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Cabrer

Définitions de « cabrer »

Trésor de la Langue Française informatisé

CABRER, verbe trans.

I.− Emplois trans.
A.− [Le suj. désigne une pers., l'obj. désigne un animal, en partic. un cheval] Dresser, faire dresser sur les membres postérieurs :
1. Les gardes mobiles cabrent leurs chevaux devant les barricades des longues haies. Nizan, Les Chiens de garde,1932, p. 203.
P. ext. [Le suj. désigne une pers. ou un animal, le compl. d'obj. désigne une partie du corps] Lever, redresser :
2. Pour cimier, pour supports, l'héraldique bétail, Licorne, léopard, alérion ou guivre, Monstres, géants captifs qu'un coup de vent délivre, Exhaussent leur stature et cabrent leur poitrail. Heredia, Les Trophées,1893, p. 145.
B.− P. anal.
AVIAT. Cabrer un avion. En relever la partie antérieure, soit pour lui faire prendre une ligne de vol ascendante, soit pour faire diminuer sa vitesse :
3. Notre radio et nos deux pilotes (...), s'amusent de leur appareil, comme d'un jouet magnifique; ils le cabrent jusqu'à l'impossible. Morand, Air indien,1932, p. 233.
P. méton. Ils [deux aigles] glissaient en cabrant lentement la descente comme sur de longs escaliers d'air (Giono, Batailles dans la montagne,1937, p. 143).
Emploi abs. Agir sur les commandes pour faire monter un avion. On cabre pour sauver son altitude (Saint-Exupéry, Terre des hommes,1939, p. 161).
C.− Au fig. [L'obj. désigne une pers. ou un ensemble de pers.] Choquer, provoquer une réaction d'opposition, d'hostilité :
4. Ce M. Du Bois ayant excité les plaintes de tous les Ordres de la province et n'ayant réussi qu'à cabrer les esprits, on le mit à Montauban... Sainte-Beuve, Nouveaux lundis,t. 3, 1863-69, p. 440.
5. La pensée que ces jeunes hommes, insignifiants et doux, eussent pu l'obtenir en mariage, était quelque chose qui la cabrait [Sabine], lui jetait l'âme en arrière. A. de Noailles, La Nouvelle espérance,1903, p. 18.
II.− Emploi pronom.
A.− [Le suj. désigne un animal, le plus souvent un cheval] Se dresser sur les membres postérieurs :
6. Le cheval, effrayé par le bruit de la cascade, se cabrait, voltait, reculait. Ponson du Terrail, Rocambole,t. 4, Les Exploits de Rocambole, 1859, p. 123.
P. métaph. :
7. La houle se cabra sous le navire et le renversa, rejetant l'épave dans sa crinière d'écume. Hugo, L'Homme qui rit,t. 1, 1869, p. 118.
Emploi factitif (avec ell. de se). Faire cabrer. Ne tirez pas la bride de ce cheval, vous le ferez cabrer (Ac.1798-1878) :
8. Si je cherche à découvrir quels ressorts faisaient ainsi cabrer comme malgré moi ma machine, je trouve surtout, il me faut bien l'avouer, du rechignement et du mauvais vouloir. Gide, Si le grain ne meurt,1924, p. 599.
9. Spectacle abominable et magnifique à faire cabrer la pitié! La tentation peut bien prendre tous les masques, et c'est l'illusion de beaucoup de naïfs qu'un Satan seulement logicien. Bernanos, L'Imposture,1927, p. 374.
P. ext. [Le suj. désigne une partie du corps] Se redresser :
10. L'un d'eux [les Centaures], (...), a su (...), s'acheminer vers la béatitude éternelle, et vous voyez parfois sur les nuées d'or se cabrer sa poitrine héroïque. A. France, L'Île des pingouins,1908, p. 52.
B.− P. anal. et au fig.
1. P. anal.
a) [Le suj. désigne une pers.] Se raidir, se redresser :
11. Il [Renaud] se penche sur la bouche chaude de la petite fille qui se cabre et se cambre, pour s'offrir ou pour résister elle n'en sait rien au juste. Colette, Claudine à Paris,1901, p. 248.
b) [Le suj. désigne une chose] Se dresser verticalement :
12. À trois reprises la chaloupe se cabre, à demi dressée hors du flot; et lorsqu'elle retombe un énorme paquet d'eau vous inonde, que vont sécher bientôt le soleil et le vent. Gide, Voyage au Congo,1927, p. 688.
2. P. métaph. et au fig. [Le suj. désigne une pers., un ensemble de pers. ou p. ext. l'esprit humain dans ses manifestations, ses attitudes, ses inclinations, etc.] Se raidir, se redresser dans une attitude d'opposition, de refus ou de révolte (cf. se braquer, se buter) :
13. Des gens qui possèdent des vertus à un degré héroïque, se cabrent et se désarçonnent, ne fût-ce que pendant l'espace d'une minute, devant l'offense; ... Huysmans, L'Oblat,t. 1, 1903, p. 155.
Se cabrer devant, contre qqc. :
14. Le libéralisme de votre esprit se cabre contre les vieilleries du dogme, et votre mysticisme naturel s'effarouche des conséquences extrêmes où la raison vous conduit. Flaubert, Correspondance,1860, p. 399.
Rem. On rencontre dans la docum. le subst. fém. cabrure. Mouvement cabré (cf. A. Cortot, La Mus. fr. de piano, 1resérie, 1930, p. 2007).
PRONONC. : [kɑbʀe] ou [kabʀe], (je me) cabre [kɑ:bʀ ̥] ou [ka:bʀ ̥]. [ɑ] post. dans Barbeau-Rodhe 1930, Pt Rob., Pt Lar. 1968 et Warn. 1968 (cf. aussi Kamm. 1964, p. 97, et Mart. Comment prononce 1913, p. 34). [a] ant. dans Dub. et Lar. Lang. fr. (cf. aussi Littré et DG). Fér. 1768, Fér. Crit. t. 1 1787 et Fél. 1851 indiquent que la syll. est longue même à l'infinitif.
ÉTYMOL. ET HIST. − Av. 1188 cabrer [d'un cheval] « se dresser sur ses pattes de derrière » (Partonopeus de Blois, BN 19 152, fo135ddans Gdf. Compl.); ca 1307-15 se cabrer « id. » (G. Guiart, Royaux Lignages, II, 1827 dans T.-L.); 1608 fig. se cabrer « s'obstiner contre qqc. par esprit d'opposition » (Schelandre, Tyr et Sidon, 1rejourn., IV, 6 dans Gdf. Compl.). Prob. dér., le verbe cabrar n'étant pas attesté anciennement en prov., du rad. de l'a. prov. cabra « chèvre », attesté au xiiies. (v. cabre) et dont d'autres dér. sont également anc. (v. cabri et cabrette). L'esp. cabrearse, donné comme étymon par Rupp., p. 46, n'est attesté que dep. 1891 (d'apr. Cor., s.v. cabra).
STAT. − Fréq. abs. littér. : 265. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 213, b) 483; xxes. : a) 402, b) 442.
BBG. − Rupp. 1915, p. 46 [Cr. Spitzer (L.). Literaturblatt für germanische und romanische Philologie. 1921, t. 42, p. 308].

Wiktionnaire

Verbe - français

cabrer \kɑ.bʁe\ ou \ka.bʁe\ transitif 1er groupe (voir la conjugaison) (pronominal : se cabrer)

  1. Faire dresser sur les pieds de derrière, en parlant d’un cheval.
    • Le cheval cabre.
  2. (Aéronautique) Action de faire augmenter l’assiette d’un aéronef.
    • Exemple d’utilisation manquant. (Ajouter)
  3. (Pronominal) Se dresser sur les pieds de derrière, en parlant d’un cheval effarouché.
    • Elle vint s’arrêter court à deux pas de moi, et les deux bêtes, animées et tout écumantes, se cabrèrent un moment, comme si elles avaient eu le sentiment que leurs cavaliers voulaient combattre. — (Eugène Fromentin, Dominique, L. Hachette et Cie, 1863, réédition Gründ, page 223)
    • Le Cœur-Loyal, grâce à un poignet de fer, maintint le cheval qui se cabrait avec fureur. — (Gustave Aimard, Les Trappeurs de l’Arkansas, Éditions Amyot, Paris, 1858)
    • Les chevaux arabes, sentant la poudre, se cabrent au fond des écuries. — (Alphonse Daudet, La partie de billard, dans Contes du lundi, 1873, Fasquelle, réédition Le Livre de Poche, 1974, page 18)
    • Puis Mouley Abdelaziz paraît, vêtu de blanc neigeux, immobile comme une idole sur un superbe coursier noir caparaçonné de vert et d’or, qui se cabre et danse au son sauvage des ghaïtas et des tebels. — (Frédéric Weisgerber, Trois mois de campagne au Maroc : étude géographique de la région parcourue, Paris : Ernest Leroux, 1904, page 108)
  4. (Pronominal) (Par analogie) Se relever de l’avant, en parlant d’une chose.
    • Il fallait le voir, debout à la barre, sa figure sombre frappée par les embruns, enlever sa chaloupe qui se cabrait sur la houle. — (Octave Mirbeau, Les Eaux muettes)
  5. (Pronominal) (Figuré) S’emporter, se révolter contre une proposition, un conseil, une remontrance, etc.
    • On ne saurait dire un mot qu’il ne se cabre. Ne lui dites pas cela, vous le ferez cabrer.
    • Il est excellent qu’il y ait, dans un musée, un tableau de maître heurtant, et qui fasse se cabrer le vulgaire. — (Léon Daudet, Souvenirs des milieux littéraires, politiques, artistiques et médicaux/Vingt-neuf mois d’exil, Grasset, réédition Le Livre de Poche, page 519)
    • J’ai eu de la peine en voyant ses larmes. Mais j’ai vite réalisé qu’elle pleurait sur son échec sans se soucier de ce qui se passait en moi. Et elle m’a cabrée en préférant la terreur à l’amitié. — (Simone de Beauvoir, Une mort très douce, Gallimard, 1964, Le Livre de Poche, page 97)
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition (1932-1935)

CABRER (SE). v. pron.
Se dresser sur les pieds de derrière, en parlant d'un cheval effarouché. Il signifie au figuré S'emporter, se révolter contre une proposition, un conseil, une remontrance, etc. On ne saurait dire un mot qu'il ne se cabre. Ne lui dites pas cela, vous le ferez cabrer.

Littré (1872-1877)

CABRER (ka-bré) v. réfl.
  • 1En parlant du cheval, se dresser sur les pieds de derrière.

    En sous-entendant se : ne tirez pas la bride à ce cheval, vous le ferez cabrer. Ne faites point des coups d'une bride rebelle Cabrer la liberté…, Hugo, F. d'aut. 3.

  • 2 Fig. S'emporter. Il se cabre au moindre mot.
  • 3 V. a. Choquer quelqu'un par quelque proposition ou quelque terme qui le révolte. Je payai [pour lui], en tremblant de le cabrer, Rousseau, Prom. 9.

HISTORIQUE

XVIe s. L'animal se sentant blessé, la douleur le fit cabrer, Mém. sur du Guesc. ch. 6. Et si d'autres [qu'Alexandre] s'efforçoient y monter, il leur couroit sus, en ronflant et hennissant, et se cambroit sous eux, et les fouloit aux pieds, Paré, Animaux, 12.

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Encyclopédie, 1re édition (1751)

CABRER, v. pass. se cabrer, (Manege.) se dit des chevaux qui se levent & dressent sur les piés de derriere prêts à se renverser lorsqu’on leur tire trop la bride, ou qu’ils sont vicieux ou fougueux. Lorsqu’un cheval se cabre plusieurs fois de suite, & se jette si haut sur les jambes de derriere qu’il est en péril de se renverser, on appelle ce desordre faire des ponts-levis : il faut que le cheval ait beaucoup de force, & lui tendre la main à propos, autrement ces ponts-levis sont très-dangereux. Le moyen de rendre obéissant un poulain sujet à se cabrer souvent & à desobéir, est de prendre le tems que ses piés de devant retombent à terre, & lui appuyer alors fortement des deux. (V)

Wikisource - licence Creative Commons attribution partage dans les mêmes conditions 3.0

Étymologie de « cabrer »

(1188)[1] Probable dénominal de cabre, l'occitan cabrar ou l’espagnol cabrear étant attestés postérieurement.
Wiktionnaire - licence Creative Commons attribution partage à l’identique 3.0

Espagn. cabra, chèvre : se dresser comme une chèvre. Paré a confondu cabrer et cambrer.

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Phonétique du mot « cabrer »

Mot Phonétique (Alphabet Phonétique International) Prononciation
cabrer kabre

Évolution historique de l’usage du mot « cabrer »

Source : Google Books Ngram Viewer, application linguistique permettant d’observer l’évolution au fil du temps du nombre d'occurrences d’un ou de plusieurs mots dans les textes publiés.

Citations contenant le mot « cabrer »

  • Deuxième obstacle: son âge. Difficile, à 65 ans, lorsqu’on est un pur produit de la génération hydrocarbures, téléphone filaire et minitel, d’incarner l’avenir écolo-numérique du continent. Erreur: Thierry Breton est un caméléon politique, sauce Jacques Chirac. Il préfère flatter que se cabrer. Il n’impressionne pas, mais verrouille ses soutiens, persuadé aujourd’hui que l’épidémie de Covid-19 sera un «grand» tournant économique. Le Temps, Thierry Breton, le patron étoilé persuadé que le Covid-19 sera un «grand» tournant économique - Le Temps
  • Un moustique peut piquer et faire se cabrer un cheval, mais l'un demeure un insecte et l'autre est toujours un cheval. De Jules Renard , 

Images d'illustration du mot « cabrer »

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Traductions du mot « cabrer »

Langue Traduction
Anglais pitch up
Espagnol encabritarse
Allemand nose-up-abschnitte
Source : Google Translate API

Synonymes de « cabrer »

Source : synonymes de cabrer sur lebonsynonyme.fr

Antonymes de « cabrer »

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Cabrer

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