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Corbeau
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Définitions de « corbeau »
Trésor de la Langue Française informatisé
CORBEAU, subst. masc.
Wiktionnaire
Nom commun - français
corbeau \kɔʁ.bo\ masculin (pour une femelle, on dit : corbelle)
- Nom vernaculaire du grand corbeau (Corvus corax), gros oiseau passereau carnassier à plumage noir et au bec fort et noir.
- […] un corbeau croassait à la dernière branche desséchée d’un chêne, et les archers montrèrent en riant ce but à Othon, mais le jeune homme répondit que le corbeau était un animal immonde, dont les plumes étaient indignes d’orner la toque d’un franc archer. — (Alexandre Dumas, Othon l’archer, 1839)
- […] ; un corbeau déjà dressé et comment (il buvait du vin), avait jugé bon néanmoins de renoncer aux bienfaits de la civilisation et de reprendre la clé des bois ; […]. — (Louis Pergaud, La Traque aux nids, dans Les Rustiques, nouvelles villageoises, 1921)
- Dans dix ans, parmi les vestiges de Beaumat, les souffles du vent, les croassements des corbeaux et la chute des pierres retentiront seuls ; nulle oreille humaine ne les entendra et la cloche du village elle-même se taira, fatiguée de tinter seulement pour les morts. — (Ludovic Naudeau, La France se regarde : le Problème de la natalité, Librairie Hachette, Paris, 1931)
- Le corbeau nommé Jet vit depuis près de 10 ans au centre de réadaptation Wildlife Haven Rehabilitation Centre à Île-des-Chênes, à environ 30 kilomètres au sud de Winnipeg. Jet a appris beaucoup de nouvelles habiletés, comme celles de parler et de reconnaître des couleurs. — (Radio-Canada, Un corbeau rescapé peut parler et reconnaître des couleurs, radio-canada.ca, 28 janvier 2021)
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(Par extension) (Zoologie) Oiseau d’allure proche du grand corbeau (1) (freux, corneille, choucas, etc.) pouvant appartenir aux genres Corvus et Pyrrhocorax.
- Toute la journée, un vent aigre a soufflé de l’Ouest ; le ciel est resté bas et triste, et j’ai vu passer des vols de corbeaux… — (Octave Mirbeau, La tête coupée,)
- Au moment de repartir, notre attention est attirée par une nuée de corbeaux s'agitant au-dessus d'un groupe d’êtres humains. — (Frédéric Weisgerber, Trois mois de campagne au Maroc : étude géographique de la région parcourue, Paris : Ernest Leroux, 1904, page 54)
- Quelques années plus tard, deux autres répulsifs pour corbeaux sont découverts : la diphénylguanidine et le triacétate de guazatine. Ces produits sont assez strictement limités aux corvidés. — (Jean Lhoste, Pierre Grison, La phytopharmacie française: chronique historique, INRA, 1989, page 29)
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(Histoire) En temps d’épidémie, personne chargée par les autorités de sortir de la ville les cadavres des pestiférés afin de les réunir dans des fosses.
- Ce qu'il y avait de terrible au milieu de cette agonie de tout un peuple, c'était l'hilarité, la joie, l'allégresse de ces hommes chargés de réunir les morts, et qu'on avait baptisés du nom expressif de corbeaux. — (Alexandre Dumas, Le comte de Moret (Le sphinx rouge), 1865, IV, 16)
- On l’appelait le corbeau, du nom qu’on donnait à ces hommes sales et ivres qui fossoyaient les morts avec une indécente brutalité très répugnante. Il fallait convenir qu’il n’était pas très populaire. — (Jean Giono, Le hussard sur le toit, 1951, réédition Folio Plus, page 282)
- Quatre hommes qui avaient la chemise en dehors des pantalons et étaient ainsi revêtus de l’uniforme habituel des corbeaux arrivèrent avec une civière. — (Jean Giono, Le hussard sur le toit, 1951, réédition Folio Plus, page 283)
- Ce ne sont pas des fossoyeurs. […] Ces hommes en casaquin sont des corbeaux, ainsi nommés à cause de leur croc, par quoi ils crochent dans les morts pour non pas les approcher trop. — (Robert Merle, Fortune de France, IX, 1977)
- (Par extension) (Désuet) (Populaire) Nom donné quelquefois aux porteurs des morts.
- (Désuet) (Péjoratif) Nom donné quelquefois aux prêtres à cause de leurs vêtements noirs.
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(Figuré) (Familier) Auteur de lettres ou de coups de téléphone anonymes.
- Les juges chargés de faire la lumière sur les envois anonymes adressés en 2004 à leur collègue Renaud Van Ruymbeke, ont découvert un deuxième corbeau dans l’affaire Clearstream. — (Le Monde, 13 juillet 2006, Gérard Davet, Hervé Gattegno, lemonde.fr)
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(Architecture, Maçonnerie) Pierre, pièce de bois ou de métal, façonnée en console, moindre en hauteur qu’en saillie, encastrée dans la maçonnerie et placée en saillie du nu d’un mur, servant à supporter une charge (poutre, corniche, balcon, etc.).
- Puis, à mesure que la charpente métallique montait, (,,,) les consoles et les corbeaux se chargeaient de sculptures. — (Émile Zola, Au Bonheur des Dames, 1883)
- Bâtière d’ardoises à coyau sur corbeaux calcaires en quart-de-rond. — (Le patrimoine monumental de la Belgique : Wallonie, tome 16, page 177, Ministère de la Région Wallonne, 1992, Éditions Mardaga)
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(Antiquité) Espèce de grappin d’abordage et de pont volant, utilisé par les Romains.
- Les Romains suppléèrent à cet inconvénient [la supériorité des Carthaginois dans la manœuvre des vaisseaux] par une machine qui fut inventée sur-le-champ et que depuis on a appelée corbeau, par le moyen de laquelle ils accrochaient les vaisseaux des ennemis, passaient dedans malgré eux et en venaient aussitôt aux mains — (Rollin, Hist. anc. t. I, page 311, dans Pougens, cité dans Littré, article corbeau)
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(Viticulture) Cépage donnant du raisin rouge nommé aussi montmélian en Savoie. Ce cépage possède une quarantaine de synonymes. [1]
- En 1970, l’ampélographe français Paul Truel découvrit, lors d’un voyage à Mendoza, que ce cépage [bonarda] était en fait le corbeau, appelé aussi douce noire et charbonneau. — (Wikipedia, article Bonarda, 2013)
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(Héraldique) Meuble représentant l’animal du même nom dans les armoiries. Il est généralement représenté de profil, debout sur ses pattes et de sable. À rapprocher de corneille.
- Écartelé d’or au lion de gueules et d’argent au corbeau de sable, becqué et membré de gueules, qui est de Fourcès du Gers → voir illustration « armoiries avec 2 corbeaux »
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Jeu traditionnel de village.
- Les uns se répandaient dans les cabarets pour digérer en fumant une pipe. D’autres jouaient aux quilles ou au corbeau, ou bien encore au bricotiau. — (Charles Deulin, « Cambrinus, roi de la bière », Cambrinus et autres Contes, Librairie internationale, 1868, page 25)
Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)
Gros oiseau carnassier, du genre des Corvidés, de la famille des Passereaux, à plumage noir, et qui vit ordinairement de charognes. Noir comme corbeau. Le croassement des corbeaux. Servir de pâture aux corbeaux. Par analogie, il désigne d'autres oiseaux. Corbeau de mer, Cormoran. Corbeau blanc, Sorte de vautour. Par extension il se dit du Genre des Corvidés auquel appartiennent aussi le choucas, la pie, etc. Par analogie, en termes d'Arts,
CORBEAU désigne Toute pièce de bois et surtout de pierre destinée à porter une charge. Corbeau de fer, Morceau de fer scellé dans la muraille et qui sert à soutenir une pièce de bois sur laquelle portent les solives.
Littré (1872-1877)
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1Gros oiseau carnassier de la famille des passereaux ; il a un plumage très noir.
Et m'ouvrez un passage à l'empire des morts, Dérobant aux corbeaux le butin de mon corps
, Rotrou, Antig. I, 6.Et ton cœur sacrilége aux corbeaux exposé
, Rotrou, St-Genest, III, 2.Maître corbeau, sur un arbre perché, Tenait en son bec un fromage
, La Fontaine, Fabl. I, 2.Eh ! bonjour, monsieur du corbeau, Que vous êtes joli, que vous me semblez beau !
La Fontaine, ib.L'oiseau de Jupiter enlevant un mouton, Un corbeau témoin de l'affaire, Et plus faible de reins mais non pas moins glouton, En voulut sur l'heure autant faire
, La Fontaine, Fabl. II, 16.Noir comme un corbeau, se dit souvent d'une personne qui a les cheveux noirs et le teint brun.
Le corbeau passait pour être de mauvais augure.
… Un songe, une vapeur, Un corbeau qui croasse, enfin tout vous fait peur
, Mairet, Sophon. V, 4.…Un corbeau Tout à l'heure annonçait malheur à quelque oiseau
, La Fontaine, Fabl. IX, 2.Et des affreux corbeaux les noires légions Fendent l'air qui frémit sous leurs longs bataillons
, Delille, Géorg. I.Se dit familièrement dans ce sens en parlant des personnes. Quel corbeau de mauvais augure !
- 2 Terme de chasse. Synonyme de corbine, corneille, choucas, crave, freux.
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3Autrefois, nom donné à des gens qui dans un temps de contagion enlevaient les pestiférés soit pour les porter à l'hôpital soit pour les enterrer.
J'entrai jusques au second étage, où je trouvai deux corps nus, étendus sur la table de la chambre ; alors je me retirai bien étonné, et en sortant je rencontrai des corbeaux qui me demandèrent ce que je cherchais
, Bassompierre, Mémoires, 1723, in-12, t. I, p. 193 (Collection PETITOT, 2e série, t. XIX, p. 364).Populairement, nom qu'on donne quelquefois aux porteurs des morts.
Ces dénominations viennent de ce que le corbeau recherche les corps morts pour s'en repaître.
Nom donné quelquefois par dénigrement aux prêtres à cause de leurs vêtements noirs.
- 4 Terme d'astronomie. Constellation de l'hémisphère austral.
- 5 Terme d'architecture. Grosse console, moindre en hauteur qu'en saillie, dont l'usage est pour soulager la portée d'une poutre ; ces corbeaux sont quelquefois de fer.
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6Dans l'ancien art militaire, espèce de grappin et de pont volant.
Les Romains suppléèrent à cet inconvénient [la supériorité des Carthaginois dans la manœuvre des vaisseaux] par une machine qui fut inventée sur-le-champ et que depuis on a appelée corbeau, par le moyen de laquelle ils accrochaient les vaisseaux des ennemis, passaient dedans malgré eux et en venaient aussitôt aux mains
, Rollin, Hist. anc. t. I, p. 311, dans POUGENS. -
7 Terme de pêche. Corbeau de mer. Poisson qui a le dos bleu, le ventre blanc, les côtés rouges, et la tête fort grande.
PROVERBE
Nourris un corbeau, il te crèvera l'œil, c'est-à-dire souvent le mal est rendu pour le bien.
HISTORIQUE
XIIe s. E j'arai cumanded à corps que la vitaille te truissent e guarisum
, Rois, 310.
XIIIe s. De Renart, si comme il conchia le corbel du fromage
, Ren. 7186. D'un leu [loup] cunte, ki vint jadiz Où uns corbiaus s'esteit assiz Desour le dos d'une berbiz
, Marie de France, Fabl. 50. Je ne sai s'en [si on] apelle potences ou corbiaus, Qui soustiennent leurs cornes [de la coiffure des femmes], que tant tiennent à biaus ; Mès tant os-je bien dire que sainte Elizabiaus N'est mie en paradis pour porter tiex borriaus
, J. de Meung, Test. 1268.
XIVe s. Ensi com je quidoie au palais retourner, Vinrent doy noir corbant mon corps avironner
, Beaud. de Seb. III, 363. Et la tor est quarrée et lée ; De sus par est si bien ornée ; La coverture et li corbel Furent moult orgueillox et bel
, Blanchandin, ms. de St-Germain, f° 178, dans LACURNE.
XVIe s. Venitiens à Trevy font posade, Comme corbeaulx dormans sur la charoigne
, Marot, J. V, 100. Nul lait noir, nul blanc corbeau
, Leroux de Lincy, Prov. t. I, p. 173. De mauvais corbeau mauvais œuf
, Oudin, Curios. fr. Mourut aussi de la maladie… Rosée, procureur en la cour, et fallut pour l'enterrer envoyer querir des corbeaux à Paris
, L'Estoille, Journal du règne de Henri IV, La Haye, 1741, t. III, p. 383, année 1606. Il n'est loisible à un voisin mettre ou faire mettre et asseoir les poultres de sa maison dedans le mur moitoyen d'entre luy et son voisin, sans y faire ou faire faire ou mettre jambes parpaignes ou chesnes et corbeaux suffisans de pierre de taille pour porter les dittes poultres
, Coust. génér. t. I, p. 35.
SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE
CORBEAU. Ajoutez :Cépage de la Savoie,les Primes d'honneur, p. 660, Paris, 1874.
Encyclopédie, 1re édition (1751)
CORBEAU, s. m. (Hist. nat. Orn.) corvus, oiseau. Celui qui a servi de sujet pour la description suivante, pesoit deux livres deux onces ; il avoit près de deux piés de longueur depuis la pointe du bec jusqu’à l’extrémité de la queue ; l’envergure approchoit de quatre piés. Le corbeau a le bec noir, épais, pointu, & fort ; la piece supérieure est un peu crochue à l’extrémité, & celle du bas est droite ; il a la langue large, fourchue, déchiquetée, & noirâtre par-dessous : la prunelle de l’œil est entourée d’un double cercle, dont l’extérieur est mêlé de blanc & de cendré, & l’intérieur de roux & de cendré. Il y a sur sa tête des poils roides qui sont dirigés en bas, & qui couvrent les narines. Cet oiseau est entierement de couleur noire mêlée d’un peu de bleu luisant, surtout sur la queue & sur les ailes : la couleur du ventre est plus pâle, & tire un peu sur le roux. Les grandes plumes des épaules recouvrent le milieu du dos, qui n’est garni en-dessous que de duvet, Il y a vingt grandes plumes dans chaque aile ; la premiere est plus courte que la seconde, la seconde plus que la troisieme, & la troisieme plus que la quatrieme, qui est la plus longue de toutes. Le tuyau des plumes, à compter depuis la sixieme jusqu’à la dix-huitieme, s’étend plus loin que les barbes, & son extrémité est pointue. La queue a neuf pouces de longueur ; elle est composée de douze plumes ; celles du milieu sont les plus longues, & les autres diminuent de longueur par degré jusqu’à la premiere de chaque côté, qui est la plus courte. Les ongles sont crochus & grands, sur-tout ceux de derriere. Le doigt extérieur tient au doigt du milieu jusqu’à la premiere articulation. Cet oiseau ne se nourrit pas seulement de fruits & d’insectes, il mange aussi la chair des cadavres de quadrupedes, de poissons, d’oiseaux. Il prend les oiseaux tout vifs, & il les dévore comme les oiseaux de proie. On voit quelquefois des corbeaux blancs, mais ils sont très-rares. On trouve des corbeaux dans tous les pays du monde : ils ne craignent ni le chaud ni le froid ; & quoiqu’on dise qu’ils aiment à vivre dans les lieux solitaires, il y en a cependant qui restent au milieu des villes les plus grandes & les plus peuplées, & qui y nichent. Ordinairement les corbeaux placent leur nid au sommet des arbres ou dans de vieilles tours ruinées, au commencement du printems, dès les premiers jours du mois de Mars, & quelquefois plûtôt. La femelle fait d’une seule ponte quatre ou cinq œufs, & quelquefois six ; ils sont parsemés de plusieurs taches & de petites bandes noirâtres, sur un fond bleu-pâle mêlé de verd. Pour ce qui est de la durée de la vie de cet oiseau, il n’y a pas à douter que ce qu’en a dit Hésiode ne soit faux : cependant il est vrai que les oiseaux vivent long-tems ; & la vie des corbeaux est peut-être encore plus longue que celle des autres. Willughby, ornith. Voyez Oiseau. (I)
Corbeau, (Mat. med.) Les petits corbeaux réduits en cendre sont recommandés pour l’épilepsie & pour la goutte.
La fiente de corbeau est réputée bonne pour la douleur des dents & pour la toux des enfans, appliquée extérieurement, ou même portée en amulette.
Les œufs de corbeau sont ordonnés dans l’épilepsie par. Arnauld de Villeneuve. Rasès prétend, d’après Pline, que les œufs de corbeau mêlés avec de l’huile dans un vaisseau de cuivre, sont propres à noircir les cheveux. Quelques auteurs attribuent la même vertu à la graisse de corbeau.
Le cerveau de corbeau pris en substance dans de l’eau de vervenne, passe, selon Gesner, pour un remede éprouvé contre l’épilepsie.
Le cœur du corbeau porté en amulette, est regardé par Fernel comme un remede efficace contre la trop grande pente au sommeil : mais toutes ces vertus ne sont fondées que sur une vaine tradition. (b)
* Corbeau, (Mythol.) La fable dit qu’il devint noir pour avoir trop parlé, & que ce fut une vengeance d’Apollon qui sur le rapport que lui fit le corbeau de l’infidélité de Coronis, tua sa maîtresse, s’en repentit, & punit l’oiseau délateur en le privant de sa blancheur.
Corbeau de Bois, voyez Corneille de Mer.
Corbeau d’Eau, voyez Cormoran.
Corbeau gallerant ou Corgallerant, voyez Fruit.
Corbeau de Mer, (Hist. nat. Ichtyol.) ce nom a été donné, soit en latin soit en françois, à différens poissons, tels que le corp, l’hirondelle de mer, & la dorée ou poisson de saint-Pierre.
Corbeau de nuit, voyez Bihoreau.
Corbeau, (petit) voyez Bihoreau.
Corbeau, en Astronomie, constellation de l’hémispere méridionale dont les étoiles sont au nombre de sept dans le catalogue de Ptolomée & dans celui de Tycho, & au nombre de dix dans le catalogue britannique. (O)
Corbeau, en Architecture, est une grosse console qui a plus de saillie que de hauteur, comme la derniere pierre d’une jambe sous poutre, qui sert à soulager la portée d’une poutre, ou à soûtenir par encorbellement un arc doubleau de voûte qui n’a pas de dosserets de fonds, comme à la grande écurie du Roi aux Tuileries. Il y en a en consoles, avec des canaux, gouttes, & même des aigles, que Pausanias appelle aquilegiæ, comme il s’en voit au portique de Septime Sévere à Rome, & au grand salon de Marly, où ils portent des balcons. (P)
Corbeau, (Art milit.) c’étoit une machine de guerre dont les Romains, selon Polybe, se servirent dans le combat naval de Myle entre le consul Duillius & Annibal. Voici la description qu’en donne cet auteur.
« Une piece de bois ronde, longue de quatre aulnes, grosse de trois palmes de diametre, étoit plantée sur la proue du navire ; au haut de la poutre étoit une poulie, & autour une échelle cloüée à des planches de 4 piés de largeur sur 6 aulnes de longueur, dont on avoit fait un plancher percé au milieu d’un trou oblong qui embrassoit la poutre à 2 aulnes de l’échelle. Des deux côtés de l’échelle sur la longueur, on avoit attaché un garde-fou qui couvroit jusqu’au genou. Il y avoit au bout du mât une espece de pilon de fer pointu, au haut duquel étoit un anneau ; de sorte que toute cette machine paroissoit semblable à celle dont on se sert pour faire la farine. Dans cet anneau passoit une corde avec laquelle, par le moyen de la poulie qui étoit au haut de la poutre, on élevoit les corbeaux lorsque les vaisseaux s’approchoient ; & on les jettoit sur les vaisseaux ennemis, tantôt du côté de la proue, tantôt sur les côtés, suivant les différentes rencontres. Quand les corbeaux accrochoient un navire, si les deux étoient joints par leurs côtés, les Romains sautoient dans le vaisseau ennemi d’un bout à l’autre ; s’ils n’étoient joints que par les deux proues, ils avançoient deux à deux au-travers du corbeau : les premiers se défendoient avec leurs boucliers des coups qu’on leur portoit en-devant ; & les suivans, pour parer les coups portés de côté, appuyoient leurs boucliers sur le garde-fou ». Traduct. de Polybe par D. Thuillier.
Il paroît par cette description, que ce corbeau n’étoit autre chose qu’un pont mobile à l’entour de la poutre, dont le bout élevé étoit garni de griffes propres à accrocher ; que ce pilon de fer & son anneau étoit attaché au haut du mât du navire ; & que cette corde passant par cet anneau & par la poulie de la poutre, ne servoit qu’à hausser & baisser ce pont mobile, pour le laisser tomber sur les vaisseaux ennemis & servir de passage aux Romains. Polybe confirme cette vérité, en disant : lorsqu’on fut à l’abordage, que les vaisseaux furent accrochés les uns aux autres par les corbeaux, les Romains entrerent au-travers de cette machine dans les vaisseaux ennemis, & ils se battirent sur leurs ponts. Ce qui démontre clairement que ce corbeau ne consistoit que dans un pont.
La description que fait M. de Folard de ce corbeau, dans son commentaire sur Polybe, est fort différente : il le représente en forme de grue (machine qui n’étoit pas inconnue à Polybe) posée sur un mât élevé sur le château de proue ; ce qui ne convient pas avec la poutre de Polybe. Sur ce mât M. de Folard établit le rancher d’une grue, au bout duquel étoit un cone de fer, piece de fonte, dit-il, des plus pesantes, laquelle tombant de son propre poids, perçoit le pont de proue ; voilà ce que M. de Folard appelle corbeau. Il est difficile de concilier cette machine avec celle que décrit Polybe.
M. de Folard parle, dans son savant commentaire, de plusieurs especes de corbeaux : il y en avoit, dit-il, tant de diverses sortes, & ils étoient si différens entr’eux, qu’il ne sait comment les anciens n’ont pas inventé différens noms pour empêcher qu’on ne les confondît les uns avec les autres. M. de Folard donne la description de ces différens corbeaux, savoir du dauphin, du corbeau démolisseur, du loup, & du corbeau à griffes.
Le premier n’étoit, selon cet auteur, qu’une masse de fer fondu suspendu au bout des antennes des vaisseaux : on le suspendoit à un des bouts des vergues pour le laisser tomber sur les vaisseaux ennemis, qu’il perçoit depuis le pont jusqu’au fond-de-cale.
A l’égard du corbeau démolisseur, Vitruve en fait mention ; mais on ne peut guere comprendre ce que c’est que cette machine. « Ne seroit-ce point, dit M. de Folard, celle dont parle Vegece, qu’il appelle tortue, au-dedans de laquelle il y avoit une ou deux pieces de bois arrondies & fort longues, pour pouvoir atteindre de loin, & au bout desquels il y avoit des crocs de fer ? elles étoient suspendues en équilibre comme les béliers, & on les poussoit contre les créneaux pour les accrocher & les tirer à bas, ou les pierres ébranlées par les béliers ». Voyez Belier.
Cependant Végece en parlant de ce croc suspendu & branlant, ne se sert pas du terme de corbeau, mais de celui de faux. Voici le passage de cet auteur.
« On construit la tortue avec des membrures & des madriers, & on la garantit du feu en la revêtissant de cuirs cruds, de couvertures de poil, ou de pieces de laine. Elle couvre une poutre armée à l’un de ses bouts d’un fer crochu pour arracher les pierres de la muraille : alors on donne le nom de faulx à cette poutre, à cause de la figure de son fer ». Nouv. traduct. de Végece.
Pour le loup, M. de Folard prétend que la machine à laquelle Végece donne ce nom, n’étoit qu’un corbeau à tenailles ou à griffes, qui consistoit dans une espece de ciseaux dentelés & recourbés en maniere de tenailles, ou de deux faucilles opposées l’une à l’autre.
Outre les différens corbeaux dont on vient de parler, le savant commentateur de Polybe traite encore du corbeau à lacs-courans & à pinces, de celui à cage, appellé aussi le tollenon ou tellenon, & du polisparte ou corbeau d’Archimede.
Le corbeau à lacs-courans n’étoit autre chose qu’une espece de levier placé sur les murailles des villes, de maniere qu’une partie sailloit en-dehors, & que l’autre plus grande étoit sur le terre-plein : à la partie extérieure étoit attachée une chaîne ou une corde qui avoit un lac avec lequel on essayoit de saisir la tête du bélier, pour le tirer en-haut & empêcher son effet.
Le corbeau à pinces étoit à-peu-près la même chose, à l’exception qu’au lieu de lacs il y avoit des pinces pour saisir le bélier. Cette machine ne differe guere de celle que M. de Folard appelle corbeau à tenaille, & à laquelle Vegece donne le nom de loup. « Plusieurs, dit cet auteur, attachent à des cordes un fer dentelé fait en maniere de pince, qu’on appelle loup, avec lequel ils accrochent le bélier, le renversent, ou le suspendent de façon qu’il ne peut plus agir ».
Le corbeau à cage ou tollenon est ainsi décrit par Végece. « Le tollenon est une bascule faite avec deux grandes pieces de bois, l’une plantée bien avant en terre ; & l’autre qui est plus longue, attachée en-travers au sommet de la premiere, & dans un tel point d’équilibre, qu’en abaissant une de ses extrémités l’autre s’éleve. On attache donc à l’un des bouts de cette poutre une espece de caisse d’osier ou de bois, où l’on met une poignée de soldats, & en abaissant l’autre bout on les éleve & on les porte sur les murailles ». Nouvelle traduct. de Végece.
Reste à parler du polysparte ou corbeau d’Archimede. « C’étoit sans doute, dit M. de Folard, une poutre ou un mât prodigieusement long & de plusieurs pieces, c’est-à-dire fait de plusieurs mâts joints ensemble, pour le rendre plus fort & moins flexible, renforcé encore au milieu par de fortes semelles, le tout rassuré avec des cercles de fer & d’une lieure de cordes de distance en distance, comme le mât d’un vaisseau composé de plusieurs autres mâts. Cette furieuse poutre devoit être encore allongée d’une autre à-peu-près d’égale force. Ce levier énorme & de la premiere espece, devoit être suspendu à un grand arbre assemblé sur sa sole, avec sa fourchette, son échelier, ses moises, enfin à-peu-près semblable à un gruau. Il devoit être appliqué & collé contre l’intérieur de la muraille de la ville, arrêté & assûré par de forts liens ou des anneaux de fer où l’on passoit des cordages qui embrassoient l’arbre au bout duquel le corbeau étoit suspendu. Ce levier énorme ainsi suspendu à un gros cable ou à une chaîne, & accolé contre son arbre, pouvoit produire des effets d’autant plus grands, que la puissance ou la ligne de direction se trouvoit plus éloignée de son point fixe, ou du centre du mouvement, en ajoûtant encore d’autres puissances qui tirent de haut en bas par des lignes de direction. Il y avoit à l’extrémité plusieurs grapins ou pattes d’ancres suspendues à des chaînes qu’on jettoit sur les vaisseaux lorsqu’ils approchoient à portée. Plusieurs hommes abaissoient cette bascule par le moyen de deux cordes en trelingage ; & dès qu’on s’appercevoit que les griffes de fer s’étoient cramponées, on faisoit un signal, & tout aussi-tôt on baissoit une des extrémités de la bascule, pendant que l’autre se relevoit & enlevoit le vaisseau à une certaine hauteur, qu’on laissoit ensuite tomber dans la mer en coupant le gros cable qui tenoit le vaisseau suspendu ». Comm. sur Polybe.
Quelques critiques se sont exercés sur cette description du corbeau d’Archimede, & sur la figure qu’en donne M. de Folard, p. 86, du prem. vol. de son commen. sur Polybe, édit. de Paris Voyez une lettre insérée sur ce sujet dans le cinq. vol. de la bibliot, raisonn. Mais malgré les difficultés dont peuvent être susceptibles quelques unes des descriptions des machines de guerre des anciens par M. le chevalier Folard, il faut convenir qu’il falloit la sagacité & la science de cet habile officier pour éclaircir ce que les auteurs de l’antiquité nous ont laissé sur cette matiere. Le commentaire sur Polybe tiendra toûjours un rang distingué parmi les bons ouvrages de notre siecle, & la lecture en sera toûjours très-utile à ceux qui voudront étudier à fond l’art de la guerre. Un auteur très-connu, M. Pluche, borne la bibliotheque d’un militaire en campagne, à un nouveau-Testament, un Euclide, & les commentaires de César. Il est à souhaiter que le commentaire sur Polybe puisse être réduit à un volume assez portatif pour être joint à cette bibliotheque, de même que l’art de la guerre par M. le maréchal de Puységur. (Q)
* Corbeaux, (Serr. & Charpent.) sont des morceaux de bois ou de fer scellés dans les murs : ils servent à porter les lambourdes sur lesquelles pose le bout des solives des planchers, lorsqu’on ne les fait point porter dans les murs. Voyez nos Planc. de Serrurerie.
Étymologie de « corbeau »
Berry, corbin ; wallon, coirbâ ; du latin corvellus, diminutif de corvus, dont le radical cor se trouve dans ϰόρ-αξ, ϰορ-ώνη, cor-nix ; sanscr. kârava ; mots qui ont une ressemblance frappante avec l'hébreu harab, corbeau. Dans le vieux français, au nominatif singulier, li corbels ou li corbaus ; au régime, le corbel. Le primitif corb ou corp se trouve dans l'ancien français.
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(Nom) Du moyen français corbeau, de l’ancien français corbel, dérivé de corb, corp, du latin populaire de Gaule *corbus, du latin classique corvus, de même sens.
Le sens d’« auteur de lettres anonymes » remonte à l’affaire Angèle Laval qui inonda Tulle de lettres anonymes en 1920. L’affaire inspira le film Le Corbeau de Henri-Georges Clouzot dans lequel une série de lettres anonymes signées « Le Corbeau » s’abat sur une petite ville française. - (Adjectif) En référence à la couleur des plumes du grand corbeau.
Phonétique du mot « corbeau »
Mot | Phonétique (Alphabet Phonétique International) | Prononciation |
---|---|---|
corbeau | kɔrbo |
Évolution historique de l’usage du mot « corbeau »
Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.
Citations contenant le mot « corbeau »
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Comme la neige serait monotone si Dieu n'avait créé les corbeaux. De Jules Renard
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Les corbeaux peuvent raisonner comme un enfant Futura, Brève | Corbeaux : et si leur intelligence provenait de leur enfance ?
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Les corbeaux entre eux ne se crèvent pas les yeux. De Proverbe français
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On ne trouve pas de colombe dans un nid de corbeaux. De Proverbe québécois
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La censure épargne les corbeaux et s'acharne sur les colombes. De Juvénal / Satires
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La censure pardonne aux corbeaux et poursuit les colombes. De Juvénal / Satires II
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N'étale pas tes entrailles pour que les corbeaux s'en repaissent. De Proverbe siamois
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L'aigle vole seul ; ce sont les corbeaux, les choucas et les étourneaux qui vont en groupe. De John Webster
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Il vaut mieux avoir affaire aux corbeaux qu'aux flatteurs, car ceux-ci dévorent les morts et ceux-là les vivants. De Antisthène
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[…] La vertu, comme le corbeau, niche dans les ruines. Elle habite les creux et les rides du corps. Anatole François Thibault, dit Anatole France, La Rôtisserie de la reine Pédauque, Calmann-Lévy
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Le corbeau, honteux et confus, Jura, mais un peu tard, qu'on ne l'y prendrait plus. Jean de La Fontaine, Fables, le Corbeau et le Renard
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La censure épargne les corbeaux et tourmente les colombes. Juvénal en latin Decimus Junius Juvenalis, Satires, II, 63
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Le corbeau critique la noirceur. De William Shakespeare
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Un corbeau disait d’un autre : « Quel croasseur ! » De Proverbe russe
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Jamais un corbeau n’a fait un canari. De Proverbe savoyard
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La vertu, comme le corbeau, niche dans les ruines. De Anatole France / La Rôtisserie de la reine Pédauque
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Coucher de poule et lever de corbeau Ecartent l'homme du tombeau. De Proverbe franc-comtois
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L'aigle ne perdit jamais plus de temps que lorsqu'il consentit à recevoir les leçons du corbeau. De William Blake / Le mariage du Ciel et de l'Enfer
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Le corbeau chante aussi bien que l'alouette pour qui n'y fait pas attention. Que de choses n'obtiennent qu'à leur saison leur juste assaisonnement de louange et de perfection ! De William Shakespeare / Le Marchand de Venise
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Il devient de plus en plus connu des scientifiques, mais aussi du grand public que les corvidés (dont les corbeaux et corneilles) sont des animaux aux capacités cognitives remarquables. The Conversation, Les corbeaux sont-ils si intelligents que ça ?
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Les melons, les œufs et les corbeaux, ce pourrait être le titre d’une fable de Jean de La Fontaine, mais c’est bel et bien une réalité qui empoisonne, depuis quelques temps, la région d’habitude si tranquille de la Petite Camargue située entre Gard et Hérault. Chasse Passion, Une colonie de corbeaux freux prédate les champs de melons et les nids en Petite Camargue - Chasse Passion
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Les exploitants agricoles sont confrontés depuis quelques semaines à des ravages dans leurs cultures de maïs. Le responsable serait le corbeau (aussi appelé corneille noire). Friand de la graine, il la déterre du sol et la plante meurt. La Voix du Nord, Les corbeaux s’attaquent aux plants de maïs, les agriculteurs demandent de l’aide
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En Artois, les canons effaroucheurs gâchent les nuits des ruraux. De leur côté, les agriculteurs les jugent indispensables car les corbeaux attaquent leurs semis. On vous explique tout L'Avenir de l'Artois, En Artois, face aux corbeaux, ils sortent les canons et ça énerve les riverains
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À Lavacquerie, dans l'Oise, un corbeau sème le trouble depuis les début des élections municipales. Les lettres anonymes qu'il envoie aux candidats des trois listes pèsent sur la campagne et mine ce petit village de 211 habitants. France 3 Hauts-de-France, Lavacquerie dans l'Oise : 211 habitants, un corbeau, des lettres anonymes et le climat délétère des municipales 2020
Images d'illustration du mot « corbeau »
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Traductions du mot « corbeau »
Langue | Traduction |
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Anglais | raven |
Espagnol | cuervo |
Italien | corvo |
Allemand | rabe |
Chinois | 掠夺 |
Arabe | غراب أسود |
Portugais | raven |
Russe | ворон |
Japonais | カラス |
Basque | raven |
Corse | corvo |
Synonymes de « corbeau »
- corvidé
- corbillat
- choucas
- freux
- corneille
- ratichon
- modillon
- cul-de-lampe
- croque-mort
- grolle
- requin
- grappin