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Tyrannie

Variantes Singulier Pluriel
Féminin tyrannie tyrannies

Définitions de « tyrannie »

Trésor de la Langue Française informatisé

TYRANNIE, subst. fém.

A. − HIST. DE L'ANTIQ. En Grèce, Sicile, Italie méridionale, régime politique dans lequel le pouvoir, monocratique et absolu, était obtenu par usurpation et par l'abolition du régime aristocratique. La tyrannie de Pisistrate protégeait les paysans. Tandis que la tyrannie s'étoit glissée à Athènes, elle avoit aussi levé l'étendard en Sicile (Chateaubr., Essai Révol., t. 2, 1797, p. 125).
P. anal. Carthage, devenue un état purement agricole et commerçant, réparait promptement ses pertes sous la bienfaisante tyrannie d'Hannibal (Michelet, Hist. romaine, t. 2, 1831, p. 48).
B. − P. ext. Synon. de absolutisme, despotisme, dictature, oppression.
1. [À propos d'une pers.]
a) Pouvoir arbitraire et absolu d'un souverain, d'une personne ou d'un groupe de personnes détenant l'autorité suprême, caractérisé par un gouvernement d'oppression, d'injustice et de terreur. Tyrannie féodale, militaire, révolutionnaire; tyrannie de Bonaparte; les excès de la tyrannie. À dater de cette époque [31 mai 1793] (...) en changeant de gouvernement elle [la France] n'a plus fait que changer de tyrannie (Proudhon, Révol. soc., 1852, p. 21).S'il est devenu banal de dire que le conflit actuel est une guerre mondiale et morale, c'est parce que cela est terriblement vrai. Le combat gigantesque que se livrent la liberté et la tyrannie n'admet pas d'autres limites que celles de la terre ni d'autre terme que la victoire complète de l'un des deux ennemis (De Gaulle, Mém. guerre, 1954, p. 460).
b) Comportement autoritaire, injuste et violent d'une personne ou d'un groupe de personnes (reconnues comme une entité) dans le domaine des relations personnelles, professionnelles, sociales, etc. Tyrannie domestique, religieuse, syndicale; tyrannie d'un père, d'un patron; tyrannie odieuse, insupportable; exercer, subir une tyrannie. D'un mari j'ai dû tout supporter; mais d'un ami, d'un simple ami, je ne veux accepter aucune de ces tyrannies d'affection qui sont les calamités des relations cordiales (Maupass., Notre cœur, 1890, p. 332).Les filles restent des enfants... Elles passent de la tyrannie baroque des parents à la tyrannie sournoise d'un mari (Chardonne, Épithal., 1929, p. 406).
2. [À propos d'une réalité concr. ou abstr.] Fait de s'imposer d'une manière impérieuse et absolue à l'esprit, aux sentiments, à la volonté de quelqu'un; fait de contraindre quelqu'un à se conformer à certaines exigences matérielles, morales. Tyrannie de la morale, de la pensée, des principes, de la raison; tyrannie du progrès; tyrannie de l'amour, des souvenirs. Une action sociale et conservatrice, dont le but est de défendre l'homme des erreurs de sa volonté et de la tyrannie de ses passions, pour le faire jouir de sa véritable liberté (Bonald, Essai analyt., 1800, p. 9).Cette « bougeotte » générale qui se montre curieusement dans la seconde moitié du Moyen Âge, besoin de se soustraire quelques mois à la tyrannie de la misère quotidiennefût-ce au prix de plus grandes fatigues physiques (P. Rousseau, Hist. transp., 1961, p. 67).
P. exagér. et p. iron. Influence, domination excessive dans un domaine particulier. Tyrannie de la mode. Je voudrais que dans ces pages splendides et charmantes, vous retranchassiez (tyrannie de l'imparfait du subjonctif) quatre mots (Hugo, Corresp., 1862, p. 429).
Prononc. et Orth.: [tiʀani]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. Ca 1140 « pouvoir oppressif » (Grant mal fist Adam, I, 43d ds T.-L.). Empr. au b. lat. eccl.tyrannia, -ae « id. », v. Blaise Lat. chrét.; ca 730 ds Latham, gr. τ υ ρ α ν ν ι ́ α « id. ». Fréq. abs. littér.: 1 287. Fréq. rel. littér. : xixes.: a) 3 553, b) 1 643; xxes.: a) 876, b) 1 033. Bbg. Dauzat Ling. fr. 1946, p. 259. − Dub. Pol. 1962, p. 436. − Quem. DDL t. 11.

Wiktionnaire

Nom commun - français

tyrannie \ti.ʁa.ni\ féminin

  1. Domination usurpée et illégale.
    • Allons enfants de la Patrie
      Le jour de gloire est arrivé !
      Contre nous de la tyrannie
      L'étendard sanglant est levé.
      — (La Marseillaise)
    • Cromwel n'étoit pas moins agité des terreurs de la tyrannie. Il étoit toujours couvert d'une cuirasse, chargé d'armes offensives, et environné de satellites. — (Étienne-François de Lantier, Voyages d’Anténor en Grèce et en Asie avec des notions sur l’Égypte, Paris : Belin & Bernard, an VI, 2e édition, t.1, p.18 (note de bas de page))
    • À peine l’indépendance de l’Amérique du Nord fut-elle proclamée, la paix conclue avec l’ancienne métropole, que ces hommes qui criaient si haut à la tyrannie, à l’oppression, qui réclamaient contre la violation du droit des gens, dont, disaient-ils, ils étaient victimes, organisèrent avec cet implacable sang-froid qu’ils tiennent de leur origine une chasse aux Indiens. — (Gustave Aimard, Les Trappeurs de l’Arkansas, Éditions Amyot, Paris, 1858)
  2. Gouvernement légitime, mais injuste et cruel.
    • Jamais aucune contrée de l’Europe ne supporterait maintenant la longue succession de tyrannies basses et féroces qui ont accablé les Romains. — (Germaine de Staël, De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (1800).)
    • Être prudemment barbare et exercer la tyrannie conséquemment signifie, selon ce politique abominable, exécuter tout d'un coup toutes les violences et tous les crimes que l'on juge utiles à ses intérêts. — (Frédéric II & Voltaire, L'anti-Machiavel - 1739 - (édition de 1947))
  3. Toute sorte d’oppressions et de violences.
    • Une circonstance, qui tendait surtout à rehausser la tyrannie de la noblesse et à doubler les souffrances des classes inférieures, dérivait particulièrement de la conquête de Guillaume, duc de Normandie. — (Walter Scott, Ivanhoé, traduit de l’anglais par Alexandre Dumas, 1820)
    • Mais ce n'est pas seulement par goût de la tyrannie que les policiers agissaient ainsi, c'est aussi par goût du lucre. Les tracasseries, le « chantage » qu'ils exerçaient sur les juifs apeurés avaient pour but de leur extorquer de fréquentes « étrennes ». — (Léon Berman, Histoire des Juifs de France des origines à nos jours, 1937)
  4. (En particulier) (Par hyperbole) Comportement capricieux et égoïste.
    • D'Aiglemont a été gâté par ses parents, de même que tu l'as été par ta mère et par moi. Comment espérer que vous pourrez vous entendre tous deux avec des volontés différentes dont les tyrannies seront inconciliables ? Tu seras ou victime ou tyran. — (Honoré de Balzac, La Femme de trente ans, Paris, 1832)
    • L'habile mais féroce tyrannie du cœur exercée par Sand montre insensiblement ses limites; pourtant la “quarante-huitarde” qui se voudrait martyrisée n'en démord pas, solidement ancrée dans son égocentrisme paranoïaque. — (Thierry Ozwald, « La correspondance George Sand/Pauline Viardot ou les tribulations de Nimounne et Fifille », dans Literatura epistolar : Correspondències (s. XIX-XX), tome 7, Lleida, 2002, p. 126)
  5. (Figuré) Pouvoir que certaines choses ont ordinairement sur les hommes.
    • L’éloquence exerce une sorte de tyrannie sur les foules. - La tyrannie de la coutume, de l’usage, de la mode. - La tyrannie des passions.
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Littré (1872-1877)

TYRANNIE (ti-ra-nnie) s. f.
  • 1Domination usurpée et illégale, bien ou mal exercée (sens ancien). Nous savons que ce prince magnanime [Charles II] eût pu hâter ses affaires, en se servant de la main de ceux qui s'offraient à détruire la tyrannie [Cromwell] par un seul coup, Bossuet, Reine d'Anglet. Je l'avoue franchement, la tyrannie ne me donnait aucun plaisir, Fénelon, Dial. morts anc. (Solon, Pisistrate). Le mot tyrannie, qui avait été pris en bonne part, ne servit plus qu'à exprimer la cruauté jointe à l'usurpation du pouvoir, Lévesque, Instit. Mém. sc. mor et pol. t. II, p. 51.
  • 2Gouvernement injuste et cruel, légitime ou non. Toujours la tyrannie a d'heureuses prémices, Racine, Brit. I, 1. Il ne faut ni art ni science pour exercer la tyrannie, La Bruyère, X. Tous les coups portèrent sur les tyrans, aucun sur la tyrannie, Montesquieu, Esp. III, 3. Sous quelle tyrannie aimeriez-vous mieux vivre ? sous aucune ; mais, s'il fallait choisir, je détesterais moins la tyrannie d'un seul que celle de plusieurs, Voltaire, Dict. phil. Tyrannie. La tyrannie d'un corps est toujours plus impitoyable que celle d'un roi, Voltaire, Mœurs, 182.
  • 3Toute sorte d'oppressions et de violences. Six cents soldats qui avaient été les instruments de leurs tyrannies [de quelques gouverneurs], Vaugelas, Q. C. 545. Tu [Assuérus] ne m'as prodigué tes perfides bienfaits Que pour me faire mieux sentir ta tyrannie, Racine, Esth. III, 1. Tous n'attendent qu'un chef contre la tyrannie [des Romains], Racine, Mithr. III, 1. Il [Napoléon] s'est plaint de la tyrannie qu'elle [l'Angleterre] exerçait sur les mers ; mais c'était ce pouvoir sur mer qui mettait obstacle à sa tyrannie sur terre, Villemain, Souven. contemp. Cent-Jours, VIII.

    Il se dit aussi de l'abus de l'empire sur les animaux. Si l'on ajoute aux causes naturelles d'altération dans les animaux libres celle de l'empire de l'homme sur ceux qu'il a réduits en servitude, on sera surpris de voir jusqu'à quel point la tyrannie peut dégrader, défigurer la nature, Buffon, Quadrup. t. VII, p. 200.

  • 4Humeur, conduite impérieuse et violente dans les rapports de famille ou de société. On a souvent besoin de force et de prudence pour les opposer à la tyrannie de la plupart de nos amis, qui se font un droit sur notre confiance et qui veulent tout savoir de nous, La Rochefoucauld, Réfl. div. p. 115. La tyrannie consiste au désir de domination universelle et hors de son ordre, Pascal, Pens. VI, 37, éd. HAVET. La tyrannie est de vouloir avoir par une voie ce qu'on ne peut avoir que par une autre, Pascal, ib. VI, 10. Nous exerçons sur nos frères une espèce de tyrannie, nous prenons contre eux un esprit d'aigreur ou un esprit de dédain, Bossuet, Serm. Samedi de la 3e sem. de carême, Jugem. hum. 1. Il n'y a point de plus maligne tyrannie que de forcer un homme de nous être obligé malgré lui, et c'est indignement abuser du nom de grâce que de le donner à un traitement forcé, plus cruel que le châtiment, Rousseau, Dial. I. Elle [sa femme] m'accuserait de caprice et peut-être de tyrannie, Ch. de Bernard, la Chasse aux amants, III.
  • 5 Fig. Pouvoir que certaines choses ont d'ordinaire sur les hommes. La tyrannie de la beauté. La tyrannie des bienséances. Pour les plus belles vies L'orgueil de la naissance a bien des tyrannies, Corneille, Pulch. I, 1. Elle sent son âme sous la tyrannie d'un démon invisible, Massillon, Carême, Prière 2.

HISTORIQUE

XIIIe s. Maintenant que li rois se porchace de faire son profit et laisse le bien dou pueple, il devient tirans, et sa tirannie n'est pas autre chose que corruption de sa signorie, Latini, Trésor, p. 313.

XIVe s. Justice sans misericorde est tirannie, Ménagier, I, 9.

XVe s. Glacidas, qui estoit de haut courage, plein de toute tyrannie et orgueil, Hist. de la puc. d'Orléans, p. 502, dans LACURNE.

XVIe s. Nous serons exempts de leurs tyrannies, et exactions. Sat. Mén. p. 177.

SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE

TYRANNIE. - HIST. Ajoutez : XIIe s. [âme] plus sogette à leur tyrannie [des œuvres mondaines] par malvaises penses [pensées], li Dialoge Gregoire lo pape, 1876, p. 334.

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Étymologie de « tyrannie »

(XIIe siècle)[1] Du grec ancien τυραννία, turannía (« tyrannie, pouvoir absolu »).
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Prov. tirannia ; esp. tirania ; ital. tirannia ; du grec τυραννία, qui vient de τύραννος.

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Phonétique du mot « tyrannie »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
tyrannie tirani

Fréquence d'apparition du mot « tyrannie » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « tyrannie »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « tyrannie »

  • La multitude qui ne se réduit pas à l'unité est confusion ; l'unité qui ne dépend pas de la multitude est tyrannie.
    Blaise Pascal — Pensées, 871 Pensées
  • La corruption des mœurs est mortelle pour les républiques et utile aux tyrannies et aux monarchies absolues : cela seul suffit à juger de la nature et de la différence de ces deux sortes de gouvernement.
    Giacomo Leopardi — Zibaldone, I, 377
  • La mort est plus douce que la tyrannie.
    Eschyle — Agamemnon
  • De la peur de tous naît, sous la tyrannie, la lâcheté du plus grand nombre.
    Vittorio Alfieri — Della tirannide, I, 4
  • De toutes les tyrannies, la pire est celle qui peut ainsi compter ses sujets et voir de son siège les limites de son empire.
    François Guizot — Essais sur l'histoire de France
  • La tyrannie est une habitude.
    Fiodor Dostoïevski — Nouvelles de la maison des morts
  • Les excès de la liberté mènent au despotisme ; mais les excès de la tyrannie ne mènent qu'à la tyrannie.
    François René de Chateaubriand
  • Le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo a appelé jeudi "le monde libre" à "triompher" de la "nouvelle tyrannie" incarnée selon lui par la Chine communiste. "La Chine d’aujourd’hui est de plus en plus autoritaire à l’intérieur du pays, et plus agressive dans son hostilité face à la liberté partout ailleurs", a-t-il déclaré en Californie lors d’un discours dont la tonalité rappelait plus que jamais la Guerre froide avec l’Union soviétique.
    SudOuest.fr — Washington appelle "le monde libre" à "triompher" de la "nouvelle tyrannie" chinoise
  • Vivre sans âme est le moyen le plus court et le plus sûr de vivre longtemps et en sécurité sous une tyrannie.
    Vittorio Alfieri — Della tirannide, II, 2
  • Il y a eu de la lâcheté partout où il y a eu de la tyrannie.
    Jean-Louis Guez de Balzac — Le Prince
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Traductions du mot « tyrannie »

Langue Traduction
Anglais tyranny
Espagnol tiranía
Italien tirannia
Allemand tyrannei
Chinois 暴政
Arabe استبداد
Portugais tirania
Russe тирания
Japonais 暴政
Basque tirania
Corse tirania
Source : Google Translate API

Synonymes de « tyrannie »

Source : synonymes de tyrannie sur lebonsynonyme.fr

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Tyrannie

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