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Non

Définitions de « non »

Trésor de la Langue Française informatisé

NON, adv.

I. − [Comme équivalent d'une phrase négative]
A. − [Récuse un énoncé positif ou refuse l'état des choses en situation discursive]
1. [En réponse à une affirmation, un ordre ou une question positifs]
a) [Non est utilisé seul]:
1. roger: (...) Ah! Suzanne... reste encore... ma chère Suzanne... Il la retient. suzanne, voulant se dégager. Non... non... je vous en prie... Pailleron, Monde où l'on s'ennuie, 1869, III, 7, p.169.
[Fréq. accompagné d'un énoncé précisant le contenu ou la portée de la négation] De temps en temps elle me demandait: «Est-ce que je suis grise? −Non, pas encore». Et elle buvait de nouveau (Maupass., Contes et nouv., t.1, Cri d'al., 1886, p.1061):
2. −On sait tellement bien ce que vous allez faire. −Non, dit Anne, je ne vais pas vous embrasser si vous ne voulez pas. B. Vian, L'Automne à Pékin, Paris, éd. de Minuit, 1964 [1956], p.85.
[Non est suivi d'un énoncé alternatif que le locuteur substitue à celui qu'il nie] Ta femme t'a lâché? −Non, elle est morte (R. Bazin, Blé, 1907, p.325).−C'est les boches qui attaquent... C'est un barrage... −Non, c'est pour faire sauter leurs mitrailleuses (Dorgelès, Croix de bois, 1919, p.44).−Tu pourrais sortir pendant que je fais le ménage, proposa-t-elle. −Oh non, je vais t'aider, tu n'y arriverais pas toute seule (Triolet, Prem. accroc, 1945, p.164).
Non... mais... −Cette fille... pourquoi diable s'est-elle sauvée si vite? On aurait dit que je lui avais fait peur! (...) −Ah? Yamina?... Non, elle n'a pas eu peur. Mais, tu sais, quand un étranger vient à la maison, les femmes, elles ne peuvent rester (Cl. Ollier, La Mise en scène, Paris, Flammarion, 1982 [1958], pp.144-145):
3. −Mais pourquoi riez-vous? Qu'est-ce qui vous amuse tant? Vous trouvez ce que je dis idiot? −Oh, non, ce n'est pas ça... Mais vous êtes impayable (...) Oh, c'est trop bon... N. Sarraute, Les Fruits d'or, Paris, Gallimard, 1969 [1963], p.93.
Ça non, pour cela non. [Ça, pour cela référant à ce qui a été dit précédemment] Sa femme l'interrompit: il allait effrayer Blanche, lui monter la tête... −Ah! pour cela non, rassurez-vous: il ne ruine pas ses neveux; il paraît que la pauvre petite ne fait pas gras tous les jours... (Mauriac, Myst. Frontenac, 1933, p.42).Sous prétexte qu'il a été un foutriquet de petit capitaine de cavalerie, avec ses bottes payées par papa, avec sa croix de guerre payée par papa, comme le reste... −Ah ça non. Je ne permettrai pas! s'écria François. Ma blessure aussi tu l'as payée, peut-être? (Druon, Gdes fam., t.2, 1948, p.37).
[Sous forme de réponse interrogative, manifestant une mise en doute étonnée] :
4. Mmepetypon: (...) Et depuis, tous les soirs, la sainte réapparaît.C'est un fait, ça!... Il n'y a pas à dire que cela n'est pas!... Et la preuve, c'est que je l'ai vue! mongicourt, bien appuyé. −Vous? Mmepetypon: −Moi!... Elle m'a parlé! mongicourt: −Non? Feydeau, Dame Maxim's, 1914, I, 7, p.12.
Rare. Pourquoi non? [Au lieu de, usuel, pourquoi pas?] Antoine: Ça vous irait-il? Carlos: Pourquoi non?... Secrétaire est une situation honorable (Bourdet, Sexe faible, 1931, iii, p.421).
b) [Non se trouve renforcé]
Mais non [Mais renforçant la dénégation, participant à la dénégation] −Alors, tu le défends? Et cette sale gamine qui riait de se sentir tripotée, tu la défends? −Mais non, j'essaie de comprendre (Aymé, Jument, 1933, p.111).Si tu sais quelque chose... Rico! −Mais non, enfant, je ne sais rien... Je devine, et peut-être que je me trompe, je te dis (Aragon, Beaux quart., 1936, p.288).Ah! Si vous aviez voulu! Mais non: vous aussi, vous êtes comme les autres (Montherl., Malatesta, 1946, ii, 4, p.471).
Non et non, non, mille (cent, dix...) fois non. Supportez-vous qu'une bonne de ce genre lève un rideau pour regarder quand vous embrassez votre femme? Supportez-vous de la trouver au bal masqué à la place de votre bien-aimée? Non, cent mille fois non, évidemment! (Jouve, Scène capit., 1935, p.51).−Vous me faites tous ch..., à la fin! Non, et non! Je ne marche pas! (Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p.179).
Non pas. −Du roi viens voir la personne. −Non, répondait-il, non pas. Ôtera-t-il sa couronne Quand je mettrai chapeau bas? (Béranger, Chans., t.3, 1829, p.202).Si je parviens seulement à la voir, je suis heureux... Non pas, se dit-il; il faut aussi qu'elle voie que je la vois (Stendhal, Chartreuse, 1839, p.300).−T'es donc tout seul? −Non pas: Berlaisier doit en être (Genevoix, Raboliot, 1925, p.238).−C'est Boivert qui vous en a parlé? −Non pas!... C'est un bruit qui court en ville (Simenon, Vac. Maigret, 1948, p.138).
Non point (rare, vieilli). −Edward, dit lady Glenarvan, vous êtes le meilleur des hommes. −Non point, mais j'ai le meilleur des équipages sur le meilleur des navires (Verne, Enf. cap. Grant, t.1, 1868, p.47).Une théorie, un système, une hypothèse, l'évolution?... Non point: mais, bien plus que cela, une condition générale à laquelle doivent se plier et satisfaire désormais, pour être pensables et vrais, toutes les théories, toutes les hypothèses, tous les systèmes (Teilhard de Ch., Phénom. hum., 1955, p.242).
[Avec que exclamatif] Que non! Que non pas! −Ça sent bon le frichti! Vous n'êtes pas fatigué de cuisiner tout le temps? −Que non pas! C'est de la ragougnasse que je fais au restaurant. Entrez. Vous allez voir ce que c'est, de la cuisine (Dabit, Hôtel Nord, 1929, p.146).Est-ce là Cécile, toute Cécile? Oh! Que non pas! Ce que je ne saurais peindre, c'est la fierté de cette petite fille, son port de Diane (Duhamel, Jard. bêtes sauv., 1934, p.22).«Ma soeur, dites-moi, pouvez-vous résister à la grâce?» «Oh! Que non! me répondit-elle. Pauvre que je suis, moi, résister à la grâce, imaginez-vous cela!» (Montherl., Port-Royal, 1954, p.990).
Non da! (vieilli, littér.). Demain [dit l'escamoteur], le Parlement vous jugera à la hart (...) −Non da! s'écria Eustache; et je veux, dès demain, dire à messieurs tout le mystère. −(...) seulement vous serez brûlé vif pour avoir usé de magie (Nerval, Nouv. et fantais., 1855, p.230).
Ma foi non (v. foi A 1).
c) Oui et non. [Marque l'hésitation sur la réponse, la volonté de faire apparaître le pour et le contre; peut être, sans plus, le signe d'une dérobade] On demande souvent si le même homme peut être à la fois grand coloriste et grand dessinateur. Oui et non; car il y a différentes sortes de dessins (Baudel., Salon, 1846, p.109).Elle ajouta d'une voix plus basse: −Nous aurons à aller assez loin. −C'est une expédition? −Oui et non. En tout cas, j'espère, une surprise (Gracq, Syrtes, 1951, p.119):
5. jean: −Ah! vous êtes fatiguée en ce moment, madame?... elle: −Mais oui... ça vous surprend? jean: −Oui et non... c'est-à-dire que... il m'est arrivé de passer des nuits blanches... et j'ai eu chaque fois l'impression que la fatigue se fatiguait d'attendre et qu'elle s'en allait vers trois heures ou quatre heures du matin... pour ne reparaître que plus tard! Guitry, Veilleur, 1911, I, p.5.
2. [Exprimant une réaction de rejet face à une situation jugée invraisemblable, totalement inattendue, ou bien inacceptable, voire scandaleuse] Synon. ce n'est pas possible.−Ah! ah! ah! ah!... Ah! non c'est trop drôle! Ah! ah! ah! ah!... Ah! ah! ah! ah! (Dans l'épuisement du rire). Ah!... m...!... (Feydeau, Dame Maxim's, 1914, ii, 8, p.48).Les femmes, jalouses, lui faisaient des yeux mauvais et ricanaient méchamment, se disaient de l'une à l'autre: −Elle est encore une fois fichue comme l'as de pique! Non, quelle dégaine! Un vrai carnaval (Van der Meersch, Invas. 14, 1935, p.85).Il ne veut pas t'épouser? Non, tout de même! Ce serait trop drôle (Mauriac, Mal Aimés, 1945, i, 3, p.166):
6. ... Non, il faut l'avoir entendu... Il faut... mais vous êtes impayable... Je ne céderais pas ma place... Alors, non, sérieusement, alors vous trouvez que c'est mauvais, Les Fruits d'or? ha, ha... N. Sarraute, Les Fruits d'or, Paris, Gallimard, 1969 [1963], p.93.
Non vraiment (avec une pause, matérialisée parfois à l'écrit par une virgule). −Non, vraiment, il est trop bête!... murmurai-je, tout bas, dépitée et furieuse (Mirbeau, Journal femme ch., 1900, p.108).Mes plaies se sont fermées très vite! Quand je pense à la blessure de Philippe, mon garçon, qui a suppuré pendant trois mois et qu'il a fallu opérer plusieurs fois! Non, vraiment, j'ai eu de la chance (Duhamel, Suzanne, 1941, p.123).
Fam. Non vrai (avec une pause, matérialisée parfois à l'écrit par une virgule). Ne bouge plus... C'est frappant comme ça... Parole d'honneur! Je crois revoir mon Empereur (...) Non, vrai, Jérôme, pas de blague, tu as l'air du trente-quatrième fils naturel du grand homme (Reybaud, J. Paturot, 1842, p.166).La forme des instruments... Non vrai, je tremble en pensant qu'il pouvait me le demander! (Colette, Cl. école, 1900, p.231).
Non mais. [Marquant de manière renforcée le refus, exprimant l'indignation, l'incrédulité] Petypon, indigné: −Mais je ne vous connais pas!... Mais en voilà une idée!... Pourquoi êtes-vous dans mon lit?... La Môme: −Comment, pourquoi que j'y suis?... Non mais, t'en as une santé! (Feydeau, Dame Maxim's, 1914, i, 4, p.8).[Bibiche] entra, timide. Son mari était là, qui tournait le dos, pérorant. Il tourna la tête, et il resta hébété, balbutiant: −C'est-il que j'rêve?... Non mais... sans blague? (Benjamin, Gaspard, 1915, p.148).−Toi, à quarante-huit ans, tu vas aller avec une fille de vingt-deux ans! Non mais, tu es fou! (H. Jelinek, La Marche du fou, Paris, Gallimard, 1974 [1967], p.161).
[Dans un récit, écartant une éventualité qui ne s'est pas réalisée] Ce coup là, non, il était parti pour de bon (A. Stil, Qui?, Paris, Gallimard, 1980 [1969], p.82).
3. [..., non? comme élém. d'interr. rhétorique]
a) [Après une question positive obligeant à une réponse positive; commute avec n'est-ce pas?] Philippe (...): Tu as la voiture? Cristina: Oui. Philippe: Alors autant en profiter, non? (Bourdet, Sexe faible, 1931, iii, p.468).Et puis, tout d'un coup, elle voit le visage de Mathieu, son air naïf et convaincu, quand il avait dit: «On le fait passer, non?» (Sartre, L'Âge de raison, Paris, Gallimard, 1981 [1945], p.464).−Eh, vous! Le grand fusil, en tête!... On vous a dit de cavaler, non? (Y. Gibeau, Allons z'enfants, Paris, Gallimard, 1961 [1952], p.60).−C'était pour son bien, dit Marlone. On peut se marrer un peu, non? (Cl. Roy, Le Soleil sur la terre, Paris, Gallimard, 1968, p.223).
b) [Après une question négative invitant à confirmer la négation, tout en suggérant que le contraire est bien possible; ne commute pas avec n'est-ce pas] −Ballot! s'écrie le choeur. À la portée de la main des soldats qui passent! T'es pas dingue, non? (Barbusse, Feu, 1916, p.15).La nuit, on lui refuse un lit: «Quoi! Vous n'êtes pas venu de si loin pour dormir, non?» (Michaux, Plume, 1930, p.143).−Tu ne pouvais pas lui foutre un bon coup de poing dans les dents, non? (Aymé, Jument, 1933, p.78):
7. Le type le regarde, stupide d'indignation: «Vous n'allez tout de même pas vous raser, non?» «Pourquoi pas?» demande Brunet. Le type est rouge de colère: «Je vous dis qu'ils me fusilleront, s'ils vous trouvent ici». Sartre, Mort ds âme, 1949, p.198.
4. [... ou non comme alternative à une prop. positive] Mais, que ces explications soient ou non satisfaisantes, il est incontestable qu'elles ne préjugent rien (Cournot, Fond. connaiss., 1851, p.179).Le troisième a dit: −Savoir s'ils étaient déjà montés, ou non... (Ramuz, Derborence, 1934, p.41).Que nous le voulions ou non, un monde de survivants est un monde de prudents et d'habiles (Mauriac, Bâillon dén., 1945, p.392).
[..., oui ou non? exprimant la mise au défi de répondre autrement que par l'affirmative] Jeanne: Et voilà où tu m'amènes, misérable! Paul: Veux-tu être préfète, oui ou non? (Pailleron, Monde où l'on s'ennuie, 1869, i, 2, p.8).−Une! Deusse! Troisse! Voulez-vous vous barrer, oui ou non? (Courteline, Train 8 h 47, 1888, 2epart., 8, p.185).−Quoi! Quoi! Qu'est-ce que c'est? Y a-t-il eu délit, oui ou non? Le braconnage est-il un délit, oui ou non? (Genevoix, Raboliot, 1925, p.45).
5. [Emplois indir. (du type dire «non»)]
a) Dire (penser, faire signe, etc.) que non. −Tu te marieras! s'écria le vieux rebbe en nasillant d'un air ironique, tu te marieras! −Je parierais que non (Erckm.-Chatr., Ami Fritz, 1864, p.36).
[Avec effacement du verbe de déclaration ou d'opinion] Il lui demande aussi si ça faisait longtemps qu'elle était dans la maison, non, du jour même (Queneau,Loin Rueil, 1944, p.10).
[Un signe négatif de la part de l'interlocuteur est explicité par le locuteur] −Voyons!... C'est sérieux?... Vous ne comprenez pas? Non, vrai?... (Bernstein, Secret, 1913, ii, 10, p.25).Le plat circula. Le curé, se tournant à demi, le tendit à Jeanne. −Comment? Non?... À ton âge! Tu vas manger de cette tarte. −Je n'ai pas faim. −Je veux que tu en manges! −Je n'en mangerai pas! −Tu en mangeras (Vailland, Drôle de jeu, 1945, p.149):
8. Donnez moi ça, je vais vous débarrasser, il fait si chaud, non, un peu froid? Mais vous allez voir, tenez, ici, près du feu, mettez-vous là, non, là, vous serez mieux. N. Sarraute, Les Fruits d'or, Paris, Gallimard, 1969 [1963], p.23.
b) Dire non. Refuser, ne pas être d'accord. Eh bien, c'est ça leur organisation. «Voulez-vous d'une vie propre? Comme tout le monde?» Vous dites oui, naturellement. Comment dire non? (Camus, Chute, 1956, p.1477).
Faire «non», dire «non». Monsieur: Alors... Il la regarde longuement, puis il fait «non» avec la tête. Elle: − Non? Monsieur: −Non! Elle: −Je n'insiste pas (Guitry, Veilleur, 1911, ii, p.15).Tous ces magots qui remuent la tête de droite à gauche, de gauche à droite, et disent «non» (Cocteau, Appogiatures, 1953, p.98).
Ne répondre ni oui ni non. Quant à votre invitation si cordiale, je ne vous réponds ni oui ni non, en vrai normand (Flaub., Corresp., 1863, p.74).
Ne pas dire non. Ne pas dire le contraire, ne pas refuser. Un p'tit verre? Je ne dis pas non! −J'ai compté autour de cette table seize personnes accoudées. −J'ai connu mieux, Josille. −Je ne dis pas non, monsieur le curé (Pesquidoux, Livre raison, 1932, p.12).Remarque que ce M. Claudel est un génie, je ne dis pas non (Bernanos, Journal curé camp., 1936, p.1188).La police, remarque, il en faut... Je ne dis pas non, j'ai vu trop de choses... (Aragon, Beaux quart., 1936, p.358).
6. En emploi subst.
a) [Désignant l'acte de dire non] −Comment, vous ne savez pas? −Non. −Pas la plus petite idée? −Non. (Le «non» était plus faible) (Romains, Hommes bonne vol., 1932, p.91):
9. corte: Qui vous parle de prorogation? Téléphonez, non télégraphiez. Ça fait plus d'effet. spanna: Un non sec? corte: Un oui sec. Un oui sans réserves. Ajoutez que je forme des voeux pour la réussite de notre entreprise. Camus, Cas intéress., 1955, 1ertabl., p.612.
b) Réponse négative, refus. Un non définitif. [Lucien] ne sut pas répondre nettement à ce mot que Louise accompagna d'un soupir d'hésitation: êtes-vous heureux? Un non mélancolique eût fait sa fortune (Balzac, Illus. perdues, 1843, p.460).Ce qu'elle voulait aujourd'hui de Costals, c'était un oui ou un non. S'il continuait d'atermoyer, ce serait elle qui dirait non (Montherl., Lépreuses, 1939, p.1382).
Pour un oui, pour un non. À n'importe quel propos. Son portrait dédicacé tenait le milieu de la vitrine, on l'invoquait comme le bon Dieu, dès la moindre contestation, pour un oui, pour un non! (Céline, Mort à crédit, 1936, p.406).
B. − [Signifie l'acceptation d'un énoncé négatif; s'oppose à si exprimant le rejet]
1. [En réponse à une question négative] La Duchesse: Oui, dans le coin, là, sous le livre noir! Tu ne vois rien? Roger: Non... Ah! si!... Un papier rose! (Pailleron, Monde où l'on s'ennuie, 1869, i, 15, p.66).Il aurait fini par te battre... Il ne t'a pas battue, au moins? −Oh! non dit-elle entre deux sanglots (Bernanos, Soleil Satan, 1926, p.79).−Tu n'as donc pas reçu ma lettre? −Mais non, et tu vas bien rire. Déodat l'a égarée, figure-toi que la lettre est tombée de son sac (Aymé, Jument, 1933, p.135).Tu n'as pas gardé ta voiture? Joseph eut un geste vague. −Ma voiture? Quelle voiture? Non, je suis venu en métro (Duhamel, Combat ombres, 1939, p.27):
10. −Tu ne peux pas venir? Ce n'est pas Rochelle qui te retient tout de même? −Sûr que non, dit Angel. B. Vian, L'Automne à Pékin, Paris, éd. de Minuit, 1964 [1956], p.47.
[En réponse à une succession de questions positives et négatives, d'où un quiproquo possible] :
11. léo: Et ce numéro trois? C'est un mythe? Je veux dire, il n'existe pas? madeleine: Non. léo: Il existe? madeleine: Non, Madame. Il n'existe pas. Cocteau, Parents, 1938, II, 12, p.264.
2. [En réponse à une assertion ou une injonction négatives]
[En réponse à une assertion négative] −Et nous nous aimerons à travers elle, et cela nous suffira bien, car nous ne serons ainsi ni méchants, ni jaloux... Ils s'embrassèrent, comme de petits enfants. −Non jamais (Miomandre, Écrit sur eau, 1908, p.270).Marianne: (...) Elisabeth touche à la trentaine sans en avoir l'air. Rose: Pour cela non, elle n'en a pas l'air... J'ignore si c'est son regard ou son sourire qui lui donnent cette expression enfantine (Mauriac, Mal Aimés, 1945, i, 1, p.157).
[En réponse à une injonction négative] N'y va pas! −Non, c'est promis:
12. −Vous n'êtes pas en désaccord, au moins? dit-il. −Mais non, voyons, quelle question! −Parce que tu sais ce que je t'ai dit; le divorce, ce n'est pas une chose pour votre famille. −Mais non, ne t'en fais pas. −Tu n'es quand même pas mal avec lui? −Mais non, ça va, tout va. H. Jelinek, op.cit., pp.289-290.
Rem. Dans les cas énumérés sous 2, oui serait également possible. Il porterait non pas sur le dit, mais sur le dire: Le divorce, ce n'est pas une chose pour votre famille −Oui, ne t'en fais pas («oui, tu as raison de dire que...»).
C. − [Annonce un énoncé négatif] Non décidément, le vieil homme n'était pas mort en lui! (Rolland, J.-Chr., Nouv. journée, 1912, p.1583).Non, je n'éprouvai, pendant ta confession, aucune jalousie. Comment te faire comprendre ce qu'elle détruisait en moi? (Mauriac, Noeud vip., 1932, p.25).Non, rien ne se passait comme elle l'avait cru. Quand Marcel avait voulu l'emmener avec lui dans sa tournée, elle avait protesté (Camus, Exil. et Roy., 1957, p.1559).
II. − [Porte sur un constituant de la phrase]
A. − [Dans le cadre d'une oppos. antithétique, écarte un terme au profit d'un autre]
1. Non, non pas
a) [Auprès d'un suj. auquel est refusée l'attribution du prédicat]
Non. Il a fini, moi non. Cet homme m'a dit tout à l'heure qu'il ferait ce qu'il voudrait, et non moi (Montherl., Bestiaires, 1926, p.554).
Non pas. Non, c'est vous qui faites tout cela, et non pas moi! (Dumas père, Monte-Cristo, t.2, 1846, p.93):
13. Cette vaste étendue en pente, à ses yeux, existait réellement; mais le reste, non pas, qui n'offrait au regard que de chimériques barrières... Bosco, Mas Théot., 1945, p.54.
b) [Auprès d'autres fonctions syntaxiques; le second terme est coordonné par mais]
[Non, non pas portent sur le premier terme]
Non. C'était comme une fin du monde, non triste, mais solennelle (Michelet, Journal, 1858, p.423).
Non pas. Oh! Nous avons un jardin, dirent-elles, avec non pas de l'orgueil, mais enfin un peu de joie d'avoir quelque objet de luxe à montrer (Stendhal, Souv. égotisme, 1832, p.81).MmeRezeau fit ingurgiter à Frédie, non pas une, mais deux cuillères d'huile de ricin (H. Bazin, Vipère, 1948, p.54):
14. La déviation en direction de Heidelberg est proche. Non pas bientôt, mais tout de suite elle [la motocycliste] va obliquer à droite, prendre la route banale, traverser un faubourg et la place Bismarck. P. de Mandiargue, La Motocyclette, Paris, Gallimard, 1980 [1963], p.208.
[Non, non pas portent sur le second terme, qui peut être coordonné par mais, et]
Non. Vous n'êtes pas encore don Juan, Sténio! Vous êtes une nature faible et non perverse (Sand, Lélia, 1839, p.524).Est-ce là que les Chrétiens allaient? Ce sont de vieilles tombes syriennes, non romaines (Barrès, Cahiers, t.11, 1914, p.42).Une époque qui sait faire des oeuvres énormes, mais non grandes (Valéry, Variété IV, 1938, p.155).
Non pas. On veut vous éclairer, et non pas vous détruire (Laya, Ami loix, 1793, i, 1, p.8).Il chante pour lui seul, et non pas pour ses semblables (Lautréam., Chants Maldoror, 1869, p.257).Son sang coulait sans turbulence, mais non pas sans chaleur, ainsi qu'en eussent pu témoigner plusieurs aristocratiques beautés (Gide, Caves, 1914, p.689).
c) [Les termes antithétiques sont des prop.]
Non que/non pas que... (mais)
Non que. Tout à coup elle s'aperçut que Walstein l'avait menée dans une des allées latérales de la promenade les plus écartées et les plus sombres; non que le petit homme rêvât la moindre audace, mais il n'était pas fâché qu'on l'en crût capable (Karr, Sous tilleuls, 1832, p.215).Rémi était un peu maussade de voir un étranger ainsi installé sur le canapé de ses amies. Non que le petit vieillard lui déplût. Bien au contraire! (A. France, Chat maigre, 1879, p.232):
15. Imaginez-le se jetant, dès sa vingtième année, dans l'agitation révolutionnaire; non qu'il en espère rien (il est à jamais désespéré) mais il ne prend conscience de soi-même que dans cette insurrection de tout son être. Mauriac, Journal 2, 1937, p.146.
Non pas que. Il s'arrêta; non pas qu'il fût à bout d'arguments, car il les choisissait au hasard dans un arsenal inépuisable, mais comme s'il eût été calmé subitement par un retour instantané sur lui-même (Fromentin, Dominique, 1863, p.230).Non pas que votre demande me choque en rien. Mais vraiment. Nous n'avons encore jamais songé, ma femme ni moi, au mariage de Juliette (Miomandre, Écrit sur eau, 1908, p.278).
Non pas que + ne. Non pas que par lui-même il ne fût beau, mais c'est nous autres qui n'étions pas dans toutes les conditions voulues pour en goûter la beauté (Flaub., Corresp., 1845, p.179).
Non parce que... mais parce que.
16. Mais il ne pouvait le lui dire; non parce qu'Anne était jalouse ou foncièrement vertueuse et intraitable sur ce sujet, mais parce qu'elle avait dû accepter de vivre avec lui... Sagan, Bonjour tristesse, 1954, p.164.
[Dans des tours marquant la gradation]
Non seulement... mais (mais encore, mais aussi, mais même). [Marque une gradation positive] V. mais, seulement.
Non content de... Non contents d'être en paix avec eux, nous avions été sur le point de faire la guerre pour eux (Maurras, Kiel et Tanger, 1914, p.118).
2. Non plus. [Marque la cessation d'une modalité du procès p. oppos. à une modalité actuelle]
[porte sur un 1erterme opposé à un second, coordonné par mais] Tout à coup, dans un éclair de génie, j'eus l'idée de représenter les bras et les jambes, non plus par un seul trait, mais au moyen de deux lignes parallèles (A. France, Pt Pierre, 1918, p.36).
[porte sur un 2eterme, coordonné par et, mais] En un mot, il me faut m'embarquer dans de longs travaux, dans des travaux où ce soit le fond et non plus le scintillement de ma pensée (...) qui intervienne (Du Bos, Journal, 1925, p.239).
[porte sur un compl., opposé directement au verbe] De sorte que je m'entendis rire, et aussi Despérados, mais non plus de notre affreux rire du matin (Vercors, Silence mer, 1942, p.20).
B. − [Dans le cadre de tours compar.]
1. Non plus. [Par servitude gramm., dans une prop. négative, comme équivalent de aussi en phrase positive] Vous qui languissez dans les fers où ils vous ont plongés, vous ne viendrez point avec nous: vous ne viendrez pas non plus, citoyens infortunés et vertueux, qui dans tant de provinces avez succombé sous les coups du fanatisme (Robesp., Discours, Guerre, t.8, 1792, p.107).Je n'y étais pas, toi non plus... (Ramuz, Gde peur mont., 1926, p.36).On ne trouvait pas beaucoup de vieux dans cette foule. Peu de couples non plus (Céline, Voyage, 1932, p.244).
Rare. [Après une première prop. ne comportant pas de négation, mais sémantiquement équivalente de la prop. négative qui comporte non plus] Avec la traite on multipliera tant qu'on voudra les cultivateurs. Les blancs ne manqueront pas non plus, si l'on a l'art de leur plaire (Baudry des Loz., Voy. Louisiane, 1802, p.148).Ses lèvres sérieuses et d'un dessin serré, l'ovale parfait de sa figure différaient essentiellement du nez africain (...). La coloration, non plus, n'était pas la même (Gautier, Rom. momie, 1858, p.243).
[Sans négation dans la phrase qui comporte non plus, mais dans la dépendance d'un verbe à contenu négatif] «Je ne puis [disait le Lord Chancelier], dans ces conditions, me trouver autorisé à lui confier des enfants». Cependant le Lord Chancelier se garda bien de les confier non plus aux détestables Westbrook (Maurois, Ariel, 1923, p.234 cité ds Grev. 1980, § 274).
Non plus que (vieilli, usuel pas plus que). [Équivalent en phrase négative, de aussi peu que] La vieille, sourde elle-même, ne lui adressait jamais la parole, non plus qu'à quiconque (Gide, Symph. pastor., 1919, p.879).Non plus que Viollet-Le-Duc ne répare les crimes commis par les révolutions en remettant des têtes aux statues de nos saints, l'artiste ne galvanise des idéologies périmées (Blanche, Modèles, 1928, p.63).
2. Non moins que. [Équivalent de aussi] Non moins caractéristiques sont les applications auxquelles se sont prêtés les longs tuyaux de graminées arborescentes (Vidal de La Bl., Princ. géogr. hum., 1921, p.124).
[Équivalent de autant (que)] Il en est ainsi en raison de l'infrastructure des transports, et, non moins, par l'effet de l'imperfection des marchés (Perroux, Écon. XXes., 1964, p.218):
17. Cependant le soleil en déclinant peu à peu inonda directement la salle de ses rayons presque horizontaux, couronna les cheveux blonds de Heide d'un nimbe doré, et lui prêta l'espace d'une seconde la toute-puissante importance que communique le contre-jour aux personnages d'une scène animée non moins qu'à ceux des gravures de Rembrandt... Gracq, Argol, 1938, p.61.
3. Vx ou région. [Après que compar.] Françoise me dit: «Il aurait mieux valu me la laisser ôter plutôt que non pas la gâter ainsi» (Proust, Sodome, 1922, p.729).MmeDomaize, qui disait: «Mieux vaut être ladre que non pas pauvre» (Pourrat, Gaspard, 1925, p.183).Que je te trouve un jour seule au bois, ma bichette, et tu seras peut-être moins faraude que non pas sur la grand'route! (Martin du G., Vieille Fr., 1933, p.1056).
C. − [Non + morphème de quantité ou de négation]
1. Non sans, non pas sans
Non sans
Non sans + subst. (= avec).Je songeais, non sans ironie, à mes terreurs (Maupass., Contes et nouv., t.2, Horla, 1886, p.1105).Un jeune homme (...) aussi pâle qu'il est possible de l'être pour un être encore vivant, (...) portait deux minables petites valises, non sans mal, parce que l'une avait la poignée arrachée d'un côté (Triolet, Prem. accroc, 1945, p.237).
Non sans + inf. (= en + gérondif).Elle commença son ascension, non sans faire une pause à chaque étage (Sue, Atar-Gull, 1831, p.34).
Non sans que + subj.:
18. Mais ils se faufilèrent, disparurent avec une brusquerie pas humaine, noirs, silencieux et agiles comme des singes des bois. Non sans qu'il leur eût glissé un douro, −le douro qu'il avait toujours sur la conscience de n'avoir pas donné à Jésus. Montherl., Bestiaires, 1926, p.457.
Non pas sans. [Thétis] se tenant aux cornes du taureau divin, naviguait au sein des ondes écumantes, non pas sans crainte, quoique sous les auspices de l'amour, qui lui servait de pilote (Dupuis, Orig. cultes, 1796, p.154).La bicoque de torchis, qu'elle retrouve pourtant chaque soir avec une résignation semblable à celle d'une bête harassée, non pas sans un secret plaisir (Bernanos, Mouchette, 1937, p.1338).
2. [Dans des tours où non signifie que la quantité est trop faible pour provoquer une conséquence]
Non (pas) assez... pour.Devenues folles d'indignation, mais, non assez, pour ne pas se rappeler la cause qui engendra cette maladie dans leur cerveau... (Lautréam., Chants Maldoror, 1869, p.245).C'est-à-dire des cheveux un peu longs, quoique non pas assez pour être ceux d'un mauvais peintre (Montherl., Lépreuses, 1939, p.1452).
Non pas tant... que + subj.Foulques, qui ne s'attendait pas à cela, demeura stupide; mais non pas tant qu'il n'accueillît galamment la proposition de sa femme (Boylesve, Leçon d'amour, 1902, p.246).
D. − [Non + adj. en fonction d'épithète]
1. [Non + adj. participial ou verbal]Un résultat non négligeable, une colère non feinte, un pari non encore gagné.
2. [Non + adj. qualificatif]Un produit non dangereux, un relevé non exhaustif, une plante non fibreuse. [Ils] ont rendu sur ce point un hommage non suspect à la conduite des papes (Lamennais, Religion, 1826, p.41).[La femme telle que l'aime Gautier] est chaste, non excitante, pour ainsi dire insexuelle (Goncourt, Journal, 1864, p.56).Je veux dire qu'à Boulanger, non vainqueur en dépit de ses excellentes performances, succédera Boulanger II (Barrès, Jard. Bérén., 1891, p.13).[Certains] prétendent alors interdire aux consciences l'emploi de tout moyen non mauvais en lui-même auquel les hommes ont fait un contexte impur (Maritain, Human. intégr., 1936, p.265).À propos, parle-moi donc moins brièvement de cette demoiselle bobineuse (...) qui me semble tenir dans tes pensées une place non petite (Duhamel, Maîtres, 1937, p.29).
Rem. 1. Non + adj. en fonction d'attribut est tout à fait rare. Cf. cependant: Ainsi, si la matière avait pu être non résistante, nous n'aurions certainement jamais rien connu que nous (Destutt de Tr., Idéol. 1, 1801, p.148). 2. Pour l'emploi pop. ou fam. de pas dans ce type de constr.: une nouvelle pas triste, une poire pas mûre, des dépenses pas contrôlables, etc., v. pas.
E. − Non loin de, loc. adv. ou prép. À proximité de (peut-être préféré à près de parce que ce dernier marque la contiguïté autant que la proximité). Non loin de lui, sur une pierre, et ombragée par des palmiers de Judée, une femme était assise. C'était Ann! (Baudel., Paradis artif., 1860, p.433).Ainsi que le minerai, la houille fut récoltée, sans peine et non loin, à la surface du sol (Verne, Île myst., 1874, p.140).Les voilà qui viennent chez nous, s'écria Marthe. Les cinq hommes se trouvaient maintenant non loin de Théotime (Bosco, Mas Théot., 1945, p.194).
F. − Rare. [Associé à un adv. de temps (au lieu de pas) ou accompagnant un compl. circ. ou un adv. de manière]
1. [Associé à un adv. de temps] Un mot, si peu qu'il signifie, n'en a pas moins son quant-à-soi; c'est quelquefois même une pensée, non pas toujours, entendons-nous, nos écrivains se fâcheraient (Musset, Lettres Dupuis Cotonet, 1836, p.597).Tu crois souvent être seul à penser comme tu penses; il y en a d'autres, je te l'affirme, qui se posent des questions (non souvent je le veux bien...) (Gide, Corresp.[avec Valéry], 1899, p.358).Un coup que tes enfants seront à l'assistance... Non encore? C'est pourtant ce qui les attend (Genevoix, Raboliot, 1925, p.235).
2. [Devant un compl. circ. ou un adv. de manière] Mais il y a entre les tempéraments de nos deux âmes des différences et même des contrariétés qui produisent ce dont vous vous plaignez, non à tort (Tocqueville, Corresp.[avec Gobineau], 1858, p.296).Car il est vrai que notre existence est liée aux phénomènes célestes, toutefois non pas également à tous et non pas comme ils croient (Alain, Propos, 1922, p.409).
Prononc. et Orth.: [nɔ ̃]. Homon. nom. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. Négation forte, employée comme négation totale de ce qui n'est pas pleinement le prédicat de la phrase. I. A. Négation de ce qui, dans la phrase, n'est pas le verbe à un mode personnel 1. négation d'un terme dans un groupe antithétique de deux termes 2emoitié xes. (St Léger, éd. J. Linskill, 97: Enviz lo fist, non voluntiers; 102: Cil Ewruins molt li vol miel [a Sanct Lethgier], Toth per enveia, non per el); 1174-76 (Guernes de Pont-Ste-Maxence, St Thomas, éd. E. Walberg, 2918: Fil d'iglise te dei, nun evesque, apeler); 1174-87 (Chrétien de Troyes, Perceval, éd. F. Lecoy, 7317: Bien en i a jusqu'a .V.C., les uns barbez, les autres non); 1228 (Jean Renart, Guillaume de Dole, éd. F. Lecoy, 1415: Voire, fet il, ce n'est pas doute Non d'une chose, mes de toute); a) non mie 1176-81 (Chrétien de Troyes, Chevalier au lion, éd. M. Roques, 6118); ca 1228 (Gerbert de Montreuil, Violette, éd. D. Labaree Buffum, 455); b) 1188 non pas (Aimon de Varennes, Florimont, éd. A. Hilka, 6186); ca 1270 (Richard le Beau, éd. W. Foerster, 4466), v. aussi plus, moins; 2. équivalent d'un préf. négatif devant des termes autres que le verbe à un mode pers. (subst., inf., part., adj.), entre autres: nunpöant (1121-34 Philippe de Thaon, Bestiaire, 2613 ds T.-L.), nonsavant (ca 1130 Gormont et Isembart, éd. A. Bayot, 33), nonsavoir, subst. (ca 1140 Gaimar, Estoire des Engleis, éd. A. Bell, 2486), nonnuisant (1remoitié xiies. Psautier d'Oxford, 72, 13 ds T.-L.), nonsage (id. Psautier de Cambridge, 93, 8, ibid.),v. aussi nonchaloir, non voyant, etc. B. Constitue, avec ellipse du verbe, le 2eterme d'une alternative a) ca 1050 (St Alexis, éd. Chr. Storey, 579: Voillent o nun, sil laissent [Alexis] metra an terre), cf. ca 1100 (Roland, éd. J. Bédier, 1419); id. (id., 423: Par lui orrez si avrez pais u nun); ca 1160 (Eneas, éd. J.-J. Salverda de Grave, 589: Les homes neier en vëimes..., si ne savon S'il sont encor neié o non); b) ca 1100 (Roland, 1279: ... l'abat mort, qui qu'en peist u qui nun); id. (ibid., 2567: Mais ço ne set liquels veint ne quels nun). C. 1. Dans une exceptive elliptique négative introduite par se (l'élément exclu se trouvant entre se et non) ca 1100 (Roland, 221: ... Ja mar crerez bricun, Ne mei en altre, se de vostre prod nun!; 3681: Mais n'ad talent que li facet se bien nun), cf. Keller, p.343b; 2. dans une hypothétique elliptique négative ca 1170 (Rois, éd. E. R. Curtius, IV, II, 10, 175: Fort chose as requise, mais nepurquant, si tu veiz quant jo ierc raviz, issi iert cume tu requiers; si nun, n'iert pas issi), v. sinon. D. Réponse directe répliquant par la négative à une question posée −ou réfutant l'assertion d'un interlocuteur 1. non employé comme compl. d'obj. après un verbe déclaratif ca 1130 ne dire ne o ne nun (Gormont et Isembart, 266); 2. non accompagné d'un pron. suj. de forme non prédicative (suggérant que le verbe est s.-ent.) ca 1170 (Béroul, Tristan, éd. A. Ewert, 505: «Sire, s'or ne nos veïsiez, Certes ne nos en creïssiez» −«Par Deu, je non»); 1174-87 (Chrétien de Troyes, Perceval, 261: Vaslez, fet il, don nel sez tu? −Je non; 4799: Es tu a lui? −Sire, ge non); 1176-81 (Id., Chevalier au lion, 4915: Car me dites voire novele [...] −«Je non» fet il «se Dex me voie!»), cf. la négation ne employée en pareil cas avec le pron. suj. prédicatif (ne* II), v. G. Moignet, Gramm. de l'a. fr., p.274; 3. non faisant phrase à lui tout seul (emploi relativement rare par rapport à l'emploi II) a) en réponse à une question oratoire 1176 (Chrétien de Troyes, Cligès, éd. A. Micha, 897: Si fera ele maugré mien, Ja ne l'an voel je tolir rien. Tolir? Non voir! ce ne vuel mon); b) ca 1200 (Jean Bodel, St Nicolas, éd. A. Henry, 895: Rasoir, chi n'atendés vous point? −Non, car tu l'as passé d'un point); début xiiies. (Raoul de Houdenc, Vengeance Raguidel, 4725 ds T.-L.: «Vos ne ferés pais autrement? Ferés?» −«Nan voir»); id. (Bueve de Hanstone, I, 8754, ibid.: «Estes de Franche?» −«Dame», dist Bueves, «non, Mais d'Engletere»). E. Non en reprise de phrase négative (négation oratoire) ca 1200 (Jean Bodel, St Nicolas, 526: Riens qui en se garde soit mise N'iert ja perdue ne maumise, Tant ne sera abandonnee, Non, se chis palais ert plain d'or Et il geüst seur le tresor); début xiiies. (Raoul de Houdenc, Vengeance Raguidel, 4864 ds T.-L.: Nus nel quidast a la cort, non, Qu'il le dëust nul jor avoir). F. Non interr. au sens de «est-ce bien vrai?» ca 1285 (Adam de la Halle, Robin et Marion, éd. E. Langlois, 85: «... je n'amerai autrui que Robert» −«Non, bergiere?» −«Non, par ma foi!»). II. [Négation totale portant sur le verbe: dep. 842, v. ne] Non, négation d'un verbe qui, dans une courte phrase, confirme ou nie une assertion ou une interr. précédente. Si le premier verbe est être ou avoir −plus rarement un autre verbe auxil. (pouvoir, vouloir...) −non précède une forme appropriée de ces verbes; si le premier verbe est autre que être ou avoir, non précède une forme appropriée du verbe faire; de ce dernier emploi, le syntagme non fait «non, non certes» [cf. l'anton. si fait]: xviies. (Épigramme ds M.Régnier, OEuvres, éd. P. Jannet, 1867, p.231: Robin, ta chandelle se fond −Non fait, dict il; cf. éd. P. Poitevin, 1860, p.335), relevé dans divers dial. (FEW t.7, p.183ab). A. Après une assertive 1. affirmative ca 1100 (Roland, 255: Respunt Rollant: «Jo i puis aler mult ben!» −«Nu ferez certes», dist li quens Oliver; 330: «Jo i puis aler, mais n'i avrai guarant. Nu l'out Basilies ne sis freres Basant»); 1160-74 (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, II, 673: «Gentiz ber», dist li roiz, «se Dex me beneïe, Tout sui prest, s'il vous plest, d'aler en vostre aïe...» −«Non ferez»); 1174-77 (Renart, éd. M. Roques, IIIa, 4367: Dist Chantecler: Renart cousin, Vos me volez traire a enging. −Certes, ce dist Renart, non voil); 1174-87 (Chrétien de Troyes, Perceval, 399: «Tu as veü, si com je croi, Les enges don la gent se plaignent, Qui ocient quan qu'il ataignent. −Voir non ai, mere, non ai, non!»); fin xiie-début xiiies. (Id., Cligès, éd. A. Micha, p.215, leçon ms. a, apr. 6462, 4-6: Ce set an bien certainement Que je sui suans et la tor soe. −Non est, Johans, ançois est toue); 2. négative ca 1223 (Gautier de Coinci, Miracles, éd. V. F. Koenig. 2 Mir. 28, 103: La ne dut pas de joie faillir, Et sachiez bien que non fist elle); 1240-80 (Baudouin de Condé, Dits et Contes, 102, 128 ds T.-L.: Voire, ja n'ai en blont n'en brun Fïance, ki fait chiere enfrume; Non ai je n'en blonde n'en brune); 1268-79 (Jean de Meun, Rose, éd. F. Lecoy, 9515: ... et s'i fet aucune foiz pendre Que sa mere nou peut defendre. Non peut ses peres Queurs Failliz). B. Après une phrase impér. 1. positive ca 1150 (Charroi de Nîmes, éd. D. McMillan, 60: Puis li a dit «Guillelmes, quar seez! −Non ferai, sire,» dit Guillelmes le ber); 2. négative 1174-87 (Chrétien de Troyes, Perceval, 170: Et dit: «Vallez, n'aies peor! −Non ai ge, par le Salveor»). C. Après une phrase optative a) négative ca 1160 (Eneas, 8489: Ja Dé ne place Qu'il m'amor ait! Non avra il); b) affirmative ca 1228 (Gerbert de Montreuil, Violette, 3146 ds T.-L.: «Que la male mors vous en vigne, Que taindre vous en puist le fache!» −«A foi, damoisiele, non fache»). D. Après une interrogative (interrogation directe) ca 1160 (Eneas, 1750: Sire, par coi m'avez traïe? −Ge non ai, voir, la moie amie). III. Non pas... que + subj., loc. conj.; sert à écarter une cause qu'on pourrait supposer: xives. (Dit de Robert le Diable, 57 ds T.-L.). IV. Emploi subst. xiiies. (Clef des Assises de Jérusalem, art. lxxxiii ds Assises de Jérusalem, éd. Beugnot, t.1, p.586: Par l'assise ou usage dou royaume de Jerusalem..., nul ne peut faire preuve de non); fin xives. dire dou non «refuser» (Froissart, Espinette amoureuse, éd. A. Fourrier, 855); 1690 pour un ouy, ou pour un non (Fur.). Du lat. non, adv. de négation se plaçant av. le verbe en prop. négative (id fieri non potest), pouvant également porter sur un mot particulier (id non fieri potest); non peut également exprimer une réponse négative [celle-ci consistant régulièrement à reprendre le terme sur lequel portait la question], cf. Térence, Phormio, 525: Iam ea [dies] praeteriit? −Non; Cicéron, Pro Murena, 73: Senatus num obviam prodire crimen putat? Non; sed mercede... Num sectari multos? Non; sed conductos, v. Lat. Gramm. t.2. Lat. Syntax und Stilistik, § 241, C γ, p.452. Fréq. abs. littér.: 75941. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 82220, b) 93484; xxes.: a) 105984, b) 138993. Bbg. Attal (P.). Négation de phrase et négation de constituant. Lang. fr. 1971, no12, pp.98-111. _Borillo (A.). La Négation et l'orientation de la demande de confirmation. Lang. fr. 1979, no44, pp.27-41. _Cohen (M.). Emplois nouv. de oui et non. B. Soc. Ling. 1952, t.48, pp.40-51. _Gaatone (D.). Ét. descr. du syst. de la négation en fr. contemp. Genève, 1971, 238 p. _Hoeybye (P.). Oui, si et non. Fr. mod. 1939, t.7, pp.47-51. _Kalik (A.). La Caractérisation négative. Fr. mod. 1971, t.39, pp.128-146. _Marouzeau (J.). Dire non. In: [Mél. Bally (Ch.)]. Genève, 1939, pp.415-422. _Martin (R.). Le Mot rien et ses concurrents en fr. Paris, 1966, p.30, 56, 68, 200, 217. _Moignet (G.) L'Opposition non/ne en anc. fr. Trav. Ling. Litt. Strasbourg. 1965, t.3, no1, pp.41-65. _Plantin (Ch.). Oui et non sont-ils des «pro-phrases»? Fr. mod. 1982, t.50, pp.252-264. _Pohl (J.). Matér. pour l'hist. du syst. oui-non-si en fr. mod. Zootecnica e vita. 1975, t.18, no1/2, pp.85-101. _Van Deyck (R.). La Synt. de la négation en fr. mod. Trav. Ling. Gand. 1977, no5, pp.35-60. _Wilmet (M.). Oui, si et non en fr. mod. Fr. mod. 1976, t.44, pp.229-252.

Wiktionnaire

Adverbe - ancien français

non \nõn\

  1. Non.
  2. Pas ; non-.
    • Lur bestials cors nun estables — (Marie de France, Livre de l’espurgatoire, ms. 25407 de la BnF, f. 103v. b.)
  3. Ne ... pas.
    • Li baron dient non feront — (Le Roman de Thèbes, édition de Constans, page 368, tome I)
      Les barons disent qu’il ne le feront pas

Nom commun - ancien français

non \nõn\ masculin

  1. Nom.
    • Wace ai non qui fai cest escrit — (Wace, Trespassement de Nostre Dame, édition de Keller du ms. de Turin)

Interjection - français

non \nɔ̃\ invariable

  1. Utilisé seul, souvent de manière exclamative et en réponse à une question ou une situation, marque un refus, une opposition.
    • Je n’ai pas souvenir d’avoir dit non toutes ces dernières années, assurément pas depuis au moins dix ou vingt ans, à dire vrai peut-être même pas depuis trente ans. Depuis ce soir au Mans où, face à mon père, Gabriel Blizan, lequel s’était mis devant la porte pour m’empêcher physiquement de sortir de la maison, j’avais dit « Non! » une fois, deux fois, jusqu’à subitement le soulever du sol comme un pantin afin de libérer le passage. — (Philippe Delaroche, Caïn et Abel avaient un frère, Éditions de l’Olivier / Le Seuil, 2000, page 112)

Adverbe - français

non \nɔ̃\ invariable

  1. Réponse négative. Il marque le désaccord sur une question affirmative et l’accord sur une question négative.
    • Tu es français, du coup ? — Non, je suis québécois.
    • Vous ne voyagez pas souvent ? — Non, par manque de temps.
    • En passant, Baudrillard associe les décadents ayant voté Non à la Constitution européenne aux banlieusards qui niquent leur mère. — (Michel Onfray, La lueur des orages désirés, chapitre 7 : Racaille, Kärcher et philosophie, éditions Grasset, 2007)
  2. (Afrique) Au contraire. — Note : Dans ce sens il est utilisé pour infirmer une prédication négative ou interronégative.
  3. Qui n’est pas. Manque de la qualité signifiée par l’adjectif suivant.
    • Une organisation non gouvernementale.
  4. (Archaïsme) Adverbe de phrase employé plutôt que ne ou ne … pas, ceux-ci étant plus propres à nier seulement le verbe ou le groupe verbal.
    • Ils osent soutenir avec une étrange impiété que Jésus-Christ n’a non plus prié pour le salut des pécheurs qui se perdent par leur impénitence, que pour le salut des démons. — (Père François Annat [1590-1670], Le Rabat-joie des jansénistes, page 10)
    • Il était son rival et non pas son ami.
  5. Au début d’une phrase négative, il en accentue le caractère. — Note : On le redouble même quelquefois pour s’exprimer plus énergiquement.
    • Il suffit d'un petit geste. Et comme je ne suis pas un mec bien qu’à moitié, je ne me contente pas de la poubelle jaune, non, je jette aussi la bouteille du jus d'orange dans un conteneur pour le verre. — (Iegor Gran, « Faites le bien », dans Vilaines pensées, Les Échappés/Charlie Hebdo, 2014)
    • Non, je n’en ferai rien.
    • Non, non, cent fois non.
  6. (Vieilli) Sert, soit seul, soit avec pas, à opposer une négation à une affirmation.
    • Les fibres sont ajoutées dans la matrice, non pour améliorer la résistance à la traction par flexion du béton, mais surtout dans le but de contrôler la fissuration, […]. — (Youcef Fritih, Apport d’un renfort de fibres sur le comportement d’éléments en béton autoplaçant armé, Université de Toulouse, thèse soutenue le 8 juillet 2009)
    • Que vous m’approuviez ou non, je continuerai d’agir de même.
  7. Il sert encore à infirmer, à nier fortement ce qui est exprimé par un des termes de la proposition.
    • Il est vraiment fâché, non sans raison.
    • Mais ce planteur de Guadeloupe était un fervent esclavagiste et a une plaque au Panthéon. Non pour son activité de planteur, mais pour avoir rétabli l’ordre en Martinique chez les colons récalcitrants face à la Révolution. — (Catherine Calvet , Marcel Dorigny : «A Paris, il faudrait redonner du sens plutôt qu’effacer les noms», Libération, 22 aout 2017)
  8. (Populaire) (À la fin d’une phrase affirmative) N’est-ce pas ?
    • La dépigeonnisation, c’est moins sévère que la dératisation. Ce qui est gênant avec les pigeons, c’est tout ce guano frais qu'ils posent sur les bancs. Toi, l’Oncle, t’es pour : la dératisation, la dépigeonnisation, la désinsectisation, la dépiafisation… Non ? — (Pierre Lagorce, Élie, mon nom secret : et autres pièces, éditions L’Harmattan, 2015, page 13)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

NON. Particule négative
, qui est opposée à la particule affirmative Oui. Il ne dit jamais non. Cette affaire est aisée à conclure, il n'y a qu'à dire oui ou non. Je gage que non. Il ne répond ni oui ni non. Avez-vous fait telle chose? Non. Le voulez-vous? Non. Répondez catégoriquement par oui ou par non. Substantivement, Ils sont gens à se brouiller pour un oui ou pour un non. Il m'a répondu un non bien sec. Il lui répondit par un non significatif. Le oui et le non. Il est souvent accompagné de Certes, de Vraiment, qui en renforcent le sens. Non certes, non vraiment, je ne le ferai pas. Il peut être aussi renforcé par le mot Pas. Prendrai-je cela? Non pas, s'il vous plaît. Il se met encore au commencement d'une phrase négative pour en annoncer le caractère et pour fortifier l'expression de la pensée. Non, je n'en ferai rien. On le redouble même quelquefois pour s'exprimer plus énergiquement. Non, non, je n'y consentirai jamais. Non, non, cent fois non.

NON sert, soit seul, soit avec Pas, à opposer une négation à une affirmation. Je désire du vin et non de la bière. Que vous m'approuviez ou non, je continuerai d'agir de même. Il était son rival et non pas son ami. Il sert encore à infirmer, à nier fortement ce qui est exprimé par un des termes de la proposition. Il en est fâché, non sans cause. Il en est en peine, non sans raison. Il vous a fait plaisir, non pas tant pour l'amour de vous que par vanité. Non toutefois que je prétende à lui plaire. Non qu'il ne soit fâcheux de le mécontenter. Non loin de la ville se trouve le château qu'il habile. Il sert également à infirmer, à nier l'idée exprimée par un mot. Tous les gens non intéressés, non préoccupés, non solvables, non recevables.

NON PLUS, loc. adv. Pas plus. Il n'en fut non plus ému que s'il eût été innocent. On n'en parle non plus que s'il n'eût jamais existé. Je n'en sais rien, non plus que vous. Il signifie aussi, dans certains cas, Pareillement; mais il n'a cette acception que dans une phrase négative. Vous ne le voulez pas, ni moi non plus. Ceux-ci n'en sont pas, ni ceux-là non plus.

NON SEULEMENT, locution adverbiale, qui est ordinairement suivie de la conjonction adversative Mais. Non seulement il n'est pas savant, mais il est très ignorant. Non seulement je l'ai payé, mais encore je lui ai fait un cadeau. Un chrétien doit aimer non seulement ses amis, mais même ses ennemis.

NON se soude également avec quelques mots, que l'on trouvera ci-dessous à leur ordre alphabétique.

Littré (1872-1877)

NON (non ; l'n ne se lie jamais : non ici, mais là)
  • 1Particule négative opposée à oui, particule affirmative. L'avez-vous fait ? - Non. Répondez par oui ou par non. Si vous répondez que non, Pascal, Prov. XI. Les langues sont des chiffres où non les lettres sont changées en lettres, mais les mots en mots ; de sorte qu'une langue inconnue est indéchiffrable, Pascal, Pens. VII, 23, éd. HAVET. Hippocrate dit out, mais Galien dit non, Regnard, Folies amour. III, 7. Pour moi, j'aime les gens dont l'âme se peut lire, Qui disent bonnement oui pour oui, non pour non, Gresset, le Méch. I, 5. Non, en métaphysique, ne me paraît guère plus sage que oui ; non liquet [la chose n'est pas claire] est la réponse raisonnable à presque tout, D'Alembert, Lett. à Voltaire, 4 août 1770.

    Familièrement. Je ne dis pas non, je ne refuse pas.

    Dans quelques cas, la phrase interrogative est telle, qu'il y peut être répondu par non ou par oui, sans que le sens soit changé. Dorante : Vous n'avez seulement qu'à dire une parole. - Philiste : Qu'une ? - Dorante : Non ; cette nuit j'ai promis de la voir, Corneille, Suite du Ment. III, 4.

  • 2Non s'emploie pour nier une proposition entière qui est sous-entendue. Je mourrai par vos feux, éteignez-les ou non, Malherbe, v, 30. Je parle de Néarque et non de votre époux, Corneille, Poly. III, 3. Et que m'importe à moi si Rome souffre ou non ? Corneille, Sert. IV, 11. Valère a votre foi, la tiendrez-vous ou non ? Molière, Tart. I, 6. On délibérait en plein sénat s'il fallait admettre un dieu dans le Capitole ou non, Bourdaloue, Dim. de la Quinquagésime, t. I, p. 450. Si de tous les hommes les uns mouraient, les autres non…, La Bruyère, XI. Que l'on approuve ou non ma fermeté sévère, Voltaire, M. de César, III, 2. On croirait, à voir les dernières entreprises d'Innocent IV, que c'était un guerrier ; non, il passait pour un profond théologien, Voltaire, Ann. Emp. Conrad IV, 1253, 1254.
  • 3Il peut remplacer un substantif, un adjectif. Malice, ou non, le mal est fait. Sage ou non. Enfin les uns sont contents, les autres non, c'est le monde ; il n'y a rien de nouveau à cela, Sévigné, 27 févr. 1679. On te propose pair ou non ; tu choisis pair et tu n'en vois pas le motif, Voltaire, Newt. I, 4.
  • 4Il se met dans le cours du discours pour nier quelque chose, très souvent avec une reprise par mais. Il a fait cela non par méchanceté, mais pour jouer. Certes, monsieur Tartuffe, à bien prendre la chose, N'est pas un homme, non, qui se mouche du pié, Molière, Tart, II, 3. Je regrette dans le sénat, dit le héros, non ce qu'il a été, mais ce qu'il pouvait être, Marmontel, Bélis. ch. 12.
  • 5Il se joint souvent avec pas, mais non avec point (du moins ce n'est pas l'usage ; car il n'y aurait pas de faute). Prendrai-je cela ? non pas, s'il vous plaît. Le mérite n'y a point de part, non pas même le mérite de la race, Guez de Balzac, 2e disc. De la cour. Et mon cœur, qui sans cesse en sa faveur se flatte, Cherche qui le soutienne et non pas qui l'abatte, Corneille, Héracl. V, 2. J'envisage non pas sa fortune, mais sa vertu ; les services qu'il a rendus, non pas les places qu'il a remplies ; les dons qu'il a reçus, non pas les honneurs qu'on lui a rendus sur la terre, Fléchier, le Tellier. Je crains votre silence et non pas vos injures, Racine, Andr. IV, 5. Je ne puis que me plaindre et non pas vous punir, Voltaire, Œdipe, IV, 3. Commandez que je meure, et non pas que je fuie, Voltaire, ib. III, 2.

    Après le que qui suit un comparatif, les anciens ajoutaient souvent non pas ; tournure qui tombe en désuétude. Mes jours Devaient plutôt finir que non pas son discours, Régnier, Sat. VIII. Quand il a fallu qu'il [Dieu] ait paru [dans l'incarnation], il s'est encore plus caché en se couvrant de l'humanité ; il était bien plus reconnaissable quand il était invisible, que non pas quand il s'est rendu visible, Pascal, Lett. à Mlle de Roannez, 2.

    Quand, dans une tournure semblable, la phrase finale a un verbe, la construction demanderait deux que qui seraient intolérables, par exemple : il vaut mieux que vous y alliez, que que j'y aille. Aujourd'hui on tourne autrement la phrase pour les éviter ; autrefois entre les deux que on intercalait non pas ; tournure fort recommandable et à reprendre. Ils [les apôtres] jugent plus sûr que Dieu approuve ceux qu'il remplit de son esprit, que non pas qu'il faille observer la loi, Pascal, Pens. XXIV, 14.

  • 6Il s'emploie devant sans, loin, etc. pour en changer le sens restrictif. Les puissantes faveurs dont Parnasse m'honore, Non loin de mon berceau commencèrent leur cours, Malherbe, Il, 12. Beau parc et beaux jardins qui dans votre clôture Avez toujours des fleurs et des ombrages verts, Non sans quelque démon qui défend aux hivers D'en effacer jamais l'agréable pointure, Malherbe, V, 14. Il vécut non sans gloire et meurt en homme libre, Saurin, Spartac. V, 13. Non sans rougeur, les deux sexes découvrent Que l'amitié qui les unit longtemps, S'est transformée en d'autres sentiments, Malfilâtre, Narcisse, I. Que vos heureux destins, les délices du ciel, Coulent toujours trempés d'ambroisie et de miel, Et non sans quelque amour paisible et mutuelle, Chénier, Élég. VII.
  • 7Il se met au commencement d'une phrase négative pour en annoncer le caractère. Non, je n'en ferai rien. Non, je ne puis, dit-il, égorger Marius, Delille, Imag. III.

    Il peut se redoubler. Non, non, je n'y consentirai jamais. Non, cent fois non. Non, non, je le connais, mon désespoir le flatte, Racine, Andr. III, 1.

  • 8Il se joint aux adverbes certes, certainement, vraiment, qui rendent la négation plus formelle. Non certes, non vraiment, je ne le ferai pas.
  • 9Il se joint à des adjectifs, à des substantifs, à des verbes. Non solvable. Non-activité. Fin de non-recevoir. (Pour le tiret, voy. la Rem. 2.)
  • 10Non-seulement, loc. adv. qui est ordinairement suivie de la conjonction adversative mais (on met un tiret à non-seulement, mais non à mais encore). L'Église traite non-seulement de criminels, mais d'hérétiques tous ceux qui emploient de l'argent pour obtenir les ministères ecclésiastiques, Pascal, Réfutation de la réponse à la 12e lettre. Toujours prêts à donner à leur troupeau non-seulement leurs veilles et leurs travaux, mais leur propre vie, Bossuet, Hist. II, 7. Ainsi l'art de se détruire est non-seulement tout autre de ce qu'il était avant l'invention de la poudre, mais de ce qu'il était il y a cent ans, Voltaire, Louis XIV, 18. Ayant déclaré non-seulement hérétique mais absurde le mouvement de la terre, Voltaire, ib. 31. On disait que cela me faisait du mal ; je crois, moi, que cela me fit du bien, et non-seulement à mon âme, mais à mon corps, Rousseau, Conf. VI.
  • 11Non plus que, loc. adv. Ne… pas plus que. Quel malheur, si l'amour de sa femme Ne peut non plus sur lui que le mien sur ton âme ! Corneille, Hor. II, 5. Ah ! si non plus que vous je n'ai point le cœur bas, Corneille, Attila, III, 4. Cette impiété de Luther… que nous ne coopérons en aucune sorte à notre salut, non plus que des choses inanimées, Pascal, Prov. XVIII. On ne serait non plus en peine de son salut [d'un homme mort subitement] que de celui de M. de Turenne, Sévigné, 220. Je suis assurée qu'elle [Mme de Guitaut qui venait d'accoucher] a reçu des visites… et ne s'est non plus ménagée sur le bruit que si elle était reine ou dauphine, Sévigné, 26 mai 1681. On ne doute non plus de sa volonté que de son être, Bossuet, Libre arb. 1. Il y sera décidé qu'on ne tient non plus devant les Français en Allemagne qu'en Flandre, Bossuet, Louis de Bourbon. Il [Maximien] ne voulait non plus pour compagnons de l'empire ses enfants que les étrangers, Bossuet, Hist. I, 10. Un être éternel incréé aussi bien qu'incorruptible, et qui n'avait non plus de commencement que de fin, Bossuet, ib. II, 6. L'humilité non plus que la foi n'est ni timide, ni raisonneuse, Fléchier, Panég. I, 301. Chassez un chien du fauteuil du roi, il grimpe à la chaire du prédicateur, il regarde le monde indifféremment, sans embarras, sans pudeur ; il n'a pas, non plus que le sot, de quoi rougir, La Bruyère, II. Ils [les criminels du Tartare] ont horreur d'eux-mêmes, et ils ne peuvent non plus se délivrer de cette horreur que de leur propre nature, Fénelon, Tél. XVIII.

    Non plus signifie quelquefois pareillement, mais seulement dans une phrase négative. Vous ne le voulez pas, ni moi non plus. Le secret n'en est su ni de lui, ni de lui [en montrant les deux princes] ; Tu n'en sauras non plus les véritables causes, Corneille, Héracl. IV, 5. Comme les successions sont réciproques, la perte du droit de succession est double [pour les mainmortables], parce que ceux à qui on ne peut succéder ne peuvent succéder non plus, Voltaire, Polit. et lég. Cout. de Franche-Comté.

  • 12Non que, avec le subjonctif, ce n'est pas que. Non qu'il ne soit fâcheux de le mécontenter. Considérez le prix que vous avez coûté, Non pas qu'elle vous croie avoir trop acheté, Corneille, Cinna, II, 1. Non que votre colère ou la mort m'intimide, Corneille, ib. V, 1. Non que je veuille à Rome imputer quelque crime, Corneille, Nicom. V, 10. Il me semble qu'en les joignant ensemble [la lecture d'Épictète et de Montaigne], elles ne pourraient réussir fort mal, parce que l'une s'oppose au mal de l'autre ; non qu'elles puissent donner la vertu, mais seulement troubler dans les vices, Pascal, Entret. avec Saci.
  • 13 S. m. Un non. Des non. Que le non prononcé soit un mur d'airain, contre lequel l'enfant n'aura pas épuisé cinq ou six fois ses forces, qu'il ne tentera plus de le renverser, Rousseau, Ém. II. Ma fierté naturelle est assez satisfaite de quelques non bien fermes que j'ai prononcés dans ma vie, Ducis, Correspondance, 7 novembre 1806.

    Pour un oui ou pour un non, pour peu de chose. Il se fâche pour un oui ou pour un non.

REMARQUE

1. Dans cet exemple : Non-seulement tous ses honneurs et toutes ses richesses, mais encore toute sa vertu s'évanouit, on met s'évanouit au singulier, à cause de mais qui interrompt la phrase. C'est là l'usage le plus ordinaire. Cependant, si quelque chose l'exigeait, rien n'empêcherait de mettre s'évanouirent.

2. Le tiret se met après non quand il s'agit d'un substantif composé : non-sens, non-usage, etc. ; il ne se met pas, en tout autre cas : les artisans non maîtres pouvaient travailler…

HISTORIQUE

Xe s. Ne ule cose non la pouret [avait pu] omque pleier [ployer], Eulalie.

XIe s. Nun ferez certes, dist li quens [le comte] Oliviers, Ch. de Rol. XVIII. Par lui orrez [entendrez] si aurez pais ou non, ib. XXX. Mais ce [il] ne sait li quels vaint [triomphe] ne quels nun, ib. CLXXXII.

XIIe s. Ne dist ne o ne non, Ronc. 11. Non mie à ceste fois, ib. 27. Au camp estez que non soiez vaincus, ib. 45. Je ne sui ne liés [joyeux] ne dolens, Ne ne sai se vif [vivant] ou non, Couci, X. Ou voil ou non, servir la [la servir] me convient, ib. XX.

XIIIe s. Chanter m'estuet [il me faut chanter], que m'en est pris corage, Non pas pour ce que d'amours me soit rien, Quesnes, Romanc. p. 85. Raison : Congnois le tu point ? - l'Amant : Oïl, dame. - Raison : Non fais. - l'Amant : Si fais…, la Rose, 4267.

XVe s. Je crois que non, car ainsi le me semble, Orléans, p. 6. Adonc il se mist à escouter s'il orroit par leans personne parler ; ce que non ; pourquoy il se print à heurter, et lors il ouyt une voix qui dist : qui es tu qui heurtes à celle heure ? Perceforest, t. v, f° 76.

XVIe s. J'ay plus estudié à rendre ce que l'autheur a voulu dire, que non pas à orner ou polir le langage, Amyot, Épit. Jusques icy les historiens sont bien d'accord ; mais au demeurant, non, Amyot, Thésée, 17. Quant à luy, il estimoit plus honorable commander à ceulx qui avoient de l'or, que non pas en avoir, Amyot, Caton, 4. Je commenceray à parler, quand je sçauray dire choses dignes de non estre teues, Amyot, C. d'Utiq. 8. Et ne se remuoit non plus qu'une souche, La Boétie, 53. Non pas un seul, dit on, du camp de Cire, ne se rendit du costé du roy, La Boétie, 139. Aux uns les dieux donnent le bonheur de la vie, aux autres non, La Boétie, 198. … Qui sont de naturel pour aymer le proufit, mais non que [seulement] bien à poinct, La Boétie, 212. Je ne feray bonne chiere de deuz, non pas [ni] de quatre jours, Rabelais, Pant. III, 25. Croyez la ou non, ce m'est tout ung, Rabelais, ib. III, 52. Non les palayz, maisons, eschaffaultz… seullement estoyent pleins de gens, mais aussi les toictz, Rabelais, la Sciomachie. Je voudroi bien que tous rois defendissent à leurs subjects, de non mettre en lumiere œuvre aucun, si premierement il n'avoit enduré la lime de quelque sçavant homme, Du Bellay, J. I, 35, verso. … Ville que jamais l'empereur n'a ausé regarder, non que [loin de] l'assaillir, Carloix, II, 6. L'estimation, non plus que l'affection, nous ne la debvons qu'à leur vertu, Montaigne, I, 13. Ne jamais dire une verité, non pas [même] quand elle est utile, Montaigne, I, 37. On ne me pouvoit arracher de l'oisiveté, non pas pour me faire jouer, Montaigne, I, 195. L'honneur de la vertu consiste à combattre non à battre, Montaigne, I, 244. Sert aussi beaucoup à la conservation de la veue le tenir des pieds secs, le non dormir sur le jour, le non encliner par trop la face en bas, De Serres, 891. Ce prince est tant obeissant aux volontés du roy d'Espagne, qu'il ne sçauroit dire de non à chose qu'il lui commande, Mém. de Bellièvre et de Sillery, p. 440, dans LACURNE.

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Étymologie de « non »

Bourguig. nain daime [non dame] ; picard, nein, naie, na ; provenç. non, no ; espagn. no ; portug. não ; ital. no, non ; du lat. non, anciennement nœnu, nœnum, que les étymologistes tirent de ni, non, et œnum, ancienne forme de unus, un.

Version électronique créée par François Gannaz - http://www.littre.org - licence Creative Commons Attribution

Du latin non. Il connaît une variation nun en ancien français et nan en français familier.
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Phonétique du mot « non »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
non nɔ̃

Fréquence d'apparition du mot « non » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Citations contenant le mot « non »

  • Créer, non posséder ; oeuvrer, non retenir ; accroître, non dominer.
    Lao-Tseu
  • Le grade confère autorité et non supériorité.
    Jean-Paul Sartre
  • Pour les aveugles, on dit non-voyant, pour les sourds, non-entendant, et pour les cons, non-comprenant.
    Guy Bedos — Inconsolable et gai
  • La femme est une promesse non tenue.
    Claude Mauriac — Ici, maintenant, Grasset
  • Un ami non éprouvé est comme une noix non cassée.
    Proverbe russe
  • On écrit pour raconter, non pour prouver.
    Quintilien en latin Marcus Fabius Quintilianus — Institution oratoire, I, 31
  • Non anxieux ici, non anxieux toute la vie.
    Koan zen
  • Pour Marine Amouroux, ingénieure de recherche au laboratoire du Centre de recherche en automatique de Nancy (CRAN) de l’université de Lorraine et au CNRS, la lumière du viseur, souvent blanche ou rouge (et non infrarouge), ne représente pas un danger pour cette glande. Il n’y a « aucune possibilité » pour que le laser « atteigne le centre du cerveau où se trouve la glande pinéale », résume-t-elle.
    Le Monde.fr — Non, les thermomètres infrarouges ne menacent pas votre glande pinéale
  • Peindre non la chose mais son effet.
    Stéphane Mallarmé — Art game book
  • Tout n’est qu’apparence, non ?
    Alberto Giacometti
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Images d'illustration du mot « non »

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Traductions du mot « non »

Langue Traduction
Anglais not
Espagnol no
Italien no
Allemand nein
Chinois 没有
Arabe لا
Portugais não
Russe нет
Japonais 番号
Basque no
Corse innò
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Synonymes de « non »

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Antonymes de « non »

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Nombre de points du mot non au scrabble : 3 points

Non

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