ch. IV, variantes.

    On viendra nous dire…, on objectera… (tournure très usitée pour prévenir les objections).

  • 10Faire venir quelqu'un, le mander, lui donner ordre ou avis de venir.

    Faire venir une chose, donner l'ordre de la transporter dans le lieu où l'on est. Faire venir des provisions. Faire venir une voiture. S'il n'était presque aussi difficile de me faire aller à Paris que de faire venir Paris ici (dans l'Angoumois), Guez de Balzac, liv. XV, Lett. 2.

    Cela fait venir l'eau à la bouche, se dit d'une chose agréable au goût dont l'idée excite l'appétit, et figurément de tout ce qui excite le désir.

    Fig. Faire venir l'eau au moulin, voy. MOULIN.

  • 11En parlant des liquides contenus dans un vaisseau, sortir. Le vin ne vient plus que goutte à goutte. On a voulu le saigner, mais le sang ne vint pas.
  • 12Monter, s'élever. Il ne me vient pas à l'épaule. Les eaux viennent jusqu'au premier étage. Eh ! que feriez-vous donc si vous voyiez ma femme ? elle vient à peine à mes genoux, cependant…, Barthélemy, Anach. ch. 14.
  • 13Tomber fortuitement en la possession, en parlant des choses. Je vous assure que les tablettes sont venues en ses mains de la même sorte, Voiture, Lett. 24. Être transmis d'âge en âge, en parlant de traditions, de livres, d'ouvrages. C'est de lui que nous vient cet art ingénieux De peindre la parole et de parler aux yeux, Brébeuf, Pharsale, III. C'est par Théophraste que sont venus jusqu'à nous les ouvrages de ce grand homme [Aristote], La Bruyère, Disc. sur Théophr. Le plus ancien traité de musique [celui d'Aristide] qui soit venu jusqu'à nous, Rollin, Hist. anc. Œuv. t. XI, 1re part. p. 236, dans POUGENS.
  • 15Venir au monde, naître. Victorieux par mer et par terre, il [Auguste] ferme le temple de Janus ; tout l'univers vit en paix sous sa puissance, et Jésus-Christ vient au monde, Bossuet, Hist. I, 9.

    Cet enfant est venu à terme, il est né à l'époque ordinaire de la naissance.

    Il est venu avant terme, il est né avant le terme ordinaire de la grossesse.

    L'enfant vient bien, se dit durant l'accouchement, lorsque l'enfant se présente de la manière la plus naturelle.

    Cet enfant nouveau-né est bien venu, la mère en est accouchée heureusement.

  • 16Apparaître à la surface du corps. Une ébullition lui est venue.

    Impersonnellement. Il lui vient des boutons au visage. Il lui vint [à Jésus] une sueur comme des gouttes de sang, qui découlaient jusqu'à terre, Sacy, Bible, Évang. St Luc, XXII, 44. S'il pouvait vous venir la petite vérole, Boursault, Fabl. d'Ésope, III, 6.

  • 17Survenir fortuitement, par accident, inopinément. Un malheur ne vient jamais seul. Tout lui vient à souhait. Cela lui vient bien à point. Tous ces maux qui viennent par la vanité me font toujours un malin plaisir, Sévigné, 3 avr. 1686. Impersonnellement. Je crains qu'il ne vienne une bourrasque, de la pluie. Il lui vint une grosse fièvre.

    Elliptiquement. Vienne une maladie, vienne un revers, s'il vient une maladie, un revers.

    S'il vient faute de lui, s'il meurt. S'il vient faute de vous, mon fils, je ne veux plus rester au monde, Molière, Mal. imag. I, 9.

    Cela lui vient de Dieu grâce, voy. GRÂCE, n° 7.

    Fig. Prendre le temps comme il vient, voy. TEMPS, n° 21.

  • 18Au jeu de la paume, laissez-moi venir ce coup-là, laissez-moi le jouer.

    À différents jeux de cartes. Laissez-moi venir cette main, laissez-moi faire cette main.

  • 19Venir par succession, échoir, avec un nom de choses pour sujet. Après la mort du père, les biens viennent aux enfants. Les biens qui viennent du côté de la mère.

    Avec un nom de personne pour sujet, obtenir par une sorte d'échéance. Venir à une succession par souche, par tête, par représentation. La royale famille des Stuarts, qui, étaient venus à la succession de la couronne d'Angleterre par une fille de Henri VII, Bossuet, Reine d'Anglet. Le fils venant de son chef à la succession du donateur, Code civ. art. 848.

    Ce roi vint jeune au trône, à la couronne, il y parvint jeune.

    Venir au sou la livre (locution vieillie), partager au sou la livre.

    Venir à compte, à partage, à composition, compter, partager, composer. L'héritier venant à partager, Code civ. art. 844.

  • 20Échoir par quelque hasard. J'ai mis à la loterie, et il m'est venu un bon billet.
  • 21Arriver suivant l'ordre des temps. Ceux qui viendront après nous. Il viendra un temps. Que n'eût-elle pas donné pour obtenir ce miracle [devenir croyante] ? mais l'heure marquée par la divine Providence n'était pas encore venue, Bossuet, Anne de Gonz.

    Son heure est venue, sa mort, sa punition est prochaine. Encore un peu plus outre, et ton heure est venue, Corneille, Poly. IV, 2.

    Son heure est venue signifie aussi qu'il subira quelque grande influence morale.

    Qui vient, prochain. Car je n'aurai, s'il t'en souvient, Que trente ans à Noël qui vient, Scarron, Virg. IV. Si vous continuez de vous bien porter, ma chère enfant, je ne vous irai voir que l'année qui vient, Sévigné, 57. Je crois toujours partir la semaine qui vient, Sévigné, 258.

    Vienne la Saint-Denis, viennent les Rois, quand la Saint-Denis arrivera, quand les Rois arriveront. J'ai pourtant, voyez-vous ! quatre-vingt-dix-huit ans Vienne la Saint-Martin, Regnard, Fol. amour. III, 4. J'imagine, mon cher ange,… que vous ferez jouer Tancrède vienne la Saint-Martin, Voltaire, Lett. d'Argental, 27 oct. 1760.

    Populairement Elle aura quinze ans viennent les prunes, l'été prochain.

    À venir, qui doit venir, qui doit arriver. Le temps à venir. Le corbeau sert pour le présage ; La corneille avertit des malheurs à venir, La Fontaine, Fabl. II, 17. Et par écrit Le sénat demanda ce qu'avait dit cet homme, Pour servir de modèle aux parleurs à venir, La Fontaine, ib. XI, 7. Et ce triomphe heureux qui s'en va devenir L'éternel entretien des siècles à venir, Racine, Iphig. I, 5.

  • 22 Fig. Il se dit des choses qui sont supposées se mouvoir. Les arts sont venus de telle contrée. Le choléra vient de l'Inde. La peste vient de l'Égypte. Un bruit assez étrange est venu jusqu'à moi, Racine, Iphig. IV, 6. Si vous refusez la paix et la justice qui viennent à vous, la paix et la justice seront vengées, Fénelon, Tél. X.

    Cela vint à ma connaissance, cette nouvelle est venue jusqu'à moi, j'ai appris cela, j'ai su cette nouvelle. J'ai senti vivement la belle et brillante action du chevalier de Pompone ; elle vous viendra de tous côtés, Sévigné, 12 juill. 1690.

  • 23Intervenir, se rencontrer à la traverse. Les protestants sont venus ensuite, qui ont fort maltraité les miracles de l'une et l'autre Église [latine et grecque], Voltaire, Dict. phil. Miracles, II.

    Venir à la traverse, traverser, troubler un dessein, une affaire.

  • 24Être issu, être sorti. C'est un homme qui vient de bon lieu. Il vient de bas lieu. Le chien doguin vient du dogue et du petit danois. Ton illustre audace Fait bien revivre en toi les héros de ma race ; C'est d'eux que tu descends, c'est de moi que tu viens, Corneille, Cid, III, 6. Les deux plus puissantes monarchies qui se soient élevées alors, furent celle d'Égypte fondée par Ptolomée fils de Lagus, d'où viennent les Lagides, et celle d'Asie ou de Syrie fondée par Séleucus, d'où viennent les Séleucides, Bossuet, Hist. I, 8. Quel bruit ? - Que cet enfant vient d'illustre origine, Racine, Athal. III, 4. Ce peuple venait d'une race de géants qui était de la même origine que les Cyclopes, Fénelon, Tél. I. Les blancs, et les nègres, et les rouges, et les Lapons, et les Samoyèdes, et les albinos ne viennent certainement pas du même sol, Voltaire, Mœurs, 3. Si les Groenlandais tirent leur origine des Islandais ou des Norwégiens, comme l'ont avancé plusieurs auteurs, ou si, comme le prétend M. P., ils viennent des Américains, Buffon, Suppl. à l'Hist. nat. Œuv. t. XI, p. 249.

    C'est un homme qui est venu de rien, il n'avait rien, il n'était rien, et il a fait fortune.

  • 25Dériver, en parlant de mots, de langues. Ce mot vient de tel autre. Le français vient, pour la plus grande partie, du latin. Cette expression vient du grec. Amiral vient de l'arabe.
  • 26Provenir, être reçu de. L'or et l'argent viennent d'Amérique. Je les reçois [des présents] de fort bon cœur, et je recevrai toujours de même tout ce qui me viendra de votre part, Voiture, Lett. 24. Ah ! gardez-vous de l'une et l'autre main ; Cette coupe est suspecte, elle vient de la reine, Corneille, Rodog. v, 4. Qu'admira-t-on davantage, ou de ce que ce secours vint si à propos, ou de ce qu'il vint d'une main dont on ne l'attendait pas ? Bossuet, Anne de Gonz.
  • 27Émaner, procéder. L'homme trahit sa foi, d'où vinrent les notaires, Régnier, Sat. VI. Ma faveur fait ta gloire, et ton pouvoir en vient, Corneille, Cinna, v, 1. La victoire ne dépend point de la grandeur des armées ; mais c'est du ciel que nous vient toute la force, Sacy, Bible, Machab. I, III, 19. D'où vous vient aujourd'hui ce noir pressentiment ? Racine, Athal. I, 1. Mon mal vient de plus loin, Sacy, Phèdre, I, 3. Les grandes pensées viennent du cœur, Vauvenargues, Max. et réfl. 127. Les jansénistes et les molinistes n'ont point eu de mortification plus cuisante que de n'avoir pu s'égorger en bataille rangée ; d'où vient cela ? Voltaire, Dict. phil. Les pourquoi. D'où viennent ces lits de tourbes qui s'étendent depuis Bruges par tout le plat pays de la Flandre jusqu'à la rivière d'Aa ? Buffon, Add. théor. terr. Œuv. t. XIII, p. 174. Ces philosophes qui nient que nos connaissances viennent des sens, Condillac, Logiq. I, 6.

    D'où vient que ? quelle est la cause que ? Mais, ma mère, d'où vient que vous sortez si vite ? Molière, Tart. I, 1. D'où vient qu'en m'écoutant, vos yeux, vos tristes yeux Avec de longs regards se tournent vers les cieux ? Racine, Brit. v, 1.

    Absolument et familièrement. D'où vient ? quelle est la cause ? quel est le motif. M.Oronte : Cela ne se peut pas, madame. - Mme Oronte : D'où vient, monsieur ? - M. Oronte : D'où vient ? voulez-vous que nous manquions de parole à M. Orgon, notre ancien ami ? Lesage, Crisp. rival de son maître, 6. Mais d'où vient donc, dis-moi ? quelque part qu'on s'arrête, en Calabre ou ailleurs, tout le monde se met à faire la révérence, et voilà une cour, Courier, Lett. à M***, 25 juin 1806.

    D'où vient, avec un verbe à l'infinitif. D'où vient le redouter, moi qui peux lever les yeux sur lui avec la noble assurance… ? Riccoboni, Œuv. t. I, p. 346, dans POUGENS. D'où vient prendre pour un tendre sentiment les simples marques de ton estime ? ID. ib. t. VI, p. 194.

  • 28Se former dans l'esprit, dans la mémoire, dans le cœur, en parlant d'idées, de sentiments. Il lui vint à l'esprit, dans l'esprit que… Tout ce que je fais me vient naturellement, c'est sans étude, Molière, Préc. 10. En voici un [passage] qui me vient sur ce verset du psaume XLI, Bossuet, Ét. d'Orais. x, 25. J'aurais dit tout net : je suis le fils d'un paysan, si le mot de fils d'un homme de la campagne ne m'était pas venu, Marivaux, Pays. parv. 4e part. Lorsque je l'ai aimé, c'était un amour qui m'était venu ; à cette heure que je ne l'aime plus, c'est un amour qui s'en est allé, Marivaux, Double inconst. III, 8. C'est une idée [charger M. Hénin de la pacification de Genève] qui me vient ; il ne me l'a point du tout suggérée, Voltaire, Lett. d'Argental, 21 déc. 1765. Quand je m'étais mis à mon papier, il ne me venait presque plus rien de ce que j'avais composé, Rousseau, Conf. VIII. Je dis ce qui me vient, et l'on peut me le rendre, Gresset, le Méch. I, 4.
  • 29Naître, être produit. Cette plante vient de bouture. La vigne ne vient pas dans ce pays. Les melons viennent là en pleine terre. Ce semis commence à venir. Les dents viennent à cet enfant. Il lui est venu deux dents. On lit avec un grand plaisir dans le livre de la Vieillesse l'élégante description que Cicéron y fait de la manière dont vient le blé, Rollin, Traité des Ét. v, art. 3 et 4. L'esprit ne vient qu'en France ; c'est pour ainsi dire son terroir ; et nous en fournissons tous les autres peuples de l'Europe, Boissy, Franç. à Lond. sc. 16. On a vraiment bien raison de dire : plantez là des filles ; il y viendra des garçons, Comte de Caylus, Féeries, Prince Muguet, Œuv. t. VIII, p. 318, dans POUGENS.

    Fig. La raison lui viendra avec l'âge.

  • 30Avoir une certaine croissance. Cet arbre vient bien, vient mal. Cet enfant ne vient pas bien. Notre prince de Dombes vient bien, et madame sa mère s'est tirée avec vigueur de cette grande affaire, Maintenon, Lett. à Mme de Brinon, t. II, p. 256, dans POUGENS.

    On dit aussi : Cet enfant a de la peine à venir

    Venir à bien, croître comme il faut. La nature est prodigue en semences de plantes ; il lui suffit que, sur un grand nombre de perdues, il y en ait quelqu'une qui vienne à bien, Fontenelle, Malebranche.

    On craint que son fruit, que son enfant ne vienne pas à bien, se dit d'une femme souffrante ou qui a éprouvé quelque accident durant sa grossesse.

    Ses enfants ne viennent pas à bien, les enfants de cette femme meurent très jeunes.

  • 31Il se dit de ce qui s'accomplit, vient comme il faut. Venir à maturité, en maturité.

    Venir bien à, convenir. Cette robe vient bien à sa taille. Ce galetas qui de rien ne nous sert Lui viendra bien, La Fontaine, Orais. C'était une affaire toute trouvée, et qui venait fort bien à la chose, Molière, Impromptu, 1. Douze mille arpents de terre ; vous et moi connaissons des gens à qui cela viendrait fort bien, Courier, Simple discours.

    Ce que je vais dire vient à mon sujet, convient au sujet de mon discours.

    Ces nuances, ces couleurs viennent bien ensemble, elles font bon effet ensemble.

    En termes d'art. Ressortir. Je crains que ce groupe ne vienne pas assez sur le devant, Diderot, Salon de 1767, Œuv. t. XIV, p. 302, dans POUGENS.

    Ces figures sont bien venues, mal venues, elles sont bien réussies, mal réussies. Il y a quelques parties à l'envers qui sont venues presque aussi nettes qu'à l'endroit, Diderot, Peint. en cire, t. XV, p. 469, dans POUGENS.

    On dit dans le même sens qu'une photographie est bien venue, mal venue.

    Terme d'imprimerie. Cette feuille, cette estampe est bien venue, mal venue, elle est sortie bien tirée, mal tirée de dessous la presse.

  • 32Venir à rien, diminuer beaucoup, se réduire presque à rien. Il maigrit, il vient à rien. Si vous laissez tant bouillir cette sauce, elle viendra à rien.

    Fig. Tous ses grands projets viendront à rien, ses grands projets échoueront misérablement.

    En un sens analogue. Mes flèches et mon arc me viennent à mépris, Régnier, Dial.

  • 33Venir à, avec un nom de personne pour sujet, passer à ce qui est de notre objet. Venir au fait. Venir à la conclusion. Je viens maintenant à notre question, Pascal, Prov. XVII. Sans craindre aucune chose, Je prends donc la parole, et je viens à ma cause, Racine, Plaid. III, 3. Je suais sang et eau pour voit si du Japon Il viendrait à bon port au fait de son chapon, Racine, ib. III, 3. C'est à quoi je voulais venir. - Eh ! viens-y donc, Brueys, Grondeur, I, 3. Je pressens votre objection ; j'y vais venir à l'instant, Rousseau, Hél. v, 3.

    On dit de même : Venir sur. Quand il [d'Ormesson, rapporteur dans le procès de Fouquet] est venu sur un certain article du marc d'or, Pussort a dit : voilà qui est contre l'accusé, Sévigné, à Pompone, 11 déc. 1664.

  • 34Venir à une chose, se résoudre à la faire, à l'accepter. Si faudra-t-il qu'elle y vienne pourtant, La Fontaine, Magn. Le fond de son caractère est porté au dogme abominable de la tolérance : un jour il y viendra, Voltaire, Voyages de Scarmentado.

    Faire venir à la raison, réduire à la raison, soit par la persuasion, soit par contrainte.

    Faire venir à jubé, voy. JUBÉ.

  • 35Se porter à quelque chose d'excessif. Il vint à un tel point d'insolence… Il vint jusqu'à me déclarer…

    Par menace. Qu'il y vienne, qu'il ait la hardiesse, l'audace de.

    Il se dit des choses en un sens analogue. Son insolence vint au point de mériter une correction.

    Les choses vinrent à un point que…, à tel point que…, si avant que…, elles furent portées à un tel excès, si loin, que…

  • 36Venir à, réussir à, atteindre. Venir à bout de ses desseins, de ses entreprises.

    Venir à bout de faire une chose, réussir à la faire.

    Venir à bout de ses ennemis, les surmonter.

    Venir à son but, à ses fins, réussir à ce qu'on voulait.

    On a dit dans le même sens : venir à chef. Le pis de leur méchef Fut qu'aucun d'eux ne put venir à chef De son dessein…, La Fontaine, Rémois.

    On dit aussi : venir au-dessus. Par ce moyen la seconde commère Vint au-dessus de ce qu'elle entreprit, La Fontaine, Gageure.

  • 37Venir se construit avec la particule en qui lui donne plus de force en indiquant à l'esprit quelque chose d'antécédent d'où l'on part. La cour étonnée en viendra à un accommodement, Retz, Mém. t. I, liv. II, p. 412, dans POUGENS. Les deux armées furent environ cinq jours en présence, sans que Maxime en voulût venir à un combat décisif, Fléchier, Hist. de Théodose, III, 7. …J'espérais de mourir à vos yeux Avant que d'en venir à ces cruels adieux, Racine, Bérén. IV, 5.

    En venir à son honneur, réussir dans ce qu'on avait entrepris.

    En venir aux mains, commencer à se battre.

    En venir aux reproches, aux injures, aux grosses paroles, aux coups, etc. porter la dispute jusqu'aux reproches, aux injures, aux coups. Et s'il fallait encor que l'on en vînt aux coups, Je combattrais…, Corneille, Hor I, 4. La plupart des ménages en vinrent aux coups, Voltaire, Avent. de la mémoire.

    En venir aux extrémités, à la violence, à la force, employer les moyens extrêmes, la violence, la force. Valère : N'en venons point, s'il vous plaît, à de fâcheuses extrémités… - Sganarelle : Parbleu ! venez-en à tout ce qui vous plaira, Molière, Méd. malgré lui, I, 6.

    Il faut en venir là, se dit de tout ce qui est nécessaire, inévitable. Mais il faut toujours en venir là : il est très vrai qu'il y a quelque chose de divin… dans les maladies qui travaillent les États, Guez de Balzac, Socrate chrétien, 8.

    On le dit aussi de ce qu'on regarde comme le plus expédient. Après avoir bien réfléchi, ils virent qu'il fallait en venir là.

    Il en vint jusqu'à le menacer, il poussa l'audace, la violence jusqu'à la menace.

    Ils en vinrent au point de faire telle chose, ils furent réduits à faire telle chose, ou ils se portèrent à des extrémités telles qu'ils firent telle chose. Les colons en vinrent jusqu'à brouter l'herbe, Raynal, Hist. phil. XIII, 27.

    Il se dit des choses en un sens analogue. Là commencent les guerres puniques, et les choses en viennent si avant que chacun de ces deux peuples jaloux croit ne pouvoir subsister que par la ruine de l'autre, Bossuet, Hist. III, 7.

  • 38En venir, aborder un sujet sur lequel on hésite. Puisque enfin il en faut venir aux sectes de ces derniers siècles, Bossuet, 5e avert. 3.

    C'est là que j'en voulais venir, c'est où j'en voulais venir, c'est le but où tendaient mes paroles ou mes actions. Discours d'enthousiaste ! on voit où vous en voulez venir, Beaumarchais, Mère coupable, I, 12.

    On dit de même : Où veut-il en venir ? Par quel hasard à Montargis, toi, mon cher Dorlis ? - Dorlis, à part : Où veut-il en venir ? Picard, Voy. interr. II, 6.

    Même signification sans la particule en. Pourquoi m'en faites-vous aujourd'hui souvenir ? Je ne vois pas encore où vous voulez venir, Scarron, D. Japh. d'Arm. I, 7.

  • 39Venir à, suivi d'un infinitif marque quelque chose d'inattendu, de fortuit. Nous vînmes à parler de telle chose. S'il venait à mourir. Je vins tout à coup à me le rappeler. La chose viendra à se savoir. Comme les premiers navigateurs qui se hasardèrent en pleine mer sans octant et sans boussole, vinrent cependant à découvrir les principales parties du globe, Bernardin de Saint-Pierre, Liv. III, Harm. anim.
  • 40Venir de, suivi d'un infinitif, se dit d'une chose faite depuis peu de temps. L'ours, porté d'un même dessein, Venait de quitter sa montagne, La Fontaine, Fabl. VIII, 10. Et quelle âme, dis-moi, ne serait éperdue Du coup dont ma raison vient d'être confondue ? Racine, Andr. III, 1. Si tu venais d'entendre Quel funeste dessein Roxane vient de prendre, Racine, Bajaz. I, 4. Damilaville vient de mourir ; il était l'auteur du Christianisme dévoilé et de beaucoup d'autres écrits ; on ne l'a jamais su, Voltaire, Lett. Villevieille, 20 déc. 1768.

    On dit de même familièrement : Il vient de venir.

  • 41S'en venir, v. réfl. Même sens que venir. Les plus exquises choses qui soient au monde sont là assemblées comme en abrégé ; venez-vous-y-en, je vous en prie ; car je n'ai garde d'y aller sans vous, Francion, liv. IX, p. 367. Mais ne la vois-je pas qui s'en vient droit à moi ? Tristan, Marianne, II, 3. Un jour, au dévot personnage Des députés du peuple rat S'en vinrent demander quelque aumône légère, La Fontaine, Fabl. VII, 3. L'ours, très mauvais complimenteur, Lui dit : viens-t'en me voir, La Fontaine, ib. VIII, 10. Laisse-moi fuir ; cesse de rire De l'indocilité qui me fait envoler, Lorsque d'un ton si doux, on s'en vient m'appeler, La Fontaine, ib. VIII, 21. Hier au soir, sur la brume, Un chat-huant s'en vint votre fils enlever, La Fontaine, ib. IX, 1.
  • 42 S. m. Le venir, l'action de venir, usité seulement en cette locution : l'aller et le venir

    Fig. Avoir l'aller pour le venir, ne rien obtenir. S. m. Terme familier et ironique. Un venez-y-voir, bagatelle, chose qui mérite à peine d'être remarquée. D'un panache de cerf sur le front me pourvoir : Hélas ! voilà vraiment un beau venez-y-voir, Molière, Sgan. 6. On lui exprime qu'on lui est obligé ; grand venez-y-voir, Marivaux, Pays. parv. 6e part. Je n'avais pas vingt ans quand cela m'arrivait ; vous passez quarante, beau venez-y-voir, Marivaux, ib.

  • 44Mouvement de va-et-vient, voy. VA-ET-VIENT.

    Fig. Proverbes. La balle vient au joueur, voy. JOUEUR.

    Après la pluie vient le beau temps, un temps heureux succède à des circonstances fâcheuses.

    Tout vient à point à qui sait, à qui peut attendre, on vient à bout des choses quand on sait ou quand on peut attendre, avoir de la patience.

    Le bien lui vient en dormant, voy. DORMIR.

    Qui chapon mange, chapon lui vient, le bien vient à ceux qui en ont déjà.

    Les maladies viennent à cheval et s'en retournent à pied.

    Va-t'en voir s'ils viennent, voy. VOIR.

    Il se conjugue avec l'auxiliaire être.

REMARQUE

1. Venir régit l'infinitif sans préposition quand il exprime la venue. Je viens vous voir. Il régit l'infinitif avec la préposition de quand il marque une action faite depuis peu de temps. Je viens de le voir. Il régit l'infinitif avec la préposition à, quand il marque une action fortuite. Si je viens à le voir…

2. Dans cette phrase de Necker : Des avantages incertains, avenirs, il y a deux fautes ; il faut retrancher l's, et écrire à venir en deux mots.

3. Pour la différence entre venir et aller, voy. ALLER aux synonymes.

4. Dans certaines provinces on dit : il s'est en venu. C'est une faute ; dites : il s'en est venu.

5. Au XVIIe siècle on mettait plus volontiers, quand deux verbes se suivaient, le dernier étant réfléchi, le pronom personnel avant le premier verbe. J'avais entre mes mains et sa vie et sa mort, Et je me viens de voir arbitre de son sort, Corneille, Suite du Menteur, I, 6.

6. Dans le XVIIe siècle, quelques-uns disaient vindrent, au lieu de vinrent ; et les courtisans disaient viegne au lieu de vienne. Au reste, il y avait beaucoup de tendance, dans l'ancien français, à confondre le son de l'n, précédée ou suivie d'un i, avec gn.

7. Pour la construction de en et y avec s'en venir, voy. EN et Y.

HISTORIQUE

Xe s. Qued avuisset de nos christus mercit Post la mort, et à lui nos laist venir, Eulalie. Est venu de cist tres dies, Fragm. de Valenc. p. 467. Si vint grances [sic] iholt [chaud], ib. p. 468.

XIe s. Il pout [put] venir à sainte yglise, Lois de Guill. I. En cest païs nos est venuz cunfundre, Ch. de Rol. II. [ils] Vindrent à Charles, ki France ad en baillie, ib. VII. La noit [ils] demurent, tresque vint al jur cler, ib. X. Ki qu'el cumpert [qui que ce soit qui le paye], venuz en sont ensemble [aux mains], ib. CXXII.

XIIe s. Et dist un mot qui li vint à plaisir, Ronc. p. 101. Li mesager li sont venu devant, ib. p. 121. Dites al duc qu'à moi veigne à parler, ib. p. 157. La mort me vient, que tant ai desirée, ib. p. 175. Quant nous venimes en la bataille grant, ib. p. 181. Car guerpi la bataille, si t'en vien avec mi, ib. p. 193. Nule chançon ne m'agrée, S'el ne vient de fine amor, Couci, I. Onques de vous ne me vint se mal non, ib. VII. Se par merci ne vieng [je] à guerredon…, ib. Que [vous] m'ocirez, se vous vient à talent [si vous le voulez], ib. X. Quand [je] voi venir le bel tanz et la flour, ib. XVII. Son douz regart qui vient d'une estencele Mon cuer [cœur] en moi ferir, ib. XVIII. Ses ieuz, son vis, qui de joie sautele, Son aler, son venir, Son biau parler et son gent maintenir, ib. XVIII. Guiteclins de Sassoigne, quand ce vint à son tans, De sa premiere fame ot deus vaslez enfans, Sax. v. Il n'en vanront à chief [à bout], mes cuers le senefie [l'annonce], ib. XXXII. Tant [elle] fu sage et courtoise et de bele façon, Que nouveles en vindrent au Saisne Brunamont, ib. III.

XIIIe s. Et les gens du païs vindrent à merci au fil de l'empereour de Constantinoble, et tant li donerent que pais firent à lui, Villehardouin, LX. Et nous vos prions par Dieu, chiers sires, que vous preigniez la croix et que vous en vengniez avec nous, Villehardouin, XXXIX. Certes nenil ; ne me vint en penser, Qu'onques nul jour je vous daignasse amer, Quesnes, Romanc. p. 108. Maugré tous sains et maugré Dieu aussi, Revient Quesnes, et mal soit il vegnant ! Hues D'Oisi, ib. p. 103. Puisque je ving à terre [depuis que je suis né], Du Cange, venire. S'en venoit li lions come beste enragie, Berte, II. Car nus ne vient à vie, ne conviene finer, ib. III. Qui de bien est venus, drois est qu'à bien retraie, ib. VIII. Quant [elle] vint de pasmoison, la parole [elle] a emprise, ib. XXX. Car deux larrons venoient de marcheans guetier, ib. XXXVIII. Mais si viennent les chose com Dieu plaist et agrée, ib. LXVIII. Dont vient ce que ma fille se fait ainsi haïr ? ib. LXXIV. Quant [ce] vint après mangier, Blanchefleurs plus n'atent, ib. LXXXIII. Puisqu'ainsi est la chose et venue et alée, ib. CXV. Bien set que il est mal venuz, Se il pooit estre tenuz, Ren. 1875. À tot le mont ai fait anui, Dolanz et repentanz en sui ; Or voil venir à repentance De quanque je fis en m'enfance, ib. 10821. Moult as empris plus fole emprise De l'amor que tu as emprise ; Si la te venist miex [il te vaudrait mieux] lessier, Se de ton preu vues apressier, la Rose, 5818. Et Dieu est droiturier, si ne devroit soufrir que celui qui si desleaument tornast le garent, en venist au dessus par bataille, Ass. de Jerus. I, 250. De toz cas de crieme on pot apeler ou venir à gages, se li accuseres en veut fere accusation, Beaumanoir, LXI, 2. Et quiconques erre contre le [la] foy, il doit estre amonestés par sainte Eglise qu'il delaissent lor erreur et viegnent à amendement de sainte Eglise, Beaumanoir, XI, 25. Et encore parlerons noz d'aucuns [cas] qui noz venront en memore, Beaumanoir, XI, 29. Avoir à clercs, toison à chien, Ne pueent pas venir à bien, Rutebeuf, 229. Quant vint au vendredi, Joinville, 214. Venés vous en, vous ne faites riens ici, Joinville, 281.

XIVe s. Nous avons moult perdu, puisque nous viemes Cl, Hugues Capet, v. 1869. Vienne qui puet venir ! pensons de chevauchier, Guesclin. 18273. Là fussent mal venu et de corps et de vie…, ib. 985. Cilz argens que je porte ne me doit demeurer, Et en vendra de l'autre pour moi à rachater, ib. 14220.

XVe s. Tant que temps et lieu venront que j'en devrai parler, Froissart, I, I, 4. En ce temps vint en propos et volonté au roi Edouard d'Angleterre qu'il feroit refaire et redifier le grand chastel de Windsore…, Froissart, I, I, 213. Si lui fit [le roi d'Angleterre à Jean de Copelant] grand chere et le prit par la main et lui dit : à bien vienne mon escuyer, qui par sa vaillance a pris notre adversaire le roi d'Escosse…, Froissart, I, I, 308. Au terme de 37 ans quand un homme est dans sa force et en son venir, et il est bien de toutes parties, Froissart, II, III, 70. Gardez votre corps, vous estes jeune et à venir, et tel vous monstre beau semblant qui vous aime moult petit, Froissart, II, II, 237. Et s'il avenoit qu'ils fussent en discord ni en guerre un temps à venir, Froissart, I, I, 125. Comme elle feust venue de bast [était bâtarde] et ne feust née en loyal mariage…, Du Cange, venire. Et quand Madame l'ouyt ainsi parler, et par raison, et qu'il n'entend pas où elle veult venir…, Jeh. de Saint. 7. Ung entre les autres y vy, Qui souvent alloit et venoit, Et pensant com homme ravy, Et gueres de bruit ne menoit, Chartier, la Belle dame sans mercy. M'a compté le roy Edouard que en toutes les batailles qu'il avoit gagnées que, dès ce qu'il venoit au dessus, il mon toit à cheval et cryoit qu'on saulvast le peuple et qu'on tuast les seigneurs, Commines, III, 5. Que plus aysement on viendroit à paix en faisant…, Commines, v, 15. Et quant ce vint que le conte d'Eu et le chancellier eurent prins congé…, Commines, I, 1. Il ne s'attendoit point que les choses veinssent jusques à la voye de faict, Commines, I, 2. Et son pere venu à l'extreme vieillesse, Commines, I, 1. Si ce qui avoit esté commencé fust venu à effect, Commines, I, 8. Il s'en fallut bien peu qu'ilz n'en vinssent à leur intention, Commines, II, 12. De mal venir [par malheur], tout à cette belle heure que ces armes se faisoient, veci bon mari d'arriver, Louis XI, Nouv. XLIII. Et, de bien venir [par bonheur], il n'y avoit qu'une paroi entre ces deux chambres, Louis XI, ib. LII. Congé et lixanse d'aller, venir et sejourner par tout nostre pays d'Anjou, Bibl. des ch. 1871, p. 474.

XVIe s. Laissez venir donc France et sa routte [troupe], Marot, J. V, 17. N'y a cellui qui ne se viegne offrir, Pour te garder jusqu'à la mort souffrir, Marot, J. v, 18. Ceulx du chasteau si lourdement tiroient, Qu'il n'estoit tour qui ne vensist par terre, Marot, J. V, 29. Prenant au pis venir, s'il adveint que fortune…, Marot, J. V, 117. Ung homme armé vint arriver en salle, Le glaive au poing, parlant en tel maniere, Marot, J. V, 237. Les pluyes venantes outre leur saison, Calvin, Inst. 137. Je vouldroys qu'il venist chose à propos, où j'eusse povoir de me revencher de tant de plaisirs que chacun jour me faictes, Marguerite de Navarre, Lett. 72. Cuydant par ce moyen faire que leurs delits et forfaits ne viennissent en lumiere, ils se sont portez pour appelans, Marguerite de Navarre, ib. 159. Dimanche qui vient, Marguerite de Navarre, ib. 36. Mais lui en veint à telle superstition…, Montaigne, I, 17. Venant à mourir, Montaigne, I, 30. Les fauttes qui viennent de nostre foiblesse, Montaigne, I, 54. Des advertissements venants de telle personne, Montaigne, I, 59. Ils penserent à la perte qu'ils venoient de faire, Montaigne, I, 63. L'esté venu il gaigna…, Montaigne, I, 261. Le nom de la vaillance vient de valeur, Montaigne, II, 67. Les souliers lui semblerent bien venir à ses pieds, comme les bottines à ses jambes, Despériers, Contes, XCVI. Amulius, quand ce vint à faire leurs partages, feit deux lots de tous leurs biens, Amyot, Rom. 4. Les Latins appelent louves les femmes qui abandonnent leur corps à tous venans, Amyot, ib. 6. Il eut toute pareille adventure au retour qu'il avoit eue au venir, Amyot, Cam. 45. Ilz aront l'aler pour le venir, G. du Guez, dans PALSGR. p. 971. Ô le plaisir que c'est de sentir venir moindre [italien venir meno, défaillir] Son ame, tant amour heureusement l'estreint, Baïf, Œuv. p. 62, dans LACURNE. Les praticiens et bourgeois disans que toutes servitudes viennent à restraindre et abolir, et toute liberté à soustenir, Coust. gén. t. I, p. 448. Des paroles ils viennent au poil, Cotgrave Il ne demeure pas trop qui vient, Cotgrave Qui vient est beau, qui apporte encore plus beau, Cotgrave Qui tost vient à son hostel, mieux luy en est à son souper, Cotgrave

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Étymologie de « venir »

(Siècle à préciser) Du latin vĕnīre (même sens). Parfaitement régulier en latin, ce verbe en passant en français, est devenu irrégulier, du fait de l’évolution phonétique (alternance des fortes et faibles au présent de l’indicatif ven/vien, amuïssement des voyelles finales atones ou prétoniques internes, épenthèse au futur et au conditionnel présent ; dans l’ordre, on pourrait retracer comme suit la morphologie du mot : *venirát > venrat > vendra > viendra, etc.).
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Berry, veindre, veinre ; wallon, vini ; prov. et esp. venir ; port. vir ; it. venire ; du latin venire ; ombrien, ben . On remarquera veindre, qui suppose venĭre, au lieu de venīre.

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Phonétique du mot « venir »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
venir vœnir

Fréquence d'apparition du mot « venir » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « venir »

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Citations contenant le mot « venir »

  • Comment obtenir la béatitude ? En disant Dada. Comment devenir célèbre ? En disant Dada. D’un geste noble et avec des manières raffinées. Jusqu’à la folie. Jusqu’à l’évanouissement. Comment en finir avec tout ce qui est journalisticaille, anguille, tout ce qui est gentil et propret, borné, vermoulu de morale, européanisé, énervé ? En disant Dada. Dada c’est l’âme du monde, Dada c’est le grand truc. Dada c’est le meilleur savon au lait de lys du monde. Dada Monsieur Rubiner, Dada Monsieur Korrodi, Dada Monsieur Anastasius Lilienstein. Cela veut dire en allemand : l’hospitalité de la Suisse est infiniment appréciable. Et en esthétique, ce qui compte, c’est la qualité. Je lis des vers qui n’ont d’autre but que de renoncer au langage conventionnel, de s’en défaire. Dada Johann Fuchsgang Goethe. Dada Stendhal, Dada Dalaï-lama, Bouddha, Bible et Nietzsche. Dada m’Dada. Dada mhm Dada da. Ce qui importe, c’est la liaison et que, tout d’abord, elle soit quelque peu interrompue.Je ne veux pas de mots inventés par quelqu’un d’autre. Tous les mots ont été inventés par les autres. Je revendique mes propres bêtises, mon propre rythme et des voyelles et des consonnes qui vont avec, qui y correspondent, qui soient les miens. Si une vibration mesure sept aunes, je veux, bien entendu, des mots qui mesurent sept aunes. Les mots de Monsieur Dupont ne mesurent que deux centimètres et demi. On voit alors parfaitement bien comment se produit le langage articulé. Je laisse galipetter les voyelles, je laisse tout simplement tomber les sons, à peu près comme miaule un chat… Des mots surgissent, des épaules de mots, des jambes, des bras, des mains de mots. AU. OI. U. Il ne faut pas laisser venir trop de mots. Un vers c’est l’occasion de se défaire de toute la saleté. Je voulais laisser tomber le langage lui-même, ce sacré langage, tout souillé, comme les pièces de monnaie usées par des marchands. Je veux le mot là où il s’arrête et là où il commence. Dada, c’est le coeur des mots. Toute chose a son mot, mais le mot est devenu une chose en soi. Pourquoi ne le trouverais-je pas, moi ? Pourquoi l’arbre ne pourrait-il pas s’appeler Plouplouche et Plouploubache quand il a plu ? Le mot, le mot, le mot à l’extérieur de votre sphère, de votre air méphitique, de cette ridicule impuissance, de votre sidérante satisfaction de vous-mêmes. Loin de tout ce radotage répétitif, de votre évidente stupidité.Le mot, messieurs, le mot est une affaire publique de tout premier ordre.
    Hugo Ball —  Manifeste littéraire
  • Comme l’enfant, la femme se représente le bien et le mal en simples images d’Épinal ; le manichéisme rassure l’esprit en supprimant l’angoisse du choix ; décider entre un fléau et un moindre fléau, entre un bénéfice présent et un plus grand bénéfice à venir, avoir soi-même à définir ce qui est défaite, ce qui est victoire, c’est prendre de terribles risques ; pour le manichéiste le bon grain est clairement distinct de l’ivraie, et il n’y a qu’à arracher l’ivraie ; la poussière se condamne elle-même et la propreté est parfaite absence de souillure ; nettoyer, c’est expulser déchets et boue.
    Simone de Beauvoir — Le deuxième sexe
  • Monter, descendre, aller, venir, tant fait l’homme qu’à la fin il disparaît.
    Raymond Queneau
  • L’être ou le néant, voilà le problème. Monter, descendre, aller, venir, tant fait l’homme qu’à la fin il disparaît. Un taxi l’emmène, un métro l’emporte, la tour n’y prend garde, ni le Panthéon. Paris n’est qu’un songe, Gabriel n’est qu’un rêve (charmant), Zazie le songe d’un rêve (ou d’un cauchemar) et toute cette histoire le songe d’un songe, le rêve d’un rêve, à peine plus qu’un délire tapé à la machine par un romancier idiot (oh ! pardon)...
    Raymond Queneau — Zazie dans le métro
  • Le travail du moine, c'est de voir venir de loin ses pensées.
    Les Pères du désert
  • Attendre et voir venir.
    Daniel Defoe
  • L'événement à venir projette son ombre.
    Thomas Campbell
  • Voici venir l'hiver, tueur de pauvres gens.
    Jean Richepin — La Chanson des gueux
  • Le véritable esprit consiste à en faire venir aux autres.
    Philippe Beaussant — Le roi soleil se lève aussi
  • Lewis Hamilton n'a «pas senti d'usure anormale», n'a «pas vu la crevaison venir» dans le dernier tour mais a fini à «l'adrénaline» pour remporter dimanche le Grand Prix de Grande Bretagne de Formule 1, sur trois roues, devant le Néerlandais Max Verstappen, alors qu'il gérait une avance confortable de plus de 20 secondes avant l'incident.
    Formule 1 : "Je n'ai pas vu la crevaison venir", Hamilton l'emporte à Silverstone en finissant sur trois roues
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Traductions du mot « venir »

Langue Traduction
Anglais come
Espagnol ven
Italien venire
Allemand kommen sie
Chinois
Arabe تأتي
Portugais venha
Russe приходить
Japonais 来る
Basque etorri
Corse veni
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Synonymes de « venir »

Source : synonymes de venir sur lebonsynonyme.fr

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