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Mâcher

Définitions de « mâcher »

Trésor de la Langue Française informatisé

MÂCHER1, verbe trans.

A. −
1. [L'obj. désigne une substance comestible] Réduire en parcelles très petites, écraser avec les dents. Il faisait manger le petit, essayait de manger lui-même, coupait la viande, la mâchait et l'avalait avec effort, comme si sa gorge eût été paralysée (Maupass., Contes et nouv., t. 2, M. Parent, 1886, p.601).
Emploi abs.:
1. Je m'émerveillais, en effet, qu'on pût observer aussi scrupuleusement le code de la parfaite tenue à table, tout en faisant disparaître, à cette cadence, des morceaux d'un tel calibre! Un homme qui dîne seul et a faim, tombe presque toujours dans son assiette; il mâche, broie, ronge, travaille des joues, du menton, de la gorge. De Scève mangeait de haut, sans hâte, sans effort, mais il en était à sa troisième tranche... Vercel, Cap. Conan, 1934, p. 40.
Emploi pronom. à sens passif. La viande ainsi coupée à un aspect plus agréable, se goûte mieux, et se mâche plus facilement (Brillat-Sav., Physiol. goût, 1825, p. 69).
Loc. verb., vieilli ou littér. Mâcher à vide
Reproduire les mouvements de la mastication sans rien avoir sous la dent. Le sourd claquement de ses dents qui s'entre-choquaient comme celles d'un tigre qui mâche à vide (Sue, Atar-Gull, 1831, p. 35).La tête étonnamment simiesque de Girardin, qui broie sa nourriture avec les mouvements mélancoliques des mandibules de singes, qui mâchent à vide (Goncourt, Journal, 1878, p. 1215).
Au fig. N'avoir rien de précis, de concret à utiliser. On le disait capable de tout. N'est-ce pas ce que la calomnie dit d'un homme quand elle mâche à vide et n'a point de pâture sous les dents? (Balzac, Œuvres div., t. 3, 1839, p. 242):
2. En parlant d'un ordre qui existait, en le citant par son nom (...) l'abbé Givresin fournissait à Durtal une substantielle pâture pour la manie raisonneuse de son verbiage; il le mettait en mesure de ne plus mâcher (...) à vide. Huysmans,Cathédr.,1898, p. 230.
2. Au fig.
a) Expliquer dans le détail de façon à faciliter à quelqu'un la compréhension et l'assimilation de quelque chose; préparer minutieusement à quelqu'un ce qu'il doit faire. Mâcher la besogne, le travail. Je l'attends donc, et, en attendant, je lui mâche et lui résume ce qu'il faut qu'elle commence à comprendre, à voir et à sentir (Sand, Corresp., 1861, p. 290).Quand on est cinquante ou soixante, un commandant c'est une bonne chose. Mais ces trois types, je ne vois pas pourquoi ils auraient besoin qu'on leur mâche le morceau (Giono, Bonh. fou, 1957, p. 369).
b) Mâcher ses mots, ses paroles (ou un terme appartenant au même paradigme)
Vieilli ou littér. [À la forme affirmative] Prononcer de façon peu distincte. Nana se vengea des ennuis qu'on lui causait, en mâchant de sourds jurons contre les hommes (Zola, Nana, 1880, p. 1136).
[À la forme négative] Ne pas mâcher ses mots, son opinion (ou un terme du même paradigme). S'exprimer de façon claire et sans ménagement. Ils fourbent pour le plaisir de fourber, et, comme on dit, pour s'entretenir la main. Voilà mon opinion, je ne la mâche pas (Balzac, Pts bourg., 1850, p. 64).Les autres camarades ne me l'ont pas mâché: dès qu'on me voit, on est édifié sur mon tempérament, on sent combien je suis femme et que «j'ai passé par tous les chemins» (Frapié, Maternelle, 1904, p.191).Le vieux ne mâchait pas les mots, crachant son mépris, éclaboussant cette passion d'une volée de boue (Moselly, Terres lorr.,1907, p. 264).
B. − [L'obj. désigne une substance gén. non comestible] Réduire en poudre ou en pâte en mordillant avec les dents et/ou en humectant de salive. Synon. mastiquer.Gomme* à mâcher; mâcher un chewing-gum, une chique. Il frissonna, rouvrit les yeux, et regarda fixement devant lui, en mâchant rageusement sa gomme, avant de poursuivre (Martin du G., Thib., Épil., 1940, p. 827):
3. Leurs voisins blancs estimaient fort les racines d'angéliques qu'ils mâchaient contre les troubles d'estomac, et un savant de la fin du xviiiesiècle attribua à certains des remèdes indigènes de fortes vertus cathartiques. Lowie, Anthropol. cult., trad. par E. Métraux, 1936, p. 363.
Emploi abs. Les peuples jaunes ont coutume de mâcher pour se rafraîchir la bouche (Flaub., Tentation, 1849, p. 389).
C. −
1. Mordiller, saisir entre les dents à plusieurs reprises. Synon. mâchonner.Celui qui (...) prend la taille de la femme de chambre devant la maîtresse de la maison, mâchant son cure-dents, riant à ses propres bons mots et débitant des ordures (Flaub., 1reÉduc. sent., 1845, p. 110).Le capitaine Gillmann continua, mâchant le bout de sa pipe de bruyère (Mille, Barnavaux, 1908, p. 176).Il leur répondait, avec méthode, en mâchant son éternel bout de cigare (Martin du G., Thib., Été 14, 1936, p. 249).
[Le suj. désigne un animal de selle] Que la mule rétive et la cavale Mâchent comme gingembre leurs mors (Moréas, Pèlerin pass., 1891, p. 105).
2. Au fig., littér. [Souvent à propos de qqc. de désagréable] Penser sans cesse à quelque chose. Synon. remâcher, ruminer.Mâcher sa douleur, son humiliation. Mâche cette idée dans ta ronde tête administrative, et moi j'exécuterai (Lamart., Corresp., 1830, p. 31).Je passe mes journées à mâcher je ne sais quelles rancunes (Arland, Ordre, 1929, p.376).Sur ce dernier point non plus, Jos-Mari, qui commençait à mâcher et à remâcher ses idées, n'était pas d'accord avec Andreas (Peyré, Matterhorn, 1939, p. 118).
REM.1.
Mâche, subst. fém.Avoir de la mâche, loc. verb. [Le suj. désigne un vin] Être riche en tanin. C'est la teneur en tanin d'un vin qui détermine l'emploi de certains termes chers aux oenophiles, tels que de la mâche, âpre, astringent (DrG. Debuigne, Nouv. Larousse des vins,Paris, Larousse, 1979, p. 282).
2.
Mâché, adj. masc.Papier* mâché.
Prononc. et Orth.: [mɑ ʃe], [-a-], (il) mâche [mɑ:ʃ], [-a-]. Ac. 1694, 1718 mascher; dep. 1740 mâcher. Étymol. et Hist. A. 1. a) Ca 1185 (Marie de France, Purgatoire St Patrice, 413 ds T.-L.: E cele denz que vus avez, Qu'unkes vïande ne mascha); 1552 (Est. s.v. mando-mansum: mansum in os inferre. Luy bailler tout masché); 1580 (Montaigne, Essais, II, X, éd. A. Thibaudet et M. Rat, p. 397: Ces historiens nous gastent tout: ils veulent nous mascher les morceaux); b) 1773 «triturer une substance molle dans sa bouche sans l'avaler» fig. des organes de papier mâché (Voltaire, Lettre à d'Argental, 19 avr. ds Corresp., éd. Th. Besterman, t. 39, p. 391); 2. fin xiiies. [ms. Bibl. nat. fr. 837] fig. ne le querre maschier «ne pas chercher à dissimuler, dire franchement» (De la fole et de la sage ds Jubinal, Nouv. recueil de fabliaux, t. 2, p. 79); 3. fig. a) xiiies. «se pénétrer d'une chose au point de la faire sienne, de l'acquérir» maskier sens «se pénétrer de sagesse» (Chans. et dits artésiens, éd. A. Jeanroy et H. Guy, XV, 36); b) ca 1350 «se pénétrer d'une chose, la méditer» (Gilles Li Muisis, II, 192 ds T.-L.). B.1306 «mordre un objet placé entre les dents» maschier le fraing (Guillaume Guiart, Royaux lignages, I, 1014 ds T.-L.). Du b. lat. masticare «mâcher»; ce verbe (= gr. μ α σ ι α ́ ω) se substitua en ce sens au début du ives. aux verbes ant. mandere et manducare (celui-ci issu du 1erpar l'intermédiaire du dér. manducus, proprement «le bâfreur», nom d'un bouffon d'atellanes portant un masque aux énormes mâchoires remuant à grand bruit) quand, mandere n'ayant laissé aucune trace dans les lang. rom., manducare fut utilisé pour exprimer la notion de «manger», v. manger.
DÉR. 1.
Mâchement, subst. masc.Action de mâcher. (Dict. xixeet xxes.). Pathol. Synon. de mâchonnement (Dict. xixeet xxes.). [mɑ ʃmɑ ̃], [maʃ-]. 1resattest. 1538 (Est., s.v. commanduco-commanducatus: le maschement entre les dents), 1867 pathol. (Littré); de mâcher1, suff. -(e)ment1*
2.
Mâcheur, -euse, subst.[Correspond à B supra] Mâcheur de qqc. Personne qui a l'habitude de mâcher quelque chose. Sobriquets de racleurs de cuir et de mâcheurs de cachous (Claudel, Soulier, 1929, 3ejournée, 2, p. 779).Mâcheurs de gomme en bras de chemise (Morand, New-York, 1930, p. 71).Au fig., littér. Personne qui prononce, qui dit (quelque chose). Où sont-ils, (...) Tous ces moines, ces vils mâcheurs de patenôtres, Gorgés par tes aïeux de tant de biens pourtant? (Leconte de Lisle, Poèmes trag., 1886, p. 136). [mɑ ʃoe:ʀ], [ma-], fém. [-ø:z]. 1reattest. a) 1562 adj. [muscles] mascheurs (Paré, Œuvres, éd. J. Fr. Malgaigne, I, 8, t. 1, p. 123b), b) 1611 subst. «celui qui mâche, celui qui mange» (Cotgr.), 1690 (Fur.: Qui disne bien); de mâcher1, suff. -eur2*.
BBG. Dub. Dér. 1962, p. 31 (s.v. mâchement).

MÂCHER2, verbe trans.

A. −
1. Couper quelque chose sans faire une section nette, déchirer. Il est essentiel que les sections de taille soient lisses, régulières, non mâchées, non écrasées (Brunet, Matér. vitic., 1909, p. 18).Il écarte ce drap du pantalon tout mâché et les paquets de pansements déroulés et puis celui qu'on a laissé en paquet dans le trou (Giono, Gd troupeau, 1931, p. 56).
2. User ou marquer de façon irrégulière. Cordage mâché. Les boulons (...) ont l'inconvénient d'élargir leurs trous, de mâcher le bois en prenant du jeu (Degrand, Résal,Ponts en maçonn., 1888, p. 590):
.Le mât de misaine n'a rien; il a eu cependant une sévère secousse. Tout le fer du beaupré a manqué, et, chose incroyable, le beaupré n'est que mâché, mais il est complètement dépouillé. Hugo, Travaill. mer, 1866, p. 183.
Mâcher une balle. Rendre la surface d'une balle irrégulière dans l'intention de la rendre plus dangereuse. Il haïssait les ci-devant princesses, celles qu'il se figurait, dans ses songes pleins d'horreur, mâchant, avec Élisabeth et l'Autrichienne, des balles pour assassiner les patriotes (A. France, Dieux ont soif,1912, p. 173).
B. − Meurtrir. Fruits mâchés. «Eh bien? eh bien?» bredouilla Prosper, étourdi, laissant voir, comme un collier, l'empreinte des doigts terribles qui lui avaient mâché la chair (Fabre, Rom. peintre, 1878, p. 101).Il avait l'aisselle toute mâchée par une grande cicatrice [d'un coup de corne] (Giono, Chant monde, 1934, p. 115).
Prononc.: [mɑ ʃe], [ma-]. Étymol. et Hist. xiiies. «battre, frapper, meurtrir» (Sermon poitevin, 57 ds T.-L.); 1547 par image ou nostre soulier nous mache «le point douloureux» (Marg. de Nav., Les Marguerites, Trop Prou, Peu, Moins [IV, 176] ds Hug.); spéc. a) 1640 «broyer le chanvre ou le lin» (A. Oudin, Rech. ital. et fr. d'apr. FEW t. 6, 1, p. 69 b; éd. 1643, p. 359 b); b) 1775 balle machée (Raynal, Hist. des Européens dans les deux Indes, XII, LXXXI, t. 2, p. 449); 1840 part. passé adj. «(d'une pièce de bois) dont les fibres ont été émoussées par le frottement d'un corps dur» (Ac. Compl. 1842). Dér. à l'aide de la dés. -er, du rad. onomat. makk- signifiant «presser ensemble», à rattacher à l'all. matsch pop.: adj. «écrasé; pulpeux; bourbeux; battu, défait», subst. «pulpe; bouillie; boue»; matschen id. «écraser, réduire en pulpe; battre, défaire» − et dont les dér. sont représentés outre en Italie et dans la Péninsule ibérique, dans les dial. gallo-rom. aux sens, notamment de «frapper, meurtrir, écraser (spéc. un fruit); broyer (le chanvre, le lin); battre (les gerbes); piler, écraser; exténuer de fatigue; frapper de stupeur», FEW, loc. cit., pp. 66b-74b; cf. l'a. prov. macar «frapper, meurtrir» (xiies. ds Rayn.), oils macatz «yeux cernés, battus» (1225-28 Jaufré, éd. C. Brunel, 5202), macat «brisé de fatigue» (ibid., 3263); ainsi que l'a. pic. maque «masse d'armes» (ca 1200 Aiol, 4002 ds T.-L.). Mâcher (Trév. 1752) par confusion avec mâcher1*.
STAT. _Mâcher1 et 2. Fréq. abs. littér.: 476. Fréq. rel. littér.: xixes.: a) 357, b) 769; xxes.: a) 1010, b) 701.

Wiktionnaire

Verbe - français

mâcher \mɑ.ʃe\ transitif 1er groupe (voir la conjugaison)

  1. Action de broyer un aliment ou un objet à l’aide des dents et de la mâchoire.
    • Sous le hangar, autour de quelques malles éparses, trop aisément classées, errent des fantômes de douaniers, mâchant nonchalamment leur chewing-gum. — (André Maurois, Chantiers américains, 1933)
    • Je […] regagnai le bord ; Matteo m'y attendait, le front soucieux, mâchant sans discontinuer sa chique amère où je le soupçonnais d'avoir mis pas mal de bétel, suivant la mode indigène. — (Sylvio Sereno, Latitude 9°-S, Éditions du Faucon Noir, 1956, page 27)
    • « Tu as entendu ce qu’a dit le docteur Kervilly ? Tu dois mâcher les aliments jusqu’à ce qu’ils deviennent aussi liquides qu’une soupe… » — (Nathalie Sarraute, Enfance, Gallimard, 1983, collection Folio, page 15)
    • Il fut intéressé par la salade de carottes râpées en longues lamelles. Il en prit une fourchettée, mâcha. Le goût le surprit. Il n'appréciait pas. — (Roger Hanin, Les sanglots de la fête, Grasset, 1996)
    • Elle tira du réfrigérateur une assiette de fromage. Il coupa une tranche d’emmental et la mâcha lentement, alternant une bouchée de fromage et une de pain. — (Gerald Messadie, Un espoir aussi fort , tome 3 : Les années d'or, Éditions de L'Archipel, 2009, chapitre 4)
  2. (Par extension) Mordiller, mâchonner.
    • Je revois mon oncle mâchant son éternel mégot.
  3. (Figuré) Préparer pour faciliter la tâche à quelqu'un.
    • Je vous ai mâché le travail, à vous de jouer !
  4. Abîmer, meurtrir.
    • La drisse de grand-voile est toute mâchée, il faut la changer. - Ne jette pas les fruits mâchés, on en fera une compote.
  5. (Figuré) Prononcer indistinctement.
    • Et tout en buvant, il mâchait entre ses dents des « chameaux par-ci, cochons par-là, vaches, grues, truies, etc. », quand l’aubergiste, […], s’immisça dans ses monologues. — (Louis Pergaud, Joséphine est enceinte, dans Les Rustiques, nouvelles villageoises, 1921)
    • Aujourd’hui, une vedette de la chanson peut se présenter à un gala de remise de prix en jeans trop étroit, en souliers de course crottés, avec un t-shirt et une veste en laine. Les vedettes peuvent sacrer, mâcher leurs mots, baragouiner une langue qui n’est ni du français ni de l’anglais et faire des blagues de fesses. — (Sophie Durocher, Michel Louvain, le gentleman, Le Journal de Québec, 16 avril 2021)
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Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

MÂCHER. v. tr.
Broyer avec les dents. Mâcher du pain, de la viande. Les viandes bien mâchées sont plus faciles à digérer. Avaler sans mâcher. Mâcher son frein, se dit d'un Cheval qui joue avec son mors et qui le ronge. On l'emploie aussi figurément en parlant des Personnes. À entendre de pareilles choses sans pouvoir répondre, je mâche mon frein. Mâcher à vide, N'avoir rien à se mettre sous la dent. Il signifie figurément Se repaître de fausses espérances. Fig. et fam., Il faut tout lui mâcher, Il a besoin qu'on lui explique les choses les plus simples. Fig. et fam., Mâcher à quelqu'un sa besogne, La préparer de façon qu'il puisse l'achever sans travail et sans peine. Fig. et fam., Je ne le lui ai point mâché, Je le lui ai dit avec une pleine franchise, sans aucun ménagement. Fig., Figure de papier mâché. Voyez PAPIER.

Littré (1872-1877)

MÂCHER (mâ-ché) v. a.
  • 1Broyer avec les dents. Mâcher du pain, de la viande. La pythie mâchait du laurier ; elle en jeta en passant sur le feu sacré quelques feuilles mêlées avec de la farine d'orge, Barthélemy, Anach. ch. 22.

    Absolument. S'il avait peine à bien mâcher Faute de dents en la gencive ! Scarron, Poés. div. Œuv. t. VII, p. 193. Les chats ne peuvent mâcher que lentement et difficilement : leurs dents sont si courtes et si mal posées qu'elles ne leur servent qu'à déchirer et non pas à broyer les aliments, Bossuet, Quadrup. t. I, p. 381.

    Familièrement. Mâcher de haut, manger sans appétit.

    Mâcher à vide, mâcher sans avoir rien sous la dent. …Simonide, Qui dit, pour être sain, qu'il faut mâcher à vide, Régnier, Sat. X. Les gens qui sont priés pourront mâcher à vide, Hauteroche, Souper mal apprêté, sc. 1. Nous les attachions au râtelier [les chevaux], où nous les laissions fort bien mâcher à vide, Lesage, Guzm. d'Alf. II, 1. Ne pouvant trouver des pensées nouvelles, ils [les académiciens dans leurs discours de réception] ont cherché des tours nouveaux, et ont parlé sans penser, comme des gens qui mâcheraient à vide, Voltaire, Dict. phil. Société royale.

    Fig. Se repaître de fausses espérances. Cette légère amorce, irritant tes désirs, Fait que l'illusion d'autres meilleurs plaisirs Vient la nuit chatouiller ton espérance avide, Mal satisfaite après de tant mâcher à vide, Corneille, Mél. I, sc. dern. 1re édit.

    Fig. et familièrement. Mâcher à quelqu'un sa besogne, la lui préparer, en faire ce qu'il y a de plus difficile.

    Il faut lui mâcher tous ses morceaux, il faut tout lui mâcher, il a besoin qu'on lui explique les choses les plus simples.

    Mâchez-lui les morceaux, et il les avalera, c'est-à-dire faites-lui le plus difficile de la besogne, et il achèvera le reste.

    Fig. Ne point mâcher une chose à quelqu'un, dire durement, sans adoucissement, une chose désagréable ou fâcheuse. Je vous parle un peu franc, mais c'est là mon humeur ; Et je ne mâche point ce que j'ai sur le cœur, Molière, Tart. I, 1.

    On dit dans le même sens : ne pas mâcher le mot. Là je verrai de quoi il tourne ; je ne leur mâcherai pas le mot, Corresp. de Klinglin, t. I, p. 292.

  • 2Serrer entre les dents sans broyer. Les enfants mâchent les hochets, quand ils sont près de faire des dents. C'était [dans les journées de Juillet 1830] la bouche aux vils jurons Qui mâchait la cartouche, et qui, noire de poudre, Criait aux citoyens : mourons ! Barbier, la Curée.

    Ce cheval mâche son frein, se dit d'un cheval qui joue avec son mors et qui le ronge. Son cheval [du soldat] mâche un frein blanc d'écume, Hugo, Orient. 15.

    Fig. Se mâcher le cœur, se tourmenter, se ronger d'impatience. Qui ronge ses poumons et se mâche le cœur, Régnier, Épît. I.

  • 3 Familièrement. Manger avec sensualité, avec gourmandise. Il aime à mâcher.

    Vieilli en ce sens.

  • 4Se mâcher, V. réfl. Être mâché. Une viande tendre qui se mâche facilement.

    Fig. Avec ellipse de se, laisser mâcher, donner à une chose le temps d'être préparée, acceptée. Les choses en cet état, j'estimai qu'il les fallait laisser reposer et mâcher, ne les point gâter par un empressement à contre-temps, Saint-Simon, t. VIII, p. 233, éd. CHÉRUEL.

    PROVERBE

    Quand on est vieux, il faut mâcher et marcher.

HISTORIQUE

XIIIe s. Bien soit la honte seue [sienne], je nel vous quier [veux] maschier, la Fole et la Sage. Se tu demandes quel la viande [mangée par les anges] devenoit, on puet dire que elle devenoit niens en maskant, Comput, f° 13. Que vaut morsiaus que bien ne mache ? G. de Coincy, p. 485.

XIVe s. La langue tourne la viande par la bouche, à ce qu'elle soit miex maschie, H. de Mondeville, f° 19. La quarte branche de gloutonnie si est quant une personne mengue si gloutement d'une viande qu'elle ne la mache pas, ains l'engloutit, Ménagier, I, 3.

XVe s. Moult rejoui de ce que messire Pierre avoit si franchement parlé et relevé la parole de messire Jean… et dit ainsi [le roi] en riant : Leur a-t-il bien masché ! je n'en voudrois pas tenir vingt mille francs, Froissart, II, II, 46. Ce ne m'est que chose commune ; Obeir fault à ma maistresse Sans machier, soit joye ou tristesse, Orléans, Rondeau. Il le me convient avaller Sans mascher, Patelin.

XVIe s. Ressemblans aux petits oysellets qui baillent tousjours attendans la becquée d'autruy, et voulans que l'on leur baille ja tout masché et tout prest, Amyot, Com. il faut ouïr, 28. Le duc de Maienne s'encourt à la maison de ville, et, maschant les menaces avec les raisons, estonna au commencement ceux qui avoient ainsi parlé, D'Aubigné, Hist. III, 274. … Qui fait le brave, et de sa bouche humide Maschele frein de l'escumeuse bride, Du Bellay, J. IV, 10, recto. Tantost il luy en donnera la moelle et la substance toute maschée, Montaigne, I, 174. Celui qui n'aime que pour mascher [manger], n'estime pour ton ami cher, Leroux de Lincy, Prov. t. II, p. 257.

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Étymologie de « mâcher »

Wallon, mausî ; picard, maker ; provenç. mastegar, maschar, machar ; espagn. mascar ; portug. mastigar ; ital. masticare ; du lat. masticare.

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(1190) Du moyen français macher, mascher – à ne pas confondre avec l’ancien français mascher –, de l’ancien français maschier, mascier, du bas latin masticare, de même sens[1].
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Phonétique du mot « mâcher »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
mâcher maʃe

Fréquence d'apparition du mot « mâcher » dans le journal Le Monde

Source : Gallicagram. Créé par Benjamin Azoulay et Benoît de Courson, Gallicagram représente graphiquement l’évolution au cours du temps de la fréquence d’apparition d’un ou plusieurs syntagmes dans les corpus numérisés de Gallica et de beaucoup d’autres bibliothèques.

Évolution historique de l’usage du mot « mâcher »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « mâcher »

  • Il faut avaler la pilule sans la mâcher.
    Proverbe latin médiéval
  • Le mépris est une pilule qu'on peut avaler mais qu'on ne peut mâcher.
    Molière
  • Avant de mâcher les mots je mange les idées.
    Charles Dullin — Souvenirs et notes de travail d'un acteur
  • Il faut mâcher les mots plus qu'un morceau de pain.
    Proverbe géorgien
  • Il faut toujours supposer le lecteur intelligent, ne pas tout lui mâcher.
    Philippe Claudel — Evene.fr - Mars 2006
  • Quand on a une dent contre quelqu’un, il est inutile de mâcher ses mots.
    Pierre Perret
  • Sans mâcher ses mots, le président par intérim de la conférence épiscopale philippine souligne que les juristes et les constitutionnalistes Philippins ont pointé combien « cette nouvelle loi constituait une “menace sérieuse pour les libertés fondamentales de tous les Philippins pacifiques” ». Des arguments qui ont été balayés par le gouvernement et le président Rodrigo Duterte.
    La Croix — Aux Philippines, l’Église catholique alerte contre une « loi antiterroriste »
  • Il y a des livres dont il faut seulement goûter, d'autres qu'il faut dévorer, d'autres enfin, mais en petit nombre, qu'il faut, pour ainsi dire, mâcher et digérer.
    Francis Bacon — Essais, sur l'étude
  • Les antiplaquettaires parentéraux tirofiban (inhibiteur de la glycoprotéine IIb/IIIA) et cangrélor (inhibiteur du P2Y12) procurent une inhibition plus rapide et plus durable. Jusqu’ici, il n'existait encore aucune donnée comparative directe entre le tirofiban et le cangrélor dans le cas d'une ICP primaire pour cause de STEMI. C'était précisément l'objectif de l'étude FABOLUS FASTER, qui a comparé les effets pharmacodynamiques de ces deux produits entre eux et face au prasugrel à mâcher dans ce contexte clinique fréquent.
    Medscape — Le prasugrel est à oublier dans l'ICP primaire
  • En l'année 4005 de notre ère Avoir des yeux, des dents à quoi ça sert ? Qui aura-t-il à mâcher Et qui pourras-tu regarder ?
    Richard Anthony — L'an 2005
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Traductions du mot « mâcher »

Langue Traduction
Anglais to chew
Espagnol masticar
Italien masticare
Allemand kauen
Chinois 咀嚼
Arabe لمضغ
Portugais mastigar
Russe чтобы жевать
Japonais かむ
Basque mastekatzeko
Corse masticà
Source : Google Translate API

Combien de points fait le mot mâcher au Scrabble ?

Nombre de points du mot mâcher au scrabble : 12 points

Mâcher

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